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Full text of "Romania"

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ROMANIA 

RECUEIL  1  RIMESTRIEL 

Diib  Langues  et  dus  i.rntRATUREs  romanes 

PUBUi-:    PAU 

Paul  MEYER  et  Gaston  PARIS 


Pur  irnieiibrcf  des  iinccsAUfS 
Le*  dh  f  k*s  iaiK  e  le;*  anirs. 


Tome  XXXn 


PARIS   (r) 

LIBRAUUH    ÉMILH    BOUiLLON,    b'DITEUR 


CONDITIONS  D\4BONKï:MhX  r  A  LA  ROMANU 


ï  :.'  font  que  pour  T  j  nnéc  tnif^rc  et  ^  p.irtîr  Je  i;m.îcî 

L'jiiPix  HOC  toi*  îcrwiTticc  se  vcrn2,  pmc  i  Rtm» 


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ROMANIA 

RECUEIL  TRIMESTRIEL 

CONSACRÉ  A  l'Étude 

DES    LANGUES    ET    DES    LITTÉRATURES    ROMANES 

PUBLIÉ    PAR 

Paul  MEYER  et  Gaston  PARIS 


Pur  remenbrer  des  ancessurs 
Les  diz  e  les  faiz  e  les  murs. 

Wacb. 


32e  ANNÉE.  —  1903 


PARIS 
LIBRAIRIE    EMILE    BOUILLON,    ÉDITEUR 

67,    RUE   DE   RICHELIEU,    67,    AU    !« 


TOUS  DftOlTt  Ilt»lliv6s 


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Gaston  Paris  s'est  éteint  doucement  le  j  mars,  à  Cannes, 
où  on  Tavait  conduit  dans  Tespoir  que  le  changement  et 
un  repos  auquel  il  se  fût  difficilement  résigné  ù  Paris 
au  raient  3  sur  sa  santé,  gra%xment  altérée  en  ces  derniers 
temps,  une  influence  favorable.  Toutefois  sa  mort  n'a  pas 
surpris  ceux  qui,  depuis  plusieurs  mois,  assistaient  au  déclin 
prc^ressif  de  ses  forces  et  aux  manifestations  variées  d'une 
maladie  (le  diabète  bientôt  compliqué  d'une  affection  du 
cœur)  qui,  après  avoir  pour  ainsi  dire  sommeillé  pendant 
de  longues  années,  semblait  s'être  subitement  réveillée. 
Si  les  forces  physiques  avaient  fléchi,  la  vigueur  intel- 
lectuelle était  restée  entière.  Le  27  janvier,  pouvant  à 
peine  se  soutenir,  il  vint  à  rÉcole  des  Chartes  pour  l'exa- 
men des  thèses,  et  prit  part  à  la  discussion*  Le  i"  février, 
il  fit  chez  lui,  comme  il  avait  coutume,  sa  leçon  de  l'École 
des  Hautes  Études,  mais  il  dut  aussitôt  s*aliter  et  ne  se 
leva  guère  que  dans  les  jours  qui  précédèrent  son  départ 
pour  Cannes  (34  février).  Tout  travail  exigeant  un  certain 
déploiement  d'activité  lui  était  devenu  impossible,  mais  il 
pouvait  encore  lire,  et  jusqu'à  son  dernier  jour  il  a  relu 
des  épreuves  de  la  Romania  ou  de  la  Société  des  anciens 
textes.  Il  est  mort  comme  it  avait  vécu,  en  travaillant. 

Celui  des  deux  fondateurs  de  la  Rûmmia  qui  reste  debout 
fera  effort  pour  continuer  l'œuvre  commune  dans  le  même 
esprit  que  par  le  passée  sans  se  dissimuler  que  toute  œuvre 
k  laquelle  G.  Paris  a  donné  sa  puissante  coopération  subira, 
lui  disparu,  une  inévitable  diminution.  Il  essaiera,  dans  un 
prochain  fliscicule,  de  retracer  la  vie  de  l'homme  éminent 
et  bon  dont  il  fut,  pendant  quarante  ans,  ramî  et  le  colla- 
borateur, et  qui,  depuis  la  publication  de  la  Fie  ik  saint 
Alexis f  était  à  juste  titre  considéré  comme  le  maître  de  la 
philologie  française. 


n-L^  10 


LA  CHANSON  DE  LANDRI 


Pierre  le  Chantre  est  l'auteur  d'une  curieuse  satire,  intitulée 
Verbum  abbreviatum  (i  187-97)  ^^  il  censure  amèrement  les  vices 
de  ses  contemporains.  Au  chapitre  qui  traite  delà  simonie,  notre 
moraliste  s'emporte  contre  les  prêtres  qui,  lorsque  l'offrande  ne» 
vient  pas,  recommencent  la  messe  à  deux,  trois  et  jusqu'à 
quatre  reprises,  et  il  emploie  à  ce  propos  la  comparaison  sui- 
vante' : 

Hi  similes  sunt  canuntibus  fabulas  et  gesta,  qui,  videntes  cantilenam  de 
Landrico  non  placere  auditoribus,  statim  incipiunt  de  Narciso'  cantare;  quod 
si  nec  placuerit  cantant  de  alio. 

Qu'est-ce  que  cette  composition  sur  Landri? 

L'abbé  Lebeuf',  les  auteurs  de  VArt  de  vérifier  les  dates  ^^  au 
siècle  dernier,  de  nos  jours  MM.  Pfister^  et  HûckeH,  ont  cru 
reconnaître  dans  ce  passage  une  allusion  à  un  rythmus  sati- 
ricus  anonyme,  dans  lequel  un  grand  seigneur  bourguignon. 


1.  Verbutn  abbreviatum,  c.  27  :  «  Quid  turpius  quam,  si  ad  primam  faciem 
et  primum  introitum  non  offeratur,  aliam  assumere  faciem,  imo  tertiam  et 
quartam  ut  offeratur?  Hi  similes  sunt,  etc.  »  (Migne,  Pairoî,  Jat.,  t.  CCV, 
col.  ICI.  Voy.  sur  Pierre  le  Chantre  V Histoire  littéraire  de  la  France,  XV, 
2S9  sq. 

2.  Sic,  Giraud  de  Barr>',  reproduisant  ce  passage  au  début  du  xui*  siècle 
dans  sa  Gemma  eulesiastica,  donne  la  variante  «  Wacherio  »  (éd.  Brewer,  II, 
290).  M.  G.  Paris  pense  à  Warocher,  le  rustique  héros  de  la  Reine  Sébile. 

3.  Hist.d'Auxerre,  éd.  Challe,  III,  $7. 

4.  A  l'article  des  comtes  de  Nevers,  éd.  in-8,  XI,  207 . 

5.  Études  sur  le  règne  de  Robert  le  P/>mx  (Paris,  188$,  in-8),  51. 

6.  Les  poèmes  satiriques  d\4dalbéron  dans  Bibl.  de  la  Faculté  des  lettre  de  Paris, 
XIII,  1901,  79-80.  Ce  travail  d'un  très  jeune  étudiant  est  à  signaler  comme 
excellent,  bien  que  nous  n'adoptions  point  sa  chronologie  et  certaines  de  ses 
interpréutlons. 

Rûwumidy  XXXII  I 


2  F.    LOT 

le  comte  de  Nevers,  Landri,  est  violemment  pris  à  partie. 
L'auteur  de  cette  composition  est  certainement  le  trop  fameux 
évoque  de  Laon,  Adalberon,  plus  connu  sous  le  nom  d'Asselin^ 
On  peut  établir  que  ce  rythmas  a  été  composé  en  Tannée  996*. 
Selon  ces  érudits,  cette  composition  aurait  joui  d'une  grande 
célébrité,  puisqu'on  la  répétait  encore  cent  cinquante  ans  plus 
tard,  du  temps  de  Pierre  le  Chantre. 

Cette  opinion  ne  me  paraît  pas  soutenable.  Le  rythmus,  dont 
le  texte  ne  nous  est  connu  que  par  un  seul  manuscrit,  aujour- 
d'hui disparu,  n'a  eu  aucune  portée.  Il  suffit  de  lire  ce  poème 
bizarre,  d'un  style  entortillé,  rempli  de  comparaisons  saugre- 
•nues,  d'allusions  impénétrables  à  tous  autres  qu'à  des  contem- 
porains au  courant  des  intrigues  de  la  cour  de  Hugues  Capet, 
pour  se  convaincre  qu'il  n'a  jamaispu  exercer  la  moindre  action. 
Vingt  ans  après  sa  composition,  il  était  totalement  incompré- 
hensible. Au  reste,  Pierre  le  Chantre  fait  allusion,  visiblement, 
non  à  un  poème  latin  qu'on  lisait  ou  récitait  dans  un  milieu  de 
clercs,  mais  à  une  chanson  de  geste  (cantilenatn,  gestd),  débitée 
devant  un  auditoire  peu  patient  par  des  jongleurs  Çcatitantibus 
fabulas  et  gesta,..  auditoribus).  Ce  rapprochement  est  donc  à 
écarter. 

Je  crois  que  la  phrase  de  Pierre  le  Chantre  nous  autorise  seu- 
lement à  admettre  qu'il  a  existé  une  chanson  de  geste,  malheu- 
reusement perdue,  sur  Landri,  comte  de  Nevers. 

Ce  personnage  a  joué  un  rôle  très  important  à  la  fin  du 
X*  siècle  et  au  début  du  xi*  siècle.  D'origine  assez  médiocre,  il 
se  distingua  comme  vaillant  chevalier  ^  Il  devint  le  gendre* 
d'Otlie-Guillaume,  qui  gouvernait  en  réalité  ^  la  Bourgogne 
sous  le  nom  de  son   beau-père,  le  duc  Henri  I",  et  reçut  le 


1.  Hûckcl,  loc.  cit.,  69-70. 

2.  M.Hùckel  croit  pouvoir  fixer  la  date  entre  1019  et  1023.  II  se  trompe  à 
coup  sûr.  Dans  un  travail  sur  le  règne  de  Hugues  Capet  actuellement  sous 
presse  (octobre  1902),  nous  «établissons  que  ce  rylhmus  a  été  composé  entre 
mars  et  novembre  996,  dans  l'été. 

}.  Dans  un  acte  de  Té véque  de  Xcvers,  Roclen,  d'avril  986,  souscrit  par 
Othe  Guillaume,  sa  mère  Gerborge  et  Landri.  ce  dernier  est  dit  <»  gloriosus 
miles  •.  Voy.  Gallia  Christiana^  XII,  col.  ^20-521. 

4.  Voy.  Raoul  le  Glabre,  éd.  Prou,  p.  57. 

5.  Pfister.  op.  cit.,  2y\sq. 


LA    CHANSON    DE    LANDRI  3 

comté  de  Nevers  entre  986  et  990  '.  Il  défendit  aussitôt  ce  pays 
contre  le  sire  de  Bourbon,  Archambaud  ^  (990).  Trois  ans  plus 
tard',  nous  le  trouvons  auprès  de  Hugues  Capet  et  de  son  fils 
Robert  IL  L'alarme  est  grande  à  la  cour.  On  vient  de  découvrir 
un  complot  tramé  contre  les  Capétiens  par  le  comte  de 
Chartres,  Eudes  I",  et  par  Asselin.  Ils  voulaient,  dit-on, 
livrer  le  royaume  au  jeune  roi  de  Germanie,  Otton  III.  Eudes 
aurait  eu  pour  prix  de  ses  services  le  titre  de  duc  des  Francs, 
Asselin  rarchevêché  de  Reims.  Un  vassal  de  l'évêque  de  Laon 
s'offrit  à  soutenir  par  le  combat  singulier  l'innocence  de  son 
seigneur.  Landri  conseilla  au  champion  épiscopal  de  s'entre- 
tenir avec  son  suzerain  de  la  véracité  de  l'accusation  avant 
d'engager  la  lutte  *.  Au  dire  de  Richer,  l'évêque  aurait  avoué 
et  défendu  à  son  vassal  de  combattre  >.  C'est  alors  que  les 
rois  l'auraient  fait  arrêter.  Le  rôle  important  joué  par  Landri  en 
cette  affaire  explique  fort  bien  la  rancune  d'Asselin  et  les 
invectives  contre  Landri  du  rythmus  satiricus  où  il  raille  les 
déconvenues  du  «  Bourguignon  ».  La  faveur  de  Landri  avait 
grandi  en  effet.  Il  fut  comte  du  palais  ou  sénéchal^.  Il  semble 
bien  que  ce  soit  lui  qui,  à  la  mort  d'Eudes  P%  au  printemps  de 
996  7,  se  soit  entremis  pour  l'union  de  sa  veuve,  Berthe,  avec 

1.  Qualifié  simplement  chevalier  (miles)  en  986  (voy.  page  2,  note  3). 
Landri  est  dit  comte  en  990  (voy.  note  suivante). 

2.  Annales  Nivernenses  :  «  991  {sic)  :  hoc  anno  fuit  magnum  bellum  intcr 
Landricum  comitem  et  Archinbaldum  II  idus  augusti  diem  martis.  »  (Moti. 
Germ.,  Script.  XIII,  89.)  Le  12  août  tombant  un  mardi  en  990,  c'est  évidem- 
ment en  celte  année,  et  non  en  991  qu'eut  lieu  la  bataille.  C'est  d'ailleurs  la 
date  que  donnent  les  Annales  Veieliacenses  :  «  990.  Bellum  inter  Ligerim  et 
Elaverim  fluvios,  inter  Landricum,  comitem  Nivernensem,  et  Archembaldum 
principem.  »  {Histor.  de  France,  X,  317) 

3.  Nous  établirons  dans  It;  travail  annoncé  plus  haut  (p.  2,  note  2)  qvie  la 
date  de  ce  complot  est  de  993  et  non  de  995. 

4.  Richer,  //«/.,  1.  IV,  c.  96-98. 

5.  Nous  ne  connaissons  ces  événements  que  par  le  seul  Richer.  Il  reste 
donc  un  doute  sur  la  culpabilité  d'Asselin.  Interdire  à  son  vassal  le  combat 
judiciaire  peut  très  bien  être  le  fait  d'un  esprit  éclairé,  mais  l'acte  fut  inter- 
prété par  les  laïques  comme  un  aveu  de  culpabilité.  Richer  est  l'écho  de  ce 
bruit. 

6.  Voy.  Hûckel,  loc.  cit.,  76  note  143. 

7.  Et  non  en  994  ou  995.  Ct.  notre  travail  annoncé  plus  haut. 


4  F.    LOT 

le  jeuae  roi  Robert  II  ^  Il  espériit  que  Berthe,  régeace  des 
comrés  Je  Cfurtres  et  Blois  et  des  possessions  champenoises 
de  son  mari  pendant  la  minorité  de  ses  fils  Eudes  H  et  Thi- 
baut-, lui  livrerai:  Provins  pour  prix  de  ses  services  ^  Il  fut 
déçu.  1  la  grande  joie  d'Asselin. 

A  b  mort  du  duc  Henri  (1002)  Tattitade  de  Landri  se 
modifia  vis-à-vis  du  Capétien.  Il  se  :rouvj  iprcs  0:he-Guillaume 
le  plus  puissant  personnage  de  li  Bourgogne.  Le  roi  Robert  II 
n'eut  point  d'adrersaire  plus  décide  quand  il  entreprit  la  con- 
quête de  ce  pays.  Landri  dctendir  victorieusement  contre  lui  la 
ville  d'Auxerre,  de  du  d'jché  (rooj)  *.  Le  roi.  pour  s^assarer 
son  alliance,  dut  Tinves^r  de  cette  vilie  et  du  comte  d'Auxerre 
et,  en  outre,  donner  en  maria^je  à  son  fils  Renaud  sa  propre 
soeur  Adèle  *.  L'ancien  -t  chevilier  ■•  devint  ainii  Taliie  de  la 
Éimille  royale'.  Landri  mourut  en  1028,  nuitre  ie  l'Auxerrois 
et  in  Nivernais  *. 

La  valeur  et  la  tbrtune  de  cc  oerioanaje  mcritaien:  d'ardrer 


:.  Avazt  4ÎIC  rasscn±=cr.:  i-  '.-ieu-\  rzi  Hvizues  eût  pu  être  zctan-^ 
Kz'c^zz  prir  ceraireme:::  3crL-.e  r«:ur  rzjfrrissc  IjLzdr.  :  jr  l'crirrinietriur.  De 
là  les  vtfrs  rxlleurs  i'.\s5<£i:z  ïrr.  ii  :  «  Dcr^n'-r.z  rcr  in  lecru!c-  Liroinci  rcn- 
àiido.  »  Hicisi  tnJuir.  i-r-i;  peu  ic  pcrsçiciztvi  i  n:cc  iria  p.  7*^  et  àj  : 
«  Li  rzi  Rjcer:  1  icrzi  ûcut  se-l    i  Sien  lu  ^.icmir-! 

iScz.  :=—?  .  p.  ic-i:. 

:.  j(  ::.':mu:  .ii.*.— *--*.. .   itr.   22.   z:.  Z' :  ci.  Hickii.  r    ij,.  j^cspcre  iv-iir 

ie  Trêves.  V:-    i.ir.5  lit  --ftr-i4'    i^  **£;;.  j--.  :io:.  r.  277. 

1.   Pistir.   :■■    -T.-  .  I ':-!"• 

-     ."•■-*'  .  •■-"  -i:;^  r  =:  ;*-  -«r.i  '. 

c.  1  -  in  r.:  r^  r  -•:  -rii'jiz.c  ;x'ir  ^j  A  l'issemoies  i'Hcr/  iir-.  -Cir-Cî 
ie  !'ijci  t  I;:  M:-:t:ï-in^cr  Jîircrs:  ic  Gtiicrj  i'é:ii:er.r  r-i:r.:i  2es  ^ur- 
r^n^t:*  2.:  Li ■:»;-:  i  -w-r  icrcr^.  Cr-:-~  les  zucrri  31: ur  !c'-r  tiLe-er  js 
riuûici  le  5^:1:  5c-«:  cr  ^.'.1-  i-a:r~.r  Tnnsoorrires  i-^r-  iu^.  L '-i^icîT^pcc 
j  ;2»ti  r:-ise  ^-  .1  icrxt  :njLhcarrji  ie  ae  pas  r^ie.'ir  :  '  "i:i  irr»:  r^î 
H-trerr.  rcrir.rjrr.  7ir.r-:s.  i-^inus:  ic«  ra  ni:::ss:T::^  pnc  r-r.Jiib  iî:^- 
SiTir  ;t  :T:.ixi  3ar_swet::i::i:  iujn:  rerîtce  Sijzs  --.cceri  :-ir::erir-  i  -l-^?' 
.*-•-* xi:*-  *r  .JLiJaj  Dsrrrtw  ^nw'r';  *î"*.  H:^.  ir  F"..  IC  •*•  A  Hcr;.'  is 
.*-ïir-:-:î  .^:  ::î:  -:i  ?.  :ccr  .--rr^::  ic  r'-.»;-irr.^r  iOn:n~i::-e=::i:nr  .^  pX3  ^i; 
Drc-    ::2a  .  'I:    Ptîsîcr.  _"j:..:    :-i    ;:2 

7.  -i.-rÀ  :»T.ier.  XL  iC".  r    ^îj.-.  lat.  3    1. 


LA  CHANSON   DE   LANDRI  5 

l'attention  de  ses  compatriotes  bourguignons.  Il  a  été  certaine- 
ment l'objet  de  récits  légendaires  qui  se  transmettaient  encore 
près  de  deux  siècles  après  sa  mort. 

Hugues  de  Poitiers,  moine  de  Vézelay,  entreprit  vers  1160 
d'écrire  Thisioire  de  son  abbaye  ^  Il  rédigea  comme  introduc- 
tion une  courte  histoire  de  l'origine  des  comtes  de  Nevers*, 
qui  est  légendaire,  exception  faite  des  dernières  lignes.  Sur  les 
ancêtres  de  Landri,  voici  ce  qu'il  nous  apprend.  Son  grand- 
père,  appelé  également  Landri,  se  distingua  aux  côtés  de  son 
oncle,  le  Poitevin  Audegier  {Hildegarius),  évêque  d'Autun  ', 
au  siège  du  château  de  Maers  en  Nivernais-».  Ce  château  était 
un  repaire  de  brigands  qui  rançonnaient  ou  tuaient  les  voyageurs. 
Le  duc  de  Bourgogne,  Richard,  vint  en  faire  le  siège  «  avec  les 
grands  et  les  évêques  de  toute  la  Gaule  ».  C'est  grâce  à  la 
présence  d'esprit  du  jeune  écuyer  Landri  (qui  prœerat  cursariis) 
que  le  chef  des  brigands  put  être  arrêté  dans  sa  fuite  et  pendu. 
Son  château  fut  donné  à  Landri.  Celui-ci  eut  d'une  Angevine  un 
fils  appelé  Boon  (Bodonem),  lequel  tenait  son  nom  d'un  certain 
Bodo  de  Montibus,  dont  on  ne  nous  apprend  rien  si  ce  n'est 
l'anecdote  suivante.  Quand  son  filleul  eut  grandi,  il  lui 
demanda  ce  qu'il  désirait  : 

«  Quid,  filiole,  libi  vis  dari?  »  At  ille  :  a  Volo,  inquit,  ut  tantum  terrae 
mihî  concédas,  quantum  contigui  montis  umbra  die  perlustraverit.  »  Quocon- 
cesso,  surrexit  juvenis  summo  mane  in  diebus  aestivi  temporis  et  coepit  pro- 


1.  Voy.  l'étude  et  l'édition  d'Aimé  Chérest  dans  le  Bulletin  de  la  société 
des  sciences  naturelles  et  historiques  de  VYonne^  XVI,  1862,  p.  209-52$. 

2.  Celte  Origo  et  hi$toria  brevis  Nivernensium  comitum  a  été  publiée  par 
Labbe,  Noi*aBibl.  mss.,  I,  399,  dont  l'édition  des  Histor.  de  France  (X,  2$8) 
n*est  qu'une  reproduction.  L'édition  de  Labbe  étant  incomplète  et  fautive 
nous  publions  à  nouveau  ce  texte  en  appendice  d'après  le  manuscrit  même 
qui  a  servi  au  P.  Labbe. 

3.  Labbe  a  omis  dans  son  édition  un  passage  scabreux  concernant  Tévêque. 
Dans  le  fonds  de  l'historiette  concernant  Audegier,  on  reconnaît,  bien  que 
très  altéré,  le  thème  de  la  légende  d^Eginhard  et  Emma.  Voy.  sur  celle-ci 
Heinrich  May,  Die  Behandlung  der  Sage  von  Eginhard  und  Emma.  Berlin, 
1900,  in-8  (fasc.  17  des  Forschungen  ^ur  neueren  Litteraturgeschiste  hgg.  von 
Franz  Muncker). 

4.  Mars-sur- Al  lier,  Nièvre,  canton  de  Saint-Pierre-le-Moutier. 


I 


v 


6  F.    LOT 

prios  limites  circum  circa  ponere,  sicut  sole  vergente  umbra  divertcbat,  et 
aedificavit  ibi  castellum  quod  dictum  est  Moncellis  »,  et  dilatavit  terminos 
patris  sui,  genuitque  filium  nomine  Landricum. 

Nous  sommes  évidemment  en  présence  d'un  conte  populaire 
dont  on  connaît  beaucoup  de  variantes.  II  s'est  localisé  en 
Nivernais,  sans  doute  sous  l'influence  d'une  préoccupation  éty- 
mologique :  expliquer  le  surnom  de  le  Comte  donné  à  Mon- 
ceaux. 

Ce  Boon  (Bodo)  n'est  pas,  du  reste,  un  personnage  imagi- 
naire. Le  ryihmus  satiricus  appelle  Landri  Bodonis  filius*.  Un 
des  fils  de  Landri  II  porta  ce  nom,  qu'il  devait  évidemment  à 
son  grand-père  K 

Hugues  de  Poitiers  vante  la  générosité  de  Landri  et  en  fait 
le  héros  d'une  historiette  qu'on  pourrait  intituler  :  «  Les  offres 
des  trois  comtes  »  ^. 

Landri  était  un  homme  «  large  ».  Il  accueillait  volontiers  les 
pèlerins  se  rendant  à   Rome,  quelle   que   fut  leur  condition. 
Lui-même  entreprit  un  jour  le  saint  voyage,  et  en  noble  société, 
car  il  avait  pour  compagnons  les  comtes  de  Poitou,  d'Anjou  et 
*  de  Bourgogne.  Les  mêmes  personnages  se  retrouvèrent  de  com- 

\  pagnie  sur  le  chemin  du  retour.  ABiterna  5,  ils  s'arrêtèrent  trois 

jours  pour  se  reposer  et  aussi  célébrer  le  saint  jour  de  Pâques. 
Le  lendemain  de  la  fête,  Landri,  fils  de  Boon,  traita  ses  compa- 
gnons de  route.  Au  sortir  de  table,  le  comte  de  Poitiers  inviu 
son  hôte  à  regagner  le  Poitou,  patrie  de  ses  aïeux,  où  il  serait 
comblé  de  fiefe.  «  Viens  plutôt  avec  moi,  dit  le  comte  d'Anjou. 
Ta  lignée  maternelle  t'y  incite.  »  Le  comte  de  Bourgogne  prit 
alors  la  parole  :  «  Pourquoi  quitter  le  sol  paternel  pour  courir 
çà  et   là,  quand  je  puis  et  je  veux  t'y  enrichir  grandement? 

1.  Monceaux-le-Comte,  Nièvre,  canton  de  Tannay.  Il  est  mentionne  dans 
des  titres  de  1126,  1244,  etc.  Voy.  G.  de  Soultraii,  EHciionnaire  tofx^rapkiqtu 
de  la  Nihre  (Paris,  1865,  in-4). 

2.  Str.  16,  éd.  Hûckel,  loc.cit.,  p.  84. 
5.  Dans  une  chane  de  Tévêque  Roclen  donnée  à  Nevers  en  Tan  looi,  je 

vois  les  souscriptions  suivantes  :  «  S.  Landrici  comitis,  S.  Bodonis  fîlii  ejus 
(Bibl.  nat.,  ms.  lat.  9207,  fol.  16  verso  et  Colleaion  Baluze,  t.  74, fol.  550).  • 

4.  Deux  sont  des  ducs,  mais  on  sait  que  jusqu'au  xii<^ct  même  au  xiii«  siècle 
le  titre  de  duc,  peu  usité,  éuit  dans  la  pratique  remplacé  par  celui  de  comte. 

5.  On  verra  dans  les  notes  suivantes  comment  il  faut  interpréter  ce  nom. 


LA    CHANSON    DE    LANDRI  7 

—  C'est  vrai,  dit  Landri;  tu  peux  beaucoup.  Je  te  demande 
donc  de  daigner  me  concéder  cette  petite  île  *  du  castrum  *  de 
Nevers.  En  y  ajoutant  le  titre  de  comte,  tu  te  feras  honneur  à 
toi-même,  et  je  n'en  tiendrai  que  plus  sûrement  mon  héritage 
qui  est  contigu  K  »  Ainsi  fut  fait.  Landri  reçut  du  comte  de 
Bourgogne  le  comté  de  Nevers  pour  lui  et  ses  successeurs,  mais 
à  charge  d'hommage  ^. 

L'anecdote  est  certainement  aussi  controuvée  que  la  pré- 
cédente. A  l'époque  où  Landri  obtint  Nevers  (987-990), 
aucun  duc  d'Aquitaine  ou  de  Bourgogne,  aucun  comte  d'An- 
jou, n'a  fait  de  voyage  à  Rome.  La  fin  paraît,  d'ailleurs,  tendan- 
cieuse 5.  La  mention  de  Biterva  ou  BiternUy  où  se  passe  la  scène, 
est  des  plus  curieuses.  Il  faut  certainement  y  reconnaître  ViterbOy 
à  vingt  lieues  au  nord  de  Rome,  et  d'autre  part  la  forme  Biterna 
ne  peut  guère  être  séparée  du  Biterne  des  chansons  de  geste  ^. 


1.  Nevers  situé  sur  un  promontoire  entre  deux  rivières,  au  confluent  de 
la  Loire  et  de  la  Nièvre,  peut  être  considéré  comme  une  presqu'île.  L'épithète 
«  parvulam  »  se  comprend  :  la  ville,  demeurée  dans  les  mêmes  limites  depuis 
Tépoque  romaine,  n'avait  pas  plus  de  i  .400  mètres  de  circonférence.  La  nou- 
velle enceinte  entreprise  par  le  comte  Pierre  de  Courtenay  en  1 194  la  porta  à 
3.400.  Voy.  Née  de  la  Rochelle,  Mémoires  pour  servir  à  Vhistoire..,  de  la 
Nièvre  (Bourges,  1827,  3  vol.  in-8),  II,  1 59-161.  Aussi  Hugues  de  Poitiers, 
écrivant  vers  1 160,  dit  de  Nevers  au  début  de  VOrigo  :  «  castrum  antiquissi- 
mum  quidem  sed  instar  viculi  exigu  um.  » 

2.  Le  castrum  y  c'est  la  cité  gallo-romaine  dans  les  textes  du  haut  moyen 
âge.  On  ne  peut  traduire  ni  par  a  château  »,  ce  qui  en  fausserait  le  sens  ni 
par  «  ville  ».  La  a  ville  »  c'est  en  effet  partout  la  réunion  de  la  cité  (le  cas^ 
trum  romain)  et  du  bourg,  le  hurgus  médiéval. 

3.  C'est-à-dire  Monceaux-le-Comte  (cf.  p.  6,  note  i).  Monceaux  est 
en  réalité  éloigné  de  Nevers  d'une  vingtaine  de  lieues. 

4.  Voy.  l'Appendice. 

5.  Il  est  douteux  en  effet  que  les  comtes  de  Nevers  aient  été  aux  xi*  et 
xn«  siècles  vassaux  des  ducs  de  Bourgogne.  Depuis  la  campagne  de  Robert  II 
les  comtes  d'Auxerre  et  Nevers  paraissent  relever  directement  du  roi.  Mais 
les  ducs,  en  guerre  perpétuelle  avec  les  puissants  princes  qui  tenaient  les  trois 
comtés  de  Nevers,  Auxerre  et  Tonnerre  prétendaient  que  ceux-ci  étaient 
leurs  vassaux.  Vézelay  eut  beaucoup  à  souffrir,  on  le  sait,  des  comtes  de 
Nevers. 

6.  D'après  le  v.  2991  du  Roland  les  boucliers  de  Biterne  étaient  renommés. 
La  Prise  de  Cordres,  v.  1235,  vante  les  «  pailes  »  de  Biterne  et  les  chapes  de 


8  F.    LOT 

Landri  qui  tint  Nevers  joue  un  certain  rôle  dans  Girart  de 
Raiissillan^épopécioncièTcmcnt  bourguignonne,  malgré  la  forme 
limousine  sous  laquelle  elle  nous  est  par\'enue  '.  C'est  un  des 
conseillers  du  héros  et  l'un  des  meilleurs  ^.  Il  est  tué  par  un 
certain  Auberi  *. 

Dans  Aymeri  de  Karbonne^  il  apparaît  une  seule  (ois  ^  avec 
le  surnom  bien  remarquable  de  Landri  de  Mâcon.  Xotre  Landri 
n'a  certainement  pas  possédé  Mâcon,  mais  il  a  dû  avoir  des  biens 
en  Maçonnais.  Nous  avons  en  effet  une  charte  de  son  père, 
Boon,  de  novembre  950,  par  laquelle  il  fait  don  à  Cluny  de 
manses  en  Maçonnais  acquis  de  son  parent,  Renaud  >.  La  chane 
porte  les  souscriptions  suivantes  qui  sont  à  relever  :  «  S.  Bodoni, 
S.  Gisoni,  S.  Attoni,  S.  Landrici^.  »  Ce  dernier  pourrait 
être  le  futur  comte  de  Nevers.  J'en  doute  néanmoins.  Landri 
ayant  vécu  jusqu'en  1028,  il  n'est  guère  admissible  qu'en  950 
il  fut  en  âge  de  souscrire  un  acte  de  donation.  Je  verrais  plutôt 
dans  ce  Landri  un  frère  de  Boon,  donc  un  oncle  de  Landri  de 
Nevers;  ou  encore  le  père  de  Boon,  puisqu'il  portait  ce  nom 
de  Landri,  au  témoignage  de  Hugues  de  Poitiers. 

Il  apparaît  que  les  comtes  de  Nevers  étaient  plutôt  d'origine 
mâconnaise  que  poitevine,  et  que  le  renseignement  de  Huguesde 


Paleme  (Païenne;;  de  même  lîlie  de  Saint-GilUs.  Les  Sarhonnais  eti  font  une 
ville  sarrasine  d'Espagne.  Mais  un  passage  du  l>it  Jt  riyrUrie  de  Rutcbeuf 
(éd.  Kressner,  p.  115)  montre  que  Biteme  est  bien  en  Italie.  C'est  évidem- 
ment Viicrbo,  comme  le  conjecture  Kressner  (p.  }oi;. 

1.  Voy.  Tintroduciion  de  M.  Paul  Meyer  à  sa  traduction  de  ce  poème 
(Paris,  1884,  in-8;.  Disons,  puisque  l'occasion  s'en  présente,  que  la  popula- 
rité de  ce  poème  en  Poitou  et  la  localisation  d'épisodes  importante  en  celte 
région  semblent  avoir  pour  origine  une  confusion  entre  Girart  de  Roussillon 
et  le  comte  Gérart  Cgendre  de  Pépin  dWquitaine;,  tige  des  ducs  d'Aquitaine. 
Le  dernier  duc,  Guillaume  X,  partageait  cette  erreur,  si  son  testament  est 
authentique  (voy.  sur  cet  acte  Luchaire,  Louis  VI,  n«>  579). 

2.  Girart  de  Rouisillon,  p.  47,  75,  98,  100,  13 $-136,   153. 
}.  Ibid.,  p.  191. 

4.  Au  V.  1546.  L'éditeur,  M.  Demaison,  a  bien  recoimu  le  comte  de 
Nevers  (II,  269). 

5.  Le  nom  de  ce  parent  se  retrouve  dans  celui  du  fils  aîné  du  comte 
Landri,  son  successeur  aux  comtés  de  Nevers  et  Auxerre. 

6.  Chartes  de  Cluny,  éd.  Bernard  et  Bruel,  n»  783,  I,  737. 


LA    CHANSON    DE    LANDRI  9 

Poitiers  est  erroné.  Au  reste,  le  Poitevin  Audegier  (^Hildegarius), 
oncle  prétendu  de  Landri  (I"),  ayant  gouverné  le  diocèse  d'Au- 
tun  de  875  à  893%  n'a  pu  se  joindre  au  duc  Richard  pour 
assiéger  un  château  du  Nivernais,  pour  la  bonne  raison  que 
cette  contrée  n'était  pas  encore  rattachée  au  duché  ou  marquisat 
de  Bourgogne  que  Richard  commença  à  constituer  vers  895. 
Elle  était  sous  l'autorité  des  comtes  d'Auvergne,  ducs  d'Aqui- 
taine et  marquis  de  Gothie  \  L'prigine  angevine  de  la  femme 
de  Boon  I  est  certainenjent  le  résultat  d'une  méprise.  C'est 
Boon  II,  fils  de  Landri  et  pttit-fils  de  Boon  I  qui  épousa  une 
Angevine  '. 

Il  ressort  avec  évidence  de  ces  remarques  que,  les  renseigne- 
ments de  VOrigo  comiitim  Niveniensium  étant  sans  fondement 
historique  sérieux,  la  famille  des  comtes  de  Nevers  a  été  l'objet 
de  récits  légendaires,  récits  traditionnels  dans  le  Nivernais 
et  contrées  avoisinantes,  dont  un  écho  s'est  transmis  jusqu'à 
Hugues  de  Poitiers  (1160).  Nous  ne  serions  pas  autorisés  à 
dire  que  certaines  de  ces  légendes  se  sont  transmises  sous  une 
forme  épique,  si  une  ligne  d'un  contemporain  +  de  Hugues  de 
Poitiers,  Pierre  le  Chantre,  sur  la  cantilena  de  Landri,  ne  nous  y 
autorisait,  du  moins  à  mon  avis. 


II 


Pierre  le  Chantre  n'est  point  le  seul  qui,  à  la  fin  du  xii*  siècle, 
ait  eu  connaissance  d'un  poème  dont  un  Landri  était  le  héros. 
M.  Paul  Meyer,  après  FaurieP,  a  relevé  les  allusions  suivantes 
des  troubadours  dans  l'introduction  de  son  édition  d'Aye  d^Avi- 


1.  Gallia  christ iana,  IV,  col.  366-569. 

2.  Je  renvoie  toujours  à  mon  travail  en  préparation.  Il  en  résulte  égale- 
ment que  tout  ce  qui  est  dit  du  premier  comte  de  Nevers,  Rahier,  soi-disant 
vassal  de  Richard,  est  sans  valeur. 

3.  Il  épousa  Alix,  fille  de  Foulques  Nerra.  Voy.  Pfister,  op,  cit.,  243. 

4.  Ou  à  peu  près.  Pierre  le  Chantre  a  écrit  la  satire  des  vices  de  son 
temps,  connue  sous  le  nom  de  Verbuw  abhmnaluw,  entre  1187  et  1197,  date 
de  sa  mort.  Voy.  Histoire  littéraire  delà  France,  XV,  288  et  293. 

5.  Histoire  de  la  poésie  provençale  (Paris,  1846,  3  vol.  in-8),  III,  488-d89. 


10  F.    LOT 

^nan^  et  dans  son  compte  rendu  d'un  travail  de   M.   Birch- 
Hirschfeld*. 

1°  Arnaud  de  Marueil  (ou  Pons  de  Capduelh)  écrit  : 

Vostre  hom  sui,  donna  gaya, 

E  am  vos  mais  que  Landrics  no  fetz  Aya. 

2°  Pierre  Raymond  de  Toulouse  : 

Plus  fis... 

Que  no  fo  Landrics  a  n'A  va. 

3**  Paulet  de  Marseille  : 

Bella  dompna  plazens,  ay 
Dit  soven  quar  ieu  nous  ai, 
Quar  vos  am,  que  qu  ieu  n'aya 
Mais  qu'Enricx  (sic)  no  fes  n'Aya. 

M.  P.  Meyer  retrouve  encore  deux  allusions  dans  des  œuvres 
françaises  du  Nord  : 

4°  La  Prise  de  Jérusalem  : 

Baron,  ceste  chançons  n'est  mie  de  folie, 
D'Auchierne  de  Landri 

5°  Thibaut  de  Marly  : 

Ce  que  je  vos  vueil  dire  et  ce  qu'avez  oï 
Sachiez  que  ce  n'est  pas  d'Auchier  ne  de  Landri. 

On  le  voit,  ces  allusions  se  réfèrent,  non  pas  à  une  mais  à 
deux  compositions,  Tune  intitulée  Landri  et  Aye,  l'autre  Auchier 
et  Landri.  De  la  première,  qui  n'a  qu'un  rapport  de  nom  fortuit 
avec  le  roman  à'Aye  d'Avignon  ',  nous  savons  seulement  qu'elle 
avait  pour  sujet  l'amour  violent  de  LanJri  pour  une  certaine 
Aye.  La  seconde  avait  un  caractère  soit  de  parodie,  soit  d'ex- 


1.  Dans  la  collection  des  Anciens  poètes  de  la  France,  i86i,  un  vol.  in- 12, 
p.  XX  à  xxn.  Cf.  Bull,  de  la  Soc.  des  anciens  textes,  1899,  49. 

2.  Romania,  VII,  451  et  M.  Birch-Hirschfeld,  Ueher  die den  provençal ischen 
Troubadours  des  12  und  j).  Jahrhunderts  bekannten  epischen  Stoffe,  Leipzig,  1878, 
I  vol.  in* 8  de  92  pages. 

3.  Les  rapports  que  tente  d'établir  M.  Birch-Hirschfeld  {pp.  cit.,  68-69) 
entre  ces  deux  compositions  n'ont  aucune  vraisemblance  ainsi  que  M.  Paul 
Meyer  Ta  déjà  fait  observer. 


LA    CHANSON    DE    LANDRI  II 

trême  fantaisie,  puisqu'on  la  cite  comme  chose  invraisemblable, 
mensongère. 

Les  rapports  entre  Landri,  comte  de  Nevers,  et  une  certaine 
Ayt  reposent-ils  sur  une  réalité  quelconque?  C'est  ce  qu'il  est 
impossible  d'établir  avec  certiiu  ie.  Je  remarque  seulement  que 
ce  nom  à! Ayt  était  extrêmement  répandu  dans  le  duché  de  Bour- 
gogne au  X*  siècle,  surtout  en  Maçonnais   et  Chaunois*. 

Je  relève,  presque  au  hasard,  dans  les  Chartes  de  Cluny  : 

1°  en  963  une  Aya  souscrit,  signum  Aye,  un  acte  comme 
témoin  %  2°  en  969  une Aia  uxorcondam  Heyrici  souscrite.  Ayt  ^  ; 
3°  en  980  une  Agia  (dont  le  nom  est  reproduit  sous  la  forme 
parlée  Aie  dans  le  cartulaire  A  du  xi''  siècle)  est  femme  de 
Girari  ^;  4°  en  949  yin^Aya  est  femme  de  Narduin  (vicomte  de 
Mâcon)  5;  50  en  953  Aia  femme  de  Robert  ^;  6°  en  904  Agia 
fille  d'Adalbornis  et  de  Foltrudis^,  etc.  Je  trouve  aussi  la  forme 
Ai  :  ainsi  1°  en  941,  la  femme  d'un  certain  Ardouin  est  dite 
Agi  et  Ai^'y  2°  à  la  même  époque  Ai  femme  de  Kaimbert^;  3° 
en  954  Ai  femme  d'Obert  *°,etc. 

Je  do  s  signaler  à  ce  propos  que  le  prédécesseur  de  Landri  au 
comté  de  Nevers,  Geoffroi,  a  eu  une  femme  dont  le  nom  est  écrit 
Ava^  Avaney  Eva  ".  On  va  s'écrier  tout  de  suite  que  c'est  un 
nom  différent.  Sans  doute.  Mais  il  est  certain  que,  au  x*  siècle, 
Agia  >  Aie,  Eva  et  Ava  ont  été  confondus.  Je  vais  en  donner 
la  preuve  : 


1.  Cette  forme  a  été  créée  par  M.  Longnon  pour  désigner  le  comté  dont 
Chalon-sur-Saône  était  le  chef-lieu.  Elle  s'autorise  des  formes  pagus  Cavlo- 
nensiSy  pagus  Cahiensis  que  nous  offrent  des  textes  du  xc  siècle,  au  lieu  de 
Cahiîonemis. 

2.  Bernard  et  Bruel,  Chartes  de  Cluny,  n»  11 57. 

3.  No  1253. 

4.  No  1515. 

5.  No  746. 

6.  No  851. 

7.  No  85. 

8.  Nos  512  et  533. 

9.  No»  518  et  676. 

10.  N»  887. 

11.  Afa  et  Avaru  dans  une  charte  de  juillet  940  en  double  rédaction 
(Bruel  no  511).  £va  dans  un  acte  de  942-954  (no  554) 


\ 


12  F.    LOT 

1°  L'abbesse  I:vo,  sœur  du  célèbre  fondateur  de  Tabbaye  de 
Cluny,  Guillaume  le  Pieux,  duc  d'Aquitaine,  comte  d'Auvergne 
et  comte  de  Mdcon,  est  dite  dans  un  même  acte  Avan  abbatissa^ 
Aiam  abbatissa,  Aia  abbatissa  \ 

2"  Un  seigneur  du  Maçonnais,  nommé  Bernard,  apparaît 
dans  un  acte  de  février  929  avec  sa  femme  Evana^,  laquelle, 
en  94Î,  souscrit  S.  Avane  uxore  stia  '.  Peu  après,  celle-ci  devint 
veuve  et  donna  à  Cluny  une  charte. (942-954)  qui  débute  ainsi  : 
Ava,..  pro  aninia  seniore  meo  Bernart^.  Une  vingtaine  d'années 
auparavant  cette  Evain  ou  Avain  est  ainsi  désigné  dans  deux 
chartes  de  juillet  928  :  Bernart  et  ucsor  sua  Aia  K 

Il  est  donc  bien  certain,  quoique  la  chose  paraisse  inadmis- 
sible au  premier  abord,  que  les  deux  noms  ont  été  confondus. 
La  confusion  entre  Aa  <  Avay  et  Aia^  est  vraisemblable  et  nous 
pouvons  admettre  que  le  comte  de  Nevers  en  question  a  eu  une 
femme  dont  le  nom  était  écrit  Ava  ou  Eva  mais  prononcé 
Aye.  Il  y  a  plus  :  la  chose  est  assurée.  En  effet,  dans  un  acte 
de  942-954,  où  cette  comtesse  de  Nevers  Eve  figure  avec  son 
mari  et  ses  nombreux  fils*",  je  relève  parmi  ceux-ci  Guichard 
(fVicardus).  Cette  constatation  permet  d'identifier  deux  per- 
sonnages d'une  charte  de  la  même  époque  passée  à  Blanot  en 
Maçonnais  (Saône-et-Loire,  canton  de  Cluny).  Nous  lisons 
parmi  les  témoins  :  5.  AgU  et  filii  ejus  Wichardi"*.  Cette  Agia^ 
mère  de  Guichard,  c'est  la  comtesse  de  Nevers  Eve. 

Je  laisse  à  la  fantaisie  du  lecteur  le  soin  de  décider  s'il  y  a 
quelque  chose  i  tirer  de  ce  fait  que  la  femme  d'un  prédécesseur 
de  Landri  s*appelait  Ayt. 

Quant  à  la  seconde  composition,  Aiuhier  et  Landri,  il  est 
impossible  de  ne  pas  se    rappeler,  à  propos  du  premier  nom. 


1,  Brucl  H'^*  74.  On  trouve  à  \i  Bibl.  \at.,coll.  Moreau,  I,  148.  une  copie 
d'après  l'on j:i roi  v^bp-iruV 

2.  />:j.,  n«  ;7c». 

4    N''  >>>. 

S.  N"»  ^N^  et  ]:t>o.  Dans  toutes  ces  ciutions  les  textes  Jcrivent  des  copies 
faites  d'après  les  ori^iînajx. 
c    Bruc^  R'-'  co;. 
-.   *.Vj..  r.'  >c^  d'après  une  copie  faite  sur  roriginol. 


LA   CHANSON    DE   LANDRI  I3 

VAlicherius  contre  lequel  le  comte  de  Nevers,  Rahier,  soutint 
un  duel  tragique  ',  resté  fameux  à  Nevers \  Mais  c'est  tout  ce 
qu'on  en  peut  dire. 

Je  hasarde  en  terminant  Thypothèse  que  Landri  a  fourni  son 
nom,  rien  que  son  nom  au  roman  en  vers  Doon  de  la  Roche  '. 
Le  héros  de  cette  composition  de  pure  fantaisie,  dont  l'action 
est  censée  se  passer  sous  le  roi  Pépin,  est  Landri,  fils  de  Doon, 
surnommé  «  de  la  Roche +».  Ce  Doon  de  la  Roche  ne 
devrait-il  pas  son  existence  A  Boon  de  Monceaux  (^Bodo  de  Mon- 
cellis)y  père  du  comte  de  Nevers,  Landri  ?  ^  Je  suppose  que  Boon 
a  été  changé  en  Doon  sous  l'influence  de  «  Doon  de  Mayence  ». 

Si  les  rapprochements  qui  précèdent  paraissaient  acceptables, 
si  Ton  admettait  que  les  premiers  comtes  de  Nevers,  et  en  par- 
ticulier Landri  (988-1028),  ont  été  l'objet  de  récits  épiques, 
nous  devrions  en  conclure  que  la  force  de  création  épique  s'est 
prolongée  plus  tard  en  Bourgogne  que  dans  le  reste  de  la  France 
du  nord.  On  sait  en  effet  que  Raoul  de  Cambrai  offre  le  dernier 
témoignage  (à  propos  d'un  événement  de  943)  d'une  formation 
épique  vraiment  populaire.  A  partir  de  la  fin  du  x'  siècle  cette 
force  créatrice  est  épuisée  à  jamais.  On  entre  dans  une  longue 
période  de  rifacinunti,  laquelle  ne  durera  pas  moins  de  quatre 
et  même  (en  tenant  compte  de  l'Italie)  de  cinq  siècles. 


1.  Voy.  ci-après  le  début  de  YOrigo  comitum  Nivernensium. 

2.  Une  île  gardait  le  nom  du  vainqueur  au  temps  de  Hugues  de  Poitiers. 
11  est  bien  probable  que  cette  légende  n*a  été,  au  contraire,  inventée  que 
pour  s'expliquer  le  nom  de  l'île.  Les  îles  étant  les  lieux  de  combats  singuliers 
favoris  dans  l'épopée,  l'idée  d'un  duel  s'est  greffé  là-dessus. 

3.  Il  est  contenu  dans  le  ms.  4404  du  fonds  harléyen  au  British  Muséum. 
Je  ne  le  connais  que  par  l'analyse  de  Léon  Gautier,  Épopées  françaises^  II, 
252-260.  Je  m'aperçois  que  M.  de  la  Lande  de  Calan  a  eu  l'idée  de  ce  rappro- 
chement dans  son  livre  bizarre  Les  personnages  de  V épopée  ro/miw^  (Redon,  1901, 
in-8),  p.  172. 

4.  Il  y  a  en  Nivernais  plusieurs  localités  de  ce  nom.  La  Roche  est  un 
fief  de  la  châtellenie  de  Monceaux-le-Comte  (cf.  plus  haut,  p.  6,  note  i).  Par 
contre,  un  château  de  Moniceaux  était  un  fief  mouvant  de  la  Roche-Millay, 
Tune  des  quatre  baronnies  du  comté  de  Nevers  (voy.  Soultrait,  op.  cit.,  160). 

5.  Dans  l'édition  d'une  charte  de  l'évcquc  Roclen,  donnée  par  Mabillon 
{Annales Beneti. y  IV,  696),  le  fils  de  Landri  est  même  appelé  Doon  {Pod6)\ 
mais  c'est  une  faute  de  lecture  pour  Bodo  (voy.,  p.  6,  note  3). 


M 


F.    LOT 


APPENDICE 

Origo  et  hisîoria  hrevis  Nivernensium  cmnitum  * 

PAH   HUGUES   DE  miTÎERS,    MOIKB    DE   VÉÎ'.EUW  (VfeHS    I160). 

Castrum  Nîvedunum,  quod  nunc  dicuur  Nivemb,  ûvùm  est  jiupra  Ner- 
vîum*  flumtfn,  m  exiremis  Bur^undie  finibtis,  cuî  subterfluït  Ligeris  amnis 
qui  dïvidit  Galliam  cclucam  et  G;iiliam  aquîtankarîi.  [EraiJ  igitur  castruni 
iUud  antiquissimum  quîdcm,  sed  instar  viculï  exigu  um,  Prefuit  ei  comcs 
Katerius,  qui,  jurchomiiùi,  de  dominio  comitis  Burgundie  dlud  tcnebat.  h 
forte  accusatus  ab  AUcherio  milite  quad  thorum  dominî  suî  violasseï,  con- 
fiicTum  duellii  œxx\  ipso  accusamre  iniit  îufra  insulam  quue  dçtom  nomitie 
hodieque  appelbtur*  Cuni  ergo  Raterius  astam  vibrasset^  percussit  Alicheriuni 
sub  niaxilla  et  transfodit  os  ejus,  dîxitqtie  :  u  Os  îpsum  luet  metidacîum  quod 
loquaciter  protulit  -  —  «  Ncquaquatn,  ait  Alicherius,  mendacîuni,  sed  tam 
bnguiT!  sîkmium  iîdulterii  tui  os  meumluit.  wStatimque  ferocî  anlmo  insur- 
geas pcrcussit  Ralorium.  Qui,  cadens  devictus  et  convittus,  post  niodicum 
expiravïT,  Fuit  autcm  dicKis  muhis  castrum  prttiomînatum  in  manu  comitis 
Burgundii;  ad  quem  jure  dotïituii  pertiniibat*  Tempore  iHo  rex  Fraiii:orum 
nioriens  pueruluni  filium  reliquit*  Hune  proccres  Francorum,  <:ommunît:ato 
lioiisilio,  Lradideruiit  Richardo  Justiciârio  in  tutelarji^  t:onimilteBtL*s  illi  toiius 
regni  curam.  K\  tlle  pio  afîectu  pueruni  eiiutrivit  ei  regîium  juste  disposuît. 

Et  erat  castellum  in  territorio  Nivemensi,  nomine  Maerjs,  mutiitione  et 
situ  !od  valde  fonîsMnvum  bominumque  frequentia  ditîssiniuni.  Hujus  habî- 
tatores  pessiml  latrcKÎniis  vacabant  et  vlatore^  itineris  coniigui  spolbbant, 
capiivabant,  occidebant.  duoruni  nialicie fama  cura  in  auribus  Richardi  JuSNti- 
ciarii  pcrcrebesceret»  coadunato  muko  exerciiti  castelluni  obsedii,  cui  obsl- 
dioni  cutn  aliîs  optiniatibus  et  episcckpîs  totius  Gallie  interfuit  dtiam  Hitd«ga^ 
rius,  episcopus  Educnsis. 

Hic,  génère  Pîctavcnsis»  diaconus  régis  Francorum  extîterat,  Qjjt  cum  forte 
aliqtîando  bunianîtus  tcmptaretur^  accidit  quod  rex  pertesus  e  stratu  suo 
nocte  surgens  et  cuidani  fenestre  incumbens  viderit  Hiîdegarlum  in  quodam 
diveniculo  palacii  ludentem  cum  quadam  juvencuta.  Super  quo  rcx  valde 
miratus  (bunc  quippc  magne  lionestatis  sobrietas  sibi  commendaverat)  rei 
iîxïtum  cauïïus  expectavit,  Erat  autein  ni\  multa  super  terram,  Ei  etce 
redeuntts  Hildegarii  prosccuta  jmencula  cepît  manu  complanare  vestîgia,  ipsa 
quoque  rt*trorsum  inccdcns  suos  cque  dtlcbat  cal  les.  Miratus  ergo  rex  versu- 


I .  Kous  devons  la  collation  de  ce  texte»  dont  Tunique  nis*  t%l  à  la  Biblio- 
thèque de  îa  ville  d*Auxerre  (ms.  127*  foL  1 8  recto,  col.  i  à  19  verso,  coL  i) 
à  re^dréme  obligeance  de  M.  Ch.  Porée,  arcbivi^te  de  TYoniie.  ^  Le  titre 
a  été  ajouté  par  une  main  du  xvii«  siècle > 

a.  Un  nom  écrit  d*abord  a  été  gratté. 


LA    CHANSON    DE    LANDRI  I5 

liam  niulieris  rursum  lectulo  se  recepit.  Et  cum  mane  rex  surrexisset  et  divi. 
nisortlciis  adsiaret  vidissetque  quod  Hildegarius,  qui  tune  forte  ebdomadarius 
evangelii  pronunciandi  erai,  supposito  vicario  nequaquam  ad  al  tare  accederet, 
voluit  temptare  utrum  reverentia  sacrorum  necne  Hildegarius  abstineret. 
Vocansque  illum  jussit  ut  sacris  vestibus  indueretur,  debito  functurus  officio 
sicut  ebdomadarius.  Hildegarius  vero,  conscius  culpe  sue,  humiliter  cepit  dis- 
simulare,  cumque  rex  instaret,  infirmum  se  esse  respondit.  Rex  autem  magis 
ac  magis  Hildegario  insistebat,  et  Hildegarius  multo  magis  se  excusabat.  Et  cum 
rex  nionitionibus  jussiones,  jussionibus  minas  Hildegario  intenderet,  divinum 
humano  Hildegarius  timorem  prefercns,  preceptum  simul  et  iram  régis  dissi- 
mulaos,  exiit  ab  ecclesia.  Factis  igitur  missarum  sollemniis,  clerici  Eduenses 
proprio  pontifice  orbati,regi  exeunti  occurrerunt  eique,  juxta  morem  avitura, 
insignia  pontificalia,  scilicet  anulum  et  baculum,  optulerunt,  petentes  ab  eo 
sibi  pontificem  dari.  Tune  assistentes  palatini,  non  quç  Dei  sed  quç  carnis 
sunt  sapientes,  singuli  pro  suis  exorabant.  Protinus  rex,  divinitus  inspiratus, 
Hildegarium  vocari  precepit.  Et  timuerunt  aulici  ne  forte  rex  indignatus 
eum  de  palatio  pelleret  (diligebatur  enim  ab  omnibus).  Cumque  vocatus 
tremens  assisteret,  dixit  ei  rex  seorsum  jocose  :    «  Mulam  candidam   quam 

-  nocte  equitasti  libenter  insellassem  si  a  te  premonitus  fuissem.  »  Perterritus 
Hildegarius  timuit  se  delatum  vel   pervisum  a  rege,   prociditque  ad  pedes 

•  régis  et  ait  :  v  Pecçavi,  et  sicut  homo  lapsus  sum.  »  Cui  rex  ait  :  «  Amodo 
tibimet  caveto,  et,  sicut  timori  nostro  Dei  reverentiam  preposuisti,  ita  quoque 
timorem  Dei  voluptatibus  tuis  deinceps  prepone,  nedum  ob  transgressionem 
juste  sacra  vereris,  transgressionis  pariter  et  negligentie  debiti  officii  reatu 
tenearis.  »  Et  convocato  clero  Eduensi  cunctisque  optimatibus,  tradidit  ei 
anulum  et  baculum,  committens  illi  curam  pontificatus  ecclesie  Eduensis. 

Cum  ergo  eandem  ecclesiam  prudenti  sollertia  regeret,  venit  et  ipse  inter 
alios  ad  predictam  obsidionem,  quendam  secum  habens  nepotcm,  nomine 
Landricum,  et  applicuit  exercitus  ad  castellum  et  expugnavit  illud  fortiter. 
Ut  autem  vidit  dominus  oppidi  quod  sustinere  non  posset,  grande  convivium 
civibus  suis  preparavit  et,  rccumbentibus  omnibus,  ipse  simulato  langore  sur- 
rexit  et  clam  couscendens  equum  per  médias  acies  effugit.  Et  ascendentes 
velocissimi  quique  fugientem  însecuti  sunt,  sed  eum  nullaienus  apprehen- 
dere  potuerunt.  Cui  forte  occurrens  Landricus,  nepos  Hildegarii,  qui  praeerai 
cursariis,  percussum  impulitab  equo  captumque  duxit  ad  tentorium  Hildegarii. 
Et  quoniam  non  est  sacerdotis  quemquam  tradere  morti,  occultato  milite, 
misit  equum  illius  duci  exercitus.  Quo  requirente  militera,  responsum  est  ei 
quod  aviditâte  retinendi  equum  militera  miles  neglexerit.  Missi  ergo  appari- 
tores  scrutati  sunt  tentorium  Hildegarii  et  inventum  militera  simul  cum  equo 
suc  suspenderunt  in  patibulo,  captumque  castellum  dederunt  possidendum 
Hildegarii  nepoti  Landrico. 

Qpi  Landricus,  accepta  uxore  stirpis  Andegavorura,  genuit  ex  ea  6lium, 
nomine  Bodonem,  quem  Bodo  de  Montibus  suscepit  de  sacro  fonte.  Is  cum 
adolevisset,  petiit  a  patrino  suo  aliquid  sibi  dari.  Cui  i lie  respondit  :  »  Quid, 


\ 


lé  F.    LOT 

ail,  nliole,  tibi  vis  dari  ?  »  At  i!Ie  :  •*  Volo,  inquit,  ut  untum  terre  michi  con- 
cédas quantum  contigui  montis  umbra  die  una  perlusrraverit.  »  Quo  concesso. 
surrcxit  juvenis  summo  mane  in  diebus  estivi  temporis  et  cepi:  proprios 
limites  drcum  circa  ponere  sicud  sole  vergente  umbra  divenebat,  et  edihcavit 
ibidem  castellum  quod  dictum  est  Monorilis  et  dilatavit  tenninos  patris  su 
genuitque  niium  nomine  Landricum. 

Et  ûctus  est  Landricus  homo  magne  liberalitatis.  et  suscipii^at  fere  qootquot 
erant  trsnseuntes  per  \TJim,  nobiles  et  médiocres  personas,  rroperantes  ad 
limina  beaiorum  apostolonim  Pétri  et  Paa!i.  Eo  nempe  tempore  omnisgaili- 
cana  et  bdun^iica  natio  cadem  plurimum  trequcnrabai  îimir^.  Contigi:  autem 
et  ipsum  Landricum  eanJem  aliqiunio  cum  mulrls  aîiis  princiribus  j«r«gri- 
nationem  subire.  Intcr  quos  ftienint  cornes  Picuvorum  et  cornes  AaJcgavo- 
rum  necnon  et  cornes  Burguridie.  Qui  pariter  curaLandrico  redeuntes,  sanctum 
dominice  resurrectionis  d:em  apud  Bitemam  celebraverjn:.  U:  autem  iîine- 
ris  laborem  îevaren:  fecerùnt  ibidem  triduum.  Sequenti  vero  die  Pasche  fedt 
omnibus  convivium  Laniriois,  niius  Bodonis,  et  cum  a  prandio  sarrexissent, 
congés  Picuvomm  in^-iiiba:  Lmdricam  quatinos  avorum  sujnim  patriam 
secjm  repcteret,  ub:  ejm  maxi-nis  benenclis  cumularet.  Cui  cum  Lmiricus 
grates  rcferret  :  •  Mccum  poti-s.  ai:  cornes  Andegavjrura,  veaire  debcs.quo 
te  matemum  ger.js  invitât.  E:  respondcns  cornes  Burgundie  dixi:  :  «  Oir 
patemum  solum  bac  vei  illac  f^eregrinatunis  reiinques  ^  cum  ego  ibidem  sans  ' 
adroodum  possim  velimque  diure?  ^.  Ad  hec  Landricus  res{»ndi:  comiti 
Burgundie  :  «  Verum  est.  inqait.  quoi  plurimum  possb.  Peto  ergo  ut  jurvu- 
|am  i'iLun  insuîam  castri  Ni  vernis  concedere  m:  h:  digr.eris  quo  m:hi.  comitis 
concessa  dignitate.  et  tibi  Ikxtor  pro'.-eniat  et  ego  contiguam  hereiutem 
tutius  reticeam.  »  Respondi:  cornes  Burgundie  :  ?  Corircio,  ait,  sicut  \'i5,  et 
comiunim  Nivemis.  saivo;ure  bominii,  tibi  et  heredibustuls  de:ncepstrib«o.  § 
Iste  Lindricus,  primu?  h;r/js  zcnerls  cornes  N:-.-err.:s  tactus,  cepit  usq',:e- 
quaque  dilatais  terminjs  saos  habuitque  tîlijm,  nomire  Rcnalium.  qui 
CDHTunctJS  matrimon-D  S3r?ri  rcg:^  Rjberrl,  ~1::  Hj£:?::L>  Cip::rr.:5.  c:.xn:u- 
tum  Autisijdori  con-uav::  ccm.iit-:  Ni.emîs.  C-v-is  CD-n-.urus  grada  bc^o 
cum  duce  Burgundi::  ccr.!::gcn>.  ar-i  Sa!if~ijj-n:  -vcisus  es:,  tri^mphum 
si  mu!  et  hereditatem  Sdng-:r.:5  G-ilelntû.  T.'.:^  suo.  reiir^uens. 

G j:"el:r.,:s  autcni  ptr  z^.'z^izir.ii  :=rc  ir.nc>  cjm  lanu  ccr-.iiîrjn:  tetiuit 
:aJu-:r!i  e:  re;.?'--n  t\z'z.i.D  zz>i  i-fra  rr^-Niriptur:.  spoci^rr.  ne^c  eciaz: 
-r.-->  -::-'.:  s-T.Tiirr:  c:..:zzTi  r::-er.:  -ji  riccm  :ta  tcr.ucrit.  nec  miaori 
:rir:-;.r.::i  :=:r.r-"rt  q-:  sai^-lr.tt:;  v^;  liizn  cirporis  eu---::  le*. abat,  quin- 
c-i^inti  -.:;  ;:j-.:  :a-r::':*ri  coa:-^>^^J  -  T.=n5<  sue  u>u5  t-iri:  E:  tarr.in,  >w- 
5e5.>,jn  rui  m»'::?   i.tJLt-^    ç-.-Ç— i*  r.:i    .t.îIiî   >:l:i:r«.-r:   i  :  :-.i>ijr."   suj 

extra  =-r.<  c..-.:i:.5  N:.\;r:::5  cc  ■:civ.t   I>:  :.:a.!t  et  irse  :irTr.:r.:r>  ir.t-a  r~i< 
Lr^:--.-,    ::~  t-LT-r.  TrTr.jo:rt-:>:-~    irrc-.ctiï    :.-n:,.:it-:   N:\iTr.  >    et 

:     1.     ^. .   A  ■  f  reli=.c-ct. 


LA    CHAKSOK   DE  LANDRl  17 

Ahisiodori,  udum  de  inbus  componens.  Genuitque  filbs  dyos,  Guilelmum 
et  Rcnaldum.  E  quibus  Guilelnius  cura  m  Tomodorî  opfmuit,  Renaldus 
autem  Malliacum  et  Huben',  duo  nobîlia  oppida,  possedit,  Uterque  ïanien 
superstiîe  patre  vha  excessît. 

Sane  Guiklmm  Tomodorensis  es  propria  uxore  usmm  filiam  habuit.  Que 
conjunciacst  in  matrimonio  Airnoni  Borbonensi.  Renaldus  vero  prlmam  uko- 
reni  hiibuit  filiam  unicim  comîtis  Foratensis;  de  qua  fîHam  îuscepjt  que  con- 
junctaest  Mîloni  de  Curtiniaco.  Qua  defuncta»  iterum  Renaldus  duxit  u^orem 
fîtiam  Laocelini  de  Balgentiaco;  ex  qua  filium  getmît  nomine  Gtlileinium, 
quem  tnoncns  pat  ris  tuteJe  dimisit,  Quo  vii4  exempto,  monarchiam  Niver- 
nefisis  et  Aumiodorensis  aique  Tornodo rendis  provincfe  optinuit.  Hne^que 
suoscîrca  Ligerim  et  Akrium  fluvios  dilatavit.  Qui  jusiidelicet  ctihor  exîmius 
cxiiieret.  Vi^eliaci  lanien  monkisterium  insoUtîs  corisuett^dinibus  sibi  vendi- 
care  primus  attemptavii.  Hic  genuit  Guitelinum  et  Ren^ildum,  quibus  militia 
provcciis,  eu  m  uterque  Iherosolimitanum  iter  cum  Ludovico  rege  Franco* 
mm  et  dnct  Aquitanorum  arripuissct,  pater  iUorum  lerrena  ceiestibus  com- 
mutant Cartu^ie  cou  versus  facius  est, 

[Lt  resté  de  ia  page  ett  Matic.) 


NOTE  ADDITIONNELLE 

faï  tenté  en  parcourant  les  liistoîre.4  de  Nevers  et  du  Nivernais  et  en 
consuîtani  les  plans  anciens  delà  %'ille,  de  vérifier  si  le  nom  d'  «  Ile  Auchier  n 
s'était  conservé.  Mais  ces  recherches  sont  demeurées  infructueuses.  M.  H. 
de  Fîamarc,  archiviste  de  là  Nièvre,  a  bien  voulu  épuiser  à  notre  intention 
toutes  les  sources  Je  renseignements  à  sa  disposition,  mais  il  n'a  rencontré 
aucun  nom  pouvant  provenir  de  la  déformation  du  nom  d*Alicherus  ou 
Auchier t  Vlk-atix-  Birufs,  en  aval  du  pont  du  chemin  de  fer,  ne  peut  être 
Te  ihéitre  du  dueU  ■  Elle  est  un  peu  loin  de  la  vieille  ville  pour  qu'on  ait 
•t  pu,  de  ses  murs,  apercevoir  distinctement  les  phases  du  combat*  Je  ne  vois 
-^  de  possible  que  Tancienne  lie  traversi^e  par  ïc  pont,  où  sYlcvait  une  chapelle 
cf  a  Notre-Dame,  dont  remplacement  actuel  serait  vers  l'cxirémiié  sud  du 
-  po  m,  à  main  droite  en  venant  de  Ne  vers,  emplacement  connu  aujourd'hui 
«  sous  le  nom  de  Plateau  de  la  Bonne  Dame,  bien  en  vue  des  murs  de  la 
•c  ville  et  domine  par  la  hauteur  où  sont  le  château  Ja  cathédrale,  etc.  y. 
(Leitrcsdes  27  août  et  10  novembre  1902.) 

Ferdinand  Lot. 


1.  Mailly-le-Château  O'otii^^*  ^^'  Auxerre,  cant.  Coulange-sur- Yonne); 
Hubaiis  Nièvre  (château  de  U  corn,  de  Grenoi^,cant,  Brisson-ïes-Allcnjands)* 

Remamim,  XXXti  2 


LES  MANUSCRITS   FRANÇAIS 
DE    CAMBRIDGE' 


III.  —  TRINITY  COLLEGE 

Le  collège  de  la  Trinité  fut  fondé  par  Henri  VIII  sur  rem- 
placement occupé  par  plusieurs  anciens  hôtels  destinés  à  rece- 
voir les  étudiants.  Il  ne  paraît  pas  qu'aucun  des  livres  que 
devaient  posséder  ces  établissements  se  soit  conservé.  Du 
moins  est-il  certain  que  les  manuscrits  actuellement  conservés 
dans  la  bibliothèque  du  collège  proviennent  de  donations 
dont  aucune  n'est  antérieure  au  xvu*  siècle.  Mais  ces  dona- 
tions sont  importantes  par  le  nombre  et  par  la  valeur  des 
livres  donnés  ou  légués,  de  sorte  qu'actuellement  la  biblio- 
thèque de  Trinity  Collège  est,  entre  les  nombreuses  biblio- 
thèques de  Cambridge,  Tune  des  plus  riches  en  manuscrits  pré- 
cieux. C'est  à  peine  si  celles  de  l'Université  et  de  Corpus 
Christi  Collège  lui  sont  supérieures. 

Des  manuscrits  de  Trinity  Collège,  bon  nombre  sont  en 
français,  le  plus  souvent  en  français  d'Angleterre,  ou  du  moins 
renferment  des  parties  françaises.  Il  s'y  trouve  plusieurs  écrits 
qui,  jusqu'à  présent,  n'ont  pas  été  signalés  et  qui  appellent  des 
recherches  variées.  Il  me  serait  impossible  de  rendre  un  compte 
exact  et  suffisamment  détaille  de  tous  ces  manuscrits  sans  donner 
au  présent  mémoire  une  étendue  excessive.  Aussi  n'ai-je  pas 
l'intention  de  les  passer  tous  en  revue.  Je  donne  en  note  la 
liste  des  manuscrits  dont   je  ne  traiterai  pas,  soit  qu'ils  aient 


I.  Premier  article,  Rom.,  VIII,  305  ;  second  article,  XV,  236. 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS   DE    CAMBRIDGE  I9 

déjà  été  étudiés  par  moi-même  ou  par  d'autres,  soit  que  je  me 
réserve  de  les  étudier  eu  une  autre  occasion  ^ 

Les  manuscrits  de  Trinity  Collège  sont  répartis  en  trois 
classes  déterminées  respectivement  par  les  lettres  B,  R^  O,  qui 
désignent  les  cabinets  où  les  livres  de  chacune  de  ces  classes 
sont  renfermés.  En  principe  B  contient  les  manuscrits  théolo* 
giques,  R  les  manuscrits  historiques,  littéraires,  médicaux,  etc., 
et  les  manuscrits  orientaux  ^;  Orenferme  la  collection  de  Thomas 


t.  Les  mss.  qnç  \t  hisse  de  côté  sont  les  suivants  : 

B-  I.  45,  foU  19.  Traiié  sur  la  conression^  dont  je  doîiiieraî  quelques 
extraits  dans  une  notice  générale  sur  les  rraués  de  ce  genre  qui  jwus  sont 
parvenus, 

R.  î,  $3.  Eéd^tion  de  h  chansoti  de  Roland  dont  j'ai  donné  des  extraits. 
en  1877,  dans  mon  Recmi!  iTanciens  iexies  (p,  209  ei  suiv,).  Depuis»  le  tcîtte 
complet  .1  été  pubUé  par  M-  Fôrster.  La  version  de  la  lettre  du  Prêtre  Jean 
qui  occupe  les  ff*  107  à  1 18  est  celle  dont  on  a  ïc  plus  grand  nombre 
d  *e  xem  p  laires  {Roman  ta ,  XV ,  177)* 

R*  5*  46,  Vies  en  vers  de  saint  Jean  Taumônier  et  de  saint  Clément 
(celle-ci  est  une  traduction  libre  des  HewgnHhncs  augmentée  de  récits  puisés 
il  d*autres  sources).  Ce  manuscrit  a  été,  de  ma  part»  1  objet  d'une  longue  notice 
dans  les  Noîkgi  et  extraits  Ja  manusctiis,  XXX VUI,  295  et  suiv-  Cette  notice 
vient  de  paraUre  en  tirage  à  part  (Paris,  Klinclisieck). 

R.  14.  ^o.  Recueil  de  traités  de  médecine  et  de  recettes  médicales  en 
latin  et  en  provençal  sur  lesquels  je  me  proposu  de  rédiger  un  mémoire  parti- 
culier. 

R.  t6.  2.  Apocalypse  en  français,  dont  \*m  traité  dans  une  récente  publica- 
tion de  la  Société   des   anciens  textes  français  {L' Apocalypst  m  fran%ah  au 

Xîîh  iikk,  I9QI ,  p,  CGXLIX-CCLUI)' 

R,  17*  I.  La  version  du  Psautier  publiée  en  1875  parFr.  Micbei,  dans  les 
Dvcumtnis  inédit i. 

O-  t-  5.  La  coutume  de  Normandie  en  français. 

O,  1*  at,  Gautier  de  Bibbysworth.  Voir  mon Rfcueihrancif us  kxks,  p.  360* 

O.  2.  29.  Sermons  français  de  Maurice  de  Suîly.  Réservé  pour  une  autre 
occasion. 

O.  4.  26*  Ms,  très  tncomplct  et  médiocre  (xv^  siècle)  de  THisioire 
ancienne  jusqti*à  César,  sur  laquelle  'voir  Umnania^  XIV,  %6. 

O,  9.  î4,  U AUxanâfê  d*Easuchc  de  Kcni.  Voir  mon  livre  sur  la  légende 
d'Aleximdre,  II,  276, 

a.  Ce  classement  n*est  pas  rigoureux  et  ne  pouvait  Tétre.  Beaucoup  de 
manuscrits  offrent  plus  ou  moins  le  caractère  de  mélanges  et  peuvent  être 
placés  indifîéremment  dans  une  catégorie  ou  dans  une  autre. 


30 


P.    MEYER 


Gale  (f  1702),  donnée  au  Coilège  en  1738  par  le  fils  de  celui- 
ci,  Roger  Gale  (f  17^  a). 

Lorsque  je  commençai  l'étude. des  manuscrits  de  Trinity, 
en  mai  et  juin  1871^  il  n'en  existait  pas  d'autre  catalogue  que 
celui  que  Berïiard  a  inséré  dans  ses  Catahgi  Ubrorum  manu- 
scfipîarum  AngHœ  d  Hibirmœ  (Oxford,  1697,  in-foL).  Dans  la 
seconde  partie  du  tome  1"  (pp.  93-102)5  on  trouve  Tinventaire, 
naturellement  fort  sommaire,  des  manuscrits  que  possédait  alors 
le  collège.  Plus  loin^  t*  II,  pp.  185-195,  est  imprimé  le  cata- 
logue des  manuscrits  Je  Th.  Gale,  qui  ne  devaient  entrer  à 
Trinity  qu*une  quarantaine  d'années  plus  turd.  Récemment^ 
M.  Munta^ue  Rhodes  James,  qui  a  entrepris  Tœuvre  méritoire 
de  rédiger  les  catalogues  de  toutes  les  bibliothèques  collégiales 
de  Cambridge,  a  mis  au  jour  les  deux  premiers  volumes  du 
catalogue  des  manuscrits  g re^,  latins,  anglais,  romans,  de  Tri- 
nity*. Ce  catalogue  est  rédigé  avec  le  soin  et  la  compétence 
dont  M,  James  avait  donné  la  preuve  dans  ses  précédents 
catalogues  des  manuscrits  du  Collège  d*Eton,  du  Musée  Fitz- 
wîlliam,  dont  il  est  le  directeur,  de  Peterhouse,  etc.  Si  les 
ouvrages  n'y  sont  pas  toujours  identifiés,  si  par  suite  la  biblio- 
graphie laisse  à  désirer,  les  manuscrits  sout  décrits  avec  une 
minutieuse  exactitude;  les  indpiî,  donnés  lorsqu'il  y  a  lieu, 
permettent  au  lecteur  compétent  de  déterminer  les  ouvrages. 
Tout  ce  qui  concerne  soit  Tornementation  soit  Thistoire  des 
livres  est  traité  avec  un  soin  particulier.  Désireux  de  réservera 
la  publication  des  textes  le  plus  d'espace  possible,  j'ai  pu,  en 
bien  des  cas,  abréger  la  description  des  manuscrits  que  j'étu- 
diais,   renvoyant  le  lecteur  aux  notices  de  M.  James. 


Bt  14.  39,  40-  —  Vie  de  saint  Nicolas,  par  Wace,  —  ExTRArrs  du 
Miiom  DE  Ro&iiRT  DE  Gretham.  —  Femïka.  —  Extrait  de  Gautieh 

DE   lîJfiBYSWORTH.  —    DIALOGUES   FRANÇAIS,  ETC. 

Ce  manuscrit  porte  les  deux  numéros  39  et  40  parce  qull 
formait  autrefois  deux  tomes,  et^  en  effets  il  se  compose  Je 
deux  parties  originairement  distinctes,  et  d'époques  différentes. 


I .   Tht  WtUmt  mantiscHpis  in  th  lihrary  of  Trinity  Cdiege,  Cûwknd^f.  Cani- 
bridge,  Univcrsity  Press,  gr»  m^°;  î.  1, 1900;  s.  Il,  1901.  Le  lûmc  Icomient 


LES    MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CaMBRJDGE  21 

qui  ont  été  reliées  en  un  volume*,  Hickes  te  cite  ù  plusieurs 
reprises  dans  son  Thésaurus^  et  même  en  a  extrait  un  morceau 
important,  une  vie  de  sainte  Marguerite  en  vers  anglais,  qui  a 
été  réimprimée  en  1862  ^  En  1841,  Thomas  Wright  publia, 
d*après  le  même  manuscrit,  quelques  pièces  anglaises^;  puis, 
en  1844,  il  le  cita  à  propos  de  la  légende,  en  vers  français,  de 
saint  Furseus  (c'est  une  partie  du  Miroir  de  Robert  de 
Gretham),  et  en  imprima  21  vers  ^  Mats,  en  1S49,  lorsque 
N*  Delius  préparait  son  édition  de  la  Fie  de  saini  Nicolas^  par 
Wace»  le  manuscrit  manquait  sur  les  rayons*,  et  depuis  lors  la 
même  constatation  a  été  faite  mainte  fois  7. 

En  18S6,  décrivant  ici  même  les  manuscrits  de  rUniversité 
de  Cambridge,  j'exprimais  Tespoir  que  le  précieux  livre  de 
Trinity  Collège  se  retrou%xrait  quelque  jour^  Cet  espoir  s*est 
réalisé.  Depuis  189e,  il  a  repris  sa  place  sur  les  rayons  de  la 
Bibliothèque.  11  n'avait  pas  été  volé,  comme  on  lavait  craint. 
Il  avait  été  empnmté  irrégulièrement^  par  un  fellow  de  Tri- 


ks  niss,  de  la  classe  B,  le  tome  II  ceux  de  k  classe  H.  Le  troisième  volume, 
actuellement  sous  presse,  est  réservé  à  la  classe  O  (mss.  Gale). 

1.  La  reliure  actuelle  paraît  dater  du  corameticcment  du  xtKc  sîècîe, 

2.  Lm^uarum  vderttm  sepUntrioitalium  ifsesattrus  i^rammatùo-cniicus  H 
ûrckmîi^iais,  auctore  Gcofgio  Hkkesio,  S.  T.  P.  Oxonie,  MDCCV.  —  Voir 
pp.  146,  149,  1^4,  des  citations  de  la  vie  de  Saint  Nicolas;  pp.  154,  155,  du 
iraité  îniUulé  Ffmîtia,  et  p.  224  ^  la  vîc  en  vers  anglais  de  sainte  Marguerite. 
De  plus,  Hickes  donne  U  fac-sîtiiilé  de  quelques  lignes  sur  la  deuxième 
des  planches  placées  en  regari  de  la  p.  144, 

|.  Seinif  Markrtk,  Ihf  timden  ani  mariyr,  in  old  erg  lis  h,  first  eJited  from 
thc  skin  books,  iti  ï  862,  by  OswAld  Cockayne,  and  now  reissu ed*  London, 
iM6(Earh  en^L  Trxt  Socifty%  p.  34-4}^  Cette  édition  n'est  autre  que  celle 
de  i86^>  à  laquelle  on  a  mis  un  nouveau  litre  et  ajoute  un  avertîsseîiient  et 
quelques  notes. 

4.  RHujui^f  antiqUi^^  1,  48,  144,   170. 

j.  Saint  Patrick* î  Purgaim y  {Lonàon^  1S44)»  p.  it. 

6,  Maùtrt  Waçés  5^  Nkhùhî  (Bonn,  iSso)^  p.  xii. 

7.  Pir  Cockayne»  préambule  de  rédition  de  sa  Stînit  Mûrhertte  {1862); 
par  A>  Way,  préface  du  t>  IJl  du  Prompt uarium  jmvuhmm  (jSés)*  par 
M,    Ed.  Stengct,    notice  du  ms.   Digby  86,  p.    66*7  Ci^ZO»  *tc, 

a.  Rmmnm,  XV,  296, 

9.  Du  moins  il  n'existe  aucune  mention  du  prêt. 


22  P.    MEYER 

nity,  qui,  étant  allé  occuper  dans  le  nord  de  l'Angleterre  une 
prébende  dépendant  du  collège,  empona  par  mégarde  dans 
s;i  nouvelle  résidence  le  manuscrit  en  question,  et  quelques 
autres  documents  appartenant  à  Trinity.  Après  sa  mon,  en 
1S95,  le  paquet  fut  retrouvé,  non  ouvert,  et  le  manuscrit,  avec 
les  autres  documents  de  même  provenance,  tiit  renvoyé  à 
Trinity*.  Comme  je  l'ai  dit  plus  haut,  le  volume  actuel  for- 
mait autrefois  deux  tomes  ayant  chacun  sa  pagination  propre, 
l-c  second  tome  commentait  à  Tanicle  Femifuiy  dont  il  sera 
traité  plus  loin.  Etepuis  peu,  une  nouvelle  pagination,  s'éten- 
dani  i  tout  le  volume  tel  qu'il  se  présente  actuellement,  a  été 
faite.  Ix  manuscrit  ayant  été  minutieusement  décrit  dans  le 
catalogue  de  M.  James,  je  me  bornerai  à  étudier  et  à  faire 
connaître  par  des  extraits  les  panies  françaises. 

Au  fol.  î4  .^,  entre  des  pièces  très  variées,  les  unes  en  latin, 
les  autres  en  anglais,  se  trouve  le  sermon  bien  connu,  et  souvent 
attribué  à  Tarchevèque  Etienne  de  Langton,  qui  a  pour  texte 
la  chanson  /v-V  AI:s  '*ui:yf:  se  Ina.  Il  sufrira  de  signaler  cène 
pièce  dont  on  a  de  nombreuses  copies  -.  Présentement  je  passe 
à  Texamen  de  textes  plus  importants. 

1.  Pri^'-f  j  JfjuS'Crns:,  —  Cette  prière,  en  sixains  alter- 
nativen^er.:  :rar.ça:>  e:  anglais  '  :"a::  suite  à  .a  vie  anglaise  de 
siir.te  Marc^ientc.  !r.^.rri:r.c^  rar  Hickes,  T'XjjwTiSy  L  222-51, 
e:  rc:n:?r:*v.te  ra-  O.  Cvvka\T:<;.  Hickes  en  a  reproduit  (r/if-, 
I.i4>  '.e  di>v.:  t-  tac->::v.:'.e.  Er.  voici  '.es  premières  sn"ophes  : 


LES  MANUSCRITS  FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE 


23 


I  Jhesuchrist  le  fiz  Marie,  (fol.  24) 
Cil  ke  tut  le  munde  fist, 

De  nus  eit  pi  té  e  merci, 

Si  H  plest, 
Ke  nos  aimes  ne  seint  dampnées 

Par  nul  maufet. 

II  Loverd  Christ  thou  »    havest  us 

Thou   madest  al   this  word  of 
[nougJn, 
We  biddet   thc  wi//;   word  ant 
[thought. 
Conseil  ant  red, 
77?at  oure  sole  ne  be 
Furiore  for  no  qued. 

III  Sire  Deu,  vus  eistes  tel, 
Père  de  tere  et  de  cel, 
Plus  douz  ke  mel 

Kaunt  il  est  chaud  ; 
A  vus  nus  devum  obliger. 
Sire,  an  haut. 

IV  Loverd  Crist,  as  thou  art  king, 
Fader  ant  sone,  of  aile  /Wng, 
77k>u  ^ef  us  aile  god  endeng 

Ant  ti  love 
r/7at  we  moden  to  thi  blisse 
Aile  come. 


V  A  un  piler  fu  lié 

E  pur  nus  peccheurs  turmenté. 
Sire,  merci  par  charité. 

Par  amur, 
Ke  nus  ne  seum  acumbré 

Nuyt  ne  jour. 

VI  Ibounden  e  was  to  a  piler 
Ant.  al  to-torn  was  is  her; 
Sire,  merci  par  charité. 

Fur  Godes  love, 
Milde  bete  thi  swete  chères 
Marie  sone. 

Vil  Mort  desour  la  crois  suftVi, 
Marie  e  seint  Jon  le  vi, 
E  se  ke  penderent  encouste  de  li 

Le  du  laron  ; 
Le  un  li  cria  merci  : 

Il  out  perdun; 
Li  autre  aval  cheït 

En  pu  parfum. 

VIII  Deet  he  /^lede  up  on  the  tre 
Ant  wuden  hothen   two  ant  thrc 
To  save  tho  than  hise  ben, 
Ant  luder  ben  comen. 
Jhesu  thi  blisse  us  bi  see 

For  /W  swete  moder  love. 

Amen. 


2.  Fie  de  saint  Nicolas,  par  Wace.  —  On  connaît  de  cette 
légende  cinq  mss.  :  celui  que  noUs  décrivons,  deux  à  la 
Bodléienne  (Douce  270  et  Digby  86),  un  à  l'Arsenal  (3516, 
fol.  69)  et  un  à  la  Bibl.  nat.  (fr.  902,  fol.  117).  Un  seul,  celui 
de  r Arsenal,  a  été  exécuté  en  France;  les  quatre  autres  sont 
d'origine  anglaise.  Le  plus  ancien  et  le  meilleur  est  le  ms.  Douce, 
qui  est  la  base  de  l'édition  donnée  par  Delius  en  1850.  Delius 
a  fait  aussi  usage  du  ms.  Digby  et  regrettait,  comme  on  Ta  vu 


I.  Ms.  y<m,  mais,  pour  éviter  toute  confusion,  et  n'ayant  pas  à  ma  dispo- 
sition le  thorn  anglais,  j'écris  th  ici  et  ailleurs.  De  même,  plus  loin,  j'emploie 
y  et  ghy  selon  les  cas,  pour  le  yoJu, 


24  P'    MEYER 

plus  haut,  de  ne  pouvoir  consulter  le  ms*  de  Trinity,  déjà 
disparu.  Le  ms.  de  l'Arsenal  a  été  reproduit  par  Monmcrqué» 
en  iSî4,  pour  la  Société  des  Bibliophiles  français,  qui,  à  cette 
époque,  tirait  ses  publications  à  trente  ou  quarante  exem- 
plaires ^ 

Si  Delius  n'a  pu  utiliser  le  texte  du  ms.  de  Trinity,  son  édi- 
tion n*y  a  pas  beaucoup  perdu ,  car  la  leçon  qu'offre  ce  ms,  est 
incomplète^  et  bien  souvent  fautive.  On  en  jugera  par  le 
spécimen  qui  suit.  Pour  iaciliter  la  comparaison,  je  joins,  entre 
(  ),  la  concordance  avec  ledition.  On  verra  que  le  prologue 
manque  à  peu  près  complètement  (les  deux  premiers  vers  .sont 
l'œuvre  d'un  copiste) ^  et  que  beaucoup  de  rimes  sont  déna- 
turées au  point  que,  si  on  n*avait  le  secours  des  autres  manu- 
scrits, on  pourrait  croire  que  le  poème  a  été  composé  par  un 
Anglais  du  xnr  siècle. 


De  seînt  Nkhoïas  ai  pensé,  (f.  48) 
Un  seint  de  gratii  au  10 rite. 
En  romauns  dîmim  un  petit  (40) 
4  De  ceo  ke  le  latin  nous  dh, 
Ke  li  lai  le  puyscnt  a[njtendre 

Ete  Pâtre  fu  né,  de  une  cité 

8  Noble  c  riche  de  antiquité  ; 
Mes  piiys  est  la  chose  empiré, 
A  bon  pmf  tui  a  menu  se. 
Père  e  mère  out  de  grant  hautessc, 

12  Df  parenté  et  de  richesse,  (51) 
Asez  urent  or  e  argent 
E  moût  vïvai[e]nt  seintement, 
E  tel  enfaunt  vodreient  a  ver 

16  Dount  il  puyscnt  fere  lour  dr, 
Nent  souI  de  bur  manauntise 
Mes  de  tut  lur  conqucst  en  autre 
[guise. 


Tel  fu  cum  il  désiraient;  (58) 

20  Nîcholas  par  noun  l'apçlaient. 
Ne  eurent  enfaunt  qut  soûl  cestui  : 
Taunt  Turent  plus  cher  aumbedui. 
Petit  fu  a  lettre  mis,  (68) 

24  Par  grant  eii tente  fu  apris. 
Encore  petit  en  ber^  jesout,(62) 
Desûul  la  mamelle  vivout, 
Si  juno'Jt  pur  Dcu  amour  : 

28  Ne  leîtout  que  une  fèx  le  jour, 
Al  megredi  e  al  vendredi;  (66) 
Si  lî  OUI  Dens  de  sa  grâce  emplL 
Quant  plus  crusi,  plus  ami!nda, 

J2  Ke  plus  servi,  Deus  plus  Tama. 
Lan'ercbachilers  tut  fourmez,(72) 
De  taunt  de  bountés  aloses. 
Sun  père  prist  definemen 

^6  E  sa  mère  cnscmetit  ; 

De  Nîcholas  firent  lour  eir, 


K  Le  volume  de  Monmerqué  contient  quelques  autres  textes  relatifs  à 
saint  Nicolas^  notamment  une  version  en  prose. 
2    Elle  omet  notamment  les  vers  1550-1457, 
î-  Le  vers  omis  est,  dans  le  ms.  Douce,  Quimstvtiit  îaim  mt£ttdn^ 


LES  MAKUSCRITS   FRANÇAIS    DE  CAMBRIDGE 


23 


De  qu^iit  kç  il  purraitrnt  averj 
E  NichoUs  tut  Jepani» 
40  Teres,  mesouns,  tut  se  feus  veodî  ; 
Si  dona  tue  a  povre  gent,  (b) 
Ne  fist  autre  reposemem.  (81) 

Uns  povres   lioume  iluc    mandt 
44  Ke  rkhes  jadis  esté  îiveit, 

Mes  en  pôverté  crt  venuz  ; 

De  ceuiavym  plusours  vvt 

Ke  de  grant  a  ver  kc  il  aveient 
48  En  po verte  gràm  descendeient. 


Tcus  i  a  ke  de  poverté 

Sount  venuK  en  grant  plcmè*  (89) 

C^  povre  hou  tue  out  treîs  pu  celés, 
52  Treis  50Uc[s]  files  ase^  bêles; 

Entre  eus  katre  ne  urent  ke 

[prendre, 

Ke  a  engager  ne  a  despendre  ; 

De  vivre  conseil  ne  troveieni 
56  Si  3  bordel*  nen  aleîent. 

Sein  Nichûlas  pjt<î  en  prbt;  (98) 

Ore  01  ez  eu  m  faitemcnt  le  fist. 


Voici  un  autre  morceau  que  je  cite  parce  qu'il  cotitîent  une 
série  de  vers  qui  lUiinqm^nt  dans  le  nis.  Douce,  entre  tes  vers 
Ï283  et  1284  dé  Tédition  de  Delius  *  : 


Grand  dol  a  veit  par  la  meson  ;  (f.  55*/) 
Ki  dolent  se  le  père  nun?        (1175) 
V  Las!  dolem  i,  fet  il,  «  cheîiift 
Ke  me  en  chout  si  mes  ne  vif^ 
Quant  si  tost  iii  mun  fiz  perdu, 
E  Deusf  si  poy  jel  ai  etî. 
E  Dcus  !  taunt  fu  lé  quand  jel  oy  ! 
E  Deus  î  pur  quei  tne  dura  si  poy  ? 
Ma  joie  me  a  durrd'  petit, 
Orc  ai  grant  dûl  ;  veîrs  dist  ki  ce  ibt  : 
Après  grant  ris  graot  plur;  (1282) 
Après  grant  joie  grauat  tristuri; 
Après  graunt  gaine  grant  domage; 
Après  grant  saune  lé  vent  grant  rage. 
Uncore  uy  matin  al  jur 
Kett  avey  ttial  oe  dolor; 


Grant  mal  m'est  avenu  en  poyd*oure 

Deuï  !  ke  pecché  m'est  œru  sure  ! 

Nen  avei  unkes  nul  enfaum 

For  sul  ccïî,  si  lî  amai  uunt. 

Perdu  ai  mun  fiz  e  mun  her; 

Ne  qur  jamès  nul  autre  aver< 

Beu  ûxt  beu  cliers,  taunt  mir  vus  vi  t 

Mort,  ke  fet  (iic)  tu?  ven.si  me  05c i; 

Mort,  car  me  prens  ;  si  rac  rent 

Celui  dunt  ai  le  que?  dotent. 

Beu  fiz,  de  ceo  sui  angusus 

Ke  je  ne  puse  mûrir  pur  vus. 

Ey  !  sein  Kicholas,  ke  en  fray 

De  mon  enfauni  kc  perdu  ay?  » 

li  père  e  la  mère  ploreient,      {^^M) 

Pteinent  sai,  si  paunicîent.    


ï*  Les  autres  m ss.  donnent  Se  en  galice  (Douce),  Si  a  gaîki  (B*  N.  fr. 
90a),  Si  d  gaeîii  (Digby).  La  bonne  leçon  Ta  gmlht  ne  se  trouve  que  dans 
le  ms.  de  l*Arsenal  (donnée  en  variante  par  Mommerqué,  p,  305);  eïlc  avait 
été  restitiiée  pur  M,  Toh\€T  {Rmnania,  II,  259), 

2,  Ils  se  trouvent  aussi  dans  les  autres  manuscrits,  par  ex.  dans  B.  N.  fr. 
902»  foL  cxxv .  et  daîis  Digby.  Delius  a  eu  tort  de  ies  considérer  comme 
une  addition  postérieure, 

3.  Ce  proverbe  se  rencontre  fréquemment,  avec  des  variantes  :  Le  Roux 
de  Uncy,  Lh^rt  des prov.,  2<  éd..  Il,  240,  472. 


^            âé                                                     p.    MEYER                        ^^^^^^^^^^1 

^^^^^M             Voici  h  fin  (foL  $6  b)i 

- ^^^^^^^M 

^^^^^^H            Ben  dtii  hum  bon  seinuramer  (t  J40) 

Ke  Suun  apele^  esteh,                     ^^^^^H 

^^^^^^H           E  servir  e  honorer. 

Fu  a  sein  Nicholas  mené,                        ^^^| 

^^^^^^^B            Ki  ben  sert  bon  semur 

Sur  un  cheval  fu  aporté                            ^^^H 

^^^^^^^H            Prou              e  honur. 

Li  seint  hunje  ou  mcisicr  esteJt  :            ^^^^H 

^^^^^^H           Bon  sire  sun  sergaunt  pa^  ne  oublie 

K  aram  e  ert ,  si  j  une  it .                              ^^^H 

^^^^^^H            Quant  veit  ke  il  ad  me^tcr  de  aïe. 

Cil  ke  le  malade  mena                             ^^^H 

^^^^^^H           Pur  ceo  ke  it  aveit  amé 

Sein  Nicholas  pur  li  pria                             ^^^H 

^^^^^^H            Sain  Nkholas  e  honoré, 

Kg  Deu  pnast  e  requîst  (1480)               ^^^H 

^^^^^^^B            Li  mustra  ke  il  li  amout 

Ke  cel  malade  sein  fe[î>t.                       ^^^| 

^^^^^^H           £  ke  de  li  II  remembrout.  (i  349) 

Savez  ke  sein  Nicholas  lîst  ?                    ^^^H 

^^^^^^H               Oe/  ke  nus  trovum  lisaunt  :  (i4sS) 

Del  oik  de  la  laumpe  prist,                     ^^^^| 

^^^^^^H           Ke  li  bers  ert  >  en  sud  vivaunt, 

Si  en  oignt  le  cors  envtrun                     ^^^| 

^^^^^^H           Uns  bu  me  en  pèlerin  us 

E  fîst  a  Deu  un  oreisun.                         ^^^| 

^^^^^^H           Tsunt  en  febles,  taunt  dolerus 

De  ke  il  out  fet,  cil  saili  sus                    ^^^H 

^^^^^^H            Ne  poei!  sur  se&  pc7  esterc 

Tut  sein,  unkesne  fu  plus;                     ^^^H 

^^^^^^H           Ne  %^z  mains  a  sun  chef  trere  \ 

Cil  ke  einz  ne  pout  aler                          ^^^H 

^^^^^^H            Felenus  {sic)  est  de  tele  nature 

Ne  sai  aider  ne  mover                             ^^^H 

^^^^^^H            La  ou  se  firent  lungcment  dure; 

E  ke  aveit  le  pèlerin                                ^^^H 

^^^^^^H           Ja  del  menibre  ta  ou  il  lèvera 

Tut  sein  ala  sun  chemin.  (1491)            ^^^H 

^^^^^^H           Aider            ne  purra 

Deu  prium  nostre  scinur  (tj^o)                    ^H 

^^^^^^V           Si  li  fet  les  membres  seccber 

Ke  pur  ce  seint  e  pur  sa  amur                        ^| 

^^^^^^H           Ke  tl  ne  se  put  ren  aider.  (1469) 

Nus  doint  de  pecchez  pardun                         ^| 

^^^^^^H           Un  11  urne  ke  out  ces  te  ct\fçfmçKé 

E  vivre  en  confessiun,                                   ^| 

^^^^^^^H            Ne  poeit 

Ke  oud  ti  régner  pusum  (iS?4)                      ^| 

^^^^^^H           De  une  vile  ou  il  mis  aveli  (c), 

In  secuk  secuJùrum.  Amen.                             ^| 

^^^^^^^B               Deui^  qui  beat  m»  Nkijofamti  poniîfi\ 

tem  ttmm  i  mm  maris  d^cùrastt  mtraatlù^            ^^ 

^^^^^^H           iribm  nobii  grmmm  ut,  cjus  meniis  tî 

predhui,  a  géhenne  itimtdiis  likrtmur^            ^M 

^^^^V            fir  Do.  M.  /.  CLf,  t 

^^1 

^^^^^H             3.  Traduction  en  vers  du  Fmi  SanfteSpîriius.  —  L'ccnture          ^| 

^^^^^H         de  cette  pièce  est  différente  de 

celte  de  la  vie  de  saint  Nicolas,           ^| 

^^^^^B          Elle  ne  parait  cependant  pas  sensiblement  plus  récente.                       H 

^^^HV            Ftni,  Samti  Spintus  (t  5  6  c) 

Seint  Esperiï,  vus  venei                          ^^^Ê 

^^^^^F            EiemiiifuHtus 

£  deï  cetl  nus  amenez,                             ^^^| 

^^^^^V                Luds  tut  radium. 

De  ta  ïumere  nus  relumei  ;                     ^^^| 

^^^^^M                 Vtni^pûtir  pauperum. 

De  poveres  père  cheir,  vcnei  ;                       ^| 

^^^^^1                   Veni^  daîor  munrrum. 

Dons  de  grâces  nus  donet                                ^M 

^^^^^■^                  ymi,  lumm  c^rdium. 

E  nos  (guéris  alumc^.  (f.  $6  d)                       ^M 

^^^^HH               t.  Con.fisL  —  2.  Voilà  deux  rimes  bien  corrompues;  Douce  istir-îwir,             H 

LES  MANUSCRITS  FRANÇAIS   DE  CAMBRIDGE 


27 


CmsùhÈôr  opHmi^ 
Dukis  IfOîpes  uni  nu  ^ 
Duîct  Ttjrigrrium^ 
Ih  Inbore  ttquks^ 
lu  t$tu  IfmperuSj 
Jn  fititi  sokciim. 

O  hix  hulissimUf 
Etplt  coniis  iniima 
Tuûru  m  fiddiu  m . 
Sim  tiiû  numint 
Nil  m  in  htmittf^ 
Nii  est  mnûxium. 

Laxm  quod  est  sordidumt 
Riga  quaâ  est  aridum, 
Sûna  quod  til  saucixim^ 
fléck  qaod  est  tigîdum^ 
Fave  (fuod  est  frigidum^ 
R0gi  qtioit  tst  dftmm, 

Da  itiis  fidtîihm 
In  ti  coiifdmtibiis 
Sacrum  itfkmrium 
Da  virtittis  meriittmf 
Da  iahdis  txitmn^ 
Da  ptrhemti  gmtdium. 


Tiî  es  trû^bon  consileir, 

Dub  hoste  de  aime,  salus  a  amer, 

E  ducK  freîdurc; 

Repos  de  Ira  val  tu  es  sur, 

Refreidureen  ardur. 

En  plure*  es  conforturc. 

O  lu  mère  très  benuré, 

De  ta  grâce  le  queor  cmpJer, 

Ke  en  tay  ont  cremor  (corr,  créance)» 

Car^  sa  ni  ta  deité^ 

Nu  le  rcyn  ne  est  alumé 

E  sumus  en  Dusance. 

Ceo  que  soyïé  trovea  lavez, 
Ceo  que  secce  est  arroser, 
E  ke  forvehe  k  adressez  ; 
Ce  que  red  est  le  abesciz, 
E  si  treid  si  nuHsei^ 
E  nos  pbies  tretus  sanez. 

De  grâce  te  seit  dons  donne/ 

A  nus  ke  sumus  feus  claniez, 

Sire,  par  ta  franchise, 

Ec!  vïvere  et  morir, 

Ke  nus  pussuns  a  ceîl  venir 

En  ta  grant  église.  Amen, 


4.  Les  pronostics  d'ÉiàhieL  —  Ce  court  texte  a  été  écrit,  sur 
une  p3^e  restée  en  partie  blanche,  par  une  main  plus  récente 
(xiv^  siècle)  que  ce  qui  précède  et  ce  qui  suit.  La  pièce  tout 
entière,  composée  d'environ  80  vers,  a  été  publiée  par  Jubinal^ 
dans  ses  Jongleurs  et  Trouvères,  p,  124,  d'après  le  ms.  BibL 
nat.  fn  837,  puis  par  moi,  d'après  un  nis,  de  Rouen,  dans  le 
\ Bulletin  delà  Striéié des  ûftciens  textes^  année  1883,  p.  89.  J'ai 
donné  à  cette  occasion  la  liste  des  manuscrits  qui  la  ren- 
terment  %  et  quelques  renseignements  sur  les  diverses  rédac- 


1.  Ceiie  liste,  qui  se  compose  de  huit  itianuscrits,  pourrait  être  augmentée. 

Le  même  poème  se  rencontre  encore  dans  !cs  mss.  de   Chartres  35-1,  de 

UUe  I  îo,  dans  un  ms.  ayant  appartenu  à  M.  de  Vema  (BibL  de  FÈcok  dtî 

^Chartest  LVl,  68j),  dans  un  ms,  de  Turin  (Rn*,  à*i  L  fom.,  4*  série,  VIII, 

}8X  dans  un  ms.  de  Modéne,  etc. 


2$  P.    MKYER 

tlons  qu'on  pOfisèdc  cL*  ces  pronostics.  J'ai  dit  que  les  textes 
latins  a»mme  les  textes  grecs  ctaient  généralement  placés  sous 
le  nom  d'Esdras,  ou,  parfois,  sous  celui  de  saint  Denis,  et  que 
je  ne  les  avais  jamais  vus  attribués  à  Ezéchiel.  J'ajoutats  toute- 
fois (p,  87  du  Bulletin)  que  l'attribut  ion  à  Ezéchiel  devait 
provenir  de  quelque  rédaction  latine  de  moi  inconnue.  Cette 
conjecture  était  fondée  :  M,  L.  Delîsle  a  signalé  un  ms.  latin 
où  ces  pronostics  sont  en  effet  attribués  à  Exéchiel  ', 

là  la  pièce  n  est  pas  complète  :  on  n'en  a  copié  que  les 
ro  premiers  vers. 

En  terre  de  kbour  et  de  promîs&iun  (f.   57  a) 

Esioyt  nn  prophète  ja  '.  Ezt'chyel  out  nun. 

Mu  II  iavyet  dd  seclc  et  de  le  by  dyvytie, 

Mult  ama  Deu  et  b  sue  doartne. 

Py ys  qe  il  ert  enfaunt  todis  leva  matia^ 

Ab  a  Tcicûlc  pur  aprendre  latin. 

Taunt  se  dôna  as  ars  et  a  sen  des  amors» 

Les  signes  des  esicîles  scrcha  et  les  curs. 

Taunt  oyt  et  aprist  de  louis  cscripturcs 

K'il  saveyt  de  le  temps  toie[s]  le*  aventures* 

5.  Morceaux  tirés  du  Miroir  de  RoaiiKT  de  Gretham.  —  En 
1886,  dans  mon  mémoire  sur  les  mss.  français  de  Tuniversité 
de  Cambridge,  fai  donné  de  ce  curieux  poème  une  notice  à 
laquelle  je  ne  puis  que  renvoyer  le  lecteur  K  Je  rappelle  seule- 
ment que  t^ouvrage^  dédié  à  une  dame  nommée  Aline,  est  une 
exposition  des  évangiles  des  dimanches  et  fôtes,  où  sont  incor- 
pores de  nombreux  récits  de  miracles  et  autres  histoires  édi- 
fiantes. J'en  connaissais  alors  deux  exemplaires  :  celui  de  la 
Bibliothèque  de  runiversîtéde  Cambridge  (Gg.  i.i)  et  celui  du 
Musée  britannique  (Addit.  26775),  Aucun  des  deux  n'offre  un 
texte  complet  :  le  premier  abrège  le  texte  en  certains  endroits  * 
et  de  plus  a  perdu  un  teuilleî  entre  les  ff.  252  et  253;  le 
second,  par  suite  de  mutilai  ions  du  m&.j  commence  au  troisième 

1 .  Méknj^is  Je  paUographiit  p.  194. 

2.  La  bonne  le^on  est  :  Oui  jûiis  un  prodonu.  Il  me  porsilt  superllu  de 
donner  des  variantes  à  ce  mauvais  texte  :  on  pourra  le  comparer  avec  les 
deux  éditions  mentionnées  plus  hâut. 

).  kofmnia^  XV,  196  et  suiv, 

4.  C'est  du  moins  ce  que  j'âi  cru  remarquer  en  comparant  ce  ms.  avec 
\m  autres.  De  plus,  Il  y  a  au  commencement  une  répétition.   La  rubrique. 


LES    MANUSCRITS    URANÇAIS    DE    CAMBRIDGE  29 

dimanche  de  TAvent,  et  est  aussi  incomplei  de  la  fin.  En  plus 
de  ces  deux  manuscrits,  j'avais  pu  établir,  grâce  à  quelques 
ver!>  cités  par  Th,  Wright  dans  son  livre  sur  le  Purgatoire  de 
saint  Patrice,  que  le  même  ouvrage  se  trouvait  dans  le  ms.  de 
Trinity  alors  considéré  comme  perdu  '♦  Mais  je  m*étaîs  trompé 
en  supposant  que  ce  manuscrit  contenait  tout  le  Miroir.  En 
réalité  il  n  en  contient  que  des  extraits,  dont  je  donnerai  tout  à 
rheure  l'indication  précise.  Cette  information  n'est  pas  la  seule 
que  j*aie  à  ajoutera  ma  notice  de  î88é»  Depuis  lors,  en  effet, 
j*ai  eu  connaissance  de  deux  nouveaux  manuscrits  (ce  ne  sont 
il  est  vrai  que  des  fragments)  du  même  poème.  L*un  appartient 
à  lu  bibliothèque  Ju  Chapitre  de  la  cathédrale  d'York,  l/autre 
nVaété  communique,  il  y  a  une  quinzaine  d'années,  par  un  géné- 
reux bibliophile,  feu  Eugène  Piot  ^.  Le  fragment  d'York,  coté 
lé  k,  14,  se  compose  de  six  feuillets  de  parchemin  à  deux 
colonnes  par  page  et  à  37  vers  par  colonne.  Il  contient  donc 
environ  SHo  vers.  L'écriture  est  de  la  seconde  moitié  du 
xur  siècle.  J'en  ai  préparé,  en  1887,  une  notice  suffisamment 
détaillée,  ainsi  que  d'autres  manuscrits  français  de  la  même 
bibliothèque.  Le  temps  m'a  manqué  jusqu'ici  pour  publier  ce 
travail.  Mais  je  profite  de  la  présente  occasion  pour  décrire  le 
fragment  du  Miroir,  Lors  même  qu'il  était  entier,  le  ms.  d*York 
n*a  jamais  contenu  le  texte  complet.  C'est  une  série  d'extraits 
tout  à  fait  analogues  à  ceux  que  renferme  le  ms.  de  Trinity 
Collège.  L  exposition  proprement  dite  de  Tévangile  dominical  a 
été  supprimée,  les  exemples  seuls  ont  été  conservés.  Le  frag- 
ment d'York  commence  ainsi  (premier  dimanche  de  TA  vent)  : 

h  ilk  UmpQTt  dixit  Jesm  titsdpuHs  suis  :  Ertmt  sigmi  ht  sok  ei  luna,  tk. 
[Luc.  XXI,  19]  r. 

Uns  cumllêrs  prudumc  estcîc  Qiianquc  il  poeit  t;sparnier, 

Ke  Deu  ara  ou  t  et  Deu  citrlheiL  Fors  sul  sun  cors  a  sustcnier 


iiprès  le  prologue,  est  ainsi  conçue  :  Dommka  prima  Aihtutus  Domitti,  mais 
Je  texte  qm  suit,  Cnm  aiipropitsquâssei  Jésus  Ifrôiolimis  d  vmisst't  Bdh/agc 
(Matth.  XX I^  1%  est  le  comniciKemetït  de  î'i^vangile  des  Hameaux,  et  le 
même  sermon  reparaît  plws  loin,  A  sa  vraie  place,  fol  t8o* 

K  ibU.^  p.  298. 

2.  Ce  fragment,  aisscjé  endommagé*  se  co  ni  pose  de  deux  feuïHets^  â  deux 
colonnes  par  pape  et  â  quar.intc-deux  vers  par  cuîonne,  Je  ne  sais  ce  <|a*il  est 
devenu.  J'en  ai  pris  copie* 

j*  Se  trouve  dans  le  nis.  de  runivcrsité  de  Cambridge  Gg*  i . i ,  fol    141  f. 


30  p.    MEYER 

£  ses  miïh  a  achater^ 

A  povres  soit  trcstut  duner* 

A  une  feîr  S€  purpcma  : 

«  Eissi\  w  fet  îl,  V  plusn*en  ira. 

Si  jeo  chai  en  langur 

Qui  me  (m^  pur  nient  sujyr? 

Si  jeo  devîenc  vielz  et  defreti 

Ki  me  dnrra  pur  nienç  cunreiz  ? 

Mieuz  me  vak  aukes  retenir 

Dunt  jeo  nie  puisse  susienir  : 

Que  qu'en  vienge  [ne]  que  que  nun, 

Kt  rien  ne  tient  multest  bricun. 

Tut  n'ai  femme,  n'ai  enfaunz, 

Mes  aveirs  me  serra  guaranz,  » 

Cnm  out  pensé  si  Tad  fet  : 

Deners  acoilt,  dcners  acreit  ; 


Tant  en  fait»  si  cum  It  p[l]ot, 
K  empli  en  ad  un  grant  pot. 
Ne  demurro  (iic)  pas  lungement 
Ke  Deti  n'en  pmt  vengement  : 
Uns  mais  en  l'autre  pié  est  feruz  \ 
Dunt  niylt  est  raaz  et  esperduz. 
Ne  pot  uvçrer,  ne  pot  aler  ; 
A  Tun  pié  pot  a  peine  ester. 
Mires  en  ad  plusurs  mandé  ; 
De  sun  aver  niult  ad  dune. 
Ke  qu'il  promet,  que  qu'il  dunt, 
Cum  pur  garir  rien  ne  li  funt. 
En  mires  tant  despent  li  soz 
Que  trestut  est  voist  *  li  poz, 
Ke  cil  que  Deu  ne  volt  aider 
Pur  nient  se  fera  meciner... 


Suivent  les  exemples  du  dlni anche  de  la  Quinquagésime,  du 
jeudi  après  le  premier  dimanche  de  carême,  du  troisième  et 
du  quatrième  dimanche  de  carême,  du  dimanche  de  ta  Passion, 
du  deuxième  dimanche  après  Pâques,  ce  dernier  incomplet 
par  suite  de  Tétat  du  manuscrit.  Je  transcris  ici  ce  qui  subsiste 
de  cet  exemple.  On  pourra  comparer  ce  nouveau  texte  avec  le 
morceau  correspondant  du  ms.  de  T Univers! té  de  Cambridge 
que  j'ai  publié  dans  la  Romania^  XV,  305.  Les  variantes  don- 
nées à  cet  endroit  montrent  que  le  ms*  dTork  se  rapproche 
beaucoup  du  ms.  de  Londres  : 

Ego  mm  pasIûT  hnus^  eU,  [Jo.  X,  u)  CfûL  €  c). 


Dunt  avint  jadis  a  un  prestre, 
Qtjî  de  Cantcrbire  ï  esioit  mestre. 
Quant  Itinges  i  ont  cum  versé 
4  Si  s*est  çuntre  lit  chuché  ; 
El  quant  il  quida  dévier. 


Devani  lui  vînt  un  bachcler; 
La  mein  li  tend),  si  li  dit  : 
8  ff  Vien  tci  ici  ad  meî  »,ct  il  si  fist, 
U  ne  vobit  u  ne  dcîgnast, 
Cuvint  lui  qu'ove  lui  alast. 


ï,  Mîeui,  dans  le  ms.  de  r Université,  %i$i, 
%,  l\  fout  corriger /ffd* 

5.  Cette  leçon,  évidemment  mauvaise,  se  retrouve  (voir  plus  loin  p.  ^aX 
dans  le  m  s,  de  Trînîty,  Mieux  dans  le  m$,  de  rUniversité  ;  Vn  mam  H  ui  0/ 

4.  MîeuKf  ms.  del'Univ.^î'wtd^^. 

%.  Le  ms.  de  Trintty  a  b  même  faute  {Cankrbury).  La  bonne  leçon  serait 
Cfuirtshufi  (Burgh  Castle). 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS    DE  CAMBRIDGE 


3> 


E  en  plu  surs  litis  ramena 
12  E  multes  choses  lui  mustra. 
D'enfer  M  mustra  le  parfunt 
E  les  poiûes  <ja1locs  stint  ; 
E  puis  h  mena  vers  le  ciel 
i6  U  il  vit  e  iruva  tut  eU 

Mes,  quant  al  ciel  aprocercnt. 
En  Feir  un  feu  muk  grant  truve- 


E  Tun  sur  Tautrc  ad  crorcs  {sic) 
[raoh  ; 
Od  crorcs(if()  ardanz,  mèsferins  ' 
[erent, 
40  Les  aimes  sanz  merci  geterent  : 
Nu  le  n'esteit  par  sei  several* 
Mes  chescune  ert  a  attre  ma)  ; 
Chescune  ert  a  autre  peîne  ; 


[rem,   44  Si  crièrent  a  dure  aleine, 
Li  icus  ert  a  merveilles  grant  Dd  cri,  del  plur,  del  guaiement 


20  E  mult  horible,  mult  ardant. 

Li  guiurs  est  iorcs  entrez 

E  li  presteres  s'est  arestex. 

Einz  el  feu  li  guiur  entra, 
24  Mes  unques  li  feu  nel  tucha. 

A  tant  reguarda  il  le  p  œstre  ; 

Si    li   dit   ;   ^   Vien    avant. 


lert  li  presires  en  grant  turment, 
duant  il  vint  eî  feu  bien  avant, 
4 S  Est  vus  un  deble  a  fort  curant. 
Les  oiU  ardanz  mult  ruelout 
E  de  sa  bouche  eschivout  ^  ; 
Un  aime  arda  ni  en  stin  crorc  tient 
danz   52  E  versk  prestre  grant  curs  vient  J, 


mesire  ;  {d) 
Jn  de  cest  fey  ne  te  en  îe  pis 

2B  Fars  sul  de  tant  cum  tu  as  mespds  : 
Tant  ardera^  einz  en  icest  feu 
Cum  tu  as  pris  et  nient  rendu.  » 
Muk  a  envy  e  mult  pensis 

p  Li  prestres  eiuï  d  feu  s'est  mis; 
Li  feu  de  tûtes  parz  csteii. 
Mes  unques  point  ne  [V]  adeseit» 
Tut  cel  feu  vit  îl  repkni 

|6  D'almes  ardantes  od  grant  cri; 
E  li  debles  les  turmentolt 


Et  criei  fort  en  sun  esleis  : 
te  Di  va  î  treitre,  fcl  malvais, 
Prenc  celui  que  tu  as  tué.  b 

56  Si  ad  sur  lui  Talme  rue. 

L*aJme  descendi  sur  le  prestre, 
E  si  li  art  Tespaule  destre, 
L'ar^un  a  feit  mal  li  feseit, 

60  Geo  U  est  vis  mûrir  deveit  ; 
Qlje  d'arsun  que  d'e^ipuntaîllc 
La  quida  remeindre  saui  faille- 
(Lt  resU  manque.) 


Le  fragment  Piot,  qui  paraît  écrit  au  commencement  du 
XIV*  siècle,  appanenait  à  un  manuscrit  de  Touvrage  complet. 
Les  morceaux  qu'il  renferme  correspondent  aux  feuillets  198 
c-199  €  et  2ri  è-liz  i  du  nis.  de  TUniversité  de  Cambridge* 
Je  ne  juge   point    utile  d'en  citer  aucun  extrait. 

Revenons  maintenant  a  notre  manuscrit  de  Trinity  Collège. 
Il  nous  offre  à  peu  près  les  mêmes  extraits  que  le  fragment 
d'York  et  commence  de  même.  Seulement  le  texte  est  fort  cor- 
rompu. Je  donnerai  en  entier  le  premier  morceau  et  les  pre- 
miers vers  des  suivants. 


I.  Cest  bien/i*rm^et  non  fàsferms  ;  ms.  de  Londres  dé  Jtr,  —2.  îl  y  a 
plutôt  nchinout.  ^  |.  tltaut  Unt-vint;  même  faute  dans  le  ms.  de  Londres^ 


24  P-    MEYER 

plus  haut,  de  ne  pouvoir  consulter  te  ms.  de  Trinîty,  déjà 
disparu.  Le  ms.  de  TArsenal  a  été  reproduit  par  Monmerqué, 
en  1834,  pour  la  Société  des  Bibliophiles  français,  qui,  à  cette 
époque,  tirait  ses  publications  h  trente  ou  quarante  exem- 
plaires ' . 

Si  Delius  n'a  pu  utiliser  le  texte  du  ms,  de  Trinity,  son  édi- 
tion n'y  a  pas  beaucoup  perdu,  car  la  leçon  qu'offre  ce  ms.  est 
incomplète^  et  bien  souvent  fautive.  On  en  jugera  par  le 
spécimen  qui  suit.  Pour  faciliter  la  comparaison,  je  joins,  entre 
(  ),  la  concordance  avec  Fédition.  On  verra  que  le  prologue 
manque  à  peu  prés  complètement  (les  deux  premiers  vers  sont 
l'œuvre  d'un  copiste),  et  que  beaucoup  de  rimes  sont  déna- 
turées au  point  que,  si  un  n'avaîr  le  secours  des  autres  manu- 
scrits, on  pourrait  croire  que  le  poème  a  été  composé  par  un 
Anglais  do  xiii*  siècle. 


De  seint  Nicholas  ai  pensé,  (f.  48) 
Un  5«im  de  grant  autorité. 
En  romauns  dïrrum  un  périt   (40) 
4  De  ceo  ke  le  latîn  nous  dit, 
Ke  lî  lai  le  puysent  a[n]tefidrc 

, . . , ,  ^  I 

De  Pâtre  fti  né,  de  une  ctté 
B  Noble  e  riche  de  antiquité  ; 
Mes  puys  est  la  chose  empiré, 
A  bon  pnjf  tut  amenusé. 
Père  e  mère  out  de  grant  hautesse, 

12  De  parenté  et  de  richesse.  (|i) 
Asez  urent  or  ç  argent 
E  moût  vjvai[e]nt  seintemeot^ 
E  tel  enfaunt  vodreient  aver 

16  Dount  il  puyient  fere  lour  eir, 
Kent  soûl  de  bur  manauntise 
Mes  de  tut  lur  conquest  en  autre 
[guïse. 


Tel  fu  cum  U  desiraient;  (sB) 
20  Nkholas  par  noun  l*a pelaient* 

Ne  eurent  enfaunt  quesoul  cestuî  : 

Taunt  Furent  plus  cher  aumbeduî. 

Petit  fu  a  leure  mis,  (68) 
34  Par  grant  entente  fu  aprb. 

Encore  petit  en  berz  jesout,  (62) 

De  soûl  la  mamelle  vivout. 

Si  junout  pur  Deu  amour  : 
28  Ne  leitout  que  une  fèz  le  jour. 

Al  niegredi  e  al  vendredi;  (6é) 

Si  U  out  De  us  de  sa  grâce  enipR. 

Quant  plus  criist,  plus  amenda, 
p  Ke  plus  servi,  Deus  plus  Tama. 

Lan'ertbachilers  tut  t'ourmez,(72) 

De  taunt  de  bonntés  aloses. 

Sun  père  prist  definemen 
56  E  sa  mère  en  se  ment  ■ 

De  Nichoïas  firent  lour  eîr, 


I.  Le  volume  de  Monmerqué  contient  quelques  autres  icKtcs  relatifs  à 
saint  Nicolas,  notamment  une  v<:rsion  en  prose* 
2    Elle  omet  notam  ment  les  v  ers  1  j  s  o- 1 4  j  7 , 
|.  Levers  omis  est»  dans  le  ms.  Douce,  Qui  m  ^fvtttt  klin  miittdn. 


LES  MANUSCRITS    FRANÇAIS   DE  CAMBRIDGE 


25 


De  ^uam  kë  il  purraiÉnt  aver; 
E  NichoUs  tui  départi, 
40  TereSp  mesouns,  tm  se  feus  vendi  ; 
Si  dona  tut  a  povre  gent,  (h) 
Ne  fisi  autre  reposetnent.  (Si) 

Uns   povrcs   hôume  iluc    maneii 
44  Kc  rkhes  jadis  esté  aveil, 

Mes  en  poverré  en  venuz  ; 

De  ceus  avunî  plusours  vuï 

Ke  de  graut  a  ver  ke  li  avdent 
48  En  povené  grant  deâc^ndeient. 


Teus  i  a  ke  de  po verte 

Sount  venuz  en  gram  pkntê*  (89) 

Ce  povre  hou  me  out  trcb  pu  celés, 
52  Treis  soue[s]  files  aseï  btlcs; 

Entre  eus  katre  oc  tirent  kc 

[prendre, 

Ne  a  engager  ne  a  despcndre  ; 

De  vivre  conseil  ne  trovdent 
^6  Si  a  bordel'  nen  aleicni* 

Sein  Nichplas  pité  en  prist;  {98) 

Ore  oicz  cum  faitemeni  le  fist. 


Voici  un  autre  morceau  que  je  cite  parce  qu'il  contient  une 
série  de  %'ers  qui  manquent  dans  le  ms*  Douce,  entre  les  vers 
1283  et  1284  de  Tédition  de  Delius  *  ; 

Grand  dol avett  parla  meson  ;  (f,  55 4) 
Kj  dolem  se  le  perc  nun?       (i^JS) 
«  LasI  dolent  ->,  fet  il,  «  cheitîfî 
Ne  me  en  chou!  si  mus  ne  vif, 
Quant  si  tost  ai  ni  un  fia  perdu. 
H  Dell  s!  si  poy  je!  ai  eu. 
E  Deust  tau  lit  fu  lé  quand  jel  oyi 
E  Deusî  pur  que»  me  dura  si  poy  ? 
Ma  joie  me  a  durrc  petit. 
Ore  ai  grant  dol  ;  veirs  dist  ki  ce  iist  : 
Après  grant  nsgraot  plur;  (1282) 
Après  grant  joie  graunt  tristuri  ; 
Après  graunt  gaine  grant  do  mage; 
Après  grant  sauncté  vent  grant  rage. 
Uocore  uy  matin  al  jur 
Nen  avey  mal  ne  dolor; 


Grant  mal  m*est  avenu  en  poy  d'oure 

Deus  î  ke  pecché  m*est  coru  sure  I 

Nen  avei  unkes  nul  enfaunt 

For  sul  celi,  sî  H  amai  taunt. 

Perdu  ai  mun  ût  e  mun  herj 

Ne  (jul  jamès  nul  autre  aver. 

Beiï  ûz,  beu  chers,  launi  mar  vus  vi  I 

Mon,  ke  fet  (sic)  tu  ?  ven,  si  me  oscî; 

Mort,  car  me  prcns;  si  me  rent 

Celui  dunt  ai  le  quer  dolent. 

Beu  ÛE,  de  ceo  sut  angusus 

Ke  je  ne  pu  se  mtirir  pur  vus, 

Ey  !  sein  Kicholas,  kc  en  fray 

De  mon  enfaunt  ke  perdu  ay?  n 

Li  père  e  h  mère  ploreient,      U3S4) 

Pletnent  sai,  si  paumeicot.   . ,  , . . 


I*  Les  autres  mss.  donnent  5*f  m  galke  (Douce),  Si  a  galkt  (B,  N.  fr. 
902),  Se  qI  gii^liz  (Digby).  La  bonne  leçoû  S'a  gaelise  ne  se  trouve  que  dans 
le  ms.  de  T Arsenal  (donnée  en  variante  par  Mommerqué,  p.  Î05);  elle  avaii 
été  restituée  par  M.  Tobler  (/î^w/uiua,  II,  239), 

2,  Ils  se  trouvent  aussi  daas  les  autres  manuscrits,  par  ex.  dans  B.  N*  fr, 
902,  foK  cxxx  t.  et  dans  Digby.  Delius  a  eu  tort  de  les  considérer  comme 
une  addition  postérieure. 

l.  Ce  proverbe  se  rencontre  fréquemment,  avec  des  variantes  :  Le  Roux 
de  Lincy,  Livrr  da prcv.^  2*  éd.,  0^  240,  472. 


ïtte. 


P,    MBYER 

plus  haut^  de  ne  pouvoir  consulter  le  ms.  de  Trinî 
disparu.  Le  ms.  de  î'Arsenal  a  été  reproduit  par  Monmerqu 
en  1S34,  pour  la  Société  des  Bihliophîles  français j  qui,  à  cette 
époque,   tirait  ses  publications  à  trente  ou  quarante   exe 
plaires  ^ 

Si  Delius  n  a  pu  utiliser  le  texte  du  ms,  de  Trînîty,  son  édi- 
tion n*y  a  pas  beaucoup  perdu,  car  la  leçon  qu'offre  ce  ms.  est 
incomplète'  et  bien  souvent  fautive.  On  en  jugera  par  le 
spécimen  qui  suit.  Pour  faciliter  la  comparaison,  je  joins,  entre 
(  ),  la  concordance  avec  Tédition,  On  verra  que  le  prologue 
manque  à  peu  près  complètement  (les  deux  premiers  vers  sont 
l'œuvre  d*un  copiste),  et  que  beaucoup  de  rimes  sont  déna^ 
turées  au  point  que,  si  on  n'avait  le  secours  des  autres  manu- 
scrits, on  pourrait  croire  que  le  poème  a  été  composé  par  ui 
Anglais  du  xni*  siècle. 


De  selnt  Nicholas  ai  pensé  »  (f.  48) 

Un  seint  de  grant  autorité* 

En  romauns  dirrum  un  petit  (40) 

4  De  cco  ke  le  latin  nous  dit, 
Ke  11  Iti  le  puysent  afnJiendrÊ 

,..___.___ j 

De  Pâtre  fu  né,  de  une  cité 

8  Noble  e  riche  de  antiquité  ; 
Mes  pays  est  h  chose  empiré, 
A  bon  pruf  tut  amenusé* 
Père  e  mère  ont  de  grani  hautesse, 

12  De  paremè  et  de  richesse.  (Sïj 
Ase^  urent  or  e  argent 
E  moût  vivai[e}nt  sein  terne  ni, 
E  tel  enfaaut  vodreient  a  ver 

16  Dount  il  pu  y  sent  fere  lour  eîr, 
Nent  soûl  de  tour  manauntise 
Mes  de  tut  lur  conquest  en  aotre 
[guise. 


Tel  fu  cum  il  desiraient;  (58) 
20  Nicholas  par  no  un  Ta  pelaient. 

Ne  curent  etiraunt  que  soûl  çestui  ; 

Tauni  Turent  plus  chtr  aumbedu^^ 

Petit  fu  a  lettre  mis,  (68) 
24  Par  grant  entente  fu  apris* 

Encore  petit  i^n  bér/  jesout,(6l) 

De  soûl  la  mamelle  vivout. 

Sî  junûut  pur  Deu  amour: 
28  Ne  leitaut  que  une  fèz  le  jour» 

Al  megredi  e  al  vendredi;  (66) 

Si  H  out  Deu  s  de  sa  grâce  empli. 

Quant  pluscrust,  plus  amenda, 
32  Ke  plus  servie  Deus  plus  Tama, 

Lan'enbachikrs  tut  fourmeï,(72) 

De  lautit  de  bountés  aloses. 

Sun  père  prist  definemen 
|6  E  sa.  mcre  ensement  ; 

De  Nicholas  firent  ïour  cïr. 


I,  Le  volume  de  Monmerqué  cooticni  quelques  autres  textes  relaiiis 
saint  Nicolas»  notamment  une  version  en  prose> 
2    Elle  omet  notam  men  t  ïes  vers  1350-1457, 
5,  Le  vers  omis  est,  dans  le  ms.  Douce,  Qui  nestvfnt  iaiin  mUndri. 


LES   MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE  CAMBRIDGE 


2S 


De  quam  ke  il  purraîcni  a  ver; 
E  Nicholâs  lui  départi, 
40  TercSj  mcsouns»  tut  sa  feus  vendi  ■ 
Si  doua  lUt  a  pûvre  gent,  (h) 
No  fisc  autre  reposera  cm.  (81) 

Uns  povres   ho  urne  iluc    maneU 
44  Ke  fiches  jadis  esté  aveit. 

Mes  en  poverté  ert  venuit  ; 

De  ccus  avum  plusours  vnz 

Ke  de  gram  aver  ke  il  aveiem 
48  En  povenê  graut  dcsceodeiept. 


Tcus  i  a  ke  de  poverté 

Sount  venuz  en  grant  pknté.  (89) 

Ce  povre  houme  oui  trcis  puceïes, 
52  Treis  soue{s]  files  ascz  bêles; 

Entre  eus  katre  uc  urent  ke 

[prendre» 

Ne  a  engager  ne  a  despendre  ; 

De  vivre  conseil  ne  croveient 
56  Si  a  bordel»  nen  aleient. 

Sein  Niehoïas  pilé  en  prist;  (98) 

Ore  ùkt  curafaiteraent  le  fist. 


Voici  un  autre  morctrau  que  je  cite  parce  qu'il  contient  une 
série  de  vers  qui  manquent  dans  le  ms.  Douce,  entre  les  vers 
1283  et  1284  de  Tédition  de  Delius  ^  : 


Grand  dol  aveit  par  la  meson  ;  (f*  $  s  tQ 
Ki  dolem  se  le  père  nun  ?        (127S) 
«I  Lasî  dolent  -%  fet  il,  a  cheitifl 
Ne  me  en  chout  si  mes  ne  vif^ 
Quant  si  lost  ai  niun  ûz  perdu. 
E  Deus  I  si  poy  jel  ai  eu» 
E  Deusl  taunt  fu  \é  quand  jel  oyl 
E  Deus  1  pur  quci  me  dura  si  poy  ? 
Ma  joie  me  a  durrè  petit, 
Ore  ai  grant  dol  ;  veîrs  dist  ki  ce  iisi  : 
Après  grani  risgranc  plur;  (1381) 
Après  grant  joie  i^raunt  tristur  ï  ; 
Après  gratint  gaine  grant  domage; 
Apres  grant  saune  té  vent  grant  rage. 
Uncore  uy  matin  al  jur 
Ken  avey  mal  ne  dolor; 


Grant  mal  m*e5t  avenwen  poy  d'oiire 

Deus  !  ke  pecché  m* est  coru  sure  I 

Nen  avei  unkes  nul  enfaunt 

For  sul  celi,  si  li  amaî  taunt* 

Perdu  ai  mun  f^r,  e  miin  hcr; 

Ne  qui  jamès  nul  autre  a  ver. 

Beu  fii,  beu  chers,  taum  mar  vus  vi  \ 

Mort,  ke  fet  (jïV)  tu?  ven.si  me  oscî; 

Mon,  car  me  prens;  si  me  rent 

Celui  dunt  ai  le  quer  dolent. 

Beu  liz,  de  ceo  sui  angusus 

Ke  je  ne  pu  se  mûrir  pur  vus. 

Ey  î  sein  Nichai  as,  ke  en  fray 

De  mon  enfaunt  ke  perdu  ay?  *> 

Li  père  e  la  mère  ploreient,      (1284) 

Pleincnt  sai,  si  paumeient.   . .  , .  - 


I .  Les  autres  mss,  donnent  Se  en  gaïice  (Douce),  Si  a  galm  (B,  N.  fr, 
90a),  51f  aigndii  (Digby).  La  bonne  leçon  S'a  goilise  ne  se  trouve  que  dans 
le  ms.  de  T Arsenal  (donnée  en  variante  par  Mommerqué,  p.  305)  ;  elle  avait 
été  restituée  par  M.  Tohkr  (Rotna nia ^  II,  239). 

1,  Ils  se  trouvent  aussi  dans  les  autres  manuscrits,  par  c;^.  dans  B>  N.  fr. 
902,  fol.  cxxv,  et  dans  Digby.  Delius  a  eu  ton  de  les  considérer  comme 
une  addition  postérieure. 

3.  Ce  proverbe  $e  rencontre  fréquemment^  avec  des  variantes  :  Le  Roux 
de  Lincy,  Livre  dei  pwv.^  2^  éd.,  U,  140»  472. 


34  1'     MEYER 

plus  haut,  de  ne  pouvoir  consulter  le  ms.  de  Trinity,  déjà 
disparu.  Le  ms,  de  TArsenal  a  été  reproduit  par  Morimerqué, 
en  1834,  pour  la  Société  des  Bibliophiles  français,  qui,  à  cette 
époque,  tirait  ses  publications  à  trente  ou  quarante  exem- 
plaires  ^ 

Si  Delius  n*a  pu  utiliser  le  texte  du  ms.  de  Trinîty,  son  édi- 
tion n'y  a  pas  beaucoup  perdu,  car  la  leçon  qu  offre  ce  ms.  est 
incomplète'  et  bien  souvent  fautive,  On  en  jugera  par  le 
spécimen  qui  suit.  Pour  faciliter  la  comparaison,  je  joins,  entre 
(  )j  la  concordance  avec  l'édition*  On  verra  que  le  prologue 
manque  à  peu  près  complètement  (les  deux  premiers  vers  sont 
Tœuvre  d*un  copiste),  et  que  beaucoup  de  rimes  sont  déna- 
turées au  point  que,  si  on  n'avait  le  secours  des  autres  manu- 
scrits, on  pourrait  croire  que  le  poème  a  été  composé  par  ue 
Anglais  du  xuï^  siècle. 


De  seînt  Nichotas  ai  pensè^  (f.  48) 

Un  s^^int  de  grant  autorité. 

En  romaups  dirrum  un  petit  (40) 

4  De  ceo  ke  le  latin  nous  dit, 
Ke  li  lai  le  puysent  afnjtendre 

De  Pâtre  fu  né,  de  une  cité 

5  Noble  e  riche  de  antiquité  ; 
Mes  puvs  est  la  chose  empiré, 
A  bon  pruf  tut  amcnusé. 

Père  e  mère  out  de  gnuit  hautesse» 
12  De  paremé  ei  de  ricliesse.  (51) 
Ase2  urent  or  e  argent 
E  moût  vivai[e]nt  setntement, 
E  tel  eafaunl  vodrcicnt  aver 
ié  Doum  il  puysent  fere  lour  eir, 
Nem  soûl  de  lour  manauntise 
Mes  de  tut  fur  conqucsi  en  autre 
[guise. 


Tel  fu  cum  il  desiraient;  (ç8) 

20  NJcholas  par  noun  rapelaient* 
Ne  eurent  enfauni  que  soûl  cestuî  : 
Tauni  Turem  plus  cheraumbedu^ 
Petit  fu  a  lettre  mis,  (68) 

34  Par  grant  entente  fu  apris. 
Encore  petit  en  hkrr.  jesout,  (62) 
De  soûl  la  mamelle  vivout. 
Si  juno'Jt  pur  Dcu  amour: 

28  Ne  leîtout  qiâ^  une  fèi  le  jour, 
Al  megredi  e  al  vendredi;  (66) 
Si  lï  out  Deus  de  sa  grâce  empli. 
Quant  plus  crus!,  plus  amenda, 

j2  Ke  plus  servi,  Deus  plus  i*ama. 
La  nVrt  bachikrs  tut  lburmez,(7i 
De  tau  ni  Je  bountés  aloses. 
Sun  père  prist  definemen 

36  E  sa  mère  ensement  ; 

De  Nicbolas  firent  iour  eir. 


I,  Le  volume  de  Monroerqué  contient  quelques  autres   textes  relatifs 
saint  Nicolas,  nota  m  ment  une  version  en  prose, 
2    Elle  omet  notamment  les  vers  1^50-1457, 
|.  Le  vers  omis  est,  dans  le  ms.  Doixc&t  Qui  m  ^fvfftl  klin  mkftdn^ 


LES  MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE  CAMBRIDGE 


2Î 


De  quant  W  il  purraîeni  avcr; 
E  Nicholas  tut  ileparti, 
40  Tcres,  mesouns.lui  se  feus  vendi; 
Si  doua  tut  a  povre  gent,  (h) 
Ne  fist  autre  reposenitnt.  (81) 

Uns   povres    houme  îIuc    mancil 

44  Ke  rkbes  jadis  esté  aveît, 
Mes  en  po verte  en  venii^  ; 
De  ceus  avum  plusours  vuz 
Kc  de  grant  aver  ke  il  aveient 

45  En  po  verte  grant  ^escendeient. 


Teus  î  a  ke  de  poverté 

Sou  ni  \  enuz  en  grant  plenté.  (89) 

Ce  povre  houme  out  treis  pucdes, 
52  Treis  soue[s]  Ttles  iiscz  bêles; 

Kntre  eus  katre  ne  urent  ke 

[prendre, 

Ne  a  engager  ne  a  despendre  ; 

De  vivre  conseil  ne  troveient 
56  Si  a  bordel*  nen  aleîent* 

Sein  Nicholas  pitéen  pnst;  {98) 

Ore  oie/  eu  m  faitemem  le  (îst. 


Voici  un  autre  morceau  que  je  cite  parce  qu'il  contient  une 
série  de  %ens  qui  manquent  dans  le  ms*  Douce,  entre  les  vers 
1283  et  1284  de  Tédition  de  Delius  *  : 


Grand  dol  aveit  pr  la  meson  ;  (f.  S  5  ^^0 
Ki  doleni  se  le  père  nun  ?        (1275) 
m  l^sl  dolent  M,  fet  U»  "  cheitif! 
Kc  me  en  chout  si  mes  ne  vif, 
Qjuant  si  tost  ai  mun  ûz  perdu. 
£  Deusl  si  poy  jel  ai  eu. 
E  Deus!  tauiu  fu  lé  quand  jel  oyi 
E  Dcusï  pur  quel  me  dura  si  poy  ? 
Ma  Joie  me  a  durré  petit. 
Ore  ai  grant  dol  ;  veirs  dist  ki  ce  Jîst  : 
Après  gr^nt  risgraDt  plur;  (1282) 
Après  grant  joie  graunt  tristur  i  ; 
Après  graunt  gaine  grant  domage  ; 
Après  grani  sauncté  vent  grant  rage, 
Uncote  uy  matin  al  jur 
Nen  avey  mal  ne  dolor; 


Grant  m  aï  m'est  avetiu  en  poy  d'oure 

Deus  I  ke  pecché  m'est  coru  sure  1 

Nen  avei  unkes  nul  enfaum 

For  sut  celi,  si  lî  amai  taunl. 

Perdu  ai  mun  fiz  e  mun  her; 

Ne  qui  jamès  nul  autre  aver. 

Bel)  ûZf  beii  chers,  taunt  roar  vus  vî  I 

Mon,  ke  fet  (sk)  tu?  ven.si  me  oscî; 

Mon,  car  me  prens;  si  me  rent 

Celui  dunt  ai  le  quer  dolent. 

fieu  ûz,  de  ceo  sui  angusus 

Ke  je  ne  puse  mûrir  pur  vus. 

Ey  !  sein  Ntchoiis,  ke  et^  fray 

De  mon  enfaunt  ke  perdu  ay?  « 

Li  père  e  la  mère  ploreient,      (1184) 

Pleiaeni  sai,  si  paumeient 


t ,  Les  autres  mss.  donnent  Se  m  galicé  (Douce),  Si  a  galice  (B,  N.  fr. 
902),  Se  al  giuîii  (Digby).  La  bonne  leçon  S'a  ^attise  ne  se  trouve  que  dans 
le  ms.  de  l'Arsenal  (donnée  en  variante  par  Mommerquê,  p.  505)  ;  elle  avait 
été  restituée  par  M.  Tobler  {Rôntania^  11^  339). 

3»  Ils  se  trouvent  aussi  dans  les  autres  manuscrits,  par  ex.  dans  B.  N,  fr, 
902,  foL  cxxv  f  et  dans  Dighy.  Delius  a  eu  tort  de  les  consid(ïrer  comme 
UDe  addition  postérieure, 

5.  Ce  proverbe  se  rencontre  fréquemment,  avec  des  variantes  :  Le  Roux 
de  Lincy,  Livre  du  pfov,,  2«  éd.^  II,  240,  472, 


38  P. 

3  Ke  ben  ne  fet,  tôt  se  repent  ; 
E  si  frews  ensement  ; 

Si  vus  ne  apemet  ard  u  engin, 
Vus  en  averet  maie  fin. 

4  Ky  ke  iveresce  e  glotonie 
Usit  e  suit  par  tute  sa  vie, 
A  la  fin  ert  tard  a  dire  : 

U  est  li  mire,  u  est  li  sire? 

5  Lesset  tute[s]  ribaudies 
E  pecchés  e  vilaynies. 
Car  la  joye  poi  dura, 
Mes  li  peine  grant  sera. 

6  Ment  un  franc  dewent  vilain 
De  dis,  de  fès  et  de  reclaim, 
Ne  mie  pur  defaute  de  nature, 
Mè[s]  pur  defaute  de  nurture. 

7  Lesset  orgul  sur  tute  ren, 
Car  ele  hunit  vertue  e  ben  ; 
Le  sage  hume  vus  gerpera 

E  maluré  vus  tendera. 

8  Lescés  voster  avant  er 
E  noveleries  cunter, 
Ne  ne  aymit  losenger 
Ne  hume  ke  est  enginer. 


MEYER 

9  Ment  hum  ki  est  de  grant  gainz 
Ki  a  ver  est  e  vilain, 
E  quid  estre  un  sage  hum, 
Si  est  estapé  bricun. 

10  Ne  seet  lechur  ne  glutun  (fr). 
Ne  avantur  ne  felun, 

Kar  Jhesu  Crist  omnipotent 
Het  péchés  e  maie  gent. 

11  Ki  ke  est  avers,  par  ma  fey, 
Si  cum  ens  nos  liveris  vey, 
For  si  isci  ne  se  repent, 
Sera  dampné  verament. 

12  Ky  ke  vuit  sut  (sic)  de  clergie. 
Il  dut  lescer  sa  folie, 

Mè[s]  ke  entre  si  e  Paris 
N'i  ust  acun  si  sutils. 

13  Ami,  ne  sehet  pas  pereceos 
Ne  trichur  ne  irus, 

Car  checun  de  sest  pecchés 
Avérât  maie  destinée. 

14  Si  vus  peccatis,  fay  penance, 
Ke  vus  puchés  san  dutance 
Mûrir  quant  Deu  plera. 
Saches  ke  ceo  vus  sauvera. 


7.  Poème  sur  la  Passion.  —  On  connaît  plusieurs  poèmes 
qui  ont  pour  sujet  la  passion  du  Christ,  mais  celui-ci  n'a  pas 
encore  été  signalé.  Il  est  médiocre,  et  la  copie  est  fort  mauvaise. 
Aussi  me  bornerai-je  à  en  transcrire  deux  courts  extraits  :  le 
commencement  et  la  fin  ' . 


Seignurs,  plaist  vus  [a]  cscuter  (f.  74) 
Cum  Deus  wint  en  terre   pur  nus 
[sauver? 
Cet  devum  ducement  oïr 


4  Si  nus  a  lu  volum  venir. 
Cet  munde  esteit  tuz  perduz. 
Que  *  Deu  n'i  esteit  ci  venuz  ; 
Ainz  laumes  tut  adessé  ) 


I .  J'avais  d'abord  supposé  que  ce  récit  était  un  dernier  extrait  du  Miroir  qui 
aurait  été  déplacé,  mais  j'ai  vérifié,  à  l'aide  du  ms.  de  l'Université  de  Cam- 
bridge, que,  dans  le  Miroir,  le  récit  de  la  Passion  est  tout  autrement  rédigé. 


2.  Que,  corr.  Se} 

3.  SiCy  corr.  A,  la  fumes  /.  adossé} 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE    CAMBRIDGE  39 

8  Déguerpi  et  deshonoré,  Par  aumoines  e  orisuns 

Quant  li  pius  Deus  nus  visita,  De  aime,  de  cors  afflicciuns. 

Pur  sa  duçur,  qui  nos  cria.  Unques  ne  fit  un  sul  pecché  : 

En  tere  vint  pur  nostre  amur;  28  Pur  Ie[s]  noz  fud  crucifié. 

12  Mut  devum  amer  tel  seignur.  Sil  le  requit  humblement», 

Char  prist  de  la  Vergine  pucele;  Uncore  le  fei\  il  ensement. 

Sa  mère  en  fit  ;  ele  ert  ancele.  Cil  qui  sun  essample  siuverunt 

Veez  cum  grant  humilité,  32  E  tent  sa  vie  ja  n'i  faudrunt*. 

16  Quel  duçur  e  quel  pité! 

Qjje  Deus  hume  pur  nus  dewint,  Ore  escutet  cum  Deus  vint  en 

En  après  mort  en  sustint;  [Jérusalem, 

Ne  se  poet  plus  en  *  humilier  ;  Ceo  est  la  cité  de  Bethléem  $  ; 

20  Tant  le  devum  amer'  plus  cher.  La  cité  vit,  si  la  gardât, 

Trente  deus  annz  e  un  poi  plus  36  Dous  disciples  i  enveat  :  (b) 
Pu  en  cet  cecle  Crit  Jésus  «  Alet  »,  dist  il,  «  en  cel  chastel, 

Pur  ensample  e  pur  doctriner  Un  anne  e  un  asniel 

24  Cum  nus  devum  a  lui  aler  Qpe  vus  trov[er]ez  m'amenet... 

Voici  la  fin,  où  l'on  reconnaît  le  récit  de  saint  Matthieu, 
XXVII,  62  et  suiv.  : 

Li  felun  s'asemblerent,  (f.  80  c)  Ignele  pas  si  dormeient. 

Vindrent  a  Pilate,  si  li  demanderunt  Al  ters  jur  si  leva  sus 

Que  le  sépulcre  gardast,  Nostre  Sire  rei  Jhesus, 

Que  houme  Jhesu  nen  emblast,  A  ses  apostles  s'aparut, 

Kar  dune,  dient,  serreit  le  errur  Quarante  jurs  od  eus  fu  ; 

Hastivement,  mut  peiur  *  :  Si  lur  mustrat  la  novele  lei, 

a  Jeo  vus  comand  quel  gardez  Puis  les  baisât  checun  parsei.     • 

Autresi  ben  cum  vus  savez.  »  Issi  nus  puss'il  sauver 

El  cil  qui  veiler  i  deveient  E  [a]  sa  glorie  amener  !  Amen. 

8.    Maximes  de  Marie-Madeleine.   —  Les   douze  vers  qui 
occupent  une  partie  de  la  dernière  colonne  du  feuillet  80  ne 


1.  Suppr.  en. 

2.  Corr.  aver. 

3.  Ce  vers  se  rattache  mal  avec  ce  qui  précède;  peut-être  le  copiste  a-t-il 
omis  une  paire  de  vers,  ou  davantage. 

4.  Sic;  on  pourrait  supprimer  tent. 

5.  Ces  deux  vers  sont  inadmissibles,  non  seulement  parce  que  le  premier 
est  beaucoup  trop  long,  mais  parce  qu'il  est  invraisemblable  que  Fauteur  ait 
identifié  Jérusalem  et  Bethléem. 

6.  «  Et  erit  novissimus  error  pejor  priore  ».  Matth.  xxvii,  64. 


40  p.    MEYF-R 

tormenr  sans  Joute  pas  un  poème  complet.  Je  suppose  qulls 
sont  extnits  de  quelque  poème  moral  ou  plutôt  ^nomiqwSj 
comme  on  dirait  s'il  s'agissait  d'une  œuvre  antique.  Je  n'ai 
point  souvenir  de  les  avoir  lus  ailleurs,  et  j'ignore  pour  quelle 
raisf:)n  la  rubrique  est  placée  sous  le  nom  de  Marie-Madeleine. 
En  tout  cas,  -e  ne  crois  pas  qu'ils  soient  tirés  d'aucun  des  cinq 
poèmes  français  que  nous  possédons  sur  cette  sainte. 

Hic  iiwipiun:  p^.r^^r'-ij:  Marie  M^J^Um  (z,  do  /;. 

Sachet  q-c  soven:  mustre  le  vicrc  Mes  mcuj  vaat  apertc  totie 

SI  ii  bome  est  fol  ou  Jebonerc.  8  Ke  trop  coverte  teionie. 

Fol  serabunt  suv^enf  indire  Trop  tost  et  trop  urt  se  decoice 

4  Li  :blie  que  in  quer  tiibite.  Ke  le  otil  ceile  de  qce  le  muzere  '. 

E  sovent  se  repce:  ceier  Fol  sembun:  ter  toi  reduter 

Pirrair.riembLir.:  =  de  i?eaovcrcr:  12  E  bel  semblant  pnxiocme  amer. 

9.  Effets  des  sept  péchés  capitaux  'k  —  Ce  morceau  est  un  de 
ces  résumés  en  forme  de  ubleau  s^-noptique  que  Ton  rencontre 
souvent  dans  les  manuscrits  des  derniers  siècles  du  moyen  âge. 
Seulement  ces  résumés  sont  en  latin,  et  celui-ci  est  en  Érançais. 
Les  sept  ^îces  sont  rangés  dans  cet  ordre  :  or^ueily  ertiie,  ire^ 
a^\'idU,  Jiaria^  lichsrU^  glotcnU  *.  Je  me  borne  à  transcrire  ce 
qui  concerne  les  deux  premiers. 

FûI.  ^i)  Oruilfe:  rvme  : 

Avincer  sei  de  ber.es  ki  il  n'a:  rai  en  sci. 
Feindre  se:  a^tre  qje  il  se  sei:, 
Q:n:rcver  novcieries, 
Esrriver  sanz  busuir.. 
InoSedicT.:  a  De::  c  a  «un  pronse. 
Pervers  t  csntri  l^îus, 
Tcr.ser  sanz  enir.cs-ns. 


:  ':"  A'  .  •-;.  :rlf  i-.::*'  fr^  "ïi/;-;?  Mais  '.a  ziznt  avec  J^cccrre 
'-=.  ..'■*.:•■.     c*:   ma-- il  Se.  :1  fa-irai:  -^1*^  •  i£  ^u£  .*r;  :«:■:■'/ ?'t 

V  't   r.r  ^,-:  i=     ctrrcsalin  irjtl  tmen:  en  usa^e.  Autrefois  on  disait 
r  -S  .'1  -i  -L-::r-.:     1*;  se?:  ^z'r.a  sa:r:e!s     :  voy.  par  ex.  le  Tr^u:us  J/^ 
........    .  .       ,         ...    ..,^^  ;:n:-ntnjc  le -r.5.  Di^by.   Se  .  ?.    i  de  la 

zz:  zt  iz  y.  >:=-.j=.  t:  li  S.  ■:•«  .'.'  R:i.  .Mais  en  dîsaî:  aussi  quelquefois 
«  v.T.i  :ir  -.i   i         .    ::  .i  r-:te  ci-arrcs. 

i-  C-rt  .  :-rc  :-.nia;r=.  Tyj:c:'::ls  -i  •  g'.oiDr.:t  t  es:  rarîcià  placée  avant 
la  «  lechcrit  >. 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  4I 

Envie  fft  hume  : 

Fere  traïsun  a  sun  pronie, 
A  ver  joye  de  autri  mal. 
Haïr  les  bens  de  autri, 
Grucer  pur  autri  avancement, 
Estre  homicide, 
De  amer  curage. 
Dépraver  autri  bens. 

De  même  pour  irCy  accidie^  avarice,  lecherie,  glotonie  '. 

10.  Sermon  en  vers.  —  Ce  sermon  pourrait  être  la  suite 
de  celui  qui  est  transcrit  ci-dessus  sous  le  n°  6.  Il  est  de 
même  en  quatrains  et  est  précédé  de  la  même  rubrique  Sermo 
communis.  De  plus,  Técriture  est  la  même. 

Sermo  communis  pis  m'  (fol.  82  vo)*. 

T  Deu  vus  dura  grant  honur  Mes  de  une  cose  vus  gardet  : 

E  grant  joye  e  grant  vigur,  Kc  trop  avers  ne  sehet. 

Nejadeceontfaudcret.  4  Qj.ant  vus  averet  jolivé 

Tant  cum  de  pecché  vus  garderet.         g^  ^^^  ,^  ^^.^  ^^,^^ 

2  Bon[s]  amis  en  averet  Pus  de  Deu  recorderet 
Tant  cum  leus3  estere  wolet,  E  a  11  reverteret. 

E  si  avérez  sovent  joye;  ç,^  ^  anseynement 

Jhesu  Cnst  le  vus  otro.ye  !  ^us  5  apernet  e  afeiteraent. 

3  Sen  e  saver  e  bon  deliz  Car  une  nature  pot  estre  en  tay 
Avérez  aset  e  de  duz  -♦  ;  [mise  ' 


1.  Le  ms.  de  Trinity  n*est  pas  le  seul  qui  renferme  ce  petit  morceau.  On 
en  trouve  une  autre  copie  dans  le  ms.  I.  4.  4  d'Emmanuel  Collège  (Cam- 
bridge) qui  paraît  être  delà  fin  du  xiii^  siècle,  et  ne  contient  d'ailleurs  que  des 
écrits  latins.  Dans  ce  manuscrit,  qui  n*est  pas  paginé,  notre  morceau  prend 
place  à  la  suite  d'un  traité  «  de  viciis  capitalibus  ».  Les  variantes,  par  rap- 
port au  texte  de  Trinity  sont  peu  importantes  :  ainsi,  dans  le  premier  para- 
graphe, encheisun  au  lieu  de  busuin,  et  dans  le  second  Fere  detractiun  de  son 
proeme  an  lieu  de  Fere  traisun  a. 

2.  Je  ne  me  rends  pas  compte  des  lettres  pis  m'  qui  suivent  la  rubrique. 

3.  Loyal. 

4.  Il  faudrait  un  mot  de  deux  syllabcb.  se  terminant  en  -i:(. 

5 .  Vus  pourrait  être  supprimé. 

6.  On  pourrait  supprimer  les  deux  premiers  mots.  Je  soupçonne  que  Tau- 


^^^^^^4^^^^ 

^^^^^^^^^^^^^^^B 

^^^^^^H                     De  cetî  ke  tute  ren  justice 

Quanke  nus  de  nut  u  jur  ^       ^^^^^^H 

^^^^^^H                 6  Hehet  Maoc  a  ^rnie, 

Servi  a  Nostre  Seinnur.                   ^^^H 

^^^^^^H                    Dcus  vus  dura  lonke  vie 

13  Lonke  vie  vus  du[n]ra  Deus,          ^^^H 

^^^^^^H                    Hek  est  cutifort  a  peccheurs 

Tant  vîvere  ke  tu  seras  veus,         ^^^H 

^^^^^^H                     £  funteine  de  tus  bon  murs. 

Si  vus  seit  plen  de  mors                ^^^H 

^^^^^^H                7  Tut  le  monde  vos  amarftt  {sic), 

Et  de  bonté  e  des  honors.             ^^^H 

^^^^^^H                 ^    Ki  ke  D€U  emplay^rat; 

t  ^  Cil   Deus  ke  nus  ad  formé            ^^^H 

^^^^^^H                    Sur  tu  lis  humîs  serra  loué 

Nus  dont  bone  volumpté              ^^^H 

^^^^^^H                   Kj  kt  3Îm  dreU|e]  leuté. 

A  estre  franc  e  debonere                      ^H 

^^^^^^H                S  Par  tat  s^  vus'  amé, 

Par  la  vertuc  de  ta  (sa  ?}  mère.              ^U 

^^^^^^H                     Cuveyté  e  désiré 

14  Le  buntés  ke  su  m  en  nus              ^^^H 

^^^^^^H                     Pur  vQ^tre  grùnî  curtasie; 

Acumer  ne  puruns,                       ^^^^| 

^^^^^^H                     E)eu  vus  durât  lonke  vie. 

Or  fort  est  a  cunter                       ^^^^H 

^^^^^^H                9  Ky  ke  est  de  bone  afere, 

Ceo  ke  Deii  nus  post  doner.          ^^^H 

^^^^^^H                    Leii$  e  sage,  de  heté  chere^ 

I  ^  Mut  seun  fort  e  hardis                   ^^^H 

^^^^^^1                    Deît  amer  saîncte  Marie 

E  sucurable  a  nos  amts,                 ^^^H 

^^^^^^H                    Ke  aJ  juge  pur  vos  prie*  (d) 

Car  aumône  est  e  cuncysie           ^^^H 

^^^^^^1              10  Asdt  de  àm  e  de  wiande                                                                         ^^^^ 

H  charité  ç  cumpanie.                     ^^^H 

^^^^H                    E  de  quanke  sun  quor  demande    ^g  Sehet  tujur^  perraanem,                 ^^H 

^^^^^^H                    Aveint  le  bon  chresEîan, 

He  vus  avcret  la  joye  grant                    ^H 

^^^^^^H                    Si  eu  m  aveit  sein  Jau. 

Ke  nul  hume  ne  pet  pencer                  ^| 

^^^^^^H                 1  Après  le  jurs  de  ccste 

£n  le  cel  ke  tant  est  cler.                      ^H 

^^^^^^H                    Tut  scrat  parempHe 

■ 

^^^^^H                A  k  suite  se  Ht,  au  bas  de  la  colonne,  ce  quatrain  qui  n'a       ^| 

^^^^^H            guère  de  rapport  avec  la  pièce 

précédente,  bien  que  de  k  même       ^H 

^^^^^H 

j 

^^^^^^^H                                                           vus  seiz  messeger,                                                     ^^^^M 

^^^^^^H                                                   Cuncte,            e                                                         ^^^| 

^^^^^^H                                                 MessuQges 

ne                                                          ^^^H 

^^^^^^H 

vus  tenet.                                                   ^H 

^^^^^^                   teur  veut  opposer  natun^  c'est-à-dire  les  qualités  innées,  à  nûrrtturf  ou  nur-        ^| 

^^^^K^                 lUTf,  les  qualités  acquises,  mais  H  est 

possible  qu*il  y  ait  une  tacune  au  mïliee        ^H 

^^^^^H                  du  quatrain,  car  le  sens  se  suii  mal. 

^^^^1 

^^^^HL                    t.  Om-jusiisi. 

^^^H 

^^^^^^^k                     3.  Corr.  Sfrri  pu$  ? 

^^^H 

^^^^^^^^                 |,  Après  ce  mot  le  texte  porte  avec  ou  m?ti,  ce  qui  ne  parait  pas  avoir  de        ^| 

^^^^^^V            sens  14:1.  Il  budrait  peut-être  corngtr 

le  vers  ainsi  :  Quankt  mfr^  dt...                    ^H 

il 

LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS    DE   CAMBRrnGH 


43 


Nous  abordons  présentement  le  second  des  deux  manuscrits 
êunis  actuellement  sous  la  même  couverture*  L'écriture  parait 
^etre  de  la  première  moitié  ou  du  milieu  du  xV^  siècle,  et  les 
opuscules  qui  y  sont  réunis  sont  de  la  même  époque.  Cela 
est  sûr  pour  l'un  d'eux  (celui  qui  sera  publié  ci-après  sous  le 
n"  12)  qui  a  du  être  composé  en  141";,  et  probable  pour  les 
autres.  Tous,  à  Texception  du  dernier,  sont  des  écrits  didac- 
tiques destinés  à  l'enseignement  du  français  en  Angleterre* 

11.  Femina,  — Tel  est  le  titre  du  premier  des  opuscules  que 
nous  allons  passer  en  revue,  La  rubrique  initiale  nous  donne 
l'explication  de  ce  titre  :  «  Ce  livre  est  appelé  femme  (Jemina) 
parce  que,  de  mime  que  ta  femme  enseigne  à  Tenfant  a  parier 
la  langue  maternelle,  de  même  ce  livre  apprend  aux  jeunes  gens 
à  parler  correctement  (rethorice)  le  français.   »> 

Ce  traité,  qui  est  anonyme,  est  en  vers  de  huit  syllabes. 
Après  chaque  paire  de  vers  est  placée  la  traduction  en  anglais. 
Nous  sommes  au  commencement  du  xv=  siècle  :  le  français 
n'est  plus  aussi  généralement  compris  que  cent  ans  plus  tôt. 
L'objet  de  Fauteur  L\st  d'enseigner  le  français  de  France,  qui  est 
soigneusement  distingué  du  français  d'Angleterre.  G  est  proba- 
blement là  ce  qui  est  indiqué  par  l'expression  de  la  rubrique 
<f  rethrice  loqui  galHcum  »*  Voici  comment  l'auteur  s'y  prend 
puur  distinguer  ces  deux  sortes  de  français.  Dans  ses  vers  —  qui 
naturellement  n'ont  rien  de  poétique  —  il  écrit  les  mots  selon 
l'usage  de  France',  puis  il  indique  en  note  la  prononciation 
usitée  en  Angleterre.  Ainsi  il  écrit  au  premier  vers  Bian  enfant 
(ce  qui  n'est  pas  absolument  correct,  car  il  laudrait  J3^/),  et  en 
note  il  nous  avertit  qu'il  faut  lire,  c'est-à-dire  prononcer,  ku 
infûunî.  Il  marque  les  appels  de  note  par  tes  lettres  de  Fal- 
phabet.  Il  s'agit  donc  d'enseigner  le  français  littéraire  tout  en 
conservant  la  prononciation  du  français  d'Angleterre.  Cette  dis- 
tinction entre  U  frtnch  after  ihi  school  of  Siratfordatte  Bcue  et  le 
french  ûf  Paris ^  comme  disait  Chaucer,  est  très  marquée  au 


ï.  Bien  entendu  il  peut  arriver  que  de  temps  â  autre  le  copiste  ait  trahi  les 

inteotions  de  Tautcur. 


44  P-    MEYHI 

XIV*  siècle  dans  la  littérature  française  d*Aïigle[erre  :  à  côté  de 
poésies  écrites  en  un  français  trè^  corrompu,  on  en  rencontre 
(celles  de  Gower  par  exemple)  qui  sont  d'une  langue  presque 
correcte. 

Le  traité  est  interpolé.  Du  fol,  93  au  fol.  129,  le  ms*  de  Tri» 
nîty  contient  le  texte  presque  entier  de  Vaprise  de  françeis  de 
Gautier  de  Bibbysworth^,  et  un  peu  plus  loin  sont  cités  des 
vers  latins.  Je  suppose  que  ces  interpolations  sont  du  fait  de 
Tauteur  de  Ftmina^  parce  que  les  vers  de  Gautier  de  Bibbys- 
worth  sont  accompagnés  (après  chaque  paire  de  vers)  d'une 
traduction  anglaise. 

M.  Aldis  Wright,  de  Trinity  Collège,  ayant  Tintention  de 
publier  Femina  pour  le  Roxburghe  Club,  je  me  borne  à  en 
donner  de  courts  extraits. 

(Fol.  88)  Lihet  hk  %*ocahtr  T^iAmh,  quUu  mut  feminu  docfi  mfankm  Icqui 
maUrnam^  sic  doctt  bit  ît^r  pn^frm  rttJjotkr  loqni  gallicum^  prout  infrapatebît, 

CapiîuJum  primnm  docd  rethorice  lo^ui  de  asstmiliiudit$f  hesHûrum, 


Beau^  enfant  ''^  pur  apprendre 
Ou  Irancds  ^  devez  bien  ^  entendre 
Fayrt  çhyîdt^  for  to  knte 
în  frtnsh  ye  *  idntt  wft  understatide. 


CoiDment  vous  parlerez  bealmeni  ' 
Et  devant  lez  sagez  nattiralmenr. 
Hoîtr  yt'  scfxii  sptke  Jayre 
And  ajort  ihy^t  Mty^t  mm  kyttddy. 


Voici  le  début  du  morceau  tiré  de  Gautier  de  Bibbysworth  ^ 

(Fol.  95)  Hoc  capiiulvm  docH  dt  propndaiibu$  în/anHum. 


Quauni  enfaunt  csï  primez  ncei  *, 
CovicQt  qll  soit  inallocci  {&u% 


Puis  en  soun  biers  ly  cochez 
E  be[r]oere  lui  purvdcz. 


I.  Bihkm'orih  dans  la  plupart  des  manuscrits  (Sitheswty  dans  le  ms. 
Gg.Uî  de  rUnivcrsilé  de  Cambridge,  R&mania,XV,  jia).  Cesi  Bibbysworth, 
paroisse  de  Kimpton,  comté  de  Heriford,  comme  Ta  montré  M.  Aldis  Wright, 
Notei  and  Quartes,  4*  série,  Vllï,  64  '1877). 

a.  J'écris  ye  avec  j^;  il  y  a  dans  le  ms.  un  jioke,  signe  que  je  n'ai  pas  à  ma 
disposition;  voy.  p,  25,  note. 

j.  Editions  :  Th,  Wright,  A  ti^ume  qJ  vGc^hrm  (18^7),  p.  14I  ;  nion 
Bfcmiîi  lamitm  textes,  partie  française*  n»  57* 

4.  A  partir  d'ici  je  ne  donne  plus  la  version  anglaise. 

a  beau  drkt  kg*  beu*  —  b  enfaunt.  —  r  fraunceys.  —  d  bcin*  — r  bck- 
ment. 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  45 

Quaunt  enfaunt  comence  a  chatoner,    Pur  ses  draps  saver  de  baveure 
E  einz  qu'il  sache  as  pies  aler,  Ditez  donque  a  sa  bercere 

E  il  bave  de  sa  nature,  Q'ele  face  un  bon  bavere... 

Le  traité  de  Gautier  se  termine  au  fol.  129  comme  suit  (cf. 
Romaniûy  XIII,  503)  : 

Et  quaunt  la  table  fuist  ousté,  E  ore  Bnie  icy  ma  resoun. 

Grant  poudre  ove  bon  draggé  And  ofolher  nobley  was  fusoiiy 

E  d'autre  nobleye  fuist  fusoun,  And  now  y  eude  hère  my  resoun. 

Mais  l'ouvrage  reprend  aussitôt  comme  suit,  avec  un  extrait 
de  l'enseignement  de  courtoisie  connu  sous  le  nom  d'Urbain 
le  courtois  que  nous  retrouverons  plus  loin  en  décrivant  le  ms. 
O.  I.  17  : 

De  moribus  infantis. 

Ore  nurture  jeo  voile  aprendre  Cornent  jeo  voile  que  soiez  norrys. 

A  totez  que  sount  d*age  tendre  ;  Jeo  voile  tout  al  primour  (vo) 

Now  nurture  y  wyl  teche  Qpe  soiez  humble  et  plein  de  doulçor. 

To  al  that  hen  of  âge  tendre  \  Soiez  ensi  franke  e  [de]bonere , 

E  pur  vérité  je  vous  di  :  Sanz  mesditz  et  sanz  meffayre, 

Hony  est  il  que  n'est  norry.  E  de  beale  porture  entre  le  gent, 

Ore  escotez,  monn  chier  fitz,  Ne  trop  hault,  mes  mesnement... 

L'auteur  de  cette  rédaction  cite  des  autorités  latines,  par 
exemple  le  Pseudo-Caton  (fol.   134)  : 

Dandum  etenim  est  aliquid  cum  tempus  postulat  aut  res', 
ou  encore  les  vers  célèbres  : 

Si  tibi  copia  seu  sapiencia  formaque  detur,  (fol.  135) 
Sola  superbia  destruit  omnia  si  comitetur*. 

Voici  la  fin  du  traité  proprement  dit  (fol.  138  v°)  : 

Si  vous  disirez  grant  honour  Qpy  luy  mesmez  sciet  justicier. 

Et  dignitez  d'emperour.  Ore  priez  Dieu  issint  puissetz  finer 

Eniperour  en  droit  [est  J]  nomez  Qe  a  soun  joye  purrez  vener. 

1.  Livre  II,  dist.  S- 

2.  Voir,  sur  ces  deux  vers,  qui  sont  du  xii*  siècle,  les  Contes  de  Bo^on  (Soc. 
des  anc.  textes  français),  p.  18.  J'en  ai  cité  à  cet  enJroit  de  nombreuses  copies. 
J'ajoute  qu'on  les  retrouve  dans  le  ms.  B.  2.  J2  deTrinity,  au  fol.  8. 

j.  Je  restitue  d'après  l'anglais  ^^j  w^wW. 


4^  P^   MEYER 

Les  ff.  139-146  sont  ocoipfe  par  une  sone  de  glossaire 
alphabétique  disposé  sur  trois  colonnes  qui  sont  intitulées  res- 
pectivement :  I''  Régula  scripiioniSj  l""  Régula  lacmioms,  3*^  Régula 
constructionis.  Dans  la  première,  lauteur  écrit  les  mots  seloQ 
IWhographc  qui  lui  a  paru  la  plus  correcte  (c'est  en  somme 
l'orthographe  du  français  de  France),  dans  la  seconde  est  figu- 
rée la  prononciation;  la  troisième  contient  la  traduction 
anglaise.  Voici  du  reste  Texplicacion  donnée  au  début  tant  en 
français  qu'en  anglais  \  mais  je  transcris  le  français  seul  : 

{FoL  îjS  v^)  La  rule  qu'est  en  suant  e[n]seigîie  ensemetit  cornent  vous 
scrivcrcît  vostrc  fraunceySj  et  ce  est  en  h  primere  rule^  la  ou  il  dit  Hfguh 
scripcionis. , ,  En  le  îj«  lieu  prochein  ensevant  a  pan  senestre,  la  ou  il  dit 
Régula  ïôcumnk^  si  com  est  escript  en  nresme  la  rulc,  en  tieï  mmerc  lirrex 
vostre  fraunceysj  et  issint  une  rule  enseigne  a  scriverc  et  l*autre  a  Ucre  (fol% 
159);  et  en  le  tierce  lieu,  q'est  devisé  !a  ou  il  dit  Rtgnîa  cominu-tioms^  ceste 
rule  enseigne  le  cnglysh  deï  voz  paroles  de  fraunceys*  Et  en  tiel  manere  la 
primere  rule  enseigne  pur  scrivere,  la  seconde  pur  lire,  la  tkrcc  pur  entendre 
et  ensement  enseigne  plusours  differencez  du  ffraunceys. 

Il  me  paraît  certain  que  ce  glossaire  n'est  pas  un  ouvrage  à 
part,  mais  est  réellement  la  dernière  partie  du  traité  Fanina. 
C'est  toujours  le  même  système,  très  régulièrement  suivi,  qui 
consiste  à  distinguer  le  français  littéraire,  envisagé  spécialement 
au  point  de  vue  de  la  graphie,  du  français  parlé  en  Angleterre. 
De  plus  les  mots  enregistrés  dans  ce  glossaire  sont  ceux  qui 
sont  employés  dans  la  partie  précédente.  Je  vais  en  donner 
quelques  extraits, 


n 


m 


avintt 
autre  fetTîtise» 

almei  vel  aimes, 

aidant, 

acier  ^ 

avaunt,  cum  u  kgelur, 
aultrc  fcmmt% 
lutics  vd  itme, 
aidaunt,  cum  u, 
acer. 

To  fore,,, 
anothcr  woman*** 
soulys  or  souk, 
hdp)^ige,,* 
steeL 

a^f^vesque, 

bien, 

beau, 

chicn^  itc.  Piàartiium, 

ar^'vc*^ue, 
beti, 

weL 
fayrc.., 

an  hounde. 

chiâOi  ^,  PariHum,     ) 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE 


47 


m 


chiet,  sec. 

PikardiatHy 

\  cheet  vel  chaat, 

an  kat. 

chiat,  sec. 

Parisium  ', 

1 

chiere, 

chère, 

diere. 

chief, 

cheef, 

ahevede... 

vient, 

veint, 

he  cometh  (f.  i66). 

vint, 

eod.  modoj 

twenty. 

vault. 

vaut. 

the  worthe. 

vostre, 

votre. 

youre. 

veout,  vel  veult, 

veut. 

wyle. 

viande, 

viaunde,  cum  «, 

mete. 

viUe, 

vile. 

atoun... 

Les  ff.  147-8  contiennent  les  noms  de  nombre  cardinaux  et 
ordinaux,  les  noms  des  jours,  enfin  quelques  observations  sur 
les  pronoms  et  la  conjugaison  de  quelques  verbes. 

12.  Dialogues  français  composés  en  1415,  —  Ces  dialogues 
sont  des  modèles  ou  exercices  de  conversation  analogues  à  la 
Manière  de  langage  que  j*ai  publiée  en  1873  et  dont  j'ai,  depuis, 
signalé  diverses  copies*.  Ils  sont  plus  courts  et  offrent  moins 
d'intérêt  pour  la  lexicographie,  parce  qu'ils  sont  moins  riches 
en  listes  de  poissons,  de  comestibles  divers,  d'objets  d'habille- 
ment ou  d'ameublement.  Enfin  ils  sont  moins  anciens,  le  texte 
de  la  Manière  de  langage  que  j'ai  publié  d'après  le  ms.  Harleien 
3988  étant  daté  de  1396,  tandis  que  les  dialogues  du  ms.  de 
Cambridge  sont  évidemment  de  la  fin  de  l'année  1415,  puisqu'il 
y  est  fait  allusion  à  la  bataille  d'Azincourt  (25  octobre)  comme 
à  un  événement  tout  récent.  L'intérêt  en  est  cependant  très 
réel,  d'abord  parce  qu'ils  sont  exactement  datés,  ensuite 
parce  que  la  scène  est  placée  en  Angleterre  ',  ce  qui  prouve 
qu'au  commencement  du  xv*  siècle,  en  Angleterre,  même  dans 
la  classe  bourgeoise,  —  les  personnages  mis  en  scène  sont  de 


1.  Je  crois  bien  qu'ici  le  copiste  a  mal  copié  son  original  :  la  différence 
entre  la  forme  picarde  et  la  forme  française  n'est  point  du  tout  celle  qui  est 
ici  indiquée. 

2.  Romania,  XV,  262-5. 

3.  Les  interlocuteurs  de  la  Manière  de  langage  sont  supposés  voyager  en 
France. 


48  p.    MEYER 

condition  plutôt  inférieure,  —  on  avait  à  cœur  de  savoir  lire  et 
parler  !e  français.  Enfin,  on  y  pourra  puiser,  comme  dans  la 
Manière  de  langage^  d'utiles  notions  sur  la  vie  privée  à  la  fin  du 
moyen  âge.  La  lexicographie  française,  et  même  anglaise,  tirera 
quelque  profit  de  certaines  parties  de  cet  opuscule,  notamment 
de  ta  liste  d'étoffes  que  contient  le  §  VIH. 

Ces  dialogues,  pour  être  inédits,  ne  sont  pourtant  pas  incon- 
nus. Il  en  existe  deux  autres  copies^  Tune  dans  lems-  Dd.  12.23 
de  la  Bibliothèque  de  rUnïversité  de  Cambridge  (foL  7- 13), 
l'autre  dans  le  ms  Add,  177 16  (foL  roi-lo6)  du  Musée  Bri- 
tanique  \  Je  me  suis  servi  de  ces  deux  copies  pour  rectifier  ça 
et  là  les  leçons  fautives  du  ms.  de  Trinity- 


I.  Signalés  l*uti  et  l'autre  par  M.  Stûtiîmgcr,  Orthographia  galUca,  p.  xiv, 
{ÂUfraniàmdx  Biblwihtk^  t.  VtU)*  —  Le  tns.  de  Trinity  est  k  mdlleor  des 
trois.  Les  deujt  autres  supprinieiit  ou  modifient  les  traits  loeaui  ;  !e  ms.  de 
rUniversité  noiammcnt  substitue  Londres  â  Oxford  ($  III),  ce  qui  est  par- 
ticulièrement absurde.  Voici,  comme  échantilîot),  le  commeoccmeni  des  deux 
textes  : 

Cambridge,  Univ.  DD  12.  i|. 

(FûL  7  t'*)  Sire  bon  joQf.  —  iiire,  boa 
jour  1  vous,  ou  bon  joar  a  «9u&  d oigne 
Diciî  î  —  Sire,  Dieii  fûb*  savc  1  —  B  vou» 
auij.  ^  Sire,  Dieu  vous  dolgnc  bon  vie  et 
longue  !  Sire,  Dxtn  voos  garde.  —  E 
voua  aoïï.  Et  après  mangvr,  vous  dirr^ 
ainsi  :  Sire,  bon  vcprci  ou  bott  SOCK  î  — 
Sirt;,  bon  ^orc  a  vous.  —  Si  ré,  bon  noct. 

—  SirCi  bon  doet  a  vous  doignc  et  bon 
repos  î  —  Sire,  repOKz  bien.  —  Sire,  vous 
estes  bien  venu.  —  Sire,  Dieas.  voo» 
diraunce  !  —  Sire^  vostre  lucfciÊ.  —  Sire^ 
Bien  vou&  esploit.  —  Sire,  Dieu  soit  ove 
vous.—  Si  re»  voiles  vous  miingcr  ovc  nous  ? 

—  Notiy^  dre  ;  certes  j'ay  mangé.  —  Sire, 
bcvci,  —  Sire,  commencei.  —  Sîrép  pcme^ 
îc  hatiap.  —  Sire,  non  pas  davant  voti*, 
M  Toû*  plest*  —  Par  Dieu  !  si  fre».  — 
Sire,  grand  mericye,  —  Sire,  prons  ¥ou8 
Uct^  on  si  grande  prous  te  von»  facel  — 
Ore,  »irc,  de»  qucui  parties  veocx  voui? 
-^  Sire,  |e  vcignc  des  partiez  de  France..^ 


Musée  brit.,  add.  17716 

{Fd.  io^  t")  Sire,  boâ  jour.  ^  Sire, 
bon  ioTtr  a  vouzi  ou  bon  jour  vous  doigne 
Di€iaï  t  —  Sire,  bofi  matin  a  vou3;  !  Sire, 
Dieui  vous  savel  Sire,  Dieua  vous  benei- 
guey ï  Sire,*  Dicut  loîcïl  Sire,  Dieux  vous 
doign«  bon  jour  et  longe  II  Sire,  Dicuivous 
doignc  bon  joie  et  (/.  103  ;  bon  lïtnïté. 
Sîre^  Dtcn^  vous  guard  !  —  Sire,  et  vous 
ansi.  —  Sire  bon  socr.^  Sire,  bon  socr  a 
vciuz,Sire,  vous  este*  bien  en^ountre?.  Sire, 
esiex  vous  bien  vcnuf.  Sire,  Dieuï  von« 
etploite!  Sire^  Dieux  vmis  avaunce^.  Sire, 
prout  vous  (ace»  —  Sire,  grani  œercte.  — 
Sire,  vuilcï  vous  manger  ove  notis?  -^  Non, 
Sire;   ccrtèE  ]'xy  maungê.  —  Sire,  bevct* 

—  Sire,  comcncei.  —  Sire,  pemez  le 
hAfuip.  —  Sire  uoa  pas  devaunt  voua,  si 
VOUA  pkst.  —  Par  Dieux  si  frei*  —  Ore, 
STI%  i  Uicuii  sotei.  —  Or,  Sire,  a  Dieun, 
bon  notn.  —  Sire,  bon  nœt  a  vour  doigne 
DkaE  et  bon  repos.  —  Sire,  vous  estez 
bien  encountrea.  —  Sire,  von*  cite*  bien 
venuiu   —    Sire,  cornent  ovc  vouz  e»l  ii  ^ 

—  Sire  Je  me  h  pur  voui  grjudt  mercie.  Or, 
Sipe,  des  «jtieux  punies  veignca  nousT^.. 


LES    MA^JUSGK!TS    FRANÇAIS    DE    CAMBRIDGE  49 

(Fa/*  149)  I.  Sire,  le  bon  *  jour.  Sire,  boû  jour  a  vous  ;  ou  :  bon  jour  vous 
doyne  Dku  1  Sire,  bon  maiyn.  Sire,  bon  matyn  a  vous.  Sire^  Dieu  vous 
savel  Sire,  Dieu  vous  betioy!  Sire»  a  Dîeu  ,soiez  î  Sire,  Dieu  vousdoyne  boû 
vie  et  longe  l  Sire,  â  Dieu  vous  comande.  Sire,  Dieu  vous  doyne  bon  san%té 
et  bon  joyel  Sire  Dieu  vous  gurde!  —Sire,  et  vous  auxci.  —  Sire»  bon  soer* 
Sire,  bon  soer  a  vous,  —  Sire,  vous  estez  bien  encountrez.  Sire,  vous  estez 
bien  venu*  Sire,  Dîeu  vous  esploite  !  Sire,  Deu  vous  avaunce  !  Sire,  prou  vous 
face  1  — Sire,  gram  mercy.  —  Sire,  voulez  vous  manger  ove  nous?  —  Non^ 
syrc.  Cenys,  j*ay  m  ange  ré  ($k).  —  Sire,  beve^;,  —  Sire,  corne  ncez.  —  Sîre» 
pernejt  le  hanap,  —  Sire,  non  pas  devant  vous.  --  Si  vous  pi  est,  par  Dcu  ! 
—  Sire,  ferez  ore-  —  Sire,  a  Dieu,  boiî  noet,  —  Sire^  bon  noct  vous  doyne 
Diau  et  bon  repos  I  —  Sire,  comem  ove  vous  esi?  —  Sire,  le  meuix,  pur  vous 
graunt  mercier.  —  Sire»  des  queux  parties  veigne^  vous  ?  —  Stre,  je  veigne 
dez  partiez  de  Ffraunce*  —  Sîrc,  tjuelez  novclx  de  par  de  la  ?  —  Sire,  le  roy 
est  en  bon  point,  loiez  soit  Dieu  I  ovesque  toute  sa  compaignie  en  lez  parties 
de  Normandie,  et  il  est  en  sanitee  luy  niesmes,  mes  pîusoursde  sez  gL-nizsouot 
maladez  et  beaucope  d*eaux  sounî  mortz.  Et  en  oultrelc  roy  arryva  illocques» 
joust  la  ville  de  Harfleu,  et  avoit  mys  un  graunç  siège  sur  la  dite  ville  ovesque 
le  nombre  de  LX  *  m.  persones,  et,  parmy  la  grâce  tle  Deu,  il  ad  conquys  la  dicte 
ville  ',  et  est  rcmeué  de  h  dicte  seege,  et  -^oy  purpose  pur  aler  versCalays,  par 
my  la  terre  de  Fraunce.  Et  puis  j'ay  oye  dyre  qu*ore  tarde  les  seignours  de 
Ffraunce>  ovesque  la  nombre  de  l  ou  lx™  persones  armez,  ount  cncontrer 
le  roy  par  le  (y^)  chymyn,  et  le  roy,  ovesque  le  numbre  de  x^i  persones,  ad 
corn  bat  U2  ovesque  eaux  a  un  lieu  apellê  Agincourt,  a  quel  bataille  i  sount 
pris  et  tuez  xj^o  personis  dez  Ffraunceys,  et*^  sount  tuez  fors  que  ,kvj.  per- 
sones dez  Engiès  %  dount  ïe  duc  d'Ever^^■yk  cstoii  un  î  et  le  counte  de  Sufif.  un 
autre;  et  k  roy  avoit  le  champ  et  k  victorie,  loiex  soit  Dieu  ï  et  mist  tout^ 
les  autrcz  Fraunceys  au  fewe^  ;  et  issiat  le  roy  tient  son  chemyn  vers  Calays 
et  soy  purpose  de  retourner  en  Engleterre,  par  la  grâce  de  Dieu. 

IL  En  ûustre,  sire,  vous  dy  pur  certeyn  que  les  Ffraunceys  que  furent  pris 
al  dît  bataylîe  Agincort»  c'est  assâver  le  duc  de  OrUaunce,  le  duc  de  Bur- 
bayue*,  et  plusours  auîrez  countes,  chîvalers,  et  esquîers  vaillaunu,  si  bien 
d'autre*  estraungez  terrez  corne  de  Ffrau nce,  serount  anmesmez  ■*  le  jeody  pn> 


1*  Le  33  septembre  141  j  (Monstrelet,  M*  Dou^t  d'Arcq,  lll,  8s). 
2,  600,  sebn  Monstrelet  (III,  llo)»  ce  qui  est  moins  invraisemblable, 
î.  Le  duc  dTorkj  onde  du  roi  d'Angleterre  (Monstrelet,  III,  110  et  119). 
4.  Brabant. 

L  «û.  On  peut  îire  ^wm,  hoftê,  peut-être  bûun.  —  h.  xl  dans  les  deux  autres 
mss,,  ce  qui  est  plus  probable.  —  C.  SuppL  [fte]  ?  manque  dans  les  trois  mss. 
Ui  ai  Ou  anmesnU^  ?  Mus,  br,  atneinei^  Univ,  amrttq* 

Jt^M«itid,  XXKII  4 


%0  p.    MEYER 

chein  après  le  festê  (de  seiot  Marn^n  ^  envers  Loundres  ;  eî  ils  soutu  arriveï  a 
Dovere,  et  touiz  lei  gemz  de  Keni  et  d'Essexe  suffisaunt  furrount  ^  ttious- 
trés  en  lour  meilour  array  par  le  haut  chyniyn  entre  Canierbery  et  LoadrtfS, 
et  lez  gentes  de  Loundres  bîen'^  <;n  armez  et  arrayez  eust  naoïastrerent*^  sur  le 
Blakebeth  *  pur  encoumrer  ici  ditz  Fraunceys,  afyn  q'Us  purrount  veyer  quel 
poepîesount  lessez  derere  le  roy  en  Engleterre  pur  la  saufgarde  de  mesmc  le 
rayme. 

in.  Syre,  ou  pcnse^î  vous  chîvachcr  aiioet  ?  —  Sire,  a  la  prochenc  vîîîci  si 
Dieu  pleat.  —  Sire,  quel  apt'Uez  la  prochenc  ville?  —  Sire»  ^ape^lent0^one*  ^ 
verement,  —  Sine,  de  celle  vï\h(JoL  150)  j'ay  oïe  parler graund  bien  de  moult 
genK.  Sire*  corne  t>ien  longe  de  cy  est  ycdle  ville,  je  vous  prî?  —  Sire^ 
nous  avons  bien  x  lewes  ïllocques  unqore,  — Ore,  sire,  lessoums  chîvacher' 
ensemble»  je  vous  pri.  quar  je  pense  Akr  ou  chîvacher  a  mesme  la  ville,  mes 
je  ne  coni  pas  ben  le  chymin,  et,  si  me  voiliez  renseigner,  j'estoîse  grande- 
ment tenu^  a  vous.  —  Par  ma  foy»  sire,  volunters,  et  je  suy  très  lés  de  vostre 
compaignye^  mes  je  me  doute  que  je  ne  puisse  mye  vous  suer,  quar  je  siiy  en 
panye  malade,  et  non  pas  toute  gari?,  unquore,  et  mon  chîvalx  est  laas  et 
doyé*  devauni  et  derere;  soun  doos  auxi  da  la  seel  est  blessé,  et  Tun  oïl  est 
oustèj  mes  unquore  il  n'est  pas  vougîe  ;  et  quaunt  il  vient  a  un  fossé  par- 
founde,  moy  covyent  !uy  porter,  quar»  certis,  il  ne  poet  mye  se^  jambes  hors 
de  le  lay  lever*  —  Dunques,  sire,  aloums  e[n]sembîe,  en  noun  de  Dieu,  et 
nous  y  vendrouns  en  beu  temps  par  le  haut  sobyl,  si  Dieu  pïest.  —  Ore,  sire, 
ou  serroums  loggez,  quaunt  nous  voîgnoums  la  ?  —  Syre,  a  le  molyn  sur  le 
hôpî,  en  le  rewe  de  No  rt  h  gâte*»  [que*]  est  ie  meilïour  hostell  d'i  celle  ville» 

1.  Le  14  novembre. 

2.  Black-Heath»  sur  la  r,  g,  de  b  Tamise,  au  sud-est  de  Londres, 

3  C-à-d,  a  chevauchons  j*^  lit  10  rûh  On  rencontrera  plus  lo m  d'autres 
exemples  de  cette  sorte  d'impérai if  composé* 

4.  Enclouè,  blessé  par  undou,  Godefroy  ar^dpfren  ce  sens  (au  Coinplé- 
meni),  mais  non  ps&cloer.  AogL  to  f/oy(Murray»  Nne  engL  tlkt.}. 

>.  tf  A  renseigne  du  moulin  n.  H&op  (voir  Ntu*  otgî.  tîkL)  désigne  le 
disque  de  métal  sur  lequel  était  représenté  le  moulin. 

6.  Li  rue  de  Nortbgate  correspond  A^sti  bien  à  la  grande  rue  d*Oïford 
appelée  actuellem^it  Cornmarkct,  La  porte  du  nord  (Northgaïc)  était  tout 
près  de  l'église  Saini-MîcheK  Le  moulin  mentionné  dans  le  texte  se  trouvait 
juste  en  dehors  de  Northgate  ;  voy*  A*  Wood»  Surivy  of  t^  Anliquiîk^  of  the 
cHy  ûf  Oxford,  edîied  by  Andrew  Clark»  I,  ^407  (Oxford  Hhtùrkai  Sûcitty}, 

^.  Ou  turmufit  :  lire  serrount,  ou  ferouni  momtrts,  — *  f .  Trin,  fry,  corrigé 
d^âpfès  les  autres  m».  —  d.  Corr.  mmatraQuni, 

HK  a.  Mus.  br  'ÙMuford^  Univ.  Loundri^.  —  k  Qtu'  est  restitué  d'après 
Mus.  br.  Ce  ms  rcmpbce  Northgate  par  deux  signes  semblables  â  i;  Univ. 
supprime  tout  simplement  Nortligate. 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE  CAMBRIDGE  5I 

coni  je  suppose,  qar  nous  y  averommes  boun  chier  et  vitailie  assez  pur  homez 
et  chivachx,  et  bon  marché. 

IV.  Hosteller,  hosieller  !  —  Sire,  sire,  je  su  cy.  —  Purroums  nous  bien 
estre  loggez  cy  eyns  ?  —  Certes,  mes  maistres,  vous  estez  très  bien  venuz 
tantostz.  Combien  estez  vous  en  nombre?  —  Mon  amy,  nous  ne  sumus  icy 
a  présent  fors  que  vj  compaignons  et  iij  garçons,  ovesque  noef  chivalx,  et  mes 
y  sount  plusurs  de  nous  conpaignons  derere.  —  Sire,  vous  serrez  loggez  icy 
bien  assez  tout  si  vous  eussez  .c.  chivalx.  Sire,  ont  (i*)  vous  chivalx  beu? 

—  Non  pas  unquore,  quar  il  sount  trop  chaudez  pur  boire,  pur  ce  que  nous 
avouns  chivaché  fors  de  Tettysworde  »  tant  que  en  cea.  En  auxci  nous  estoions 
pursuez  ove  larons  icy  a  Shottore  *  *  ;  et  ce  nous  chivach  n'eussent  esté  le  meil- 
lours  et  la  grâce  de  Dieu  [ne]  nous  eust  eidé,  nous  n'eussomes  mye  escapé 
saunz  robber,  mes,  loiez  soit  Dieu  que  nous  ore  sumus  icy  en  savetté,  quar 
nous  y  aviouns  grant  pour.  Et  pur  ce  lessez  nous  garçons  amesner  '  nous  chi- 
valx suys  et  juys,  en  le  rvve,  en  tanque  ils  soient  enfreydez,  et  puiz  les  eawer 
et  laver  bien  parfunde,  issint  que  lez  estrwez  et  senglez  soient  nectez,  savant 
lez  celiez  ove  hernoisez  secchez  ;  et  puis  regardez  que  nous  eions  un  bon 
estabile  chaud  et  bon  literez  tanque  a  la  ventre  de  le  chivalle,  quar  le  temps 
est  froyde  ;  et  auxci  mettes  waddes  J  de  paile  sek  desouth  lour  senglez,  et 
frotez  bien  lour  jambys  issint  qu'ils  ne  soient  mye  crachez  <* ,  et  puis  lour  donez 
chascun  chivalx  ij  botelsde  feyn  et  j  derr.  de  pain. 

V.  Hosteler  !  —  Sire  ?  —  Coment  vendez  vous  del  aveigne  ?  —  Sire,  pur 
iiiî  d.  le  bussell.  —  Verement,  c'est  bon  merché.  Ore,  ou  est  la  dame  de 
cyens? —  Syre,  ila  (lis.  ele)  viendra  tantost  :  ele  est  ovesque  une  commère, 
et  ne  denoorra  guerres.  —  Dame,  bon  soer.  —  Sire,  vous  estez  très  bien 
venuz.  —  Sire,  coment  a  vous  est,  et  coment  avez  vous  valu  depuis  que 
vous  fustez  derreinement  ycy?  —  Dame,  bien,  grant  mercy,  et  le  meulx  que 
vous  vaillez  bien.  Coment  vaille  vostre  maryf  et  tout  vostre  mesnage? 

—  Sire,  bien,  loiez  soit  Dieu  et  le  meulx  pur  vous.  Sire,  (/.  151)  vuillez 
vous  approcher  a  la  sale,  ou  vuillez  mounter  a  la  chamber?  —  Neny, 
dame,  nous  voilons  prender  nostre  chamber  par  temps,  et  voilez  vous 
nous    faire  a  nou[s]  un  bon   fu  en  le   chemené   pur   nous    rechaufer,  et 


1.  Tetsworth,  Oxfordshire,  près  de  Thame. 

2.  Shotover,  petit  monticule  situé  à  peu  de  distance  d'Oxford,  vers  l'Est. 

}.  L'anglais  ivadde^  des  bouchons  ou  coussinets  de  paille,  pour  empêcher 
le  frottement  des  sangles. 

IV.  b.  La  leçon  est  changée  d'une  manière  absurde  dans  Univ.  :  fors  de  Rou- 
chester  tant  que  en  cea.,.  ove  larons  yci  sur  le  Bhchethe.  —  c.  Trin.  a  mtsnUy 
corrigé  d'après  les  deux  autres  rass.  —  d,  Univ.  drache^. 

V.  a.  Trin.  moryt. 


S2  P.    MEYER 

baillez  a  nous  de  vosrre  pam  et  un  hannap  de  st^rvobe  pur  nom  reliaî- 
tier^^  quar  nous  stimus  nlOLlIe^  et  ïaas,  et  nous  avons  chevache^  a  [our 
de  huy  %l  lewes  et  pltis^  par  niay  foy.  —  Site,  c'est  grant  travaill  pur  votis 
qu'estez  veille  et  malades,  et  je  vous  promette  que  vous  avrez  le  meillour  ser- 
voise  cy  eins  qu*eî*i  eD  ceste  vîUe^  tt  vous  bevrez  de  ni  es  me  le  pot  que  nostre 
sire  bcvroit  c'il  fust  a  Tosiell,  quar  je  le  meltray  a  broche*  pur  l'amour  de 
vous.  Et  $\  vous  vuitle3£  l>oire  de  vyn,  je  [c]nnvoieray  a  une  taverne  f  jousi 
le  quatrefu[r]kes  S  lou  *  une  pipfe]  de  bon  vin  vermaill  est  novelment  a 
broche,  c  a  la  corne  sur  le^  hôp*  vous  avérés  de  bon  malve^ey  ï%  romeny  * 
bastarde^,  Osey*^  Tyj*.  vyn  crei*,  vernage^*',  ypocras  et  vyn  blaoc. 

VI.  Ore»  bcde  dame,  qu^avrens  a  soper?  —  Sire,  vous  avérez  a  soper 
viande  assez.  ;  méï  dite?  a  moy  sî  vous  vuiUejs  avoir  vostre  viande  a  p  parai  lé 
cyens  ou  a  le  kewes  '  '  ?  ^  Nonîî,  dame,  en  vostre  cusyne  demesnc,  ou  autre- 
ment en  le  chemeney  devant  nous.  ^  Syre,  quel  maner  de  viande  ayme 
vousmeulx?  —  Dame,  fay te  nous  avoir  àcz  nieilloursvitaîlkz  que  vous  ave£| 
ni  que  vous  purrez  trover  a  vendre,  -  Sire,  j'ay  cy  cins  bons  pulcytis^  cha- 


1.  En  perce,  angl,  on  hroach  ou  a  ifreack  (maintenait  <£n  un  mot,  abrmch)^ 

2,  Aciudlenient  Carfax, 
?.  Là  où. 

4.  C'est  une  enseigne:  cf.  p.  50,  note  5- 

5.  Malvoisie. 

6.  Vin  de  îîomenie,  c.-à-d.  d'Asie  Mineure^  ou,  plus  généralement,  de 
l'empire  de  Byzance;  voir  le  glossaire  delà  ManUn  de  îangâg^^  "^onskumnêy, 

7.  Le  vin  bi\tard  est  associé  au  vin  de  Romenic  dans  deux  exemples  de  la 
première  moitié  du  xvi*  siècle  cités  par  Godefroy,  sous  Romehie.  Vinum  hai- 
tarJum  est  entendu  par  Carpcntier  (Da  Cange,  vinum)  au  "sens  de  *  vinum 
mîxtum  V.  Une  définition  plus  précise  est  fourtiie  par  un  ex.  de  15^  cité 
dans  !e  ^^'  eugî.  dkt.  :  «  Bastard  wine,  that  Is  wine  sod  wîih  ocw  wine, 
called  must,  « 

8.  Le  vin  d*Oseî,  qui  doit  être  un  vin  d'Alsace  (Ausstti)j  était  (ftn  connu 
en  Angleterre  ;  voir  le  gloss.  de  la  Mttnu'rtr  de  iariga^f. 

9.  HalUwdl,  Dkl,  &f  tirckik  and  promue iaî  wordî^  cite  un  ex,  de  crtH€^ 
signifiant  une  sorte  de  vin  doux.  Le  ms.  de  TUnivcrsité  porte  aussi  crték. 
Carpentier  (dans  Du  Cange,  visUM)  cite  un  passage  de  la  Ciavh  satmiwnis 
de  Simon  de  Gènes  ou  innam  cr^tkum  est  ainsi  défini  i  ^  fit  ex  vinis  (uvîs?) 
tn  vite  pâssatis,  poscea  expressis,  et  est  dukc.  » 

to.  Ganache  %  voir  Mm.  éi  long. 

1 1*  ir  Céans  (dans  rhotellçrie)  ou  [au  dettoi^}  cher  le  cuisinier  ». 

t.  Ou  rttmiUf  \  la  fin  du  mot  est  abrégée-  —  c,  Trin.  lam'cr^  corrigé 
d'après  les  deux  autres  mss.  —  d.  Trin.  iirt  la,  corrigé  d'après  les  dtun 
aitlrei  tnss.  —  #«  Tnn.  mûlmis  iu. 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  53 

pons,  gelyns,  pygeons,  owes,  porrelles  »  joefnes  et  gras,  perdrys,  plovcrs  et 
autrez  oyseux  petitz  et  grantz,  heyrons,  fesans  et  cockes  du  boys  ou  vide- 
cockes,  becaces  « ,  allowcs,  esturneux  h  ;  dez  gruez  (v^)  auxci  et  de  gryvas  et 
d'autre  volatyl  savage  je  ne  fayle  ryens,  signes,  malardes,  columbes  et 
pigeons;  de  poires  et  pomes<^  j'ay  plentee  ;  formage  et  noes  vous  ne  faillerez 
point,  et  puis  dez  oues,  bon  candelle,  et  a  vostre  lyt  une  damoy[se]le  beal  *. 

—  Dame,  grant  mercy  de  vostre  soper,  mes  de  nostre  lyt  lessom  «^  parler,  et 
de  nostre  dyner  '  demayn  a  matyn,  et  pus  nous  irrouns  nostre  chymin.  —  Syre, 
vostre  lyt  sera  fayt  bien  tost  et  bealment  pour  vous  coucher/  et  dormer  en 
ycelle  saunz  songer if  torment,  dez*  oraillers  dez  plumes  et  lynceux  blancz, 
materassez,  coverlitz  et  blanket,  curtyns,  testez  et  syllour  »  vous  y  avérez  tout 
entour.  —  Ore,  dame,  grant  mercy  de  vostre  beal  cheir.  Pernez  le  hanap  et 
bevez  le  vyn  cleir,  quar,  a  vostre  congee,  voillon  dormer.  Appeliez  [1*]  hos- 
teler  pur  nous  counter  combien  paieroum  pur  nous  chevalx  et  nostre  soper. 

VII.  Hostiller!  —  Syre?  —  Sount  nous  chivalx  appareillez  «  pur  toute  la 
noet?  —  Sire,  non  pas  unquor,  mes  lessez  vostre  garçon  venir  et  dire*  quei  de 
provendir  ils  avrount.  —  Johan  !  —  Mastyr,  quevuillez  vous? —  As  tu  sopé? 

—  Oyl,  syre.  —  Tien  le  hanap  et  bevez  une  foiz,  mes  ne  bevez  myetrop  haut 
pur  doubte  que  vous  soiez  ivrez  ;  et  puis  va  a  Testable  et  oustez  les  sellez  de 
lez  chivalx,  et  eaux  correiex  et  frotez  bien  ;  et  auxci  ccrchez  lour  pees  e  le[sj 
stoppez  de  coyne,  et  pernez  de  grece  et  de  bon  servoise  et  les  boillez 
ensemble,  et  lavez  ove  ycelle  toutz  lour  jambes,  et  auxci  pernez  de  ceef  et  de 
lyne+et  le  fryez  ensamble  en  une  paille  veille  de  ferre  ou  d*aresme,  et  stoppez 
le  pee  del  chival  gris  (/.  7/2)  qu'esteit  cloié,  et  puis  lour  donez  de  provendre 


1.  Faut-il  lire  porceîUs  ?  Dans  IdL'Mamtre  de  langage  (p.  386),  les  «  porceus 
et  porceletes  »  sont  mentionnés,  comme  ici,  entre  les  oies  et  divers  oiseaux 
sauvages. 

2.  Sur  ce  complément  habituel  de  l'hospitalité  telle  qu'on  l'entendait 
anciennement,  voir  la  préface  de  la  Mau.  de  hng.  (p.  376). 

5.  Le  tester  est  le  fond  du  lit,  la  partie  qui  s'élève  derrière  la  tête;  le  syllour 
est  le  ciel  du  lit.  Voy.  ma  note  sur  ces  doux  mots  dans  la  Man,  de  long,, 
p.  384,  n.  2,  et  sur  le  second,  le  \eu'  efiglisb  dictionnary,  cfxure. 

4.  Du  suif  et  du  lin  ? 

VI.  a.  Tri  n.  betayes.  —  h.  Trin.  est  ne  veux.  Mus.  br.  esturveux,  Univ. 
eslurneaux,  —  c.  Trin.  répète /\;irw.  —d.  Trin.  kssam.  —  e.  Mus.  br.  D,gr. 
m.  de  iH)stre  /i7^,  w^;^  de  nostre  dysner  lesson^  parler.  —  /.  Trin.  toucfxr.  — 
g.  Trin.  songer  et  corrigé  d'après  Univ.  ;  Mus.  br.  et  dormer  en  icelV  sauger  ou 
—  h.  Univ.  ajoute  piloue^  (l'angl.  pillows)  ou, 
VII.  a.  Trin,  apparculle^.  —  b.  Trin.  dur. 


S4  ^^^mr         p^  MHYER 

as^ez,  c*est  a  sa  ver  a  chascun  chival  une  pek'  d*aveyne  et  plus  de  pain,  sî 
vous  veiez  que  l>osoîgtic  soit  ;  cl  demayn  levez  bien  matyn,  et  appçlkî!  un 
Jîerrour^  le  meillour  qui  purna  estrc  trovcîî  a  la  ville,  et  lesse/.  lui  ferrer  ^ 
le  chivâlï  blanc,  le  chival  noire,  le  chival  sor^  et  lex  autrez  hakeneys 
enveyroun.  Et»  Jakcs,  je  loy  promette  veremem,  si  ceste  chose  ne  soit 
myc  fait  corne  je  vous  ay  dit,  ou  si  je  trovc  ascun  defaute  en  ta  personc, 
je  loy  fray  coruser  issîat  que  lu  comparre^  grevousement. 

VIU.  Hostilkrl  —  Syre  ?  —  Baillez  cea  de  jettoursS  et  lessoms  compter 
combien  nous  avons  a  la  chambre  kx  combien  a  resiable.  ^  Sir»  j'ay  compté 
ovesque  vostre  vadlel  Guillam  en  la  présence  de  sire  Hughe»  vostre  chapeleyn. 
—  Bien»  de  cella  je  suy  content.  Tien  ta  mayn  et  pernez  TargenL  Combien 
amounte,  trestout  compte?  —  Sir^  il  amounte  a  v  s.,  j  d.  meyns,  —  Ore 
appeïleE  la  dame  et  cmple  le  hanap  et  bayllcit  ■*  nous  a  boire,  Ffaïtez  nous 
avoir  ]«£  poumes  roste^  et  mette?  de  payn  tosiê  a  le  fés,  que  fra  nostre  beve- 
rachc  plus  fresk  ^ .  Dame,  beve?.,  m^  commencejî  ;  dame  pernez  vostre  hanap. 
^  Par  Diee,  sii-i  non  pas  devaui;t  vous,  si  vous  plaist.  —  Dame,  qoei  avrons 
demain  a  jiostre  dvner?  —  Sire,  vous  avrez  viande  asseJîj  coyïez,  rostez  et 
pestez;  mes  ditez  moi  vostre  volnntê,  quei  vous  aymerez  meulz.  —  Dame, 
faitez  nous  avoir  braQn  du  sengler  oveke  mustarde,  bons  joutes  ovesque 
boef,  moiun  et  porc  boillez,  (i-*)  etceosulïiceiapvir  hommes  travaillauntz.  — 
Dame,  ou  est  vostre  maistrc*  ?— -  Par  Dke.sire,  il  est  aie  a  le  feire  d*une  ville 
qu*estdys  kwes  de  cy,  appelle  Wodestukc''  ï.  —  Dame,  quclc  mcrchaundye 
voei  il  vendre  ou  achatet  illoeques?  —  Sir,  il  ad  la  a  vendre  boefs,  vaches, 
boveix,  vecles,  tores,  eysnes  et  joefnes  porcjt,  senglcrs»  iroyes,  chival»^ 
jumeotz,  polayns,  berbys%  motouns  et  berbys  du  mere^  toups/*»  agnelx, 
keduxi,  cheverelx.asnes,  mulcsetautrez  bestcs.  Il  aauxcilapur  vendre  .xse» 

1.  Mesure  d'avoine,  picotin  ;  «  pnk^  picottn,  la  quatrîesme  partie  d*un 
boisseau  «,  Sher^ood,  â  tiicL  rttgL  athi  frensh  (imprimé  à  la  suite  de  Col* 
grave).  L'ex,  cité  dans  Godcfroy  est  tire  d*un  texte  écrit  en  Angleterre, 

2.  Des  jetons,  pour  faire  les  comptes;  God*,  cirroiR. 

}.  Woodstodc»  Ûxfordshire,  â  il  HK  au  N.  O*  d'Oxford. 

4.  Là  leçon  nVstpas  douteuse,  6tani  cdo^rmée  par  le  ms.du  Musée;  mais 
le  sens  de  fti^rt  est  obscur.  Quant  à  tonp^  c'est  Tanc.  anglais  ittp,  cncoa*  usité 
dins  le  nord  de  l'Angleterre  et  en  Ecosse  pour  désigner  un  béïier.  11  y  a  dans 
Gautier  de  Btbbysworth  (mon  Hecutil,  p.  362)  un  vers  où  loup  est  employé 
en  ce  ^ns  :  A  M  fuU  dtrtni^  imp,  glosé  pr  tvyn  the  mm  atît  wresilyr^. 

5.  Dérivé  1  forme  française  de  kid^  chevreau?  P.-é,  fa  ut- il  supprimer  la 
virgule  entre  ce  mot  et  le  suivant  ? 

c,  Trin.  fffCfT.   —  4.  Trin.  fw^  ou  fmr,   Mus.  br.  Si^rrt,  Univ.  soir, 
VIIL  rf.  Trm.  (MÎyîf^*    —  h,  Trin.  /rtnk.  —  f.  Univ.  tnaril.  —  d.  Univ, 

ÏVimhfiitr^  —  r.  Ce  mot  manque  dans  Univ.  et  est  retn placé  d^ns  Mus.  br, 

par  fwir**  —  /,   Univ.  motum  t  mtrtbtrbei^  tot^. 


LES    MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE    CAMBRIDGE  55 

sackes,  .iij.toddes,  .iiîj.  percs  et  .v.  clowes  *  delayne,  deux  centz  peaux  lanuz, 
.xiiij.draps  longez  et  dys  doszeyns  démêliez  d'Oxenford,  .xx.kerseys  d*Abyn- 
done'  .X.  blanketzde  WytteneyJ,  .vj.  rougez  de  Castelcombe ♦,  .iiij.  russetde 
ColchesterJ,  scarletz,  bloyesou  pers  selestiens,  plunketz*  sanguyns  et  violetz 
en  greyn  rayés,  motlez  ^  de  Sarisbury,  et  autrez  divers  colours  de  plusours 
sortz  pur  faire  lyverées  si  bien  as  seignours  abbees,  et  priours  corne  as  autrez 
gentils  du  pays.  Il  a  auxci  de  lynge,  toille,  canvas  ou  cambre,  cordes,  savon, 
oyie,  fere,  peverez,  jugebre  et  autrez  espicerie  et  mercerye  a  taunt  come  lui 
coste  .c.  H. 

IX.  Syre,  je  vous  pri,  ou  pansez  vous  chivacher  ore  de  cy?  —  Dame, 
droit  a  Loundres,  si  Dieu  plaist.  —  Sir,  d*une  chose  je  vous  prieroy,  si 
j*osasse  ou  fuisse  si  hardy.  —  Dame,  pur  Tamour  de  vostre  maistreet  de  vous, 
je  fray  ce  que  je  purray,  savant  moun  estât,  a  vostre  pleser.  —  Sir,  j*ay  icy 


1 .  SaCy  tody  perCy  clot'e  sont  des  mesures  de  poids.  Le  sac  valait  28  stones 
(en  fr.  pierres ,  14  livres),  voir  Du  Cange  saccus  2  ;  \e  tod  valait  2  stones;  le 
clove  un  dcim-stone  (Murray.  New  engL  dici,,  clove).  Sur  perc]e  ne  suis  pas 
renseigné.  On  vendait  la  laine  au  poids  :  a  Les  laines  vend  on  par  sacs  et  par 
pois,  par  pierres  et  par  claus  et  par  livres  ■  {Le  livre  des  mestiers,  dialogtus 
français-flamands  composés  au  XIV'^  siècle  par  un  nuiitre  d'école  de  Bru^es^  p. 
p.  H.  Michelant;  Paris,  Tross,  1875  ;  feuillet  B  5  vo).Cf.  aussi  les  Dia- 
logues français-anglais  de  Caxton,  chap.  v. 

2.  Abingdon,  Berkshire,  à  peu  de  distance  d'Oxford.  —  Kersey  est  pure- 
ment anglais  ;  c'est  une  grosse  étoffe  de  laine. 

3.  Witney,  Oxfordshire.  Le  blanket  est  une  étoffe  de  laine  blanche  (fr.  hlan- 
chel);  p.-ê.  avons-nous  ici  le  sens,  qui  s'est  développé  en  Angleterre,  de  cou- 
verture. Witney  est  renommé  depuis  longtemps  pour  ses  fabriques  de  blan- 
kets: 

4.  Castlecombe,  Wilts.  L'industrie  de  la  laine  était  florissante  à  Castle- 
combe  au  xv*  siècle.  Elle  n'a  disparu  que  dans  la  première  moitié  du 
xviiie  siècle.  Voir  History  of  the  Manor  and  ancieni  barony  of  Castlecombe  in 
thecountyof  IVilts, ..hy  G.  PoulettScROPE,  p.  3.  [London]  1852.  (Printed  for 
private  circulation).  Le  rouget  était  vraisemblablement  une  étoffe  teinte  avec 
la  garance  (Du  Cange,  rogia,  roja).  Je  ne  trouve  ce  mot  en  aucun  diction- 
naire avec  le  sens  qu'il  a  ici. 

5 .  Colchester,  Essex.  Le  rousset  est  bien  connu  ;  voir  Du  Cange,  russetus. 

6.  Plunket,  «  a  coarse  woollen  cloth  »,  est  enregistré  par  Halliwell.  Ce 
mot  est  sans  doute  le  fr.  plonquiéy  désignant  une  étoffe  de  couleur  de  plomb 
(Godefroy);  cf.  Du  Cange,  plonquatus. 

7.  Motlevy  mottdey,  nom  d'une  étoffe  mentionnée  par  Chaucer  (Prol.  des 
Cant.  Taies,  v.  273),  est  rattaché  par  M.  Skeat  (Etym.  dict.)â  un  mot  français 
mattelé  enregistré  par  Cotgrave,  mais  d'ailleurs  inconnu. 


j6  p.    MEYER 

un  fiz  del  âge  die  ,3iij,  ans,  et,  sol  une  vostn;  av^ys,  il  est  la  {J.  î$j)  vol  ti  nié  de 
mauû  maîftre  et  de  moi  pur  Lui  estowcr  a  un  bon  home  de  mesiîer  en 
Loundres,  la  ou  il  purroil  bien  cstrc  cn5eïgn<î  et  governt!  en  l*^  man^re  d'ap- 
prentjrs  illoequtis.  —  Dame*  appeliez  i'cnfaunt  et  lesse?.  moi  lui  veicr. 
Mouu  fil,  avex  vous  esté  a  Tescok  ?  —  Oy,  sire,  par  vostre  congé.  —  A  quel 
lieu  ?  —  Syr,  4  l'ostelle  de  WilL  Kyngesiuylle  Esc'uen  •*  .  —  Beau  fyz,  com- 
ben  de  temps  avez  vous  demurezovesque  luy?  —  Sîre»  fors  que  un  quart  de 
an,  ^ — Cella  n'est  que  un  poi  temps;  mes  qu'avez  votis  jpriz  la  en  ycel  terme? 
—  Syr.  mon  maistre  m'ad  enseigné  purescnre,  cnditer,  acompteret  Eraunceys 
parler.  —  El  que  savez  vous  en  fraunceys  dire  r  —  Sir,  je  say  moun  noun  et 
mû  un  corps  bien  descrîere.  —  Ditez  moy  qu'avez  a  noun?  —  J'ai  a  noun 
Johan,  bon  enfant,  beat  et  sage  et  bien  parlant  engleys,  Lraunceys  et  bon 
normand.  Beoeyt  soit  la  verge  que  chasi[î]c  l'cnfaum  et  le  bon  niaisire  qui  me 
prist*  uunt!  Je  pH  a  Dieu  tout  puissant  nous  graunte  le  joyc  tous  di* 
durante 

X.  A u ici  \  sire,  j'esioy  ayr  a  le  feste  ovesque  mon  chief^ove  mon  tï*ste, 
mezcbivculjt  reccrdlez,  le  frount  devaiint,  le  col*  dcrcr,  Uî  ordïei,  les  oillcz 
ove  le  vcwe  clcre,  les  papiers  et  le  pumelîe,  lez  surcilea,  le  nées,  Icï  narrei  et 
te  tendron,  la  bouche,  ove  te  palet  a  mou  m  lez  deniz,  la  lange,  les  gyii> 
gyves,  ïef  Èiuk,  le  jowes  et  le  mentoun,  \^  K^^res  desus  et  desuiz  qu'en* 
closent  lez  denii  envyroun^  le  hanapel  ove  lez  terapïez  et  le  cervel,  le  fo6selei  >, 
la  gorge  devaunt,  la  gargalette  (t^Q)  la  ou  mon  aleyne  est  passant  En  my  le 
teste  est  le  grève,  le  cakcnole  *  Jercrc»  la  visage  devaunt  de  tout  le  teste;  je 
n'ay   cure  d*i  la  reraanant.  Jay  auïi  le  pys  ou  le  pcitrync*,  les  espaulea, 


I,  Il  semble  que  la  réponse  de  fctifant  soit  une  formule  riméc  apprise  par 
cœur. 

2-  On  a  dressé,  au  moyen  ige,  des  diverses  parties  é\à  corps  certaines  listes 
qu'on  peut  rapprocher  de  celle-cî  :  par  exemple  dans  îe  Dkiiùnarim  de  Jean 
de  Garlande  (Th.  Wright,  A  iH.ûumt  ef  vocâbularm,  p.  m),  dans  Gautier 
de  Bibbvsworth  (i/*/^.,  p.  144-^)  ;  dans  la  Manière  de  langa^^  (p.  582).  La 
plupart  des  fjominaiia  commencent  par  une  cnumL^ration  de  ce  genre* 

j.  Au  Cûoi  trovrré^  iû  fasset^  Gautïcr  de  Bibbysworih,  éd.  Wright,  p.  146, 
glosé  par  ir  daik  in  i&  nekki.  C'est  ïe  petit  creux  qui  se  trouve  derrière  la  tète, 
au-dessous  de  la  protubérance  occipiule. 

4.  Qikrmfk,  le  derrière  de  la  lètc,  n'est  pas  relevé  dans  !e  diaionnairc  de 
Godefroy.  Cependant  oe  mot  se  trouve  encore  dans  le  traité  de  G.  de  Bib- 
bysworth,  dant  un  pass^^e  du  reste  obscur  : 

E[n]  checuti  orayl  si  2À  mulet  hoîe 

Par  cakertoîi  c  ccrvé  net. 

IX.  a.  Univ.  Guiltûim  Scrivgiur^,  Mus.  br.  IT,  ir,,.ii(isî  abnégé,  et  le  troî- 
siè-ne  cnot  manque.  —  k  II  ùiut  eniendr^  a^riU^  mais  les  trois  mss.  ont 
prùL 

X,  tf*  Trin,  cor.  —  fr.Trin*  pHîtym. 


LES    MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  57 

blason  *  et  l'eschyne,  ventre,  os,  dos,  mamels,  costees,  coustees,  unibyl*  et  la 
peel  dehors  que  covere  le  vyt,  lez  coyllons,  le  cuyl,  la  chaar  et  tout  le  corps 
En  my  lyeu,  derer  mez  braas,  j'ay  lez  coubtez  sur  queux  je  décline  quant  je 
su  laas;  par  entre  le  coubte  et  la  cowe  de  ma  mayn,  j'appelle  un  cubyt  en 
longuer  certein.  Sur  mez  mayns  j'ay  les  deyes,  ou  lez  ungles  d'eaux  crcssantz,  et 
le  poynque  clost  la  mayn,  quant  j'ay  scié  unpoignon  de  bleededeins  la  paum. 
XI.  Dedeins  le  ventre  j'ay  le  coer  ou  qui  je  pause  de  mon  seen  d'ap- 
prendre et  fayre  bien,  boweles  en  qels  foy,  esplen  et  renoun»,  estomak, 
veyns  et  pulmon,  reyns  et  punyl  dehors,  feel  dedeins  et  vescye.  J'ay  auxi 
lez  jambes  ou  la  ssure,  quysseux  et  lez  genules,  nages  et  la  forcheure,  lez 
pîés  ove  les  kevyls,  les  urtiles,  le  plaunte  et  le  talon  dount  le  ffraunceys 
est  comun.  Auxi,  sir,  j'ay  de  draps  qu'apparteignent  a  mon  corps  de 
lynges  et  de  laynes  sengles,  furrez  et  doublez  dedeins  et  dehors,  chausez, 
solers,  botes  ou  hoseux  et  boteaux,  chausemblez  *,  esporons,  chemyse, 
brays  et  brael,  cote,  purpoint  et  kertcl  ?,  surkot,  mantel,  tabarde  et  cloke*, 
hopelonde,  chaperoun,  pilion  et  chapelet  et  autre  garnement,  ove  man- 
chez  longez,  largez  (/.  iS4)  et  bien  taillez,  •  et,  si  mestier  y  soit,  j'ay  une 
coiffe,  peigne  et  un  keverchief  de  soy,  de  fyle  et  de  cotoun  ;  mes  je  ne  vuille 
mye  oblier  ma  burse  ne  moun  aguler  ;  et  quant  ma  femme  serrât  enseyntée, 
ele  sera  seintée  de  bon  seinture  :  s'il  ne  soit  de  soy  il  serra  de  quyr  ;  mon  dage 
et  mon  cutell  bien  trenchant,  la  gaigne  beal,  et  espeye  et  bokeler  d'acer  fynou 
beal  forure  et  lemel  novel;  mes  je  ne  vuille  mye  tyrer  mon  espeye  hors  de  la 
foruresaunzgraunt  eye7  ou  cause  resonable,  quar  l'em  dit  en  seinte  Escrip- 
ture  :  «  Cyl  qui  coveyte  ferer  ovesque  l'espeye,  par  espeye  il  sera  feruz*  ». 

E  pur  tut  certefier  la  parole 
Conoustre  covent  la  cakenole. 

(Wright,  A  voU  of.  vocah,,  p.  146.) 
Dans  ce  texte  cakenole  est  glosé  par  l'anglais  lyerespon  (probablement  faute, 
pour  hernes  pan,  actuellement  barn-pan,  crâne  ;  voy  Ntiu  engl.  dict  ,  harn). 
Est-ce  le  même  mot  que  caquerole  (Godefroy  et  Cotgrave),  coquille  de  limaçon? 

1 .  Blason  se  trouve,  au  sens  d'omoplate,  dans  Gautier  de  Bibbysworth  et 
dans  la  Man.  de  hinar.  (p.  383,  n.  i);  voir  Godefroy. 

2.  Cf.  la  Man.  de  lan^.y  p.  383  :  «  la  poitrin,  lesmanieles,  les  coustees,  les 
costes,les  flans,  le  dos,  les  os,  l'eschine,  le  ventre,  l'ombril  ». 

3.  Rognon. 

4.  Le  même  que  clmuncemele,  chaussure,  dans  le  Promptuarium  pàrx'ulornm, 
I,  71,  (Camden  Society). 

5.  L'angl.  kirtle  (voy.  Murray,  New  engl,  dict.)y  sorte  de  tunique. 

6   Cloche  2,  Godefroy,  vêtement  de  dessus  qui  couvre  toute  la  personne, 
l'angl.  cloah. 

7.  Expression  elliptique  :  «  sans  grant  [besoing  d')  aïe  ». 

8.  Matth.  XXV,  $2. 


5 8  p.    MEYER 

XIL  Auxd,  beal  fyz,  je  toy  *»  enseigne  de  coraunc  langage  et  d'autre  manere 
de  parhnce,  et  de^  divers  choses,  bestez  et  de  gaynerie,  issim  «|uç  de  parkr 
droit  \*ous  ne  faïUerc:!  niye*  Si  vous  ireiex  a  bone  compaîgnîe  et  gmrp€£ 
ks  maveys  et  lour  folyç  ;  mes  d*iin  homme  ui  d*une  femtne  ut  de  lour 
enfaunt  il  nebosoigne  pas  purp^irler  taum  ^  de  lour  fij£,  file  ou  filetie,  garson, 
pusele  ou  garsetie,  valets  lowys,  servaiimz  ne  lour  apprentys,  veysyns, 
tiiaistres,  soveragnez  scignours,  subgitz,  Jour  amys  e(  bien  voiilantz,  austî  dez 
emperours,  roys,  dukts^  countes,  barons,  cbivalers  ci  esquier^.  Les^om  parler 
del  pape  auxî  et  dez  erce\^esques,  evesques,  archedekenes,  denes,  officiais^ 
prtïtres,  derkes,  abbees,  moîgnes  et  priours,  frères  et  chanons,  noneignies  et 
autres  religiouse^  ;  de  îa  roigne  atixi  et  de  la  duchesse,  d'autrez  damejt  et  de 
U  countesse,  delà  (t«)  soer  et  sorceresse»  de  les  veiller,  vewes  et  virgines,  de 
le;5  ribaudes  ou  paillardcz  puuignes,  putevileï  et  villayns  krofis,  félons  et 
t  rai  tours.  Autre  fraunceys  j'ay  aprys  pour  un  chate,  un  rate  et  un  sorys, 
Jyvre,  livre,  ïevere  et  leverer  a  estables  et  brichetz^  sieilespur  la  sale,  docers, 
blankers  ou  quarreuK,  cheyres,  auudyres,  fourches  de  fere  pur  le  feu, 
basyns,  ewcrs  et  chausours,  poz  et  paillez  d*aresme^  coupes  d'or,  pièces  ou 
tassez  d'argent  en  dorrejî  banaps  de  fiTraxmes  ovc  les  covercle/  peyntez, 
launces  de  verte,  hacher  de  guerre,  coynes  pour  couper  bastons  de  keyne  ri 
coignes  '  pur  lez  busches  fendre^  et  brgent  coignée  prendre  ^  ;  et  autre  armure, 
c'est  assaver  baysinct,  ou  lombrere  et  la  vcn taille,  plates,  pesynes'et  haber- 
geons,  vambras,  rerebras»,  quisseux  et  gauntz  de  plate,  arkes,  setes*  et 
cordes  pur  les  arkes,  vessclle  auxj  d'argent  et  d*esteyne,  c*est  assavoir  deux 
doszeinsdez  cuillers  d'argent  merchezove  le  teste  d*un  libani  «,  JÎj.  douszcvns 
plateaux,. iij.  doszeins  esquiles ^  et  .iij.  dos.  saucers. 


1.  Des  coignéu  pour  couper,  et  des  coins  pour  fendre  le  bois, 

2.  Manque  dans  les  dictionnaires  (pemm^  vase  -iï  huile,  dans  Godefroy, 
ne  saumit  convenir).  Mais  le  mot  s  est  conservé  en  ancien  anglais  :«  Fesanft 
a  gorget  of  mail  or  plate  attached   to  the  helmet  n  (Halîiwell)* 

3.  Avant-bras  et  arrière-bras,  pièces  d'armure.  Le  premier  de  ces  deux 
mots  est  dans  le  Complément  de  Godefroy. 

4.  SiiikSf  flèches. 

5.  Lihm-df  ancïetme  forme  anglaise  de  leopttnL  On  marquait  autrefois  Tar- 
gemcrie  eti  Angleterre  avec  une  tétc  de  léopard  ou  de  lion  (on  sait  que  ces 
deux  animaux  ont  été  confondus  eti  blason).  iMaîntenant  encore  la  marque 
anglaise  est  un  liati  passant. 

6.  Êcuelles. 

Xn.  tf.  Mus.  br.  /W%,  qui  semblerait  préférable  (à  condition  de  lire 
rmei^ni)  puisque  le  jeune  homrnc  réeitc  ce  qull  sait  et  nVnseîgne  pas.  Mab 
btî  fil  ne  s'accommode  pas  de  cette  leçon.  U  vaut  mieux  supposer  que  ce 
passage  est  emprunté  k  un  traité  où  un  maUrc  s'adressait  à  son  élève.  -  h> 
Corr.  pur  tant  partir}  -*  ^,  5ir  dans  les  iroln  mis, 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  59 

13.  Traité  d'orthographe  dont  le  début  est  : 

(Fol.  155)  Primo  sciendum  est  quod  Htterarum  alie  sunt  vocales,  alie 
consonantes.  Vocales  quinque  scil.  a  e  i  0 11,  et  dicuiitur  vocales  qui  a  per  se 
plenam  vocem  habent 

Ce  traité  se  retrouve  encore  dans  le  ms.  Addit.  17716, 
fol.  88,  et  dans  le  ms.  182,  fol.  340,  du  collège  d'Ail  Soûls 
(cf.  Stùrzinger,  Orthographia  gallica,  p.  m).  Il  y  a  dans  ces  deux 
mss.  un  préambule  qui  manque  ici. 

14.  (Fol.  159)  formules  d'adresses  de  lettres  selon  la  qualité 
des  personnes,  et  modèles  de  lettres  en  latin  avec  traduction 
française. 

15.  Le  mari  cocu,  battu  et  content.  —  Le  manuscrit  contient 
en  ses  derniers  feuillets  (ff.  179  v°  et  suiv.)  une  rédaction  de 
ce  conte  qui  est,  à  quelques  variantes  près,  identique  au  récit 
de  Boccace  (septième  journée,  nouvelle  septième).  La  princi- 
pale différence  est  que  l'action  se  passe  en  Bourgogne  et  non  à 
Bologne.  En  outre,  tandis  que  l'écrivain  français  nous  introduit 
tout  de  suite  in  tnedias  res^  Boccace  imagine  un  prologue  roma- 
nesque où  il  feint  que  le  héros  du  conte  soit  devenu  amoureux 
de  la  dame  avant  de  l'avoir  vue,  comme  Guillaume  de  Nevers 
dans  Flatnenca\  Du  reste  les  deux  récits  sont  à  peu  près  sem- 
blables, sans  que  l'on  puisse  affirmer  que  l'un  soit  imité  de 
l'autre.  Ils  ont  plutôt  une  source  commune. 

Le  conte  français  n'est  pas  inédit  :  il  est  publié  depuis  18 14, 
mais  le  livre  où  il  a  été  inséré  est  tellement  rare,  au  moins  sur  le 
continent,  qu'il  peut  passer  pour  inédit.  Ce  livre  est  intitulé 
Shahespeares  jest  Book,  Chiswick,  from  the  press  of  C.  Whittin- 
gham,MDCCCXiv,  in- 12.  L'avertissement  de  la  deuxième  partie  est 
signé  S.  W.  S.  (Singer).  Dans  cet  avertissement  (p.  ix),  Singer 
nous  dit  avoir  trouvé  le  récit  en  question  dans  un  curieux  traité 
manuscrit  sur  Tart  de  parler  français,  composé  du  temps  de 
Henri  VI.  Il  cite  en  note  le  début  de  ce  traité  *,  ce  qui  nous 

I.  Voici  ce  début  tel  que  Singer  le  transcrit  (partie  II,  p.  x)  :  «  Ici  comence 
un  tretis  de  douls  franccis  qu'anformera  aussi  ban  (lire  bUn)  les  petiz  comme 
les  granz  a  parler  bien  et  parfaitement  beau  franceis  selon  Tusage  et  la  man- 
niere  de  Paris  et  Aurilians  ». 


SO  p.    MFYER 

permet  d'idenufieric  manuscrit  dont  il  s'est  servi.  Ce  manuscrit 
est  un  petit  livre  fort  analogue  par  le  contenu  aux  mss.  add« 
17716  du  Musée  britinniqutf  et  Dd.  12,23  ^^  Cambridge,  qui 
ont  été  mentionnes  plus  haut  ',  Je  lai  étudié  jadis  k  Chelten* 
ham,  où  il  portait  le  n°  8r88  de  la  Bibliothèque  Phillipps.  Il  a 
été  vendu  en  1896,  et  jHgnore  où  il  se  trouve  actuellement.  Je 
sais  seulement  qu*il  n*a  pas  été  acquis  par  le  Musée  britannique* 
Sir  Th.  Phillipps  Tavaitacheté  à  la  vente  de  la  collection  de  Sir 
Richard  Heber  (Bihlsoîkra  Hektiana,  n'*  77  r)^  et  c'est  peut-être 
chez  Heber  que  Singer  l'avait  vu. 

Dans  le  ms*  Phillipps,  comme  dans  les  deux  mss.  précités  du 
Musée  britannique  et  de  Cimbridge,  le  conte  est  inséré  assez 
maladroitement  d:ins  la  Manière  Je  langage ^  où  il  ne  semble  pas 
qu'il  soit  à  sa  place.  Dans  le  ms.  d  après  lequel  j'ai  publié  la 
Manière  de  langage  (HarU  3988)  et  dans  celui  d'Oxford  (Al!  Soûls 
i82),iiy  a  tout  autre  chose  à  cet  endroit.  Dans  le  ms.  deTriuicy, 
le  conte  forme  comme  un  opuscule  à  part,  à  la  suite  des  formules 
de  lettres  :  je  ne  saurais  dire  si  le  copiste  Ta  trouvé  en  cette 
condition  ou  sll  Va  extrait  d'un  exemplaire  de  la  Manière  de 
langage.  Quoi  qu'il  en  soit,  voici  ce  morceau  (fol.  179  v**)  : 

M*amlc,  je  vous  etn  pri  qu'il  ne  vous  displest  point  dt  hi  compte  que  je  vous 
compicriy  inamtenant,  quar  verameïUje  nti  votisdirmy  point  de  mefiilMingê. 
Vra[i]tneîït,  m'amie,  il  est  le  pïus  meillear  compte  que  j'oy  unques  mais  [our 
de  ma  vie.  De  par  Dieux,  donquet  je  le  vous  dirray.  Jadys  y  avoit  en  Burgoyne 
une  dame  bien  gcntyl  et  sage  que  passoît  toutz  lei  autres  dames  de  cel  païs 
la  aussi  bien  de  bcut^^  corne  de  bountt^.  £t  celé  d^nie  avoit  un  baron  qe  fusi 
rnuh  bon  chivaler  et  vaillant,  aux»  il  avoit  un  csquier  demurant  en  lour  hos- 
lelle  que  fust  Hen  [oHet  an  coer%  z  astoit  aussi  home  de  muU  bon  h^Qn  et 
beus*  c  sibcn  e  gefuilmem  emâsUé  du  corps  que  ce  fust  merveilles.  Et  st  avicn! 
un  jour  que  dl  esquicr,  si  corne  il  regardoit  sur  la  dame  deï  hostelîe,  que  le 
corps  z  le  *:ocr  luy  furent  trcsiout  cnriYotez  pur  la  gr^m  bracîer  d'amour 
qu'il  en  out  devers  la  dame,  en  taunl  ne  savoii  que  dire  ne  que  taire.  Si 
endura  de  Jour  en  autre  très  grandez  palnez  et  dolours.  Puis  il  pansa  bien  que 
soîi  amour  ne  poett  estre  aperceu.  z  suffri  tant  de  tristesse  z  dotour  ou  cocr 
que  mîvt  »  ne  jour  ne  pouoît  mye  dormir.  Si  fust  il  naflre^  trop  pitousemeni 


t.  Cette  idctîtrfication  a  déjà  ùlé  faite  dansb  Romania,  XXÎV,  485,  â  pro- 
pos de  b  dissertation  de  M*  W.  H.  Schoficld  sur  la  nouvelle  de  Boccacc, 


a  Ms.  mrr.  —  ^  Ms*  ne) ni. 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  6l 

de  la  launce  d'amour  bien  près  a  la  mort.  Si  aviental  darreinsqueTescuier  s*en 
ala  parler  a  la  dame  tout  en  secret,  ainsi  lui  disant  :  «  Ma  très  gentile,  très 
amiable  z  très  sovepayne  dame,  fist  il,  je  vous  em  pri  très  entirement  de  coer 
q'il  ne  vous  desplece  de  ce  que  je  vous  dirray  maintenant.  —  De  par  Dieu, 
fist  ele,  me  ditez  vous  tout  quanque  vous  vuillez,  z  je  n'en  parlera[i]  ja  jour  de 
ma  vie,  ne  vous  sourciez.  —  Ore,  dame,  fist  il,  mèz  que  vous  ne  desplese, 
je  fu  si  dolourousement  nauftrè  ou  coer  del  ardant  amour  que  pieça  j'ay  eu 
z  enquore  ay  divers  vous,  que  je  ne  puisse  pas  longement  endurer  ne  vivere 
saunz  consolacion  de  vostre  très  gracious  persone,  pour  quoi,  ma  très  douce 
dame,  fist  il,  eiez  pitee  de  ma  dolour,  ou  autrement  vous  serés  cause  de  ma 
mort.  —  Donqucs,  dist  la  dame,  est  ce  voire  que  vous  en  (v»)  avez  tant 
d'amour  envers  moy  corii  vous  ditez?  —  Par  mon  serement  ■,  fit  il,  beal 
très  douce  dame,  si  est.  —  Ore,  fist  ile,  je  vous  ouitroie  m'amours, 
mais  pour  aconipler  vostre  désir  plus  privement,  je  vous  dirray  coment 
vous  frez.  Vous  savez  bien  que  mon  s^  se  purpose  de  chivachcr  hors 
de  la  ville  demain  après  manger,  et  pur  ce  alez  demander  maintenant  congé 
de  luy,  pur  aler  a  vous  amys  que  dennirent  en  le  païs  icy,  pur  certeine[s] 
bosoynes  que  vous  en  avez  a  faire;  z  quant  vous  rav[r]ez  fait,  pur  luy 
deceiver  *  plus  sotilment,  je  vous  conseille  que  vous  en  alez  sur  vostre  che- 
myn,  mais  demayn  anyut,  quant  il  sera  grant  oscurtce,  retournez  si  prive- 
ment come  vous  purrez,  et  venez  a  ma  chambre  parle  huse  de  ^ardyn» 
un  poy  devant  my  nuyt,  pur  cocher  ovesque  moy.  »  Lors  dist  [l'Jescuier  : 
«  Ma  très  gentyl  dame,  je  vous  remercie  soveraignement  de  coer  de  vostre 
amour  z  curtaisie.  >>  Et  puis  après,  quant  l'escuicr  avoit  congee  de  son 
seignour  pur  aler  a  sez  amys,  si  s'en  ala  bien  matyn  a  la  jour,  et  après  manger 
le  sr  commanda  sez  varlets  de  seller  lez  chivalx  pur  chivacher  hors  de  la  ville. 
Donques  vient  la  dame  del  hostelle  a  son  sr  et  lui  dist  *  ainsi  :  «  Mon  s^, 
fist  ele,  vous  ne  chivacherez  hors  de  ciens  mais  huy,  si  vous  plest,  quar  il  est 
déjà  bien  près  de  nuyt,  z  pur  ce  vous  conseille  d'esierJ  ceste  journée,  et  alez 
vous  demain,  —  Dame,  il  fist,  je  le  vuille  bien  «.  Si  avcnoit,  après  que  le  s' 
et  la  dame  avoient  soupe,  ils  s'en  alerent  coucher  ensemble.  Lor  vient 
l'escuier  a  mynuyt  tout  privement  a  lour  chambre,  si  coni  la  dame  luy  avoit' 
enseingné,  z  ne  quidoit  mye  que  le  s^  estoit  couchée  ovesque  la  dame.  Et 
quant  il  fust  venuz  a  coustee  du  lit  lou"  la  dame  coucha,  la  dame  luy  prisi  par 
la  main,  ainsi  luy  disant  en  son  oraille  :  «  Ne  souez  vous  mot,  fist  ele,  pur 
nulle  chose  de  mounde,  mais  escotez  vous  bien  a  ce  que  je  vous  dirray.  » 
Donques  la  dame  (Jol.  i8o)  se  loma  devers  son  s^  pour  luy  éveiller,  z  quant  il 
^ust  éveillé,  la  dame  luy  dist  ainsi  :  «  Mon  s»^,  fist  ele,  il  y  a  un  esquier 
demurant   en  vostre   court,  cil  qui  demanda  congee  de  vous  en  soir  *,  qui 


I  Ms.  sourement.  —  2  Ms.  deteitier.  —  ^  Vour  j a rdyn.  —  4  Ms.  dttist. — 
S  Ms.  daisUr,  —  6  Ms.  avoir.   —  7  Pour  la  ou.  —  8  Corr.  ersoir. 


6a 


P,    MÈYKK 


m'a  parte  z  requys  d'araour  pur  coucher  ovesque  nioy.  Se  vous  ne  crei^  myc» 
levez  su*  lost  z  vesiez  vous  en  ma  robe,  z  app[a]failïe?.  vous  en  ruant  rc 
z  guyse  de  moy»  z  aîez  vous  au'  verger  r  Tat tendes  isu  poy»  t  vous  vqttvz 
mctntenant  comeut  il  viendra  demenravoier  *.  »  Donques  le  s^  se  conietiç-i 
pur  esire  marry,  t  dist  :  «  Que  dea,  est  ce  voir  que  tudijîr  —  Vraiment,  mon 
s»",  fist  de»  cy  est,  n  Lot  k  s' se  leva  losc  bien  vigorousemeiK,  corne  un  hotnme 
forsenne^  z  5oy  vestoit  corne  k  dame  lui  a  volt  apris.  Ei  puis  s'en  aU  très 
fort  courrant  devers  k  verger  de  pros*er  ce  que  la  dame  lui  avojt  dit.  Donques 
dist  la  dame  a  i'escuîer  tout  ain^i  :  »^  Mon  amy,  fist  eie*  n'ave;^  vous  point 
de  taîent  pur  esbatre  ovesque  moi?  —  Par  mon  seretnctu*,  ma  très  douce 
danie,  fîst  il,  je  su  si  dîsconfiz  t  paoureux  ♦  ou  coer  que  je  n'ay  plus 
d'apetil  ne  voluntec  pur  esbatre  ovesque  vous  que  un  peiît  eiyfnnt  qui  n  entent 
point  de  nul,  ^  Oic,  fit  ele,  faitez  vous  un  chose  que  [c  vous  Jirray,  et  vous 
en  avrez  m*araour  as  toutz  jours  maïs  devaunt  toutz  auirez  du  monde,  saunz 
faire  changement.  —  Par  Nostrc  Danie  de  Bol  oigne,  fist  il,  je  le  ferai  très 
volunters  sî  je  purrai  —  Maintenant,  lit  ele*  preïmés  un  hon  baston  z  alez  vous 
au  verger,  z  ta  vous  troverez  mon  s^  arrayê  en  manere  z  guyse  de  moy,  z 
batef  lui  bien,  z  doncz  lui  dex  bons  horions  sur  le  dos,  ainsi  lui  disant  :  «  Va 
V  t'en  a  ton  lit,  mavaisc  putaigne  que  tu  es,  va  t'en  de  par  deable  et  de  pur  sa 
m  mère,  ove  tout,  ou  autrement  je  toy  rumperay  le  col  devant  que  tii  te  bou- 
•  géras  jie  cy  *>  ;  quar  vra[ijment,  fi  si  eîe,  *ie  vous  le  faitst  ainsi,  il  n'avra 
unquL's  mais  après  mal  suspcçun  de  nous,  et  en  (1*^)  tiel  manere  nous  purroms 
faire  tout  nost  re  désir  en  temps  a  venir  bien  et  prîvement,  sauni  escient  de  îuî 
ou  d'ascun  autre.  ^  Si  Dieu  m'aide,  ma  très  gracioiis  dame,  fîsi  il,  je  m*en 
îrrày  volumiers  pur  vostre  comandement  acompler.  r>  Kt  quant  il  fust  venu  au 
verger,  il  regardoii  le  s^  corne  le  graunt  deable,  ïuy  donaunt  des  horriojis 
tré's  bien  assis  stcoiti  ta  dame  luiavoit  coniandee,  ainsi  lui  parlant  com  il  fust 
apris  par  devant  ;  t  lost  après  le  %^  se  coitra  bien  igiielment  a  sa  chanabre, 
et  puis  dist  le  sr  a  h  dame  ainsi  :  «c  Dame,  fîst  il,  cil  cKuter  de  quoi  vous 
m*efi  parbste^  m'a  très  malement  batu,  quar  il  quidoit  que  vous  y  fustei, 
par  quoy  je  say  bien  cju*il  est  bien  loialx  a  vous  et  a  moi,  et  pur  ce  je  vous 
feray  très  bien  acorder,  ^uar  ce  qu'il  a  faii  il  ne  fist  que  soulemcni  pur  vous 
a  tempter.  —  Ore,  mon  sf  je  le  fcray  a  vostre  comandement.  n  Et  puis  apnb 
b  dame  et  Tcscuier  avoient  tout  dix  lotir  voluntees  d'esbatement  et  desduyt, 
saunï  escient  de  nully,  et  en  tiel  manere  le  s"  fust  deceu  par  coyntise  d'une 
famé,  quar  pur  le  greinur  partie  toutes  les  famés  du  mounde  sount  plains  de 
mavelstee  z  treso^*  Et  pur  ce  le  sage  Salenion  dit  ou  livre  de  Sapience  qu'il 
n'y  a  malice  eo  toute  le  monde  que  surmonte  la  malice  d'une  maveisefemme  s, 
Dount  je  prî  a  Dieu  qu'il  vous  vuUk  bdn  garder  de  euat.  Amen. 


l  Ms.  4,  —  2  Sk.  COTT,  «rfr  mn  tmwF  (ravir)?  —  }  Ms,  sctirtmtnt.  — 
4  Ms  fationux,  —  s  EccLi,  XXV,  lê. 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE  CAMBRIDGE  63 

R.3.20.  —  Ballades  françaises. 

Ce  livre,  en  papier  et  écrit  vers  le  milieu  du  xv«  siècle,  est 
un  recueil  de  poésies  anglaises  et  françaises  dont  le  détail  est 
donné  par  M.  James  dans  le  t.  II  de  son  catalogue.  Je  me  borne- 
rai à  relever  ici  les  pièces  en  français,  pour  l'identification  des- 
quelles notre  collaborateur  M.  Arthur  Piaget,  si  versé  dans  la 
littérature  du  xv^  siècle,  a  bien  voulu  me  fournir  des  rensei- 
gnements très  précis. 

Les  pages  '  25  à  37  renferment  des  rondeaux  et  une  ballade 
en  français  composés  par  le  comte  de  Suffolk  *  du  temps  qu'il 
était  prisonnier  en  France,  whylest  he  was  prysonnier  in  France^ 
dit  une  des  rubriques,  ou  à  sa  sortie  de  prison.  —  Pages  82-3, 
la  Desputacion  entre  Salomon  ly  saage  et  Marcoulf  le  fook.  Premiers 
vers  : 

Salomon  dit  :  Marcoulf  respont  : 

Mortalité  et  guerre  De  putayne  sourd  maulx 

Sount  exil  de  terre  Et  guerres  mortaulx 

Et  dcstruizement.  Et  périls  des  gens. 

C'est  une  pièce  bien  connue  se  rattachant  à  un  sujet  sur 
lequel  on  a  beaucoup  écrit..  Le  texte  du  ms.  de  Trinity  a  été 
publié  parKemble,  Anglo-saxon  dialogues  of  Salotnon  and  Saturn 
(^jElfric  Society),  p.  78.  On  a  d'assez  nombreuses  copies  des 
mêmes  couplets '.  Voici  maintenant  la  liste  des  ballades  fran- 
çaises, accompagnée  de  notes  que  m'a  fournies  M.  Piaget  : 

(P.  49)  Ran Je  (lis  Rens  to/).  —  A  quoy  ?  —  Tu  le  savras. 

Rejr.  Car  jo  ne  ne  soy  meillour  trover. 

(Eust.  Deschamps,  X,  xxvi). 

1 .  Les  pages,  et  non  les  feuillets,  sont  numérotées. 

2.  William  de  la  Pôle,  comte  de  Suffolk  en  141 5,  créé  marquis  en  1444, 
décapité  en  1451.  Voir  Dugdale,  Barona^e  of  England,  II,  186-9;  I^^^t,  of 
national  htograpbyy  XL VI.  50  (PoLE,  William  de  la),  etc.  On  sait  que  le 
comte  de  Suffolk  fut  fait  prisonnier  par  Jeanne  d'Arc  (12  juin  1429).  Mais  il 
fut  bientôt  remis  en  liberté,  après  avoir  payé  une  forte  rançon.  Il  fut  pour 
un  temps  (1433)  ^^  gardien  de  Charles  d'Orléans. 

3.  Voir  Kemble,  ouvr,  cité,  p.  77;  cf.  Hist,  litt.  de.  la  Fr,,  XXIII,  688-9, 
Le  Roux  de  Lincy,  Livre  des  pi  av.,  II,  548;  Ihill.  de  la  Soc.  des  anc.  textes, 
1876,  p.  82;  1877,  p.  91,  etc. 


i 


\ 


64  p.    MEYER 

(P.  49)  Icy  comence  un  balade  flPrançoys  fait  par  le  plus  grand  poetical 
clerk  du  Paris. 

Le  monde  va  en  amendant. 

(Cette  ballade,  qui  a  pour  refrain  Ainsi  que  Vescrevisse  va,  se  trouve  dans  le 
ms.  B.  N.  fr.  2206,  fol.  103,  sous  le  titre  de  «  Ballade  pour  les  Mondains  >;  dans 
Berne  205,  fol.  206  v*;  dans  le  ms.  du  cardinal  de  Rohan,  fol.  20  '  ;  dans  le 
Jardin  de  Plaisance,  éd.  de  Vérard,  fol.  ex.) 

(P.  89)  Tant  de  perilz  sont  a  suïr  la  court. 

fifff'  D'avoir  en  court  un  pié  hors  et  Tautre  ens. 

(Eust.  Deschamps,  II,  p.  30;  anonyme,  d'après  un  ancien  imprimé,  dans 
Montaiglon,  Rec.  de  Poésies  fr.,  IV,  32  ;  se  trouve  en  divers  mss.  :  Turin,  L. 
IV,  3,  fol.  116;  Berne,  473,  fol.  93  ;  Vienne  (Autriche)  2602,  fol.  42). 

(P.  90)  Qui  ses  besoigncs  veult  bien  faire. 

Refr,  Mon  seigneur  dit  bien  ;  il  a  droit. 

(Eust.  Deschamps,  X.  p.  xxi  ;  mais  cette  ballade  n'est  pas  de  Deschamps  : 
voir  Bull,  de  la  Soc.  des  auc.  textes,  1901,  p.  66.) 

(P.  91)  Les  biens  mondains  et  toulx  les  accessoires. 

Refr,  Avisons  nous  :  il  nous  convient  mourir. 

(P.  92)  Puis  que  je  suy  fumeux,  plain  du  fumée. 

Refr.  Quant  on  fume  sans  fere  autruy  dommage. 

(Eust.  Deschamps,  X,  p.  xiv.) 

(P.  93)  Amours  est  bien  par  son  noun  appeliez. 

Refr.  Con  lui  respont  :  Encor  n'est  il  pas  temps. 

(Eust.  Deschamps,  X.  p.  v.) 

(P.  9j)  Ma  doulc-j  amour  et  dame  souveraine. 

Refr.  Et  loyauliés  tenir  ou  que  je  soye. 

(Le  premier  vers  est  semblable  à  celui  de  la  pièce  publiée  dans  les  Œttvtes 
d'Eust.  Deschamps,  X,  p.  Li.) 

(P.  95)  Vous  me  priez  si  amoureusement. 

Refr.  Je  vous  respons  que  je  m'aviseray. 

(C'est,  comme  l'indique  la  rubrique,  la  réponse  à  la  ballade  précédente.) 

(P.  96)  Je  me  merveil  du  désir  qui  m'esprent. 

Refr.  Je  la  regarde  et  n'ose  dire  rien. 


I.  Sur  ce  ms  ,  dont  on  n'a  plus  qu'une  analyse  accompagnée  d'extraits, 
voir  Rotnanidy  XXI,  428. 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE  CAMBRIDGE  éj 

(P.  97)  Puis  que  désir  me  fait  estre  amoreux. 

Ktfr,  Dieu  la  parfîst  pour  abellir  le  mond. 

(P.  98)  A  vous,  dame,  humblement  me  complaine. 

Ktjr,  Vray  corps  geniilz,  pour  vostre  amour  mourray. 

(B.N.  fr.  2264,  fol.  41  vo.) 

(P.  99)  Vous  qui  fuistes  en  jeunesse  moult  cointe. 

Ktfr.  D'amer  aultruy  ne  d*aultruy  estre  amée. 

(Ms.  de  Westminster  Abbey,  fol.  28,  voir  Bull,  de  la  Soc,  des  anc.  textes ^ 
1875,  p.  32.) 

(P.  99)         J'ay  fréquenté  maint  compagnon  galant. 
Refr.  Alez  a  Dieux,  car  gales  sont  failliez. 

(P.  100)  J'ai  veu  et  hanté  longement. 

Refr.  Nul  n'est  prisié  s'il  n'ait  chevanche. 

(P.  ici)  On  par[o]le  de  maladie. 

Refr,  Il  n'est  rage  que  d'avoir  fain. 

(P.  102)        Je  Fortune,  de  ce  mounde  emperier[e]. 
Rejr.  Car  tôt  ou  tarde,  compter  fauh  qui  reçoit. 

(P.  103)        Qpe  vaut  trésor  qui  n'a  joye  ne  leesse? 
Refr,  Qui  plus  avra  plus  dolent  mourra. 

(P.  103)  Je  voy  les  estas  amender. 

Refr.  Par  S.  Mor  !  c'est  tout  a  rebours. 

(P.  104)        Que  fais  tu,  derk,  que  veux  tu  que  je  die  ? 
Refr,  Me  dis  tu  voir?  Oïl,  sainte  Marie. 

(Musée  brit.,  Lansdowne  380,  fol.  219;  fardin  de  Plaisanu,  éd.   Vérard 
fol.  Ixij  vo;  Campaux,  François  Villon^  p.  363.) 

R.3.56.  —  Petit  traité  de  conjugaison  française. 

Pour  la  description  de  ce  curieux  petit  manuscrit,  composé  de 
parties  originairement  distinctes  (xiii*  et  xv*  siècle),  et  réunies 
sous  une  même  couverture,  je  renvoie  à  la  description  donnée 
dans  le  t.  II  du  catalogue  de  M.  James.  J'appelle  l'attention  en 
passant,  sur  une  satire,  souvent  spirituelle,  parfois  un  peu 
lourde  et  même  grossière,  de  la  cour  de  Rome  et  des  mœurs 
du  haut  clergé  vers  la  fin  du  xii*  siècle,  qui  occupe  les  ff.  35  à 
42  du  volume.  C'est  le  récit  des  moyens  par  lesquels  un  très 
fabuleux  archevêque  de  Tolède,  appelé  Grimoald,  obtint  du 

Ann«»i«.  xxxu  c 


66  p.    MEYER 

pape  Urbain  (probablement  Urbain  III),  le  titre  et  l'office  de 
légat  d'Aquitaine.  Ce  petit  roman  est  en  latin  :  il  ne  serait 
pas  à  sa  place  dans  un  mémoire  consacré  à  la  littérature  fran- 
çaise. Je  me  borne  à  en  donner  le  commencement  en 
note  '. 

n  est  plus  à  propos  de  mentionner  un  court  traité  de  la  con- 
jugaison française  envisagée  au  point  de  vue  syntaaique,  qui 
occupe  les  fol.  47  verso  et  48  recto.  C'est  un  morceau  assez 
intéressant  par  sa  date  —  l'écriture  n'est  pas  postérieure  au 
milieu  du  xiu'  siècle  —  et  par  la  conception  qu'il  révèle.  C'est 
l'œuvre  d'un  véritable  grammairien,  qui  s'attache  à  bien  établir 
le  rapport  des  temps  en  latin  et  en  français.  Je  ne  connais  pas 
d'autre  exemplaire  de  ce  petit  traité,  ce  qui  ne  veut  pas  dire 


I.  Quo  tempore  Urbanus,  Romane  ecclesie  avidissimus  pontifex,  beatissi- 
morum  corpora  martyrura,  Albani  \idelicet  et  RufRoi,  Romam  transferrei, 
Galliarum  collecta  ecclcsiis,  dumque  ea  raanibus  propriis,  utpote  Wr  religio. 
sus,  marsupiîs  deauratis  gloriosissime  sepelirct,  Grimoaldus,  Toleune  ecclesie 
archiepiscopus,  quasdam  predictorum  martyrum  reliquias  forte  inveniens,  in 
gazofilatium  sancte  Cupiditatis  transferre  eas  diligenter  accuravii.  Intelli- 
gens  vero  eas  placere  Romano  pontifici  (noverat  enim  viri  compunctionem), 
easdem  secum  tollens  Romam  profectus  est.  Suspirfabjat  autem  idem  Tole- 
tanus  pontifex  ad  habendam  Equitanie  legationem,  quam  ex  bcati  Gregorii 
ordinatione,  antiquis  attestantibus  privilegiis,  Toletana  metropolis  obtinuerat. 
U:îde  ignavie,  immo  pudoris,  Wdebatur  si  unte  graviuiis  persona,  um  pin- 
guis,  rani  rotunJa.  un  dclectabiîis  suorum  privaretnr  dignitate  predeccsso- 
runi.  GrTcrum.  licct  plenis  arrideret  calicibus.  ([erat]  enim  fortis  adbibendum 
vinuiîi),  iicc:  Jics  e:  noctcs  sterterei  (vigilare  enim  non  poierat),  licet  vcn- 
trem  haberet  poniiticis  (  rurgebat  enim  venter  extentus  non  modicum  utpote 
ubi  sa"mo  totus  uno  prandio  ^epcliri  consueverat  >,  licet  innocentera  proscri- 
berc,  justum  pcr^cqui.  paupcrem  incscare,  suis  orph-num  patrimoniis  violen- 
ter emungere,  religioni  asjriberct  ;  li>:e:  in  omnibus  iatJi;cret,  si  quid  modo 
forte  veriuîis  attîgisseî,  verecu::Jari;  licet  inquam  prennitispollerct  \-irtutî- 
bus  cetcrisquc  quibus  hac  tcmpestate  pinguissimi  promoveniur  pontifices, 
minime  umen  Romane  ecclesie  haberetur  Icgaïus.  nisi  preciofas  supradicto- 
nim  martyrum  reliquias  representaret  Romano  pontitici.  Hiis  igitur  munitus, 
proui  videbatur  necessarium,  Romanam  ingressus  est  civitaiem... 

On  sait  que  dans  le  mi'-nde  des  joyeux  clercs  du  moyen  âge.  les  reliques  de 
samt  Kjrtirî  et  de  «u'n:  \\'^::\  dciij:ia:e:it  :oj:  si.î^p'cmcr.t  i'or  et  Targent. 
Voir  \ci  :e\:c>  ^-w  j'-i;  :cj::i>  .;  Ce  propjs  dans  une  n^ie  de  V Histoire  de 
GuilUunu  le  Maréchal,  IIL  i>i. 


LES   MANUSCRITS  FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  67 

que  le  manuscrit  de  Cambridge   soit  unique  :    un  texte  aussi 
court  échappe  facilement  aux  recherches*. 

Modus  indicativus  uno  modo  construitur.  Preteritum  perfectum  modi 
indicativi  verbi  activi  duobus  modis  construitur,  verbi  gracia  :  Amavi,  jo 
atnai  et  fo  ai  amé.  NuUum  aliud  teropus  ejusdem  modi  et  verbi  ejusdem 
variis  modis  construitur.  Nullum  tempus  imperativi  modi  varias  recipit  cons- 
tructiones.  Presens  et  preteritum  impertectum  tempus  optativi  modi  uno  modo 
construitur.  Preteritum  perfectum  et  plus  quam  perfectum  optativi  modi  tri- 
bus modis  construitur,  verbi  gracia  :  Utinâm  amavissem,  la  meie  volunté  jo 
aveieaméj  ctjo  eusse  amé  y  et  jo  avérai  amé.  Futurum  tempus  uno  modo  semper 
construitur.  Presens  conjunctivi  uno  modo  construitur  ;  preteritum  imper- 
fecti,  duobus  :  Cum  amarem,  ctitn  jo  avoe  amé,  et  cum  jo  atnasse.  Preteritum 
perfecti  tribus  :  Cum  amaverim,  cum  jo  amai  et  cum  jo  ai  atné.  et  cum  jo  eie 
amé.  Et  notaquod  quando  construitur  cum  jo  aie  amé,  tune  optative  pônitur.... 

A  la  suite  des  observations  sur  les  temps  viennent,  au  feuillet 
suivant,  des  gloses  sur  un  texte  qui  n'est  pas  déterminé.  Les 
premiers  mots  glosés  sont  immunis,  nubere,  facerCy  merere^  crepare, 
discrimen.  Il  y  a  quelques  mots  français  dans  cette  glose  :  ainsi  : 

Crepare  idem  est  quod  sonare,  et  inde  iiec  crepida,  bote  a  muine cre- 

pare,  crever (Fol.  49)  cogère,  cunstreitidre^  et  cogère  asemhler Fisiula, 

cunduit.,.  gutefestre  et  fresiel (Fol.  $0  vo  )  cratis,  ^r«i//,  gall.  et  cleie 

celare,  celer  et  entailer (Fol.  55  v©)  Hoc  idioma,  Ifinguage.  Burnellus  : 

Mox  idioma  suum  vertens  Galienus  et  orans, 
Subridensque  parum,  sic  benedixit  ei. 

Hic  poples,  poplitis,  garei.  Unde  Burnellus  : 

Poplite  deflexo  vertice  pronus  humi. 

BurnelluSy  ailleurs  BrunelluSy  est  le  nom  du  personnage  prin- 
cipal (un  âne)  d'un  poème  en  distiques  composé  en  Angleterre, 
vers  la  fin  du  xii*  siècle,  par  Nigellus  Wireker,  préchantre  de 
l'église  de  Cantorbéry,  et  plusieurs  fois  publié  de  la  fin  du 
XV*  siècle  au  xvII*^  Il  a  été  imprimé  en  dernier  lieu  par 
Th.  Wright,  The  anglo-latin  satyrical  pœfs,  t.  I  (1872).  Voir, 
sur  Tauteur,  le  même,  Biographia  Britannica  litteraria,  II,  353. 

1.  On  soit  qu'il  existe  des  traités  de  la  conjugaison  française  composés 
en  Angleterre  â  la  fin  du  xiv*  siècle  ou  au  commencement  du  xv»;  mais  ils 
n*ont  aucun  rapport  avec  celui  dont  on  va  lire  le  début. 

2.  Sous  le  titre  de  Spéculum  stuUorum  :   voir  Brunet  Manuel  du   libraire , 

5*  éd.,  V,   I2I5,SOUS   ViGELLUS. 


68 


p.    MEY£R 


Cl.  17^  —  Urbain  le  Courtois,  —  Lk  plainte  d* amour- 

Ce  manuscrit,  qui  a  le  format  d'an  petit  în-4*'  (hauteur  0,195, 
largeur  o,i3î)i  ^  compose  de  288  feuillers  de  diverses  écri- 
tures, donc  les  264  premiers  sont  écrits  en  Lniti.  On  trouvera, 
dans  le  t.  10  (sous  presse)  du  catalogue  de  M,  James,  l'indi- 
cation précise  des  ouvrages  quMl  renferme.  Je  me  borne  ù  une 
rapide  et  sommaire  énutnération  : 

FoL  i>  les  R^ûgmihttfi.Qu  Pdn  itintfarium,  attribue  au  pape  Clément  L 
FôL  loj,  un  pfûvinçmlt, 

FoL  no,  VHhtoria  Brittottum  de  Gaufroi  de  Monmouih. 
Fol,  185,  les  MéditiUions  de  saint  Bernard, 
FoL  200  vu,  Hisioïre  d'Aleiciindre  le  Grand  (c'est  Tabrégé  de  Julius  Vâlt- 
rius). 
Fol.  212,  rHîstoire  des  ducs  de  Hormandie,  de  Guillaume  de  Jumiêges, 
Fûh  2St,  rÉvangîle  de  f*Enfance. 
FôU  265  Cl  suiv.,  les  ouvrages  fran^^alsdùiit  le  deuil  est  donne  d-après. 

Au  bas  du  foL  267  on  lit  :  Likr  mon.  de  Wlmïky,  Tabbaye 
cistercienne  de  Whalley,  comté  de  Lancastre,  fondée  en  1296 
par  Henri  de  Lad,  comte  de  Lincoln,  dont  les  ruines  existent 
encore, 

1 .  Urbain  k  Courtois.  —  C'est,  comme  on  disait  au  moyen  âge, 
un  «  enseignement  m,  ou,  plus  spécialement*  pour  employer 
un  terme  plus  moderne,  un  traité  de  civilité  puérile  et  honnête. 
J'en  ai  signalé  jadis  cinq  manuscrits  (y  compris  celui  de  Trinity) 
dans  manotîcedu  ms.  Douce  210',  publiant  en  même  temps, 
d'après  ce  dernier  manuscrit»  les  premiers  et  les  derniers  vers  du 
potme'p  Les  mêmes  vers  sont  de  nouveau  imprimés  d'après  le 
ras.  Gg  i*ï  de  rUniversité  de  Cambridge,  dans  la  Romania, 
XV,  ^84.  Enfin  la  leçon  de  ce  dernier  manuscrit  a  été  publiée  en 
entier,  dans  un  per  ru^^^  par  M.  L.  Biadene',  k  qui  j'en  avais 
tbumî  la  copie.  Comme  cette  édition  est  naturellement  fort  peu 
répandue,  je  crois  utile  de  transcrire  ici  le    texte  du  ms.   de 


t,  Bulkiin  de  la  îo(.  dis  anc.  Itxies,  18S0,  p.  7î. 

2.  Il  faut  maintciianï  ajouier  à  celte  liste  la  copie  rcntermèe  dans  le  ms, 
B.  14.  40,  décrit  plus  haiâf»  p-  45- 
j.  No££cCrivdluci-Brumt.  Pîsa/febbra.b  1895, 


LES   MANUSCRITS    FRANÇAIS   DK   CAMBRIDGE  69 

Trînityj  d'autant  plus  qu'il  diffère  beaucoup  du  ms.  de  TUniver- 
sUé. 

Urbain  le  Canrkvs  est  un  titre  qui  n  a  été  conservé  que 
par  une  de  nos  copies,  celle  de  TUniversité.  Je  crois  cependant 
que  les  deux  vers  où  ce  nom  figure  sont  authentiques,  et 
qu'ils  ont  été  simplement  omis  par  les  autres  copies*  Le  nom 
d'Urbain  a  été,  selon  toute  apparence,  emprunté  à  quelqu^un 
de  ces  poènfîes  kcins  qui  contenaient  des  préceptes  sur  la 
manière  de  se  comporter  dans  le  monde,  ou,  si  l'on  veut,  des 
règles  de  courtoisie.  Nous  connaissons  au  moins  deux  poèmes 
qui  ont  reçu  le  tilre  à'Urbanus,  Je  vais  dire  quelques  mots  de 
Tun  et  de  Tautre*  John  Baie  '  nous  apprend  qu'un  certain 
Daniel  Churchc,  sive  Ecclestensis^  homme  de  noble  origine,  ayant 
vécu  pendant  une  trentaine  d*années  à  la  cour  du  roi  Henri  11, 
avait  composé  un  poème  latin  jntitnlé  Urbanus.  Ce  poème, 
Baie  ne  la  pas  vu  :  il  tire  ses  informations  d*une  chronique 
qu'il  désigne  d'une  façon  assez  vague  (quoddam  chroniam  nu  pet 
tondini  rcpertum),  et  qui  nous  est  inconnue  comme  beaucoup 
des  manuscrits  vus  parBale;  elle  doit  avoir  disparu  vers  le  milieu 
du  xvr  siècle,  alors  qu*une  rage  de  destruction  sévit  sur  les 
bibliothèques  anglaises,  Fabricius  ^  ajoute  aux  données  fournies 
par  Baie  cette  notion  nouvelle  que  le  poème  était  en  hexa- 
mètres et  qu'il  commençait  par  Cum  nUnl  utilius.  Il  signale  en 
même  temps  un  manuscrit  de  ce  poème  à  Trinity  Collège, 
Dublin.  Il  est  de  toute  évidence  queTidentification  proposée  par 
Fabricius  est  purement  conjecturale.  Nous  connaissons  bien  ie 
poème  didactique  commençant  par  Cum  nihil  fitilius.  Il  en  existe 
de  nombreux  manuscrits,  outre  celui  de  Dublin,  et  il  a  été 
imprimé  dès  la  fin  du  xv^  siècle  dans  le  recueil  intitulé  Juciares 
€*r/cj  continentes  libres^  viddmt  Caîbomm^  Factîum^  Thtodolum.,.  ' 
iCest  le  Fûceîus  qui  a  été  mis,  bien  à  tort,  sous  le  nom  de 


1.  Scriptitritm  iUmtrium  maprii  Briîanniœ Caîdlcfus.  Sasile^  [MSJ]* 

in-fol.,  p.  221,  Le  recueil  alphabétique  iJe  notes  de  Baie  qu'on  a  récemment 

pu  Nié  à  Oxford  (Arucdota  OxQm/n$k M^dixt'aidmi  modtrtt  serks,  fmri.  IX) 

15*1  joute  rien,   sur  le  poim  qui  nous  intéresse,  a  ce  <|ue  renferme  Touvragc 
inipnnié,  et  est  même  nioins  complet. 

2.  BïMhiiK£a  ktina  mtdim  d  infimat  Liliniiaîis^  sous  Cherche* 
j.  Hain,  n«î"  1915-191  g,  Copinger,  n"*  717-743. 


70  A|lA,S|fEYËR 

Jean  de  Garlande^  Rien^né^permet  de  supposer  qu'il  ak  été 
composé  eu  Angleterre  par  un  contemporain  de  Henri  H.  Mais, 
ce  qui  nous  iniéressej  c'est  qu'il  a  été  désigné ,  eu  certains 
manuscrits j  sous  le  titre  de  Liber  Urbani^  d'oùj  assurément 
ridentificatiori  donnée  comme  certaine  par  Fabricius.  L'un  des 
manuscrit?;  où  le  livre  est  ainsi  appelé  se  trouve  à  Cambridge, 
Saint  John's  Collège^  F  lo.  Dans  cette  copie  on  lit  à  la  6n 
ces  mots  qui  paraissent  bien  être  une  addition  due  â  un  cppiste. 

. , Liber  explicit  hicque  Facelm. 

Scribitur  Vrhanm,  sit  Mriptor  a  cri  mi  ne  sanus. 

ExpUdt  Hher  Urhantl 

Arrivons  à  l'autre  poème,  qui  paraît  avoir  porté  d'une  façon 
plu5î  spéciale  le  titre  â'Urbanm.  Celui-là  semble  devoir  être 
identifié  avec  le  poème  composé,  selon  le  Chmnicon  que  men- 
tionne Baie,  par  un  personnage  de  la  cour  de  Henri  IL  II  n'en 
subsiste,  ï  ma  connaissance,  que  deux  extraits  transcrits  dans  un 
manuscrit  du  xnr  siècle,  Bibl>  nat.  lat.  3718',  fol.  80  et  suiv. 


I.  Voir  Hauréau,  N^ice  sur  Us  mtwta  authentiquis  m  supposées  et  Jmn  tk 
Garïanâi,  dans  les  Nôikes  tî  exi rails,  i,  XX Vil,  2*  panie,  pp.  16,  17-20.  — 
Nôloos  ea  passant  qui!  existe  de  ce  poème  latin  une  ancienne  traduction 
CD  vers  îmnçàh  qui  nomme  atissi  Je.in  de  Garlande  : 


Qjiî  de  transiater  s'entremet. 
Se  il  la  matière  n'y  met, 
EnsimMe  toute  b  substance, 
Chacun  doh  savoir  qui  fait  en  ce  ; 
Kon  pourtant  (lis.    pourquant)  st  ne 
[doibi  on  mye 
St  forment  mettre  s'estudie 
A  dire  moi  a  mot  ta  lettre, 
Aiûs  y  doibi  on  oster  et  meure 
Et  iransUter  cl  transposer 


Ht  de  jolis  mos  ajouster 
Pour  plaire  mielx  a  l*escoutcr. 
Et  pour  \ù  chose  mklx  entendre 
A  ceulx  qui  h  veuUent  apreodre. 
Pour  ce  vous  ai  ce  devarU  dit 
Que  un  livre  [qu'Ja  faire  entendit 
En  latin  Jehak  de  Gu£LLakde* 
De  qui  I  ame  a  Dieu  recommande, 
Vous  vueil  en  IVançois  resiter. 

(B,  N\  lat.  1492 K  fol,  ti|.) 


n  y  en  À  une  autre  version»  du  %v^  siècle,  dans  le  ms,  B,  N*  &.  1 2478,  M. 

Ce  haciiui  est  en  hexamètres  accouplés  par  la  rime.  H  ne  faut  pas  le  con- 
fondre avec  un  autre  Fauim^  ctïmAà  en  vers  i^l6giaquc&,  que  M.  Mord  Fatio 
a  puèlté  id  méme^  XV,  224, 

2.  Ccst  Tun  d^  nombretis  manuscrits  volés  vers  TS40  â  la  Bibliothèque 
nationale  (alors  royaïc)  qui  emrtrrent  Jans  la  collection  Birrois  et  qui  furent 
rachetés  de  Lord  Ashbumham  en  iSÔS.  Voir  Deïtsle,  Qn^l(}^ue  deji  m^s.  des 
fonds  Ubri  ti  Bar  rois  ^  p,  193-}. 


LES   MANUSCRITS    FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  Jî 

A  la  suite  du  premier  extrait,  qui  est  visiblement  la  fin  du  poème, 
on  lit  ces  vers,  reproduits,  par  M.  Delisle  dans  la  description  du 
volume. 

Rex  vêtus  Henricus  primo  dédit  hec  docfumenu 

Illepidis  libro  nova  que  scribuntur  in  isto. 

Curvamen  celi  demittat,  gaudia  celi 

Qui  geminavit  Heli  merito  tribuat  Danibu. 

Qui  dédit  alpha  et  to  sit  laus  et  gloria  Christo. 

Explicit  iste  liber  qui  vocatur  Urbanus. 

Ainsi  le  poème  a  pour  titre  Urbanus;  il  a  été  inspiré  par  le 
roi  Henri  II  (il  ne  peut  s'agir  d'un  autre)  et  l'auteur  s^appelait 
Daniel.  C'est  donc  avec  raison  que  M.  Delisle  l'a  place  sous  le 
nom  de  Daniel  Churche  que  nous  connaissons  par  Baie. 

Il  ne  paraît  pas,  du  reste,  qu'aucun  des  deux  poèmes  latins 
qui  ont  porté  le  nom  d'Urbanus  ait  servi  de  modèle  à  notre 
Urbain  français.  Rien  ne  prouve,  en  réalité,  que  ce  dernier  soit 
une  traduction  du  latin.  Le  titre  peut  avoir  été  emprunté  à  la 
littérature  latine  du  temps  :  l'ouvrage  lui-même  est  un  recueil 
de  préceptes  dont  aucun  ne  peut  passer  pour  bien  original, 
mais  dont  la  rédaction  et  l'arrangement  peuvent  constituer 
une  oeuvre  personnelle.  Voici  le  texte  du  ms.  de  Trinity  : 

Uns  sages  home  de  grand  valur,  Premer,  tut  a  devise, 

Ki  lung  temps  vesquist  en  honur,  Amez  Deu  et  sente  Eglise; 

De  suen  enfaunt  se  purpensa  Père  et  mère  honurez, 

4  Et  de  suen  bien  lui  moustra,  i6  Bone  grâce  en  avérez, 
Et  dit  :  Beau  filz,  me  escuhez  ;  Bone  sancté  et  lunge  vie  ; 

Si  jeo  di  bien  si  l'entendez.  De  cestes  choses  ne  faudrez  mie. 

Nurreture  vus  voil  aprendre  Li  bon  enfant  deit  ester 

8  Tant  cum  tu  es  de  âge  tendre,  20  Devant  son  seigneur  a  manger; 
CsLVy  por  voirs  a  vous  le  di,  Il  ne  se  doit  point  apouuer, 

Honyz  est  ki  ne  est  norri.  Ne  nul  membre  doit  grater, 

Ore  escuhez,  mon  chier  filz.  Et  nul  hom  doit  eschuer, 

12  Coment  voil  ke  seiez  norriz.  24  Ne  nuly  ne  doit  moker. 

2  Le  ms.  de  TUniversité  a  de  plus  ici  ces  deux  vers  qui  ont  été  omis 
par  tous  les  autres  manuscrits  :  Urhane  estait  il  appelé ^  Ki  en  sun  tensfust  amé, 
—  4  Mieux  ailleurs  Et  de  son  bon  sens.  —  11-12  manquent  dans  Univ.  — 
22  Ailleurs  Nese  xnve  char  grater^  ce  qui  rappelle  les  vers  du  Stanspuer  ad  mm- 

sam  :   «  Nec  nares  fodias  carnem  p^ropriam  neque  scalpes Nec  carnem 

propriam  verres  digito  neque  scalpes  »  (Furnivall,  TJje  Babees  Booh,  1868, 
2«  partie,  p.  30,  32). 


■ 

72                                                       p.    MEYEH                                                                 ^^^1 

^^^^H^ 

De  service  dcit  aprendre> 

60  Ke  nule  ke  Sûiten  livre  lettriÉ(srV),       ^^^H 

^^^^^^1 

Si  il  voille  ben  entendre, 

Car  sovcnt  sunt  decevables              ^^^| 

^^^^^1 

Et  de  language  erse  ment 

Et  relement  sun!  establ^  ;                ^^^H 

^^^^^^ 

a8  Cura  il  a  nurture  apenî. 

Mes  pernez  une  que  soit  sage,          ^^^^| 

^^^^^^H 

Si  hom  vous  doigne  petit  u  grant, 

64  Ke  vous  ns^  i  poise  sa  mariage.         ^^^H 

^^^^^^H 

Tant   cum    vous    estes    JDcsnc 

Ta  femme  demeinc  amercic              ^^^H 

^^^^^^H 

[eofant, 

El  nu  le  autre  désirer  devez.            ^^^H 

^^^^^H 

Fuez  putaine  et  hasardrie                 ^^^H 

^^^^^^H 

J2  Et  doucement  lui  tnercîez; 

68  Et  la  taverne  ne  ha  un  te  z  mie  ;              ^H 

^^^^^H 

Et  si  vous  aïet  en  cheminant 

Od  bone  gent  sovent  alcz                ^^^^M 

^^^^^^1 

Et  encountreî  petyt  u  graot. 

Et  les  mauveis  fuîr  devez.             ^^^H 

^^^^^^P 

Voiuntiers  lui  saluez 

Si  povres  home  devenez,                 ^^^H 

^^^^^H 

î6  Et  beieraent  a  lui  parki. 

72  Trop  esmaer  vous  ne  deve^;.             ^^^H 

^^^^^H 

Si  vous  ale«,  cutn  surd,  avant 

Car  Jesu  Crist  omnipotent               ^^^H 

^^^^^^H 

Et  ne  dmt  tant  ne  quant, 

Fait  suceurs  a  tute  gent  :               ^^^H 

^^^^^^1 

Om  dira  delez  vous 

Ke  en  lui  bien  se  jfBe,                    ^^^H 

^^^^^H 

40  Ke  vous  estes  desdçignous. 

76  Suceurs  fait  et  bone  ayc.                 ^^^H 

^^^^^^H 

Si  les  escoles  volez  hauntcr 

Si  VOUS  une  ami  avez,                       ^^^H 

^^^^^H 

Vostfc  meistre  devez  duter  ; 

De  une  chose  vous  porpensez        ^^^H 

^^^^^^B 

Et  si  vous  savez  voster  lesçoun 

Ke  ja,  por  vostre  fol  délit,                ^^^^^ 

^^^^^H 

44  Avant  ke  tun  compaïgnouu. 

So  A  ]m  ne  lacez  nul  dcspit  :                ^^^H 

^^^^^^H 

Voluntîers  lui  apcrnez 

El  si  enemi  en  nvtz,                       ^^^H 

^^^^^^1 

Et  bêlement  a  Jui  parlez, 

Bien  avisîé  sciez  :                             ^^^^^ 

^^^^^H 

El  ceo  votis  doint  nurrcture» 

Se  il  Icnce  vers  vous^                      ^^^^| 

^^^^^H 

4S  Curtcisîe  et  mesure. 

S4  Ceo  vous  prt  par  amours                 ^^^H 

^^^^^^H 

Ne  sciez  pas  mesJisani 

A  lui  ne  devez  rcspouns  doner,          ^H 

^^^^^^1 

A  honnc,  a  femme  ne  a  cnfaot* 

Mes  la  place  devez  fuer  :                 ^^^H 

^^^^^^L 

Si  riches  home  devenez. 

Si  vous  responez  le  jugelour            ^^^H 

^^^^^^^^ 

1         52  De  une  chose  vous  porpenseï  : 

88  Le  pys  avérez  a  chief  de  tour.               ^H 

^^^^^^H 

L             Ne  vous  porter  ja  trop  haut 

De  lui  ne  pernez  ja  vengance          ^^^^Ê 

^^^^^^^H 

■            Ne  trop  simples  ne  trop  haut, 

De  espeie  ne  de  launce,                  ^^^H 

^^^^^^^^ 

Mes  vous  porteï  ou  vêlement 

Car  autre  folz  poez  conquerre         ^^^H 

^^^^^^H 

56  Cum  a  nurrcturc  apcni. 

92  Vostre  dreîi  par  lai  de  terre.            ^^^H 

^^^^^H 

Si  femme  volc^  csposer, 

Si  sages  home  devenez,                           ^^M 

^^^^^^H 

Pcnseï  de  m,  mon  filz  diier, 

Chier  Bh^  de  ceo  pense/.  :                     ^H 

^H. 

Pernez  nule  por  sa  beauté 

Si  nul  conseil  devez  doner                     ^| 

iB  II  manque  ici,  par  comparaison  au  ms.de  l'Univ-,  24  vers  ;  cette  lacune           ^| 

^^^^^^^ 

est  causée  par  un  bourdon.  En  effet  le  vers  Cum  il  a  nurUtrf  apmi  reparaît           ^^k 

^^^^■b 

deux  fois,  dAns  le  ms,  de  l'Univ.,  au^i  vers  28  et  54.    —  41  A  partir  dici  le          ^| 

^^^^^H 

im,  de  rUniv.  diffi-re  beaucoup  du 

nu.  de  Trinîty  et  le  ms.  BoJley   9          ^M 

^^^^^^v 

encore  plus.  —  60  Cette  dclknce  â  1 

'égard  des  femmes  lettrées  n'est  point          ^H 

^^^^^^1 

exprimée  dans  les  autres  mss.  ;  eïle  est  toutefois  assez  générale  au  moyen           ^| 

1 

IgC*  —  87  On  prc^férerait  jan^IruF, 

1 

LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  73 

96  A  celui  ke  de  vous  ad  mcstier,  Ne  vous  medlez  od  foie  genz 

Lui  conseillez  sulunt  la  lai  Ke  vendent  terres  et  tenemenz 

Et  lui  diez  la  droite  fai  :  Et  roflent  les  damoiseles 

Ne  lui  blandiez,  jeo  vous  defent,  124  Ke  sunt  en  chambre  si  bêles. 


100  Ja  por  or  ne  por  argent. 
Lui  diez  la  droite  vérité, 
Ke  autre  foiz  vous  sache  gré. 
El  si  pleidour  devenez, 

104  Bien  avisé  vous  soiez. 
Si  Tem  counte  vers  tei 
Responez  beal  par  bon  lei. 
Piez  ne  mains  devez  mover 

108  Tant  cum  devez  as  genz  parler; 
Sans  manaz  u  serement 
Devez  counter  devant  la  gent. 
De  ceo  ke  ai  a  vous  counté 

112  Vous  turnera  a  grant  bounté, 
Si  vous  le  voiliez  retcner. 
Sachez  por  voir,  mon  filz  cher, 
De  une  chose  vous  dirrai  ; 

116  Uncore  entendez  a  moi  : 

Des  biens  ke  vous  avez    avant 
[conquis 
Porpensez  vous  en  tun  avis 
Les  despendre  en  dreiture, 

120  Jeo  vous  prie,  et  en  mesure. 


Il  achatent  riches  viandes, 
Figes,  rys  et  alemandes, 
Bone  servoise  et  bon  vins, 

1 28  Riches  oisels  et  grâces  gelins, 
Et  al  drein  mokent  le  despendur 
Ki  lur  ad  fet  tant  honur. 
Quant  il  ae  puit  plus  durer 

1 32  Ne  despender  a  lur  voler. 
Si  lui  ira  tost  un  despit  : 
Un  autre  vendra  en  son  lit. 
Tant  cum  la  burse  puet  durer 

156  Amour  de  femme  poez  aver. 
Et  quant  la  burse  soit  enclose 
De  femme  ne  avérez  autre  chose. 
Por  ceo  garnez  vos  compaignons 

140  Ke  vous  avez  e  nunduns  (?); 
Ke  il  poent  le  melz  faire 
Et  de  lur  folies  retraire; 
Et  issi  menez  vostre  vie 

1 44  Ke  vous  amez  le  filz  Marie. 
Plus  ne  dirrai  maintenant  : 
Chier  filz,  a  Deux  vous  cornant. 


2.  La  plainte  d'Amour,  —  J'ai  déjà  parlé  ici-même,  à 
plusieurs  reprises,  de  ce  remarquable  poème  (XII,  507;  XV,  292; 
XXIX,  4).  Je  me  bornerai  à  en  citer  les  trois  premiers  cou- 
plets. Le  premier  ne  se  trouve  que  dans  le  ms.  de  Trinity. 

Volez  escuier  un  déduit  (Fol.  266) 

Ke  jeooy  cestre  (jic)  autre  nuit, 
Tut  en  cochaunt, 


123  Rojfler  n*est  pas  relevé  dans  les  dictionnaires.  Est-ce  l'angl.  ruffity  au 
sens  de  «  troubler,  mettre  en  désordre  »  ?  Le  ms.  de  l'Univ.  porte  robent  ; 
Bodlcy9  roehent.  —  126  Univ.  resyns,  —  127-8  Mieux  dans  Univ.  Bon  vin 
t  oractî  cfweSf  Et  puis  après  funl  lur  mowes.  Même  leçon,  ou  à  peu  près,  dans 
Bodley  9.  —  13 1-4  manquent  dans  Univ.  et  Bodley  9.  Il  semble  que  ces 
vers  devraient  prendre  place  après  le  v.  138.  —  1 38  Ici  s'arrête  le  ms.  de 
rUniversité.  —  139  Gartie;;^,  avertissez.  —  140  La  fin  de  ce  vers  est  corrom- 
pue. 


74  p.    MEYER 

Entre  très  duz  fin'  Amur 
Et  un  prodome  de  grant  valur 
Issi  disant  : 

Amor,  amor,  u  estes  vous? 

—  Certes,  sire,  en  poi  de  leus, 

Gir  jeo  ne  os. 

—  Pur  quei  nen  osez  estre  veu, 
Vous  ki  estes  si  bien  conu 

Et  de  bon  los  ? 

Jeo  parlasse  od  vous  a  leiser, 
Si  il  vous  venist  a  pleiser, 

Tut  privement, 
Por  saver  mon  la  vérité 
Pur  quei  vous  estes  si  rebotés 

De  tute  gont. 

3.  La  légende  du  bois  de  la  sainte  Croix,  — ,  J'ai  déjà 
signalé  cette  rédaction  dans  le  ms.  Gg.  i.i  de  l'Université  de 
Camhndgc(^Roniania,  XV,  326).  Il  y  en  a  une  autre  copie  dans 
lems.  B  282  de  la  Bibliothèque  royale  de  Belgique,  qui  a  appar- 
tenu jadis  à  E.  De  Coussemaker  \  Ces  deux  manuscrits  ont  été, 
comme  le  nôtre,  exécutés  en  Angleterre  ^  Ce  ne  sont  proba- 
blement pas  les  seuls.  Il  suffira  de  citer  les  premières  et  les  der- 
nières lignes  du  ms.  de  Trinity  : 

(Fol.  273)  Ki  voudra  saver  et  oyr  de  la  verraye  croiz,  dont  ele  vint  et  de 

quel  fust (Fol.  279)  En  ccsto  manere  corne  jeo  vus  ai  counté  voleit  Dieu 

ke  nostre  redempcion  venit  a  lui  de  mesme  le  liu  e  de  meisme  le  arbre  dont 
nostre  perdicion  surdist  premièrement  ;  et  de  mesme  le  frut  et  de  mesme  le 
bûche  crust  nostre  sauvacion.  E  issint  corne  nus  sûmes  por  feme  descordez, 
issint  par  femme  sûmes  a  Dieu  reconciliez 

4.  Suit,  fol.  279,  la  version  française  du  Spéculum  de  saint 
Edmond  de  Pontigni,  archevêque  de  Cantorbéry,  dont  on  a 
beaucoup  d\iutres  copies,  voir  Roniania,  XXIX,  53. 


1 .  L\4tH.\\jlypse  en  framais^  au  XII h  surh'  (Soc.  des  anc.  textes  fr.), 
p.  ccxxvi,  note  i. 

2.  Deux  mss.  d'origine  française  contiennent  a  pju  près  la  mOme  rédac- 
tion :  Hihl.  de  Sainte-Gencvicve.  iiv)4  (xv*  siècle),  et  Rouen,  942  (Çata^ 
h^uf^ctu'fiil  lies  vuinuaciitSy  I,  238). 


LES   MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  75 


0.1.20.  —  Traités  de  médecine. 

Volume  assez  gros  (o  m.  198  sur  o  m.  155),  328  ff.  en 
parchemin,  composé  de  quatre  manuscrits,  tous  écrits  au 
XIII''  siècle,  mais  par  des  mains  différentes.  Le  premier  com- 
prend les  ff.  I  i  237,  le  second  les  ff.  238  à  297,  le  troisième 
les  ff.  298  à  322,  le  quatrième  les  ff.  323  à  328.  Le  poème  par 
lequel  commence  ce  recueil  est  à  deux  colonnes;  de  même 
aussi  la  Chirurgie  de  Roger  de  Salerne,  qui  occupe  le  troisième 
manuscrit.  Le  reste  est  écrit  à  longues  lignes. 

1.  Poème  médical  contenant  près  de  2000  vers  et  com- 
posé d'après  un  original  latin  (voy.  v.  83)  que  je  ne  suis  pas 
en  état  d'indiquer.  Cet  original  n'était  probablement  rien  de 
plus  qu'un  recueil  anonyme  de  recettes  médicales,  comme  on 
en  a  tant  fait  au  moyen  âge.  Le  traducteur  était  anglais, 
comme  le  copiste.  On  ne  s'étonnera  pas  de  rencontrer  dans  le 
spécimen  qui  suit  beaucoup. de  vers  trop  longs  ou  trop  courts. 
J'ai  proposé  diverses  corrections,  mais  toutes  ne  sont  peut- 
être  pas  légitimes.  Il  faudrait  avoir  étudié  le  poème  en  son 
entier  pour  arriver  à  faire  le  départ  entre  les  fautes  du  copiste 
et  les  irrégularités  imputables  à  l'auteur. 

Qui  ctst  livre  vodra  entendre  Ke  il  ne  poent  estre  estable  : 

Bêle  raison  il  porreit  aprendre  ;  Le  fu  si  degaste  z  confunt, 

Plusors  choses  il  porreit  oïr  16  Ce  sevent  ceuski  veù  Font. 
\  Ke  mult  font  bien  a  retenir.  De  l'ewe  vous  dirai  le  voir  : 

Ce  vous  di  jo  por  cors  humain  En  travail  est  [z]  jor  z  soir  ; 

Ki  longes  ne  poent  estre  sain,  Le  vent  est  en  travail  sovent, 

Ne  dure  gueres  en  saunté  20  Et  la  tere,  si  com  jo  entent, 
8  Kar  itele  est  sa  qualité.  En  travail  sunt  en  tel  endroit,  (b) 

Le  fais  de  quatre  helemens,  Chaut  sunt,  secche,  moiste  z  froit; 

De  fu,  de  ewe,  de  terre,  z  vens  ;         Entr'eus  a  grant  divefsetés  ; 

Ceus  quatre  que  ci  vous  acont  24  E  s'i  covient  adversetés, 
12  De  tele  manere  ensemble  sont  Divers  maus  z  enfermetés 

Ke  il  sont  entre  eus  si  muable  Dont  mainte  gent  sont  engrotés. 


2.  3  Suppr.  il.  —  6  Corr.  puet.  —  9  Corr.  Fais  est?  12  —  Corr.  t€Î. 


^^^^^^^H                     Vous  entendes  bien  qui;  ce  suhâit. 

Ne  le  meins  ne  sont  ven[u]eus^f^^^^H 

^^^^^^H              28  Mes  Deus  encontre  ce  nus  fait 

Profila  blés  ne  precîûses.  {d)                     ^H 

^^^^^^^H                     Muh  gratit  solaz  t  î^rant  confort, 

Cil  ki  [bien]  conust  lor  m  an  ères             ^H 

^^^^^^^H                     Kc  il  giiri^c  maint  home  d^  mon 

68  Les  tient  a  bones  z  a  chieres  ;                ^^k 

^^^^^^V                   par  herbes,  bieo  est  c^ncù, 

Mes  cil  qui  la  vertu  ne  siet                     ^^k 

^^^^^^H              p  Ou  Deus  *1  mb  granc  vertu, 

Ne  poct  chaloir  si  il  les  aime  ou          ^^k 

^^^^^^H                    Chaudes  £  ti)oîstês,  douces,  anieres 

[hiet            ■ 

Si  n  est  nul  home,  al  mien  viaire»          ^^k 

^^^^^^H                    Ki  bien  U  force  conustmii, 

72  Ki  n  ait  de  medidne  a  fdire                     ^H 

^^^^^^H              ^6  A  maini  home  vâler  porroit. 

Ou  por  son  ami  ou  por  soî«                     ^H 

^^^^^^H                    Herbes  ont  molt  très  gr^int  vertus 

Ou  por  aucun  autre,  come  jo  croi.          ^H 

^^^^^^^H                    De  bois,  Je  pr6  z  de  p^lu. 

Mult  vault  a  proiser  lor  savoyr              ^H 

^^^^^^H                   Semence^  flors,  fuile,  r^cmc 

76  Ke  vous  poet  a  bosoine  valoyr,              ^H 

^^^^^^H              40  MiJlt  par  valent  a  medicine; 

Scn  z  savoir  z  riche  fais,                   ^^^H 

^^^^^^H                   Maintes  herbes  poez  voir 

Kar  grant  bien  avieneni  après.          ^^^H 

^^^^^^^H                    Ke  muhes  maus  poent  garîr; 

Ore  vous  voil  par  tant  mostrer         ^^^^| 

^^^^^^H                   Les  herbes  con  u  st  re  poez , 

80  Kc  aî  enpensê  a  translater  :             ^^^H 

^^^^^^H              44  Mes  les  vertus  fss  ne  savci^. 

Ceseroit  cslit  z  scient                       ^^^B 

^^^^^^^H                    Voir  poue^  des  herbes  plu  sors 

Cbii  mult  vaudrojt  a  plusor  gcni.     ^^H 

^^^^^^H                   FoiUes,  semences ,  [  f r  u  i  s  ?]  et  flo  rs  ; 

En  romauns  dirai  le  !atin,                 ^^^H 

^^^^^^H                   Vous  ne  save^  lors  qualités; 

84  Puis  rescrivTai  en  parchemin,           ^^^H 

^^^^^^H             48  Ke  tor  vcnuz  ne  lor  bontez. 

Ke  plusors  îc  puissent  aprendre              ^H 

^^^^^^^                      Et  vous  por  quel  les  priscroiesî 

Q^e  ne  se^^ent  latin  entendre.          ^^^H 

^H                                   Kant  vous  soî  lor  nous  couusez  ? 

Et  si  aucun  home  a  envie                 ^^^H 

r                                     A  vis  vous  est  n*om  nul  po[oJ»r 

S8  Qui  il  por  ce  de  mai  meisdie  (f.  a)          ^H 

Il                                 $2  Kant  chcscun  home  les  pocs  avoir; 

Ke  en  romauns  Taî  translaté,                   ^H 

VK                                    Qjjant  [elej  est  plus  chier  achatée, 

Jo  U  dirai  la  vente  :                                   ^H 

^^m                                 Tani  est  de  vous  plus  désirée. 

Monsendemostrerniultmêsl  bon»           ^H 

^^^^                           Eles  crescent  en  bois  t  en  prés, 

92  E  si  ii  plaist  ce  est  bien  saison  ;                ^| 

^^^^^                      S  6  En  voies,  en  sentes  z  en  bl^  ; 

Si  envie  a  i  t!  me  biet                              ^H 

^^^^H                           Par  ces  fosses  t  par  c^  haies 

Moi  ne  chaut  gueres»  Deus  le  iiet,          ^H 

^^^^^                         Les  troveras,  poor  n^en  aies. 

Kar  en  tele  chose  me  délit                      ^H 

^^^^^^H                   II  i  a  homes  plus  de  mil 

96  Ke  tornera  a  graum  profit.                      ^| 

^^^^^^H             60  Que  por  tor  plenté  les  tenenl  vil. 

Por  veriin,                                        ^^^H 

^^^^^^H                   Ke  mult  cncrescent  z  rauns  sont  ; 

Por  te  vertin  pemez  la  rue               ^^^H 

^^^^^^^H                   Les  grans  plentès  plus  viles  ont. 

0  Tcre  en  terre  creûe;                    ^^^H 

^^^^^H                   Mes,  por  ce  qui          tauntes, 

Triblejî  le  bien,  pressez  le  jus          ^^^H 

^^^^^^F             64  Nesont  eles  mie  meinsvaillauntes. 

100  Tant  que  ne  poc^  traire  plus  î          ^^^H 

^^^^^^^                ;o  îl  faut  prononcer  it*i7, ici  et  ailleurs.  —  41  Corr*  vtir,  —  4^  Corr  Viir          ^H 

^^^^^^H            p.  d*f  ^  |3  Corr.  pott.  —6)  Corr.  quU  m  ta.  *  6^,  70  Lire  sait -huit;  de           ^| 

^^^^^^B            m^me  vv.  9^-4,  —  70  Vers  trop  long 

;  Si  4haut}  —  7a  On  préférerait  KiL           H 

^^^^^^H             —  74  Suppr,  aucun.  —  75  vatdl,  corr. 

,  fuU^  —  7e  Corr.  bomn.                              ^H 

1 

LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  77 

Pemez  miel  z  aubon  de  oef  Ki  de  plusors  est  mult  loée  ; 

Et  un  drap  linge  viel  ou  noef  ;  DaunsGaliens  le  nous  tesmoigne  : 

Bien  Templastrez,  ne  vous  soit  grief,  108  En  le   mois  de  mai  peraez  ve- 

104  Si  le  metez  sor  vostre  chief.  [toigne, 

Autre  Triblcz  le,  si  li  donez  le  jus  (b) 

Autre  medicine  ai  ci  trovée  Plaine  coupe  ou  auques  plus... 

Voici  les  derniers  vers  : 

(¥o\.2i)Porfeme  ke  large d'enfaunUr.  (iiaunt  feme  porte  malle, 

Si  femme  targe  d*enfaunter  La  face  est  plus  vermaille, 

For  tost  mort  ou  vif  fors  geter.  Et  si  n*esi  pas  de  haille  '  ; 

Lci  de  femme  od  oile  bevra  Si  est  la  mamele  destre 

Tost  après  le  délivra  (sic).  Plus  graunt  ke  la  senestre  ; 

Espeirement  de  enfaunt  :  Nuques  vaut  viaires 

c,.  t  ,  En  plaisaunt  ses  aferes. 

Si  vous  volez  saver  en  ame  '  '^ 

2.  Suivent  des  recettes  en  prose.  La  première  a  la  forme  d'une 
légende.  Elle  se  retrouve  ailleurs  sous  des  formes  variables  :  en 
latin  dans  quelques  livres  d'heures,  par  ex.  dans  le  n**  i  de  la 
Bibliothèque  de  Saint-Brieuc  (xv«  siècle)  :  «  Très  boni  fratres 
ibant  per  unam  viam  et  obviavit  eis  Dominus  noster  J.  C.  et 
dixit  eis  :  Boni  fratres,  quo  itis?...  »  En  anglais,  mais  sous  une 
forme  assez  différente,  dans  les  Reliquix  antiquœ  de  Wright  et 
Halliwell,  I,  126. 

Espnmenl  aphtes. 

Trcis  bons  frères  estoieni  ke  aloient  al  montd'Olivetporcoillir  herbes  bones 
a  plaie  z  a  garison.  Et  ancontrerent  nostre  Seignor  Jesu  Crist,  z  nostre  Sei- 
gnor  lor  demanda  :  «  Treis  bons  frères,  ou  alez  vous  ?  »  r  il  responderent  : 
«  Al  mont  d'Olivet  por  coiller  herbes  de  plaie  z  de  garison.  »  Et  Nostre  Sire 
dit  a  eus  :  «  Venez  o  mai,  z  me  graniez  {c)  en  bone  tei  ke  vous  nel  diez  a 
nul  home  ne  a  femme  ne  aprcndrez  :  Pemez  oile  d'olive  z  leine  ke  unkes  ne 
fust  lavec,  z  metez  sor  la  plaie».  Q.uaunt  Longins  l'ebreu  aficha  la  launce 
en  le  costé  nostre  seignor  Jesu  Crist.  celé  plaie  ne  seigna,  cle  n*emfla 
point  ;  ele  ne  puoit  mie,    ele  ne  doloit  mie,  ele   ne  rancla  mie,  ele  n*es- 


1 .  Je  pense  qu'il  faut  entendre  en  esme.  Pour  rendre  au  vers  suiv.  sa  rime 
et  sa  forme  régulière,  on  pourrait  \\r*iQnaunt  enfant  malle  porte  femme. 

2.  Corr.  faille  ? 


78  p.    MEYER 

châufa  mie.  Ausi  ceste  plaie  ne  seine  mes,  n'emfle  point,  ne  pue  mie,  ne 
doile  mie,  ne  rancle  point,  n'eschaufe  mie.  En  le  nun  del  Pierc,  el  nom  del 
Fi/.,  el  nun  del  seint  Espirit.  Pater  nosler  treis  fois. 

Por  malade  avciller. 

Pernez  le  castor  z  ardez  le  ;  z  quaunt  il  est  ars,  affuniez  le  malade  de  celé 
fumée  ki  trop  dort,  z  il  aveillera  maintenaunt. 

Voici  les  deux  dernières  recettes  : 

(Fol.  24  h)  Por  cfitonncweiU  J\v'eille. 

Por  entounement  d'oreille,  sain  d'anguille  soit  boilli  (c)  en  la  poielle,  el 
puis  refreidi,  et  puis  i  metez  jus  de  jubarbe  et  la  pudre  de  nois  muscade  triblée, 
et  oile  de  lorier;  tôt  ce  scit  quit  ensemble  et  mis  en  ncit  veire,  et  de  cestc 
oigncment  oignez  l'oraile  la  ou  ele  doui,  par  laquel  oignement  oïe  est  reco- 
vré,  et  le  nerf  retrait  en  oint  aloins. 

Autre.  Pernez  aloine  et  vif  argent  estaint  et  aubun  del  oef  et  viel  oint,  et 
triblez  lot  ensemble  ;  et  por  le  sowcf  flairer  si  vous  volez,  si  i  metez  encens. 

3.  Traduction  en  prose  de  la  Chirurgie  de  Roger  de 
Parme.  —  On  sait  quel  a  été  le  succès  de  la  Praclica  chirur- 
gie de  Roger  de  Parme  ou  de  Salerne.  Non  seulement  on  en 
possède  de  nombreux  manuscrits,  mais  encore  elle  a  été  tra- 
duite au  moyen  âge  en  diverses  langues.  M.  Ant.  Thomas  a 
cité  plusieurs  de  ces  traductions  ici-mème  *  dans  le  mémoire 
qu'il  a  consacré  à  la  paraphrase  en  vers  provençaux  de  Raimon 
d'Avignon,  et  entre  autres  une  traduction  française*  qui  est 
sensiblement  plus  récente  que  celle  dont  je  vais  donner  un 
extrait.  Nous  trouverons  plus  loin,  dans  une  autre  partie  de 
notre  manuscrit,  une  troisième  version  de  hxPractica  chirurgiey 
différente  des  deux  précédentes. 

Avant  de  transcrire  les  premiers  paragraphes  de  la  traduction 
qui  occupe  les  ff.  24  à  45  du  ms.  de  Trinity  Collège,  je  crois 
utile  de  reproduire  ici  le  début  du  texte  latin  d'après  l'édition 
de  1546  î  : 


1.  Romattia,  X,  63  et  su iv.  ;  cf.  //'/(i.,  ^156. 

2.  HiH.  nat.,  fr.   1288. 

5.  Ar.  chiruri^nca  GuiJonis  CauUaci...  his  acccsserunt  Rogerii ac Guiïielmi 
Saliceti  chirur^ix.,.  Vcnetis,  apud  Juntas,  .mdxlvi.  La  chirurgie  de  Roger 
de  Parme  termine  le  volume,  fol.  362  et  suiv.   -  Le  même  texte,  avec  beau- 


LES    MANUSCRITS   FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  79 

I.  De  vulneribus  quae  fiunt  in  capite. 

Caput  vulnerari  diversis  modis  contigii  :  vulneratur  enim  aliquando  cum 
fractura  cranei,  aliquando  sine  fractura  ejusdem.  Fractura  vero  cum  vulnere 
aliquoties  est  magna  et  manifesta,  aliquoties  est  parva.  Sed,  tam  magna  quam 
parva,  alia  est  cum  magno  et  amplo  vulnere,  alia  cum  parvoet  stricto. 
Qpaecumque  vero  fractura  cranei  sit,  de  laesione  panniculorum  cerebri  sem- 
per  est  dubitandum  ;  nam  aliquando  pia  mater,  aliquando  dura  mater  Ixdi- 
tur.  Cum  vero  dura  mater  laeditur,  per  haec  signa  cognoscitur  :  patienti  dolor 
adcst  in  capite,  rubor  in  facie,  oculorum  incensio,  alienatio,  linguae  nigredo. 
Piae  matris  laesio  per  haec  signa  cognoscitur  :  defectus  virtutis  adest,  ablatio 
vocis,  piJStulae  quoque  soient  in  facie  supervcnire,  sanguis  et  sanies  a  nasibus 
effluere  et  constipatio  ventris  adest,  et  rigor  ter  et  quater  in  die  solet  patienti 
contingere,  quod  est  certum  signum  mortis.  Et  omnibus  vel  pluribus  de 
supradictis  signis  supervenientibus  usque  ad  centum  dies  ad  plus  morssequi- 
tur  vel  expectari  potesi.  Et  maxime, 'si  aliqua  menyngarum  cerebri  Isesa  sit, 
raorietur  aeger  in  primo  plenilunio  adveniente,  ut  in  pluribus  hoc  contingit. 
Quia  ergo  de  fractura  cranei  sequitur  maximum  periculum,  qualiter  fracturée 
cranei  nos  subvenire  possimus,  per  ordinem  prosequamur. 

II.  De  fractura  cranei  magna  et  manifesta  cum  largo  et  amplo  vulnere. 

Cum  fractura  cranei  magna  et  manifesta  cum  amplo  et  largo  vulnere 
fuerit,  ut  si  fiât  ense  vel  aliquo  simili,  ita  quidem  ut  os  vel  aliquid  aliud  debeat 
abstrahi,  nisi  sanguis  multum  fiuat  vel  aliud  impediat,  os,  sive  aliud  quod, 
removeri  débet,  illico  abstrahatur,  et  subtilissimus  pannus  de  lino  inter 
craneum  et  duram  matrem,  velut  ex  obliquo,  cum  penna  caute  mittatur  ; 
in  ore  vero  fractura:  cranei  pannus  de  lino  vel  de  serico,  quod  longe  est 
melius,  ita  quoi  extremitates  panni  undique  sub  craneo  provide  immittan- 
tur,  ne  putreJo  ab  exterioribus  fluens  ad  duram  matrem  decurrat  et  majorem 
laîsionem  ccrebro  inférât.  De  spongia  vero  marina  diligenter  Iota  et  exsiccata 
idem  fieri  consucvit;  hitc  enim  putredinem  ab  exterioribus  derivatam, 
velut  bibula,  recipit  ;  vulnus  autem  extrinsecus  toium,  undique  peciis  lineis 
in  albumine  ovi  infusis  et  aliquaniulum  expressis  diligentissime  repleatur  ; 
plumaceolus  desuper  ponatur,  et,  pro  varictate  partis  capitis,  caute  ligetur. 
Bis  in  hieme  et  ter  in  acstate  mutetur  ;  et  paiiens  supra  dolentem  partem  ad 
jacendum  locetur.  Cum  hac  cura  est  insistendum  usque  ad  plenam  cranei 
restaurationem. 

III.  De  superflua  carne  si  super  duram  matrem  excnverit. 

Si  vero  ante  cranei  reparationem  aliqua  superflua  caro  supra  duram 
matrem  excreverit,  spongia  marina  bene  Iota  et  exsiccata  ponatur  ibi,  quous- 
que  caro  superflua  corrodatur.  Caiterum,  si,  post  reparationem  cranei,  caro 

coup  de  fautes  d'impression  en  plus,  se  trouve  dans  la  Collectio  Salernitana  de 
Salvatorede  Rcnzi,  II,  458  et  suiv.  Le  début  est  imprinvj,  d'après  un  nis.  de 
Florence,  par  Puccinotti,  Storia  ddla  medicina,  II,  2*:  partie  (1870),  p.  387. 


8o  p.    MEVER 

su^>er  ipsum  rtparamentum  superflua  creverit,  pulvcrem  de  hermodactylis 
sccure  ponere  consuevimus,  Vulnus  autcm  cxtnnsecus  cum  panno  solum  et 
carpta  usque  ad  fînem  perfectc  curamus... 

Voici  maintenant  le  début  de  la  version  française,  que  je  sup- 
pose avoir  été  faite  en  Angleterre  comme  les  autres  écrits  médi- 
eaux  du  même  volume;  mais  comme  il  s'agit  d'un  texte  en 
prose,  on  comprend  qu'il  serait  téméraire  de  l'affirmer  absolu- 
ment, 

[I]  i>  tok  [s]  mankrei  de  fromtûrt&  (fol.  24  c). 

Il  avient  ke  II  chlef  est  naufrez  en  <iiverSÊ[s]  manières,  kar  tl  est  a  b  fiez 
natifrez  ovec  h  depcsceûre  del  tes,  a  h  fie?,  sauns  depeceùre  del  tes,  La  dépe- 
cé ûre  ovcc  la  plaie  est  a  la  fiez  grant  {d)  z  aperte,  a  la  fois  petite  %  repuse  ^ 
Mais  quaunt  k  depeceûre  del  tes  ke  oiu  V^  petite  est  a  la  fiez  ovec  large  plaie 
z  grande,  a  la  fiez  avec  petite  plaie  t  estreite*.  En  qtielcunque  manière  la 
depeceûre  del  lès  seit,  il  est  a  doter  de  la  bJeceûre  des  peaucellettes  lesqueles 
envolupcm  le  cervel,  kar  a  la  ficiî  la  dure  mère  est  blecee,  a  la  fiez  la  picue 
mereï.  Quant  la  dure  mère  est  blecîc^  ces  suni  les  signes  :  li  naufrés  ad 
dolor  cl  chîef,  rojor  en  la  fjcc,enbrasemcm  eseur,  il  est  lot  devejt*,  la  langue 
est  Eote  noire.  Mes  quaunt  la  pîcue  mcre  esî  depecie,  ces  suni  les  sîj^nes  :  ij 
n'a  point  de  vertu  ne  vois,  boceies  sue  lent  lever  en  sa  face  tôt  au  comence- 
ment,  sanc  z  nierde  sont  décore  de  ses  oreilles  %  de  ses  narines  ;  il  est  lot 
serrés  ;  (f.  25)  il  a  freic  /lij.  fois  ou  .îii},  le  jor,  z  ce  est  certainement  signe  de 
mort,  keus  signes  sorvenans  ïe  naufrês  ne  poet  vivre  au  plus  de  cent  [ours  s, 

[ÎI]  Por  depf£tfir<i. 

Quant  la  depeceûre  del  tes  est  graunt  z  aperte,  si  com  ele  seit  faîte  d*espée 
ou  de  hache,  si  os  ou  autre  chose  deit  estre  estrait^  tost  seit  estrait.  Si  U  plaie 
seine  trop,  donkes  un  deliè  drapci  de  lin  seit  mis  entre  la  dure  mère  z  le  tés 


1,  fi  rtpmt  (cachée)  semble  une  addition  du  traducteur,  si  on  stm  tient  au 
texte  latin  imprimé.  Toutefois  un  mot  s^opposant  à  aptrte  (lat.  mani/isla)  mi 
bien  Ici  a  sa  place. 

2.  Le  texte  pourrait  sv  comprendre  si  on  mettait  ici  une  virgule  au  Heu 
d'un  point»  inais  le  sens  serait  bien  mal  rendu.  Je  pen'îc  tju'il  faut  terminer  k 
phrase  après  est  ni U^  comme  dans  le  latin  ^  et  supposer  qu'il  y  a  une  faute  oti 
plusieurs  dans  ce  qui  précède.  On  pourrait  proposer  :  Mah^  quauni  [ht  mt]  h 
é€Spf€iûri  del  tét  ht  ûm  a  \frande  ou]  ptiiit^  £ï^.. 

5.  Le  traducteur  avait  sous  les  yeux  un   teKte  comme  celui  de  Florence 
(Puccinoni,  il,  ît,  587),  ohpiamaier  est  en  second. 
4.  Pour  âtnffi  :  hu  alknaiio. 
5*  On  voit  qu'ici  le  traducteur  omet  un  paragraphe. 


LES    MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  8l 

en  bouunt  d'une  penne  en  escient  *  ;  drapeus  de  lin  ou  de  seie,  ki  meilor  est, 
seit  mis  en  la  depeceûre  del  tes,  si  ke  les  chiefs  des  drapelès  seient  de  totes 
pars  sor  le  tes,  ke  ordure  n'i  pust  venir  a  la  dure  mère,  t  ke  le  cervel  ne  seit 
plus  blessé.  Om  poet  faire  iceste  chose  d'esponge  de  mer  (Jb)  bien  lavée  z 
essuée,  kar  ele  beit  la  porriture.  La  plaie  dehors  se[i]t  emplée  de  drapelès  de 
lin  moilez  en  aubun  de  oef,  z  un  poi  après  un  orilier  seit  mis  desus,  z  bien 
seit  lié;  .ij.  fois  en  yver  z  .iij.  fiez  en  esté  seit  remué  la  plaie.  Li  malade 
gise  sor  sa  plaie  ;  z  si  seit  gardez'  de  si  ke  li  tés  seit  garis.  [III]  Si  morte  char 
crest  desur  la  dure  mère  devaunt  ce  ke  li  tés  seit  garis,  esponge  marine  ne 
mie 3  bien  lavée  z  faite  sèche  seit  mise  de  si  ace  ke  la  morte  char  seit  ostée.  Si 
la  niorte  char  crest  desur  le  repareillement  del  tes,  poudre  de  ermodacles^ 
metés  sure.  La  plaie  dehors  seit  garieJ  de  linge  drap  z  de  colon.  Come  la 
plaie  seit  garie,  apostolicum  cirurgicum  i  seit  mis.  [IV]  Si  la  depeceûre  del  tes 
est  graunt  z  la  la  plaie  petite,  si  ke  om  ne  puisse  saver  si  la  depeceûre 
estgrant  ou  petite,  botes  i  le  dei  z  tastés  amont  z  aval,  kar  nous  ne  sentoms 
en  nule  manere  si  bien  come  del  dei  ke  a  ongle.  Puis  ke  vous  saverez  de 
la  depeceûre  del  tes  si  la  plaie  est  estroite,  fendez  le  en  crois,  z  deseverez  les 
quartiers  del  tes  d*un  estrument  ke  on  apele  erùgo^.  Et  si  sanc  ou  autre  chose 
nedcstorbe,  si  os  ou  autre  chose  deit  estre  trait,  ostez  le  tost  avec  pissicalloris  ?, 
c'est  un  estrument.  Si  la  plaie  seigne  mult  ou  autre  chose  destorbe,  n'i  faites 
nient.  Metés  .j.  drap  entre  la  dure  mère  z  le  tes,  z  faites  totes  les  choses  ke 
sont (J) dites  devant.  Metés  les  quartiers  ensemble;  emplez  tote  la  plaie  de 
drapelès  moitiés  en  aubun  de  oef.  Metés  .j.  oreillier  de  drapel  desure  z  liés 
le  ;  laissez  le  issi  del  matin  treskeau  vespre,  ou  del  vespre  treske  au  matin. 
Li  malades  gise  sor  la  plaie.  Quant  vous  revendrez  al  malade,  si  vous  trovez 
les  quartiers  enflés  z  aoites  *,  icest  est  bon  signe  ;  si  vous  les  trovez  retraiés 


1.  En  escient  traduit  «  ex  obliquo  »  ;  le  sens  propre  serait  plutôt  «  à  gauche  »; 
«f/f«^t^  signifiant  «  gauche  »  (voir  Godefroy)  ;  c'est  l'anc.  ail.  i/mc  (Fôrster, 
Zeitschr,  f.  rom.  PInL,  I,  561).  Mais  la  locution  tn  esclani  n'est  pas  relevé 
dans  Godefroy,  et  je  ne  l'ai  jamais  rencontrée  ailleurs  qu'ici  et  dans  la  seconde 
traduction  (en  esclengy  ci-aprés,  p.  92). 

2.  Il  Êiudrait  ^ari/,  au  neutre. 

3 .  Suppr.  ne  mie^  ou  corr.  neuve  ? 

4.  «  Hermodacle,  bulbe  de  colchique.  »  D""  Bos,  au  glossaire  de  la  Chirur- 
gie de  MondevilJe. 

5.  Garie^  ici  et  à  la  ligne  suivante,  est  ^m garnie. 

6.  Rugine,anc.  fr.  roisne;  voir  Littré,  rugine,  et  legloss.  de  Mondeville, 

ROISNE. 

7.  Pinces,  piscarides  dans  la  traduction  de  Henri  de  Mondeville  (éd.  Bos, 
SS  749»  1018). 

8.  Aoite  (lat.  adauc  ta)  n'est  enregistré  dans  God.  que  comme  subst.  fém. 

x««M«M,  xxxii  6 


82  p.    MEYER 

z  iimeniiisés,  mauveîsse  signe  est.  Fiiitos  ice^tc  cure  dvsl  trcskc  li  tas  seit 
garis.  Amenuisée  Joiikc  les  dfîipdC^s  z  mcivs  ks  quariers  en  Jor  propre  lyi. 
Gari5€E  '  k  plaie  puis  de  drape  us  t  de  colon.  Nous  metoms  tant  soiilcmetit 
drap  en  la  plaie  dont  le  tes  Citt  depedejc  ;  nous  laissoms  det  lot  en  loi 
ointes  choses  ;  apostolîcom  (Jù\^  26)  cirurgicum  seit  mis  sor  une  corcie,  z  U 
coreie  seit  mise  sor  la  plaie  sânèe. 

I^  version  se  potirsuit  assex  réguliërcmctvt  jusqu'au  ch^xvii 
du  latin  ;  de  là  nous  pit^sons  au  ch.  xxt,  donc  voici  la  traduc- 
tion : 

(Fol.  29  f)  Qiiani  home  chiei  M  foH  tnu!.  Trenchîez  le  quir  el  somechon'del 
chief  en  crois,  et  faîtes  pertub  en  le  tes,  ke  la  niatere  s'en  vos  st.  Liez  ferme- 
ment le  derve'.  Garisei  la  pbie  co nie  devant.  --  Afain:  quxtuu.  Faites  une 
quiture  en  la  fontenclle  del  coî  derîere. 

Suit  le  chap.  kxix  du  L  m  {Si  înîesiinum  ptr  aliqtiôd  vulnus 
foras  exkrit  ci  ptr  largum  pd  ex  oblique  S)  : 

(Fol,  29  d)  Siksh0fU[s]h$fttt.  Si  les  boucles  isscnt  par  aucune  plaîc,  et  les 
boueus  sdent  trenchiés,  mes  ke  Ka  graindre  partie  retnaine  saine,  aide£  le  isst  : 
si  les  boueus  sont  endurcis  par  froit^  trenchc;:  aucune  vive  beste  parmi,  et 
metés  sor  les  boweus  de  si  a  ce  que  il  seyent  rechatifés*.* 

Mais  à  ce  chapitre  s'arrête  la  traduction  de  la  Chirurgie  de 
Roger.  La  recette  pour  Vapostoliavn  cirurgicmn  (sic)  et  Vaposio- 
Ikôtn  bdstarî  (fol.  30)  ne  sont  pas  de  Roger ,  non  plus  que 
diverses  recettes  qui  suivent.  A  partir  du  fol.  35  le  copiste  écrit 
à  longues  lignes,  et  non  plus  à  deux  colonnes.  La  première 
recette  de  cette  partie  du  manuscrit  commence  ainsi  :  (FoL  jj) 
M  Pmtdrt  par  la  pitrt.  Foudre  por  piere,  recet  semence  de  persil, 
de  fenoil,  de  ache.  de  lo vache,  les  semences  de  chascon  une 
once...  »  Ce  recueil  de  recettes  se  termme  comme  suit  : 

(FoL  4î  v»)  Encùntrt  mnc  itcorani  de  n^s.  Encontre  sanc  ke  decort  (/<?/.  44} 
denf^s,  faites  li  c*^ic  signe  sor  le  front  :  XK.  Si  pcrncï  ^iprês  .j-  '^stu  a  .(j.nous 
c  coupci  les  nous,  z  pxh  escrivea  cest  signe  en  son  front  de  son  sanc. 

A  ce  meimc  :  pcrnez  argille  ïrès  fon  t  le  destemprc^  de  vin  egrc ,  i  de  ce 


au   sens  d'accroissement,  avantage  ;  id  c'est  un  adj.  à  peu  prés  synominc 
dVfi/^i  qui  prC'Ctfde. 

2.  lïy  A  dans  le  latin  :  et  patlens  autem  in  vînculîs  teneatur.  > 


LES   MANUSCRITS    FRANÇAIS   DE    CAMBRIDGE  83 

faites  .j.  escrictoire  de  sus  le  front,  z  de  celetere  meimes  z  et  de  cel  vin  faites 
une  emplastre  z  metez  sor  le  flanc. 

A  ce  meime  :  faites  poudre  de  vers  de  tere  o  solsecle  z  peivre,  z  ice  des- 
temprez  z  bcvez  en  vin  par  .iij.  lunisons.  Derechief  quisez  le  quer  de  .j. 
cicoigne  z  Tewe  bevez,  z  escrivez  les  nons  des  .iij.  reis,  Jaspar,  Melchior, 
Baptizar,  en  .j.  brevet,  z  les  portez  sor  vous. 

Encontre  sanc,  Pemez  bendes  de  linges  cordeles,  z  temprez  en  vin  egre,  z 
liez  les  jointes  totes. 

Encontre  le  maille  et  le  teie  del  oil  novele,  pemez  le  sanc  de  arundes 
secke,  z  faites  poudre,  z  metez  en  l'oil  au  malade  un  petit  ensemble.  Encontre 
le  maille  del  oil,  pemez  pel  de  colovre  z  quisez  en  grasse  de  coc  ou  de  oisel 
ke  vit  de  ravine,  z  puis  colez  parmi  .j.  drap,  z  si  le  estuez  (x^)  en  .j.  vaissel 
de  areime,  z  metez  en  Toil  au  malade. 

A  ce  meime  :  pemez  basme  une  partie,  z  de  fiel  de  oisel  z  metez  en  Toil. 

Qpisez  le  rouge  lumaisson  en  ewe  z  coillez  la  grasse,  z  puis  le  colez  z  en 
oignez  les  euz  ' . 

Collire  as  eu:(.  As  euz  faitez  tel  coUirie  :  pemez  cire  virge  z  tuttie  z  vert  de 
Grèce,  saugeme;  poudrez  tôt  z  destemprcz  de  bon  vin. 

Encontre  festre,  sanz  trencher,  faites  tel  emplastre  de  ces  herbes  :  favee  .iiij. 
poignes,  des  autres  de  chescune  une  :  primerole,  bugle,  la  racine  de  cucuel, 
mirfoil,  gantelée  *,  sanemonde»,  herbe  Robert ♦,  pinpre,  z  bâtez  en  .j.  morter, 
z  pemez  siu  de  moton  z  fondez  z  pemez  le  jus  des  herbes  z  miel  z  farine  de 
orge,  suffisantement,  z  de  ce  faites  emplastre  z  l'eschaufez  z  le  metez  si  chaut 
com  il  porra  suffrir  ;  mes  primes  metez  une  tente  en  la  plaie,  z  après  metez 
Templastre  desus. 

4.  Court  traité  de  médecine,  qui  n'est  qu'une  série  de 
recettes.  —  Les  trois  premières  lignes,  dont  la  première  est  la 
rubrique,  ont  été  grattées  presque  totalement. 

(Fol.   45) a  doner  medicine, 

T • 

quant  vodrés  doner  medicine 

a  malades,  se  regardé[s]  laquele  humor  li  abunde  el  cors,  z  quele  maladie  il  ad. 
Se  ce  est  fleume,  vous  le  devès  atraire  par  oximel  donier,  z  quant  la  matere 
est  apparill[i]e,  que  vus  le  conustrés  par  Tespeceté  ou  par  la  color  del  urine 
se  li  dictes  $  ainz  que  vus  li  donés  medicine  par  troi  jors  de  bones  viandes  z 

1 .  Cet  emploi  du  limaçon  contre  une  affection  des  yeux  est  recommandé 
ailleurs  ;  voir  les  recettes  publiées  d*après  un  ms.  de  Cambrai  par  M.  Salmon, 
art.  54  (Études  rom.  dédias  à  G.  Paris,  p.  259). 

2.  Campanule  gantelée,  Joret,  Flore  popul.  de  la  Normandie,  p.  125. 

3.  Benoite,  D'  Bos,  Chirurgie  de  Mondeville,  au  glossaire. 

4.  Géranium  Rohertianum,  Joret,  Flore  pop.,  p.  49;  ci.Romania,  XII,  10 1. 

5.  Corr.  si  le  dictés} 


84  P-    MHYER 

solubîes»  r  si  mangut  porées  qu«  soit  fait  de  mauves  z  de  mercuriale,  z  se  i 
rmiùs  clmr  de  porc.  5c  vus  n'avea:  porée,  si  pregne;c  oigtiions  z  metés  ovec  la 
char  de  porc,  e  se  ce  est  en  tens  que  on  ne  doit  mie  manger  char,  se 
mangut  tcles  viandes  :  c'est  a  savoir  menuise,  perches,  lu/,  roches,  poissons 
a  grosse[s]  escardes  '  de  mer  z  de  duce  cwe... 

Ce  traité  se  termine  (fol.  52)  par  un  chapitre  intitulé  Encontre 
fause  flmtm^  scabie^  rûigne,  dcrtre^  manjia^  z  îesche  t  aulrc{s\ 
cimes.  Les  deux  dernières  recettes  sont  les  suivantes  : 

(Fol.  51  v^)  Autre.  Perncii  teudroDs  de  runcc  t  lovasche  z  quise^  en 
gressc  de  capon,  puis  metez  en  .j,  boiste  en  cire. 

Oimmtnt  a  gouk  rose.  Pemez  demie  marc  peisant  de  bknc  de  Puillc  z  demi 
marc  pesant  de  bknc  plum  z  deniî  marc  pesant  de  blanc  alun  z:  demi  marc 
pesant  de  franc  encens  z  .].  m;irc  pesani  d'oile  d*olive  z  .j.  marc  pissant  de  vif 
.  argcm  z  ,].  livre  de  vieux  oint, 

5*  Traité  (apocryphe)  d'Hippocrate  envoyé  à  Tempereur 
César,  —  Ce  traité,  qui  commence  par  la  théorie  des  quatre 
humeurs,  et  n  est  autre  chose  qu'une  collection  de  recettes 
médicales,  a  été^  comme  ou  sait,  extrêmement  répandu  au 
moyen  âge.  Les  manuscrits  latins  en  sont  fort  nombreux,  et  il 
en  a  été  fait,  au  xni*  siècle,  plusieurs  traductions  françaises. 
Celle  que  nous  avons  ici  se  rencontre  en  divers  manuscrits, 
par  exemple  Digby  86,  foL  8  v^  (Bodleienne)S  HarL  15 ï8, 
fol,  17s  (Musée  britannique).  Dans  ces  deux  mss.,  Touvrage 
est  précédé  d'une  rubrique  qui  manque  ici  K  J*ai  déjà  signalé 
une  autre  version  du  même  apocryphe  dans  un  ms,  de  l'Univer- 
site  de  Cambridge,  et  à  ce  propos  j'ai  cité  d'autres  versions^. 

(FoL  5jJ  Cliascun  veraimeni,  z  home  z  best^  Eoisel,qui  cuer  ïi  en  soi» 
a  .liij.  humors,  meismement  cors  d'orne,  et  quelcs  sont  les  humors?  Ce  est 
a  savoir  î*une  est  chaude»  Tauirc  est  scche»  la  tierce  est  moiste,  ta  quarte  csi 


1,  Écailles. 

2,  Voir  la  notice  de  M.  Stengel*  p*  4. 

3,  Dans  le  ms.  Digby  :  «  Ici  comence  le  livre  Ypoçras  ke  il  envead  a  César 
Tempereur.  »  HarL  :  *i  Ceo  est  la  livre  ky  jco  Vpocras  enveye  a  Sesar*  » 

4,  Rûntania,  XV,  274.  Ajouter  au?i  manuscrits  cités  a  cet  endroit  les 
n<a  1361  et  Î124  de  b  Bibl.  Sainte -Geneviève,  Je  note  en  passant  qu1l  existe 
une  version  en  provenijal  du  même  traîtC*.  Fr.  Michel  en  cite  les  premi^rçs 
lignes  diaprés  un  ms.  qui  îuî  appartenait  en  18^6,  dans  son  édirïon  du  poème 
de  la  guem:  de  Navarre,  p*  7S2-  Il  a  dû  le  vendre,  mais  je  ne  sais  à  qui. 


LES    MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  85 

froide.  Par  la  chalor  sont  soustenues  totes  iceles  choses  par  lesqueles  nos 
vivons.  Nostre  os  sont'sec  qui  force  nos  donent  a  soffrir  travail.  Froides  sont 
les  entrailles  dont  nous  espirons,  z  li  sans  est  moistes  qui  norrist  la  vie.  Par 
les  os  z  par  les  entrailles  corent  les  veines,  lesqueles  govement  le  sanc  ;  li 
sans  la  vie;  la  vie  le  cors  sostient... 

6.  A  la  suite  viennent  des  recettes  empruntées  à  Touvrage 
de  Platearius  qui  sera  indiqué  plus  loin.  En  voici  une  contre  la 
fistule  ou  «  goûte  festre  ». 

(Fol.  191)  Fistula  si  est  une  maladie  que  orne  apele  goûte  festre;  si  est  une 
plaie  parfont  estroit  par  desus  en  la  superficie  ;  si  vient  acostomement  de  veus 
plaies  sorsanées,  corne  la  bouche  desouz  est  teint  de  venim,  dont  tote  la  nor- 
reture  qui  i  vient  tome  a  corrupcion,  dont  la  superfice  depece,  et  cort  fors 
une  porreture.  Et  corne  ele  est  une  fiez  resoudée  ou  .ij.  foiz,  si  depece 
de  rechief,  et  environ  la  plaie  si  naissent  plu  sors  bouches  ;  z  si  vient  a  la  fiez 
de  cause  reumatique  sans  plaie  que  Ton  a  eu  devant... 

Suivent  diverses  «  cures  ».  Voici  la  dernière  : 

(Fol.  191  vo)  Autre.  Faites  poudre  en  tele  manere  de  cantaridis  :  pregne 
Ten  cantarides  vives  z  les  mete  om  en  vin  (f.  192)  egre  z  en  sel,  z  au  tierç 
jor  les  mete  om  secchier  au  soleil,  z  en  face  Ten  poudre,  z  mete  l'en  en  goûte 
festre  ovesques  une  tente,  z  face  Ten  une  quiture  en  la  fonteine  del  col. 
—  Poudre  precius  a  tuer  cancre.  Pregne  l'en  le  jus  des  racines  affodillorum 
.vj.  ounces,  z  chius  .vj.  onces  %  .x.,  de  orpiment  .j.  once,r  lesconfise  l'en  en 
teu  manere  :  les  boille  l'en  en  ewe  z  i  mete  om  .j.  once  de  orpiment  z  les 
lesse  l'en  boillir  .j.  poi,2:  les  confise  om,  z  les  mete  om  au  solein  {sic)  secchir, 
z  en  face  om  trocisques,  z  les  estue  l'en  tant  que  on  ait  a  1ère  por  mètre  sor 
cancre. 

Explicit  Amicum  induit. 

Atnicum  induit  qui  justis  amicorum  petitionibus  condescendit  est 
le  début  de  la  Practica  brevis  de  Platearius,  dont  les  manuscrits 
ne  sont  pas  rares  %  et  qui  a  été  imprimée  dans  l'ouvrage  inti- 
tulé, Practica  Jo.   Serapionis^  dicta  Breviarium  (Venise,  1497, 

1 .  Un  mot  doit  avoir  été  omis. 

2.  Bruges,  470  (Laude,  Catal.  des  mss.  de  Bruges,  p.  405).  Gimbridge, 
Trin.  Coll.  R.  14.  40  (James,  Catal. y  II,  325);  Peterhouse,  0.5.1,  fol.  119 
(James,  A  descriptive  Catal .  oj  the  mss.  in  Peterhouse  Library,  p.  73).  Florence, 
Bibl.  Laurentienne,  Gadd.  201  (Bandini,  Bihl.Leop  -Laur.,  II,  198).  Oxford, 
Bodléienne,  Ashm.  1428;  Magd.  Coll.,  173.  Paris,  Bibl.  nat.  lat.  8160, 
fol.  9,  etc. 


86  p.    ME  VER 

in-foK;  Hain,  n*"  14695),  fol,  169  et  suiv.  Le  paragraphe  sur 
la  fismie  et  la  recette  pour  la  poudre  de  cantharides  se  lisent  en 
latin,  à  la  fin  de  la  Pra^ticaj'oL  185  v"  de  rédidon  citée. 
Suit,  de  la  même  écriture,  nuis  un  peu  moins  grosse  : 

Pemez  unepoine  de  cikoré  une  de  cereliunge'  z  la  terce  de  cou  père,  z  une 
des  racines  de  persil^  t  une  des  racines  de  fenoil,  z  une  de  menu  ache,  z  une 
de  bchim,  z  une  de  la  semence  de  anij?,  z  une  poine  del  escorche  de 
saumbu  ^  z  demi  poine  de  escroclie  (sic)  de  frêne  z  deus  poines  de  pollipode. 

7.  Traduction  d*un  autre  traité  apocryphe  d'Hippocrate.  — 
La  rubrique  attribue  ce  traité  à  Hippocrate,  et  il  est  certain 
qu'on  y  trouve  beaucoup  de  choses  prises  à  cet  auteur.  Mais  eii 
réalité  1  original  est  Toeuvre  d'un  médecin  anonyme  de  l'École 
.  de  Salerne.  Cet  original  a  été  imprimé  pour  la  première  fois, 
par  Henschel,  d'après  un  manuscrit  de  Breslau.  Il  est  réimprime 
(avec  les  notes  de  Henschel)  dans  la  Colle^th  Sakrnilanu  de 
Salvatore  de  Renzi,  II,  74  L  Seulement  notre  traducteur  a  dû 
avoir  sous  les  yeux  un  texte  pourvu  d'un  prologue  qui  manque 
dans  le  ms.  de  Breslau,  et  dont  il  sVst  borné  adonner  un  résumé 
en  forme  indirecte,  La  traduction  est  du  reste  fort  libre  et 
renferme  bien  des  passages  que  je  n'ai  pas  trouvés  dans  le  latin, 

(Fol.  194)  hîi  cmfmtci  k  $otiî  éfimgtument  Ypoeras  a  ers  dùdpks  quf  muH  U 
mmitfit  rtquis  comfttt  t!  dfftsênt  risîlfr  H  ftiaîmi^s^ 

Li  iluctor  disi  au  començcmcnt  de  cest  livre  z  parole  a  ses  disciples  qui 
l'a  voient  requis  de  ccst  livre  faire,  z  dbt  qu'il  a  grant  joie  r  grant  leessc 
loies  les  foi  JE  que  il  pense  à  lor  peticîou  pur  le  preu  que  lor  est  a  venir  de  sa 
doctrine  s'il  volent  retenir  t  c  dîst  qu'il  ne  lor  dira  se  choses  e?ipruvécs  non  t 
conçues,  El  si  lor  djst  qulî  n  aveient  pas  sa  doctrine  pur  vil,  por  ce  qti*il  ont 
assés  livres  de  ftsiquc,  que  om  csuiicKe  bien  ^vent  la  soif  d'un  roisseî,  coni 
Ten  ne  poet  venir  a  la  funtaine.  Ore  vos  dirons  dunques  un  poi  de  bons 
comandcmcns  que  serront  autnesî  coni  introductions  de  praciique,  car  a  la  ûez 
si  vaut  mut  l'art  ovc  b  niain;  c'est  a  dire  que  le  practique  vaut  mut  ovc  la 
théorique,  Ore  v-us  doig  donqucs  un  novel  cotnandement  que  vus  faces  tresto« 
autrcsî  come  jo  faz  et  que  vo[s]  overj^^  si  com  jo  vus  enseigneray. 


l.  Langue  de  cerf,  scolopendre  (Dorvauft,  VAntiéoiaîre  Nicolas^  p.  sj). 
a.  Sureau. 

j.  De  plus  îly  en  a  une  rédaction  en  hexamètres  dans  le  t  JV  Je  U  même 
coUectioo,  p.  14$  et  suiv. 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  87 

(To)  Otu  mires,  corn  hom  terequer[r]a  que  tu  viengies  veoir  aucun  malade, 
le  nun  de  Xostre  Segnur  te  puisse  aider,  z  li  angeles  Deu  ke  fist  compaignie 
a  Thobie,  cum  il  ala  en  Ninive,  z  le  guiout  z  menout,  puisse  guier  z  conduire 
vostre  cors  z  vostre  aime  en  totes  vos  ovres  !  Ore  vus  amonesie  donques  que 
vus  enquerez  z  encercliez  par  chemin,  tôt  com  vos  irrés  pur  veoir  le  malade, 
dou  messager,  com  longement  li  malades  avéra  geû,  z  en  quele  manere  la 
maladie  li  avint,  que  vus  puissez  estre  certefiez  de  la  maladie  par  les  signes 
que  li  messager  vus  dirra,  si  que  vus  ne  seez  pas  esbaîs  cum  vus  vendrez 
devant  le  malade... 

A  la  suite  de  ce  traité,  du  fol.  211  v**  au  fol.  213  v<»,  où  finit 
le  cahier,  une  main  diflférente,  mais  de  très  peu  postérieure,  a 
écrit  diverses  notes  de  matière  médicale.  La  première  paraît 
abrégée  de  l'article  Olibanum  du  livre  De  simplici  medicinay  ou 
«  Circa  instans  »  de  Platearius  ;  voir  la  Practica  Serapionis  citée 
plus  haut,  fol.  205  v**.  Pour  les  deux  autres,  voir  le  même 
ouvrage,  fol.  205  v**  et  207  r**. 

Olibanum,  ceo  est  ensens.  Il  est  chaud  e  sèche  el  secunde  degrei.  Il  ad 
vertu  de  cunforter  et  de  confermer,  de  traire  ensemble  e  de  restreindre  ;  il 
est  bon  encuntre  les  lermes  des  oylz  e  la  dolur  de  denz  e  encontre  le  huuel 
e  encuntre  la  grossesce  et  la  roinssor  des  nariles,  e  encontre  (/o/.  212) 
indigestiun  e  ameres  éructations,  e  pur  les  mameles  engred[l]er  »  sunpodre 
confit  od  eysil  e  enplastre  sor  un  drap  e  mis  sur  le  mameles.  —  Poine  est 
chaude  z  sèche  el  secunde  degrei  ;  ele  a  vertu  a  défaire  e  a  degaster. 

Plum  est  freid  e  moiste  el  secund  degré.  Pernez  un  morter  de  plum  et  un 
pestel  e  metez  la  einz  eve  z  oile  oviole  *  e  movez  le  deques  il  seit  espés  ;  après 
sil  metez  sechier  quinze  jors  au  solail,e  pus  si  metez  oile  rosat  e  movez  le 
mut  e  suvent.  Icest  uniment  mult  vaut  encuntre  arsure  de  feu  u  de  ewe 
chaude  e  encuntre  chaudes  apostemes  e  encuntre  escorceùres  de  chalure 
encuntre  roigne  qu'en  apele  en  englois  les  changles... 

8.  Traité  en  vers  sur  les  maladies  des  femtnes,  —  L  auteur 
indique,  en  termes  généraux,  dès  les  premiers  vers,  les  sources 
auxquelles  il  a  puisé.  Entre  ^es  auteurs,  il  nomme  une  dame 
appelée  Cléopatras.  Cette  Cléopatra  (sans  s)  était  une  femme 
médecin  de  l'antiquité,  sur  laquelle  on  a  divers  témoignages 
anciens,  mais  de  qui  il  ne  subsiste  aucune  œuvre  authentique  '. 
Ce  nom  a  été  pris  par  notre  auteur  dans  un  traité  fort  répandu 

1.  «  Ad  mamillas  gracillandas  ». 

2.  a  Oleum  rosaceum  vel  violaceum  ». 

3.  A  la  suite  de  Trotula,  on  trouve  dans  le  ms.  B.  N.  lat.  7056  (fol.  86  v») 
un  traité  qui  commence  ainsi  :  «  Incîpit  genecea  Cleopatue  ad  Deodaiam, 
Desideranti  tibi  filia,  karissima,  et  habere  volenti  commentarium  curationis 


88  p.    MEYER 

appartenant  à  Técole  de  Salerne  et  connu  sous  le  nom  de 
Trotula;  c'est  ce  traîté  qui  est  sa  source  principale.  Mais  je  dois 
faire  remarquer  que  les  éditions  de  Trotuîa  (j*en  connais  trois, 
de  iS44j  15475  1566)  présentent  un  texte  remanié  d'où  le  nom 
de  Cleopatra  a  disparu.  C'est  donc  d'aprà  un  manuscrit  que  je 
rapporterai  ici  un  morceau  du  texte  latio  que  Ton  pourra  com- 
parer au  début  du  poème  français  ; 

, . .  .Earum  (_  mulicrum)  igitur  rniseranda  cakmîUs^  et  maxime  cujusdam 
mulieris  gratîa  animum  tneuni  soUicttans,  tmpuljt  ui  contra  e^itudinescarum 
evîdefîdus  provtderem  sanitati,  ex  libris  Ypo.  et  G[alieni]  ei  Cleopatre  pociora 
decerptre  desudavi,  m  causas  egritudinum  et  signa  cum  ciîris  cxponerem  et 
dîcerem^  Quoniam  in  muiieribus  non  tan  tus  habundat  cal  or  ut  pravos 
hutîiores  sufHciat  desîccare  qui  in  eis  sunt»  nec  tantum  laborcni  vakat  dcbiiitas 
earum  tolerar»;  ut  per  sudores  vale^vt  eos  ad  cxteriora  exp^Uere  natura,  sicut 
in  viriSj  propter  lioc  ad  caïoris  récupéra tionem ,  eîs  quandam  purgationem 
natura  precipue  assignavit  per  nieiistrua  que  vulgus  flores  appel  Ut;  quia,  iicyt 
arbores  non  ferunt  fructus  sine  floribus,  ita  muUeres  sine  floribus  ofRcio  sue 
conceptioms  fraudamur.  Hujus  autem  purgatio  contingit  mulicribus,  sicut 
vtris  de  tiocte  poUuib  accidit^  vi  nature.  SempL-renim  natura  gravaiaa  quibus* 
dnm  humoribus  in  vins  sive  in  niulieribus,  juxta  genus  suuni  nititur  lionus 
siîum  deponere  et  bborem  nimucre*  Contlrgit  mulieribus  iiec  purgatio  circa 

quartum  dedmutn  annum,  vel  paulo  ciiius,  veî  pauîo  tardius {B.  N,  ht, 

7056,  /<^*  77,  corrige  ^à  et  /à,  à  raiàt  d'un  mdrt  ms.) 

Proiogt  (fol,  214). 

Bien  sachîéf}  femmes,  de  ce  ti'aiés  douunce, 

Ci  est  cscrit  por  voir  de  lor  science, 

D'cnÉini  avoir  r  de  lor  enfanter, 
4  De  br  secrùs  tôt  i  est  devisé. 

Trover  pots  toccs  les  aventures; 

Cerchies  sunt  les  mdllors  escriptures 

De  Costendn  t  del  bon  Catien  ; 
8  Diacoridcs  ceï  i  mist  de  son  sen  ; 

Sa  part  i  mist  li  sages  Ypocras 


mulicrona..,  »  L'ouvrage  est  donné,  diaprés  le  prologue,  comme  traduit  du 
grec,  Clwpaita  est  probablement  ici  un  nom  imaginaire,  car  !e  même  ouvrage 
se  trouve  ailleurs  (par  ex.  Ttinit>'  ColL  R.  14.^0,  fol.  îci)  sous  un  tout 
autre  nom.  En  tout  cas  ce  n'est  pas  Toriginal  de  notre  poème  français. 

1,  On  Ut  dans  les  éditions  {par  ex,  Medidmiiqui  omms,  Venise,  1547.  f*>î, 
71)- 

Qli«pro|itcT   ego  misenndâ  ilUrum  c*kmitii!c*   prtfenfm   cuJDidBn^    mutrani:  | 
iiiitig*tioBc  comptiîîa*  începi  dîîigcntiu*  contempUri  Je  *grïtu*iinibtJS  «|uîbtt&  femî» 
nlotis  icxui  »%pî»ïîme  motetUtar. 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  89 

Et  une  dame  que  out  non  Cleopatras. 

Certeinement  eles  i  troverent 
12  Dont  li  max  vient  z  cornent  en  garront. 

Por  ce  que  femmes  nen  ont  tant  de  chalor 

Que  eles  puissent  degaster  lor  humors, 

Por  ce  rcmainent  les  humors  en  lor  cors  ; 
16  Pur  la  froidure  nel  poent  geter  hoi^. 

Li  home  suent  z  tra[va]illent  fortment, 

Por  ce  s'espurgent,  n'ont  enfermeté  tant. 

Par  nature  vont  homes  a  femmes  conseiller, 
20  Espurgement  lor  donent  por  aider  : 

Doné  lor  a  un  grant  espurgement,  (v©) 

Dames  Tapellent  fleur  par  engendrement. 

Ne  pœnt  conceivre  par  nul  engignement 
24  Femme  nesune  sans  fleur  apparisant. 

Arbres  ne  porte  c'  il  ne  florist  avant  : 

Primes  florist,  a  tous  est  çonoissant, 

Herbe  ne  porte  ne  grein  ne  semence 
28  Se  ains  ne  floris[t],  de  ce  n'est  pas  dotance. 

Sclunc  nature  arbres  ne  porte  fruit 

S'il  ne  florist  ;   ice  conoissent  tuit. 

Por  ce  ai  jo  amené  ces  semblances 
32  Ke  femmes  ont  en  fleurs  grant  conoissances. 

A  femme  vient  teu  purgations 

Si  come  a  home  vienent  pollutions. 

Pollutions  avienent  z  tex  flors 
36  QjLiant  habondance  i  a  grant  des  humors; 

Naturelement  vient  itel  purgemens 

Quant  la  femme  a  ou  treise  ou  quatorsc  anz, 

A  la  fiez,  ou  plus  tart  ou  ançois, 
40  Estre  ne  poent  pas  totes  d'une  lois  : 

L'une  est  froide,  l'autre  est  plus  chaude,  (f.  215) 

Geste  tst  humble,  celé  est  plus  baude... 

L'auteur  cite   Galien,  mais  d'après  Trotnla,  ainsi    dans  ces 
vers  : 

En  un  suen  livre  reconte  Galiens  (f.  216  v») 
Que  jadis  fist  as  escolers  grant  biens, 


II  Corr.  troveront,  —  21.  Le  sujet  de  dont  doit  ère  nature;  mais  alors  les 
deux  vers  précédents,  dont  le  premier  est  trop  long,  doivent  être  corrompus. 
—  22  Engendrement  Tiz  pas  de  sens  ici.  Il  y  a  peut-ctre  lieu  d'intervertir  ce 
mot  avec  engignement  du  vers  suivant. 


90  p.    MEYER 

De  une  que  out  perdu  ses  flors 
Par  quatre  mois,  estre  poet  par  plusors, 
Mult  devint  niagre  z  f>crdoit  le  manger 
De  nule  rien  n'avoit  el  desirrier.  (f.  217) 
Par  quatre  jor[sJ  la  comande  a  seignier... 

Il  cite  Dioscoride  (fol.  225),  Oribase  (ibid.),  Hippocrate 
(f.  236),  Constantin  (f.  231).  Tout  cela  est  pris  de  Troiula^ 
comme  aussi  le  passage  suivant  où  il  est  fait  mention,  peut- 
être  par  suite  d'une  erreur  de  texte,  d'une  reine  de  France. 

Uns   mires  de  Lions  fact   un  autre  mecine  (f.  220  v») 

A  cele  que  de  France  estoit  clamée  roïne  '  : 

Preng  gingebre  z  savine  z  foilles  de  lorier, 

Titruiles  *  tôt  ensemble  en  un  morter, 

Sor  les  carbones  mist  ceste  medicine 

Sor  la  sele  patie  J   fist  s[e]oir  la  roïne 

Ensi  qu'en  la  nassance  la  fumée  venist. 

Bien  fu  de  dras  coverte,  niuli  longement  i  sit. 

Dame  que  tel  mecine  vodra  fere  sovent 

Doit  oindre  sa  nassance  de  oie  rose  devant... 

On  a  remarque  que  Tauteur  associe  en  rime  en  et  atiy  ce  qui 
serait  bien  insolite  de  la  part  d'un  écrivain  anglais.  J'incline  à 
croire  que  le  poème  a  été  composé  en  France. 

9.  Le  poème  qui  vient  ensuite  n'a  que  172  vers.  Ce  sont 
encore  des  recettes  pour  les  femmes.  Toutefois,  comme  les 
vers  sont  de  8  syllabes  et  non  plus  de  10,  je  ne  crois  pas  que 
ce  soit,  à  proprement  parler,  la  continuation  du  poème  précé- 
dent. 

Por  tecc1)fs  eu  le  vis  (fol.  234). 

Liquele  que  soir,  dame  ou  pucele,       Femme  ne  sai  en  nul  paîs, 

Ki  désire  avoir  la  face  bêle,  4  Porqueiqueeleait  techesenson  vis, 


1.  On  lit  en  effet  dans  un  texte  de  Trot ula  (Tnn.  Coll.  R  14.  30)  :  Qui- 
dam mcdicus  fecit  regine  Francie  :  accipe  folia  laurc,  savinamtere  simul...  » 
(fol.  189  v^').  Mais  il  va  dans  le  ms.  lat.  7056  ffol.  78  a)  :  «  Quidam  medicus 
fecit  h(K  in  regiont'  l'rancie...  » 

2.  Corr.  triith'^  ou  trihJr^. 

3.  Sic.  corr.  fH-rcù. 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  9I 

Que  forment  ne  li  mesaviene,  Laver  le  deit  z  fere  net 

Por  quele  cnose  ki  avigne.  Et  quire  en  .j.  bel  possonet 

Si  tecches  a  ki  al  vis  apiere,  Kisoit  degastedel  jor  grant  masse, 

8  Si  face  prendre  gome  d'eere  20  Tant  que  celé  ewe  soit  grasse  ; 

Et  fiel  de  tor  triblé  ensemble  ;  De  celé  grasse  soit  doldée  (sic) 

Leleudoitfroter,com  il  me  semble,  Et  del  plus  clier  abevrée. 
Totes  les  tecches  doit  froter 

12  Et  tôt  le  vis  mult  bien  laver;  Por  faire  clier  vis  (v«) 

Et  en  après,  par  dreiture  En  le  mois  de  mai,  el  tens  novel. 

Doit  avoir  autre  laveùre  :  24  Prenez  le  pain  del  cucuel  ; 

Foïr  doit  on  a  une  besche  Lavez  le  bien  et  fêtes  net, 

16  La  racine  de  la  lovasche;  Si  le  parez  a  un  coutelet... 

Ce  petit  poème  se  termine  ainsi  : 

Por  jaun€[s]  clinvus  avoir  '  (f.  237). 

Un  bon  conseil  dirai  a  ceus  Garder  le  pocz  si  vous  plaist, 
Ki  désirent  avoir  jaune[s]  cheveus  :        L*an  outre  en  outre  tôt  plenier, 

Les  trous  de  choies  facent  prendre  Ki  bonemeni  le  veut  seccher 

Secchir  z  arder  puis  en  cendre  ;  En  la  leissive  le  quisez  ; 

De  ce  face  om  bone  leissive,  Eins  que  vostre  chief  moillez 

Et  de  ewe  de  fontaine  vive,  Laver  le  poés  par  raison 

Prendre  la  flor  de  la  genest  ;  O  mult  très  petit  de  savon. 

10.  Traduction  en  prose  de  la  Chirurgie  de  Roger  de  Parme. 
—  Cette  traduction  est  fort  différente  de  celle  que  nous  avons 
rencontrée  plus  haut  (art.  r).  Elle  me  paraît  inférieure,  et  de 
plus  le  texte  en  est  assez  souvent  altéré.  Elle  est  accompagnée 
de  nombreux  dessins,  fort  élégamment  exécutés,  qui  repré- 
sentent les  diverses  opérations  décrites.  Ces  illustrations  occupent 
la  marge  inférieure  des  pages. 

De  tote  matière  de  plaies  ke  avenent  al  chefÇÎ.  2} 8). 

A  feiz  avent  que  li  chef  est  plaie  en  plusurs  maneirs.  Auchune  feiz  od 
la  despesceùr[e|  del  test,  auchune  feiz  sanz  despesceùrfe]  del  test.  Od  la 
despesceûife]  del  test  est  quant  la  plaie  est  achune  tie    grande  et   aperte  ', 


X.  On  possède  beaucoup  de  recettes  pour  blondir  les  cheveux:  j*en  ai 
publié  une  toute  différente  dans  mes  RapfnyrtSy  p.  107,  d'après  un  ms. 
d'Edimbourg.  11  y  en  a  plusieurs  dans  Trotula,  MeJici  antiqui  (Venise,  i$47, 
fol.  79  vo). 

2.  Le  traducteur  n'a  pas  bien  compris  le  texte  (ci-dessus,  p.  79). 


92  P,    MEYÊR 

achune  fdsî  petite.  Mcis  quant*  la  plnie  petite  u  grande,  Tune  est  od  graundc 
il  large  plaîc,  c  Tauirc  ost  od  petite  estroitè  plaie.  ï^  dcspeceûre  del  tesc, 
quaunt  eîe  aveint  od  la  blcsceûre  des  toks  del  cervel,  est  tut  dis  a  criendrc, 
kar  aichune  feiz  e:st  blescé  la  toie  que  defent  le  cervel  est  *  del  test,  que 
est  a  pelé  la  dure  nieire,  auchune  feiz  la  toie  que  oiî  sur  k  cervel,  que  est 
apelé  la  pie  mère.  S\  h  dure  mère  est  blesce,  ceo  est  h  raie  que  defent  le 
cervel  dcl  test,  par  ces  signes  le  deve»  saver  :  h  teste  del  plaie  H  doit  dukr, 
la  face  H  doit  roger»  la  veine  des  oh  li  deit  reesver,  e  h  langue  II  doit  nercir. 
En  après,  t^uaunt  la  pie  mère  est  blescé,  ceo  est  la  toie  que  est  sur  k  cervel, 
par  ces  signes  le  deve;;  cunustre  :  H  iiafTré  ruvera,  e  sa  voÎï  (v"")  li  esgrevera, 
que  a  peines  parler  pura  ;  blorbetes  *  li  snrvt'ndrunt  en  la  face.  E  al  commen- 
cement ii  doit  core  hors  des  orreales  e  des  narrilies  sanc  e  pureture,  e  si  dcîc 
estre  costïvé  ;  e  pus  en  fui  M,  cea  que  pis  est,  que  la  plaie  doit  ?rembïer  iroi 
feiz  u  qifane  (sic)  k  jor.  Car  ceo  est  certein  signe  de  mort.  En  après  de 
trestUT;  îcels  desquels  œs  signes  que  dît  aviam  avendrunt,  u  sî  des  autres 
si|ç(ws  plus  i  avenunt,  deveîlla  mort  de  cels  attendre  al  plusjesque  acent  jors  »* 
E  pur  ceo  que  de  h  deï»peceûr[e]  del  test  auchune  feiz  en  avcim  la  mort, 
duTum  a\'ïui!  par  ordre  cornent  honi  pœet  aîdeir  a  ta  despesceûre  del  test. 

De  ht  tkffseeùrtdd  tes. 

Quant  la  despesc[e]ûre  del  test  est  grande  e  aperte,  si  cum  d'espee  u  de 
achune  arme»  issî  que  os  u  autre  chose  i  deve  estre  fors  tteit^  sî  mult  sanc 
nel  dei^turbe,  u  os  u  altre  chose  que  deit  estre  trait  hors,  Uit  meintenant  le 
traiz  hors,  e  un  drap  de  lin  mult  délié  entre  le  test  e  la  dure  mère  cointe- 
ment  en  escleng  metcz  deden^,  e  dedenz  le  pertuz  de  k  depesceûre  del  test 
metez  un  drap  de  lin  u  de  ^W  u  de  aichune  que  muît  mels  vaut*,  issi  que 
le  ches  del  drap  (fol.  239)  de  tôt  es  pars  desu^  le  test  seint  mis  proveablement, 
que  la  poreture  que  decurt  des  parties  dehors  ne  decurge  a  la  tek  que  dure 
meîre  est  apelé,  c  ensi  blescé  le  cer\'el  plus  que  ainz  blescé  ne  fud.  Del 
espunge  de  b  meir  ben  kvé  e  sechié  poot  hom  meimes  ceo  faire,  car  ele,  al 
com  la  cose  que  mut  beit,  reccit  la  pureture  que  cheit  de  parties  dehors. 

Por  l'mpkir  la  plaie. 

Tote  la  plaie  seit  emplie  de  pekes  linges  u  d'estupes  que  seint  mis  en 
albun  d'oef,  e  de  une  plume  seiiit  sur  mis.  E  j>or  la  diverseté  de  la  partie  del 
chef  cotntement  seît  mis  desure,  E  en  iver  soit  la  plaie  dous  fei;;  remuée  e  en 
este  troiz  foiz,  char  en  esté  naisî  plus  tost  puanure  en  la  plaie  que  en  iver. 


I  *  Il  ta  ut  probablement  suppléer  ici  [que  wii] .  —  2,  at  doit  ôtre  supprimé. 
—  5,  «  Pustulae  »,  —  4,  Sic,  corr.  suiL  —  5 ^Traduction  detcsuHc*  — 
6.  Il  y  a  simplement,  dans  les  textes  imprimés  :  «  pannus  de  lino  vd 
de  serico,  quod  longe  est  melius.  » 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  9} 

Loex^  le  naffré. 

Si  devez  loer  al  naffré  que  il  gise  de  celé  part  dunt  se  doit,  que  les 
homurs  (sic)  que  decurrent  a  latei[e]  que  dure  mère  est  apelé  ne  la  blescent. 
E  ceste  cure  deit  home  faire  jesque  al  plener  reparraiilement  del  test. 

Por  morte  cl)ar. 

Si  il  avient  que  devant  le  reparrailement  del  test  auchune  malcveise  (sic) 

chare  mort  surcresse  la  teieque  dure  mère  est  apellé,  l'esponge  delà  mer  mie 

ben  (y*)  lavée,  mes  ben  sechié  metez  desure,  que  par  sa  sause  mangusce  la 

morte  [charj.  E  tant  metez  la  desure  que  tote  la  maufaisse  '  char  seit  amortie. 

Por  morte  char. 

Après,  si  aveint  que  après  le  parraillement  del  test  malvaise  char  surcresse 
le  teste  reparrallié,  si  metez  seurement  la  pudre  des  hermodacles.  Si  devetz 
garir  la  plaie  dehors  od  sul  drap  linge  u  od  cotun  queres(?)  u  drap  linge, 
que  est  apelé  charpie . 

Cette  traduction  est  beaucoup  plus  complète  que  la  précé- 
dente, mais  elle  présente  une  interversion  singulière,  qui  peut 
être  attribuée  au  copiste,  mais  qui  peut  aussi  avoir  été  causée 
par  le  texte  latin  que  le  traducteur  avait  sous  les  yeux.  Au  fol. 
251  v°  nous  trouvons  le  prologue  du  second  livre  («  Nul  ne  me 
doit  blâmer  de  parole  lunge  quant  mutes  paroles  brevement 
dites  plus  tornent  a  nunsaver  que  a  profit....  *  »)  Puis  vient  le 
premier  chapitre  du  second  livre.  Mais  le  deuxième  cha- 
pitre est  bizarrement  mêlé  au  ch.  xxui  du  premier  livre. 

(Fol.  252  z/o)  De  plaie  en  le  atherel.  Si  la  plaie  vient  al  haterel  d*espéé  u  de 
auchune  tele  arme  semblable,  que  la  veine  soit  taillie  que  en  apele  organale, 
issi  la  devez  aidier  :  cosez  tute  la  veine  od  une  aguille,  issi  que  la  veine  ne 
soit  percie,  e  del  autre  part  metez  Taguille  od  un  fîl,  que  le  fil  s'aerde  a  la 
veine,  e  od  cel  fil  bien  la  saceze  strainiez  que  sanc  n'en  issie.  Si  n'emplez  pas 
pas  la  plaie  de  drap;  e  si  ceo  est  en  (Jol.  253)  iver,  si  metez  embroche  sur 
issi  faire.  (Ce qui  suit  appartient  au  ch,  XXlll  du  livre  /.)  E  si  mult  char  i  ad,  liez 
les  paupires  desure,  qu'il  seunt  desure  prient  K  E  s'il  n'i  ad  mult  char,  esrachiez 
les  peilez  e  frotez  les  paupiers  des  devant  dites  foilles,  tant  qu'il  seignent,  et 
alez  avant  en  la  cure  si  eu  m  devant  dit  est.  A  cel  mêmes  pernez  les  jus  de 


1.  Cet  emploi  d'/  pour  v  n'est  pas  sans  exemple  dans  les  manuscrits  fran- 
çais exécutés  en  Angleterre  ;  voir  VHist,  de  Guillaume  le  Maréchal,  p.  cxxxix. 

2.  Ce  qui  précède  est  bien  la  fin  (ch.  xliv)  du  premier  livre. 

3.  « palpebra  vero  ita  semper  lieetur  ut  superius  comprimatur  », 


94  P-    AIEYHR 

chk[v}rtl"oil  et  ks  cimes  dt-l  bui^sum  c  dd  aloîsne  e  medlex  od  jubun  d'ocf 
et  ûd  evc  tosat,  e  faites  cotne  emplastre»  Kt  mctex  dépure  [C//,  .VXH'J.  Si  lï 
oil  Icrnicnt  e  rogisseni  ks  peiU  estre  nature  n'i  soient  pas  [t;sj  paupîers, 
iaJUii?ï  les  veines  qui  su  m  el  frum  e  es  temples 

La  suite  du  chap.  n  du  livre  II  se  retrouve  pluii  loin,  après 
la  traaspositîon  que  je  viens  de  signaler,  au  fol*  264,  Le  troi- 
sième livre  commence,  sans  le  prologue,  au  foL  273  \^;  le 
quatrième  au  tbL  291.  La  version  se  termine  ainsi,  a%'ec  le 
dernier  chapitre  du  livre  IV  (De  spasmo)  : 

(FoL  296  v*^)Ptw  iftjnfpt  kî  air  ut.  A  crdppe  (^iV)qui  aveint  t;n  ïa  pi^te  pu  et 
um  saner  eu  ctrste  maneire.  Umic^  de  çcl  ûîgueiiîcnt  ^ue  si  doit  csire  fait  : 
pcme/  ûîle  tïiuiccîîn  une  unce,  pet  ter  oi  le  (pc  trahi}  utice  une  e  demi,  d'oile 

decomun  e  de  bure  de  maî,  uelemeivt,  dragmes  .liij (/t>/.  197).  kesi 

oiiigneTneni  vault  niult  e[u]  checuue  gute  crampe  qui  vient  de  repkciou. 

Mais  nous  trouvons  ensuite  deux  petits  paragraphes  fort  cor* 

rompus  qui  manquent  dans  les  textes  latins  iniprimés(foL  298): 

Pui  la  tmladtf  que  al  aptif^maimn  mmiumn  \ 

Ceice  maiadîe  maltim  mortuum  est  a  pelé  comiiiunement,  si  il  vknt  de 
malancolie»  e  n,iist  iis  dereîneî*  parties  del  cors  ;  dunt  ce  ssunt  les  s'gnes  :  î) 
a  lec  cruste  e  dure  e  santé  moiMure  e  od  grature,  e  cco  doit  estre  la  curt:  : 
q^s]  purgicr{?)  la  ma  lire  quinze  jurs  d'oximel^  e  %\\  porgit;/  puis  od  beneilc 
medîu  od  yeralogûdion  *  a^sie  de  dkbrentire  c  le  tetr^  jor  AftH  estuiet  le^ 
janîbcs  od  herbes  boiîUes  en  vin  fort;  e  puis  oigne^c  le  maJade  dt  ncir  oigne- 
nient  e  de  oigne  ment  qui  soit  a  sause  rtegme  »  tnedlé  en&etnble  e  aguisscï  de 
kbre  (?)  e  par  sis  jors  checum  jor  dous  Ibîï. 

Del  Uma^un 

PemaE  limajun,  tnbîeis  en  fort  vin  u  quisez  en  bscîvc,  et  pemeï  la  grcsâe 
qui  soit  noce  e  oignez  les  jambes;  pemcz  le  test  de  grand  nois  e  metez  en 
pudre  od  fulugine  e  od  crotc  de  clicifre  *  e  destemprez  od  saim  dois  î  ;  pemez 


I .  Mûlum  itmrtuum  est  interprété  par  les  Bénédictins ,  continuateurs  de 
Du  Can^\  de  la  fa(;on  suivante:  «  Morbî  genus  peduni  et  tibiaruni;  galL 
mauxmfyfx  »»  ce  qui  est  bien  vague.  En  réalité  c*est  la  gangrène;  cf,  ce  pas- 
sage de  la  Mattierf  de  iati^^age  (p,  401  de  mon  édition)  :  «  Ore  regarder 
«  comment  ma  jambe  en  est  tout  enflée.  J'en  ai  grant  cremeur  quMJ  devendra 
«  un  niormal,  Ciir  il  puyt  vilaynement  qtie  un  fumers  potirrii;  tout  plain  de 
(f  fîefts,  caroingc  et  nocrde  et  de  tous  autres  ordures  et  choses  puans  n. 
Cf.GodciVoy  et  le  gloss.  de  b  Chirmg'w  de  Mondeville,  mortmaL, 

1  *  Con  f  ection  in  ventée  par  Logadi  us  (  Do  r\*a  ul  î,  L' J  n  Hêoktm  Nk^s^  P-  3  S  )• 

l^  Voir  le  glo$s.  de  Mondevillc,  flëugme  sausse, 

4,  Pour  tfjnre;  cf*  p,  9?,  note  k 

$.  Sk^  }>0iur  dmts. 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  95 

la  terce  suriz  e  le  sel  bruilH  e  destemprez  odle  jus  de  (yo)  la  parele,epuis  tri- 
blant  e  en  pestelant  mêliez  od  mel  oint  de  porc,  e  faites  enplastre  e  esjliaufez 
sur  une  teule  al  fu,  emetez  sur  le  mal  al  plus  chaut  que  li  malade  le  poce 
suffrir. 

Le  reste  de  la  page  est  blanc.  Au  fol.  suivant  commence  le 
texte  latin  de  la  chirurgie  de  Roger  :  Post  mundi  fahricam,  La 
copie  s'arrête  au  ch.  xviii  du  1.  IIL 

11.  Traité  de  la  confession.  —  Ce  traité  est-il  traduit  du 
latin  ou  a-t-il  été  composé  originairement  en  français,  je  ne 
saurais  le  dire  :  toujours  est-il  que  j'en  connais  deux  copies, 
comme  celle-ci  exécutées  en  Angleterre  :  Oxford,  S.  John's 
Coll.  75  fol.  86  r.  Paris,  Bibl.  nat.fr.  19325,  fol.  82  v*>. 

Il  n'est  guère  douteux  qu'il  en  existe  beaucoup  d'autres. 

(Fo/.  323)  Qui  vodra  bel  e  beaus  vestu  apparer  devant  la  face  Jhesu,  il 
covent  qu'il  ait  une  robe  qui  a  non  confession.  Q.ui  bien  ceste  robe  use,  ja 
n'avéra  garde  del  félon.  Au  comencement  deit  Ten  prendre  garde  qu'ele  seit 
bien  taillée,  que  ren  n'eie  que  reprendre  Ore  dune  issi  devom  comencer. 
Quanque  remort  la  concience  devom  regeïr  umblement  purement  e  leaument. 
Umblement  par  doçur  de  quor,  purement  par  confession  de  bûche,  leaument 
par  satisfaction  de  overaine... 

L'ordre  suivi  pour  l'examen  de  conscience  est  le  suivant  :  les 
dix  commandements,  puis  les  sept  péchés  capitaux.  Suivent  des 
préceptes  sur  la  manière  de  se  confesser.  Ce  traité,  qui  occupe 
six  feuillets,  est  incomplet  de  la  fin.  En  voici  les  dernières  lignes  : 

{Fol.  328  z«)  Issi  est  li  pecheor  mut  joyus  ç  hetié  c  loe  son  creator  nuit  e 
jor.  Ici  pert  il  tote  icele  malveise  savur  qu'il  avant  aveit  del  ord  délit  de  son 
pecché  ;  si  entre  en  grant  duçor  que  vient  de  la  miséricorde  e  de  la  grâce  Deu, 
dunt  dit  li  prophète  :  «  Guster  e  veez  com  suef  e  duz  est  li  Sire.  Cil  est 
benuré  qui  met  sa  espérance  en  li'  ».  Pur  ceo  vus,  qu'estes  de  pecché  seinz 
devenuz,  dutet  Deu,  quar  il  n'averont  ja  defaute  de  bien  que  '  li  aiment  et 

dutent  :  ceo  sunt  le  deus  gardeins  que  Deu  ad  mis  pur  garder  ses 

{Le  reste  manque). 

O  2.5.   TRAITÉ   DE  GÉOMANCIE.    —   TRAITÉS  MÉDICAUX. 

Ce  recueil  d'ouvrages  variés  est  écrit  tout  entier  en  cursive 
anglaise  du  xiv«  siècle.  Au  fol.  42  v°  il  y  a  une   table  des 

I .  Ps.  XXXIII,  8. 


^6  p.    MEYER 

éclipses  de  1330  à  1386.  Le  manuscrit  a  sûrement  été  écrit 
entre  ces  deux  dates.  Je  n'oserais  Tattribuer  à  Tannée  1330  : 
récriture  ne  me  paraît  pas  si  ancienne. 

Je  n'énumérerai  par  les  divers  traités  latins,  concernant  le 
corn  put,  Tastronomie,  la  théologie,  que  renferme  ce  volume  : 
on  en  trouvera  rindication  détaillée  dans  le  troisii^me  tome 
du  catalogue  de  i\L  James.  Je  m'en  tiendrai  aux  écrits  fran- 
çais* Je  suis,  dans  les  citations,  l'ancienne  pagination,  qui  e^t 
par  pages,  non  par  feuillets. 

1.  Traité  de  géomancie.  —  Ce  traité,  intitulé  w  L*arc  de  cal- 

culacione  >>  est  très  probablement  traduit  du  latin.  Il  y  a 
quelques  années,  en  taisant  connaître  un  poème  provençal, 
jusque  là  inconnu,  relatif  à  la  géomancie,  je  signalai  un  assers 
grand  nombre  d'ouvrages  relatifs  à  cet  art  \  De  ces  ouvrages, 
plusieurs,  à  la  vérité,  ne  m'étaient  connus  que  par  d'anciens 
catalogues.  Depuis  la  publication  du  mémoire  précité,  j*ai  eu 
occasion  de  prendre  note  de  quelques  traites  de  géomande, 
en  latm  et  en  français  %  mais  je  n'ai  rencontré  ni  un  second 
exemplaire  ni  Toriginal  de  Topuscule  dont  je  vais  transcrire  le 
début,  n  ne  faut  pas  désespérer.  L'étude  des  divers  arts  de 
divination  n*a  rien  de  bien  attrayant  et  Ton  ne  s'étonne  pas 
que  le  sujet  ait  été  jusqu'ici  peu  exploré, 

fart  df  cakulmione. 

(P.  65)  Cçs!  an  esi  ippelc  iiijof  fabrica  \  et  en  autre  manere  la  file  4c 
jsironomic  *,  et  en  autre  mantre  science  de  garvel  *,  solom  ceo  que  jco 
vous  dirniy-  Pour  ce  que  le  graiiu  mestres  que  cest  arl  fierunt,  de  la  pro- 
funde  astronomie  irahierunt  quant  que  volcynt  cstrc  certcfié  des  choses  que 
fuit  *,  dount  que  jettereyns'  lur  questions  en  ncUe  gravel,  solom  cco  que 
jeo  vous  dirray  après.  Ore  vous  voyi  nionstre[r]  brevemcat  comcni  vous  devet 


1 .  Rmnaniat  XXVl»  24e  et  suiv. 

2.  Ibid.,  478. 

3.  Plutôt  fabrke.  Cette  dénomination  doit  venir  des  quatre  figures  for* 
mies  avec  les  lignes  de  points  jetés  au  hasard  ;  voy.  le  début  du  traité 
d*Hugo  Satiïiensis,   Rmnania,  XXVI,  248  et  la  note  de  la  p,  267. 

4*  La  géomancie  est  toujours  cousidi^rée  comme  Tondée  sur  Tastronomie. 
Voir  le  poème  provençal,  v.  7,8  {Rûm.^W\%  366). 
S,  CiQXt.  gravii. 
6*  Corr.  iunl. 
7.  Corr.  Donquu  jttttrmt  } 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE    CAMBRIDGE  97 

deinaunder.  A  comencemeni  vous  devct  prier  Dcu  tousi  pusani  que  il  vous 
certefie  de  choses  que  vous  voylés  saver,  que  la  temps  seyt  clerc  ei  que  la 
lune  seyi  en  bone  signe  de  firmament,  et  noun  pace*  de  malveyns*,  et 
nomyment  ou  Scorpion,  kar  cest  signe  est  figure  o  signe  de  faustè.  et  que 
vous  dcmaundet  choses  avenauns  que  sunt  a  demaunder  et  dount  vo*.  s  est 
en  doute,  et  le  queor  est  anginee  '  ;  et  si  avérés  vostre  pourpos.  Pus  pernez 
nette  sablun  et  perpiierez  ♦  syr  un  table  playne,  et  J  pernez  p;irchemyn  et 
enke  et  jeitez  4  ordnres*  dez  poyntz  par  lui,  cum  si  vous  verrez,  et  ser- 
runt  16  linez  e...  et  que  checun  de  4  ordnres  content  4  linez;  pus  joynés 
ij  poyntz  tut  joynez  o  un  chif  de  le  Unes,  quar,  si  seyt  par  7 ,  vous  lierez 
ij  poyntz  d-  sieute,  et  si  noun  par  un  poynie,  e  si  avérez  4  figures  que  sunt 
appeleez  mcre,  cum  vous  veyez  issi. 

Suivent  des  figures  que  je  ne  juge  pas  utile  de  reproduire. 
L'ouvrage  se  termine  ainsi,  p.  80  : 

En  questione  de  amur  ou  de  héritage  est  mené.  Celi  que  est  en  prisone  tost 
issera,  malades  serra  tost  garra.  L*an  serra  secche,  vent  sena  grant  et  defautc 
de  fruit  et  de  semence.  Nequedent  que  avéra  plus  de  un  fruyte  que  de  un 
aultre,  d*estature  de  cors  que  il  sera  longe.  Le  col  e[r]t  blaunche,  grosse  teste, 
larges  espaulez  rounde  face,  petit 

(Le  reste  de  la  page  est  blanc.) 

2.  Recettes  médicales  en  vers.  —  Ce  recueil  se  compose  d*en- 
viron  vingt-quatre  recettes.  Le  versificateur  était  Anglais  et 
savait  mal  le  français.  Il  emploie  oier,  à  Tinfinitif,  pour  oïr, 
v.  27  ;  il  fait  rimer  atigoile  (anguille)  avec  serfoile  (cerfeuil), 
v.  29.  Le  texte  est  d'ailleurs  fort  corrompu,  et,  en  maint  cas, 
je  serais  incapable  de  le  corriger.  Les  traités  de  ce  genre  ne 
peuvent  être  utilement  étudiés  que  par  des  personnes  ayant 
sur  l'histoire  de  la  thérapeutique  du  moyen  âge  des  connais- 
sances spéciales  qui  me  manquent.  Ces  textes  abondent  en 
termes  botaniques  que  Godefroy  n'a  pas  relevés  ou  qu'il  a 
traduits  avec  la  plus  grande  légèreté.  Il  est  d'autant  plus 
nécessaire  de  les  signaler  à  l'attention  des  personnes  compé- 
tentes. Mon  ambition  ne  va  pas  au  delà. 


1.  Pour^.  —  2.  Corr.  en  malveys.  —  3.  Faut-il  corriger  anguissié\'  — 
4.  Précipiterez?  —  5.  Corr.  ou  ?  Les  figures  pouvaient  ôtre  tracées  avec  le  doigt 
sur  du  sable  fin  ou  à  la  plume,  sur  une  feuille  de  parchemin.  —  6.  C.-à-d. 
ordres.    -  7.  Nombre  pair. 

Rtumania,  XXXII  n 


98 


Checun  sage  e  saine  '  (p 
Se  dut  garder  de  maladie 
Atende  voluntiers  a  mei, 

4  E  bone  saunté  li  aseygnerei. 
Les  queus  herbes  e  cspecerie 
Sount  bones  de  norer  '  la  vie 
De  eins  la  cors  e  par  dehors. 

8  Atendez  a  moy,  jeo  dirra  î  lors. 

Contra  [doîorem]  capitis. 

Sy  tun  chef  est  trop  doylaunt, 

Penez  a  tut  meintenaunt 

Puliol  quit  en  eisil 
12  E  metez  Tcmplastre  a  vertil  ; 

Aloyne  e  foi  le  de  lorer 

Metez  auci,  jeo    vous  requerre, 

En  tens  vient  quidé(?) 
i6  Vus  sentcrez  vus  mesmes  amendé; 

Mè[s]  egrcmoine  ne  oble  mie, 

A  la  teste  fest  grant  aye. 


P.    MEYER 
172) 


Contra  doîorem  ocuîorum. 


Si  vos  eus  sunt  grevez, 
20  Cerfolie  meintenant  metez, 
Al  aubun  des  oufs  medclez  bien, 
E  ceo  vus  vaudra  sur  tute  rien. 
E  si  vos  oes  lermunt  trop, 
24  Metez  a  eus  legustrop  ; 
Sentorie  ne  obliez  pas, 
Kar  a  eus  fet  grant  solas. 

Contra  anditum. 

Si  vus  ne  poez  pas  bien  oier 
28  Pernez  la  grece  de  un  sengler, 

Medlct  la  grece  de  gros  angoile  ♦, 

E  ne  oblet  pas  la  serfoile  ; 

Pimpernele  est  mult  fin, 
32  A  surdis  tut  jurs  est  enclin. 


Voici  la  dernière  de  ces  recettes  (p.  174)  : 


Contra  podagtam. 

Si  la  podagre  auci  avct« 
Grece  de  baleyne  medlet 
A  la  herbe  que  ad  noun  herbive, 
Kar  celé  tue  la  gute  vive. 
Grece  de  bausan  e  de  gopil 
Medlet  auci  su  de  cheveril, 


Camamille  e  morele  ; 
Auci  pernet  la  pare  le. 
Chaunfe  (?),sareie  e  enrinencin(?) 
A  cuer  potagre  sunt  enclin. 
Medlet  les  avant  nomez  ensemble, 
A  la  potagre  toudront  la  tremble. 


3.  Des  pronostics  de  la  mort,  — Traité  attribué  à  Hippocrate. 
Le  prologue  nous  apprend  que  ce  livre  aurait  été  trouvé  dans 
le  tombeau  d'Hippocrate.  Je  suppose  que  c'est  la  traduction 
d'un  opuscule  ainsi  intitulé  dans  un  ms.  de  Balliol  Collège  *,  à 


I.  Lire  eu  sa  vif,  pour  rimer  avec  maladie.  —  2.  norer  pour  tiorrir?  mais 
le  sens?  —  5.  Corrompu.  —  4.  Nous  avons  vu  plus  haut  (p.  78),  la  graisse 
d'anguille  cniplovée  pour  la  surdité. 


I.  N"  28)  du  Catalogue  de   Coxe. 


LES   MANUSCRITS    FRANÇAIS   DE    CAMBRIDGE  99 

Oxford  :  Liber  prescientie  Hippocratis  qui  inventus  est  in  sepulchro 
ejus  in  piccide  eburnea.  Autres  copies,  avec  un  titre  différent 
{Sécréta  Ypocratis)  dans  le  ms.  Ashmole  1471,  fol.  184 
(Bodléienne),  et  à  Trinity,  O.  2,21,  fol.  138. 

(P.  196)  Ypocras  le  tresauge  mire,  z  que  sour  tutez  altres  sout  la  nature 
de  humeyne  corps,  z  cum  il  vist  que  il  deust  morer,  comanda  que  Ten 
prist  cest  livre  ou  estoit  escrit  la  nature  de  lut  le  cors  et  secretz,  z  que  Ten  le 
mist  a  son  chif  en  sépulcre  ou  il  gist.  Un  jour  passa  Augustus  César  par 
devant  la  sépulcre,  quida  que  la  gist  grant  tresour,  si  commanda  que  l'en 
Toverist  ;  z  trova  longues  {corr.  Ten  ?)  ceste  livere  a  son  chef,  z  fu  aporté  a 
Temperour.  Li  emperour  comandast  son  mire  que  il  gardast  dedeynz  ;  list  ly 
mire,  si  trova  au  comensement  :  Si  li  malade  ad  dolur  ou  emflure  en  la  face, 
z  s*il  ...  *  soure  son  neez,  a  le  xx  î  tressime  jour  morra... 

Ce  traité,  que  je  n'ai  examiné  que  superficiellement,  n'ayant 
pas  à  portée  les  éléments  de  comparaison  nécessaires,  se  ter- 
mine ainsi  : 

(P.  218)  Pur  enmegrer  ceus  que  sunt  trout  crasse.  Pemezfenoil,  si  bevez  en 
ewe  longement,  z  çoe  fet  les  hommes  z  femmes  enmegrer.  Autre.  Fetz  pain 
de  pure  sigle  ;  si  le  fêtez  lever  par  ix  jours,  z  a  dissinie  jour  fetz  le  quire  al 
forn,  z  quant  vous  trerrez  hors,  depecchez  menucment  en  un  pot  de  pur  vyn 
plein  ;  si  coverez  au  meuz  que  porrez  en  tere  par  ix  jours  ensinez  (?),  z  pus, 
cum  vus  volez  doner  a  acun,  pernez  une  poy  de  nugage  (?)  z  donez  luy  a  bei- 
vere  quant  devra  dormer,  sil  '  devendra  megre  asset,  etc, 

ExpîicU  liber  Ypocratis  philosophi  et  medici  sapientissimi  de  diversis  medicinis 
maxime  corporihus  Immanis  proficientibus . 

4.  Recettes  en  vers.  —  De  la  page  220  à  la  page  246  est  écrit  un 
poème  d'environ  1800  vers,  qui  m'a  paru  n'être  autre  chose 
qu'une  collection  de  recettes  médicales.  Le  même  poème  se 
retrouve  dans  le  ms.  Bodley  761  de  la  Bodléienne  à  Oxford 
(fol.  21-27).  Mais  les  différences  entre  les  deux  textes  sont 
considérables.  D'abord  le  texte  de  la  Bodléienne  ne  contient 
guère  que  780  vers;  puis,  pour  les  parties  qui  existent  dans 
les  deux  manuscrits,  les  variantes  m'ont  paru  nombreuses.  J'ai 
copié  les  32  premiers  vers  et  les  huit  derniers  vers  du  ms.  de 
Trinity.  Mais,  dans  les  extraits  que  je  possède  du  ms.   de  la 


1.  Ms.  sg^  avec  un  signe  d'abréviation  sur  1*5.  —  2.  Corr.  si  ou  cil. 


lOO  P*    MËYER 

Bodléieane,  je  n'ai  retrouvé  que  les  vingt  premiers.  J'en  donne 
les  variantes.  La  leçon  du  ins.  Budley  eu  précédée  de  cette 
rubrique  :  kl  comence  la  mvele  cimrgmt  m  frana-is  par  rime.  Et 
de  même,  à  la  fin,  on  lit  ;  Expîkit  nma  cirurgia  in  galliœ. 
Cependant  il  ne  m'a  pas  paru  que  Touvrage,  simple  recueil  de 
recettes,  ait  trait  à   la  chirurgie. 

(P,  220)  Pur  dolur  de  k  kstt.  Un  oigncment  en devejt  fer*;; 

^         ,  *       I       ,..  De  tut  trds  ensemble  joint 

Quant  le  corps  est  en  Ungur,  ^  ^  ^         '  . 

duant  le  chi[ejt  susprertt  dolur,  ^ 


Pur  vcir  donk  fra  que  sage 

4  Ky  se  garde  de  *:esic  rage. 
La  morele  et  la  chineïié, 

^  gloteniere  que  foi  le  ad  lé, 
Lo  vache  et  aune  en  se  ment 

5  Boillé  seîni  communément 
En  siu  de  moton  ou  en  bure  ; 
Pur  vcir  bone  est  ceste  cure. 
Q^ant  sérum  qui t  [si]  serruni  curt  : 

11  Par  my  un  drup  espés  et  forr 
Te  m  pi  us  et  from  en  oyndnis; 
Pur  vcir  saches  que  garras. 

Atiirf  medaine  hom, 

La  oyle  prendras  de  la  rose, 


Autn  mtdicine  tnbont* 
Kant  la  teste  doiidera 
La  mente  ïavèe  triblera; 
Les  t  en  j  pies  en  oindra[s]  de  le  jus 
24  Duu[s]  ^c\u  ou  trois  od  quatre  ou 
[plus. 

Pur  ver  Un  de  le  çhif. 
En  Éîsike  trovom  escrit 
Qpe  puliol  en  cistl  quit 
Hn  la  fumée  pus  receue 
aii  Par  le  narlls,  quant  ert  issue 
Del  vesseï  ou  fu  quit, 
Pur  vertin  est  bone  élit. 
Pus  celé  puliûl  prendeiî. 


ï6  Car  mut  est  durmeni  boue  chose,    \i  Entour  la  teste  un  piastre  ferest- 
Eisîl  ei  le  jus  de  ère  ; 

Ce  recueil  de  recettes  se  termine  auBÏ,  a  la  page  246  : 


Pur  veruii  remtk'r, 
VcruË$  assises  al  cors  de  home 

Auire  curt. 
Soufre  e  peb  ensemble  boilez 
E  semence  de  eble  bien  trîblcz, 


Tm  ensemble  aûnex, 
Epusk'  V crues  en  oignes, 

Auîft  cure 
La  cgremoyne  seit  bien  batue, 
Pus  lié  sur  le  char  nue; 
Cet  remue  verament 
Le  vcrues  hastivement. 


5  Bodl.  Pertic^  marouil  et  dîeniUe.  La  themlre  (manque  d^ns  Godcfro) j,  du 
hu  caniculata,  est  la  jusquiatne;  voir  P.  Dorvauït,  LAntidolain  Nkûîas^ 
p*  )UV,  —  6  BodL  gkiomrt.  C'est  fa  barda  ne  cotonneuse,  ghtitû^nkr  en 
Normandie  (Joret»  Fîùrt  pop.^  p,  114).  — -  7  BodL  I.  d  camùmiUe.  — 
u  Mieux  EodL  îort,  —  1^20  hoàl.  De  trtUui  mmnbk  àûit  rmini  \  Btitt  k$ 
Umpîfi  ti  kjrutU. 


LES   MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  10 1 

5.  Sur  Us  maladies  des  femmes.  —  Le  reste  du  feuillet  et  une 
grande  partie  du  feuillet  suivant  sont  occupés  par  un  poème 
d'environ  170  vers  sur  les  maladies  des  femmes  qui  paraît  dis- 
tinct de  ce  qui  précède.  En  voici  le  début,  qui  est  fort  corrompu  : 


Si  com  Arisiotele  nous  dit 
En  Alisaundre  en  son  escrit, 
N'est  pas  reison  ne  afaitement 
Qpe  sues  sount  a  tote  gent 
Le[s]  maladies  que  aveinunt 
En  langor  le  cors  teinunt  ' . 
A  homme  icel[es]  n'ont  overe 
Ke  femme  cele,  tant  est  covere 
Ke  envis  unkes  a  nul  home 
Le  voil  mustrer,  çoe  [est]  la  sume. 
Pur  ceo  aprenne  médecine 


E  a  dame  z  a  meschinc 
Par  quei  puse  privement 
Sei  eider  sanz  afient. 

DfS  flotirs  de  femmes. 

Escrit  est  que  par  atele  reson 

Com  vint  al  mal  polucion, 

Tôt  est  (lire  en  ?)  même  la  manere 

Avent  icest  mal  a  la  mulicr. 

Çoe  vint  par  habundance  des  huijiours  ; 

Si  l'apele  feme  cez  flours... 


Ces  derniers  vers  rappellent  évidemment  le  traité  de  Trotula 
dont  nous  avons  rencontré  plus  haut  une  version  rimée. 

6.  Pronostics  tirés  du  mois  de  la  naissance.  —  Ce  court  mor- 
ceau se  termine  par  un  explicit  ainsi  conçu  :  Explicit  distinctio 
humane  originis  jacta  per  menses  et  per  dies.  J'en  ai  signalé  jadis 
(Romania,  XV,  331)  un  autre  texte  dans  le  ms.  Gg  i.i  de  la 
Bibliothèque  de  l'Université  de  Cambridge. 

Issi  poyt  home  veyr  saunz  douiancc     (p.  426) 
Le[s]  proprietez  de  home  par  sa  neysaunce». 

Vous  que  lirrez  lez  chosez  saunz  »,  ne  emmerveylez  mye  cum  il  fussent 
inpossibles,  kar  si  il  ne  seyt  pas  partout  si  cum  il  enseigunt  *,  ceo  est  pur  la 
diverseté  de  conplexion  et  non  pas  pur  la  defaute  de  art. 

Jenver.  Enfant  né  en  le  moyns  5  de  jenver  amiable,  coveytos,  voluntrifs  z 
irrous  z  de  maie  creaunce  serra... 


1.  Il  semble  que  Fauteur  se  réfère  au  Secrettnn  secretorum,  qu'on  attribuait 
à  Aristote.  Je  n'ai  pas  trouvé  le  passage  auquel  il  est  fait  allusion. 

2.  Nous  avons  ici  une  rubrique  en  vers,  selon  un  usage  fréquent  dans  les 
ouvrages  français  composés  en  Angleterre.  Mais  le  second  vers  est  trop  long. 

3.  Céans. 

4.  Mieux,  dans  le  ms.  de  TUniv.,  Vart  enseigne, 

5.  Oumopis.  Il  faut  lire //M>y5. 


102 


P.    MEYHR 


0.2.14*  —  La  passion,  en  VEiis,  —  Le  Roman  des  romans  —  Sikmons 

FRANÇAIS.  "  La  DÈma\CE  DES  ÉGLISES. 

Ms,  en  parchemin^  ayaat  à  peu  près;  le  format  d*un  ancien 
in-4**  (0,220  sur  0,155);  1^9  *^'  I-^  premier  cahier j  écrit  au 
XV*  siècle,  contient  une  copie  incomplète  du  Stcretum  Secreto* 
mm.  Le  reste  paraît  dater  du  commencement,  ou  pour  ne  pas 
trop  préciser»  dt*  la  première  moitié  du  xiu'=  siècle-  L*écritureesc 
celle  qu  on  appelle  en  Angleterre  «  normande  m,  par  opposition 
à  récriture  cursivc  proprement  anglaise  (amrt  hand).  Mais  il  n'y 
a  pas  de  doute  que  Técrivain  était  Anglais.  Les  pages  sont  k 
deux  colonnes  et  à  trente-trois  lignes  par  colonne. 

J*aî  transcrit  cetre  partie  du  manuscrit  presqu'en  entier  en 
1871  et  1S74,  G.  Paris,  qui  se  trouvait  avec  moi  à  Cambridge 
en  1874^  m'a  aidé  dans  cette  tâche.  Mais  je  m*exagérais  peut- 
être  alors  l*imponance  des  copies  que  nous  avons  transcrites*  Il 
suffira  d'en  donner  quelques  brefs  extraits, 

1.  La  Passion.  —  Je  ne  puis  mHmaginer  par  suite  de  quel 
accident  le  copiste  a  écrit  en  tète  Sermotm  Maurihi  pariskmis 
episcopi.  L'ouvrage  par  lequel  commence  le  manuscrit'  est  un 
poème  sur  la  passion  du  Christ  dont  j'aî  énuméré  jadis'  de 
nombreuses  copies,  et  dont  j'ai  publié  en  diverses  occasions 
plusieurs  extraits  d'après  des  manuscrits  différents  K  J'ai 
montré  que  les  %^arianres  étaient  considérables  et  qu'en  beau- 
coup de  manuscrits  un  poème  sur  la"  descente  aux  enfers  était 
joint  au  récit  de  ta  Passion.  Il  n'en  est  pas  de  même  ici.  La 
descente  aux  enfers  et  les  apparitions  de  Jésus  à  ses  disciples, 
jusqu^à  l'Ascension  n'occupent  que  quelques  vers.  Entre  les 
rédactions  que  j'ai  fait  connaître  en  mes  précédentes  notices, 


1 .  Je  ne  tiens  pas  compte  Ju  premier  cahier  qui  n'a  nen  de  commun  avec 
\t  ms.  français  relié  à  b  suite, 

2,  Hommiit,  XVI,  47. 

\,  Rottmma.  XVl,  4g  (ms.  de  T Arsenal  jioi);  ihd.  227  (ms<  de  Grenoble); 
ikûl.  344  (Musée brit.  Add.  15606); XXV,  551  (Ms.  du  FitiwiUiam  Muscum, 
à  Cambridge)* 


LES   MANXSOUTS   FRANÇAIS   DE  C\MBRIDGE  IO3 

celle  qui  se  rapproche  le  plus  de  la  nôtre  est  celle  de  TArsenal 
{Ramania^  X\î,  48).  C'est,  à  mon  avis,  la  réJaciion  primitî\*e. 
Je  me  borne  i  transcrire  ici  les  premiers  vers,  sans  donner  de 
variantes,  ni  proposer  de  correaions.  On  trouvera  facilement 
le  moyen  de  remédier  aux  incorrections  du  texte  en  se  reportant 
aux  extraits  publiés  d'après  d'autres  manuscrits. 

Sfrmotus  Mattritii  ftarisùnsis  efnsct^i  (f.  i  %), 


Or  escutez  mult  ducement. 
Gardez  qu'il  n*ait  parlement. 
La  passion  Deu  entendez, 
4  Cument  il  fu  pur  nus  pencz. 
Ne  la  poet  oîr  créature 
Qp^il  n*ait  piti^,  ja  tant  n'iert  dure 
Pur  ceo  qu'il  ait  puint  d*entende- 
[ment 
8  Al  rei  del  ciel  omnipotent. 
La  lettrure  vus  oîstes 
Que  recunterent  les  ewangelistes, 
Meis  ne  seûstes  que  amunta. 

12  Si  bien  eu  m  ci  orrez  ja. 
La  Teste  as  Juels  aprismout, 
Ceo  dit  li  livres  mot  a  mot, 
Ke  Pasche  esteit  appelez, 

16  Sor  tote  rien  esteit  gardez. 
Meis  H  prince  de  celé  lei 
Ki  nen  ourent  cure  de  bon  rei, 
E  li  proveire  e  li  meistre 

20  Quereient  a  destre  e  a  seneStrc 
Cument  Jesum  pcûssent  prendre 
E  par  boisdie  en  la  croiz  pendre. 
Chés  Caîphas  sont  assemblé, 

24  Evesques  fu  de  la  cité. 
Iluec  unt  lor  conseil  tenu  ; 
La  parole  fu  de  Jhesu 
Cum  faitement  le  traieraient, 

28  Sanz  la  gent  qu'il  mult  doteient  ; 
Ê  dient  tôt  privéement  : 
«  Laissom  aler  tote  la  gent 
a  Qpi  sunt  venu  a  ceste  feste, 
32  «  Que  trop  grant  nbise  n*i  sait 
[Ictc  ». 


Siz  jors  ains  que  Pasche  fu 
En  Bethanie  esteit  Jehesu« 
La  ou  par  grant  pieté  plura 

^6  Quant  Lazarum  resu5cita« 
En  Tostel  Simun  Ieprus« 
Iceo  sachez  nVst  pas  suis  : 
Des  disciples  i  out  asez  ; 

40  Judas  n*i  fu  pas  ubliez. 


1512 


Si  cum  li  treis  jurz  sont  venuz 
(f.  a4« 

Quant  Deu  plout,  s*cn  est  issuz  ; 

Mes  pur  nient  se  pcnerent  issi. 

Kar,  quant  Deu  volcit,  s*en  issi. 

Issuz  s'en  est  si  cum  il  voleit  : 
15 16  En  enfcrn  alat  tôt  drcit. 

De  enfcrn  brisa  les  sercOrc[s] 

E  rumpi  tuies  les  closturcs  ; 

Fors  en  gctta  la  compaignic 
1 5  20  Que  dcl  diable  esteit  ravie. 

Il  la  conduist  a  son  chier  pierc(0 

En  sa  gloire  la  ou  il  ère. 

A  ses  apostres  s'aparut; 
1524  Quarante  jorz  iluecques  fut. 

Mustra  lur  la  novelc  lei, 

Puis. les  beissa  chascun  par  sei. 

Issi  nus  puisset  il  salver 
1528  E  noz  aimes  de  peines  délivrer 

Cum  il   pur  nus  suffri  la  mort 

E  fist  a  nus  grant  confort. 

Amen. 


104  P-    MEYER 

2.  Le  Roman  des  rotnans.  —  Je  me  proposais  d'étudier  ce 
beau  poème  à  propos  du  ms.  de  Trinity.  L'étendue  déjà  consi- 
dérable du  présent  mémoire  m'oblige  de  remettre  à  plus  tard 
cette  étude.  Je  me  bornerai  à  en  énumérer  les  copies.  Nous 
possédons,  du  Roman  des  romans,  outre  le  ms.de  Trinity,  quatre 
manuscrits  dont  l'un  est  un  simple  fragment. 

Londres,  Musée  brit.,  Old.  royal  20.  B.  xiv,  fol.  96. 

Oxford,  Bodléienne,  fonds  Douce,  210,  fol.  33  ». 

Paris,  Bibl.  nat.  fr.  19523,  fol.  145  '. 
—  —  25407,  fol.  139. 

Voici  les  premiers  et  les  derniers  quatrains,  qui  sont,  dans  le 
ms.  de  Trinity,  au  nombre  de  257: 

1  Ici  comencc  H  Romanz  des  romanz;    (f.  24  c) 
Mult  deit  boens  estre,  kar  li  nons  est  granz, 

E  profitables  e  forment  delitanz 
E  as  oreilles  c  as  quers  des  oianz. 

2  Jeo  nel  comcnce  par  nule  presumpcie, 
Ne  pur  fiance  de  ma  bone  clergie, 
Car  petit  sai  e  sui  de  foie  vie, 

E  li  men  sens  a  ceo  ne  suflfit  mie. 

3  Mes  jeo  sai  ben  ke  nel  puis  unques  doter, 
Ke  cil  |ki]  fist  les  langages  muer 

E  fist  Tasncsse  a  Balaam  parler 
Poet  foie  lange  a  ben  dire  a  tu  mer. 

4  Sainz  Esperiz  sa  grâce  mi  enveit 

Ki  mon  dur  quer  a  bien  dire  apareit, 
E  teles  paroles  pronuncier  mi  ottreit 
Ke  li  romanz  de  son  non  digne  seit  ! 

Fin  (fol.  32).  Les  cinq  derniers  quatrains  sont  d'une  écriture 
plus  fine  que  ce  qui  précède,  mais,  sinon  de  la  même  main,  du 
moins  à  peu  près  du  même  temps.  Ils  manquent  dans  les  autres 
copies. 

2)1  Judas  vendi  Jhesu  Crist  vairement. 
Repenti  sai,  mes  nel  fist  sagement  ; 
Par  rcpentance  renJi  il  cel  argent. 
Mes  desespeir  lui  loli  sauvement. 

1.  Fragment,  consistant  en  17  quatrains,  dont  j*ai  donné  le  texte  entier 
dans  le  Bulletin  de  la  Société  Ja  anciens  textes ^  1880,  p.  69-71. 

2.  Les  trois  premiers  quatrains  et  les  deux  derniers  sont  rapportés  dans  la 
préface  (p.  vi-vii)  du  Besanlde  Dieu,  édité  par  E.  Martin  (Halle,  1869). 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  I05 

252  Car  c'il  eùst  a  Dieu  merci  crié, 
Od  bone  fei  e  od  simplicilé, 
Deus  est  si  plains  de  grani  pieté 
Q.ue  il  lui  eûst  sun  pecchié  pardoné. 

253  Ore  le  prium  dune  ententivement, 
Qui  descendi  pur  nostre  salvement 

Et  de  la  Virginc  volt  nestre  charnclment, 
«        Si  peut  il  ben  cume  rais  omnipotent. 

254  Qpant  il  nasqui,  une  estaille  aparut 
Desuz  la  berche,  la  u  li  emfes  jut. 

Es  vus  li  angeles  as  pasturs  descendu       (f.  32  t) 
Qui  lur  nuncia  la  joie  que  la  fu. 

255  Icele  joie  tut  le  munde  repleni; 
Si  serrums  nus  par  la  grâce  de  li, 
Si  verraiment  cum  il  descendi 
fur  pécheurs  salver  par  sa  merci. 

256  De  noz  péchez  nus  face  vair  pardun. 
Devant  la  mort  vaire  confession. 
Issi  finist  le  rumanz  al  bon  nun, 
Mais  de  ma  part  le  cries  *  d*une  oraisun 

257  Feit'  en  rumanz  e  en  altretel  guise, 

Car  cil  frautKS  home  pur  qui  joe  ra[i]  mise 
Chevaler  est  e  aime  sainte  Eglise. 
Deus  li  otreit  finir  en  son  servise  I 

Suivent  ces  deux  vers  : 

Si  plus  i  a,  joe  n'en  puis  niés, 
A  çeste  parole  je  me  tés. 

3.  Le  Bestiaire  de  Guillaume  le  Normand.  —  J'ai  énu- 
méré  19  copies  de  ce  poème  dans  mes  Notices  sur  quelques 
manuscrits  français  de  la  Bibliothèque  Phillipps  (Notices  et  extraits  y 
XXXrV,  première  partie,  p.  235).  Mais  cette  liste  n'est  pas 
complète.  J'avais  négligé  de  mentionner  le  ms.  Arsenal  2691 


I.  Pour  creis;  le  sens  est  :  «  Le  roman....  finit  ici,  mais,  jeTaccrois  d'une 
oraison  ».  Le  poème  s'arrêtait  donc  au  quatrain  152,  et  l'oraison  ajoutée  est 
probablement  Toeuvre  d'un  simple  scribe. 


I06  p.   ME  VER 

(fol.  62),  qui  n'est  que  du  xv*  siècle,  et  le  ms.  de  Trinity,  dont 

je  possédais  depuis  bien  des  années  la  description  *. 


En  toutes  overaîgnes  en  deit 

Estrc  loei,  qui  que  il  seît. 

Lïwe  de  bone  corne iiçâtlk 

Ki  avra  boue  delînaiîie 

E  bon  dit  c  bone  matîre 

Veit  GuUbmes  en  rotnanz  cscrîre 

De  bon  latin  ou  il  îe  trove.... 


(f-    12) 


4,  Sermon  en  prose.  —  Ce  sermon,  peut-être  traduit  du  latin, 
se  trou ve  encore  dans  les  niss.  Douce  282,  foL  i  (Bodléienne), 
et  B,  N.  fr.  19525,  foL  I53<  U  paraît  se  diviser  en  plusieurs 
parties  dont  la  première  est  la  plus  longue. 

(Fol.  68)  Danavît  iUi  nomm  quotl  tst  super  mtme  nomm  [Philifp.  ÎI,  29]- . 
Scint  Pol  li  apostles  pirole  de  Nostre  Satvur  e  dit  que  »  Deu  père  celestre^ 
dunat  a  lui  un  nun  ki  est  sur  tuï  altres  nuns.  Seint  Jcronime  dit  que  ceo  est 
icesi  nur>  Jhesu*  En  la  révérence  de  cest  tiun.  ceo  dit  li  apostres,  si  flcchîst  e 
plie  chescun  genoil  de  celestiens,  de  terrestriens  e  des  enfernals,  li  un  volen^ 
tiers,  eu  m  me  (lU  e  dtiers  amis,  li  ahre  envius,  cum  serf  u  felun  entrepris  ;  ceo 
est  a  dire  en  la  révérence  de  cest  nun  sunt  !e5  mainies  de  la  mansiun  de  trois 
csiâges  j  Deu  cncïinez.  Li  rois  céleste  ad  un   mansiun  de  trois  estages  :  Uj 
suverçin  est  li  ciels,  ki  est  soliers.estelé  e  chambre  u  clarté  est  e  joie  panna- 
nable;  la  m:i5ne  est  cest  siècle  k'v  est  cume  sale  u  ad  travail  e  luitc  e  jur  e 
nuit  entrechanjat^Ie.  L*es!age  plus  bas  est  enfer,  kî  est  gaole  e  chartre  u  peines 
sunt  e  puurs  e  oscurté  esta  Me,,* 

(Fol.  85  rf)  DixU  Dmmnus  ad  Jeutm  fiVmm  Navt  mhmtrum  Moysi^  [JosuH 
I,  i]*,  Deu  dist  a  Jhesu  li  fila  Nave,  quicrt  ministre  Moyse  :  Moyses,  raun  scr- 
gant  est  dévié.  Ore  tcî  esdrecc  c  passe  cest  flum  Jordan,  tu  e  cist  poeple,  en 
la  terre  que  jeo  vus  dîrnii.,. 

(Fol.  90)  MUil  Deus  exphratort.s  in  ahscmtdih  et  dtxit  ei$  [JosUE,  II,  l],.. 
Aléz  sercherla  terre  t  le  bureh  de  Jéricho.  Ildunt  alerente  entrèrent  de  nuit.. 


1.  Ajoutons  que  le  ms.  mentionné  comme  étant  à  Berlin  (coiiectîon 
H  am  il  ton)  est  le  m  s,  du  Fitjtwiiliam  Muséum  (Cambridge)  que  j'ai  décrit  id 
même  (KXV,  SSj)-  —  Le  ms.  Birrois  1 1  est  le  no  518  de  la  vente  de  1901, 
Je  ne  sais  oii  il  est  aaucllement. 

2  Les  deux  premiers  vers  manquent  :  L'initiale  seule  a  été  faite  :  Q^ki 
tmt  çofturuibkn  defim  \  Ont  wrtià  îfut  H  pn^]. 

j.  Ms.  qu0. 

4,  Ce  texte  et  le  suivant  ne  sont  pas  dtés  exactiementi 


LES   MANUSCRITS    FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  I07 

(Fol.  97)  Cum  autem  esset  Jhesus  in  agro  urbis  Jeridjo  {JosuE^  v,  13].  Ceo 
nus  cunte  reîtorie  de  la  lei... 

(Fol.  ICI  c)  Tulit  autem  unus  ex  filiis  Israël  aliquid  de  anathemate  [JosuE, 
VII,  i].  Ceo  dit  Testorie  que  uns  home  de  la  maign[i]e  Israël 

5.  Sermon  sur  la  dédicace  des  églises.  —  Ce  sermon,  qui 
n'a  pas  de  rapport  avec  le  chap.  CLxxxii  {De  dedicatione  eccksie) 
de  Jacques  de  Varazze,  offre  cette  particularité  qu'il  commence 
par  un  prologue  en  vers.  Il  est  incomplet  de  la  fin  et  je  n'en 
connais  pas  d'autre  copie.  Voici  ce  qui  en  reste  dans  le  ms.  de 
Trinity. 

Ki  volt  oïr  e  volt  aprendre  (f.  109^)  16  A  qui  Deus  dona  la  sue  amur 
E  de  curage  ben  entendre  En  («)rr  Est)  cest  traité  fors  excepté; 

Le  sacrement  de  seint  Eglise,  E  sul  par  lui  sui  ordené, 

4  Cum  Tescripture  le  devise,  K*il  s'en  délite  el  oïr 

Ceo  est  des  mustiers  dediement,  20  E  preu  i  ait  del  retenir, 
Issi  le  diîrt  Tem  vulgarement,  E  tut  li  altre  ensement 

Ces  dous  mcz,  «  sacrer  e  dedîer  »         De  ceo  reteg[n]ent  esperement 

8  En  cest  lui  servent  d'un  mestier.         De  bien  oïr  e  de  bien  faire 

Dunée  est  la  poesté  24  £  lur  ben  fait  a  bon  chef  traire. 
Sul  as  eveskes,  de  par  Dé,  Le  rimer  dès  ore  larrum. 

Les  églises  [de]  dedîer,  Kar  pleinement  parler  voldrum 

12  A  els  apent  icest  mestier  Pur  bien  espundre  la  escripture 

E  nient  a  altre;  c'est  Tasise  28  E  bien  mustrer  la  sanz  cuverture. 
De  li  qui  fundat  seinte  Eglise.  Ore  dune  entende  qui  voldra, 

Par  un  prodom  de  grant  valur  Del  bien  entendre  pru  avérât. 

Pur  ce  que  del  dediement  des  églises  avons  entrepris  a  parler,  premerement 
fait  a  oïr  que  sune  (c)  cest  mot  église. 

Eglise  sune  tant  cum  convocaliOy  l'asemble  de  cels  qui  sunt  el  règne  Deu,  e 
en  cço  est  la  différence  entre  Sinagoge  et  seinte  Yglise,  ke  sinagogedit  tant 
cunie  congregatio,  asemble.  Assembler  poet  l'om  ensemble  rainables  créatures 
e  nun  reidnables  créatures.  Issi  furent  en  la  sinagoge  gent  que  reisun  enten- 
dirent. Li  patriarche  e  li  prophète  ki  entendirent  par  les  escriptures  le  adve- 
nement  Jhesu  Crist  (et  la  salvatiun  Jhesu  Christ  *)  et  la  salvatiun  del  munt, 
et  asez  i  out  de  tels  qui  ren  de  ceo  ne  sourent,mès  quiderent  entre  salve  par  le 
sacreBze  de  la  lei.  Ceste  église  espiritelei  {sic)  est  sacrée  del  saint  Espirit  et 
dédié  a  Deu  par  la  sue  grâce  e  par  sun  sanc,  del  quel  dediement  est  figuré 
et  mustrancée  la  materiale,  e  veûm  cument.  Li  evesques,  quant  il  deit  dédier 
église  materiale,  primers  beneist  l'ewe  que  defors  estât,  dunt  il  deit  l'église 
aruser,  e  siel  giet  en  cel  ewe  cum  en  altre  ewe  beneite.  Après  avirunent  le 

I.  Les  mots  que  j'ai  mis  entre  (  )  doivent  être  supprimés. 


T08  ?,    METER 

église  trcis  fci^  dehors  e  gcttet  adès  Têwe  bsnuite  sur  les  mesieres  e  sur  c 
popîe,  t  II  clerc  et  lî  poeple  le  siwem.  H  curn  il  fait  celés  triiSs  processîuns, 
SI  deivent  ardeîr  par  di^derx  duc^i  (d)  ctfges  u  du?!e  chaudeiles^  e  a  chescun 
turn  kc  ilevesques  fdl»  si  vend  rat  al  ntaistre  us  de  l'église  c  hurterat  al  bus 
del  église  de  sa  croce  e  dirrat  :  éiUdîiU  portas  principes  vestrm^  ik  introibii 
r<?A  gkrif  [Ps.  xxiii»  9].  Et  H  dîakenes  qui  dedetu  ert  enclos  lui  respundrat  : 
Quh  eît  îste  nx  giorie  ?  E  li  evesques  rcspundrat  ■  Ihfninm  virtutum^  ipse 
est  rixgloriê}  [Ps,  XXiiI,  ïo]  A  la  tierce  fie  overat  li  diakeiie  Tus,  clie\^esques 
entrera!,  e  li  clerc  e  li  fai  après  lui.  î^  dirrat  li  evesquc,  quant  ilenirerat  :  Paz 
hik  âpmui.  H  cum  il  ert  cntrej:,  si  se  mettrai  en  ordsons  od  les  ciers,  e  prierai 
pur  la  satïsfactiun  de  ia  maisun  ki  est  a  dédier.  Après  leverat  et  amottes- 
tera  les  atres  a  orer,  sans  dire  Dommus  vohiscum.  Quant  ceo  ertfet,  si  escri- 
vera  del  pié  de  sa  croce  un  a  fr  ^  e!  sablun  qui  ert  gettc  en  seinte  église  ;  si 
cumencera  j  la  senestre  angle  devers  Orient  ;  si  escriverat  dcsque  al  destre 
angle  devers  Occident  ;  e  derechef  de  h  destre  angle  devers  Orient  desque 
al  angle  seneâirc  devers  Occident  Après  ceo  irrat  devant  le  hait  ahel  c  dirra: 
Dius  in  afijutûrium  meaitt,  où  Gloria  Patrie  %ûnt  alMuîa.  E  puis  frat  un  c^^^e 
beneii  e  si  metra  eiiz  fieL*. 

(Lt  rtsti  manqutj) 

0^    2-45^    —  CH.\RMEfï,   POfi-SïES   m  VERSES,  PROVEUBES,    CtC. 

Manuscrit  ayant  le  format  d'un  în-8^  allongé  (o,22t>  sur 
0,035)  ^<^i"ïï  d'une  belle  écriture  normande  en  Angleterre  vers 
le  milieu  du  xni*'  siècle".  Il  appartint  jadis,  et  fut  peut-être 
même  écrit,  à  Tabbaye  de  Cerne,  en  Dorset,  Cest  un  recueil 
d'opuscules  variés,  en  latin  et  en  français,  où  Thistoire  litté- 
raire peut  puiser  d'utiles  éléments.  Malheureusement  le  manu* 
scritj  tel  que  le  possède  la  Bibliothèque  de  Trinity,  n'est 
plus  complet.  Une  cinquantaine  de  feuillets  en  ont  été  détachés 
il  y  a  un  peu  plus  de  soixante  ans,  et  ont  été  vendus  au 
Musée  britannique  où  ils  forment  Tarticle  coté  Egerton  843  '. 
Ce  fragment  renferme  divers  écrits  relatifs  aux  sciences  mathé- 


t.  Voir  cependant  d-dessous,  p.  109,  note  li 

a»  Le  Musée  ;icqtiit  ces  feuillets  le  il  lAOdi  iS;40  du  librjiire  Rodd,  en 
m^me  temps  que  quelques  4Utrei  manuscrits  ou  fr^gmerus,  de  même  pro- 
venance. Tous  ces  livres  p^îrient»  îx  la  première  page^  U  signature  d'iin  èrudii 
bien  connu  parles  travaui^  sur  b  Uucr^ture  anglaise,  Jâme5  C)rcU;ird  Hatlt- 
wcll  (t  1889).  Celui-d  fui  accusé  da  vol;   ïes  apparences  étaient  contrit  loi. 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  IO9 

matiques  et  notamment  le  traité  de  la  sphère  de  Johannes  de 
Sacrobosco.  Il  ne  s'y  trouve  aucun  écrit  français'.  Tout  au 
contraire,  le  morceau,  plus  considérable,  qui  est  demeuré  sur 
les  rayons  de  la  Bibliothèque  de  Trinity  contient  quelques 
breÉs  textes  qui  méritent  d'être  signalés. 

1.  Je  transcris  une  page  du  commencement,  où  il  est 
question  de  l'usage  qu'on  faisait  de  certains  psaumes  comme 
charmes  ou  talismans. 

(P.  4  ')  Si  aucun  voderat  Deusupplicr,  vers  li  deit  od  gémissement  devant 
la  croiz  .vij.  feiz  ces  saumes  dire  :  Usquequo,  Domine  [XII];  Ad  te,  Domitie, 
levavi  [XXIV].  —  En  besoign  si  vus  chaez,  dites  ceste  saurae  ententivement; 
si  serrez  délivre  :  ///  te.  Domine^  speravi  [LXX].  —  Quant  aucun  vc[n]rat  la 
ou  il  creindrat,  die  treis  feiz  ceste  saume  od  bon  queor,  e  voist  seur  al  conduit 
Deu  :  Judica  tne,  Deus  [XLII].  —  Qp^nt  vus  lèverez  del  lit,  dites  treis  feiz  : 
Dominus  in  iwmitic  luo  [LUI]  et  .iij.  pater  noster;  si  passerez  le  jur  senz  encum- 
brer.  —  Si  vus  en  adversité  estes  e  vulez  par  Deu  cstre  délivre,  dites  cinc 
feiz  a  genuilluns  et  od  lermes  :  Exaudi  Detis  ;  Miserere  met,  Deus,  quoniam 
[LV]  ;  si  serrez  délivre.  —  Si  aucun  deit  pleider  a  plus  haut  de  sei,  die  : 
Miserere  mei,  Deus,  miserere  [LVI],  e  agenuille  set  feiz,  e  prie  Deu  humble- 
ment. -  Ki  bataille  deit  fere,  die  neof  feiz,  ou  aucun  pur  lui  :  Eripe  vie 
Domitu  [CXXXIX]  ;  Exaudi  Deus  deprecationem  [LX]  ;  Exaudi,  Deus,  oratio- 
nem  [LXIII];  pus  si  avérât  Taide  Deu.  —  Ki  est  en  volenté  de  peccher,  die  : 
Deus  miserealur  [LXVI],  et  prie  ententivement  ;  si  ert  délivre. 

Après  sunges  dites  treis  feîz  dévotement  : 

Loverd  Jhesu  Crist,  ich  the  bidde  for  tÏK  vif  wunde  and  //je  diet  //rat  //;u 
///oledest  in  //jare  holie  rode  //>at  thu  turnc  mine  swevenes  to  blisse  and  to 
gode.  Amen,  amen,  so  mote  hit  beofor  //?are  swete  holie  rode.  Pater  noster  iij... 

car  on  savait  qu'il  avait  fréquenté  assidûment  la  bibliothèque  de  Trinity.  Il 
se  défendit  en  disant  qu'il  avait  acheté  chez  un  libraire  de  Londres  les  manu- 
scrits revendus  par  lui  à  Rodd,  et  qu'il  en  avait  ignoré  la  provenance.  Ce 
point  n'a  jamais  été  bien  éclairci,  et  Halliwell  a  toujours  eu,  depuis  ce  temps, 
une  mauvaise  réputation  à  Cambridge.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  Musée  britan- 
nique se  considéra  comme  légitime  possesseur  des  manuscrits  volés  et 
repoussa  les  réclamations  de  Trinity.  Voir  sur  celte  querelle  l'article  Halli- 
well du  Dictionary  0]  national  Biography,  t.  XXIV. 

1.  Il  y  a,  dans  l'Egerion  843  (fol.  33  vo  et  suiv.),  une  table,  des  années 
1273  à  1396 avec  des  colonnes  pour  l'indiction,  l'épacte,  le  concurrent,  etc., 
d'où  Ton  pourrait  conclure  que  le  ms.  n'aurait  été  fait  qu'en  1273.  Toutefois 
l'écriture  m'avait  paru  antérieure  à  cette  date. 

2.  Le  ms.  tsx  pagine,  non  foliote. 


IIO  p.    MEYER 

Il  semble  bien  que  la  pièce  anglaise  qui  précède  soit  en  vers; 
toutefois  je  ne  réussis  pas  h.  trouver  les  rimes  du  commence- 
ment. A  k  suite  vient  cette  courte  picce  française  : 

Sîre  Jhcsu  Crbt,  rei  pussant,    (p*  S  ) 

A  vostre  seint  cors  me  comand  ; 

E  vostre  seint  sanc  me  suit  salu 

Ki  pur  nus  eu  h  set  me  croh  fu  e5>paiidu. 

Amen,  amen,  is^i  scit  pur  U  grant  venu. 

2.  Formule  de  confession,  qui  se  retrouve  ailleurs»  par 
ex.  dans  le  ms.  Gg.  r*  i  de  la  Bliblioihèque  de  TUniversité 
de  Cambridge  {Romania^  XV,  340).  Premières  lignes  : 

(P.  6)  Ui  comtmt  la  tmm'tt  dt  c^njmfr.  Benedîcite  Dominus.  In  no  mine 
Patris  et  Filiiet  SpîritussatKlu  Jeo  me  tend  cupablc  a  aostre  Seigneur  Jhesu 
Crist  et  n  nostre  dame  sainte  Marie  et  a  tux  1^  sciiu  Deu  e  seirites  de  mz 
les  pecchezke  jeo  ai  fet  pus  ke  jeo  fu  né  deske  ore.  Jeo  m  mull  pecché  en 
orguîl^  en  fierté,  en  baudur  de  queor^  en  surquiderîe,*. 

3.  Saints  à  Jésus  Christ  d  à  la  Vierge.  —  Ces  pièces  ^ni 
écrites  à  longues  lignes  comme  prose.  La  première  (pour  la 
seconde  il  y  a  doute)  est  en  couplets  de  six  vers  monorimes* 
Ce  qu'il  y  a  de  particulier,  c*est  que  les  vers  ont  seize  syllabes 
(du  moins  en  principe),  avec  un  repos  après  la  huitième. 
Nous  possédons  de  ce  genre  de  vers  quelques  rares  exemples 
dans  des  pièces  composées  en  Angleterre'.  La  seconde  pièce  a 
un  refrain  de  deux  vers. 

(P.  7)  Dita  imt  a  Dtu  da'Oifftnent  : 

Ave  Jhesu^  reis  omnipotent»  ki  home  pecchewr  custes  si  chicr, 
Pur  ki  suffristes  vostre  cors  si  très  vile[ne[ment  treiter. 
Vos  seïfites  meîns  c  vos  du2  pxci  en  croij:  estendre  e  cloufichîcr. 
E  vostrv  cors  prccius  de  une  kncc  agûc  percier, 
E  les  cinc  plaies  de  salu  pur  iîus  pecchcurs  feîstes  seigtier, 
6  Défendez  nus,  sire  Jhesu  Crist,  de  pecché  e  d'cncoïiibrier. 


i*  Rùmankj  XV,  J09,  331.  —  Il  faut  mettre  à  part  le  vers  de  16  syllabes, 
avec  une  syllabe  féminine  non  comptée  dans  la  mesure,  à  rhémîstîche, 
forme  qui  se  rencontre  en  France  vers  h  fin  du  moyen  âge,  J*en  ai  cité  an 
exemple^  Komanm,  XV^  310.  Un  autre  est  fourni  par  la  pièce  des  quinze 
signes  de  la  un  du  monde  dont  le  début  a  été  publié  par  M.  Tobicr  dans  le 
JahrbuchJ.   rmfan.  u.  engi.  Likrâtur,  Vil,  405» 


LES   MANUSCRITS   FRANÇAIS   DE   CAMBRIDGE  III 

Ave  Jhesu,  lii  vos  duz  braz  pur  mei  voliez  estendre 
En  celé  gloriose  croiz  e  pur  mei  cheitif  pendre, 
E  suffrir  si  dure  mort  ice  ne  sui  fors  pudre  e  cendre. 
Sire,  donez  mei  grâce  ke  jeo  le  sace  entendre, 
E  en  vostre  seint  servisse  issi  mun  tens  despendre 
12  Ke  mun  espirit  pusse  a  ma  fin  en  vos  meins  rendre. 
Amen. 

Dites  a  nostre  Dame  seinte  Marie  mut  dévotement  :  Ave  Maria  gracia  plena  ; 
Dominus  tecum,  etc. 

Duce  dame  seinte  Marie,  eez  de-  nus  pité, 

Ke  ja  de  pecché  mortel  ne  seium  encumbré, 

Ne  ja  pur  nule  folie  a  dure  mort  livré. 

Amen,  amen,  duce  puccle,  pur  ta  seinte  virginité. 

Duce  dame  sainte  Marie,  preez  vostre  enfant 

K*il  nus  salve  de  tuz  mais,  si  cum  il  est  pussant. 

Duce  dame  seinte  Marie,  priez  Jhesu  trist 

K'il  nus  tuz  salve  si  com  de  vus  char  prist. 

Amen,  duce  dame,  mère  Jhesu  Crist, 

Beneit  seit  le  hure  ice  il  en  tei  se  mist. 

Ileit  merci  de  nus  ke  tele  te  fist. 

Duce  dame  seinte  Marie,  preez  vostre  enfant 

K'il  nus  doint  sa  aïe  e  nus  seit  garant 

Encontre  tuz  nos  enemis  ke  nus  haient  tant. 

Duce  Marie,  preez  vostre  enfant 

K'il  nus  salve  de  tuz  mais,  si  cum  il  est  pussant... 

De  la  p.  lo  à  la  p.  324  le  manuscrit  contient  un  assez 
curieux  mélange  de  morceaux  latins,  en  vers  et  en  prose,  dont 
on  trouvera  Ténumération  détaillée  dans  le  troisième  tome  du 
catalv)gue  de  M.  James.  Je  me  borne  à  citer  en  passant  : 

P.  II,  deux  vers  sur  l'étymologie  de  Philippus,  à  joindre 
aux  textes  cités  par  Darmesteter,  Romaniay  I,  360  : 

Phiy  nota  fetoris,  lippus  gravis  omnibus  horis  ; 
Shpfn,  sit  lippus  y  semper  procul  ergo  Philippus. 

P.  19,  traité  d'arithmétique,  en  forme  de  dialogue  :  «  Quia 
te,  venerande  preceptor,  sepius  audivi...  »  —  P.  20,  traité 
d'algorisme  :  «  Omnia  que  a  primeva  origine  rerum  processe- 
runt...  »  Cf.  Romaniay  XXVI,  232.  —  P.  23,  l'algorisme  ver- 
sifié d'Alexandre  de  Villedieu  :  «  Hec  algorismus  ars  presens 
dicitur  esse...  »  Cf.  Rotnania,  L  c.  —  P.  82,  un  calendrier,  etc. 


ri2 


p.    MEYER 


—  Les  pages  309-322  î^ont  occupées  par  diverses  pièces  goliar- 
diqueSj  à  commencer  par  VApocalypsis  Gtflicy  à  propos  de 
laquelle  Th«  Wright  *  cite  notre  manuscrit. 


Pur  chAsticrk  foie  gent  (p,  324  t) 
Kc  plus  eîment  or  et  argent 
K'il  ne  fuîit  Dcu  et  sainte  Glîsc, 
Ai  yn  poi  m 'entente  mise 
A  rimer  et  â  conter 
Ceo  ke  jeo  ai  oî  recomer 
Mestre  Robert  de  Cursun  » 

5.  La  am/ession  de  r usurier* 

Plcsi  vus  oîrunemer\"aille(p.527) 
A  kî  nu  le  ïie  se  apaniille  1  ? 
Bien  la  devez  tur  escuter. 
E[n]  vos  quers  tiietre  et  e^uter. 
Dire  voil  la  conkssiou 


L'autre  jur  a  sun  scrraun, 

Cuni  feitcment  li  usurier 

Vet  a  muster  pur  Deu  prier. 

Li  userers  est  par  matin  levez, 

Tuz  SCS  us  ad  defermcz 

Pur  ve€r  si  aukun  venîsi 

Ke  deniers  empnjmpier  vousist,.. 


Al  u^ercr  e  k  pardon 
Kc  îî  out  quant  il  dusi  morir. 
Diable  le  sout  bien  nierir 
Le  servi  se  ke  fet  aveit, 
Car  unkes  en  sa  vie  n^aveit 


K  Latin  potmi  amtnonîy  (ttirihUtd  to  W.  Afa^*  (Camdeti  Socieiy),  p,  1. 
2.  FtfWrVïi/.vJV,  99. 

\.  Rctmtftû,  L  2aj8*9.  Voici  les  premiers  vers  de  b  Ic^on  du  ms.  Harléicn  :  ^ 

A  rnaisire  Robert  de  Dijon» 


A  Paris»  enz  en  pïcïn  sermon, 

Cum  faitement  li  userier 

Vient  au  niostier  por  Dieu  proier,.. 


Pur  chaioier  les  riges  (sk)  eçni 

Ki  mie^t  4inmc[nt]  For  et  l  argent 

Ai  ce  .j.  pou  m'ememe  mise 

A  nmoier  c  a  conter 

ke  que  j^oii  reconter 
4.  Hohrt  de  ChûnoH,  dans  îems.  8j7(Mèon).  —  Robert  de  Courson,  chin* 
ccïicr  de  rUnivcrsiîé  de  Paris^  légat  du  pape,  mourut  en  M 18  au  tiiege  de 
Damictte  (HiU.  îiU.  dth  Fr^,  XVIL  î9ï-6).  Nous  n*avons  pas  sessemnons. 
Mais  Hauréau  a  prouvé  qu'il  était  T auteur  d'une  Summû  de  Sùcrâtft^Hth^  attïn- 
buée  À  tort  i  Simon  de  Tournai,  dans  laquelle  il  s'élève  avec  une  extrême  vio- 
lence contre  le^  usuriers  parmi  lesquels  il  englobe  à  pi:u  près  tous  ceux  qui 
vivent  du  négoce  (Hauréau,  Notices  ri  txtrûiH  de  c/f  ♦  mss.  htins  de  k  BiH.  nat,^ 
L  167  ctsuiv.). 

$.  Fomiuïe  fréqucnie;  voir  Rmtmniû^  VI,  23*  Le  ùbï«ui  jt  du  prestrc  qui 
disit  la  passion  «  commence  à  peu  près  de  même. 


LES    xMANUSCRlTS    FRANÇAIS    DE   CAMBRIDGE  113 

Un  jur  esté  sanz  usure.  Mes  la  joie  de  paradis  (p.  330) 

Mes  la  mort,  ki  rien  ne  asure,  Nus  otrie  cil  ki  nus  fist  nestre, 

De  sa  verge  le  tucha.  E  nus  mette  tuz  en  sa  destre, 


En  la  joie  pardurable 

Od  le  père  esperitable.  Amen. 


6.  La  Riote  du  monde.  —  On  sait  qu'il  existe  de  cette  amu- 
sante trufe  diverses  rédactions,  Tune  en  vers,  les  autres  en 
prose.  Elles  ont  été  toutes  publiées,  dans  h  Zeiischrift  f,  rom. 
Philologie,  Vm  (1884),  275-289,  XXIV  (1900),  112-129,  par 
M.  J.  Ulrich.  Le  texte  du  ms.  de  Trinity  a  pris  place  dans  cette 
collection,  VIII,  279.  Premiers  mots  : 

Jeo  chevachoie  l'autrier  de  Amiens  a  Corbie.  Si  encontrai  li  reis  e  sa  mes- 
née.  «  Beaus  amis  »,  dist  le  rei,  «  dunt  viens  tu?  —  Sire,  jeo  vient  de  ça  — 
Ou  vas  tu  ?  Jeo  vois  la. . . .  » 

7.  Recettes  variées,  analogues  aux  «  quentyses  bones  et 
esprovées  »  que  j'ai  publiées  jadis  d'après  un  manuscrit  d'Edim- 
bourg ^ 

(P.  349).  Peniez  drasche  de  oylle  z  arnement  z  vitreole,  c  destemprez 
ensemble  e  metez  en  un  crusil  ou  en  une  lampe,  een  oignez  la  mèche  de  ceo, 
e  alumez,  e  tuz  en  le  ostel  resemblerunt  mors. 

Pernez  la  gresse  de  la  verte  lesarde  avec  le  cowe  e  vif  argent,  destemprez 
ensemble  e  metez  en  une  lampe  ou  en  une  chandeille,  e  alumez,  e  la  chambre 
resemblera  argent. 

Pernez  archal  .j.  wyr'  e  enoignez  le  de  suffre  vif  destempré  un  poi  od 
oille,  e  estendez  le  archal  en  lung  la  meysun,  e  fichez  autant  de  chandoilles 
cum  vus  unkes  voldrez  en  lung  del  archal,  e  alumez  une  chandele  al  un  but 
del  archal  ke  la  flamble  atuche  le  archal,  e  tuz  les  autres  par  fei  alumerunt. 

Destemprez  coperose  od  fiel  de  sengler,  issi  k'il  seit  cum  oigne  ment.  Sil 
gardez  en  boistes  e  oignez,  e  les  pcilz  cherrunt.  Meimes  ceo  vus  fra  arsenik  e 
coperose  destempré  od  vin  egre. 

8.  Proverbes  vulgaires  traduits  en  hexamètres.  On  sait  que 
les  clercs  du  moyen  âge  ont  pris  plaisir  à  mettre  en  vers  latins 
des  proverbes  vulgaires.  Le  ms.  Digby  53  (Bodléienne)  qui 
remonte  au  commencement  du  xni'  siècle,  contient  un  cer- 
tain  nombre    de   ces    traductions,    accompagnées     du    pro- 

1.  Doc.  mss.  de  Pane.  litt.  de  la  France,  (1871),    p.  107. 

2.  L'anglais  wire,  fil. 

Ranumia  XXXIl  Q 


114  ~  *'*    MHYEK 

verbe  orîgiriiiL  J*ai  décrk  jadis  ce  manuscrit  ^  Je  publierai 
pruchainement  une  émde  sur  d*autres  recueils  du  même  genre. 
Icij  le  proverbe  original  est  ordinairement  donné  sous  la  forme 
anglaise  ;  ainsi  ; 

(P.  Î5 1)  ÎFd  wùthufÉ  mi  vjha^  berd  hc  Hcht, 
Munlegu^  bcne  scu  eu  jus  barbam  îamberc  suet'it. 

C'est  le  proverbe  français  bien  connu  :  Bien  uî  li  chas  cm  barbe 
il  îecbe  ^  Mais  le  vers  latin  est  transcrit  ici  inconectement.  Il  faut 
eut  aii  lieu  de  cujus  K  Une  fois  sculemcDC  la  forme  française 
est  donnée  : 

(P.  J52)  Ki  ne  dune  aQ  IsU  aime  ne  prent  ^eo  k'il  désire. 
Qui  non  dat  quod  amat   non  accipil  omnc  quod  optât  *, 

Dans  la  suite,  ce  recueil  de  proverbes,  qui  s*arréte  au  bas  de 
la  p.  556s  omet  les  proverbes  originaux  et  donne  seulement 
les  vers  latins. 

Notre  manuscrit  contient  un  feuillet  de  garde  dont  il  con- 
vient de  dire  quelques  mots.  Ce  feuillet  de  garde,  formé  d'une 
bande  de  parchemin  assez  étroite,  est  une  colonne  détachée  d'une 
bible  française  écrite  à  deux  colonnes  par  pages.  On  y  lit  k  fin 
du  premier  livre  des  Macchabées.  L'écriture  (tin  do  xnr  siècle 
ou  commencemem  du  xtv*)  est  anglaise,  mais  la  traduction  est 
bien  française  d'origine,  car  c*esc  ta  version  qu'on  rencontre 
dans  ce  que  Samuel  Berger  appelle,  à  tort  ou  à  raison,  la  Bible 
du  xni^  siècle,  d'où  elle  a  passé  dans  la  Bible  historiale  de 
Guyart  Desmoulins*-  Je  donne  les  premières  lignes  de  notre 


1.  Docutnrnh  nmttuscHh  p,  170, 

2.  Le  Roux  de  Lincy,  Livre  dts  prm.K,  3f  éd.,  L  ijé,  H,  474,  487.  Cf. 
Remania,  III,    11}  ;  XXXJ,  477. 

j.  CL  le  ras.  Roy,  î^.A,  IV,  fol.  85  (Musée  britannî^ue). 

4,  Ce  vers  latin  est  cit^  par  Nicolas  de  Byard  (Bibl,  MaKârine,  lo^Oi 
foL  70  tt).  Quant  au  prov.  français  il  se  rencontre,  avec  trois  traductions 
ktines  dilîèrcn^i,  dans  le  ni5,  Digby  5  j  (voir  mes  Dùcumenh  fnûmmrih,  p, 
174)- 

î*  S*  Ikfïîer  nnentionne  cette  \*ersion  dans  son  chapitre  sur  Guyart  Des- 
inoulbs  (£^  BiifU  frân{ahf^  p.  170-t)»  mjîs  il  n'a  pas  remarqué  qu*elle  est 
iimèricun?  à    Gu\'art   Desmoulins,   puisqu^elïe  se  trouve  dans  la   «  Bible  du 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS    DK    CAMBRIDGE  115 

tiragmein  en  rétablissant  le  début  de  la  première  phrase  à  Taide 
du  ms.  fr.  398,  fol.  208**,  qui  est  de  la  fin  du  xiir  siècle.  Je 
mets  en  italiques  les  mots  restitués. 

(I,  XVI,  1 5)  Lijili  Ahboby  les  reçut  en  une  petite  forleresce  qui  est  apellcz  Doth 
par  tricherie,  et  lur  fist  un  grant  nicngier,  et  repoust  homes  en  la  meson  ; 
(16)  et  quant  Symeon  et  ses  fiuz  furent  enyvrez,  Tholonicr  et  sa  gent  se 
levèrent  et  pristrent  lur  armes  et  entrèrent  ou  il  mangoient  et  occistrent 
Symeon  et  ses  .ij.  fiuz  et  aucuns  de  ses  serganz.  (17)  Ainsi  déçut  Tholomer 
le  pueple  Israël  et  lur  rendi  mal  por  bien.  (18)  Lor  cscrist  Tholomer  lettres  et 
l[es|  envoia  au  roi  qu'il  envoiast  gent  en  aide  ;  et  il  li  bailleroii  la  région  et  lez 
citez  et  les  treûs 


0.5. 32.  —  GÉOMANCIE,  Géométrie,  Lunaire  de  Salomon,  etc. 

Ce  manuscrit,  du  commencement  du  xv*'  siècle,  est  un 
recueil  d'opuscules  variés,  en  latin  et  en  français,  concernant 
la  divination,  la  géométrie,  la  médecine.  J'en  donne  quelques 
extraits  qui  acquerront  un  certain  intérêt  si  on  trouve  d'autres 
manuscrits  renfermant  les  mêmes  textes. 

Au  commencement  il  y  a  divers  tableaux  servant  à  la  divi- 
nation. Il  s'y  trouve  des  sphères  ou  roues,  analogues  à  celles 
que  j'ai  signalées  dans  la  Romania,  XXVI,  238.  On  y  voit 
figurer  «  le  roy  des  Tourcs,  le  roy  d'Espagne,  le  roy  de 
Ynde  »,  etc.,  avec  des  réponses  aux  questions  posées. 

1.  Le  livre  Herniis  le  philosophe,  — Traduction  plus  ou  moins 
libre  d'un  traité  astrologique  mis  sous  le  nom  du  fabuleux 
Hermès  Trismégiste  :  Liber  H er métis  de  i^  siellis  et  tôt  lapidi- 
bus  et  de  /j  herbis  et  de  ij  imaginihus.  C'est  ainsi  qu'il  est 
intitulé  dans  le  ms.  B.  N.  lat.  7440,  fol.  13  v°.  Le  même  titre, 
ou  à  peu  près,  estfournipar  le  ms.  Ashmole  1471,  fol.  50,  de 
la  Bodléienne.  Du  reste  cet  opuscule  est  rare  en  manuscrit,  et 
il  ne  paraît  pas  qu'il  ait  été  imprimé.  La  version  de  notre 
manuscrit  commence  ainsi  : 

{Fol,  II)  Cy  comence  le  livre  Hermès  le  philosofre  parlaunt  des  .iij. 
esteilles  greyndres  fixes  et  15  pieres  précieuses,  15  herbes  vertueuses  et 
des  is  figures  miraculouses.  Adounques,  entre  moutz  des  autres  choses  que 
les  aunciens  sages  moustreront  en  lour  escritz,  cestui  Hermès,  très  auncien 


Il6  p.     MEYER 

piere  des  phylosofres  et  com  des  benoîts  dieux,  tist  cest  livre  et  le  départi  en 
quatre  parties  pur  ceo  que  principalment  quatre  vertues  des  choses  sount  en 
ycele  contenuz...  » 

2.  Traité  de  géométrie.  —  Il  faut  entendre  ici  «  géométrie  » 
en  son  sens  propre,  Tart  de  mesurer  la  terre.  Cest  un  traité 
d'arpentage.  Le  prologue  fait  honneur  aux  Égyptiens  de  Tin- 
vention  de  cet  art.  La  même  idée  est  exprimée  dans  les  traités 
de  géométrie  de  Boèce  et  de  Gerbert,  qui  toutefois  sont  fort 
différents  de  notre  traité  français.  Ce  traité  est-il  traduit  du 
latin  ?  Je  n'oserais  l'affirmer,  bien  que  cette  hypothèse  me 
paraisse  a  priori  assez  probable.  On  peut  du  moins  admettre 
que,  sans  avoir  traduit  proprement  un  texte  déterminé,  l'écri- 
vain a  emprunté  sa  matière  à  des  écrits  latins. 

(F(j/.  if)  Un  sage  autour  de  géométrie  disi  qu'ele  fust  prymes  trovê  en 
Egipte,  que  auncienneraent  fust  la  terre  ou  diverses  sciences  furont  useez  et 
apryses.  Qar  des  Caldeus  et  Egipciens  vindront  eles  a  Grt^eys,  et  puis  des 
Gregeys  as  Arabiens  et  Latins.  Et  solonc  ceo  que  le  dit  autour  counte,  la 
manière  et  la  cause  pur  quey  ele  fust  prymes  trovée  illeok  fust  ceste.  Nous 
savons  bien  que  la  terre  d'Egipte  est  graunt  partie,  en  certeyn  seysoun  del 
an,  coverte  del  Bom  de  Nil,  estre  les  plus  haustz  lieus  et  les  citeez,  et  pur 
celé  cause  sont  clesassysle  plus  haut  que  les  pays  enviroun,  issi  que,  quant 
Tewe  fust  retrete,  les  gentz  du  pays  ne  porroient  conustre  les  boundes  de 
lour  champs,  quar  les  boundes  furont  ostée  par  Tewe,  dount  grant  estryf 
sovent  sourdy  entre  eux,  qar  la  terre  do  Egipte  est  si  bone  et  plenturouse 
que  damage  lour  semble  a  perdre  un  pié  de  terre... 

3.  Le  lunaire  de  Salomon.  —  C'est  une  rédaction  en  vers 
toute  différente  de  celle  que  Méon  a  publiée  et  dont  j'ai  indi- 
qué diverses  copies  dans  une  précédente  notice  (Romaniûy 
XXIX,  77).  Le  texte  que  nous  avons  ici,  et  dont  je  ne  con- 
nais pas  d'autre  exemplaire,  se  rapproche  assez  d'un  texte  en 
prose  dont  j'ai  cité  quelques  lignes  dans  mes  Notices  sur  quelqtus 


1 .  Voici  le  latin  :  «  Inter  mulia  alia  bona  que  antiqui  patres  sapientissimi 
narravcrunt  philosophi,  Hermès  Abydymon,  patcr  philosophorum  antiquissi- 
mus,  sapiens  et  quasi  unus  benedictus  a  Deo,  philosophis  librum  hune 
edidit  divisiique  eum  in  4  partibus,  eo  quod  principaliter  sunt  4  rerum  vir- 
tutes,  videlicet  stellarum,  lapidum,  herbarum  atque  ferarum  que  in  eis 
continentur...  »  (B.  N.  lat.  7440,  fol.  15  c;  xive  siècle). 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS    DK    CAMBRIDGE  II5 

fragment  en  rétablissant  le  début  de  la  première  phrase  à  Taide 
du  ms.  fr.  398,  fol.  208**,  qui  est  de  la  fin  du  xiir  siècle.  Je 
mets  en  italiques  les  mots  restitués. 

(I,  XVI,  1 5)  Lijili  Abhoby  les  reçut  en  une  petite  forleresce  qui  est  apellez  Doth 
par  tricherie,  et  lur  fist  un  grani  mengier,  et  repoust  homes  en  la  meson  ; 
(16)  et  quant  Symeon  et  ses  fiuz  furent  enyvrez,  Tholonier  et  sa  gent  se 
levèrent  et  pristrent  lur  armes  et  entrèrent  ou  il  mangoient  et  occistrent 
Symeon  et  ses  .ij.  fiuz  et  aucuns  de  ses  serganz.  (17)  Ainsi  det;ut  Tholomer 
le  pueple  Israël  et  lur  rendi  mal  por  bien.  (18)  Lor  escrist  Tholomer  lettres  et 
l[es|  envoia  au  roi  qu'il  envoiast  gent  en  aide  ;  et  il  H  bailleroii  la  région  et  lez 
citez  et  les  treûs 


0.5.32.  —  GÉOMANCIE,  Géométrie,  Lunaire  de  Salomon,  etc. 

Ce  manuscrit,  du  commencement  du  xV  siècle,  est  un 
recueil  d*opuscules  variés,  en  latin  et  en  français,  concernant 
la  divination,  la  géométrie,  la  médecine.  J'en  donne  quelques 
extraits  qui  acquerront  un  certain  intérêt  si  on  trouve  d'autres 
manuscrits  renfermant  les  mêmes  textes. 

Au  commencement  il  y  a  divers  tableaux  servant  à  la  divi- 
nation. Il  s'y  trouve  des  sphères  ou  roues,  analogues  à  celles 
que  j'ai  signalées  dans  la  Rotnania,  XXVI,  238.  On  y  voit 
figurer  «  le  roy  des  Tourcs,  le  roy  d'Espagne,  le  roy  de 
Ynde  »,  etc.,  avec  des  réponses  aux  questions  posées. 

1.  L€  livre  Hernies  le  philosophe.  — Traduction  plus  ou  moins 
libre  d*un  traité  astrologique  mis  sous  le  nom  du  fabuleux 
Hermès  Trismégiste  :  Liber  Hernietis  de  ij  siellis  ci  tôt  lapidi- 
bus  el  de  ij  herbis  et  de  ij  imaginibus.  Cest  ainsi  qu'il  est 
intitulé  dans  le  ms.  B.  N.  lat.  7440,  fol.  13  v°.  Le  même  titre, 
ou  à  peu  près,  est  fourni  par  le  ms.  Ashmole  1471,  fol.  50,  de 
la  Bodléienne.  Du  reste  cet  opuscule  est  rare  en  manuscrit,  et 
il  ne  paraît  pas  qu'il  ait  été  imprimé.  La  version  de  notre 
manuscrit  commence  ainsi  : 

(^FoL  II)  Cy  comence  le  livre  Hermès  le  philosofre  parlaunt  des  .iij. 
esteilles  greyndres  fixes  et  15  pieres  preciouses,  15  herbes  vertueuses  et 
des  is  figures  miraculouses.  Adounques,  entre  moutz  des  autres  choses  que 
les  aunciens  sages  moustreront  en  lour  escritz,  cestui  Hermès,  très  auncien 


Il8  p.    MKYKR 

Dame,  si  verroyment  corne  ceo  est  verroy  •» 
J^ycz  en  garde  le  corps  et  Talme  de  nioy  ^ 

Et  après  ditc>  Pater  *Vo.7.7'  et  cink  Ave  Maria.  Icest  orisoun  envoia 
Nostre  Dame  seinie  Marie  a  seint  Morice,  Tevesque  de  Paris  î,  et  qi  chescun 
jour  le  dirra  cynk  foitz  en  Tonuraunce  des  cynk  joies  que  Nostre  Dame 
a  voit  de  son  cher  tîtz,  et  Paier  noster  et  v.  Ave  Maria,  ja  en  cest  Siècle 
hountage  n'avéra  ne  mes  aventure  ne  lui  a  vendra  ne  en  court  de  terrien 
seignour  vcncu  ne  serra;  tonere  ne  foudre  ne  lui  damagera,  viseyn  qy  ♦  ne 
lui  noiera  s,  ne  femme  enceynte  de  son  enfant  ne  périra. 

Suit  une  table  des  jours  égyptiaques,  et,  d'une  écriture  du 
xvi'^  siècle,  un  recueil  de  recettes  médicales,  les  unes  en  latin, 
les  autres  en  français. 


T.ABl.K   Di:S   MSS.  DÉCRITS 

B.  14.  39 20       O.  i.  20 75 

B.   14.  40 n       0.2.     5. 95 

K.     3.  :o 65       O.  2.   14 102 

R.     3.  56 6s       C).  2.   is 108 

O.     I.   17 68       O.  >.  32 115 


1.  Bodl.  /).  Kumc  co  est  irirs  e  jo  hnt  le  crei,  Harl.  /).  si  ctttti  ceo  ert  vtirs  et 
eo  le  erei. 

2.  Harl.  Vahth-  et  le  cors  île  met. 

^.  I/êvcqiic  .Maurice  de  Sully  (j-  1 196)  n'a  jamais  été  canonisé.  Toutefois 
ce  n'est  pas  ici  seulement  qu'il  est  appelé  saint.  Le  ms.  Digby  86  (voir  la 
notice  de  .M.  Sienj^el.  p.  6)  renferme  une  pièce  en  prose,  analogue,  mais 
non  identique  .1  celle-ci,  qui  est  précédée  de  cette  indication  :  «  Nostre  Dame 
seinie  .M.irie  envea  cest  oreisun  a  seint  .Morice,  eveske  de  Paris.  » 

\.  lacune. 

\.  1)  faut  entendre  »i////v. 


LES    MANUSCRITS    FRANÇAIS    DE    CAMBRIDGE 


119 


TABLE  DES  AUTEURS  ET  DES  OUVRAGES 


Amiaim  induit,  voir  Platearius. 
Ballades  françaises  (R.  3.  20). .     63 
Bêle  Aîis  matyn  se  leva,  chanson 

(B.  14.  39) 22 

Bibbysworthy  Gautier  de  — 
Charmes,     psaumes    employés 

comme  —  (O.  2.  45) 109 

Chirurgie,  la  nouvelle  —  en  vers 

(O.2.5) 99 

Cinq  joies  Notre  Dame,  les  — 

(O-  5.  32) 117 

Confession,  formule  de  —  (O. 

2.  45) iio 

—     traité  de  la  —  (O.  i.  20)..     95 
Confession   de   V  Usurier,  la  — , 

poème  (O.  2.  45) 112 

Conjugaison  française,  traité  en 

latin  delà  — (R.  3.  56).....     66 
Croix,    légende   du   bois  de  la 

sainte  —  (O.  i .  17) 74 

Daniel  Churche,  voir  Urbain 

le  Courtois. 
Dialogues  français  composés  en 

1415(8.   14.  40) 47 

Edmond    de    Pontigni    (saint) 

traduction  au  Spéculum  Ecclesic 

(p.  I.  17) 74 

Ezechiel,  voir  Pronostics  d*  — 
Femina,  traité  pour  apprendre 

le  français  (B.  14.  40) 43 

Formulaire  de  lettres(B.  14.40)     59 
Gautier     de     Bibbysworth  , 

Aprise  de  franceii  (B.  14.  40)  .     44 
Géomancie,   traité  de    —   (O. 

2.  S) 96 

Géométrie,  traité  de— (0.5. 3  2)  116 
Guillaume  le  Normand,  Bes- 
tiaire (O.  2.  14) 105 

Hermès,  le  liv  e  —  (O.  5.32)..    11$ 
Hippocrate,  traité   apocryphe 


adressé    à   Tempereur   César 

(0. 1.20) 84 

Hippocrate,  traité  attribué  à  — 
sur  la  manière  de  visiter  les 
malades  (O.  i .  20) 86 

—  ,  traité  attribué  à  — 
sur  les  pronostics  de  la  mort 
(O.  2.  5)... 98 

Lunaire  de  Salomon,le  —  (O.  5'. 

J2) >i6 

Maccljqfxes,  traduaion  des  —  , 

fragment  (O.  2.  4s) 114 

Maladies  des  femmes,  traité  en 

vers  sur  les  —  (O.  2.  5) loi 

—  ,  voir  Trotula. 

Mari  (le)  cocu,  battu  et  content, 
—  récit  en  prose  (B.  14.  40)     59 

Médecine,  traité  de  —  en  prose 
(O.  I.  20) 83 

—  ,  voir  Poème  médical, 
Recettes    médicales ,     Tro  • 

TULA. 

Miroir,  le,  voir  Robert  de  Gre- 
THAM,  orthographe,  traitéd' — 
(B.  14.40) 59 

Passion,    poème  sur  la  —  (O. 

2.   14) 102    ^ 

Passion,  poème  sur  la  —  B.  14. 

39) 38' 

Patenotrede  V  Usurier,  la  — ,(0. 

2.  45) 112 

Péchés  capitaux,  sur  les  —  (B. 

14.   39) 40 

Plainte  d'amour,    la  — ,   poème 

(O.  I.  17) 73 

P  L  ATE  A  R I  u  S ,  Practica  hrevis , 
commençant  par  Amicum  in- 
duit, extraits  traduits  en  fran- 
çais (O.  I.  20) 8s 

Poème  médical  (O.  i.  20). ...     75 


I20  P 

Prière  à  J.  C.  en  vers  français 

rt  anglais  (B.  14.  59) 

Pronostics  d'Ézéchicl.  fragment 

en  vers  (B.   1 4.  39J 

Pronostics    de     la    mort,    voir 

HïPPOCBATE. 

Pronostics  tirés  du  mois  de  ia 
naissance  (O.  2.  5; 

Proverbes  vulgaires  traduits  en 
vers  latins  (O.  2.  45J 

Proverhia    Marie  MagJ alêne   (B. 

M.   39; 

Recettes  médicales  en  vers,  pour 

les  femmes  fO.   i .  20; 

Recettes   médicales  en  vers  (O. 

2.   s; 97, 

—     en  prose  (O.  i.  20; 

Recettes  variées  (O.  2.  4$) 

Rinte  du  monJt\  la —   CO.  2.45). 
Robert   de    Gretham,    extraits 

du  Miroir  (B.  14.   39; 

Roger  de  Parme,  la  Chirurgie ^ 

trad.  en  français  (O.  1.  20;.   78 
Roman    des    rotnans,   le    —    (O 


.    MEYER 

(2.  14) 104 

22     Saloinon  et  Marcoulf  (K  3.20;..     63 
Saluts  en  vers  à  J.  C.  et  à  la 

27  Vierge  (O.  2.  45; 110 

Satire  en  latin  sur  la  cour  de 

Rome  CR.  5.  56; 66 

Sermon  en  vers  (B.  14.  39).  37.   41 
ICI     —    sur  la  dédicace  des  ^lises 

(O.  2.  14) 107 

113     —     sur  Josué  fO.  2.  14; 106 

SuFFOLK,  le  comte  de  —,  bal- 
40         lades  et  rondeaux  TR.  3.  20)..     63 

Trotula,  traité  sur  les  maladies 
90         des  femmes,  traduit  en  vers 

(O.   I.  20; 87 

99      Urbain  le  Courtois,  poème  fB. 

77         14.40) 45 

113     —    rO.  I.  17) 68 

1 1 3      Usurier^  voir  Confession  et  Pale- 
notre. 

28  Vent    ^ancte  Sfnritus,  traduit  en 
vers  français  fB.  14.  39)....     26 

,91      Wace,  vie  de  saint  Nicolas  (B. 

M.  39) 5« 

P.  Mf.ykr. 


p.  H6rart.  7).  II  semble  qu'Arnaut  de  Villeneuve  se  si)ii  inspiré  de  ce  traité 
ap'H-Tvphe  d'Hippocnte  dans  ses  CauteUr  wcdicoruni  ;  voir  ///>/.  ////.  de  la 
Fi.,  XXVIII,  69. 

P.  )S,  1.  I,  pfrca  est  sûrement  une  mauvaise  lecture  pour  pères  (l'anglais 
stoue). 

A  propos  du  charme  commençant  par  '  Treis  bon  s"  frères...  »>  (p.  77), 
j'aurais  dû  renvoyer  à  un  mémoire  de  R.  Kôhlcr  rù  sont  rapportées  des 
rédactions  en  latin,  en  itali-n  et  en  allcm-ind  de  la  même  formule  CR.  Kohler. 
Kh'inere  Schriflen...  hgg.  von  J.  IV»]te,  III,  s  52-8). 


MÉLANGES 


LES  NOMS  DES  ROUMAINS  DE  L'ISTRIE 

Dans  le  langage  philologique  nous  avons  Thabitude  de  nom- 
mer les  Roumains  de  Tlstrie  hiro-Roumains,  par  analogie  avec 
IcsMacédo- Roumain  s  tx.\tsDaco-Rouma'nis.  Ce  procédé  est  simple 
et  clair.  Mais  ces  noms  ne  sont  pas  ceux  qu'ils  se  donnent  à 
eux-mêmes  *  ou  qu'ils  reçoivent  de  leurs  voisins. 

Les  Roumains  de  l'Istrie  s'appellent  eux-mêmes  seulement 
Vlah,  Vlasi  et  sont  nommés  par  les  Slaves,  quelquefois  aussi 
par  les  Italiens,  Cici  et  Ciribiri.  Les  Cici  sont  les  Roumains  de 
la  montagne  de  Cars  ;  hs  Ciribiri^  leurs  frères,  habitent  au  pied 
du   Montemaggiore  (en  croate  Ucka). 

Ces  noms  si  curieux  et  si  intéressants  datent  d'une  époque 
historique.  Romîn  —  malgré  quelques  dénominations  provin- 
ciales sans  importance  —  est  le  nom  universel  du  peuple.  Les 
écrivains  des  siècles  passés  ont  employé  quelquefois  aussi  Rumin, 
forme  justifiée  par  les  lois  phoniques.     . 

Quand  on  soulève  un  peu  le  voile  qui  couvre  l'existence  des 
Roumains  de  Tlstrie  dans  les  plus  anciens  temps,  on  peut  trou- 
ver quelques  noms  qui  concordent  avec  leur  existence  historique. 

A.  Covach,  qui  a  fait  connaître  les  Istro-Ronmains  au  commen- 


I.  Les  Roumains  du  sud  du  Danube  s'appellent  Armin'i,  nom  qui  n'çst 
que  le  mot  Roniini  avec  la  prothèse  de  j,  très  usitée  dans  ce  dialecte.  M.  Wei- 
gand  les  nomme  en  allemand  Aroniuneny  forme  qui  ne  me  semble  pas  logique  : 
on  appelle  les  Roumains  en  allemand  :  Rumàneti  ;  en  partant  de  là,  si  nous 
procédons  logiquement,  Arminl  sera  en  allemand  :  AnimCvicu^  et  non  Aromu- 
nen.  Aromnnen  ressemble  beaucoup  au  Rntuuneu  de  Miklosich,  nom  mal  fait, 
qui  n*est  que  la  tran»icription  allemande  de  Rumun-i,  nom  Slovène  des  Rou- 
mains. 


T22  .VftLANGES 

cernent  du  xix'  siècle,  les  appelle  :  Rimglîani  * .  Ce  nom  es 
pour  moi  une  preuve  éclatante  de  Tancienneté  de  leur  séjour"' 
dans  ristrie.  Dans  le  nom  Rimgliam  nous  avons  en  effet,  à 
mon  avis,  le  nom  Ronim  traduit  en  slave.  Rome  était 
nommée  en  vieux  slave  Rymi.;  révolution  historique  de  ce 
mot  nous  donne  pour  le  domaine  slave  méridional  Rim. 
Quand  on  unit  ce  dernier  mot  a%'ec  la  finale  -janinu  %  qui 
en  slave  sert  à  caractériser  les  différences  ethniques  et  sociales, 
en  observant  la  loi  phonétique  d'après  laquelle  entre  les 
labiales  et  les  palatales  s*intercale  toujours  une  /  euphonique 
ou  épenthétique^  on  obtient  pour  le  pluriel  la  forme  très 
logique  :  RimPûm  ou  Rimljane^  qui^  dans  Torthographe  ita- 
Henné,  devient  Rimgliani. 

A  côté  de  RimgUani  on  a  aussi  Rumeri^  forme  qui  se  trouve 
chez  Ireneo  délia  Croce  *.  Rumeri  serait  la  forme  rhotacisée 
Rumàriî  pour  Rumànit  transcrite  en  italien.  Était-elle  très 
usitée  ?C*est  ce  qu'il  est  difficile  de  savoir,  parce  que  nous  nian* 
quons  de  données  historiques.  Ce  nom,  en  tout  as,  est  aujour- 
d'hui entièrement  perdu. 

Les  Slaves  méridionaux,  quand  ils  ne  veulent  pas  plaisanter, 
nomment  les  Roumains  :  Flah^  pi.  Flasi.  Ce  nom  fut,  plus  tard, 
adopté  par  les  Istro- Roumains  eux-mêmes,  ce  qui  n  a  rien 
d'étonnant.  Les  Roumains,  par  suite  des  circonstances  géogra- 
phiques, ont  toujours  été  en  communication  plus  fréquente 
avec  les  Slaves  qu*avec  leurs  confrères  italiens,  et  ont  été  ainsi 
comme  forcés  de  s'approprier  le  nom  de  Flah,  l^lûsi,  qui  ensuite 
s'est  généralisé. 

Les  choses  ne  semblent  pas  aussi  claires  si  Ton  se  place  à  un 
autre  point  de  vue.  C'est  un  fait  psychologique  connu  que  les 
hommes  de  langue  différente  qui  se  trouvent  en  contaa  sont  les 
uns  pour  les  autres  un  sujet  de  railleries,  parfois  très  naïves  et 
sans  malice.  C'est  ce  qui  est  arrivé  icL  Les  Slaves  de  TLstrie, 
Croates  et  Slovènes,  et  les  Roumains,  ayant  entre  eux  des 


I,  Cf.  Burada,  O  ùHàiorit  irt  iatdf  nfminqtûtîn  hlria,  ïaçi,  1R96,  p.  4. 
1.  Lc&kîco»  Hamllmch  iîtr  atlhilgiiri^fmt  Spracht  K  p.  64. 
5.  îbtd,,  p.  46. 

4.  Hûtotia  antiùif  r  modfrtta,  niera  e  ff^j'&na  idkt  citUi  di  Trirstr^  Venetia 
1698;  ï\b.  l\\  cap.  vil»  p,  }%4, 


LES   NOMS    DES    ROUMAINS    DE    l'iSTRIE  I23 

relations  quotidiennes  et  se-  comprenant  peu,  se  sont  donné  les 
uns  aux  autres  des  noms  plaisants,  et  dans  cette  lutte  les 
Roumains,  moins  nombreux  que  les  Slaves,  ont  eu  le  dessous  : 
les  IstrO'Rotimains  ont  gardé  les  surnoms  Cici  et  Ciribiri, 

Je  vois  dans  ces  mots  un  simple  procédé  populaire,  qui  n'est 
pas  rare  dans  le  langage  :  de  ce,  cire  et  bire^  les  Slaves  ont  tiré 
les  deux  noms  Cici  et  Ciribiri,  qui  ont  été  étendus  à  tout  le 
peuple  roumain  de  Tlstrie. 

Dans  Cici  je  vois  une  répétition  du  mot  ce,  entendu  ci 
par  les  Slaves.  Ce  fait  peut  servûr  indirectement  à  la  fixation  de 
lieu  d'origine  des  Roumains  distrie.  Nous  remarquons  en  effet 
que  IV  était  fermé  :  les  Roumains  venaient  donc  d*une  région 
où  on  prononçait  e  fermé. 

Ciribiri  nous  présente  une  combinaison  de  cire  -\-bire  :  ùre- 
bire  a  donné  Ciribiri  par  assimilation.  Cette  étymologie  popu- 
laire me  semble  plus  probable  que  l'analyse  savante  de 
M.  Byhan  sur  Cici  et  Ciribiri^. 

Mais  aujourd'hui,  les  Cici  ne  sont  pas  seulement,  comme  je 
Tai  dit,  les  Roumains  de  la  montagne  de  Cars  :  on  appelle  de 
même  les  Slaves  qui  habitent  le  «  Tschitschenboden  »  des 
cartes  de  Tétat-major  autrichien  ;  les  Ciribiri  sont  seulement  les 
Roumains  du  Montemaggiore.  Nos  rares  données  historiques 
suffisent  à  montrer  que  cette  différence  existait  déjà*  dans  les 
temps  anciens.  A  considérer  la  forme  en  elle-même,  nous 
pouvons  supposer  que  Cici  est  plus  ancien  que  Ciribiri,  Cici  est 
attesté  depuis  le  temps  d'Ireneo  délia  Croce  sous  la  forme  Chichi, 
Son  contemporain,  le  baron  J.  W.  Valvasor,  mentionne  aussi 
plusieurs  fois  les  TschitiiK  II  a  quelques  indications  d'après  les- 
quelles les  Roumains  seraient  venus  de  la  Turquie.  J'ai  moi- 
même  entendu  cette  tradition  dans  le  village  de  Zeiànu  dans 
le  nord. 

Sur  le  mot  Tschitii,  Valvasor  nous  donne  l'explication  sui- 
vante :  «  Es  sey  aber  gleich  der  Nam  Tscintii  von  den  angekom- 
menen  Walachen  allererst  eingefùhrt,  oder  von  Ihnen  daselbst 
angenommen  worden;  so  scheinet   mir  ganz  vernunftmâssig, 

1.  d^  =-  quoi,  cire  =  qui,  bire  z=l  bien. 

2.  Jahresbericht  d.  Insi.  f.  rum.  Spiache;^H  Uip^io^  VI,  pp.  368,  370. 

3.  D/V  Ehre  des  Er^ogthums  Craiii,  1689,  Cf.  lib.  1,  t.  I,  p.  7. 


124  '^  MfaAKGHS 

er  rCihrc  her  von  deii  alten  Siyhh\  als  derer  Nam  aucli  vomi- 
als  ûberaus  weit  gereîcht.  n 

De  cette  c'tymologie  tout  à  fait  fantaisiste,  il  passe  (lib*  IL,  1. 1, 
p.  256)  à  une  autre  plus  curieusej  dont  je  citerai  une  partie  : 
ii  Das  driite  Geschlcclu  dcr  Einvvohner  neiinei  man  die  Tschi- 
tsclmt  (uiuern  gemeinen  Hauffen  aber  Ziich).  Dièse  hausen 
^wischen  Meuhaus  (Castelnuuvo)  und  S,  Si-rff  (S.  Scrvolo) 
konimen  îîwar  in  der  Tracht  deu  jetzt  beschriebenen  Karstuern 
gar  nahe;  bleiben  aber  in  der  Sprachc  weît  von  Ihnen  und 
reden  ihre  besondcre,  aïs  die  rechte  lapydts  oder  Nachkommen 
der  alten  lapydum^  welche  von  den  alien  I^and-  und  Gesehîcht- 
sverfassern  beschricbcn  worden.  » 

ùce  est  la  forme  coUective  slave  de  ac,cia  (p*  ex.  listje  - 
des  feuilles,  kamenje  ~  des  pierres,  etc.)  et  ira  rien  de  commun 
avec  les  lapydes.  C'est  un  fait  constaté  qu'au  xvîf  siècle  il  y  a 
eu  des  Roumains  entre  Casteliuiovo  et  S.  Servolo;  ils  si*  sont 
perdus  dans  la  masse  des  Slaves. 

L'ancienne  forme  Rimgîianî,  «  roumanisée  »  par  Urechiâ  (cL 
Burada,  102)  en  Râmknt^  superposce  à  G'n,  nous  a  donné  un 
nom  nouveau,  Ciciliam^  qui,,  un  peu  plus  tard,  par  dtssiniilation, 
s'est  développé  en  CiHriani.  Ce  sont  d'ailleurs  des  formes  rares. 
Je  ne  les  ai  jamais  moi-même  observées. 

Après  Tanalyse  précédente  nous  pouvons  conclure  que  les 
Roumain.^  de  Tlstrie  ont  emprunte'  leur  nom  Vlah  aux 
Slaves.  D*autrc  part  il  est  visible  que  les  Slaves,  d'après 
les  mots  roumains  très  usités  te^Hre^  hîre  ont  créé  les  noms 
Cîci  Cl  Cirihiri  ^  lesquels  sont  aujourd'hui  connus  dans  toute 
ristrie. 

Joseph  Pnpo\'Tci. 

DISETTE  =  DECFFTÂ. 

On  sait  que  le  verbe  latin  decipcre  est  souvent  synonyme 
de  fa  11  ère  :  Pline  l'Ancien  dit  par  ex.,  L  XVHL  >é  :  «  Sun: 
qui  properem  atque  ita  pranuntient,fcstinatam  sementem  saepe 
decipcre,  serotinam  scmpcr.  »  On  sait  qu'il  signifie  aussi  desti- 
tuerez sens  fréquent  surtout  dans  les  inscriptions  tumulaires 
où  la  fin  d'hexamètre  decepta  marito' équivaut  à  viduata 


t,  Carmbiû  latina  /ptgraphtca  cmkgfl  Ff.  Bunhiler^  1,  627.  4. 


TANT  MIEUX,  TANT  PIS,  TANT  PLUS,  TANT  MOINS    I25 

marito.  Rien  ne  s'opposera  par  conséquent  à  ce  qu'on 
regarde  disette  ou  disete^  anc.  fr.  dial.  disiete,  comme  le  déve- 
loppement de  decepta.  On  s'attendrait,  il  est  vrai,  à  *deisete 
^doisete  qu'on  ne  rencontre  pas,  mais  les  voyelles  atones  sont 
souvent  capricieuses*.  Quant  au  sens,  le  substantif  de  forme 
participiale  disette  decepta  est  à  faute  faite  fallita  comme 
decipere  est  à  fallere.  Ces  substantifs  signifient  «  manque, 
privation  »  et  peuvent  encore  à  l'occasion  se  dire  Tuii  pour 
l'autre.  Mais,  dira-t-on  peut-être,  décevoir  s'accorde  mal  avec 
disette,  La  parenté  de  decepta  avec  decipere  ayant  cessé 
d'être  sentie,  le  substantif  participial  se  dérobait  à  l'influence 
du  verbe.  Il  s'ensuit  que  decipere  et  aussi  recipere,  et 
recepta,  où  le  c  est  irrégulier,  ont  été  entravés  dans  leur 
développement  par  concipere  percipere  *appercipere. 

J.  Cornu. 

TANT  MIEUX,  TANT  PIS,  TANT  PLUS,  TANT  MOINS 

Tant  mieux,  tant  pis  appartiennent  à  l'usage  courant.  Jadis 
on  disait  aussi  tant  plus,  tant  moins  :  «  Tant  plus  y  estudions, 
tant  moins  y  entendons  »,  écrit  Rabelais.  Pant,  H,  X.  Les  dic- 
tionnaires enregistrent  tant  mieux  et  tant  pis  sans  analyser  ces 
expressions.  Ce  tant  est  un  ablatif  qui  répond  au  latin  tan;to 
dans  tanto  melius,  t.  peius,  t.  plus,  t.  minus.  Cet  abla- 
tif appartient  à  tout  le  domaine  roman  :  voir  Diez,  Gramm.  III, 
y  éd.  p.  395.  D'après  Mistral,  le  .prov.  a  tant  miéus  ou  tant 
meiou,  tant  pis  et  tant  mai;  le  port,  a  tant  mellm,  /.  peôr,  t. 
niaior,  t.  mais,  /.  mems,  Tesp.  tanto  mejor,  t.  peor,  /.  mayor,  /. 
inàs,  /.  menos.  Mais  nulle  part  cet  ablatif  ne  s'est  mieux  conservé 
qu'en  italien  où  il  est  encore  en  plein  us;ige.  Il  suffît  de 
renvoyer  à  Vockeradt,  Lehrbuch  der  ital.  Sprache  I,  §  434, 
Anm.  4.  L'italien,  l'espagnol  et  le  portugais  se  servent  cou- 
ramment aussi  de  l'abl.  quanto. 

J.  Cornu. 


I.  [Toute  séduisante  qu'elle  soit,  je  ne  puis  dire  que  cette  étymologie  me 
convainque  :  Vi  au    lieu   dV/,  oi    me  semble   insuffisamment  expliqué   par 


Ile 


MRLâî^GES 


POCHh  »  CUILLER  A  POT  » 

Outre  les  sens  bien  connus  de  ce  mot,  qui  semble  avoir  pour 
base  Tanglo-saxon  poccj,  Littré  mentionne  aussi  celui  de  w cuil- 
ler avec  b()yelle  on  sert  le  potage^  ainsi  dite  de  Sii  forme  ||  cuil- 
ler de  fer  avec  lin  long  manche,  dont  les  fondeurs  se  servent 
pour  puiser  le  mé^l  en  fusion  \\  cuiller  dont  se  sert  le  raffineur 
de  sucre",  et  rattache  expressément  ce  dernier  aux  premiers. 
L'Académie  (1878)  ne  connaît  pas  pock,  «  cuiller  »,  ou  ne  veut 
pas  le  connaître,  car,  à  Paris,  la  grande  cuiller  a  long  manche  avec 
laquelle  on  sert  le  potage,  se  dit  huche  et  non  poche.  Le  même 
mot  est  aussi  dans  le  compost'  pcKhe-cuiller^  qui  est  le  nom 
vulgaire  de  la  spatule,  dite  en  allemand  «  Lôffelreiher  »>.  Le 
mot  poche  au  sens  de  cuiller  semble  être  inconnu  aux  dialectes 
de  ia  région  française,  car  iimanqueaux  dictionnairesdes  patois 
que  j'ai  pu  consulter.  Cependant  on  le  trouvedans  un  texte  de  Tan 
145  î  cité  par  Du  Cange,  sou^ pachia  i  «  Jehan  F^speron,  cuisinier, 
frappa  le  suppliant  d'une  cuiller,  autrement  dit  poche  de  boisn, 
et  La  Monnaye  dans  le  Glossaire  des  Xikî  Btmrgniî^tmi  traduit 
poc!j€  par  a  cuiller  a  put  >»,  ce  qu'il  n'aurait  pas  fait  s'il  avait  cru 
le  mot  intelligible  à  ses  lecteurs  français.  Diinsla  Suisse  romande 
/vr/jret  le  diminutif /joc/io/î  '  appartiennent  ;ï  Tusage  journalier. 
Ce  sont  des  mots  empruntes  au  patois  qui  francisent  poisJ  et 
pot  son'',  et  par  lesquels  on  désigne  les  cuillers  i  pot, 

Piiche^  en  tant  qtHl  signifie  cuiller,  n'est  pas  le  même  mot 
que  poche  dzn%  poche  de  îmk  et  a  pour  base  le  latin  popia 
w  cuiller  en  bois  n  qu*on  rencontre  dans  le  Testamenium  pwcelll  : 
Eî  me  mmifmmh  coco  le^aio  dimitto  popia  m  et  pisliltnnu  ^f^T 
tnecum  aUukram^  ].  Cornu. 


un  w  caprice  «,  tt  révolution  sémantique  ne  me  paraît  pas  claire,  fc  songe 
deptii»  longtemps  d  une  luinc  cîtp ticiit ion  Je  ^i5c//^,  —  G.   P.] 

i>  Voir  k'  G/iK5iî/ri' fmrtwff^Gcnève»  Paris  1817,  ut  L.  Grangkr,  GiùSMiri 
frihoiir^tdii^  Fribûurg,  i864-lHl>8. 

2  Voir  Bridd,  Gh^siaift  du  ffMoiuh  la  Stfuîi  rmnatidi^.  ^  Poli^ ci  âérWéy 
>ont  particuliers,  ^emble-t-iJ,  -lu  franco -provcnçiil.  Ils  sont  i'n  us;igç  dans  r^rron- 
disvcmciJt  de  Pontarîtcr^  dans  k  Fore^»  en  Savoie,  a  ne  sont  pas  étrangers 
au\  patois  du  Jura  bernois,  ainsi  t^ue  me  Tapprend  le  Df  Dupasquîcr,  quoique  ires 
derniers  ne  iiîiem  plus  franco-proveriçaux,  mais  bourguignons*  A  Lyon  on  dit 
courammcm /î^iît'kwi  pour  u  louche  ».  Le  provençal  a  pùucîjotttî  au  sens  de 
gruide  cuiller  de  bots  (Mistral)»  mais  n*a  rien  qui  corresponde  à  potii. 


COMPTES  RENDUS 


£tymolOffiSChes,   von    A.    Tobler.    Berlin,    1902,  gr.  in-80,    12  p. 
(ExtTzït  dits  Sit:(un^sberichte  der  kon.  preuss.  Akademie^  1902,  VII). 

M.  Tobler  nous  donne  ici  trois  nouvelles  études  d'étymologie  française, 
toutes  trois  fort  intéressantes,  pleines  de  science  et  d'ingéniosité. 

Maquereauy  «  Kuppler  ».  L'auteur  signale  les  difficultés  qui  s'opposent  à  ce 
qu'on  reconnaisse  simplement  dans  ce  mot,  avec  Diez,  le  néerl.  makelaar, 
«  courtier  »,  et  suppose  que  d'un  verbe  maquUr^  «  arranger  »,  i<  néerl. 
maken),  dont  il  cite  au  moins  un  exemple  ',  on  a  tiré  maquerel,  soit  par  l'in- 
termédiaire d'un  *wj^/<«?r  *wa^M<'wr',  soit  directement  d'après  l'analogie  de 
couples  comme  sauter  satilerel  etc.  C'est  très  séduisant.  —  Passant  ensuite  à 
maquereau^  nom  vulgaire  du  scombre,  M.  T.  montre  qu'il  ne  peut  venir  ni 
de  macula,  ni  d'un  primitif  supposé  *maca;  il  est  porté  à  y  voir,  avec 
Mahn,  un  emploi  figuré  du  premier  mot  :  les  pécheurs  prétendent,  paraît-il, 
que  le  scombre  pousse  les  aloses  femelles  du  côté  des  mâles,  et  à  cause  de 
cela  ils  lui  auraient  donné  son  nom  actuels  11  ne  me  paraît  pas  impossible 


1.  L'autre  exemple,  tiré  des  Dits  artésiens  (VIII,  77),  est  douteux  (voy. 
Rom,,  XXVII,  493). 

2.  Parmi  les  dérivés  analogues  de  mots  en  -eor,  -eur,  M.  T.  cite  couperet  : 
je  crois  plutôt  que  couperet  est  originairement  un  adjectif  et  qu'il  est  pour 
coupere^y  c'est-à-dire  qu  il  appartient  au  groupe  des  adjectifs  en  -^rt^  que  l'au- 
teur lui-même  a  le  premier  étudiés. 

3.  Il  est  singulier  que  le  nom  français  de  ce  poisson  ait  pénétré  en  anglais, 
hollandais,  allemand,  danois,  suédois  et  norvégien  ;  c'est  généralement  l'in- 
verse qui  a  lieu.  L'emprunt  est  très  ancien,  au  moins  en  anglais,  comme  le 
montre  la  forme  mackareJ.  Dans  les  langues  romanes,  au  contraire,  le  mot  est 
à  peine  connu.  Rolland  cite  seulement  le  galicien  macreUy  qui  paraît  emprunté. 
Le  prov.  tmicareu,  d'après  Mistral,  ne  signifie  «  scombre  »-  qu'à  Avignon  (où 
le  sens  peut  être  emprunté  au  français)  ;  partout  ailleurs  macareu  n'a  que  le  sens 
d'«  entremetteur  ».  L'expression /air^  Ion  macareu,  «  attachera  la  pouj>e  d'un 
bateau  un  poisson  femelle  qui  en  attire  d'autres  qu'on  prend  avec  le  trident  », 
est  curieuse,  mais,  bien  que  s'appliquant  à  la  pèche,  elle  dérive  évidemment 
du  sens  d'  «  entremetteur  »>  et  non  de  celui  de  «  scombre  ».  —  Ce  qui  est  encore 
notable  dans  le  mot  provençal,  c'est  son  a,  qui  empêche  de  le  croire  dérivé 
du  français  (cf.  plus  loin). 


128  COMÎ*TES   RHKDUS 

ijuc  k  mat^nermu  w  mviiciiicikur  d'amour  w  d(.>ivc,  au  coiiiriitrc,  wjti  nom 
au  poisson,  soit  a  caust:  dt-  k  croyance  dont  celui-ci  ùxm  Tobjct,  soit  parce 
qu'on  attribuait  pt-utctre  ii  la  chair  de  ce  poisson,  qui  fiiît  son  apparition  au 
printemps,  des  vertus  aphrodisiaques  *.  M.  T.  remari|uc  hti-mcme  que  mûca-^ 
tdltis  (cf*  iingl.  mackarti  ^  prov  *  m<frari*«),  nmchtrel  comme  nom  de 
poisson  apparaît  dès  k  xti*^  siècle,  tandis  que  maqutrd^  «  entrenïetteur  «,  n*est 
signalé  qu^;  pour  la  st;conde  moitié  du  XiW.  SI  on  regardait  la  conjecture  cî- 
dessus  comme  fondée  *,  il  resterait  i^i  chercher  réiynioîogie  du  ne  m  du  poisson  ». 
Frâyit\jtQfT^ffûh.  Les  remarques  sur7>jj>T(m  a.  fr.  Jrdirjroier  <;  fr- 
care)  ne  sont  qu'îuirod actives.  Le  principal  intérêt  de  Tarticle  est  d^ins  ce  qui 
concerne  l'a.  fr,  ymV,  «  briser  ji,et  le  UJrais.  Pour  le  premier,  lauteur  peiise 
quHÏ  représente  fratjdare,  en  supposant  que  le  sens  intransirif,  *  se  brisa- 1», 
est  le  sens  primitiL  et  en  comparant  le  sens  analogue  qu'ont  en  anc.  iV,  /ttUtîr, 
nutttir\  dnmffUir  et  JamSiT  (qui  est  de  même  transi rif  et  inlransitif).  Cette 
étymolo^ie  est  fort  belle,  et  peut  bien  être  vraie  :  j*ai  toutefois  quelques 
doutas  :  le  passage  du  sens  iniransiiif  au  transitif (wm/i>,_/4ii7/ïr»  ne  lont  pas 
fait*)  est  plus  difficile  que  l'inverse  (conirne  dansy^iiMi^r),  et  d'autre  pan  fr^ 
beaucoup  plus  employé  transiti\X'ment  qulntransitivemcnt.  a  dans  son  sens 
quelque  chose  à  la  fois  de  précis  et  de  violent  ^  qui  ne  parait  pas  ti^s  bico 


1 .  Le  nutquereau  était  aussi  appelé  pulsion  ifûvriK  et  ee  notn  a  passé  Jk 
i*ent  remet  leur  ;  mais  ce  peut  être  un  simple  jeu  de  mots  fondé  sur  les  deux 
sens  qu*avaît  le  mol  maquerfan^  d*autant  mieux  que  cet  emploi  de  potHôfi 
if  avril  n  apparaît  pas,  que  je  sache  ^  avant  k  xv^  siècle.  Aujourd'hui  pôîn&f% 
tout  seul  est  svnonynïc  de  nmittimm  au  sens  spécial  de  v  souteneur  >» 
que  CK  mot  a  pris,  et  en  argot  tfas  ifrt  ou  même  simplemenï  rfo5  a  le  même 
îSfens.  On  peut  se  demander  aussi  quel  rapport  il  y  a  entre  le  potsntn  d'tnnl. 
nom  du  maquereau,  el  \q  piHHon  d'uvril  désignant  une  farce  laite  le  i^f  avril 

2.  Ce  qui  peut  paraître  Tappuyer,  c'est  la  restriction  du  sens  de  maqutrmit, 
appliqué  a  un  honniic,  en  françiiis  :  s*il  dérive  de  matfuîtr,  «  arranger  (une 
affaire)  m,  pourquoi  se  présente-t-îï  uniquement^  dés  s<in  apparition^  avec  le 
sens déshonnéte  qu'on  sait?  —  Le  uom  ù'aif^^fin  donné  v^  a  un  officier  dln- 
fanterie,  2^  i  un  aventurier  peu  ^TUpulcux,  provient  il  du  nom  du  poisson? 
Il  faudrait  trouver  une  analogie.  Rabelais  emploie  le  mot  at^refin  pour  dési- 
gner une  certaine  monnaie  turque  :  d  où  vient  ce  mot»  qui  pourrait  être  ie 
point  de  départ  û^s  sens  figurés  d\iii,'njiii  ? 

j.  M,  T.  ne  parle  pas  du  mot  maqhfrtati,  t-  t^che  aux  jambes  causée  par  le 
voisinage  du  feu  n  (de  même  prov.  macattu)  :  je  ne  sais  comment  ce  sens 
OomK'  en  désuêtuiic)  se  rattache  auK  deux  autres. 

i.  M*  T.  cite  toutefois  pour  fa  tlitr  un  exemple  dk-  7rùk  (8807)  i  TrfH€iMn; 
fufijûf^  lii%put^,  Lauhen'  éiToni  d  htnîk  el  jalt  et  M.  L.  Constans  a  bien 
voulu  m'tnfomier  que  cette  le^on  est  bien  celle  qui  devra  figurer  dans  le  teîite 
critique.  Dftmrfiîir  est  pris  transi tivemeîit  au  sens  de  •  céder  m  sous  Tb- 
fluence  de  aon  emploi  transitif  au  sens  propre, 

y  Ffwt  signifie  "  briser  violemment,  mettre  en  miettes  »^  tandis  que 
Jitâhr,  tnaUtr^dnmfniit\Jainu'r  ne  s'appliquent  qu'aux  mailles  de  haubert,  de 
Il  broigne  ici.  ropposition  avec  fraindn  dans  M&ins  mns  frais ^  mainte  i^rûignt 


A.  TOBLER,  Eiymologisches  129 

s'accorder  avec  l'origine  proposée  *.  —  Je  ne  puis  au  contraire  que  me  rallier 
à  l'explication  à^  frais,  originairement /rai/,  non  point  par  l'ail,  frïd,  mais  par 
le  lat.  frac  tu  m,  qu'avait  déjà  proposé  Littré*  :  payer  le/ra//,  c'est  propre- 
ment payer  le  bris,  le  dégât;  le  mot  étant  surtout  employé  au  pluriel,  lesfraii^ 
plus  tard  les  frais,  on  a  cru,  par  une  erreur  dont  il  y  a  plus  d'un  exemple, 
que  le  singulier  était/rai  (M.  T.  relève  certe  forme  déjà  dans  un  texte  antérieur 
au  xiiic  s.),  et  on  en  a  tiré  les  verbes  frayer  et  dif rayer.  Ce  qui  prouve  qu'il 
ne  s'agit  pas  ici  de  frïd,  c'est  d'abord  que  la  forme  la  plus  ancienne  et  la  plus 
régulière  du  sing.  est  frait  (d'où  l'anc.  fr.  fraiiier)  et  ensuite  que  «  jamais  et 
à  aucune  époque  en  anc.  fr.  le  mot  ne  se  présente  avec  ei  ou  0/,  qui  aurait 
dû,  tout  au  moins  à  l'origine,  sortir  d'un  /  bref,  mais  a  toujours  ai  ou  l'^ 
qui  en  est  venu  ».  L'auteur  termine  par  cette  intéressante  suggestion, 
qu'il  faut  espérer  qu'il  développera  :  «  Si  le  néerl.  vracbt  (ail.  Fracht)  n'est 
pas  aussi  égal  à  frac  tu  m  et  si  par  conséquent  le  fr.  fret  n'est  pas  simple- 
ment le  sing.  dcfraiSy  c'est  ce  que  je  ne  veux  pas  examiner  ici;  je  dirai  seule- 
ment que  je  ne  vois  pas  ce  qui  s'opposerait  à  cette  hypothèse.  » 

Narguer.  L'étymologie  proposée  pour  ce  mot,  ou  plutôt  pour  nargue,  d'où 
serait  sorti  le  verbe,  est  très  inattendue  :  nargue  serait  composé  de  la  négation 
ne  et  de  argue  y  subjonctif  du  verbe  ardre  ou  ardoir^  «  brûler  »,  employé 
impersonnellement.  On  aurait  dit  n'argue  comme  ne  chaiîîe  :  «  que  cela  (ce  qui 
a  été  dit,  fait,  pour  effrayer,  humilier,  blesser)  ne  brûle  pas»,  ce  qui  équivaut  à 
dire  :  a  que  cela  soit  comme  n'étant  pas,  qu'on  s'en  moque.  »  «  Puis  nargue, 
peut-être  après  avoir  été  quelque  temps  senti  comme  interjection  (ce  qui 
explique  Vs  de  nargues  dans  Rabelais,  IV,  53),  a  pris  la  forme  d'un 
substantif,  si  bien  qu'on  a  dit  faire  nargue  à,  dire  nargue  de,  locutions  qui  ne 
signifient  pas  la  même  chose  qutifaire  fi  de,  mais  qui  grammaticalement  ont 
la  même  valeur,  et  ce  substantif  est  devenu  le  point  de  départ  pour  le  verbe 
narguer ^  qui  est  à  nargue  ce  que  pester  est  à  l'exclamation  peste,  et  qui  a  pris  la 
construction  dérailler  et  (anciennement)  de  wo^w<t,  c'est-à-dire  la  construction 
transitive.  Que  je  ne  sois  pas  en  état  de  citer  en  ancien  français  nargue 
•  n'importe  »,  cela  me  peine,  mais  ne  me  trouble  pas.  L'ancienne  littérature 
française,  que  d'ailleurs,  naturellement,  nous  sommes  bien  loin  de  connaître 
dans  toute  son  étendue,  ne  contient  certainement  pas  toute  la  langue  de  l'an- 
cienne France.  La  tournure  dont  j'ai  essayé  de  rendre  vraisemblable  l'existence 
à  un  moment  donné  peut  très  bien  n'avoir  été  usitée  que  dans  des  limites 


faussée)  et  veulent  dire  proprement  non  qu'elles  sont  brisées,  mais  qu'elles 
sont  mises  hors  de  service,  qu'elles  se  distendent  ou  se  disloquent  et  laissent 
passer  l'épée  ou  la  lance. 

1 .  En  note,  M.  T.  se  montre  disposé  à  abandonner  son  étvmologie  de  estuei, 
est  opus,  pour  stupet,  étant  à  peu  près  convaincu  par  1  explication  séman- 
tique de  M.  Walberg(cf.  Rom.  XXXI,  175). 

2.  Aussi  pourrait-on  penser  à  frac  tu  s,  «  bris  »,  plutôt  qu'au  part,  frac- 
tum. 

Romani  a,    XXXII  O 


1^0  COMPTES   RENDUS 

restreintes  et  aimin  avoir  pa?^  pénétré  dstn^  la  littérature  jusqu'au  jour,  peut-être 
au  XVI «  siècle,  où  un  écrivam  de  talent  Vy  aura  introduite.  D^iilleurs,  si  au- 
jourd'hui je  ne  la  connais  pas,  qui  me  dit  que  demain  elle  ne  sera  pa^  signa- 
lée par  nn  autre?  a  On  pourrait  à  la  rigueur  admettre  a:  raisonnement  si 
e'éuic  seuîement  la  locution  ti'argnê  (ou  tCargtr  n'ardt,  ou  encore  tCart)  t^ui  fit 
délaul  dans  ce  que  nous  conn.iissonî»  de  la  vieille  langtie  française  (qui  sans 
être  complet,  est  cependant  considérable);  mais  ce  qui  est  bien  plus  grave, 
c'est  quon  n'y   rcncontr*^  pas  non  plus  un  seul    exemple  û'ardrc  È:mplo\'c 
au  sens  de  chahîr  :  on  ne  trouve  jamais   il  art,  il  m' art,  cui  art?  comme 
tl  dntttt,  il  me  chaut,  cui  chaut  ?  non  plus  que  fi*art  ou  nar^f  comme  m  clmtd 
ou  ne  àmlh.  Dès  lors  lu  construction  si  ingénieuse  de  M*  T.  n'est -elle  pas 
tout  à  fait  en  l'air?  »  —  Ajoutons  qu'elle  n'est  pas  moins  hasardeuse  du  côté 
de  la  forme  que  du  côté  du  stns.  Les  verbes  en  nire,  dit   M*  T,,  ont  des 
formes  en  g,  où  nous  sommes  portés  à  attribuer  an  g  la  valeur  de  t»  n^ais 
où  il  peut  très  bien  avoir  la  valeur  de  g,  comme  l'indique  la  graphie  parf  i^ 
devante,  o{argani^  argùit)  et  surtout  la  graphie  tff/wi^u^^  aitesièe  une  fois  pour  i 
le  subj,  fïispardrt.  Mais  remploi  du  g  devant  a^  &  dans  les  textes  picards  ne 
prouve  nullement  (et  M.  T.  le  reconnaît  lui- même)  la  valeur  d'espiosive  de  la 
consonne*  et  quAni  k  cspargue,  il  répond  au  latinspargat  et  n*est  pas  compa- 
rable à  un  ar^tte  <  ardeat.  Bien  qu'on  cite  quelques  exemples  de  iaagt  z^ 
iangt(f,  remploi  de  g  pour  gu  devant  ty  i  est  beaucoup  plus  rare  que  celui  de 
g  pour/  devant  a,  o,  et  si  on  avait  prononcé  affui^  il  serait  très  surprenant 
qu'on  ne  le  trouvât  jamais  ainsi  écrit.  Je  ne  crois  pas,  pour  ma  part,  que 
g  <  d|  appuyé  ait  pu  dt: venir  f,  et  ni  Tît.  irn^o,  ni  le  prov.  arga,  perga  ne 
me  semblent  îe  prouver  ni  pour  ces  langues  elles-mêmes  (où  il  s^agit  à  mon 
avis  de  faits  d'amiogie  et  non  de  phonétique)  ni  surtout  pour  le  français'. 
—  L'étymologie  d'un  mot  qui  n'apparaît  qu'au  xvic  siècle  est  toujours  très 
liasardeuse;  je  suis  toutefois  porté  a  croire  que  nargur  ou  narguer  se  rattache, 
comme  on  Ta  supposé  depuis  longtemps,  soit  X  nares^  soit  plutôt  a  nasus 
par  un  dérivé  nasîcare»  qui  a  donné  en  anc,  fr,  naquifr  {voy\  Godcfroy,  s.  v, 
naquir,  ci  Rom.,  XXII,  6S;  norm.  «^^rtfr),  d*où  rttnasqimr,  tt.  mod.  renâcler^. 


I,  Cet  emploi  d'ardere  ne  mï  préseme  non  plus  dans  aucune  autre  langue 
romane  ;  il  n'a  jamais  que  le  sens  de  «  brlikr  »  et  l'emploi  personnel*  tandis 
que  ca  1ère  en  italien,  provençal  et  français  n'a  que  remploi  impersonnel  ei 
le  sens  lïgJJré* 

3.  M.  T.  suppose  aussi  que  de  morgûni  ~-  mordant  «  un  chemin  pourrait 
conduire,  par  le  verbe  (attesté)  morgtur^  tiré  par  erreur  de  ce  participe,  au 
fr.  mod.  ttwtgm  »*  Je  ne  connais  marguif  (xvi^  s.)  qu'au  sens  moderne  ei  ne 
sois  pas  comment  le  rattacher  pour  le  sens  ii  mùrdre. 

j.  M.  Tobler  montre  que  Littré  a  commis  sur  le  sens  d'un  namusâtè  par 
Carpentier  une  méprise  qui  a  été  reproduite  par  d'autres,  et  sur  laquelle  il  a 
construit  son  étymologie. 

4-  LcDiCi  j^/ra.,  qui  de  rmdcUr  renvoie  à  la  forme  antérieure  rmdqmr,  rgnéS- 
^ufft  dit  cependant  :  m  Origine  inconnue».  Elle  ne  me  parait  guère  douteuse. 


ANDRAUD,  Raimon  de  Miraval  131 

La  forme  narguer,  avec  changement  bien  connu  d'5  en  r  devant  sonore  et  son 
sens  particulier,  appartiendrait  à  un  dialecte,  d'où  le  mot  aurait  passé  dans  la 
langue  générale  '. 

G.  P. 


P.  Andraud.  La  vie  et  Fœuvre  du  troubadour  Raimon  de 
Miraval.  Étude  sur  la  littérature  et  la  société  méridio- 
nales à  la  veille  delà  guerre  des  Albigeois  (thèse  présen- 
tée à  la  Faculté  des  Lettres  de  TUniversité  de  Paris).  Paris,  Bouillon,  1900, 
in-8ode  V11-270  p.  ^ 

Écrire  tout  un  livre  sur  un  troubadour  dont  l'œuvre  est  uniquement  com- 
posée de  chansons  amoureuses  dans  lesquelles  deux  vers,  sans  plus,  renfer- 
ment une  vague  allusion  à  l'histoire  politique,  cela  parait  une  gageure  bien 
imprudente.  Cette  gageure,  M.  A.  l'a  tenue,  et  il  l'a  gagnée.  De  ces  270  pages 
pas  une  n'est  de  trop  :  s'il  s'y  trouve  quelques  longueurs,  il  \\y  a  pas  de 
hors-d'œuvre  proprement  dits,  et  pas  un  instant  notre  attention  n'est  lassée; 
la  majeure  partie  du  livre,  au  contraire,  se  lit  avec  un  vif  plaisir  et  un  intérêt  sou- 
tenu. Cela  tient  d'abord  à  l'heureuse  et  logique  disposition  des  matières,  et  aussi 
à  un  réel  talent  d'exposition  :  certaines  analyses  psychologiques  ou  littéraires, 
notamment,  ont  inspiré  à  M.  Andraud  des  pages  à  la  fois  précises  et  délicates 
qui  n'étaient  nullement  faciles  à  écrire.  Les  traductions  sont  aussi  en  général 
fort  réussies,  M.  A.  ayant  très  heureusement  «  interprété  »  les  expressions 
techniques,  à  la  fois  si  nettes  dans  le  fond  et  si  vagues  dans  la  forme,  de  la 
langue  des  troubadours.  J'avoue  pourtant  que  je  préférerais  parfois  un  peu 
moins  d'élégance  et  un  peu  plus  de  littéralité. 

J'ai  loué  le  plan  de  M.  Andraud.  Il  est  d'une  grande  simplicité  :  après  une 
introduction  (p.  i-ioj  assez  peu  originale,  mais  bien  informée  et  agréablement 
écrite,  sur  «  le  Languedoc  et  le  nord-est  de  l'Espagne  à  la  fin  du  xii^  siècle  », 
ou  plus  exactement  sur  le  milieu  où  vécut  Raimon  de  Miraval  et  les 
cours  qu'il  fréquenta,  M.  A.  étudie  successivement  la  vie  du  poète  (p.  1 3-163), 
et  son  oeuvre  (p.  167-21 1);  divers  appendices  nous  donnent  le  texte  de  l'an- 
cienne biographie  et  des  ra^os,  ainsi  que  des  extraits  des  biographies  modernes, 
l'analyse  ou  le  texte  de  documents  d'archives  concernant  la  famille  de 
Miraval,  et  une  analyse  métrique  des  chansons  du  troubadour.  Toutes  ces 
parties  étaient  nécessaires,  et  elles  sont  à  leur  place  ;  mais  j'avoue  que  j'en 
aurais  autrement  compris  l'importance  respective   et   autrement   réglé  les 


1 .  Le  fait  qu'on  a  -guer  et  non  -f  iVr,  -gne  et  non  -ge,  ferait  penser  à  une 
provenance  méridionale  ;  mais  le  prov.  nargo,  iiarga  est-il  ancien  ? 

2.  Le  volume  n'a  paru  qu'en  juin  dernier,  la  soutenance  ayant  été  retar- 
dée jusqu  a  cette  date. 


132  COMPTKS    RKNDUS 

dimensions.  M.  A.  me  paraît  surtout  avoir  trop  insisté  sur  la  biographie  et 
trop  peu  sur  l'étude  littéraire  :  dans  la  première  partie  il  se  trouvait,  par  la 
force  des  choses,  plongé  dans  le  domaine  des  ombres  ;  la  seconde,  au  con- 
traire, lui  otFrait  un  terrain  solide,  où  Ton  s'étonne  qu'il  n'ait  pas  pris  plaisir  à 
s'installer  plus  délibérément. 

Tout  d'abord  la  date  de  la  vie  du  poète  a  posé  à  M.  A.  un  angoissant  pro- 
blème :  toutes  les  œuvres  de  Mira  val  qui  sont  susceptibles  de  datation  se 
placent  entre  1 190  environ  et  121 3  :  d'autre  part  M.  A.  croit  avoir  retrouve 
son  nom  mentionné  dans  des  documents  d'archives  qui  conduiraient  à  placer 
sa  naissance  vers  1 1 5  5 .  Or,  toutes  ses  chansons  ne  sont  pas  des  chansons 
d'amour  ordinaire,  œuvres  banales  où  le  cœur  n'a  aucune  part  et  qui  pou- 
vaient même  être  composées  pour  un  tiers  :  quelques-unes  nous  montrent  un 
Miraval  vraiment  amoureux,  torturé  de  désirs  et  de  jalousie.  L'une  des 
femmes  qu'il  a  chantées,  celle  qu'il  appelle  Mais  d*aniic\  n'est  nullement  la 
maîtresse  banale  figée  dans  une  olympienne  impassibilité  :  c'est  une  fieffée 
coquette,  dont  les  manèges  apparaissent  clairement  à  travers  quelques  strophes 
d'un  aspect  singulièrement  passionné  ;  bien  qu'il  la  servt  depuis  trois  ans  ' 
{S'adng  Jos),  il  n'a  rien  obtenu  «  que  l'espoir  »,  et  il  l'implore  en  vain, 
comme  Alceste,  de  se  déclarer  nettement  : 

Ops  es  que  vas  me  s'oscl.iirc 
0  Jcl  tôt  me  dcsman. 

{Knqiwr  non  a,  dans  Malin,  Ged.,  n"  1118.) 

}i!lle  le  bannit  de  sa  présence  {ScJh  que  de  chantar)  et  fait  à  ses  rivaux  le 
meilleur  accueil  ;  les  torts  de  celte  c  ipricicuse  amante  lui  sont  clairs  comme 
le  jour  :  mais  dès  qu'elle  ouvre  la  bouche,  les  rôles  sont  retournés  et  c'est  lui 
qui  implore  son  pardon  : 

Quels  sieus  tort/  sembla  vertat/. 
(lolssieus  bels  Jigz... 

[Pufis  vn^an^  dans  Mahn,  GctI.,  n"  1109,  cuupl.  5.) 

Les  plus  légères  avances  le  rengagent  et  lui  arrachent  des  cris  de  joie  :  il  avoue 
qu'il  a  eu  tort  d'être  si  pressant  et  promet  de  ne  plus  ess;iyer  de  tout  com- 
prendre dans  la  conduite  de  sa  dame  (Ihtt  hii).  \l\\  vain  d'obligeants  amis 
e^>aient-ils  de  l'éclairer  sur  son  nuilheur  : 

Alsbim  \etion  tup  d■e>i.li^ 
Dire  ni.i  ^rcu  nuNabens».i  ^ 

(Al  a  m  \igta  ofn .  cou  pi .  } .  ) 


1.  V()\e/  p.  112,  n.  2,  la  li>te  des  pièces  où  est  nommée  Mais  d'amie. 

2.  Aille'.ir>  de[Hiis  Jeux  ans  cinq  mois  {liuqutr  non  a  i^'ain). 

V  C'/est-â-dire  :  .'  ils  me  disent  ce  qu'il  m'est  pénible  d'entendre  ;  ils  me 
font  sur  nî.i  J.ame  de  mauvai-.  rapports.  »  M.  A.  comprend  diMic  à  rebours 
quand  il  p.irlc  •■.  des  !v\:iî^  q  Je  les  médisants  fi)nt  courir  sur  son  compte  » 
(il  lui  Miraval;.  Des  .seniinienis  analogues  sont  e.xprimés  dans  5elh  que  de 
d\intar.  , 


AKDRAUD,  Ratmon  de  Miraval  133 

Il  refuse  de  les  écouter,  les  accuse  de  perfidie,  et  se  jette  dans  la  mêlée 
pour  défendre  sa  dame,  ridicule  paladin  d'une  cause  à  laquelle  personne  ne 
croit  {lyamors  es  tot:;;^:  —  Tôt  quant  fa^  de  ht).  Il  y  a  d  ailleurs  çà  et  là  des 
allusions  à  des  événements  réels  :  le  poète  maudit  une  traîtresse  qui  a  mis 
le  trouble  entre  lui  et  celle  qu'il  aime  (D'anior  es  totO  ;  il  parle  à  deux  reprises, 
en  termes  du  reste  fort  obscurs  (Selh  que  de  chantaVy  S'ieu  en  chantan)^  d'un 
anneau  qui  parait  avoir  joué  un  grand  rôle  dans  l'histoire  de  ses  amours.  Se 
figure-t-on  toutes  ces  pièces  écrites  par  un  homme  de  55  à  75  ans?  Que  Ton 
puisse,  à  cet  âge,  ressentir  tous  ces  sentiments,  soit  ;  mais  qui  se  résignerait 
à  les  exprimer  tout  haut,  dans  des  pièces  destinées  à  la  plus  large  publicité? 

Il  y  avait  un  moyen  bien  simple  d'écarter  cette  grosse  difficulté,  et  j'avoue 
que  j'y  aurais  recouru  sans  hésitation  :  c'était  de  ne  pas  identifier  le  trouba- 
dour avec  leRaimon  de  Miraval  nommé  comme  témoin  dans  un  acte  de  11 57 
(Appendice  I,  no  7)'.  Je  ne  veux  pas  m'engager  dans  une  recherche  généalo- 
gique qui  paraît  sans  issue;  je  remarque  seulement  que  l'on  trouve,  dans 
l'acte  de  1157  ^^  ""  autre  un  peu  postérieur  (n©  10),  trois  frères  nom- 
més Raimon,  Raimon-Ugo,  Bemart,  plus  une  soeur,  Vidiana;  et  dans  un 
autre  de  121 3  (n«  18),  deux  frères,  Raimon,  Guilhem,  plus  Raimon-Ugo  leur 
ne\x*u,  et  Alfansa  leur  sœur.  N'y  a-t-ilpas  là  vraisemblablement  les  représen- 
tants de  deux  générations,  et  le  Raimon  de  121 3  ne  peut-il  pas  être  le  fils  de 
celui  qili  avait  l'âge  d'homme  en  11 57?  L'habitude,  si  fréquente  alors,  de  se 
transmettre  les  prénoms  de  père  en  fils  autorise  parfaitement  cette  hypo- 
thèse. 

Les  allusions  à  des  personnages  contemporains  sont  fréquentes  chez  Miraval  ; 
ceux-ci  sont  malheureusement  désignés  le  plus  souvent  par  des  pseudonymes  ; 
c'est  une  tâche  pénible  et  décevante  que  d'essayer  d'en  pénétrer  le  secret,  et 
M.  A.  a  perdu  là  bien  des  pages.  Qu'Audiart  soit  Raimon  VI,  le  biographe  le 
dit,  et  nous  voulons  bien  croire  qu'il  le  savait;  mais  que  Pastoret  soit,  comme 
le  pense  M.  A.,  Raimon-Roger  de  Béziers,  rien  de  moins  certain  :  celui-ci, 
en  effet,  avait  quinze  ans  «  à  la  date  qui  marque  à  peu  près  le  centre  des 
aventures  »  auxquelles  M.  A.  veut  le  mêler.  Au  reste  je  proteste  moins 
contre  cette  identification  er.  particulier  que  contre  une  regrettable  obsti- 
nation à  agiter  longuement  des  problèmes  insolubles. 

Les  chapitres  relatifs  aux  «  aventures  galantes  »  de  Raimon  de  Miraval 
sont  évidemment  parmi  les  plus  soignés  du  livre;  ils  sont  aussi  parmi  les 
plus  intéressants.  J'avoue  néanmoins  qu'eux  aussi  je  les  aurais  bâtis  un  peu 
différemment.  M.  A.  se  résigne  en  général  — -  quoiqu'il  lui  en  coûte  visible- 
ment —  à  s'abstenir  de  toute  hypothèse  sur  les  personnalités  dissimulées  sous 
tel  ou  tel    senhdl;  mais  il  veut  à  toute  force  retrouver  l'ordre  chronologique 


I.  Rien  dans  cet  acte  ne  nous  amène  nécessairement  à  l'identification 
admise  par  M.  A.  :  Miraval,  selon  sa  biographie,  avait  trois  frères,  et  ici 
deux  seulement  sont  nommés. 


^ 


TÎ4  COMPTES  RENDUS 

des  pièces.  Voilà  encore  une  tetiutîve  chimérique  *  :  la  nature  des  sentîmenîs 
exprimés  n*es!  éviJemment  pas  id  un  point  d'Appui  suffîsam,  et  1j  rupture  U 
plus  caractérisct'  a.  pu  t-ire  suivie  d*unc  rùcoiidliation  et  d'un  renouvtratj  de 
passion  Retrou  ver»  d'aprcii  k  ton  des  envois,  qudles  fenimt^  Mira  val  a  sim- 
plement prétendu  louer,  lesquelles  il  a  aimées,  et,  d'après  les  pièces  mûmes, 
de  quelle  sorte  d*amour,  voil;'^  évidemment  tout  ce  que  permettait  Tètude 
directe  des  ch^iniions. 

Les  auteurs  dera^pj  prétendent  en  savoir  bien  davanta^eT  et  M.  A,  ne  pou- 
vait pas  ne  pas  discuter  leur  témoignage  il  la  fait  en  génOnil  avec  une  cri- 
tique avisée»  mais  trop  timide,  trop  peu  décisive  en  ses  conclusions*  Ce  qui 
ôtc  encore  à  la  netteté  de  celles  ci.  c  est  que  cette  discussion  est  méïéc  aux 
chapitres  dont  je  viens  de  parler,  U  valait  la  peine,  ce  me  semble,  d^éludîer 
en  elles-mêmes  ces  ni^oj,  de  îes  étendre,  si  je  puis  dire,  sur  la  table  de  dissec- 
tion, et  de  montrer  comment  elles  avaient  été  fabriquées  :  on  fût  arrivé,  je  croîs, 
à  cette  conclusion  que  tous  les  éléments  en  ont  été  puisés  dans  les  chansons , 
ou  mal  comprises,  ou  interprétées  avec  une  incroyable  fantaisie. 

Nous  pouvons  écart  jr  d'abord  les  trois  dernières,  La  troisième  n'çsi,  comme 
le  remarque  M.  Chahaneau,  qu'une  variante  du  début  de  îa  quatrième,  et  la 
cinquième  prête  ,^  Miravaî  un  rôle  poliîique  dont  rimpi>nance  n'a  pu  être 
prise  au  sérieux  par  persontie  (ce  serait  lui  qui.  dans  ! 'espoir  de  recouvrer  son 
château,  aurait  décidé  Pierre  d'Aragon  à  joindre  ses  troupes  à  celles  de 
Raimon  VI).  Quant  a  la  quatrième,  où  il  est  raconté  comment  M  ira  val  repu* 
dia  sa  temme  pour  obtenir  la  main  d'Ermengardc  de  Castres,  qu'OH^'ier  de 
Saissac  aurait  ensuite  épousée  à  sa  b^rbe.  M.  A,  en  a  tait  bonne  justice  et 
montré  que  c'était  un  pur  roman  ^  M.  A,  ayant  lui-même  mis  hors  de  doute 
rifianïté  des  renseignements  contenus  dans  trois  rtiioi  sur  cinq,  il  est  étrange 
qu'il  ait  cru  pouvoir  emprunter  quelque  chose  aux  deux  autres.  Examinons^ 
les  brièvement  a  notre  tour. 

La  première  raconte  comment  la  Loba  de  Pucnautier,  après  avoir  lait  à  Mira* 
val  des  avances  intéressées,  lui  préféra  le  comte  de  Foix,  comment  le  trouba- 
dour«  avec  Fa rri ère-pensée  de  la  ïromper,  prit  ardemment  sa  détense,  et  com 
ment,  après  en  avoir  été  récompensé,  U  l'abandonna  pour  la  marquise  de 
Miner\^e,  M.  A.  a-niarque  bien  {p.  104)  que  «  la  concordance  entre  la  r^i^o  et 
le  texte  »  des  chansons  n'est  pas  absolument  complète  ;  néanmoins  il  ne  signale 
nulle  pan  h  caractère  rottunesque  de  la  première»  et  il  lui  emprunte  même  un 


t ,  Sauf  pour  deuil  ou  trois  pièces  qui  portent  en  elles-mêmes  des  indici- 
tions  chron*)logiques  et  pour  celles  où  sont  nommés  des  personnai^es  histo- 
riques comme  Audiart  ou  le  roi  d'Aragon;  mais  on  voit  combien  étendues 
sont  ïcj  limites  où  ces  indications  permettent  de  se  mouvoir. 

1,  Sa  démonstration  est  excellente,  mais  un  ptu  longue;  U  lui  suffisait  de 
rappeler  que,  dans  un  des  slrveoté^  sur  lesquels  s'est  appuyé  fauteur  de  la 
ra^o,  Mataplana  engage  Mtr;îval  a  reprendre  *ta  femme  ( vers '^i,  î7*K>  :  îl  n*y 
av4ii  donc  eu  ni  divorce  ni  répudiation. 


haà 


ANDRAUD,  Raitmn  de  Miravnl  ijj 

rensei^ement  précis,  k  îuvoir  que  la  Loba  serait  la  femme  chiintcc  par  le  pcïtrte 
sous  le  nom  de  Mah  damk  \  C'est  tC*moîgner  trop  de  confiance  à  \a  miô. 
Remarquons  d'abord  qull  n'y  a  pas  dans  ce  r^cit  la  memiou  d'tjti  seul  person- 
oage  qui  ne  soit  emprunté  aux  chansons  de  M  ira  val  ou  à  la  biographie  de 
Peîre  Vidal  ;  la  liste  des  pr^Hendus  adorateurs  de  la  Loba  provient  en  grande 
partie  du  sirventés  A  Dita  me  cmmm^  Bayona  ',  Ce  r^cit  est  du  rcîitc,  dans  son 
ensemble,  fort  invraisemblable  :  M  ira  val»  qui  est  censé  ne  louer  la  Loba  que 
dans  Tintent  ion  de  la  bafouer  ensuite^  commence  par  entretenir  avec  elle  de 
longues  relations  {ac  dtlith  tôt  so  qui  aluiplac  hnga  Sit^ù),  et  il  ne  l'abandonne 
que  quand  une  occasion  favorabk  se  présente  k  lui.  Mais  cette  invraisemblance 
n*est  rien  k  càié  du  contresens  sur  lequel  repose  tout  Je  récit  :  il  est  en  elîct 
en  contradiction  absolue  avec  la  pièce  qu'il  prétend  expliquer.  Il  fallait  vrai- 
ment que  son  auteur,  qui  avait  du  reste  un  joli  talent  narratif  ï^  eût  mie  bien 
médiocre  idée  du  sens  critique  de  ses  auditeurs*  lî  affirme  que  Miraval  aban- 
donna la  Loba  pour  la  ntarqulsc  de  Minerve  *.  Qr»  que  dit  la  chanson  a 
laquelle  ce  récit  sert  d'introduction  (5* /Vu  en  cantar  sot^ett)  ?  Exactement  le 
contraire,  Miraval  y  dit  très  nettement  que  s'il  n'a  rien  obtenu  de  celle  qu'il 
aime  (Maii  d'amie),  il  a  fmî  par  s'y  résigner,  et  qull  est  résolu,  puisqu'elle 
se  bisse  cotirtiscr  par  d'autres  adorateurs,  â  lui  rendre  h  pareille  et  à  courir 
lui-même  d'autres  aventures,  sans  que,  du  reste,  tl  renonce  pour  cela  à  son 
service  :  fi  des  reproches,  des  injures  malséantes,  et  vive  pour  chacun  une 
honnête  lïbené  !  Voilà  la  pensée  qui  donne  à  la  pièce  tout  son  sel  et  tout  son 


t.  Cette  identification  n'est  pas  donnée  en  propres  termes,  mais  elle 
risuhe  de  ce  fait  que  les  chansons  alléguées  sont  celles  adressées  à  Mah 

2,  A  ce  slrventés  est  empruntée  la  mention  de  Bertrand  et  d'Olivier  de 
Saissac,  d'Aîmeric  (de  Montréal  est  une  addition  de  la  ra^oj^  de  Peire  ttogier 
(qualifié  ici  u  de  Mirepoijs  #  et  substitué  à  son  homonyme  <*  de  Carcas- 
sonne  •»);  la  ra{o  ajiiute  le  comte  de  Foix  et  Peire  Vidal  d'après  la  biographie 
de  ce  dernier.  Le  nom  de  Gfnt  Esqmu,  attribué  dans  deux  manuscrits  à  la 
marquise  de  Minerve»  doit  aus^ii  provenir  du  sirventés  (v,  ^4),  La  première 
jurtie  tout  entière  da  récit  est  empruntée  à  ta  même  biographie  .  l'auteur  de 
la  ra^û  —  qui  paraît  être  aussi  celui  de  ladite  biographie  —  aura  trouvé  tout 
naturel  défaire  |ouer  a  la  Lfiba,  vis-â-vis  de  Miraval,  te  rolequ'il  luiavait  vu  (ou 
fait)  jouer  ailleurs  vîs-à*vi s  de  Peire  VidaL  —  Voici  encore  un  exempte  asstv 
curieux  des  emprunts  du  nouvelliste  aux  chansons.  Miraval  avait  dit  (Bt-'n  mai 
ç&rtfî  mfsutt^hn,  str.  5)  ;  Hu^imtii  rtmitnlml  faUnmfm  —  Ah  seîba  qtte.  falh  t^n 
j'm*r^  fM,  A.  imprime,  p,  m^  noie,  ah  iW'Vi  qut  fathan^aud)  :  c  est  de  là 
évidemment  que  provient  la  phrase  énigmatique  qui  a  embarrassé  tant  de 
commentateurs  t  Qm  lai  tmian  prr  mùritÈ  iota  donna  qttr  fr^fi  smi  driU  tfaut 
h^ro,  ce  qui,  rapproché  du  conteste,  est  fort  clair  i  faîhir  désigne  la  faute  de 
ta  fenmie  qui  préfère  à  un  amant  pauvre  un  «  haut  baron  *  ;  et  nucir  $i  signifie 
se  perdre,  se  u  tuer  i»  de  réputation. 

^.  Voye^  b  très  juste  appréciation  de  M.  A.  (p*  102)» 

4.  Par  une  singulière  inadvenancc,  cette  marquise  est  dite,  dans  une  copie 
de  la  r^io  (celle  du  ms  P)  femme  du  *  comte  »  de  Mmerve* 


13 6  COMPTES   RENDUS 

sens.  L*aùteur  de  la  ra^ù  a  donc  pris  pour  une  signiftcatioti  de  rupture  ce  qulJ 
n'éuu  que  rtmoncé  d'un  pacte,  d*un  marché,  selon  le  mot  du  pocte  lur-môn 
(efo  plus  nârtgîo  mtrcati  —  que  dt  îm  dm  partis  iraii).  Et  celul-cî  répète  dans 
l'en^'oi  que,  «  où  qu'il  aille  i>  (c'est-à-dire  en  quelque  endroit  qu'il  îKirte  ses 
hommages).  Mais  (Tamk  reste  k  «  dernier  terme  de  ses  cliants  u  et  maîtresse 
de  Miraval  *.  Qpant  A  la  marquise  de  Mînen^e,  ce  ii^est  pas  une  maîtresse 
tiouvelïe,  niais  simplement  une  protectrice,  dont  il  einend  faire  Télogie, 
D*abord  il  serait  inouï  qu*un  troubadour  nommât  en  toutes  lettres  Tobjet  de 
sa  passion  »  ;  puis  les  expressions  ici  employées  sont  de  pure  courtoisie,  desti- 
nées â  soïlJcîlcr  faveur  et  protection;  le  poète  ajoute  même  que  cette  pro- 
tection ne  s*est  pas  encore  manifestée  (f  pois  tk  Um  no  m'rscai  ^fitf^)  ♦.  H  fallait 
donc  traiter  cette  raio  coninn;  elle  le  mérite,  c'est-iî-dire  comme  un  simple 
roman,  et  ne  pas  lui  emprunter  mCmc  rideniification  de  la  Loba  avec  Mais 
d*amk  (p.  léB)  :  en  dehors  de  b  raio,  rien  absolument  n'appuie  cette  idcniifi- 
cation,  et  c*est  en  vain  que  Ton  chercherait  chez  M.  A.  l'ombre  m^me  d*un 
argument*. 

La  seconde  ra^o  se  présente  exactement  dans  les  mêmes  conditions  que  la 
première.  M.  A.  ne  s'en  est  pas  non  plus  assez  délie,  et,  quoîquUl  en  ait 
montré  lui-même  Tin  vraisemblance  (p.  ité),  il  en  accepte  les  indications 
presque  sans  réserve*  Sdon  ce  récit,  Ajsalaîs  de  Boîsscîton,  femme  d*iin  scî- 


t  *  On  objectera  peut-être  <jue  Mais  ifitmic  est  ici ,  iion  h  lemmc  a 
laquelle  il  est  fait  allusion  dans  toute  îa  pièce»  mais  une  des  consol.urices 
cherchées  par  le  poète*  Non,  car  cette  comolairice*  il  ne  l'a  pas  encore  trou- 
vée (E  Diem  nu  don  i'aufrt  an  —  Trûbar  domna  ^rj^îa*/...);  et  les  envoi?* 
adressés  dans  une  autre  piéceM^wari  meftûàmntar)  A  Mmi  d\imic  déj^ci^ncnt 
CTsactement  la  même  situation  : 

Bom  domnÀ,  on  qu'^iâ  domiKjflt. 
Vûlh  qac  t^ngixxt  Mi  m  val  domcniAt 
3     E  rna$  c^nsos  en  cap  d'iutrAi  •mias. 

Si  tût  n(i*avc(z*  Maïs  d'jimîCt  cor  irat, 
A  vostrc  ops  al  Nfi rival  «i  gardât 
6     Qjtie  voi  1  avctï  e  it^u  n'iiî  coiniigfLs, 

Le  rapprochement  des  vers  2  el  ç  prouve  que  c'est  bien  la  même  personne 
que  Miraval  désigne  par  les  siîrnoms  de  Bond  domm  et  de  Mais  d*mmc. 

2.  Qu*on  se  souvienne  que  Miraval  lui-même  n'a  jamais  nommé  cette 
Mati  d'amie  qu1l  paraît  avoir  aimée  d*un  amour  si  passionné,  il  proteste 
d'ailleurs  qu'if  ne  commettra  jamaî^i  ceiïe  indiscrétion  i 

Domtta^  *olb  que  Mîrj^val  vo»  aon. 
Mît»  nun  voik  ik  quais  €tt  ni  don. 

(Âr  lîh  îa  fùriii,) 

%.  De  toute*  les  femmes  qu'a  chantées  Miraval,  Mai^  ifamk  seule  fdont  le 
srnfm}  est  du  reste  transparent)  est  qualifiée  amia  (D'amot  son,  dans  Mahn, 
mr ht,  il,  119), 

4.  Inutile  XMvû  de  chercher  (p.  107)  Tonginc  du  *  surnom  *  de  l-oKi  t 
c*est  un  simple  prénom,  formf  féminine  de  hi^p* 


ANDRAUD,  Rainton  de  Miraval  137 

gncur  de  Lombers,  comprenant  que  Miraval  «  était  plus  capable  que  quiconque 
de  lui  donner  du  prix,  lui  fit  tous  les  plus  beaux  semblants  que  dame  peut  faire 
à  chevalier  ».  Les  éloges  du  poète  attirent  à  Lombers  le  vicomte  de  Béziers,  le 
comte  de  Toulouse  et  le  roi  d'Aragon  ;  Miraval  prie  ce  dernier  d'intercéder 
en  sa  faveur  auprès  de  la  dame,  mais  celui-ci  préfère  plaider  sa  propre  cause 
et  la  gagne  aisément  ;  c'est  alors  que  le  poète  «  fort  marri  »  aurait  composé 
la  chanson  Entre  dos  volets.  Or  il  est  aisé  de  retrouver  toutes  les  sources  de 
ce  récit.  Son  auteur  trouvait  dans  une  seule  chanson  (Cel  cm  jois  tanh)  la 
mention  des  trois  seigneurs  qu'il  a  mis  en  scène.  Le  poète  disait  en  effet  : 

Domna,  Bezcrs  ni  Aragon 
Ad  ops  de  prctz  nous  valria 
Tan  cum  Miraval  faria... 

et  dans  la  strophe  suivante  il  louait  en  termes  assez  vagues  «  son  Audiart  » 
c.-à-d.  le  comte  de  Toulouse.  Notre  nouvelliste  aura  vu  dans  les  quelques 
vers  qui  viennent  d'être  cités  la  trace  d'une  rivalité  (bien  invraisemblable) 
entre  le  troubadour  et  les  deux  princes».  Il  se  sera  souvenu  d'autre  pan 
de  certaines  pièces  qui  paraissent  vraiment  faites  pour  exalter  la  beauté 
d'Azalais  et  lui  attirer  des  adorateurs  (Baiotia,  per  sinrntes  ;  Ar  ab  laforsa). 
Dans  celle-ci,  Miraval  semble  vraiment  inviter  le  roi  [d'Aragon]  à  venir 
vérifier  de  visu  le  bien  fondé  de  ses  éloges.  Rapprochant  de  toutes  ces  indica- 
tions la  phrase  de  la  biographie  où  il  est  dit  que  toutes  les  femmes  courtisées 
par  Miraval  le  trompèrent,  l'auteur  de  la  ra:(o  aura  sans  aucune  peine  mis  sur 
pieds  le  petit  roman  que  nous  avons  résumé.  Or  ce  roman  n'est  pas  moins 
absurde  que  le  précédent  :  en  effet,  la  chanson  où  Miraval  est  censé  «  se 
plaindre  de  la  trahison  d'Azalais  »  se  termine  précisément  par  un  envoi  où 
Azalais  est  louée  sans  réserves.  Il  est  bien  question  dans  cette  pièce  d'une 
traîtresse  et  d'une  autre  femme  dont  le  poète  attend  des  consolations  :  la 
première  n'est  évidemment  pas  Azalais  (mais  bien  probablement  Mais  (famic); 
la  seconde  sans  doute  n'est  pas  elle  non  plus,  puisqu'il  est  entendu  que  le 
poète  ne  nomme  pas  l'objet  de  sa  passion.  Du  reste  Miraval  prétend  ne  la 
courtiser  qu'en  tout  bien  tout  honneur  (mas  110  de  re  que  sos  prel:^  hais,  v.  18), 
ce  qui  suflfirait  à  faire  écarter  cette  hypothèse. 

Or,  ce  roman,  M.  A.  l'a  accepté,  au  moins  en  partie  :  il  croit  qu'il  y  a  eu 
entre  Miraval  et  Azalais  une  «  intrigue  »  ;  il  croit  i\  la  visite  qu'auraient 
faite  a  Lombers  le  roi  d'Aragon  et  le  comte  de  Béziers,  à  la  part  que  le  poète 
aurait  eue  dans  cette  démarche,  à  la  rivalité  qui  l'aurait  mis  aux  prises  avec 


I.  Il  est  évident  qu'il  s'agit  ici,  non  des  personnages  désignés  par  ces 
noms,  mais  des  fiefs  eux-mêmes  :  on  sait  que  Miraval  avait  l'habitude  (raillée 
par  le  Moine  de  Montaudon)  d'offrir  constamment  son  château  à  sa  dame. 
Le  sens  est  en  somme  :  «  Vous  obtiendrez  plus  de  gloire  si  vous  possédez 
mon  château  (c'est-à-dire  si  vous  acceptez  mes  hommages)  que  si  vous  pos- 
sédiez (réellement)  le  royaume  d'.Aragcn  ou  la  vicomte  de  Béziers.  » 


I3S  COMPTES   RENDUS 

ces  deux  illustres  per^nnages  (p.  isa-i)-  Aussi  est- il  fort  embarrassé  d*e3t- 
cuscr  ie  rôle  de  son  Ir^ros,  duquel  on  peut  se  demander  s'il  fut  plus  vil  ou 
pltis  ridicule*  Mais  si  Ton  réublll  la  vérité  des  diose^i  ce  rôle  n\i  plus  rien, 
étant  données  les  mœurs  du  lenips,  que  de  très  naturel.  Sans  doute  M  ira  val 
se  fait  le  preneur  de  îa  beauté  J'Ajtalais,  mais  ce  n'est  pas  à  des  rivattis  qu'il 
s'adresse;  il  n'y  a  h  qu'une  flatterie  un  peu  lourde  par  bquelle  il  enrendaii 
rémunérer  sans  doutu  î'buspitalîté  qu'il  avait  re^ue  au  diiteau  de  LonibL-rs. 
M.  A>  a  cru  ïe  voir  s^eïTaçant  —  miracle  d'abné^iitio:!  !  —  devint  un  aurr^ 
rival,  le  comte  de  Toulouse.  Voici  le  texte  sur  lequel  il  s'appuîe  : 

Quar  €s  soi  prctz  tan  cars  e  bos» 
Ab  N^Axâbis  vuclh  paria. 
H  Kérsti  ïîcfui  tyta  via 
Apres  scllis*  qwe  no  vol  qii^om  en  gap* 

w  Car  son  mérite  [d'Audiart  j  est  si  précieux  et  si  rare  que  je  veux  le  voir 
admis  auprès  de  ma  dame  Aîfabjs,  et  c'est  a  lui  que  j'appartiendrai  toute  ma 
vie,  après  celle  dont  je  ne  veux  pas  qu'on  se  moque,  ii  Ainsi  traduit  M*  A. 
Maïs  te  sens  est  tout  différent  ;  il  s'agit  dans  le  premier  ver^^  non  du  comte 
de  Toulouse,  mais  d'A;!alais;  c'est  d'elle  que  Miraval  souhaite  la  société,  c*e$t 
à  elle  qu*il  veut  appartenir  «  toutefois  «  {et  non  toute  sa  vie),  c'est-à-dire  aprûs 
celle  qu'il  aime  vraiment  (et  que  par  conséquent  il  se  garde  de  nommer)  d 
qui  ne  veut  pas  que  l'on  rie  d'elle.  M.  A.  n'a  pas  vu  que  le  possessif  so^  du 
premier  vers  se  rapportait  par  anticipation  au  nom  propre  exprimé  dans  le 
second  ', 

D'un  envoi  inédit  qu'il  a  découven  (cité  p.  119,  n.  i),  M.  A,  croit  aussi 
pouvoir  conclure  à  k  passion  de  Mirava!  pour  A/.abïs  ;  après  quelques  vers 
où  il  l'a  célébrée,  M  ira  val  ajoute  ; 

No  ver  aïnor»  mi  somi* 
QliHd  scrva  d'dtal  razo... 

Mais  le  pronom  /  se  rapporte  ^  T objet  de  ce  «  nouvel  amour  »  et  non  à 
Avalais  elle-même. 

J'ai  si  longuement  Insisté  sur  la  première  partie  du  livre  de  M.  A*  qu'il  ne 
me  reste  plus  la  place  nécessaire  pour  examiner  la  seconde  comme  elle  Tcût 
mérité.  M.  A,  aurait  dû,  ce  me  ^mble  f  je  lai  déjà  dît),  étudier  de  plus  prés 
b  langue,  le  style  et  la  versification  de  son  auteur.  J  avoue  du  reste  qu'un 
travail  de  ce  genre  n'est  jamais  définitif  que  quand  il  est  fait  d'après  une  édition 


! .  Il  y  avait  pounant  dans  son  poète  même  d'autrÈ:s  ejtemples  de  la  même 
tûurnurc,  étudiée,  on  le  sait*  par  M.  Tobler  (Frrrti.  Bdintj^t,  II,  78-Ho)  : 
M»*  dtf  mif  doux  «  t4  v^lor^  lên  grans^.. 

Ht:  cm  qucit  vol  bAiïsc  sti^  briu»*.. 

{Entrg  dfis  t 'ottrs ,  v*   54,) 


ANDRAUD,  Rai  mon  de  Miraval  139 

critique.  Cette  édition,  M.  A.  nous  la  promet  :  ce  sera  alors  le  moment  de 
combler  la  lacune  que  je  viens  d'indiquer  * . 

L'appendice  II (  est  consacré  à. une  analyse  métrique  des  pièces  de  Miraval. 
C'eût  été  le  cas  de  rechercher  les  imitations  qui  en  ont  été  faites  :  c'est  là, 
comme  on  sait,  un  critérium  commode  et  sur  de  la  popularité  d'un  poète. 
Sans  avoir  fait  à  ce  sujet  de  recherches  paniculières,  je  puis  au  moins  indi- 
quer quelques-unes  de  ces  imitations.  Le  n©  1 1  (de  la  liste  de  Bartsch)  est 
sur  le  même  rythme  et  les  mêmes  rimes  que  le  n»  392,8  (de  Rambaut  de 
Vaqueiras);  peut  être  y  aurait -il  moyen  de  retrouver  de  quel  côté  est  l'imita- 
tion. Le  sirventés  de  Peire  del  Vilar  (365,  i),  que  j'ai  récemment  publié 
{Mélanges  Léonce  Couture,  p.  115),  est  certainement  imité  du  n»  20,  dont  il 
reproduit  exactement  le  rythme  et  les  rimes.  Le  fameux  sirventés  de  Bernard 
de  Rovenac  (66,3)  est  sur  le  modèle  du  n«  22.  Le  no  34  a  servi  de  modèle  à 
un  sirventés  de  G.  Figueira  récemment  retrouvé  (Studj  di  filologia  roman:{a, 
VIII,  460;  cf.  Schultz  Gora,  Ein  Sirventés  von  G.  Figueira,  p.  18).  Enfin  le 
n"  12  a  fourni  son  rythme  et  ses  rimes  à  un  célèbre  sirventés  de  P.  Cardinal, 
comme  M.  P.  Mever  l'a  déjà  montré  {Chanson  de  la  Croisade,  II,  p.  xxxviii). 

J'ai  dit  que  les  traductions  de  M.  A.  étaient  parfois  insuffisantes.  Voici 
quelques  inexactitudes  que  je  n'ai  pas  eu  l'occasion  de  relever  dans  les  pages 
qui  précèdent  : 

Elam  fetz  tornar  en  so.in 
Tal  don  siii  pecairc. 

(Enqii/r  non  a  gaire,  coupl.  2.) 

«  Elle  m'a  fait  mépriser  de  telle  autre  dame  envers  qui  je  suis  coupable  » 
(p.  90).  Traduisez  :  «  Elle  m'a  fait  dédaigner  telle  autre  dame...  » 

Mas  aram  ditz  riscn  gaban 
Qji'ops  es  que  vas  me  s'esclairc 
O  que  del  tôt  me  desman. 

(Jbid.,  coupl.  3.) 

«  Elle  me  dit  en  riant  qu'il  faut  qu'elle  s'explique  avec  moi  ou  qu'elle 
m'éjonjuise  pouf  toujours.  »  Je  corrigerais  aram  en  aral  et  traduirais  :  «  Je 
/mi  dis...  »,  ou  considérerais  m  commj  datif  explétif,  et  le  sens  serait  le  même 
(  «  je  dis  »). 

L'envoi  de  Tug  silh  queni  van  demandan  : 

Ni  mais  ni  mens  noi  cove  per  razo, 

n'est  nullement  obscur  (p.  94)  :  «  Il  y  a  [dans  ce  manteau]  tout  ce  qui  doit 
s'y  trouver,  ni  plus  ni  moins  ». 


I.  Dans  le  tableau  des  chansons  avec  renvois  aux  manuscrits  (dressé 
p.  170  ss.),  il  y  a  un  assez  grand  noMibre  d'erreurs,  généralement  empruntées 
à  Bartsch  :  les  sigles  C  et  R,  Cet  I  notamment,  sont  assez  souvent  mis  Tun 
pour  l'autre. 


140  COMPTES    RKNDVr 

Les  deux  sirventés  écliangés  entre  Miraval  et  Mataplana  sont  particulièrement 
difikiles,  et  M.  A.  est  fort  excusable  de  ne  pas  les  avoir  entièrement  compris 
(p.  137-42).  La  netteté  de  son  commentaire  s'en  ressent  naturellement. 
Au  V.  22  du  sir\entés  de  Mataplana, 

Bc'ii  par  qu'cl  cossclh  es  sirvcns, 

je  comprendrais  :  «  On  voit  bien  qu'il  se  laisse  conseiller  par  des  goujats  », 
ce  qui  expliquerait  la  riposte  de  Miraval  (v.  12-1^)  : 

Ni  mollier  non  longici  de  mi 
Pcr  cossclli  de  nicnudas  gens. 

La  traduction  des  vers  24-8  du  premier  sir\'entés  ne  me  paraît  pas  si  diffi- 
cile :  je  corrigerais  Veuansa  en  s'cinuisn  et  donnerais  à  prendre  le  sens,  attesté 
en  provençal  et  en  français',  de  «  recevoir  des  coups  »  (ici  «  être  maltraité 
par  l'opinion,  ridiculisé  v),  et  supposerais  la  phrase  interrogative.  Le  sens 
serait  :  «  Le  chevalier  le  plus  courtois  a  le  droit  d'abandonner  une  épouse 
qu'il  a  prise  à  la  légère  {per  tnfausa):  si  sa  dame  elle-même  se  compromet  au 
point  de  nuire  i\  sa  réputation,  doit-il  se  considérer  comme  lié  par  son  hom- 
mage (je  ne  comprends  pas  ccrtan)  au  point  de  ne  pas  changer  de  conduite 
(envers  elle)?  •> 

P.  145,  1.  7  :  «  Miraval,  en  cherchant  à  se  réconcilier  avec  Gaudairenca, 
avouait  par  là  même  ses  torts  à  |son  endroit  »  (cf.  v.  32-3).  H  n'y  a  rien  de 
cela  dans  le  texte  :  c'est  au  contraire  Mataplana  qui  conseille  à  Miraval  de  se 
montrer  bon  prince  (/>«>/ wf  est  au  subjonctil). 

P.  148  : 

Qu'adoncs  ciii.iva  qu'us  empicrs 
Nom  tendues  tua  donin.i  en  dcfcs. 

{Ben  aial  ir.rssatgûrs,  v.  21-2.) 

Non  pas  :  o  11  ne  me  semblait  pas  que  ma  dame  pût  être  en  sûreté  même  dans 
un  empire  »,  mais  plutôt  :  «-  Je  ne  croyais  pas  qu'un  empire  pût  m'enlever 
ma  dame  >»,  c'est-.\-dire  «'  qu'elle  m'abandonn;\t  pour  un  empire  »  (cf. 
V.  n-i  I). 

A.  Jkanrov. 


1.  D.in^  un  proverbe  souvent  cité,  par  exemple  :  «  Le  repruche  dist  hum 
suveni  Q.ue  û'N  ne  crienulesi  k'il  prent  »  (Marie  de  I-rance,  Fables^  no9i, 
V.  ^3-4,  éd.  Warnke).  *«  On  dit    que  fol    ne   doubte   jusqu'il    prent   u 

(I^.  I)esch.inip>,  HalLule  3S2.  refrain).  -  «  Que  fol  no  tem  tro  que  pren  » 
(Ikrii.  de  Veiit.Kl»)ur,  l.o  tcnh  i.ii  r  ivu,  \\  21).  Cf.  la  note  de  M.  Ulrich 
dans  Xt'itsi'hrifl  Ji'ir  fiiin:.  Spnhlv.  XXIII,  p.  i,  n^  123. 


M.-v.  YOUNG,  Les  Enseignements  de  Robert  de  Ho       141 

Les  Enseignements  de  Robârc  de  Ho,  dits  Enseignements 

Trebor.  Publiés  pour  la  première  fois,  d'après  les  manuscrits  de  Paris  et 
de  Cheltenham,  par  Mary-Vance  Young.  Paris,  Picard,  1901,  in-8,  176  p. 

On  avait' depuis  longtemps  signalé,  dans  un  manuscrit  de  Paris  %  le  poème 
moral  dont  Tauteur  s*est  caché  à  demi  sous  le  nom  de  Trebor,  où  on  avait 
sans  peine  deviné  le  nom  de  Robert  renversé;  mais  on  n*en  savait  pas  plus 
long  jusqu'au  jour  où  P.  Meyer  fit  connaître  un  second  manuscrit,  conservé 
à  Cheltenham,  et  qui  contient  une  fin  absente  de  celui  de  Paris  :  dans  cette 
fin,  l'auteur,  renonçant  au  vague  de  son  anagramme,  fournit  à  celui  qui 
Trebor  couoistre  voldra  le  moyen  de  le  faire,  à  l'aide  d'un  acrostiche  qui 
donne  Robert  île  Ho.  P.  Meyer  a  reconnu  dans  ce  Ho  un  des  trois  villages 
anglais  dont  le  nom  actuel,  Hoo,  s'écrivait  anciennement  Ho  y  et  plus 
probablement  «  celui  du  comté  de  Kent,  sur  la  rive  gauche,  de  la 
Medway.  »  Ce  Robert  de  Ho,  qui  écrivait  sans  doute  à  la  fin  du 
xii»'  siècle*,  était  un  laïque  (non  seulement  il  adresse  son  poème  à  son 
fils,  mais  sa  morale,  tout  en  ayant,  naturellement,  un  élément  pieux,  est 
essentiellement  laïque)  frotté  de  lettres.  Il  s'est  proposé  de  donner  un  traité 
de  morale  pratique,  pour  lequel  il  assure  avoir  puisé  dans  Caton,  Salomon, 
Stace,  Horace,   Homère,  Virgile  et  Ovide;  «  mais  »,  dit  miss  Young,  «   il 

attribue  à  Caton  et  à  Salomon  bien  des  choses  qui  ne  sont  pas  d'eux Il  a 

adapté  plusieurs  sentences  d'Horace,  mais  je  n'ai  pu  rien  identifier  de  Stace, 
ni  de  Virgile,  ni  d'Ovide  qu'il  prétend  citer.  Il  ne  pouvait  naturellement  pas 
connaître  Homère  et  il  n'y  a  pas  trace  de  Darès  le  Phrygien  ».  »  Dans  la  der- 


1.  Ce  manuscrit  (B.  N.  fr.  25408)  est  le  même  d'après  lequel  j'ai  publié 
{Rom.  VIII,  167  ss.)une  Vie  de  saint  Alexis  en  vers  octosyllabiques.  J'ai  dit 
qu'il  me  paraissait  avoir  été  écrit  dans  l'ouest  de  la  France.  D'autre  part,  P. 
Meyer  {Bull.  lU  la  Soc.  des  auc.  texes,  1883,  p.  102)  pense  qu'il  a  été  exé- 
cuté en  Angleterre.  Quoi  qu'il  en  soit,  des  formes  comme  pre  •=.  pri,  lèse  =  lise, 
sou/est  =  soujist,  etc.,  ne  sont  pas  anglo-normandes,  et  Miss  Young  aurait 
mieux  fait  de  ne  pas  les  conserver  dans  son  texte,  où  elles  contredisent  sou- 
vent la  rime. 

2.  Les  arguments  tirés  de  la  langue  par  Miss  Y.  me  paraissent,  au  moins  en 
partie  (la  ionnu  ^^rafule  ne  prouve  rien;  Miss  Y.  a  oublié  la  F^  pers.  desit^ 
au  V.  2051,  etc.)  très  plausibles;  mais  je  ne  puis  admettre  son  interprétation 
des  vers  174 1-2,  où  elle  voit  une  exhortation  à  la  croisade  Dans  ce  passage 
d'ailleurs  peu  clair,  le  leu  ancieu  que  nous  devons  restorer,  et  qui  est  otrié  à  saint 
Paul,  n'est  pas  la  Terre  Sainte,  mais  le  paradis,  où  la  place  laissée  vacante 
par  les  anges  rebelles  doit,  d'après  une  ancienne  croyance,  être  occupée  de 
nouveau  par  les  hommes. 

3.  Ce  n'est  pas  dans  Darès  qu'il  eût  fallu  chercher  des  rapprochements, 
mais  dans  VHomerus  latinus  (Italiens),  si  répandu  au  moyen  âge.  Toutefois 
il  est  probable  que  le  nom  d'Orner  a  été  pris  au  hasard  par  le  poète  au  pro- 
logue de  TVoïV,  comme  celui  d'Estace  au  roman  de  T/k'beSy  comme  ceux 
d'Ovide  et  de  Virgile  à  d'autres  sources  en  langue  vulgaire. 


14^ 


COMPTES    RENDUS 


nicrc  partie,  qui  semble  ;i voir  été  njcutêe  par  Robert  à  ia  premicrc  œuvic 
(terminée  avtc  Amen  au  \\  2611  '),  or>  lii  une  cinquantaine  de  vers  qui  se 
retrouvent  a  peu  près  tels  quels  ^  d^ns  la  traduction  de  Caton  par  Éltc  K  U  est 
probable,  en  dehors  de  ce  cas  spécial,  qu'il  a  largement  puisé  Uans  la  littéra- 
ture latine  et  vulgaire  de  son  tempii*.  lî  a  emprunté  a  Avianus  le  conte  du 
Citfivoikux  tt  de  PBmieux  >  (y.  622  ss,)  et  la  fable  de  ïa  Crabr  et  son  fih 
(y.  1569  ss.)*.  Mais  ù  ces  éléments  étrangers  il  en  a  joint  de  per^nnels:  E 
parik  m  a  cùntram^  E  q  k$  auirts  ajmff^.  Ceux-là  sont  naturellement  les  plus 
iniénessanis  :  on  notera  surtout  ïe  passage  (v.  i  toj  ss.)  où  sont  énumérés 
tous  les  lalçnts  dont  la  réunion  cmistîtue  La  Lurti'ùU  (bien  combattre,  bien 
monter  X  cUt^val,  s'entendre  à  la  vénerie  de  chiens  et  d'oiseaux,  parler  avec 
niesure,  être  f^tabh,  et,  ce  qui  est  bien  caractéristique  pour  le  temps,  vtrstfitr 
avec  art)  et  celui  (v  2527-IÎ6Î)  où  Tauteur  donne  à  son  fils,  $11  veut  conifs 
conttr  Ou  dtansôm  de  gesk  chutUtr^  Tavii^  de  ne  pas  ennuyer  ses  auditeurs  en 
leur  demandant  une  attention  trop  prolongée  et  hn  enseigne  une  quoifitisf 
pour  savoir  ce  qui  m  est  réçllemeni. 
Malgré  ces  passages  et  qt^clques  autres,  le  poème  de  Hobert  de  Ho,  écril 


1.  Le  ms.  P  ne  s*arrète  que  dou^.c  vers  plus  loin  et  contient  ainsi  le 
commencement  de  la  seconde  partie»  qui  figurait  donc  dans  l'original  de  P 
incomplet  par  la  pêne  d*nn  cahtcr. 

2,  Les  variantes  sont  intéressantes,  et  leur  comparaison  peut  pemicttncdc 
rt-stituer  le  texte  commun.  Les  deux  vers  suivants  soni  ftin&i  conçus  dans  le 
ms.  de  Rohen  et  dans  celui  d*Élie  : 


Robert 
Creitiv  ton  mtîire  ç  s«ur  s^x^'y 
\in  vérité  vif  tutci  rcia 


tlrtin  n\m  uiaisifc  swcf  iwiei» 
En  ncitïte  vîf  turc  veîs 


Il  faut  probablement  restituer  (autrenicnt  que  ne  Tout  fait  rcsj>eciivciULnï 
M.  Stengel  et  Miss  Voung)  : 

Crîem  ton  mes-trv*  e  suff  \v\^% 
Ko  ncieê  vif  totcs  wica. 

l^  leçon  /i^ir/ (ou  M^W/),au  lieu  de  lYtité^  pour  Robert  ^  est  prouvée  par  les 
deux  vers  qui  suivent,  qui  ne  î-ont  pas  dans  Élie  :  Kar  ai  qui  onfettuHt  tnvta 

l.  Mi  Si  Young.  avec  une  prudence  peut-être  wcessive,  dii  qull  en  résulte 
"  que  l'auteur  connaif^sait  îa  traduciîon  d^Étie  ou  tout  au  moins  quelque  autre 
également  connue  d'Élie  »  En  tout  cà\  il  faut  remarquer  que  Hobert  a  des 
vert  en  plus,  dont  le  pendant  ne  se  retfonve  pas  dan^^  Caton,  ce  qui  prouve 
bien  Qull  a  eu  pour  base  une  tntduaîon  de  Caton,  et  cette  traduainn  ^>cut 
fort  bien  *nç  celle  même  d'Kïic,  <m%  est  certainement  ajitérîeure  a  Robert. 

4.  Le  passage  sur  Brut  et  Argal  vst  sans  doute,  comme  le  dit  Miss  Y.»  pris 
ddtis  Wace.  i>lutût  qde  dan?»  Gaulrei  de  Monniouth. 

j.  Il  est  â  noter  que  Robert  en  ofl^re  une  moraiisation  chrétienne, 

é.  Miss  Y,  a  rémn  pour  chacun  de  ces  deux  récits  de  nombreux  parallèles  ; 
leur  provenance  directe  d*Avianus  est  prouvée  pour  le  premier  par  le  fait  que 
c*est  Jupiter  qui  intervient,  pour  le  second  par  le  fait  qu*tl  s*agit  d^une  mère 
crabe  et  de  son  fils  (v.  1^75)  et  non  de  sa  ^le. 


M*-v,  YOUNG,  Les  Enstignrmtiïîs  de  Robert  de  Ho  145 
ikiis  un  styk  sec  et  souvcut  csbitur,  l^î  w^b^t  lubuiam;  tn  outre  le  texte, 
conservé  dans  deux  manuscrits  qui  paraissent  rcmoiîier  k  un  archétype  déjà 
tamîf,  est  difficile  à  restituer  et  à  comprendre.  Miss  Younga  rempli  avec  beau- 
coup de  consctence  la  tâche  dithcile  qu*cll^  s'était  d55igi.ée-  Elle  a  entouré 
Touvragcde  Robert  d'un  précieux  commeniaire^  tant  d.tns  rintroductîon,  où 
elle  étudie  la  bngue  ^  et  ia  veniiftcation  ',  que  dans  les  nombreuses  notes 
où  elle  rapproche  de  soti  texte  des  passages  parallèles»  latins,  français  ou 
provençaiist  ;  ces  notes  prouvent  une  lecture  étendue  et  attentive  et  servi- 
ront i  l'étude  de  la  poésie  gnomique  du  moyen  âge  '»  D'autres  notes, 
rejetéts  à  \a  fin,  M)ni  consacrées  à  rinterprératinn  des  passages  les  plus  dilïi- 
I elles  et  montrent  que  Miss  Young  sest  efforcée  de  les  comprendre  et  y  a 
souvent  réussi. 

Sédition  est  essentiellement  une  reproduction  de  P  ^  avec  les  variantes  de 


j.  Cette  partie  du  travail  est  un  peu  confuse,  et  pourrait  être  plus  appro- 
fondie Je  ne  comprends  pas  conmiLiit  fétymoïogie  de  conide  est  douteuse 
(p*  t7;  au  reste  !a  forme  kèî,  If^'k  est  commune  en  anfilo-normand)  ;  je 
n'hériterais  pjsi  corriger  {v.  1256)  en  jm^mifr  Vfmàii^fiit'r  des  mss.,  qui  four- 
nit le  senï  exemple  ife  r  :  u*  (ie  fait  qu'on  a  successHemem  ici  trois  couplets 
en  /,  //,  If  montre  bien  quts  le  poète  les  distinguait);  rien  n*>nvite  à  croire 
{p*  iH)  que  l'i  devant  une  sourde  était  amuïe  ;  il  est  bien  mutile  d'essayer 
(p.  1 1  )  de  remplacer  fûrgr  au  masc,  qui  est  la  forme  ile  tous  les  tentes  depuis 
les  plus  anciens,  par  ian,  dont  on  a  à  peine  un  exemple  peu  ancien;  p.  22 
l'auteur  cite  r/,  pronom  pers,  neutre,  et  renvoie  à  mon  article  sur  cette  forme 
{Rom.^  XXÎll,  161),  mais  dans  les  trois  exemples  qu'elle  cite  son  texte  (et 
sans  doute  le  ms.)  porte  //;  que  veut  dire  cette  phrase  (p.  24)  :  u  L'impé^ 
ratif  $c  trouve  pour  le  subjouctif  :  cm  194  (toutes  deux  formes  de  llnfinitif), 
$t'ti  22?2  ^?  le  subjfmctif  se  trouverait  pour  l'impératif  dans  man,  v.  lajo, 
(mais  dans  le  texte  Miss  Y,,  avec  raison,  a  adopté  la  ïe<îoti  de  C,  rejrtin)  et 
dans  dfspis  lé^j  (mais  fifspis  est  l'impératif)  :  quant  àgarJ  pouï  garde ^  on  sait 
qu'il  est  ancien  et  répandu. 

2.  Robert  de  Ho,  qui  met  si  haut  le  talent  de  versefifr^  s'est  plu  à  montrer 
son  habileté  en  variaiii  la  longueur  et  la  disposition  de  ses  vers:  P&r  ft-n 
enttnJrt  qurje  sai  Mts  vers  tût  auiiemcut  hnifr^  Dés  ûtu'  je  nw  vomirai  ptntr, 
fên  pim  iùTi  ùfi  islùngiiief.  Ou,  se  jt  voiî^  ettîrekdff.  Il  insère  donc  dans  son 
texte  en  couplets  octosyl  la  biques  des  morceaux  en  alexandrins»  en  vers  de 
quinze  et  aussi  de  six  syllabes;  ces  changements  de  rythme  ont  embarrassé 
les  copistes  ;  Miss  Y  ,  oui  s'était  trompée  sur  la  formi;  d'un  morceau  en  vers 
de  quinze  syllabes  qu'elle  avait  essayé  de  réduire  en  alexandrins,  a  reconnu 
ensuite  son  erreur  et  Ta  corrigée  eu  appendice;  ailleurs  elle  a  bien  ré^iabli  le 
rytîune,  ce  qui  n'était  pas  touiours  facile.  Ses  remarques  sur  la  versification 
{qui  est  correcte)  sont  généralement  bonnes,  bien  que  certains  détails  prêtent 
*i  la  critique  (/m/  :  consel  157-8  n'offre  une  rime  înexacie  que  pour  la  gra- 
phie; sur  les  vv,  641-2,  voy.  plus  loin). 

3.  La  dii; position  adoptée  par  Miss  Y.  pour  ces  notes  n'est  pas  bien  com- 
mode :  elles  sont  confondues,  au  bas  des  pages,  avec  les  variantes,  et  variantes 
et  notes  ont  la  mêtne  série  de  chiiîresd appel,  ce  qui  fait  qu'on  a  un  peu  de 
peine  i  s'y  retrouver. 

4.  La  grapliie  (pour  les  26a?  premiers  vers)  est  celle  de  P;  je  crois  que 
réditrîce  aurait  pu  sans  témérité  essayer  de  la  régulariser  (cL  ci -dessus, 
p.  141,  n.  î)  , 


144  COMPTES    RENDUS 

C(saul  naiurclleniciit  pjL:r  la  lin  qui  ncht  qiijJans  C)  ,  mais  l'éditeur  a  essayé 
partout  de  rendre  le  texte  lisible  et  correct.  «  Bien  que  P,  dit-elle,  fût  en 
gros  meilleur  que  C,  j'ai  pa  souvent  corriger  sa  leçon  au  moyen  de  celui- 
ci,  et,  sansC,  une  édition  du  poème,  même  de  la  partie  précédant  le  v.  2624, 
serait  à  peine  possible,  tant  les  vers  sont  peu  compiéhensibles  et  les  lacunes 
fréquentes.  »  Le  texte  qu'elle  a  ainsi  constitué  est  vraiment  très  digne  d*éloge 
et  montre  partout  chez  elle  du  soin,  du  savoir  et  de  l'intelligence.  Je  présente 
ici  quelques  remarques  sur  des  passages  qui  me  paraissent  susceptibles  d'amé- 
lioration. 

V.  12  Virgillt'  ijui  plus  sont  Je  autres  dis  mile,  1.  plutôt  avec^C  k[e]  autre,  — 
30  je  préfjrerais  la  leçon  de  C,  (c*)  fin  un  iotnpein[cr]  Jere  roir,  à  celle  de  P, 
Sa  comptiignie  est  a  fuir,  qui  a  bien  l'air  d'être  due  à  un  copiste  qui  ne  com- 
prenait pas  son  original.  —  57-8  le  poète  dit  que  le  sage  est  chez  lui  en  tous 
pays  :  P  Cum  a  peisun  qui  veut  nocr  errer  Ou  quil  out  vienge  en  la  nier 
Cest  >2  demeine  re^^iun\  C  Cum  al  peisson  ki  volt  errer  Quil  vietige  en  la  mer;  je 
lirais, en  ponctuant  autrement  que  ne  le  fait  Miss  Y.  :  Cume  al  peissun  qui  veut 
nocr,  Ouquil  aut  [m]  vienne  en  la  m:r,  C\'t  sa  demeint:  regiun  *.  — 64-5  P  Fi^  di^ 
ne  tables  naie{  cure  Kar  ices  gieus  sunt  ^ans  mesure:  C  F/^  ne  des  tables  naie^ 
cure  Car  itel  ju  est  san;^  mesure ,  c'est  la  leçon  de  C  qui  est  la  bonne  (on  peut 
changer  itel  ju  cnitels  jus)  :  P  a  voulu,  comme  ailleurs,  améliorer  son  texte  en 
introduisant  le  jeu  de  dés  (Caton,  l'original,  n'a  qu'un  mot,  aléa,  qu'Everard 
de  Kirkham  traduit  par  tables);  mais  'i'j/>^  cure  ne  peut  gouverner  directement 
Taccuvatif-.  —  86  mal[e]fanie.  —  118  ponct.  Mes  si  cum  te  ferai  entendre.  — 
158  Conu\  impr.  Ço  me.  -  171  I.  Et  se  tul(e)  les  y  il  lerra  ta.  —  208  1.  K(/) 
0  hom[e]  genglour  ne  tene^.  —  219  1.  avec  C  E  encore  ice  je  te  di.  —  249  n«f, 
impr.  nen.  —  250  quoique,  \m\tx.quoi  que.  —  252  ;  au  lieu  de.^  -  259  qu^iU 
impr.  quil{cî.  le  parallèle  cité  en  note).  —    261   SouJ'retè,  impr.  Soujrete.  — 

-  263  impr.  t^i/<7/«  'aequalinum  plutôt  quVi'r/i;/.  —  544  E  Jet  si  cvirir 
sun  curai^^e,  1.  set.  —  372  qu  nuist  plutôt  que  quonnist.  —  375  1.  Se  en  fiirece 
mesjeras.  —  401  1.  Ker  la  vie  de  [tôt]  cljascun.  —    45^  :  après  sei.  —  460  en 


I.  A  propos  de  la  leçon  de  P,  Miss  V.  remarque  (p.  2  et  p.  161)  que  dans 
plusieurs  cas  "  P  offre  deux  mots  synon\mes  dont  l'un  est  évidemment  la 
^lose  ou  une  correction  de  l'autre,  et  que  dans  les  deux  cas  C  préfère 
régulièrement  la  mauvaisj  leçon,  c'est-à-dire  la  glose  ou  la  faute.  »  Cela 
semblerait  indiquer  que  dans  la  pensée  de  lédirrice  C  est  copié  sur  P,  ce  qui 
ne  saurait  être  \rai,  car  il  a  trop  de  kçons  préférables:  il  laut  supposer  que 
P  cl  C  derivciU  tous  deux  d'un  nis.  qui  p  ^rtait  Jéjà  ces  variantes.  Sauf  cela, 
la  reîuarqi.e  Je  .Miss  Y.  parait  en  ;;cnè:al  justifiée,  et  l'a  autorisée  souvent  à 
reitter  «•  u:;e  ieç  in  qui  se  trouve  Jans  les  deux  manuscrits,  en  faveur  d'une 
qui  :^e  ^e  : '<-)'.. vc  que  dans  C.  »  Le  fait  est  curieux,  et  il  aurait  été  bon  d'en 
léi.nir  et  d'en  tNr'.iqi;».r  tous  les  exemples. 

1.  La  n.ite  de  Mis>  Y.  sur  ce  pa-^sajc  est  un  peu  hésitante.  Au  v.  71,  — 
(  u  .-.  :,  j.>:nnie  e!  e  îe  dit  avec  raison,  i'^dique  pl::lôî  un  «itui  jeu,  —  il  faut 
ii:e  Jaiî^  P  Oui  p.n  i«^*i'/,.;.-^'/;[.  J  ':\i  uuip)ii:  \  .:uain^  ne  peut  être  la  5»-*  pers. 
du  prés,  dj  verbe. 


M,*v.  YOUNG,  /-rJ  Bnm^nemenis  de  Robert  dt  Hù       145 
^ pemei^  impr,  ml^rnf^.  —  467  LV»  uf  pitd  mie  a  tek  i^rni  Gmrrt  Unir  ou  tle- 
ment\  58  r   Kar  ne  puent  ^u  tudurtrl  mtoui;  un  Ju  on  eUmtnt  :  Miss  Y.  enre- 
gistre  au  Gtossaîre  tltmeni^  t  querelle,  guerre,  force  «,  et  remarque  qu'il  n'y 
a  *ï  d'autre  exemple  de  ce  mot  que  celui  de  Saintr  Eulaïk&  \  mais  il  faut  daas 
nos  deux  vers  lire  mtdemtnt^  «  également  >k  —  491.  L  Ker  ki  [ujij  autrt  ht  a 
tort.  —  499  P  5*'  tm  tuami,  C  Si  vo-i  âve^  m  A.  ami,  P  Eagiiràf^  a  primes  par  qui   ^ 
C  Esgardei  prinu^  pir  quel  qntri^  P  Entre  l'OJ  i  sardr  diiCûnit^  C  Entre  vos  iorde 
la  dHCôidi.  Miss  W  remarque  que  le  v.  499  «  est  incompréhensible;  d.ms  les 
deux  mss.  ^^  et  elle  adopie  la  leçon  de  C,  en  chatigeant  un  en  xd  :  avoir  en 
ïiaine,  in  oJio.  Ce  serait  un  bel  exemple  de  ut  <  odium   \m\é\  malheu- 
reusement notre  passage  n'autorise  pas  cet  enrichissement  du  vocabulaire  :  il 
faut  hre,  je  pense  {les  deux  mss.  remo niant  â  un  original  corrompu)  i  Se  x*ôi 
a\xi  nn  cnemi,  E^^gmrdex  a  prinm  par  qui  Entre  vas  mrdi  la  discorde ^  ce   qui 
convient  parfaite  ttient  au  sens,  —  509  h  5*?  vasttg  vrisiti  l'on  s  a  non  (C  fjonore, 
Fithùre)^  Matin  ou  seir  ou  a  nuie  hore  Que  it  tos  vtit  (leçon  de  P  abandonnée  à 
tort  ipo^t  ffit^  ift  â^  C),  —  562  r«  cft  pluiôt  que  en  /«r/»  —  5S9P  La  Utrce  si 
iit  MOU  »  apei^e, éd.  i(0 ist;  je  lirjis  plutôt  îa  /,  rfst,  —  60}  h  Vmheiun  de  cet 
[îuh]  /pf^/jiV;  Miss  Y.  pmpose  (à  peu  près)  cette  leçon  en  note,  maïs  elle  se 
demande   si  aclnsun    ne    pourrait  pas  compter   pour   quatre  svlbbes    (cf. 
|p.  Il):  c'est  i  m  possible*  —  642   )^  Sdgmurs   irei  vos  vrrs  Cùlo^nr^  C  trri 
Ekhalmu  i  la  nm^  avce  anîûne  dôît  faire  préférer  cette  leçon,  en  supprimant 
WJ.  —  671  K  âinx  Paresme  Ve^tvins  :  cVst   le  £omitui   qui   parle,  —  685 
impr.  ra  dit  et  suppr,  radire  an  Glossaire.  —  752  a^rUname^  1.  apercevunct^ 
*  circonspection,  sage^e  w.  —  754  Suppr,  la    virgule.  — ^780  gtnt{f),  — 
880  L  Kd{e)i  chiftnt.  —  909  suppr.  la  virg.  après  bien.  —  918  je  lirais  heï 
m  pufi  avHr  pour  ke  fen,  ce  qui  modifie  le  sctis  (cf,  la  note).  —  921  I.  peut- 
être  Kûr  £iomeH(mi qni  eH  bofn.  —  968  parmi  les  treize  fous  qu'il  carjictérisc, 
Tauteurcite  E  qui  m  tr  t*ent  conmUiir  Nt  ti'itutns  m'  se  tvnt  dkiritr\  Mii.  Y. 
conserve   cette  Ivçon  Je  P,  tn  renvoyant  a  siiu  Gîfssjirc,  où  elle  traduit  se 
ckfirier  par  ii  se  laisser  conduiri:  u;  mjb»  ou  ire  que  ce  sens  est  peu  adm^^sible, 
charter  aurait  troi^  s/lUbes ;  Q  donne  E  daiUfi  net  tf /  cerchrr,  ce  qui  ptut 
fournir  la  leçon  Ne  d'autres  ne  h  (=  le  conseil,  compris  dan!»  conseiHkr} 
veut  (pu  mieux  Nta  autres  net  t'eut)  crrchier .  —  98a  K  //   ne  rfst(e)  mie  wui 
fifhur.  —  989  L  Des  plies  te  dei^  ^uardfr.  —  1046  et  JO74  suppr    la  eirgule. 
—  fogi  L  ta  avec  C  pour  tt.  —  ro97  te  Hovel,  1.  de  noiei     —    itij  Ktrdi 
teus  gudrde  tié  vos  darjei  :  Miss  Y.  suppr   n»',  mais  il  est  indis^'ensable;  il  faut 
supprimer  Ker^  ou  peut-être  admettre  nos  ==  tti-tt'j.  —  117c  Tauteur  tnijagc 
son  fils  a  se  mener  de  Tcau  dormante  et  de  l'homme  «  simp!«  »  enappartncci 
car  Tune  brise  souvent  son  écluse,  et  Si  fet  s  impie  home  entre  int  Quant  meins 
cuiàe^fel  ^r*ind  iorfet\  Miss  Y.  traduit  :  *i  L'envie  entre  dans  un  tel  homme 
simple;  au  moment  où  vous  vous  y  attendes  le  moins,  il  fait  qutîque  grand 
f&rfait*  1*  Elle  comprend  donc  M  comme  hi^  «  haine  1»  (et  non  «  envie  w)i 
finis  quand  mkmt  ce  mot  aurait  conservé   le  t  fînal,   ce  qui  est  Inadn^is- 

«N  xxxn  ïo 


Ué  COMPTES    RENDUS 

sible,  son  e  fermé  ne  pourrait  rimer  avec  IV  ouvert  de  fet.  C  donne  :  Si  Jet  li 
simple  hom  cntreshait  Quant  ne  quide\  grant  jorjaity  et  il  faut  lire  :  Si  Jet  le 
simple  home  entresait,  Quant  meins  cuide:;;,  [moût]  grant  sorfait  (plutôt  que 
forfait).  —  I2IO  Tauteur  invite  son  fils  à  ne  pas  quitter  le  vieux  chemin 
(v.  1208  I.  Kar  ase^  tost  ferei[e]i  pis)  pour  sente  qui  vait  traversant  :  Kar  tost 
çruèneras  itant  Que  tu  en  seras  destorhé  E  de  ta  jornee  arriéré  \  que  veut  dire  le 
mot  gûener}  yi\ss  Y.  ne  fait  là-dessus  aucune  remarque  et  ne  l'enregistre  pas 
au  Glossaire  ;  j*avoue  ne  le  connaître  ni  ne  le  comprendre  :  c'est  sans  doute  une 
faute  pour geûneras  (ou  p.-ê.  1.  i  peneras).  —  Le  v.  1214  n  offre  pas  de  difficulté 
si  on  met  une  virgule  après  saches.  —  1327  1.  Fii;^,  contien  teien  [tel]  manière. — 
1 309  deveer,  1.  deneer(  :  desresner).  —  i  3  50I.  hom[é].  —  1 372  remès,  impr.  remés. 
—  1392  1.  Idoncen  dei^  [tu]  honte  aveir.  —  1407  1.  Nient  plus  que  [ne]puet  chaut 
sofrir. —  1427  Donc  refet  tost  que  (mss  éd.  quant)  nul  n'agrée.  —  1466  1.  avec 
C  Donc  les  ester  le  nunacier;  lessies(sic)  ne  peut  compter  pour  trois  syllabes.  — 
1478  suppr.  la  virg.  après  aperceveirtt  en  mettre  une  après  sens.  —  15 19  Mes 
que  il  dit  vérité,  1.  die.  —  1545  je  lirais  (à  peu  près  avec  C)  La  desreine  tient 
la  première,  c'est-à-dire  :  «  La  seconde  nature  (l'habitude)  domine  la  pre- 
mière »  (rexplication  donnée  en  note  est  peu  plausible).  —  1 596  D'ele,  impr. 
De  lé.  —  1636  Epar  le  louier  qui  englue  A  sei  le  cors  rame  si  tue,  C  Le  quor  del 
home  s'aime  tue  :  quor  (iz:  cuer)  vaut  mieux  que  cors\  je  lirais  :  A  sei  le  cuer 
ame  si  tue,  C  Le  quor  del  homesalme  tue  :  quor  (^rzcuer)  vaut  mieux  que  cors;']C 
lirais  :  A  sei  le  cuer  Y  ame  se  tue  —  1686  l.  ICil  Cai[t].  —  1711-12  l.  (d'après 
C)  Contenez  vos  solon  les  (PC  lors)  murs  Ke  vos  a  cei  fere  verreix  Entur  qui  vos 
conversereix.  —  7783  entornera,  impr.  en  tornera.  —  1828  requist  et  non 
requi(j)t  :  cf.  i86>.  —  1830  inutile  de  changer  en  ai  le  oi  des  deux  manu- 
scrits. —  2049  l.  Que  li  hom  puet  bien  a  son  aive,  Veire,  e  oncore  a  son  tresaive 
Bien  resembler  ».  —  1888  l.  Cum[e]  veraie  amie.  —  2060  impr.  Mal  mont  tost  a 
[u]lui  repère.  -  2135  1.  Kil  vuillent  seulement  ve[e]ir.  —  2195  /iff  «///  hom  nen 
porreit  descrivre  '  La  disme  partie  fie  dire  :  les  deux  mss.  ont  nel  qui  n'est  pas 
«  évidemment  faux  »,  si  on  met  La  disme  partie  entre  deux  virgules.  —  Les 
vv.  2091  ss.  sont  altérés,  et  l'explication  donnée  en  note  ne  satisfait  pas.  — 
2199 /a^/f^V,  impr.  jamès^  ou  mïtu\  ja  mes.  —  2325  1.  Quant  qu'au  mauvais 
avras(C)  perdu.  —  2257  le(i)  et  non  /rf/].  —  2368  Ne  tropafii{s]  a  ton  savoir  : 
Vs  ajoutée  à  afie  fausse  le  vers,  et  n'est  pas  nécessaire  :  l'auteur  passe  du  sub- 
jonciil  à  l'impératif.  —  2380  De  so^,  impr.  Deso^.  —  2503  point  et  virgule 
après  voleir.  —  2526  P  £  gentille  hérite,  C  E gentillesce  e  richesse-.  Miss  Y. 
imprime  :  E  moût  gentille  hérité-,  rnsLis  gentille  (qu'elle  ne  signale  pas  dans  son 
étude  sur  la  langue)  est  inconnu  au  moyen  âge;  1.  E  genlillecee  richeté,  ce  qui 
est  d'ailleurs  postulé  par  le  sens.  —  2453  impr.  Ictlui.  —  2537  Car  le*  uns 


1.  Cette  théorie  de  l'atavisme  est  à  noter,  et  aussi  l'opposition  que  fait 
l'auteur  a  la  doctrine  de  l'hérédité  si  générale  aient  acceptée  au  moyen  âge. 

2.  Pour  descrire  :  Miss  Y.  n'a  pas  noté  cette  rime. 


M*-v.  ydu>;g.  Lis  Enseignements  de  R(éeit  de  Mo  147 
par  iHvie  Htmdmt  commt  JA  :  Miss  Y.,  iu  Glossaire,  traduit  umHire  (sîv)  par 
«  niïgUgcr,  dvtruirv  *^;  mais  comment  tnund-clIv/W?  die  y  voit  sans  tlt^iitc 
fthfi  (en  ce  cas  elle  aurait  dû  noter  la  rime  de  e  <  ê  ivec  c  <  a),  ce  qm  tou- 
tefois tie  donne  guère  de  sens;  ntnetre  sigtiîfW  ici»  commtr  très  souvent, 
*t  fondre  »^  et  ri  faut  lire  ui  au  lieu  de  Jd.  —  2549-50  deux  points  apris 
manamlty  virg.  après  siuk,  —  Je  ne  vois  pas  le  moyen  de  restituer  le  v. 
2$65  (^ui  n'est  que  dans  C);  en  loutcas  nijert^  ïnfernum,  miiïgré  les 
rJ ppruc hem enis  allégués  par  Miss  Y  ,  n'est  guère  possible  —  25?"  Guai  ne 
peut  avoir  dtujt  sv  Ikbes  :  I ,  G  mi  [ii\^'rH.  —  260  ^  P  Tmlo^  drvumknr  anir  For 
€Sin  in  cd  dfpotl^  C  Tmsloi  dnwn  iû  tt^rr;  Miss  Y.  imprime  Trest&i  dn'itn  noi 
ifovaiUier,  qui  convient  comme  sens,  mais  s'éloigne  du  Uiit\  kitr  des  niss. 
(aussi  bien  C|ue  les  mots  qu'elle  propose  en  note);  il  faut  sans  doute  ititUlktr. 
I — 2606  \.Dfm  ms{\\fQ££  fshmdtr.  —  2626  m  s.  (à  partir  de  2624  on  n'a  plus 
l^ue  Cj  Bî  nohil^i  mie  iiHatil  tu  viitras  t  la  comparaison  avec  le  texte  d*Èlie  de 
Winchester,  que  Robert  copie  ici,  pi^mtet  de  restituer  :  Bt  u^oblie^,  quant  Uu 
verrm.  —  26^1  Z:  rtpaiUm  rdmoU  ;  Miss  X.  imprime  n\t]}mfni^  mais  au 
Glossaire  elle  enregistre  rdrmmt  «  réellement  ?  régulièrement }  »  Les  variantes 
du  texte  d' Elle»  ^<'mwrM^  rdnftetit  {rdmmi,  rtdlmfttt)  Aux  ont  cependant  indiqué 
la  vraie  forme  et  la  vraie  valeur  du  mot,  rdrmtttt,  (qui  revtetit  au  v  2784), 
pomrtfrttmti,--  Il  rarement  1»  ^  —2672  Har  muinï  Imn^f)  jalt  iust  prm\fyir. 
A  fc>  tfuU  t^mdf  h<in  iavrir,  L  Kur  tuant  ^mue  Jaif^  toi  pur  vtir.  — 
—  26H1  I,  Ke  la  maî\r]di  td  jVm  (di}pari.  —  2725  Di  Uu  en  Uu  e  fîij  rùulie  : 
l'addition  de  ^/ est  inutile;  roiihr  ^:  rooîrr,  —  3751  Ton  l'îd  ami  m  dfh 
biaitnfT^  S'tJ  fit  djan^ir,  tiuih  rtmimhfir  IM  atuor  cy*u?  pritti^r{t\mtnt  Entre  im  fu 
ntislt^t\mtHt  ;  je  ne  *>ais  comment  rédîtnce  comprend  le  dernier  vers;  il  faut 
impûmuT  tfti'siremi'itt,  **  mutuellement  «,  —  2771  ms*  a  mdrrtes  hn^  éd,  n 
mtismt^n^  L  plutôt  fn  w  Twif.  —  2776  mettre  la  virgule  avant  beaî  (cf,  Élié 
de  Winchester),—  L'auteur  engage  son  fils  à  ne  pas  muitiplierses  visites  dans 
une  maison  :  pour  un  qui  vitiU  rarement,  dit-î),  on  fera  écorcher  des  mou- 
lons; mais  â  celui  q\^  vient  trop  souvent  on  n'offrira  que  des  œufs,  et  dii- 
chement;  £  tant  iovent  i  putt  ivnir  Hr  as  (ms^éd,  dfî)oes  pitdiî  hieu/ajUirixé. 
f&ihlir);  Nds  In  'brtses  m  {i7)  quit  strrmt  En  H  sauf  uf  vodmunt.  Miss 
Y.  imprime  ce  dernier  vers  (2791)  :  En  H  «  sahr  »>  ne  i-ahront,  et  traduit  : 
«  Pas  mêmv  ïes  braises  sur  lesqii elles  on  aura  fait  cuire  ks  œufs  ne  lui 
dirof-t  «  salve  »*,  ne  lui  femnt  la  bienvenue,  n  CVst  trop  ingénieux»  et  cela 
n*eîipliqiie  pas  m  H.  Il  faut  imprimer  i  En  ![\i]i  iam-ti  nt  l'odrwnl^  »  îb  (les 
gens  de  la  maison)  n*appelleront  pas  bien  employées  en  lui  (comme  don  pour 
lui)  même  les  braises  ».  —  2794  Fi^f  k  ton  dnpcndrr  dnrm  Sdm  tço  que  tu 
verras  Feîiimt[iils€  amdone  Edcum  k  tùn  te /0h{syi}nf ,  Mi^s  Y.  n'a  pas  admis 
fehme  dans  son  Glossaire  ;  en  note  elle  dît  a  qu'on  s'aiicndrait  â  Fdau^t  st  con~ 


I.  Pour  expl^uc^  cette  forme  il  ne  faudrait  pas  dire  que  «  tiotre  poème 
présente  souvent  e  pour  a  ji  :  r^r  est  la  forme  régulière  de  rarutn. 


T48  COMPTES    REKDCS 

dmtr  »,  ou  qu'an  pouffjii  lire  ;  IQn^']  tdatiu  y  c^mlmt,  ce  cjol  prouve  qu*tll€ 
aîîâche  un  sens  à  ce  mm,  mai<i  lequel  ?  Je  pense  ^u'îl  faut  lire  :  Sdon  i(o  ^ut 
îu  verras  K/  Vanee  U  le  ayndom.  —  2809  Quani  in  n[trt]  as  dt  rm  ttiesfati  :  je 
préfcrerais  n[fj.  —  Les  vv.  2^2 ^  N.  sont  très  difficiles  et  Texplication  qu'en 
donne  Miss  Y,  n'est  pas  claire.  Je  proposerais  :  Ki  îùh  pru  ksse  «ndormir^  Ti?si 
iî  pofra  f^rânî  fftalt^ttir;  Ki  enki  (=  €timi,  «  aujourd'hui  *)  fixai  irairt  n  fin 
E  a  ttrmi  desqu^at  rnatiti,  Bm  iô^l,  par  tUi  pûrhîgnter^  Li  avifni  puh  îiî  âittor^ 
hirr  Kf  ja  »ws  tn  tûitia  vie  La  hosùigm  nuvrafink,  ^  ^f^l^lAi  ai>rne  %flt  (m s, 
cn^  éd.  œks)  hontei  (ou  mîeux  honti^  et  au  v,  suiv.  vfrilé).    —  2K72  hat^t). 

J  ai  Jqa  eu  dans  cène  révision  du  texte  Toci^asgon  de  faire  q uniques  obser» 
vations  sur  les  noies  qui  le  suivent.  J'en  relC*ve  encore  quelques- unes.  Celle 
qui  concerne  le  v,  èo,  avec  la  proposition  de  substituer/wi/  àfuni,  qui  va  tort 
bien,  m*est  incompréhensible,  ^  La  difficuïté  sîjçnalécsur  le  v.  1 120,  estcntr^ 
s*accordant  avec  tvs  désignant  une  seule  personne,  nVsitstc  pas  i  cet  accord 
est  plus  ancien  que  Tusage  contraire.  —  Au  v,  tt  5 1  Li  mi  t7  a  signifie  plutôt 
m  là  où  il  y  il  (quelque  chose)  9-  —  ]*at  déjà  indique  que  rexplication  de*  vv. 
1744  ss*  était  peu  acceptable  ;  en  tout  cas  il  s'agit  id  de  saint  Paul  et  ooti  de 
saint  Pierre. —  V.  2572*3  Si  H  sagts  set  dmtfichitr  Li  iv^f*^  stt  bim  rfplekr 
(suppr.  bien^  car  i^f^rir  a  toujours  trois  syîbbes);  Miss»  Y,»  qui  dans  son  Glas* 
sairc  rend  chujkfmr  par  «  (ÎKer  av^^c  un  clou  1,  traduit  ici  :  (^  Si  le  sage  sait 
rester  terme^  le  ruse  sait  bien  se  replier  »*  ce  qui  ne  se  justice  guère.  J'ira- 
prl nierais  plutôt  cîou  fitbier^  et  je  comprendrais  :  «  Si  le  sage  sait  bien  planter 
un  dou^  le  rusé  sait  le  replier  »  (opération  fréquente  quand  on  plante  un 
dou). 

Dans  le  Glossaire,  Miss  Young  n'a  voulu  admettre  que  les  mots  «  rares, 
douteux  ou  remarquables  pour  n'importe  quelle  mi^n.  ■  11  y  a  naturelle- 
ment dans  tout  choix  de  ce  genre  une  part  d  arbitraire.  J'ai  déjà  signalé  plus 
d*un  mot  qui  aurait  dû  être  enn^gistré;  je  noterai  encore  ^^iiaVr  3276, 
arrurtr  t2i2,  tupet  76  (au  sens  de  toupie,  sabot),  intéressants  par  kur 
ancienneté,  îoiii  1584,  soriineûr  330,  qui  ne  sont  pas  des  mots  fréquente.  Le 
mot  hei  1427,  qui  semble  signiiVer  v  humeur,  disposition  >»,  m*cst  inconnu , 
ainsi  qu'à  Godefroy,  et  n'aurait  pas  dû  être  omis*  —  En  revanche,  sans  parler 
des  mots  qui  ne  semblaient  pas  valoir  la  peine  d'être  enregistrés,  îc  Glos- 
saire en  contient  plu?*  d'un  qui  doit  disparaître  :  ahi^er  ^Qg;(voy,  ci-drssui)» 
iiprrttnaiut  752  (id-),  aifser  2288  (t-  dunsCi*  /r^rr,  cfmriet  ,  voy.  ci-des$usX 
chiifichirr{ié),  tkmeni  468,  S%4  (id,),  tmperdre  69  (le  texte  porte  correcte- 
ment tn  péri),  emui<lier  28^  (le  texte  a  encore  la  bonne  coupure #»f  cuide%  fin 
11^8  (l'Errati  corrige  avec  raison  dans  le  texte  di  fin  en  4i  fi)^  radin  6B5 
(voy.  d-dessu$).  Les  traductions  sont  généralement  bannes;  quelques-unes 
sont  erronées  ou  douteuses*  Le  mot  hùitoui  137  {hoitomefnent  i^'^)^n%\Ati 
bien  signifier  er  bruyant  i»,  et  Mîss  Y,  le  rattache  avec  grande  vrais^nibUnccI 
au  moy.  angt  hùhtmi  (angL  nvid.  hûiikrom)\  mais  je  ne  crois  pas  qu*il  Caili 
le  reconnaître  dans  le  bùittmc  de  Gjillaume  Guiart  cité  par  GoJefray,  — 1 
Demandtr^  au  v.  1297^  est  traduit  par  h  être  prié  u,  ce  qui  ne  peut  être  :  iff#i^ 


M.-v.  YOUNG,  Les  Enseignements  de  Robert  de  Ho  149 
demander  veut  dire  «  sans  qu'on  lui  demande  ».  — Je  ne  comprends  pas  ce  qui 
peut  engager  à  traduire  w^iwn/Vr  356  (et  non  357)  par  «  arranger  »  :  le  sens 
du  quatrain  est  :  «  Fils,  ne  soyez  pas  trop  affligé  si  vous  êtes  jugé  injuste- 
ment ;  car  il  est  rare  que  ceux  qui  ont  trompé  les  autres  s'en  réjouissent  Ion- 
temps.  »  —  Bien  empiéter  229 1,«  réaliser  m^esaier  1287,  «  décrier  »,  ne  sont 
pas  des  traductions  absolument  exactes;  mais  il  ne  s'agit  que  de  nuances.  — 
Fret  1794,  "  mot  douteux  qui  semble  signifier y>r/io«  ».  Cest Jésus,  au  jour 
du  Jugement,  qui  reproche  aux  pécheurs  de  ne  pas  Tavoir  accueilli  dans  la 
personne  des  pauvres  :  Et  quant  je  jui  en  fret.  Malade,  dont  de  met  Veer  n'eùstes 
cure.  Le  passage  de  l'Évangile  dont  celui-ci  est  inspiré  est  :  Infirmus  et  in 
carcere,  et  non  visitastis  me  ;  c'est  ce  qui  a  suggéré  a  Miss  Y.  son  interprétation 
de  frei,  qui  est  plausible  en  soi  ;  mais  on  ne  voit  pas  ce  que  peut  être  ce  mot  : 
serait-ce  Tall.  fréd,  d'où  le  b.-lat.  fredum  au  sens  d'  «  amende  »?  — 
Hel  (qu'il  aurait  mieux  valu  ranger  à  el)  signifie  non  «  autre  »,  mais  a  autre 
chose  ».  —  Lor  2334  est  leur  et  non  lors.  —  Norrir  ne  peut  signifier 
<r  croître,  grandir  »;  au  v.  154  font  norrir  veut  dire  «  font  entretenir  ».  — 
Parissable  2858,  «  productif,  fécond  ».  Il  s'agit  de  la  loyauté,  source  et  con- 
dition de  toutes  les  vertus,  qui  est  utile  à  tous  les  âges  et  à  toutes  les  condi- 
tions, et  qui,  notamment.  Al  hacheler  est  parissable.  Le  sens  précis  du  mot,  qui 
n'est  peut-être  pas  très  assuré  (le  passage  n'est  que  dans  C),  m'échappe;  je  ne 
vois  pas  comment  Miss  Y.  est  arrivée  à  sa  traduction.  —  Pleines  (=  plaines) 
paroles  129  n'a  pas  besoin  d'être  changé  en  planies.  —  Pleniere  612  ne  veut 
pas  dire  «  absolution  plénière  »,  mais  est  adjectif  et  se  rapporte  à  charche, 
«pénitence».  —  L'art,  poiy  divisé  en  «  adjectif»,  «  pronom  »  et 
«  adverbe»  donnerait  lieu  à  une  discussion  qui  m'entraînerait  trop  loin; 
en  fait,  poi  dans  notre  texte  est  invariable  et  toujours  adverbe.  —  Première 
1538  ne  signifie  pas  «  la  principale  chose  »,  ni  1545  «  commencement  »  : 
c'est,  comme  je  l'ai  indiqué  plus  haut,  la  «  première  nature  »,  opposée  à  la 
«  seconde*-,  l'habitude.  — Sur  relement,  remetre,  repleier,  107,  voy.  ci-dessus. 
—  Repouoir  966  «  pouvoir  »,  aj.  «  aussi,  de  son  côté  ».  —  Resort  261 1,  «  res- 
triction ».  Ice  seit  sani  resort  signifie  plutôt  :  «  Que  cela  soit  sans  appel,  sans 
retour  ».  —  Sordre  501  (où  il  faut  lire  sordi  et  non  sorde^  voy.  ci-dessus) 
signifie  comme  toujours  «  surgir,  s'élever  »,  et  non  «  élever  ».  —  Sorfet 
1175,  «  injure,  forfait,  crime»;  plutôt  «excès».  —  Tressaillir  2386, 
«  sauter,  aller  vite  »  :  Qui  a  honor  veut  tressaillir  Contre  ese  Festud  efforcir, 
c'est  plutôt  a  parvenir,  monter  (à  travers  les  obstacles)  ».  —  Vuitters  2096, 
que  Miss  Y.  traduit  par  «  méprisable  »  et  rapproche  de  luitart,  est  un  mot 
bien  douteux  (C  donne  motiers)  ;  il  rime  avec  avers,  où  Miss  Y.  voit  aver, 
9  avare  »,  mais  qui  est  peut-être  une  faute  pour  laniers. 

Le  nombre  de  ces  remarques  critiques,  —  qui  prouve  simplement  l'intérêt 
que  j'ai  pris  à  la  publication  de  Miss  Young,  —  ne  doit  pas  donner  le  change 
sur  le  mérite  et  la  valeur  de  cette  publication, qui  sont  très  réels.  La  jeune  roma- 
niste américaine  a  choisi  pour  son  début  un  travail  devant  lequel  aurait  reculé 
plus  d'un  philologue  ayant  de  l'ancien  français  une  pratique  plus  ancienne,  et 


IjO  COMPTES    REKDUS 

Ta  exécuté  d'une  façon  qui  tui  fait  honneur  *.  Elle  a  !>ten  voulu,  en  souvenir 
de  nos  confère 'icçi  Je  T  Eco  le  des  Hiutes  Études^  inscnre  mon  nom  à  la 
premièfif  page  J.:  ^n  livre,  çt,  pour  me  fjire  pîu^  de  plahir,  elle  \\i  ai^soci^  a 
celui  de  mon  ami  H.  Morf,  aux  ki^ons  duquel  elle  s'esi  formée.  Elle  ajoute 
que  V  fouvrage  n'est  pas  digne  d'être  offert  à  ces  deuK  maîtres  i*  •  c*c5t  pous* 
ser  trop  loin  là  modcsue;  M.  Morf  ne  me  désavouera  pas,  je  lésais,  si  je  d\4 
que  n nus  regiirdans  notre  enseignement  cotnme  très  bien  employé  quand  il' 
produit  un  travail  aussi  utile  et  aussi  digne  dVloges  que  celui -ci. 

G.  R 


ilîier  ûie  Vengeance  d'Alexandre  van  Jean  le  Venetais, 

Jnauguraldissertation.,,  von  K;irl  Sackkow.  H^Uc   1902,  74  p» 

Die  Vengeance  AUxandre  von  Ji^han  le  Nevelan  picrausg. 
vonj  ScHULTZ-GofiA  [ikilin  1902.  Tirce  à  jo  ex.],  toi  p. 

Malgré  la  différence  des  noms  donnés  à  Tauieur,  il  s*agit  du  même  | 
dans  les  deux  publications  dont  les  titres  se  lisent  en  tète  de  cet  article.| 
M.  Sachrow,  s'appuyam  sur  la  majorité  des  mss.  et  sur  la  classification  quMeit 
a  établie,  adopte  le  nom  que  M,  Wilmotte  avait  le  premier  assigné  au  poète, 
tandis  que  M.  Schultz-Gora  sùiX  pour  le  nom,  lenis.  qu'il  n^produit  Sur  les 
autres  problèmes  que  soulève  ce  texte,  les  deux  philologues  arrivent  aussi  à 
des  conclusions  différentes  ;  M,  Sachrow  adopte  l'opinion  diaprés  laquelle  le 
poème  serait  dédié  au  comtL.-  Henri  le  Large,  de  Champagne,  mort  en  uili  ; 
selon  lui,  Tauteur  était  originaire  de  la  région  comprise  emreSoissons,  Ltonet 
Reims,  et  son  nom  serait  peut-être  à  rapprocher  de  celui  du  village  VûuUlay 
(dép.  de  la  Marne,  cant,  de  Fismcs).  M,  Schuîtz*Gora,  sans  apporter  de  m* 
sons  nouvelles,  se  range  à  Tavi'i  de  M,  P.  Meyer,  qui,  dans  son  Aifxnndfi  It 
Grami  dun^  lu  Ht  t.  Jr,  du  moyrn  d^e,  II,  265  ei  suiv.,  propose  de  voir,  dans  le 
w  comte  Henri  n  auquel  le  pone  fait  aîiusior.,  Henri  V,  comte  de  LtisLcmbourg 
depuis  l  a 88  Cl  proclamé  roi  des  Romains  en  i  îo8  '. 

Il  est  en  e€et  exirèmemeni  difficile  de  fixer  la  date  de  la  compotiitlon  de 
ce  texte,  ar  on  ny  trouve  aucune  allusior.  historique  qui  puisse  nous  y 
aidera  et  Tanjlysc  de  U  langue  ne  donne  pas  df  résultats  bien  préds. 
Quoique  les  traits  dialectaux  que  nou^  fournit  Tétude  des  rimes  ne  soient 
pas  très  caraatnstiqui.^,  ils  rendent  pourtant  probable  que  la  patrie  de  l'au- 
teur est  à  chefclier  dans  le  nord  de  la  Champagne,  ce  qui  est  en  faveur  de 
r identité  du  protecteur  de  notre  poète  avec  Henri  I"  de  Champagne,  tl  est 


1 .  Je  remarquerai  en  passant  qae  le  livre  de  Miss  Y  est  écrit  en  très  bon 

a,  fC'c>t  Topinion  ^ui  me  paraît  encore  la  pluspnïbaHe.  *-  P,  M  J 

]«  De  b  mention,  au  v.    ttçé,  SAr^bU,   nom    de    Iku  figurant  dans 


SACHROW,  Die  Fengeance  d'Alexandre  151 

vrai  qu*un  certain  nombre  de  fautes  de  déclinaison  et  de  formes  verbales 
analogiques  semblent  parler  contre  un  âge  aussi  reculé,  mais  d*autre  part  le 
texte  offre  aussi  des  traits  archaïques.  Je  reviendrai  plus  loin  sur  ce  sujet. 

Examinons  maintenant  d'une  manière  un  peu  plus  détaillée  la  thèse  de 
M.  Sachrow.  Voici  d*abord  le  tableau  de  classement  qu^il  a  dressé  des  sept 
mss.  de  la  Vengeanu^: 


\ 


N        X 

A  i 

M.  Schultz-Gora  est  d'un  autre  avis  au  sujet  de  la  filiation  des  mss.,  bien 
que,  comme  il  le  dit  lui-même,  cette  partie  de  son  travail  ne  soit  guère 
qu'une  esquisse.  D'après  lui  KOX  -f-  Q  forment  un  groupe,  M  constitue  à  lui 
seul  une  autre  famille,  et  PS^  ayant  puisé  k  la  fois  dans  la  source  de  M  et 
dans  celle  de  NOXQy  occupent  une  place  intermédiaire. 

Aucun  de  ces  classements  n*est  exact,  à  mon  avis.  Il  est  vrai  que  les  mss. 
.V  et  X  sont  apparentés  ;  ils  le  sont  même  à  un  point  que  M.  Sachrow  ne 
soupçonnait  pas,  ne  connaissant  de  X  qu'un  petit  nombre  de  vers.  Il  est 
exact  encore  que  5  et  P  sont  intimement  liés  ensemble  ;  mais  M.  S.  et 
M.  Sch.-G.  se  trompent  tous  deux  en  supposant  pour  ce  groupe  deux  sources 
différentes  dont  Tune  serait  apparentée  à  Af ,  l'autre  à  Q  {NOXQ)  :  il  n'en  a  cer- 
tainement eu  qu'une.  Par  contre  c'est  le  ms.  jQ  qui  dérive  de  deux  sources,  dont 
Tune  appartient  à  la  famille  de  NXy  l'autre  au  groupe  MPS;  le  copiste  a  géné- 
ralement puisé  à  la  première  en  écrivant  les  450  premiers  vers,  à  l'autre  en 
écrivant  le  reste  du  poème.  Je  regrette  que  l'espace  nie  manque  pour  citer  ici 
les  passages  qui  prouvent  l'exactitude  de  celte  assertion.  Je  dois  me  bornera 
dire  que  c'est  là  le  résultat  du  classement  que  j'ai  fait  en  vue  d'une  édition 
critique  de  la  Vengeance  y  édition  projetée  déjà  avant  l'apparition  de  la  thèse  de 


Fouœti  de  Candie  (voy.  Schuliz-Gora,  p.  6),  il  n'y  a  pas  grand*  chose  à 
conclure,  la  date  de  ce  poème  n'étant  pas  encore  fixée.  M.  G.  Paris  le  place 
vers  1170,  M.  Suchier  vers  1195.  Il  en  est  de  même  des  vers  cités  par 
.M.  Sachrow,  p.  52,  dans  lesquels  sont  mentionnés  les  noms  de  Fronionty 
Foiicon  et  Thielniui  ;  d'ailleurs  je  doute  fort  de  l'authenticité  de  ce  passage. 

I.  .V  --  Bibl.  \at.  f.  fr.  791  ;  O  .  B.  N.  fr.  1375  ;  X  =z  Mus.  Britt.  19 
D.  1.  Ai  =  B.  \.  fr.  24565  ;  Q.  -  B.  N.  Ir.  790;  =  P  -  Oxford,  Bodlev 
264;  S  =  B.  N.  fr.  1590. 


I>2  COMPTES   RENDUS 

M,  SachrcwS  et  qut  je  donnerai  peut-^trt  un  jour  ou!'auirc,  malgré  loui.Li. 
fait  qui*  le  ms.  Af  se  rattache  au  groupe (0P5  e-M  aîtesté  par  les  deux  passages 
relevés  par  M*  S,, p.  ^o,  —âom  au  moins  k  premier  pjraîi  absolumtni  pro- 
bant, —  ei  auxquels  on  pourrait  en  ajouter  une  dcmi^doiizaine  d*auires. 
D'après  M.  Sachrow,  N  serait,  matgrt*  bien  des  bièvues  imputables  auit 
deux  copistes  qui  l'ont  c)((3cuté  (cL  p,  14  et  54)^  le  meilleur,  pour  le  Jbnd, 
de  10 us  ki  mss,  du  poème  et  aurait  dans  beaucoup  de  cas  seul  consent  là 
ItÇOn  originale.  Mûh  dans  a  peu  près  tous  les  cis  qu'il  ciie,  —  sauf  ceuic 
auxquels  je  viens  dt  faire  allusion,  —  la  leçon  de  N  est  au  coturair«  fautive. 
M.  Schulu-Gora  en  a  âcp  indiqué  deux,  dans  les  notes  des  vv,  560  et  6}2*i 
il  en  est  de  niémc  du  v  70^1,  où  selon  M.  S.,  p.  so,  *V  offrirait  seul  la  bonne 
Icçôii  :  Moîii  rfitmbk  bun  pvina  rî  bon  de  bardrmtni  (X,  inconnu  à  M.  S.^  à 
pïain  ili  grant  6.),  tandis  que  le  v.  préc*,  Lks  purru  de  son  hmutttf  tr^hut  U 
chû'itp  rfipLnt,  indique  bitn  plutôt  que  UQSP  ont  la  leçon  originale  ;  Mcui 
nsûmhle  tien  loi  por  le  ihttr  ^^tinttmnit.  Au  v,  862  b  leçon  de  h\  Car  kifn$ 
fiiirl  ja  liomijiH)  pur  fmtii  ajattte  ^  straiï  la  boimc  (p.  40)  Voici  ce  que 
pi*rtent  les  autr^  m^s.  :  X  (inci  nnu  i\  M.  S.)  C  /.  wV.  /a  fîomttir  par  nul  ai 
û.,  MQPS  Ja  hmt€  n'erl  L  di%{ram%  (QPS  àfitnit^)  ne  a.  Ni  ta  leçon  de  X  01 
encore  moins  eelle  de  *V  ne  sont  admissibles  ;  la  conjonction  car  n'a  rien  à 
fjire  à  cet  endroit,  D*autre  p*irt  î'acc,  Imut  paraît  trop  choquani;  je  suppose 
qu*it  faut  lire/ti  funti  tt[fti]^.(ou  Ja  [ttui]  iMwt.Jti  [m  ii>J  h  ).  J'ajouterai  encore 
quelques  mot<i  pour  montrer  jusqu'à  quel  point  M*  Sachrow  suit  aveuglé- 
ment le  ms.  ^,  P.  îSj  en  parlant  de  fa  niélnque  du  pnéme^  M.  S*  nous  dît 
que  trois  fois  Tiiy  leur  admet  à  la  rime  le  môme  mot  dan^  deuat  %*ers  consé- 
cutifs :  V.  itoet  ni  uttrr^  v.  ^$1  et  S831  Hongrie^  1119  et  1150  fdm.  Or, 
que  irouve-t'On  dans  ks  mss.  ?  Dans  k  premier  cas  il  y  a  sturr  :  tftnvouenrt^ 
dans  NKQP,  S  fait  défaut,  M  écrit  dtmôiitun  ;  dans  k  deuxième,  où  selon 
M.  S.  il  faudrait  lire  datrurs  df  Hon^rk  :  ffmgrk^  ce  ne  sont  que  NX  qui 
portent  d.  dû  Hottgrie^  —  ci  ils  omettent  le  second  vers,  qui  est  indispensable 
pour  le  sens,  —  M  a  df  NuHe,  QPS  df  Saîk  ;  dans  k  troîsii^me  ^V  et  X 
omettent  de  nouveau  un  versauthenti-|ue  et  indispensable.  Voici  le  passage  : 

Et  ont  trouvé  Tcsior  mcrveillcus  et  fclon, 

Et  djtni  Clins  Icssc  cortc,  vct  jousier  â  Tcison  ; 

Niex  fu  Antipiiter  dti  ligDiige  «u  khn* 

Le  second  vers  manque  dans  NX,  ce  qui  rend  cet  lignes  incompréhen- 
sible* dans  ces  mss  ».  Ixms.  N  est  en  effet  médiocre,  et  laplupandeses  fautes 


1,  Voy*  Rom.  XXXI,  1 66.  M,  Frcymond  m'ayanl  averti  qu'il  n*avalt  pas 
renonce  à  publi^-r  la  Ven^mnCf  de  Gui  de  Cambrai*  projet  annoncé  ici 
mcmc  \\  y  a  dou?.e  ans,  je  lui  ai  écrit  immédiatement  que  j'abandonnais  mon 
plan  de  publier  ks  deux  textes  ensemble. 

2.  Pour  ta  numérotation  des  vers  je  suis  toujotirs  rédliion  de  M.  Schulu* 
Gota. 

I  r.  59  M.  S.  cite,  comme  doublet  de  ^rim,  grfjûU(\\  qui  n*est  natun:11e- 
mcni  qu  un  lapsus  du  seul  ms.  N  ^ut^tjm. 


SACHROW,  Die  Vtngtanct  AUxandrc  1 5  j 

se  retrouvent  dans  X,  —  même  .xL  pour  Casmârant^  au  v*  1562,  que 
M.  Sadirow  cite  comme  uri  exemple  frappant  de  la  négligence  du  second 
scribe  (p.  ^4).  M.  Schuhz-Gora  n  très  bien  fait  de  prendre  pour  base  de  son 
édition  Af,  q\i\  est,  de  beaucoup,  îe  meilleur  manuscrit. 

L'étude  des  rimes»  qui  â  vrai  dire  n^oflfrait  pas  de  bien  grandes  difficultés^ 
est  en  somme  assez  satisfaîsame.  Je  relèverai  cependant  quelques  erreurs  un 
peu  fortes.  P.  4}, S  3  nm^^  pour  ttusél^  ne  remonte  pas  à  nasiUum  mais  â 
nisalem*  —  !bïd.  M.  Sacbrow  voit  un  exemple  de  la  désinence  Lit*  a  rem  dans 
le  mot  merkr,  w  im  „  c*est  toui  bonnement  un  infinitif  «  mi  seul  are),  — ► 
P.  44,  S  i'  ^^  subst,  compUe  ne  vient  pas  du  lat*  c om p leta  mAis  éa  fr. compHr^ 
—  D'après  M.  S.,  ffrR,  fis  serait  le  produit  de  fi li  us  au  v,  285,  que  voici  : 
/fr  femmfrai  qikne,  ^f  lui  stti  je  /nw^/f  (I).  —  L*asscrîion  de  M,  S.  que  Tau- 
leur  de  notre  poëm':?  ferait  rimer  ci  et  fi  <  ti  est  due  i  une  faute  de  lecture  : 
au  V.  67,  laissa  en  -oi  {voi,  m,  etc.),  Icsmss.  portent  non  pas  andot  mais  au 
dûi,  —  Il  est  exact  que  an  et  ai  rîmcm  ensemble,  cf.  les  bisses  54,  46,  65, 
71  ;  mait  il  est  à  remarquer  que  la  tirade  S  n*a  sans  doute  contenu  que  des 
mots  en  -int  dans  rorîginal,  et  que  dans  les  mss,  MX  la  tirade  77  est  divisée 
cndeuxï  la  première  en  -ant,  la  seconde,  qui  commence  avec  îe  v.  1903,  en 
-rnt,  —  IL  est  exagéré  de  dire  que  i  s'est  changé  en  s  dans  la  Vengeance i  il  y 
a  au  contraire  une  tendance  très  marquée  à  tenir  scpar^  ces  deux  sons.  Ainsi 
les  laisses  lo»  30,  4^\  >0,  60,  en  <if,  sont  toutes  pures,  sî  ce  n'est  que  le 
rég.  faifitis  (<  -ici  u  m)  se  trouve  i  la  rîme  au  v.  203^  et  /jî^,  remplacé  par  vh 
dans  les  mss.  AfP,  au  v.  992;  de  môme  la  laisse  57,  en  -ii  (remarquez 
massif  127 4)»  tandis  tfoe  dans  la  l.  14,  en  -t^^  figurent  les  mots  pais,  amis 
(deuît  fois),  Mottcfttli  ^  Les  laisses  en  -w^  et  en  -m^  ^^^^  pures;  par  contre  on 
trouve  la  forme  irf(  <  Irabes  aux  w.  950  et  î  592.  A  cet  égard  notre  auteur 
n'est  donc  guère  plus  avancé  que  Chrétien  de  Troyes,  voy*  Fdrster»  Oig/s 
f  grande  éd  ),  p.  Lxxiti. 

J*ai  dit  plus  haut  que  le  texte  offre  quelques  fliutes  contre  les  règles  de  la 
déclÎTiaison.  Les  cas  où  l'ace,  a  été  mis  pour  le  nom.  ne  sont  pas  nombreux; 
il  yen  aune  dizaine  au  plus^  Mais  ce  qui  est  plus  grave»  c^est  qu1l  semble 
bien  que  lauteursesoit  quelquefois  permis  d'employer»  pour  les  besoins  de 
La  rime,  le  nom,  dans  la  fonction  de  Face.  M  S^chrow  veut  éliminer  ces  cas 
en  y  supposant  des  assonances»  mais  cette  explication  se  heurte  contre  le 
fait  que,  —  malgré  ce^u'en  dit  M.  Schult^-Gora  dans  ktiote  du  v,  aS^,  — 
il  Oy  a' pas  assonances  dans  le  poéme^  si  ce  n'est  -é  \  m  mi^r)  pH  ;  drUriHr) 
j4î     mMJ)  1085,  et  CCS  formes  sont  bien  connues  d*a  il  leurs.    Plusieurs  de 


K  Cette  laisse  est  corrompue  dans  le  ms.  imprimé  par  M.  Schu!tiE-Gûra, 
2.  Au   moins  un  det^  six  cas  allégués  par  M.  S.  est  h  rayer  ;  Fihk  au 
V*  974  est  régime,  non  pas  sujet.  De  plus  il  est  â  remarquer  que  dans  un  de 
€cs  Ois  le  ms.  .Vf  n'enfreint  pas  la  rc^k,  et  que  troi^  autres  concenient  le 
mot  4'r///.  Par  coiitrc,  il  faut  ajouter  quelques  c;ts  nouveausi. 


I>4  CDMPTKS    RENDUS 

CCS  incorrections  peuvent  êtra  facilement  écartées,  mais  tl  reste  toujours 
les  cas  suivants:  v.  7CX3*  Et  ni^ntons  (corr*  ironf})  ai^c  ttoui  .^Hx  P^ruîHl*^ 
\\  1600.  Et  diîHsCtini/it  mofdr^  ffi  Pm/isranl crrttui  (corr,  A  jerrmH  qurtt  c.  ?), 
Après  n  vùH%  on  trouve  le  cas  sujet  :  v.  \  5495  Atani  a  vmts  k  roy  AUor  ât-^- 
hiiichiei^  et  peut-être  au  v,  1 569  :  Guumts  H  nît^  U  roy  f^  tints  kut$  mmie^ 
NX  (les  autres  mss.  fit  eii  L  m.).  Les  w.  io$6-S  me  paraissent  oor- 
rompus  ;  je  propose  de  lire  Altor  h  fiett  st  Iqfté]  p^ce  ui  eicui^\  Bt  i'jubm 
de  Sun  dos  \fsl]  ifamhfs  pars  rompu;  \  Et  Pûrçam  àf  h  sHk  par  dtirkn  fm- 
dui  ;  vO)^  ïes  variantes  dans  Sachrow,  p,  49*  l\  est  vrai  que  perdnr  est  géné- 
ralement actifs  mais  il  semble  bien  être  neutre  dans  notre  texte,  v,  1170, 
Rien  d'étonnant  :  les  verbes  atïaiogues,  tels  que  dêptckr,  dtsmfntir,  /ttusser, 
j'rawdrf.Jft^r,  p^çùkr,  rompu  etc.  sont  tour  à  tour  actifs  et  neutres.  ^-  Pour  k 
V.  861  cL   plus  haut. 

Il  est  vrai  que  les  verbes  de  la  i^e  conj.  ont»  au  moins  deux  fois  sur  trob, 
pris  un  t  analogique  â  la  i^^  pers.  sîng,  du  prés,  subj  ,  vv,  :j57  (Uste)  et 
466  {mtint)^  Piïr  coi>ire  U  y^  pers,  n'ulTre  jamais  JV;  les  deux  exemples 
allégués  par  M.  Sachrow,  p.  58,  sont  errronés.  Dans  le  premier,  v.  690»  k 
verbe  est  il  l'irTilcatif,  dans  le  stîconJ,  v,  45^,  il  faut  lire  avec  MPS{Q) pawlt^ 
non  pas  chanit  (NX).  —  D'autres  traits  relativement  rC-cenis  sont  cmt  mil 
V.  628  ;  cotârfû;  à  côté  ûiâ  cmrui:  ét^ux  ou  trois  participes  neutres  traités 
comme  masc.  (Sachr.,  p.  53^  ^^  P-^-  ^'-  i2%ù)i  la  rimed/  ;  oi  (dAak  :  -ôîf 
1927)»  fréquente  au  milieu  du  xut«  siécle{^i^jA  Rustebuei)  mais  qui  se  ren- 
contre sensiblement  plus  tôt^  p*  ex,  Nitthmnnis  (vers  13 10)  66$1  dehl  i  -<w, 
Rom  d'Alix    594,  27,  moi^  *ai  * . 

D'autre  patt  le  te\ie  oiïre  aussi  des  traits  archaïques  :  les  adjeaifs  de  h 
Y  tJccl  îat.  n'ont  jamais  dV  au  le  m,,  la  i"^  pers.  du  prés,  înd.  ne  prend 
jamais  dV  ni  d*j  non  étymologiques  ;  le  prétérit  de  dtsctndff  est  ét$muHi  5 14, 
les  verbes  lels  que  mtrdtr,  crier  etc.  riment  toujours  en  *fr**^  \ï  n'y  a  p^% 
d'  «  éliiion  interne  0  sauf  dans  Timpér  t'.x,  pas  de  rimes  -ai  \  /  (fréquentes  nu 
XUK  s.);enftn  le  style  paraît  être  de  la  bonne  époque.  L*ensemblc  des  traits 
linguistiques  que  je  viens  de  relever  conviendrait  le  mieux  â  un  poéniede  la 
première  moitir  du  xttl«  siècle,  ntj  semble-t-il;  mais  n'ayant  à  choisir 
qu'entre  Henri  le  Large  (ttîl^l  181)  et  Henri  de  Luxembourg  (iië9-i;oH), 
—  car  il  n'y  a  pas  d'autre  «  comte  Henri  «  possible,  que  je  sache,  —  je 
penche,  bien  qu'avec  hésitation,  pour  îc  premier,  à  qui  s'appîique  d*aillcurs 


K  On  trouve  b  timt  paîrt  i  Jmré  dans  les  Fables  de  Marie  de  France, 
79' K  mai^  réditeur,  M.  Wamke,  doute  de  l'authenticité  de  cette  rime;  voir 
redit  ion.  p,  LxxxiiK 

2.  En  revanche  il  y  a  quelques  rimes  de  k'  :  /,  ainsi  -ir^  :  loufi  45,  1417 
(<  tmtJfi*tti;  le  nn'  M  écrit  iotr^,  ^>"^^0*  """*  »  iffornf  ^tq.  où  M.  Sch/  G. 
corrige  ttdattiî\  ei   -ié    :    tutunt  ttef  ^in^nnr    \lb  „  \o\ .  les   variantes  d^tts 
SAchr.,  p«  Ji.  On  pourrait  conjcciurer  maint  [béti]  tttj\y¥*fté\. 


SCHULTZ-GORA,  Dîc  Vengeatiu  Alixandre  155 

admirablement  ce  que  dit  notre  poète  de  son  noble  protecteur,  dans  les 
vv.  46  ss.  Le  fait  qu'aucun  des  mss.  qui  contiennent  notre  texte  ne 
remonte  au  delà  de  la  première  moitié  du  xive  siècle  est  étonnant,  mais 
n*a  pas  une  granJe  Jorce  probante  Evidemment  le  poème  a  pu  se  trouver, 
séparément  ou  joint  au  Rom.  d'Alix.,  dans  des  mss.  plus  anciens  qui  ne 
nous  sont  pas  parvenus.  Les  plus  anciens  des  mss.  que  nous  ont  transmis 
la  Vitigcanct  de  Gui  de  Cambrai,  écrite  avant  1191,  sont  du  milieu  ou  du 
troisième  quart  du  xiiic  siècle  '. 

•  On  a  beaucoup  discuté  sur  le  vrai  nom  de  Fauteur  de  notre  poème.  G)mme 
je  l'ai  dit  au  commencement  de  cet  article,  M.  Saclirow  s'est  décidé  pour 
Jehan  le  Venelais.  Mais  on  a  vu  plus  haut  que  je  repousse  le  classement  des 
mss.  établi  par  M.  S.  et  que,  à  mon  avis,  les  quatre  mss.  qui  présentent  la 
forme  mentionnée  ne  font,  pour  cette  partie  du  poème,  —  Tauteur  se 
nomme  au  v.  59,  —  qu'un  seul  groupe.  M.  Schultz-Gora  défend  la  forme 
offerte  par  le  ms.  M,  //  NevAons.  Nevelon  est  connu  en  Champagne  et  ailleurs; 
pour  l'emploi  comme  surnom  M.  Sch.-G.  compare /^a/i  H  Mikieus  relevé 
dans  le  Cartnlaire  de  Flines  (éd.  Hautcœur).  En  fait,  la  leçon  de  PS  remonte 
sans  doute  aussi  à  li  Neirlous;  je  suppose  du  moins  que  le  copiste  de  la 
source  de  ces  deux  mss.  a  XuJcImiïsH  uoueloirs,  erreur  facile  à  comprendre  au 
point  de  vue  paléographique,  et  «  corrigé  »  /.  li  twuiaus  lx>irs.  De  même 
je  présume  que  /.  Nevelaux,  Nevelaus  (sans  article),  comme  écrit  Wauquelin, 
provient  de  Nn'elous  pour  Nn'elons.  Aussi  avais-je,  déjà  avant  de  connaître 
l'édition  de  M.  Sch.-G.,  aJopté  comme  le  plus  probaole  le  surnom  de  le  Neve- 
lon. La  supptîsiiion  qu'il  laudrait  lire  le  Nei'elois  n'est  même  pas  appuyée 
par  la  langue  du  texte.  D'un  autre  côté  le  surnom  le  Venelais  est  tout  à  fait 
obscur,  et  l'idée  de  le  rapprocher  du  nom  de  lieu  Vantelay,  Ventelay,  est 
bien  extraordinaire.  Selon  M.  Sachrow,  p.  67,  ce  nom  serait  une  faute  pour 
le  Ventelais,  de  Ventelai  -\-  5,  formation  à  l'appui  de  laquelle  il  cite  (Estienes) 
li  Viennes,  tiré  du  Rôle  des  Vassaux  des  ducs  de  Champagne,  ne  voyant  pas 
que  c'est    là   une   simple  graphie  pour   Viennes,  Vennais  (Viennois). 

L'édition  de  M  Schultz-G  jra  est  précédée  d'une  courte  préface  où  l'éditeur 
traite  de  la  date  du  poème  et  du  nom  de  l'auteur  ;  il  y  discute  aussi  la  valeur 
-  des  mss.  et  expose  le  principe  qui  l'a  guidé  dans  l'établissement  du  texte. 
Puisque,  comme  nous  l'avons  vu,  dans  la  classification  de  M.  Sch.-G.,  le 
ms.  M  vaut  à  peu  près  autant  que  tous  les  autres  ensemble,  l'éditeur  se 
borne  à  reproduire  ce  ms.,  s'en  écartant  seulement  là  où  le  texte  est  trop 
visiblement  corrompu  *.  Je  ne  relèverai  naturellement  pas  tous  les  passages 


I.  Vov.  l'étude  de  M.  P.  Meyer  sur  les  mss.  du  Ronum  d' Alixandre 
Rom.,  Xl,  215SS. 

3.  Partout  où  M.  Sch.-G.  s'éloigne  du  nis.  M  il  en  indique  la  leçon  au  bas 
de  la  page;  par  contre  il  ne  donne  les  variantes  des  autres  mss.  que  dans 
certains  cas  spéciaux  mentionnés  dans  les  notes. 


10  COMPTES    R£KDCS 

de  moindre  importjucç  où,  sdan  moi,  t*accord  d^  fnss,  prou^  qoll  aurait 
fallu  adopter  une  autre  leçofi.  mais  )  indiquerai  ï*.-*  endroits  où  j'ai  lu  autre 
chit^  qiie  M-  Se  h. -G,  dans  le  ms  ;  je  ^ignakrii  aussi  quelques  otnissionâ  oa 
lapsus  de  ^  part,  ainsi  que  d'autres  cas  J'une  certaine  importance, 

V,  14  lïijîw,  mi.  m  ).  (de  m^ie  Wilmottc),  ^  W  51  qui  bon  fuit  ^fiwf/r<^, 
lis*  /il,  avec  tous  les  autres  mss.  —  V.  lî,  note  :  is  n'est  pas  nccessaireroenf 
un  nom-  k  mon  avis;  cC  Face,  dJw  attesté  à  côté  de  oUf,  et  /ij»  /iî-  -^  V.  58 
Fwf^,  ms.  J'ôr^  (de  même  Wilmortc)*  —  V.  54,  note.  D*apres  cette  note, 
Fihii^  au  V,  974,  serait  sujet  i  iî  résulte  pourtimt  de  h  miducûon  parfaitec- 
ment  exacte  que  donne  F  éditeur  dans  la  note  du  vers  en  question  que  fiîùii 
est  régime.  —  V,  62  Qiit  Xkhlas  occhî  ;  KX  Rqî  N,  vaut  beaucoup  mieux 
(PS  Quef.  ^  V.  7î»  note.  I/cdîteur  ne  s  explique  pas  k  mot  Paklrm 
otTert  p^f  tous  les  nrss.,  et  ^  demande  si  c'est  le  nom  de  la  bni  dé  la  reine 
Candacc  ou  s*il  faut  restituer  ^hmt,  désignant  la  rdne  cl  le- même.  Rien 
n'est  pourtant  pfus  clair;  c'est  le  duc  de  Pûïaiîm  qui  avait  ravi  La  hru  de  la 
reine,  voy,  k  Rom.  d'AUx.  jyi,  7  (var.),  574,  „  (var),  îi»  17Îi  *S.  17^.4- 
—  V.  So,  note.  Selon  M.  Sch.-G.  le  Rom,  iTAtix.  ne  mentionnerait  I Inti- 
mité d'Alexandre  et  de  Caiîdace  qu'à  la  p.  497,  au  cours  du  rccît  d'un  autre 
épisode;  cîle  est  cependant  indiquée  déjà  pp,  580  et  182.  — -  V.  108.  Je  ne 
sab  pas  trop  pourquoi  M.  Sch.  G.  ne  conserve  pas,  ici  et  ailleurs^  la  graphie 
ftdi  <  filius  Elle  est  intéressante  par  la  métathése  et  tout  à  fait  régulière 
dans  te  m%,  (elle  se  trouve  en  réalité  déj  aux  vv.  f  1^  41,  84^  bien  quHt  n'en 
soit  pas  fait  metitionj.  L'éditeur  itriprîme  bien  tuk'  <  iiui  (ikuf)  65 1^  78^, 
794.  —  V.  T2a  fis^  mit.  Jui^,  — ^  V,  199  ura  imikurutevé^  1.  lermit  (XS).  — 
V,  aoa  k  pttus  tt  k  gfUiihf  L  qui  est  p.  et  g.  (NXQ.)>  —  V.  244  granJ^  ms* 
grant  (faute  d'impr.).  —  V,  180  ss.  et  note.  Ce  passage  est  altéré  dans  M  ;  sans 
parler  de  df  Anlio^he,  ce  ms.  est  le  seul  qui  écrive  Aniigi^nm  pour  AntuKus. 
Le  fait  relevé  par  M.  Se  h, -G*  qu'au  v,  1189  tous  les  mss.  f>orteru  A*di^mut^ 
ne  prouve  rien,  pas  plus  que  la  prétendue  confusion  dans  le  Rom.  d'Alix. 
M.  Sch.-G.  aurait  dû  remarquer  qu\'f///i;;,'t>wMi  qui  reçoit  la  Syrie  p.  514  et 
Antiocm  qui  possède  Antioche  p.  514  (cf.  notre  poème)  ne  sont  pas  une 
même  personne,  et  que  parmi  les  dou^c  pairs  d'Alexandre,  énumérés 
p.  1 4  s^i.  €1  1 7  figure  aussi  bien  Aniiocus  qu' Antîgonus.  Liseï,  avee  NXQ  : 
i%me,  d*Afitiocui  m*Ht  mmtt  ^rani  pie  dti  ;  |  La  die  d'Atitlothi  tkut^  si  in 
fît  satih  etc.  —  V.  ^2b  trtj  de  Nubie  (  :  f/),  1.  trtj  ^irmné^  d.  ci^dc^us*  — 
V.  \\i  akml  leur  ctjeiHittchie (  i  f/),  1,  el  ont  tant  c tiemmchk'  (NXQP).  ^  V.  481 
Baucfftt,  ms,  But4cant.  ^  V.  jot  ss,  lire  //  tvnt  par  kur  jmtfuetj  et  mi  tant 
chnmuchi/  \  Qtia  Faug renie  viennent  $i  smt  iôimtt  et  lié  (KX);  JOJ  L  jont  fies- 
cendu^  J04  mtmient,  505  Aliùr  vùit  Famani  (NX);  voy.  Sachrow.  p.  jo,  — 
V*  507   Apfo  la  première  moitié  de  ce  vers  Téditeur  a  omis  deux  hémî* 


I.  Je  ne  cite  jamais  O,  mauvais  ms.  du  xv*  siècle  et  qu'on  peut  regarder 
conime  un  descendant  direct  de  iV. 


scHULTZ-GORA,  Die  yenreance  Alixandre  157 

âtiches;  le  ms,  porte  Puis  li  a  demauJc  \  [^^  Comment  as  esploitié}  \  Que  me 
manie  Urois  }]Avrade  moi  pitié}  «  —  V.  ^cm)  </<',!.  le  (faute  J'impr.)  —  V.  539 
Mettre  ici  le  guillemet  et  les  deux  points  placés  devant  le  v.  542.  —  V.  540 
Et  H  hliaut  forre  a  miinieres  deuvie  (NX),  1.  plutôt  avec  QPS  d\rmine  bien 
deiigiè\  M  écrit  et  d^ennine  enroulé.  Pour  le  genre  masc.  du  mot  cf.  R.  de 
Cambrai,  17 18,  Si^j ,  ermitte  deïgié.  —  V.  553  antii,  1.  orgueil  (KX)  ;  le  mot 
flwiii,  qui  figure  au  v.  précédent,  est  inadmissible  ici.  — V.  569  Lis.  Tel  com- 
fmigtte  ne  fu  veuene  oie  (NX);  voy.  Sachrow,  p.  30. —  V.  575  AriUes  s'acorda^ 
1.  Aristé  a.,  avec  S  (P  Aristes  a.,  i]  Ariste:^  a.\  NX  font  défaut);  avec  la 
leçon  de  M  les  vv.  577  sqq.  donnent  un  contresens.  —  V.  629  ouques  ne  fu 
tneillor,  1.  aine  hom  ne  vit  m.  (ainsi  NX;  QPS  nus  fx>ns  ne  v.  m.).  —  V.  663 
Juire,  1.  /M/r(NXQPS).  —  V.  6^Candaleon,  ms.  Candeolon.  —  V.  739  tretuit 
communément  y  1.  //  Irahitour  puant  (N;  Xpaiant  ?).  —  V.  774  est  haute  d*une 
loee  donne  une  syllabe  de  trop  ;  le  ms.  porte  e.  /;.  utu  /.  —  V.  798  Lire 
pesu  (faute  d*impr.).  —  V.  810  Irestoute,  ms.  tretoute.  —  V.  814  œuvre^  ms. 
oevre,  —  V.  839  «n  a  ja  près  s'eisine,  ms.  pris  seisine.  Gjntrairement  à  ce 
qu'en  dit  M.  Sch.-G.  dans  la  note,  tous  les  mss.  écrivent  pris^  abrégé  Ou  en 
toutes  lettres.  Il  est  vrai  qu'en  réalité  Alior  ne  s'est  pas  encore  emparé  d'An, 
tipater,  mais  cette  anticipation  n'est  pas  plus  frappante  que  celle  de  Florent  au 
V.  1485,  par  exemple.  —  P.  853  sont  li  molin  fennec,  1.  ont  les  molinsf.  (NX). 
—  V.  862  Voy.  plus  haut.  —V.  895  croissie,  1.  trenchie  (NXQPS).  —  V.  907 
catdaus  de  tir,  1.  de  Tir;  de  môme  1627,  1654  (cf.  piiiles  de  Tir  Narb.  3973)s 
Ce  nom  ne  figure  pas  à  la  table  des  noms  propres.  —  Vv.  1015  et  1042  II  ne 
me  parait  nullement  certain  que  le  v.  1042,  Seigneur  le  roi  d'Ongrie,  qu'il  en  a 
grant  mestier,  contienne  une  faute  commune  à  tous  les  mss.,  comme  le  veut 
M.  Sachr.,  p.  27,  ni  que  l'auteur  ait  confondu  aux  vv.  1017,  1023  et  1042 
le  roi  de  Bougrieax  t amiral  de  Hongrie,  comme  le  suppose  M.  Sch.-G.  dans 
la  note  du  v.  882.  D'abord,  il  n'y  avait  pas  de  roi  de  Hongrie  dans  l'original, 
à  mon  avis.  Je  crois,  comme  M.  Sachrow,  que  cette  épithéte  a  été  intro- 
duite par  M,  ou  plutôt  par  la  source  de  ce  ms.,  peut-être  à  cause  du  v.  883 
Lts  Hongres  et  les  Bougres  ot  en  sa  compaignie  ;  les  ms.  PS  écrivent  deux  ou 
trois  fois  roi  de  Bougie,  par  conséquent  cette  expression  remonte  à  la  source 
commune  de  MQPS,  En  effet  ce  n'est  pas,  comme  le  dit  M.  Sch.-G.  dans 
la  note  citée,  seulement  au  v.  1042  que  M  porte,  --  ainsi  que  tous  les  autres 
mss.,  —  le  roy  d*Ongrie,  mais  encore  au  v.  1541  :  Fiert  le  roy  de  Hongrie 
elc,  ;  par  contre  il  écni  amiral  de  Bougrie  131 3.  Il  y  a  donc  s;ms  doute  eu 
dans  l'original  un  roi  et  un  amiral  de  Hongrie  (ou  d\)ngrie).  Au  v.  1042  (cf. 
ci-dessus)  on  s'attendrait,  selon  MM.  S.  et  Sch.-G.,  à  voir  figurer  l'amiral, 
car  c'est  lui  qui  se  trouve  dans  le  danger  le  plus  imminent  et  qui,  plus  tard, 
est  fait  prisonnier  par  les  Grieus.  Seulement,  une  trentaine  de  lignes  plus 
liaut,  v.  1015  ss.,  il  a  été  parlé  aussi  bien  du  roi  que  de  Vamiral,  et  celui-là 
étant  le  personnage  le  plus  important  des  deux,  il  n'est  que  naturel  que  ce 
soit  pour  lui  qu'Antipater  appelle  le  secours  de  Florent.  C'est  qu'après  le 
V.  loi  5  il  manque  dans  M  (et  dans  N)  cinq  vers  que  l'éditeur  n'a  pas  cru 


1)8  COMin'ES    RKNDUS 

ilc\'oîr  intfOtiuia%  mais  leur  authenticité  est  assurée  par  Taccord  de  XQFS, 
et,  Lomruiremcnt  â  ce  quu  dit  M.  Sch.-(j.,  ïb  îioiK  absolument  indispensables 
pour  le  5cn!i.  Voici  k  passagts  : 


1015     II  (le  frère  ^ AUùr)  fesst*  corre  a  eut  lantcum  chevil  il  rent, 
A'ÇPS    Sus  Tcscu  J*^  son  col  va  ferir  MnlploiaïU  f  A'  Maupriant), 
Le  cuer  au 'il  ot  ou  ven:re  en  deus  moitiés  li  feni  : 
Si  ion  rabat  1  tîiort  qu'a  la  terre  Testent  (Q  s'e.  ), 
Quant  ce  voit  Tamiraut  s*èn  a  le  cuer  doïent  ; 
Il  let  corrc  vers  ek  crnircval  un  pendant, 
Onque!^  \a  genr  Pilote  ne  st  mut  Uni  ne  qujnt, 
Et  li  rois  Je  Hongrie  i  viem  csperonn;»nt* 
Lors  rennembira  Pilote  de  cel  coma  rudement  etc^ 
Kt  tuit  li    .Tsxît*  de  leur  tomoiement. 

Remarquer  Te x pression  kiir  Ummitmetn  qui  vient  il  Tapptii  de  ttioti  «pi^ 
nion  que  le  roi  eï-l'aniiral  sont  du  même  pays.  L*absence,  dans  M  et  ^V  à  k 
fois»  des  vers  rnis  etitre  crochets^  s'explique  par  la  ressemblance  entre  le 
V.  101$  et  le  dernier  des  vers  omis.  —  Pour  les  vv*  io>6-S  voy.  plus  haut*  — 
\K  1066  hf$  a  tfet  h  l^rum  hw^,  I.  Ion  fu  (NXQ).  —  V*  11^7  vùtdt^  ms. 
liiWf  (qu^oil  peut  niiturellement  interpréter  vuiêe)  i  de  même  1469  TX  \eii 
IS\1.  —  V.  1201  Apréi.  ce  vers  îediieur  d  omis  une  ligne  qui  se  trouve 
dans  le  ms>  ;  [Tlx  .Ix.  h^mespi  apffi  lui  aîrr].  ^  V,  1296  iv^  emmjmtt'mftti^ 
l,  m«  i\  (NXPS;  lacune  dans  Q.)*  -  V,  156a  /r^,  ms.  tti.  —  V*,  1^65  t^n- 
gement,  ms.  vitigemem.  —  V.  i\h^  Jdre^  txii,fete,  —  V.  i^o  dhl  À!hr,  l. 
«  disi  Phihti  fXK).  Le  roi  qu\  répottd,  au  v  suivant,  tie  peut  guère  ùttv 
qu*Alîor.  Cf.  aus^i  le  v.  1^77-  —  V.  1410  puhf,  ms*  puiisc.  —  W  1425  ti 
sont  si  aprûchif{^  ],  u  tfi  ont  a.,  ivec  NX^  ou  ses  ont  si  a  ,  avec  PS.  ^  W  1427 
çéiimi'^.  M.  Sch  'G.  observe  dans  b  note  de  ce  veiï  que  Godcfroy  qui 
sépare  loi^nifr  cl  migmrr  na  qu'un  ex.,  du  XV"-^  siècle,  de  cette  dernière 
forme.  A  vré  dire  je  ne  sais  pas  pourquoi  Téditeur  a  introduit  cette  graphie. 
qui  ne  ic  trouve  dans  aucun  des  mss,  :  Ai  porte,  à  ne  pas  à\v  mèprenda', 
cuirif^,  —  donc  une  leçon  différente,  —  Û  P  écrivent  i'<îjV""\»  ^  mtsgme^: 
NX  chang^t.  -  V.  t447t  ttotc  (cf.  aussi  lu  note  des  w.  f^i-^sf)  M.  Sch.- 
G.  s'étotmc  de  voir  ici  Lkuttor  et  Fihtr  appelés  frères,  €t  incline  â  croire 
qu'après  1446  il  manque  un  vers  dans  Icquul  11  aurait  été  parlé  de  Candeelui 
et  âi'htri,  les  frères  dWlior.  Il  n'en  est  rien.  Ce  qui  est  plus  étonnant  c'est 
que  le  savant  éditeur  n'ait  p^s  remarqué  lespssages  suivantsdu  Rom.  d'Alto,: 
Frerf  eitn^  ft  iiwi  [Licanor  et  Filotc]  ri  d'uni  compiitgHie  >iî,ii,  Frrrr  /u 
Lkmw  [FlloteJ  i/wi  tant  oi  vas  f  loge  M^^a*  Les  deux  y  sont  trfo  souvent 
nommés  en>embïe,  p.  ex.  1$.  j,  i7itr»  65,11,  ctc,  La  ponctuation  de 
M.  Sch. -G,  c^l  mauvaise  :  effacer  le  point  après  1446  ^i  mettre  le  v.  1447 
enta*  parenthèses,  —  V.  14  çB  U*rs  qI  mti  Rc^kjîifr  mairie  brcgne  tarti^ 
donne  un  contresens;  c'est  une  faute  du  seuJ  ms.  M  pour  iaiue.  —  W  1570 
Lire  .m.  hùmn  t&^  (ou  bkn)  arm^;  c(.  h  note  du  v.  ai.  —   V.  106  U  gûn 


scHULTZ-GORA,  Dic  Vengeatice  Alixandre  159 

taiion  levé  {:  f^),  1.  coin  fatuon  mpenne^  (ainsi  QPS;  N  comme  hère  aire^i  X 
c.  bofH  il.).  —  V.  1 592  u  SON  Iref,  I.  a  se<:;;^trei^  (avec  Q.S;  N  5<':^  wt*^,  X  son  Ire, 
P  5<^«  1res).  —  V.  1629  et  note.  Le  ms.  P  a  en  effet  la  bonne  leçon  que  il 
ttt{l]pot  soffrir.  La  coïncidence  entre  M  et  N  doit  être  fortuite.  —  Après  le 
V.  1693  Téditeur  omet  de  nouveau  deux  lignes  qui  se  trouvent  dans  M 
comme  dans  tous  les  autres  niss'.  :  [Et  cens  de  Rochejîor  fet  en  poudre  venter.  La 
moitié  de  ses  tentes  a  il  fet  destraver];  lis.  plutôt,  avec  NX,  La  moitié  des  esjors 
(Nestours)  a  il  fet  desarmer  (X  destorner).  —  V.  1726  ()///  //  //  fet  etc.,  1.  Li 
ont  il  f.  (\FS).  —  V.  1729  Mont  feist  bien  entreuSj  \.  seist  (NXPS)  ;  avec 
Jeist  il  Caudrait  un  le  que  la  mesure  n'admet  pas.  —  V.  1760  Lire,  ou 
bien  avec  S(P)  :  Car  cil  qiies  d^struira  leur  estait  trop  proclmin,  ou  plutôt 
avec  N  :  Car  cil  les  destruuont  qui  leur  sont  t.  p.  —  V.  1802  cil  les  aperçoit :, 
1.  s'en  a.  (NX);  le  plur.  ne  se  comprend  pas.  —  V.  18 14  O  vaure:^  vo 
déserte^  1.  Ou  avrci.  D'ailleurs  le  vers  est  interpolé.  —  La  fin  du  poème 
est  très  altérée  dans  le  ms.  M,  notamment  on  y  trouve,  surtout  dans 
les  laisses  75-77,  un  grand  nombre  de  vers  interpolés.  Je  n'en  relèverai 
ici  qu'un,  1857  :  Tant  i  ol  de  traîtres  que  le  nombre  n'en  se,  dans  une 
laisse  en  -ê;  cf.  plus  haut  et  Sachrow,  p.  45.  —  V.  1855  et  note.  L'accord 
de  XXQPS  prouve  que  Divinu<pater  est  original  (ou  du  moins  qu'il  s'est 
trouvé  dans  la  source  commune  de  nos  mss.)  et  que  la  leçon  de  M  est  le 
résultat  de  la  correction  d'un  copiste  étonné  de  rencontrer  ici  tout  à  coup  ce 
nom,  qui  n'avait  pas  été  mentionné  auparavant  dans  notre  poème.  Remar- 
quez que  la  capture  d'Antipater  a  été  racontée  déjà  dans  la  laisse  74.  D'autre 
part  je  reconnais  que  le  début  de  la  laisse  76,  tel  qu'il  se  lit  dans  les  mss. 
cités,  est  assez  curieux.  Le  voici  (v.  1853)  :  Quant  cil  de  Rochejîor  furent  pris 
et  maté  QPS  —  Florent  e<toit  moût  preus  si  avoit  grant  biaulé  (Q.PS  bonté)  — 
Et  Divinuspater,  qui  avoit  mal  pensé,  Li  Grieu  se  vont  arm.r  etc.  Pourquoi 
Divinuspater  n'est-il  pas  «  de  Rocheflor  »  ?  ou  y  a-t-il  eu  FI.  qu*estoit  dans 
l'original  ?  Pour  les  qualités  de  Florent  cf.  les  vv.  1707  sqq.  Le  ms.  Q.,  qui 
prend  souvent  de  grandes  libertés  avec  le  texte,  se  rapproche  de  M  en  écri- 
vant :  Et  Divinuspater  qui  le  mal  ot  pensé  |  De  quoi  rois  Alixandre  fu  mors  et 
dévié,  I  (A'ttipater  i  fu  au  conseil  apele)  \  Les  grieus  etc.  Quant  au  rôle  de 
Divinuspater  dans  le  complot  contre  Alexandre,  il  est  à  observer  que  d'après 
le  Rom.  d'Alix.,  p.  370,  c'est  en  effet  lui  qui  propose  le  premier  d'empoison- 
ner le  roi.  P.  504  où  le  récit  de  la  trahison  est  repris  depuis  le  commence- 
ment, le  texte  de  Michelant  paraît  un  peu  embrouillé,  mais  c'est  bien 
Divinuspater  qui  dit,  v.  22,  Boin  conseil  ai  trouvé,  se  il  vous  atalente  :  |  Nous 
li  donrons  venin  si  que  la  mort  en  sente.  Il  semble  que  l'auteur  de  la  Ven^ 
geance,  qui  jusqu'ici  n'avait  mentionné  qu'Antipater  et  Cassadrant,  suivant, 
en  cela  le  récit  de  Justin  »,  se  soit  ici  rappelé  le  rôle  que  Divinuspater  avait 


I.  Voy.  Sachrow,  p.  70 s.  Cassadrant  est  inconnu  au  Rom.  d'Alix.,  comme 
Divinuspater  l'est  à  Justin. 


l60  COMPTES    RENDUS 

joué  dans  le  Roman,  et  en  lait  il  continue  à  parler,  par  la  suite,  des  w  sers  •., 
des  «  cuverts  ^  (au  plur.;  qui  avaient  empoisonné  leur  seigneur  et  qui  atten- 
daient encore  leur  punition,  bien  que  C^ssadrant  soit  mort  depuis  longtemps. 
On  remarquera  spécialement  les  vv.  1881  sqq.  et  1894:  de  ce  dernier  il 
résulte  que  les  «  félons  »  étaient  deux  *.  —  V.  1882  trai'rent,  ms.  traitrent. 

Comme  on  aura  pu  s'en  rendre  compte  par  les  remarques  précédentes,  un 
texte  critique  établi  d'après  le  schéma  que  j'ai  exposé  au  début  de  cet 
article  différerait  sensiblement  de  celui  de  M.  Schultz-Gora  et  aurait  un 
aspect  bien  plus  archaïque.  Ce  qui  n'empêche  pas  celui-ci  d'être  déjà  assez 
satisfaisant.  On  ne  saurait  nier  que  la  présente  édition  ne  porte  des  marques 
d'une  certaine  précipitation,  nuis  ce  fait  s'explique  sans  doute  en  grande 
partie  par  le  caractère  même  de  cette  publication  ». 

E.  Walberg. 


1.  Le  ms.  .Vf  seul  appelle,  dans  des  vers  interpolés,  1841  et  1857,  traitrst 
tous  les  hommes  d  Antipater.  (iiant  à  Florent  il  était  le  fils  d'Antipater, 
mais  innoce.. t  du  meurtre  d'Alexandre. 

2.  Le  livre  porte  cette  dédicace  :  Ftau  RittergiUshtsit^er  Schidli-Gora  ^um 
2 if  Sepiemhir  it^oi. 


PÉRIODIQUES 


Archivio  glottologico  italiano,  t.  XV,  puntata  quarta,  Turin,  190t. 

—  P.  411,   suite  du  travail  de  M.   Giacomino  sur  la  lingua  delV  Aîione. 

—  P.  449,  Lt  hasi  al  nu  s,  al  ne  us,  ne^  dialetti  italiani  t  ladini  di  C. 
Salvîoni.  Excellent  travail  de  géographie  lexicale  dont  nous  ne  pouvons 
résumer  que  les  conclusions  :  alnus,  alneus-a  sont  représentés,  soit 
directement  soit  par  des  dérivés  dont  on  peut  déterminer  Taire  d'extension, 
en  Rétie  et  dans  presque  toute  Tltalie.  Les  formes  avec  -///-  (p.  ex.  émil. 
umdan)  sont  dues  à  l'analogie  de  olmo  ;  les  formes  avec  (>,  là  où  q  ne  peut  pas 
provenir  de  a  +  1,  sont  dues  à  l'analogie  de  olmo  ou  de  orno.  —  P.  456, 
C.  Salvioni,  anc.  esp.  yengo^  ^ngar^  engtudad.  Addition  à  l'article  de  M™*  C. 
Michaelis  de  Vasconcellos  sur  ces  mots  dans  la  Miscellanea  Ascoli,  p.  521-537 
(cf.  Romaniûy  XXX,  576).  M.  S.  fait  aussi  remonter  ces  motsé  ingenuus, 
mais  sans  recourir  à  la  métathése  admise  par  M^c  de  Vasconcellos.  La  série 
des  formes  serait  ingenuus  >  *genuus  (cf.  fante<i  infantem)  ^  yenguo 
(cl.  yema  <  gemma  et  menguar  <  minuare)  >  yengo.  L'a  port,  engeo 
devrait  àès  lors  être  considéré  comme  une  forme  savante  incomplètement 
assimilée. —  Anc.  esp.  brecuelo.  Rattaché  àvehiculum  >  *beklo  >  *bleko  -h 
'Ueh,  —  P.  457,  La  vocal  tonica  altèrata  dal  contatto  d'utta  consonante  labiale  di 
Silvio  Pieri;  p.  476,  G.  L  Ascoli,  Osservaiioni  al  précédente  lavoro.  M.  Pieri 
s'est  proposé  de  montrer  qu'une  consonne  labiale  précédente  ou  suivante  peut 
abréger  ou  même  faire  monter  d'un  degré  la  voyelle  tonique,  c.-à-d.  changer 
ê  ï  en  è,  ô  û  en  ô,  î  en  i(ç),  û  en  û(q).  Il  accompagne  sa  proposition  de  trois 
listes  d'exemples,  les  uns  se  trouvent  à  la  fois  ou  séparément  sur  des  points 
différents  de  la  Romania,  d'autres  paraissent  limités  à  l'Italie;  d'autres 
enfin,  surtout  italiens  ou  ladins,  tendraient  à  assurer  l'influence  supposée 
même  dans  le  cas  où  la  consonne  labiale  est  séparée  de  la  tonique  par  une 
liquide.  M.  P.  pense,  ce  groupement  le  prouve,  que  cette  influence  s'est 
produite  à  des  moments  très  divers  de  l'évolution  romane  et  même  dés 
l'époque  latine  ;  parfois  l'influence  a  pu  se  faire  sentir  à  deux  degrés  :  î  >  ï 
>>  ê.  Dès  lors  il  est  assez  étonnant  que  les  exemples  de  cette  influence, 
qu'attesterait  l'ensemble  ou  une  fraction  importante  des  langues  romanes, 
soient  si  rares  dans  les  listes  de  M.  Pieri.  M.  Ascoli,  dans  ses  Osserva^ioni^  a 
soulevé  cette  difficulté,  et,  tout  en  remettant  un  jugement  définitif  après  com- 
plément du  travail  de  M.  Pieri,  il  a  présenté,  avec  des  objections  ou  correc- 

R^mênia,  XXXU  1 1 


l62  pèRIODiaUES 

lions  de  deuil,  quelijues  rumarqucs  préliminaires  mlt^  â  résumer  :  pour  pou- 
voir auribuer  les  phénomènes  consiaiés  â  Tinfluence  des  labblcs,  inHutncv 
dont  oti  ne  saurait  d'ailleurs  donner  d*expIicatioii  physiologique,  U  faudrait 
dresser  une  statistique  comparative  des  cas  où  ces  pbénomènes  se  produiseny 
en  présence  Je  labiales  ou  d'autres  consonnes,  ovu  <  ôvuni  et  it.  dqglîo 
doHum,  en  tenant  compte  Ju  nombre  des  labiales  dans  Talphabet  cl  de 
h  fréquence  relative  des  cotisonnes  des  divers  ordres  auprès  de  la  tonique  ; 
y  Taudrâtt  encore  faire  le  dépan  entre  les  mots  paroxytons  où  la  tonique 
est  en  syllabe  ouverte  et  les  mots  proparox)'tons  ou  paroxytons  avec 
tonique  entravée,  Tabrè^jerneni  de  la  tonique  pouvant  dans  ce  second  groupe 
j-étre  dû  à  la  position.  Ce  départ  fait,  il  ne  reste  de  la  pri;miére  liste  de  M.  P. 
qu'un  sixième  environ  (zt  mots  sur  125  exemples)  pour  lesquels  en  général 
la  modilication  de  la  tonique  n 'apparaît  que  sur  un  point  de  la  Romanla  et 
peut  s'expliquer  souvent  en  dehors  de  toute  influence  des  labiales  voisines.  — 
P.  48 1,  Posliik  kssiciili  sardf  dî  C,  Nigra,  Nous  ne  pouvons  que  signaler 
cette  précieuse  contribution  àTétude  du  lexique  sarde,  qui  intéresse  une  ccfi-J 
taine  de  mots*  —  P.  494,  !^ok  HiuwlogktM  t  ksikali  di  C  Nigra,  quînt«l 
série*  1.  Ital.  armetîitw.  abricotier,  forme  dissimilée  de  *afmfiiifm  de  Arme- 
nia.  —  2.  Mil.  hottûm^  dé  bris  ^  <  nid.  hott^  morceau,  -J-  suff.  coUeciif  -u$n£. 

—  i,  Bell  un.  buHsÊjffiîtisŒ,  De  ytiviliisca.  —  4,  ItaL  ^artfr,fr.  hoamr^  prov* 
hùurra,  etc.  Ge  verbe  se  rencontre  en  France,  Provence,  et  dans  la  Haute- 
Italie.  Il  présente  des  formes  en -are,  -ire,  C-re,  la  fonne  en  *are  éLini 
vraisemblablement  primitive,  Toutes  ces  formes  auraient  leur  commune  ori* 
ginc,  malgré  les  différences  de  sens,  dans  "burra,  si  Ton  admet  le  passage  , 
de  «  rembourrer  n  à  w  fouler  »,  puis  à  m  poursuivre  ».  —  J,  liât.  çaççhûmÊA 
larve  <  cmchiù  (de  cal  ulus  +  nine).  —  6.  Amora  fil,  «  mrpGm  &  (cf.  Arch, 
Glûtt.,  KV,  28 ï).  M.  N.  n'admet  pas  Tétymologie  de  M.  Pieri  (Miîcdlmtiû 
AiCùlu  498»  cf.  Rotftania,  XXX,  573)  et  maintient  carponi  <  germ,  krampf; 
de  plus,  le  rapprochement  du  fr,  crapaud  et  d*exprcssions  de  la  Hautc-IuUe 
équivalentes  à  carpmty  mais  formées  avec  des  mots  désignant  le  crapaud,  per- 
mettrait de  préciser  le  sens  de  cmpom  «  à  quatre  patteSi  avec  l'allure  du  cra- 
paud »»  —  7.  It.  ctîio.  M.  X.  défend  contre  M,  Pieri  ï'étymoloigie  ùtîia 
<secessunî,  attestée  en  particulier  par  l'existence  de  stcesso  au  même  sens,  \ 

—  8.  Ancone  mmbott^  ckmmuoîiOj  crapaud^  <  lampa,  —  9.  Fr.  occi4.  esveik^  \ 
alevin  d*anguille.  Diminutif  de  d^^  féminin  de  au  <  caecum;  cf.  it.  de- 
cditfûi  m.  sign.  —  10,  Tosc>  dîal,  fùfacci%  *^(^  sartie  pava^ia;  mécathèst;  réci- 
proque âç/Lxmm.  ^  u.  h.  Umitart^  bruiiKr.  Du  lat.  lima.  Mais  le  rappro- 
chement du  travail  lent  de  ki  lime  et  de  la  chute  lente  de  la  bruine  parait  Hca 
forcé,  —  î2.  Rifhm  nH>htmi  M  ma  tari»,  javelot.  M.  N.  cjtplique  piir 
*matlâris  plus  un  suffixe  augmentatif  les  fomïes  françaises  et  provençales , 
wmUrus,  etc.,  trait  d'arbalète*  Un  rapprochement  entre  la  pointe  triangulaire 
du  trait  et  la  tétc  de  certains  reptiles  fit  appliquer  à  ceu\'Ci  le  nom  du  trait 
(exemplei  italiens  et  frioalans  pour  mata  ris,  exemples  italiens  et  français 
pour  des  mat*  arulogues)*  Un  autre  rapproche  nient  entre  ta  forme  du  reptile 


PÉRIODIQUES  163 

et  k  col  fin  des  mat  ras  de  verrue  serait  l'origine  du  notti  de  ceux-ci  en  it,, 
maîracch^^l  en  français.  --  15.  Un  anîka  mdakst  «  Mkouf-Ci motte  ».  lï  s'agit 
de  Mycon,  ail  ailé  dans  sa  prisoi:i  par  sa  fille.  Son  nom  est  attesté  par  Hygin 
{fab.  154)  et  par  la  Jégt;ndc  d'une  peinture  de  Pompéi,  mais  Valère-Masime 
(V, 4) rappelle Cimon.  Est-ce  une  îaute  de  scribe?  La  k^^ende  étant  populaire, 
ce  pourrait  être  le  résultat  d'une  métathèse  qui  impliquerait  le  maintien  de  c 
comme  palatale  pure  devant  i  encore  au  i^^  siècle*  —  14,  It,  nâvûla,  esp.  nrM\ 
pTQs\  nubk\  prov,  ntbk^  nimni^  ven.  ttibia,  etc.  La  première  série  postule 
*nubùla|  diminutif  de  nubes  ou  résultat  du  croisement  nebûla  +  riuhUa, 
avec  des  différences  de  déclinaison;  la  seconde,  à  laquelle  appartient  le  ttihUs 
deBoècc(cf,  pour  nibks  <  *nub il is  Thomas,  Romanm^  XX JX,  585),  s'ex- 
plique îur  nubila^  avec  métathése  des  voyelles.  —  15.  Rijkîsi  di  «  oblaia, 
ôblatnm  n.  Formes  germaniques  prises  par  ces  mots  avec  !c  sens  ecclésiastique 
et  le  sens  profane*  Obi  a  ta  serait  revenu  du  moyen  haat-allemand  au  français 
et  k  ritalien  du  nord,  avec  sens  profane  plus  ou  moUis  étendu.  -^  16*  Bcîlun. 
étmgûy  nausée  pour  Vûmtga{çt  okr  <i  vo  1ère)  de  voraîca,  —  17.  Cônu 
orahbiy  pour  rùahhi  par  métathése  <  *ro  ta  bu  lu  m,  spatule,  —  iS.  Ven.  bel- 
Itin.  ar-Ufo,  orvti>o,  friouL  ûn.'h\  bord  de  la  trame  restant  à  découvert^  de  orlo- 
viv0^  et  sarde  %foraîHva  et  it.  t'ii'ùfiw  expliqué  par  M,  Pieri  (d.  Roman  ta,  XXX, 
616)*  —  19*  Pîcm.  ptsst  et  formes  voisines,  «  engourdi  i>.  De  pïcem(cL  fr. 
empesa).— 2^.  It.  rospo fil.  nord  rosi{o%  lad.  rmsc.  M*  N*  abandonne  le  rappro- 
chement avec  le  germ./rDsè  et  ramène  les  formes  italiennes  à  'broscus,  (cf. 
bruscus,  rubeta,  dans  Papias);  rospo  serait  pour  yrospa,  par  métaihése  de 
*btoxai.  'Broscus  est  appuyé  par  le  roum.  bioascà.  —  26.  BeUun.  sgarba^ 
mamelle  pi  due,  <germ.  *skarpa;  exemples  de  transformations  sémantiques 
analogues.  —  27.  Gén .  stralahU,  r  ad  oter  de  a  s  t  r  o  1  a  b  1  u  m  *  par  su  i  te  d 'u  ne 
assimilation  populaire  facile  à  comprendre,  —  2S*  Val  Brozjto  turdôi,  orgelet, 
de  *triliceolu  m .  Le  d  anonnal  peut  être  dii  à  Fanalogie  de  l'équivalent  arJoi 
<  h  o  r  d  e  o  1  u  m .  —  29 .  Va  1  B  r .  uieUa ,  h  î  rond  el  le  *  Fé  m .  de  usiU  r=  uccello  ; 
h  changement  de  sens  et  de  genre  est  remarquable.  —  jo.  Dérivés  et  com* 
posés  de  ultra  dans  le  franco-provençal  et  V'n.  du  nord,  —  P.  jU,  indki 
di  C.  Salvioni, 

Ce  fascicule  contient  avec  les  titres  et  table  du  tome  XV  une  noie  AgU  amici 
ddf  Archlvio  où  M.  Ascoli  annonce,  en  termes  émus,  qu'il  remet  la  direction 
de  ÏArchivio  à  M.  C.  Salvioni. 

T«  XVI.  punt.  prima,  Turin,  190I-  —  P.  1,  Salvioni,  Dr  dun^r  wxiutlla 
poesia  popokr^scû  aliù  Haliana.  Cette  forme  n'apparaît  que  dans  Tltalie  du 
Nord,  seulement  dans  U  poésie  et  plus  particulièrement  dans  la  poésie  narra- 
tive; elle  n'appanicnt  pas  à  b  langue  parlée.  M.  S,  Tcxpliquc  ingénieu- 
sement comme  une  extension  analogique  de  la  préposition  légitime  dans 
la  formule  initiale  canUir  me  plas  d*ufju  cançon  ou  analogues;  la  langue 
de  la  poésie  populaire  n'aurait  plus  compris  la  différence  entre  cmlar,^  ifiina 
et  una  mn^cn,  —  P.  7,  Engad.  sèh^a^  valteU.  sobîga\  de  subllca.  avec 
sufiâxe  accentuèj  dans  la  seconde  forme,  sous  Tinfluence  de  Tacccnt nation 


j64  pèftioDiaoEs 

floctaïuc  des  déverbaux  en  ica.  —  P.  9^  V.  dt;  Bartholomads,  Cmtrihuii 
alla  cùTtosan^^a  liéi  dkkiti  tieW  îtaVm  maidiottaîe  n/  itcoH  ankriofi  a!  Xf//*  — 
II,  Spog^tw  fkl  CQiies  dipîomatkus  cajeunus-  Les  chanes  Jaunes  étudiées  ici 
vont  du  vuK  au  %m^  sièdt.%  et  appaniciinent  au  duché  de  Gaëte.  Dépouilîe- 
ment  phonéiique^  morphologique  et  lexical,  celui-ci  très  intéressant.  ^ 
P,  28»  V,  de  Bartïioloîiiads,  Un  antka  vetsiotte  dtl  «  IJbro  di  Sydra€  » 
in  vûlgate  dt  Terra  d'Otranio.  Cette  version  appartient  à  la  région  de  Btin* 
djsi.  Le  manuscrit  qui  nous  en  a  conservé  dts  fragments  étendus  est  du 
XV*  siècle*  C'est  en  dire  riraportance  pour  Tétude  d*un  dialecte  très  pauvre 
en  textes  anciens.  M.  de  B.  public  une  petite  partie  du  texte  et  l'accom- 
pagne d'une  étude  linguistique  de  Tensenibîe,  —  P,  69,  Bgloga  pdstoraît  e 
Sùttttli  in  tUaktto  htîiuntse  naiico  dd  itc.  Xiîî,  eâiti  a  cura  di  G.  Salviooî.  Le 
manuscrit  qui  a  conservé  ces  ie:xtes  (1112  vers)  attribue  Féglogue  à  Messer 
Paoîo  da  Castetlo;  Tattribuiion  des  sonnets  reste  douteuse,  L'enscrablc 
appartient  à  la  première  moitié  du  xvi«  siècle.  M,  S*  ne  publie  ici  que  le 
texte.  —  P.  104,  lomb.  vtrii^  èire  nécessaire;  M.  S.  propose  la  série  opor- 
icre  >  *mmrti  >  *  oi^irti  par  dissîmilation-  —  P.  los^  E.  G.  Parodi, 
Siudi  (ignri  ,  $  }i  II  diakUù  di  Goiava  dai  ie£^>h  X^l  ai  nosiri  giûrm.  Pre- 
mitrre  partie  :  vocalisme,  —  P.  161  »  S^lvioni,  Etinwhgie  :  mirmn^ia  pour 
imnantiû  est  une  ex^teosion  de  b  prononciation  scolaire  du  groupe  latin 
-t  tiv  au  groupe -li^;  surselv.  stpkM,  se  blottir,  de'placicare  <  pU- 
care  ;  vén.  bamik^  lucarne,  M.  S.  y  voit  un  dérivé  du  radical  baj-(bad-)j 
•  iHijoral  >  knorai  (cf.  Ktii.  JaJirak,  JV^  i6K)>  haardl  ou  Imrcdî;  crémon* 
gr^ot  de  -rûtuiUj  comme  l'italien  aoccMOj  mais  avec  maintien  de  la  post- 
tonique.  *-  P-  i^lt  S.  Picri,  La  sibilantt  ira  vocaU  ndV  Udiam^  a  p*  17 j, 
Âseoli,  Àncora  délia  sibilante  ira  vocdli  nd  îmcam.  Meycr-Lûbkc  a  posé  la 
règle:  lat.  s  entrt*  voyelles  >  It*  %  (sourde)  après  Tacccnt,  i  (sonore)  avam 
rajçccnt*  M.  P.  réunit  un  grand  nombre  d  exemples  et  propose  une  formule 
toute  nouvelle  :  la  t.  s  entre  voyelles  >  it.  s,  les  mots  qui  ont  i  ne  sont 
pas  héréditaires.  11  faudrait  alors  admettre  un  emprunt  pour  des  mots  comme 
va$Q  (viRp).  M,  A.  ne  le  pense  pas.  Il  propose  une  solution  d'un  grand  inté- 
rêt pour  b  phonétique  latine  :  5  et  :(  sont  réguliers  en  italien,  mais  corres* 
pondent  à  des  sons  latins  différents,  i  <  {n)%yrimase,  mtit  <  rema(n)sit^ 
mcn(s)c,  etc.,  ^  <C  s  vraiment  intervocaliquep  «5ir,  visii{ii\o^  vi^o)  <  tisa, 
visUi  etc.  Il  y  a  des  exceptionSp  que  M,  A.  explique  par  des  influctîces 
analogiques.  La  démonstration  est  admirablement  claire  et  parait  convaln* 
cante.  —  P,  174,  Salvioni,  Etimukgiâ  :  Haute  ïtaL  cr^,  lifrck,  îifrÔH,  — 
P*  192,  Salvioni,  Cronaca  i  hlktino  bibliiTgrafiLO  :  Miicdlnv^a  Audi  y  Raca^iu 
di  studii  criiid  didiùata  ad.  A.d'Âtuana,  Scriui  vari   di  filologiû.,.y  o^eris  k 

£,  Monaci  ;  livres  divers. 

MAttïo  Uoat;is. 


PÉRlODiaUES  165 

Studi  glottologicï  ïTALiANi,  dîrettî  da  Giacomo  de  Gregorio,  t.  IL 
—  Ce  volume  contient  huit  études  dlmponance  diverse  etsiir  des  sujets 
plus  divers  encore.  Nous  ne  signalerons  que  celles  qui  intéressent  ïcs  roma- 
nistes* P*  96,  dans  des  Racimolature  ^httoh^kht^  M,  R,  Sabbadini  cite 
deux  passages  d*Andrea  Brenta  et  d'^Eneas  Silvius  Piccolominî  qui  attestent 
ù\tz  les  humanistes  du  xvi=  siècle  le  sentimem  de  rafTinîté  du  [aim  cl  dti 
roumain.  —  P.  101-115.  Manipoh  ai  etimoh^it  ml  diahttù  sûrdo  mit  ko  t 
*Mi)(/4'f«o  di  Tito  Zanardelli.  —  W  [15*128.  H  consondtiihrtto  deî  {iiaktiù  ^aUo* 
iiafico  di  Nicmia  in  Siciîîa  âï  M,  La  Via.  Une  ^nude  du  même  auteur  sur  le 
vocajîsme  de  ce  dialecte  avait  paru  au  t.  I  des  Studi;  nous  trouvons  ici  une 
(collection  de  formes  classées  d\iprés  les  consonnes  des  orîginauic  latins 
qu'elles  représentent,  mais  sans  aucun  essai  d^explîcation  des  destinées 
parfois  très  diverses  d'une  même  cof^sonne.  —  P,  225-258.  Su^Ji  fkmmti 
ûmht  ntJ  dialHîoe  ntUa  iopùtwmasiîca  drîTitùladi  Panttlhrla  di  G,  de  Gregorio 
c  C»  F,  Seybold.  Le  dialecte  de  Pantelleria  tCù.  été  jusqu'ici  Tobjer  d'aucune 
étude.  L1le  a  été  occupée  par  les  Arabes  dès  la  fin  du  Vïic  siècle,  l'arabe  y 
était  encore  parlé  au  xvitie  ;  mais  la  population,  réduite  en  1798  â  600  Imes, 
a  été  portée  dans  le  cours  du  xixt  siècle  à  près  de  10  000  pir  des  émigrations 
siciliennes.  Aussi  le  dialecte  actuel  est-il  sicilien  et  conserve* t-îl  très  peu  de 
termes  arabes.  Le  trait  phonétique  le  plus  important  est  Texistence  d'une 
gutturale  analogue  au  j  espagnol*  Mais  h  toponomastique  présente  de 
nombreuses  traces  de  Tinlluence  arabe,  ^  P*  239-245.  M*  Niedermann, 
Daî  Vtnchrtiîitn,  Collection  de  fautes  relevées  dans  des  dictées  à  IMcole 
secondaire  de  jeunes  filles  de  La  CbauH-de-Fonds.  Le  texte  dicté  était 
français.  Les  fautes,  soigneusement  classées  d'après  la  nature  et  la  cause 
probable  de  l'erreur,  sont  pour  la  plupart  bien  connues  des  professeurs 
(prùpToiê\  cairMdrtiU,  etc.)-  Elles  peuvent  toutefois  servir  d'illustrations  à 
quelques  remarques  de  M,  G  ra  m  mont  dans  son  livre  sur  la  âissimihtwn  con- 
smanîiqm  {2^  partie).  —  P.  248-^01.  Ânccra  per  il  principio  délia  varidd  dt 
ûrigitîe  dd  diakUi  gallo-italin  dt  Ski  lia  di  G,  de  Gregorio.  Nouvel  épisode  de 
la  discussion  entre  l'auteur  et  M.  Salvionr  sur  l'unité  ou  la  variété  originelle 
des  dialectes  de  San  Fratello,  Pia^^a  Armerina,  Nicosia,  etc.  (cf.  Rottumia, 
XXVI 11^  p.  70  et  409  et  un  exposé  très  sommaire  de  la  question  par 
M.  Schneegans  dans  Zeibâh  f.  Hotn,  phiL,  XXVI,  375).  M,  de  G.  réfute  peu 
des  arguments  de  M.  Salvionï,  mais  son  étude  est  importante  par  la  nouvelle 
collection  de  mots  qu'elle  contient,  et  qui  distingue  entre  les  formes  de 
San  Fraielîo,  de  Pîazza  et  de  Nicosia.  A  ces  formes  sont  jointes  les  formes 
siciliennes  coircspondantes.  Le  travail  est  complété  par  11  m  pression  d*une 
assez  br)gue  poésie  de  Nicosia,  avec,  en  regard,  la  traduction  dans  le  dialecte 
de  San  Fratello. 

Mario  Roques 


i6é 


PÊRJODiaUES 


ArCHIV    FÛft    DAS    StVDWU     DE»      KEUEREK    SfRACKEN  UND     LiTTBKA- 

TUREN,  CÎI  (nouvelle  série  II)*  —  P.  109,  A.  Tobler,  Ziit  Lt^màt  von  hdîigtn 
Julkmus  (Suite  et  fin  ;  contient  le  texte  de  w  la  Vie  de  saint  Julien  *>  en  vet^, 
d'ipros  Iem5.de  TArsenal»  avec  notes  explicatives.  —  P,  179,  A/Pillet,  Dk 
aïtprairniailscht  LîiiM)ûndschriJi  N  •  (suite  et  fin).  —  Comptes  rendus.  — 
P.  114,  Suchier,  Aucassin  und  NicQkk  {Schu\m).  —  P.  229,  Oebtier,  Dunti 
in  Franhrmh  hh  inm  Enât  dis  i  S  JahrhttinirrU  (Wîese;  éïogcs).  —  P,  441,  C* 
Kîôpper,  Franiô^ischâs  Rmlkxihn  (Risop).  —  P,  446,  Ludwig,  Z/i/v  dt  Vegat 
Dramm  ans  dnn  KaroUnghchs  Sagathrêist  (Farinelli;  c.  r*  très  détaillt*  cï 
éîogieux).  —  P.  464,  hidz-x  lu  dm  v^humchaftUcyn  ArheUtn  Wemhfikys 
(Kolsen),  ^  P,  466,  Clédat,  Chansons  de  geste.  TraiituHrn  (Tobler;  dés- 
approuve le  procédé). 

cm  (nouv.  série  III) .  —  P.  j^s,  G.  Dobschall,  Zv  Fttrarms  Smmi  «  Bra 
iî  gwrtio  cfiat  sot  si  scoloraro  m,  —  Comptes  rendus.  —  P.  208,  Thomas, 
Essais  de  phihlogie  ftaftçaist  (Cohn  ;  c.  r.  impottant).  —  P.  40^,  Fricd^A-agner, 
hferaugis  mn  Ptfr//«^ttq  (Ebelîng  :  d,  Zdticlmfi  f.  wùrn,  PhiîùLy  XXIV^  508; 
XXVI,  4va,  SS2-  —  P-  4P^  Heuckenkamp,  «  Le  Cmiali»,  par  Alaim 
CJMtrtifr  (Kraose;  éloges).  —  P*  434i  Molenaer,  U  Ihrfs  du  jfwrt^- 
wm^nt  di's  rm  »^  a  X///'*  ctntury  Jrench  version  0/  llgiiîù  Coî<mndi 
Irmiisr  a  dt  regimim-  prinâpum  »  (Tobler).  —  P,  4^9,  Rydberg,  Zur  Gtschkhu 
dis/rani^  3 (Meycr-Lûbke  ;  éloges).  ^P.  441,  Weslholm,  Èhtdt  bhU>tîqui  sur 
la  cmuttmtmi  du  type  w  /i  Jï/^  h  rn  »  e^t  français  (Tobler).  —  P.  451,  Hi^* 
iùifi'^e  la  hngui  ft  dt  k  Vméûîurt  frmmiîe  dn  origints  à  1^0^  publiée  sous 
la  direction  de  L.  Petit  de  Jullevillc  (Tobler).  —  P,  459^  Schneegans,  Gesia 
Kiirûiî  Magni  ad  Carcdssonafn  et  Nathmum  (Vûlcl).  —  P.  467,  Torrcs,  Grmna- 
tÎŒ  hisl0rh4H:omparadu  di  la  Itngm  m<teUana  (de  Mugica;  réserves). 

CIV  (no u V,  série  IV).  —  P.  331,  G.  Stcflfens,  i>i<  altfran^ô^isclje  Urd^rîxind' 
ichri/l  der  Badhiana  in  Oxford,  Douc^  }o8  (fin),—  P.  129,  Ebeling.^M  <  F#r- 
mmhtt  Bdtràge  m,  III,  14.  —  Comptes  rendus.  P.  219,  Marchot,  î^  r0mm 
hrtion  m  France  att  moyen  dgf;  Wechsstcr,  Die  Sage  l'om  hiilig€H  Gral  (Frcy- 
mond)*  ^  F.  2ïi,  Bruckner,  Charakteristik  der  gtrmanisctm^  Elemmte  im  lia* 
litmUihfn  (Mackel).  —  P*  2^0,  Levy»  Prm^enialisclMs  SuppkmerU'H'ârterbucK  U 
(Appel).  —P.  ^i,  G.  Paris»  Lu  littérature  normande  avant  ranntxum  (913- 
120^)  (Tobler),  — P.  14s,  R*  Tobler,  £>ï>  aliprmvn^aîisehe  Venion  der  «  Dir- 
tkljts  Catotus  M  (Suchier),  —  P.  426^  U'ilmotte,  Us  Passions  alî^mandes  du 
Rhin  dans  leur  mppot  t  avec  Ftwiien  iffèdlre français  (Cloêrta),  —  P.  428,  Jc;in- 
roy  et  Guy,  Chamonset  dits  artt'siensdu  uu'S*  (Cloêtu).  —  P.  468»  Sabersky, 
Ueb^r  iinigeNamen  vùn  B^en^  'IMlern^  ik\  in  der  Vmgeimng  inm  Madanna  di 
CamplfVw  (Gartner), 

CV  (Kouvcîle  série  V).  —  Comîïtes  tmàm,  P-  içf.  A,  G  Ott,  Étudf% 
mr  Iti  mulemî  en  xnftLx  jranaus  (Tobler;  éloges  et  correct  ions).  —  P.  194^ 
E*  Walbcrg,  Le  Bt-^tiaire  dt  Philippe  de  Tljam  (Tobler  :  éloges).  —  P.  197^ 
Sdmon,  Les  Coutumes  de  Beau vai sis  de  Philippe  dt  Beumnanùir  (Tobl^; 
éloges).  «  P.  203,  G,  Lenér  Us  uéstantift  p&slverhaux  dam  h  langue  frmi^ 


PÈRIODiaUES  1 67 

çaise  (Tobler  :  élogieux).  —  P.  429,  G.  Kôrting,  Der  Fortnenbau  des  franco' 
sischen  Nomtn  in  seinen  geschichtlicheii  Entwickelung  dargestellt  (EhQ]ing',  réserves 
et  corrections).  —  P.  445, *0.  Schultz-Gora,  Zwei  alifrau:(ôsische  Dichiuttgen 
(Risop). —  P.  45i,Nyrop,  Grammaire  historique  de  la  langue  française  IÇRisop; 
très  élogieux).  —  P.  454,  E.  Nonnenmacher ^  Praktisches  Lehrhuch  der  altfran- 
lôsischen  Sprache  (Risop).  —  P.  465,  Rennert,  MaciaSy  0  namorado,  a  gali- 
cian  Irobador  (Tobler). 

CVI  (Nouvelle série  VI).  —P.  113,  F.  Liebermann,  Ueber  die  «  Leis  JVil- 
clme  »  (Sur  les  mss.  fr.  et  lat.,  la  langue  et  la  date  des  Lois  de  Guillaume 
(1100-1120). —  P.  294,  R.  Tobler,  Die  Prosafassung  der  Légende  vom  heiligen 
Julian  (cette  première  partie  contient  Tintroduction  d'une  édition  de  la  ver- 
sion en  prose  de  la  légende  de  saint  Julien,  composée  dans  la  première  moitié 
du  xiiie  siècle  ;  Tauteur  admet  une  rédaction  intermédiaire  entre  l'original 
latin  et  la  rédaction  qu'il  publie).  —  P.  324,  A.  Schulze,  Nette  bihliographische 
Mitteilungen,  — Comptes  rendus.  P.  195,  Kôrting,  Der  Formenhau  des  fran- 
^ôsischm  Nomens (EhçXm%\  fin).  — P.  207,  L.  Wiese,  Die  SpracJje  der  Dialoge 
des  Papstes  Gr^f or  (Krause).  —  P.  221,  F.  WulfF,  La  rythmicité  de  Talexan- 
drin  français  (Tobler).  —  P.  426,  Wamke,  Die  Quellen  des  Esope  der  Marie  de 
France(Cohn  ;  compte  rendu  très  détaillé).  —  P.  456,  O.  Zimmermann,  Die 
Totenklage  in  den  altfran:(ôsischen  Chansons  de  geste  (Springer). 

CVII(Nouvellesérie  VII).  — P.  79,  R.  Tobler,  Die  Prosafassung  der  Légende 
vom  heiligen  fulian  (fin;  impression  du  texte).  —  P.  114,  ^.  Tobler,  Zu  der 
Ausgàbe  des  Sone  von  Min^oy  (nombreuses  corrections  au  texte  de  Goldschmidt). 

—  P.  129,  H.  Weiske,  Quellegeschichtliches  ^u  Aimeri  de  Narbonne.»  — 
P.  134,  F.  Liebermann,  Zu  den  Leis  Willelme  (cf.  Arch.,  CVI).  —  P.  338, 
C.  Appel,  Wiederum  lujaufre  Rudel  (cf.  Romania,  XXXI,  472).  —  Comptes 
rendus.  P.  203,  P.  Genelin,  Germanisclie  Bestandteile  des  ràtoromaniscUn 
(Sursehischen)  Wortschat^es  (Mackel;  réserves).  —  P.  219,  Kohler,  Dantes 
Heilige  Reise,freie  Nacljdichtung  der  Divina  Commedia  (Arnheim).  —  P.  221, 
Th.  Koch,  Catalogue  of  theDanU  Collection  presented  by  IVillard  Fiske  (Tobler). 

—  P.  444,  O.  Sôhring,  Werke  bildender  Kunst  in  Altfran{ôsischen  Epen  I 
(Freymond).  —  P.  447,  G.  Kôrting,  Lateinisch-romanisclyes  Wôrterbuch 
2mc  édition  (Tobler;  remarques  et  corrections).  —  P.  462,  Studi  glottologici 
itàliani  diretti  da  Giacomo  de  Gregorio  (^îiedermann). 

S.  D.  G. 


CHRONiaUE 


Nous  avons  appris  trop  t;ird  h  mon  de  M,  A,  Gastê  pour  pouvoir 
l'annoncer  dans  notre  demiùrc  chronique,  A.  Gasté,  né  à  Vire  (Calvados), 
en  18}  8,  CSC  décidé  iCacn  k-  26  mars  dernier.  Ancien  élève  de  rÉeole  nor- 
anale  supcrieujc,  il  arJit  enseigne  pendant  une  quin/-aine  d^aiindes  dans  les 
lycées,  et  était  entré  en  1878  dans  renseignement  supérieur  comme  maître 
de  conférences  de  littérature  ancienne  à  la  Faculté  des  lettres  de  Caen. 
Devenu  titulaire  en  1881.  il  passa,  en  18S4,  à  la  chaire  de  liuérature  française, 
pour  laquelle  il  se  sentait  plus  d'aptitude.  Il  prit  sa  retraite  en  1901  comme 
professeur  honoraire*  Gasté  avait  un  esprit  cultivé  et  aimait  la  recherche. 
Il  a  publié,  dans  ks  mémoires  de  diverses  sociétés  normandes»  sur  h  littéra- 
ture du  XV II*  siècle j  sur  Thistoire  et  l*archéologie  focales,  un  grand  nonïbre 
de  travaux  qui  ne  sont  pas  de  notre  ressort.  Mais  nous  devons  rappeler  ses 
études  sur  Olivier  Basselin  et  sur  les  chansons  normandes  du  XV^  siècle  qui 
ont  complètement  renouvelé  une  question  jusque-là  bien  embrouillée  (Eludés 
sur  Olkifr  Bûsidin  et  les  compagnons  da  Faux^e-Firf,  Caen,  1866;  Chansons 
normand fJ  du  XV^  iikît  pubL  pour  h  prinmn  fuis  sur  ks  tnss.  de  Btîyeux  it  dé 
Vire,  Cacn,  i86é  ;  cf.  rarticle  de  G.  Paris  dans  la  RfVUi  critique  de  î866»  tl, 
547  ; /*'J»«  '^  Hotix  d  h  Vaudnnre^  1874;  î^s  VauxHié*Vir£  di  Jmn  k  Houx 
puM^dMpnh  U  tns.  (mtû^rapfpe  du  pûék,  Vnrh,  1875.  M.  Gasté  a  publié  des 
travaux j  d*un  caractère  élémentaire,  destinés  à  faciliter  rintelîigcnce  de  la 
Chanson  de  Roland  et  des  serments  de  841,  Nous  en  avotis  rendu  compte 
lorsqu'ils  ont  paru  {Romaniû^  XYI^^i6,  519). 

'-  M*  Joseph  CovKAVK  nu  Pa«c,  bibliothécaire  â  la  Bibliothèque  natio- 
nale, est  décédé  le  17  décembre  dernier.  H  était  né  à  Vire  le  i  J  juin  1856.  H 
avait  pré^*nté  comme  tliésc  à  l'Ecole  dei  chartes  (1880)  une  édition  de  la 
Morl  Âym^ri  d$  Narhonm,  C'ei-t  cette  édition  qu'il  publia,  en  1884,  après 
i*avoîr  revue  ei  corrigée»  pouf  la  Société  des  anciens  textes  français»  Très 
occupé  par  la  publication  du  catalogue  des  Imprimés  de  la  Bibliothèque  naiio* 
nale,  dont  il  avait  en  ces  dernières  années  b  direction,  il  avait  dû  abandonner 
les  études  dliistoinr  littéraire  pour  lesquelles  il  montrait  beaucoup  de  goûl* 
Rappelons  cependant  qull  publia  dans  les  Étttdes  romams  dtdiiti  à  G.  Parti ^ 
quelques  chansons  populaire*  recueillies  en  Basst^Normandîe  (cf*  Eotnama, 


ClHRONJQJCr£  î6$ 

XXlî,  t}B),  et  daiis  les  Méan^es  JuUm  Htwet  d'intéressantes  recherches  sur 
Jflmi  de  Lansm  (d.  Romania,  XXIV,  317), 

—  M,  W,  Zingarclli  vkni  d'être  nommé  professeur  pour  les  ïitténiUircs 
romiinesà  T  Université  de  Palentit\ 

—  M*  Salvioni,  qui  était  professeur  à  TUniversitè  de  Pavie,  a  ùté  nommée» 
titulaire  à  VAc^ademk  îcltutificoAifUrarm  de  Milati^  de  la  chaire  de  linguis- 
tique occupée  jusqu'ici  par  M.  Ascoli  qui  a  pris  sa  retraite»  M*  P.  E.  Guar- 
ncria  a  trté  chargé  du  cours  laissé  vacaiii  à  Pavie  par  M,  Salvioni, 

—  La  Sociéié  des  anciens  testes  h-at>çais  vient  de  mettre  en  distribution 
)*êdîtion  â\t^Chamùns  de  Gûc€  BruUp^r  M*  G,  Huet.  Ce  volume  estk  premier 
de  Tcxercice  1902.  Deux  autres  volutnes  suivrotit  prochaitiement.  Entre  îes 
ouwages  sous  presse  il  faut  signaler,  outre  la  nouvelle  édition  de  Robert  le 
Diahk  par  M»  Lôsetih,  que  nous  avons  déjà  amioncéc  (XXX,  1$^),  et  dont 
Timpression  sera  bientôt  terminéet  les  éditions  du  Tristan  de  Bérouï,  par 
M*  Muret,  du  Trùian  de  Thomas,  par  M*  Bédier,  des  Vi^rs  de  îa  mort,  par 
M,  Wulff,  et  un  recueil  de  sotties  (en  trois  volumes)  par  M.  E,   Picot,  Ces 

r volumes  sont  assez  avancés  pour  qu*on  puisse  espérer  les  voir  paraître  au 
cours  de  !*année  190; . 

—  A  Foccasion  du  dixième  congrès  des  Neuphthîogi'n  allemand,  le  Vercin 
akâdtmiich  gthÛâHa  tihe»  der  muer  en  SprmfHU  în  Brt^kn  a  publié  des  Bd- 
tfâf£  xnr  rtmaniichen  und  mgUichen  Philologie  (Breslau,  Prcuss,  1902,  in-ëo)i 
dont  trois  articles  rentrent  dans  le  cadre  de  la  RomiJttw.  Le  premier  est  une 
très  bonne  édition,  accompagnée  de  notes,  par  M*  G*  Appel,  de  h  Dita^id  getie- 
raJ  delà  Muette  (d'après  le  manuscrit  de  TEscorial);  le  second  est  l'étude  de 
de  M*  A.  Pillet  sur  la  pastoureîle,  dont  M.  Jeanroy  a  rendu  compte  ici 
(XXXI,  630),  d*aprés  le  tirage  à  part;  le  troisième  est  une  étude  sur  le 
rapport  des  manuscrits  de  fkrahrm,  par  M-  G.  Reichel,  dont  M.  Friedel 
compte  également  rendre  compte  dans  notre  recueil. 

—  Dans  le  t.  IX  des  Mémoires  im'dih  pour  servir  à  P histoire  de  la  Framîx~ 
Comte  ',  M.  J,  Gauthier,  archiviste  du  Doubs,  a  publié  une  série  de  48  chartes 
en  langue  vulgaire  comprises  entre  les  années  1227  à  tiSo  (pp.  $21-^74)*  Ces 
chartes  sont  empruntées  not\  pas  seulement  aux  archives  du  Douhs,  mais 
encore  il  celles  de  la  llame-Saàne,  du  Jura,  de  U  G6te-d*Or  et  du  canton  de 
Keufchâteï.  Elles  présentent,  en  raison  de  la  diversité  de  leur  origine,  des  carac- 
tères îitiguistiques  assez  variés.  La  variété,  cependant,  ne  devait  pas  être  en 
réalité  aussi  grande  qu*elîe  paraît  être  :  il  faut  tenir  compte  des  habitudes  de 
chaque  copiste  et  surtout  de  rinfluence  variable  cKercée  par  le  français  litté- 
raire.  Au  cours  de  la  lecture  nous  avons  relevé  quelques  formes  (dont  plu- 


I,  Besancon,  impr*  P.  Jacquin,  igoo.  La  disposition  typographique  de  ce 
volunie  est  fort  incommode  :  les  divers  mémoires  qu*il  renfermi;  ne  sont 
point  indiqués  par  des  litres  courams  ;  les  noms  même  des  auteurs  et  des  édi- 
teurs manquent,  d  leur  place  naturelle,  et  il  faut  les  chercher  dans  une  note 
de  la  p.  vti* 


lyO  CHRONIQUE 

sieurs  déjà  connues)  qui  tie  sont  pas  sans  ïntérôï  ;  àevmre,  n»  pour  «  deve- 
nir M  ;  cavônt^  JU^  pour  «  couvent  *  ;  ia$^  iv,  pour  «des  «  ;  r^J  (ou  foj)  suj, 
xxjtl,  ï'  ccs^  ^es  w  ;  (/f  /£>r»  xxxvti,  «f  d*eux  »\  comme  en  provençal  ;  mrsn^ 
XXXiV,  xuv%  ru(ïH^\  XXX vu,  «  raessire^  monsirc  »  (déjà  dans  Godefroy),  sous 
MESsmi:  Jmf,  XLiii.  «  lieu  ».  Les  textes  sont  accompagnes  de  T identification 
des  noms  de  lieux  et  paraissent  bien  transcrits;  il  y  a  toutefois  quelques 
erreurs  probablement  tvpo^aphiques  en  qui,  p.  516,  au  lieu  d>«ij«i,  adv., 
nwn  ^i\  p,  567,  au  ïicu  de  momi,  etc),  et  des  formes  qui,  à  première  %'uç, 
semblent  douteuses  et  quil  aurait  fallu  au  moins  confirmer  par  une  note  ;  ainsi, 
p*  >  27  :  B  ne  en  aîjcune  de  cfalfOi  ne  de  autres  que  la  maison  de  Oerefon- 
taygne  Uamufûu  soit  venue.  *  dahs  pour  Cfks,  et  Uanrm'poyiT  tir^m  sont  dfô 
formes  bien  slîîguliéres.  Dans  la  pièce  xxi  il  y  a  successivement  lai  et  ki  pour 
Part,  féminin.  Mais  n'y  aurait-Il  pas  aussi  /a*  dans  le  cas  où  Téditeur  a  lu  la^} 
Vi  final  est  souvent  fait  comme  une  sorte  de  i-  Pièce  xxiiï,  mas  aznej  n  mon 
aïeul  M  devrait  sans  doute  se  lire  mas  atves.  Pièce  XLVi  «  les  requit (Hmi  et 
les  lor/îïfOïV  rendra  »  est  certainement  fautif  ;  il  aurait  fallu  corriger  rtquirtmt. 
Pour  certains  mots  il  eût  été  bon  d*a venir  s*ils  sont  écrits  dans  les  orlginauit 
en  toutes  lettres  ou  abrégés.  =-  P.  M. 

—  Un  recueil  d'un  très  grand  intérêt  pour  Thistoire  de  la  poésie  et  de  la 
versification  françaises  au  xv*  siècle  va  paraître  prochainement  dans  la  col- 
lection des  Documents  inédits  :  c'est  le  recueil  des  Arti  dé  rhétorique  édité  par 
notre  collaborateur  M,  E.  Lan gl ois,  doyen  de  la  Faculté  des  lettres  de  Lille. 

—  Le  P.  Poncelet,  bolUmdiste,  a  publié  dans  It  t.  XXI  des  AnaÏHta  Bdîan- 
i^i4jiïtf  (1902)  un  index  fort  commode  des  miracles  de  la  Vierge  qui  ont  été 
écrits  en  btin.  Les  miracles  sont  classés  dans  l'ordre  alphabétique  des  tncipit. 
A  chaque  ineipii  sont  jointes  de  brèves  indications  bibliographiques,  et 
notamment  des  renvois  aux  Stitdif»  de  M.  Mussafia,  qui,  on  le  sait,  ne  sont 
point  un  recueil  commode  à  consulter.  A  la  fin  est  un  index  des  principaux 
miracles  (ffurrâ/fon^^  ^afcifntaf). 

—  Dans  le  i,  XVH,  n»  4(oct,  1902)  des  PtéUcaHom  of  tbf  modirtt  îattpmge 
Assûciatîon  of  Amerieû.  M*  John  E,  Matzke,  professeur  de  philologie  romane 
;l  Stanford  Univcrsîty  (Californie),  bien  connu  par  son  édition  des  Loh  de 
GuilkumeU  Ctympiff^nt  (Rmn,,Wl\.  IÎ3),  commence  la  publication  d*on 
mémoînc  très  dèïjîllé  sur  les  disperses  rédactions  grecques^  orientales,  Intiiîeat, 
françaises  de  la  lé^nde  de  saint  Georges.  Ce  tra\^l  paraît  conduit  avec 
beaucoup  de  soin  et  de  critique  ;  Tauteyr  connaît  ^  fond  toutes  les  sources  de 
son  sujet,  aussi  bien  les  livres  imprimés  que  les  manuscrits.  Cependant  nous 
aurions  quelques  tïbservatîons  à  présenter  au  sujet  des  rédactions  trançai^s 
en  prose  (M.  Mat^kç  ne  traite  pas  encore  des  versions  en  vers  français;. 
Nous  signalerons  d'abord  quelques  erreurs  matérielles.  Le  ms,  B.  N.  fr 
2^1  î2  (p.  49;)  n'est  pas  de  Tan  laoo;  il  est  postérieur  de  plus  de  ^o^iis* 
L*crTeur  qui  Ta  fait  attrit^uer  à  Tan  I300  a  été  mainte  fois  relevée.  Il  oV  a 
pas  de  BibL  âvii.  Carnol  (p.  s  1  î>  :  la  BiMîOihtca  ckiiahi  Carndtmis  n*est 
autre,  comme  chacun  sait,  que  la  Bibliothèque  de  Chanr^«    indiquée  du 


CHRONIQUE  ryi 

reste  darrs  la  même  page  et  à  la  page  suivante  '.  Il  y  a  inconvénient  a  cbsser 
pêle-mêle  dans  iine  même  famille  (la  famille  Y)  des  textes  latins  et  des  ver- 
sions françaises  (p*  492).  A  tout  le  moins  faudrait-il  distinguer  clairement  les 
premiers  des  secondes.  De  plus  les  subdivisions  proposées  pour  cette  famille  Y 
sont  fort  contestables.  M.  M,  y  distingue  on^e  rédactions  dont  les  trois  pre* 
mîèTes(ft,  3,  i)  sont  en  français  et  les  autres  eo  latin.  Il  eût  été  évidemment 
plus  naturel  de  mettre  en  premier  les  rédactions  latines,  mais  de  plus  je  dois 
faire  observer  que  la  rédaction  «  (Bibl  Sie-Geneviève,  s^^X  publiée  en  appen- 
dice^ est  identique  à  l:i  rédaction  ^,  caractérisée  dans  la  liste  de  la  p.  492  par 
le  légendier  de  Saint-Pétersbourg,  maïs  qiii  en  fait  se  trouve  en  un  grand 
nombre  de  mss.  comme  il  est  dit  du  reste  à  la  page  suivante.  Les  diffé- 
rences qui  se  rencontrent  entre  ces  divers  mss.  français  sont  sans  importance, 

P-M. 

—  livres  annoncés  sommairement  : 

The  Troidmdours  oj  Dmiît^  hing  sekctims  jront  thi  wûrks  ofthe  provençal  Poels 
qmitd  by  Danti^  with  introduction,  notes,  concise  grammar  and  glossary, 
by  A.  J,  Cha^ton,  Oxford,  Clarendofi  press,  1902.  In-8û,  xxxvi, 
142  pages.  --Comme le  titre  1  indique ^  nous  avons  ici  un  choix  de  pièces 
empruntées  aux  troubadouTS  que  Dante  a  cités.  L'idée  est  peu  heureuse  et 
ne  petit  s'expliquer  que  par  le  désir  de  mettre  le  nom  de  Dame  sur  le  titre 
afin  d'attirer  Tattenrion  et  la  souscription  des  personnes  qui  collectionnent 
les  livres  relatifs  k  Dante,  Cir,  si  Ton  se  place  au  point  de  vue  des  études 
dantesques  Jl  fallait  indiquer  avec  précision  quelles  pièces  Dante  a  connues. 
Et  il  n'est  pas  douteux  qu'il  en  a  connu  beaucoup  auxquelles  il  ne  fait 
aucune  allusion.  On  sait  depuis  longtemps  à  quelle  famille  appartenait  le 
manuscrit  où  il  a  puisé  sa  connaissance  de  la  poésie  des  troubadours. 
D'autre  part,  si  on  se  place  au  poiiît  de  vue  plus  général  de  la  littérature 
provençale,  il  n  y  a  aucune  nison  pour  limiter  le  recueil  aux  troubadours 
mentionnés  par  Dante.  Or  le  présent  choix,  étant  précédé  de  généralités  sur 
la  poésie  provençale  et  suivi  d'une  esquisse  gratnmatîcate  et  d'un  glossaire, 
ne  semble  pas  conçu  spécialement  au  point  de  vue  des  études  dantesques. 
Il  fout  aussi  remarquer  que  l'auteur  y  a  fait  entrer  des  pièces  que  Dante  n'a 
cen finement  pas  connues,  par  exemple  le  n^  L  /*î  reiYlaiio  âf  las  pfnui  deh 
yfetm  pubîiêe  pour  \i  première  fois  par  Bartsch  iDfnkmiler^  p*  3  to),  qui  est 
b  traduction  d'un  apocryphe  latin  bien  connu  dont  le  texte  a  été  imprimé 
id  même  (XXIV»  36s)  Ce  morceau  n'a  rien  à  faire  avec  les  troubadours. 
îl  est  également  bien  douteux  que  Dante  ait  connu  le  Documintum  Imtons 


Les  nô*  190  et  500  désignent  un  seul  et  même  manuscrit.  Le  n*>  190 
st  Tanden  n^^  et  le  n^  s 00  le  nouveau.  Cela  est  parfaitement  indiqué  dans 
e  catalogue  imprimé.  De  même  le  ms.  «  Bibl.  civ.  Camot  193  a  de  la 
p.  501  n'est  pas  différem  du  ms.  sot  de  Chanres  mentionné  à  la  p.  511. 


172  CHKONiaUE 

de  Sûrd^],  qui  occupe  quarante  pûges  du  volume.  On  ni:  voit  donc  pis 
bien  ce  que  M,  Cbayton  a  voulu  faire.  Quam  â  rexccuiîon  du  cravaîl,  elle 
est  de  valeur  moyenne.  «  Ce  ihrt  n^  dit  l'auteur  en  commentant,  «  est  une 
ceuvre  de  vulgarisation  qui  n'a  pas  de  prétentions  à  rorigînalîté,  «  Devant 
cette  déclaration  modeste,  la  critique  se  sent  désarmée.  L*auteur  paraît 
avoir  bien  copié  les  textes  imprimés  auxquels  il  a  emprunté  les  pièces  réu- 
nies dans  son  recueil  ;  ses  noces  résument  assez  bien  ce  que  d'autres  ont  dit, 
mais  ce  qu'il  y  a  de  bon,  comme  ce  qu'il  y  a  de  faible,  dans  son  travail  est 
emprunté  et  par  conséquent  ne  peut  guère  être  discuté  ici.  Il  serait  injuste, 
par  exemple,  de  lui  reprocher  d'avoir  dit  qu'usor  a  disparu  des  langues 
romanes  (p.  XX),  cette  erreur  n'étant  pas  de  lui  ;  mais  on  peut  rengager  à 
consulter  Raynouard  (IV,  565)  et  Godefroy  sous  ûhsor.  Mais  peut-être  faut* 
il  le  retenir  responsable  de  la  iradoction  de  fiaayi  (Édcsse)  par  Rodez,  ce  qui 
serait  gra%'e.  Dans  U  glossaire^  qui  est  assez  détailï<^»  nous  avons  remarqué 
certaines  formes  doutttises  et  beaucoup  d*  interprétai  ions  vagues  ou  con- 
testables ;  mais  les  articles  de  ce  glossaire  ne  contenant  pas  de  rélérences,  le 
contrôle  est  difikile.  —  P,  M. 
Lu  tende  et  ki  p^afa  de  Saint^GUUs  au  Xfh  siècle  ;  textes  en  langue  d'oc  et  en 
latin»  publiés  par  Ed*  Bokdurand.  Nîmes,  igoa,  in-8«,  ^7  pages  (Extrait 
des  mémoires  de  T  Académie  de  Nîmesj,  —  Ces  tarifs,  concernent  les  péages 
de  Saint-Gilles,  de  Petaman^im,  de  la  Fosse  et  de  ^a.  Les  lieux  de  Pâh- 
nmr^uis  et  de  Ra  n'existent  plus.  M,  Bondurand  en  a  déterminé  aussi 
exactement  que  possible  l'emplacement»  Ils  étaient  situés  à  une  fjaible 
distance  de  Saint-Gilles,  sur  le  Petit  Rhône.  Tous  les  documents  sont  en 
provençal  :  sauf  une  série  de  neuf  articles  latins,  publiés  en  dernier  lieu, 
sous  le  litre  de  Ptdatgia  Sancii  B^idii.  M,  B.  les  attribue  au  xiî«  sîéclc, 
ce  qui  est  hasardé.  En  tout  cas  ils  sont  antérieurs  à  ijii  puisque  les 
Tcmpli^^rs  sont  mentionnés  dans  l'un  d*cux*  Le  manuscrit  qui  est  fort 
endommagé  n'est  que  du  xiv^  siècle.  Peut-être  nVst-il  pas  exempt,  de 
fautes  :  il  semble  cependant  qu'on  aurait  pu  en  tirer  un  meilleur  ternie. 
Le  commentaire,  qui  est  copieux  dénote  une  connaissance  insuffisante  de 
la  langue;  ainsi,  p.  14,  note  14,  p.  25,  n,  4.  l'éditeur  suppose  que  le 
sujet  est  au  pluriel  et  le  verbe  au  singulier  ;  mais  ivt^  ai^rs  est  au  singulier 
(sujet),  et  non  pas  au  pluriel.  Voici  quelques  autres  rectifications  ou  conjçc- 
tiïiTS  t  art.  V,  Bur^n  (k  côté  d'Arras)  est  Bruges  et  non  pas  Bourges. 
Amtri^otit  art.  xxv,  mentionné  A  la  suite  de  plusieurs  étoffes  prècieuses^i 
pourrait  bien  appartenir  à  la  même  famille  que  le  fr.  osUrm,  sur  lequel 
^ok  Ji&tmnia,  XXIX,  429.  Art,  xxviti,  tiehcade  /mit,  traduit  par«  laque 
d'Inde  A,  est  bien  douteuK  \  ne  fautai l  pas  entendre  <<  de  laque  d* indigo  »  ? 
iWi,  pour  indigo,  se  trouve  en  d  autres  tarifs  du  même  ^tnTt^  par  ot, 
dans  celui  de  Tanu^on  publié  par  M.  Bondurand  (Romania,  XX,  îSa); 
indi  et  îam  iont  dtés  dans  ]c  tarif  de  Trinquetaille  (art*  26,  CatîuL  de 
S.  Fktûr^  ï,  %cv}f  voir  du  reste  Raynouard,  Lex.  rom.^  111,  557  et  IV^  $, 
Art.    XXX  ttï,    n^tni  doit  se    lire    ntgtKS    et    signîîie  •    de    même   ». 


CHROKiaUE  173 

Art.  XXX.1X.  «  Toit  ho  m,  d*oti  que  $m,  que  iratiapLWi^  per  DurensA  »^ 
lire  «^  que  traitei  porte  »  ;  travtSj  pîur.  de  tran  (poutre)  su  retrouve  à 
Tart.  XLL  An.  xliii,  «  môser  san  Gili  w,  lire  mosenfkr.  Art.  xlv,  idr^i*wfl  est 
un  bateau  sur  Ici^uel  on  peut  voir  Du  Câugc,  sagena  2.  An.  XLVilt,  dotto- 
fia  est  sans  doute  une  faute  d'impression  pour donariû, 

i  primi  infimiî  M  Dante,  dti  Pttmrca  e  dd  Boccaccio  suîk  LeUiraiura  spagmwla 
con  appendîd  di  docu  menti  inédite  Sâggîo  di  Remando  Sanvishntj,  V, 
Hoepli.  Miîan,  1902,  m-B*»,  XJV  et  463  p,  —  Travail  un  peu  rapide  et  insuf* 
ftsam,  mais  agréable  à  lire.  On  s'étonne  que  dans  le  premier  diapitrei 
M,  Sanvîsenti  n*ait  parlé  ni  d'Alfonso  de  Cartajena  ni  de  Pîetro  Candi  do 
Decêmbri,  qui  ont  joué  im  rôle  imponant  dans  Thistoire  des  relations 
littéraires  de  ritalieet  de  l'Espagne,  A  prapos  du  marquis  de  Santillane, 
Tauteur  dit  qu'il  s'était  procure  «  !c  opère  di  Jean  de  Meung,  d'Alain 
Chartier,  di  Pierre  Mie  haut,  d'Honoré  Bosset  (sic  pour  Bon  et),  d'Ottone 
di  Granson  ^.  Il  y  a  longtemps  que  l'on  a  remarqué  que  k  Midsaui  de 
la  Lettre  au  connétable  de  Portugal  désigne  Madmd.  Le  chapitre  sur  Impc- 
riali,  contrairement  à  ce  qu*Qti  pouvait  attendre,  nous  apporte  bien  peu  de 
nouveau,  Juan  de  Mena  devait  être  étudié  à  Taide  des  anciens  commcnta- 
tcursj  surtout  de  Fernando  de  Guiman,  qui  est  capital,  L*appendice  con- 
ticni  quelques  textes  intéressanis»  entre  autres  une  version  des  Emtigs  de 
Jordi,  d*aprés  un  ms,  de  T Athénée  de  Barcelone,  Le  livre  de  M*  Sanvî- 
senti, couronne  par  TAcadémie  scientitique-liitéraire  de  Miïan,  est  dédié  à 
notre  éminent  collaborateur»  M.  Novati,  —  A.  M.  F. 

NoisM  d  la  vtmfimcion  dt  }uau  Mmuel  par  Federico  Hanssen  (Amks  d^  la 
UntwrsUad,  t.  CIX),  Santiago  de  Chile^  1901,  in*8",  27  p^iges,  —  11  s'agit 
des  distiques  rimes  qui  se  trouvent  en  tète  des  <<  enxiemplos  »  du  Cmuie 
Lmattor,  M.  Hanssen  s'est  servi  de  l'édition  de  Knust,  qui  ne  suffit  pas 
pour  un  travail  de  ce  genre  ;  en  second  lien,  il  est  très  douteux  que  ces 
distiques  nous  représentent  toujours  des  vers.  M.  Hanssen  établit  des 
catégories  qui  semblent  purement  imaginaires  et  qu'il  faudrait  en  tout  cas 
contrôler  tout  autrement  qu'il  ne  Ta  fait. 

Lsm  pkhoi  Trtwr,  Dictionnaire  provenH^al-françaîs  et  français-provençal,  piar 
le  K,  P.  X.VVIER  deFourvif-rf^  chanoine  prémontré,  avec  la  coHaboration 
de  son  confrère  le  R,  P.  Rupkrt.  Avignon,  Roumanillc*  1902,  in-i6,  xxiU 
-774-264  p,  —  Ce  volunie,  d*une  impression  soignée^  lisible  quoique  com- 
pacte, qui  r^ii il  honneur  auK  presM^  de  la  maison  Aubanel,  a  été  compo:^ 
avec  amour  pour  lus  Méridionaux  qui  ne  peuvent  avoir  le  Trésor  de 
Miiitrjt;  les  Frandnman^  s  en  serviront  aussi  avec  avanuge.  On  aurait 
voulu  que  fauteur  cKphquAt»  d;ins  sa  préface,  plus  clairement  qu'il  ne  le 
fait,  ou,  mieux  encore,  inJiquAt  dan*»  le  livre  p^r  des  signes  quckotiques» 
ce  qui  lui  appartient  d;uis  son  iiruvre  et  ce  qui  est  simplement  pris 
au7(  «i  dictionnaires  de  Mistral,  de  Doujat,  d*Avrîl,  de  Piat  et  du 
Ntçard  PcUegrini  n.  FI  répondra  sans  doute  qu'il  a  voulu  Élire  œuvre  de 
vulgarisation  et  non  de  science*  et  nous  passerons  condamnation»  d'auiant 


J 


/ 


174  CHROKîaUE 

que  nous  laissons  en  g^'nêraî  hors  de  notre  ciJre  les  parkrs  modernes 
qu^rid  ils  ne  sont  pas  Tobjet  d'études  historiques*  —  Le  v  provençil  * 
donné  comme  base  au  lexique  est  celui  des  félîbres.  Un  système  de  «  clefs  i* 
asseiî  pratique,  exposé  dans  la  prèficc,  pcmiet  aux  «  Occ  iraniens  m  dont  k 
parler  diffère  de  celui-là  de  retrouver  sous  ïa  forme  classique  les  mots  de 
leurs  idiomes  respectifs.  On  trouve  aussi  dans  cette  préface  un  tableau  des 
verbes  irréguliers. 

VincetîJîo    C^^EMLim,  L*ipiiodiù   dt    Franctsm.  Padova.    Draghi^    1902,8%! 
ji  p.  ^  Cette  (*  lecture   »,  qui  inaugure  une  série,  est  tout  à  Mit  char^l 
mante.  L'aiitenr,  qui  parlait  pour  une  réunion  de  personnes  du  mondc^  [ 
a  fait  cependant  pïus  d'une  remarque  qui  intéresse  les  savants^  noiiimmctit  j 
oelle-ci  :  en  faisant  rappeler  par  Francesca  Tépisode  du  premier  b^iisirr  de^ 
Lanccïot  et  de  Gueniévre,  Dante  Ta  sensiblement  modifié  :  d*un  réch  frdd, 
tout  conventionnel  {et  même  choquant»  pour  nous,  par  TintervcTition  et  b 
présence  de  Galehaut),  ît  &  fatt  une  scène  émouvante,  pleine  de  gricc  et 
de  vie;  le  dhiato  rho  baisé  par  Lancelot  n'est  pas  dans  le  roman  français,  et 
ce  n'est  pas  même  Lanccïot  qui  y  donne  le  baiser  :  c*est  Gueniévre  qui, 
voyant  que  Lancebt  îî'osc  pas,  «  le  prend  par  le  menton  et  le  baise  longue- 
ment »,  Dame  a-t-il  eu  un   souvenir  inexact  ?  Ou  a-t-il  change  exprés  ? 
C'est  vers  la  seconde  explication  que  penche  M,  Crescini  ;  cependant  il 
senible  bien  que  le  poète  fasse  allusion  â  un  récit  connu  de  tous  (1/  dismiû 
n$o).  On  peut  se  demander  (naais  rien  ne  permet  de  le  supposer  en  dehors 
du  passage  même  de  Dante)  s'il  aurait  existé  de  cette  scène  une  rédaction 
difîé rente  de  la  seule  que  nous  connaissions. 

SiudkH  lur  EriMmigdiUeratur  des  MittdaUers^  von  Anton  SCMôHBACH.  IV 
Uiber  CiMsarîtis  l'on  Hehkdmch,  l.  Wlen^  Gerold»  190a,  10*8,92  p.  ^  Le 
savant  auteur  se  proposait  surtout  d'étudier  les  histoires  que  le  prieur 
de  Heisterbach  (f  1240)  a  racontées  plus  d'une  fois^  afin  de  comparer 
SCS  récits  entre  eux  et  de  tirer  de  leurs  variantes  des  conclusions  sur  la  façon 
dont  se  transmettent  les  traditions  orales.  Il  a  été  amené,  ci.' dont  nous  devons  \ 
nous  féîiciter,  à  étudier  toute  l'œu^Te  et  la  vie  du  pieux  cistercien.  Dans- 
ée premier  fascicule  il  passe  en  revue  tous  ses  écrits»  auxqueb  il  en  ajoute 
plus  d'un  qu*on  ne  connaissait  pas,  et  imprime  en  appendice  celles  des 
hisiorictces  édifiantes  contenues  dans  ses  Homélies  (dont  l'édition  unique 
est  peu  accessible)  qui  ne  se  retrouvent  pas  dans  le  Dtalôgui  miracuhrum. 
Nous  attendons  avec  un  vif  intérêt  la  suite  de  cet  im ponant  travail. 

Lés  Quinze  joyes  it  mariagi.  Texte  de  l'édition  prince ps  du  îtv«  siècle*  Pre- 
mière réimpression,  par  Ferdinand  H  eue  KEN  CAMP,  Haïle,  Niemeycf  »  1901, 
12^,  11-82  p.  —  On  ne  connaît  de  rèdicion  princeps  (xv<î  s/)  des  Quinxt 
jit'm  du  mraini^*^^  qu'un  seul  exempliiire,  ctitiservé  à  la  Bibliothèque  Natio- 
nale; M.  Heuckenkamp  Ta  reproduit  hdciementp  sauf  quelques  fautes  d'Im* 
pression  trop  grossières  qu'il  a  signalées  dans  un  court  avertissement.  Il  a 
voulu  par  là  faciliter  l'étude  critique  et  scientiâque  du  petit  chef-d'ceuvrv 
d'Antoine  de  la  Sak  ;  l'éditeur  a  fait  en  outre  de  cette  réimpression  une 
élé^nte  plaquette  que  les  amateurs  auront  plaisir  i  posséder. 


CHRONiaOE  Ï75 

Dk  Tr'mmpix  Francesco  Pflrûrcus  m  kfîtîschenn  Texte  herausgcgeben  von 
Cari  Appel.  Halle  a.  S,  M.  Nicmeyer,  1901,  xuv  et  476  pp.  -  A  pre- 
mière vue,  cettf  édition  critique,  produit  d'un  travail  minutieux  et  consi- 
dérable, semble  ur*  eftôrt  dis pro port io une  avec  la  valeur  ri:cllc  des  Trlutifi, 
la  partie  de  Taruvre  de  PiÈtrar<5ue  qui  a  le  plus  vieilli  et  qui,  il  faut  bien  le 
reconnaître,  o'imêrcsse  plus  que  quelques  èrudits.  Mais  les  raisons  que 
donne  le  savant  éditeur  pour  justifier  son  labeur  sont  à  prendre  en  sérieuse 
*:onsidê ration  ;  il  a  si  bien  montré  ce  que  nous  apprennent  ces  fasiidieuseti 
compositions  :  quand  on  sait  les  lire»  et^  d*autre  part,  Timportance  que  leur 
donnent,  par  exemple,  les  œuvres  d*art  qu*elles  ont  inspirées»  qu'on  ne 
peut  que  se  montrer  très  reconnaissd.ni  de  la  peine  qu*il  a  prise  d'en 
établir  un  texte  aussi  authentique  que  possible*  Uappréciaiion  des  pnn* 
4:ipes  qui  Font  guidé  et  de  la  méthode  qu'il  a  suivie  apparîien!  aux  spécia- 
îbtes;  mais  on  peut  être  sûr  que  cette  édition  sera  longtemps  celle  dont  on 
devra  se  ser/ir  :  etîe  tturque  un  progrès  considérable  sur  les  précédentes, 
soulève,  et  résout  souvent,  des  questions  que  les  autres  éditeurs  avaient 
â  peine  effleurées.  —  A.  M. -F. 

/  Trionfi  dt  FrmtceSi:0  Pttrarm.  Tcsto  critîco,  per  cura  di  Cari  Appel. 
Halle,  Niemcyer,  1902^  la*',  vt-l^l  p*  — De  sa  grande  édition  des  Trionfi 
M.  Appel  a  extrait  le  texte  critique  qu1l  publie  dans  cet  élégant  petit 
volume,  avec  une  courte  préface  et  quelques  noies  écrites  en  italien.  C'est 
un  grand  service  qu'il  rend  à  ceux  qui  d^irent  lire  les  poèmes  de  Pétrarque 
dans  un  texte  aussi  bon  que  possible,  sans  entrer  dans  les  longues  et  minu- 
tieuses discussions  qu'en  comporte  rétablisse  m  em. 

Dktiofitimte  éiymQÎHigiqm  de  la  langue  ^asavui^^  avec  la  racine  celte  ou  grecque 
de  chaque  mot  giiscon,  suivi  du  mot  îatîn  et  frani^ais,  par  Alcéc  DuRBiECX^ 
Auch,  Impr,  Foix.  lîl^^et  1901,  ivoL  in-12^  îyï  et  544,  p,  —  M.  Alcéc 
Durrieux  a  découvert  que  le  gascon  n*êst  nullement  du  latin»  miîs  du  celte 
mélangé  de  grec  (il  ne  connaît  d'ailleurs  nullement  le  celte  et  connaît  fort 
nul  le  grec,  a  en  juger  par  la  façon  dont  il  l'imprinn^V  l)  soutient  cette  thèse 
datfe  son  premier  volume  et  la  démontre  dans  son  second,  en  donnant 
Tétymologic  grecque  (parfois  v(  celte  »)  des  mots  gascons,  et  en  en  rappro- 
cluint  ïcs  synonymes  latins,  qui,  riatureUenient,  n*ont  le  plus  souvent  aucun 
rapp<^m.  et  les  mots  français,  qui  ressemblent  tantôt  aux  mots  latins,  tantôt 
aux  mots  celto-gréco-gascotis.  C'est  bien  de  la  place  perdue  ;  mais  faute 
d'un  meilleur  dictionnaire  gascon  (l'auteur  est  du  tiers),  les  philologues 
pourront  recueilUr  quelques  mots  intéressants  au  nûlieu  de  tout  ce  balbsl  ^ 

l*rof*  Pietro  Toldo.  EUtJcs  sur  k  iWin  comiquf  frmhai^  dn  moyen  dfc  et  sur 
le  râle  de  la  nouvelle  dai^s  tes  farces  et  dans  les  comédies.  Turin,  Loescher, 


1 


t,  M.  A.  Durrieux,  qui  était  extrêmement  Igé  quand  U  publia  son  livre, 
iM  mort  peu  après;  cette  note  était  rédigée  depuis  longtemps. 


Ijé  CHRONldUH 

r90a,  m-8,  189  p.  (extrait  des  Studj  di  fihhgia  ronitmia,  vol,  IX,  fasc.  2). 
—  M*  Toldo^  bien  connu  par  ses  travaux  de  litlèrature  comparée  franco- 
italienne,  s'est  proposé  ici  de  démontrer,  contrai rcment  à  l'opinion 
reçue,  que  «  la  farct  du  X v^  cl  du  wn^  siècle  n'est^  dans  h  plupart  des  cas, 
qu*un  tabliau  mis  en  action,  n  A  notre  avis,  il  n'y  a  pas  réussi»  ci  U  tâui 
s*en  tenir  à  ce  qu'ont  dit  là-dessus  MM-  Petit  de  JuUeville,  Picot,  Bédier  et 
Des  Granges.  Un  cas  comme  celui  de  h  farce  d'Eio^  et  du  Cmtutierf  que 
M*  T,  eiamine  en  premier,  est  tout  à  fait  isole  et  s  explique  par  le  fait  que 
cette  farce  est  Tœuvre  d'un  clerc  (le  mmmuînU  du  collège  de  Navarre),  qui 
a  puise  sans  doute  directement  dans  Pierre  Alfonse  (car  ce  que  M,  T, 
appelle  le  fabliau  Du  iailkur  du  rûi  d  ai  smi  sergent  est  un  chapitre  de  Tune 
des  traductions  en  vprs  de  la  DmipUna  clerkalisy.  On  ne  lisaic  plus  les 
fabîçaux  à  Tépoque  où  ont  été  compOi^Jes  les  farces  qui  nous  sont  parve- 
nues ^  quand  on  trouve  entre  celles-ci  et  ceux-là  des  points  de  contact» 
c'est  que  les  auteurs  de  farces  ont  pris,  comme  ceux  des  fableaux^  leurs 
motifs  dans  la  tradition  orale,  toujours  vivante.  Ce  n'est  d'ailleurs  qu^un  fait 
exceptionnel,  le  cadre  habituel  et  Tallure  de  la  farce  étant  tout  autres  que 
ceux  du  conte.  Bien  que  nous  n'acceptions  pas  la  thèse  générale  de  M,  T,, 
nous  recommandons  son  livre  à  ceux  qui  s'intéressent  à  Tancien  thédtn^  et 
à  Thistoire  des  contes  :  ils  y  trouveront  beaucoup  de  remarques  justes  et  de 
rapprochements  intéressants.  —  Une  partie  du  îivre  concerne  les  comédien 
de  b  Renaissance^  qui,  elles»  ont  très  largement  puisé  d^is  la  nouvelle, 
ce  que  l'auteur  montre  par  pîus  d'un  exemple  qu'on  n'avait  pas  caoon; 
signalé. 

Gutdo  pBKSiCO.  Cino  âa  Pisioia  e  il  ptlmù  wmHQ  delîa  Vita  Nuova  dt  Datiie, 
Fircn^e,  1902,  in-S,  15  p*  (extrait  de  la  Rtmegna  Na^iùnaU).  —  Contrai- 
rement à  M.  ScherillOj  l'auteur  cherche  à  protiver,  et,  à  et  qu'il  semble» 
par  de  bonnes  raisons,  que  le  pdrmnie  adressé  à  Dante  sur  le  premier 
sonnet  de  la  f^ita  Numm  est  bien  de  Cino  da  Pistoia,  qui  l'aurait  envoyé 
à  Danie^  ainsi  que  sa  cmsokiaria  sur  la  mort  de  Béatrice»  en  1292  environ, 
quand  Cino  étudiait  à  Bologne,  et  que  la  ^ita  Ntioin  avait  été  publiée 
en  entter. 

Prmmt^aiùehe  ChnslomaihU,  mit  Abrlss  der  Fortnenlehre  und  Glossar.  Von 
Cari  Appel  Zweite  vermehrte  AuAage.  Leipzig,  Reisland,  1902,  gr.  ln«8«, 
XUJ-Î44  p.  —  Cet  ouvrage,  dont  on  connaît  le  mérite  et  Tutilité,  reparaît 
ici  aprt«  une  révision  soigneuse  qui  fait^  dit  Tauteur,  qull  ny  a  guère  une 
page  qui  «ou  restée  sans  changements. 


U  Prù^kiairt-Gémni ,  V*  E,  BOUILLON. 


UÂJGmt,  moffàrt  rftiKEs,  tMpRtxiitjms 


EN  VENTE  A  LA  MÊME  UBRAIKIE 


Les  officiers  royaux  des  Baitliages  et  Sénéchauiaèes     ^^ 

mstitutLons  raon  loc*ik-^  en  Freinte  A  h  Jin  du  maycïi  Age,  pitr 

L.  Dupont* FETii  art  voî  i^r  în  S,  ircc  2  certes,  ^  Itix.     SOfr. 

La  Vie  de  Saint-Alexis,    ^^  J*^;?*=  ^f'^*^^  ^"^^^i^^ 

et  tt'uiit   uble  dw-i  a5>ondnc4:^  par  G.   PaMléS,  tnetithn;    de  Vlnstitut  de 
Frantc.  tJri  voL  ra-iS  |èsus.  —  Prix.  ,,..*..**,,. I  l>.   &Q 

R  ComciOc  et  le  théâtre  espagnol.    P^  p   Hu^^Am.  t  ri  voï   iiv 
Le  Musée  de  la  conversation,    P^'  ^^g'^^  Auixxsnm,  4*  édition 

de  nombreiixjiftidcs  nouvéïus*  Lj  J  norèe  d'aile 

mention  p<ir  rAcadémie  françaive  ij                        J                ^i)-   U«i    fort 
vol.  iiv8.  —  Prix .,    .        *    . .^ -.-      IBfi 

Éludes  sur  Pétymologie  et  le  vocabulatre  du  vieux  alavc, 

par  A,  MïiiLiET^  f«  parik.  Un  vol   gr.  m-&.  —  Prix    ......       7  fn 

L*iiiBuence  orientale  sur  la  langue  et  la  civilisation  roumaines 

1.    La   bnguiL*,  ï^is  n^lémvncs   orictiuux   en   lomiiaîu,   pdf   U   Sain'Iak. 
(Exiraîï  de  h   Romanm.)  Brochurv  grand  tn-8,  —  Prix 6  fr. 

Les  éléments  latins  de  la  langue  fcumainc     !;^  p^^olS^- 
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Études  sur  rhistoire  de  Milet  et  du  Didymeion»  P*^^  ^  ^^^"*- 

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voi.  gr,  in-6»  —  Prix.      _ .  _        *......_..     13  fr. 

Remarques  et  corrections  au  lexioon  Comu-BHlanntcum  de 

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Sobriquets,  prénoms  et  noms  de  famille  patois  d'un  village 

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J*rîiE ,...,...-.- *     .     1^60 


Rîmes  bourguignonnes.    ^^^^^^  «'  iradiaciion  p^r 


Discours 


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^un^f)  numéro  ntsi  \fndu  téparéfHtn$. 


SOMMAIRE  DU  PRÊSEOT  KVMÉK 

A»  Thom.'^s.  Le  suffixe  aricius  tn  frin^îs  et  en  provoiçai. . , , , , 1 77 

P.  Raj.s'A.  Le  origini  dclla  novdla  narrau  dal  a  Frankdeyn  *  nd  Otn- 

tnbury  Taki  dcl  Ch^uccr . . ,....*,.,.*♦ * 204 

P.  Meyew.  RecèUes  mC-dicaks  en  provençal  d*aprÈs  Icros,  R.  1440  de 

Tnotty  Collège,  Cambridge.  368 

Ml*  LANGES 


G.  L.  KîTTîiEJKîi,  The  chanson  du  Comte  Kemiquin 


ÎIK) 


COMPTES  RENDUS 

J.  Pm-ios.  Iw  ian^iif  dis  mscr.  ht,  df  ta  GauU  \  A,  Cimoy,  Ir  /^/iVi 
iTB^ptt^nf  fTapr^t  Ux  ifisct.  (M.  Rov|ucs).  ,,♦.♦..,-..,-......,.... 

CoLUjs.   U-s  sulïtxi'S  loponyunijucs  di*rï!î   îc$  langues    française  et 
provaiçalg  (G.  P  ,;,.,...*.. .  ..*,.,,    , .#-*** , , 

R.  ZuNKiiK-  Dï>  Lié(tir  ^mts  V0ti  Auvffgm  (A    Jeânroy)*  ,.*>.. 

J.'N.  N,^*AU  NotjrdcWiiCf.  ^i/dnigt  tùi  di  B*oùrMin^  v&H  dm  WiUt 
haim  (Minckwiu) * .  ^ , ,  * 

F.  ( j  D  t  LLON .  /éw^  f  '  r^  M '^  (ï^  ^  Lmgl  0  h) 

A,  Brn\s.  Istrorûfu,.  (J    Popuviti) 


n; 


CHRONiaUH 


U4 


Les  proctuîiis  nnm^rofi  coia tiendront 

R.  BASsia-.  L-     ' -  .-  .      -1' 

Sv.  Bir^G.  Lii 

A.  n 

Ov- 

A.   U... 
F.Lot. 

pîon,  - 

A*    PtAGfT-    i 

M,  Scnwoîî. 
H,  s 


n  en  Espagne  de  778. 


Yubmnn.  —  Ltitscrnc.  —  Boton  d*Escar- 
'le  jtfrti  rwnct  et  ses  imiutîotw  (suiii). 

-  Ici  dunsoQs  de  Gt</fl<ittrnr  d'Ùrmt^i.  —  La 


P,T 


in  tfae  Cmtnviù  ind  F/l^  111101^ . 


LE  SUFFIXE  "ARICIUS 
EN  FRANÇAIS  ET  EN  PROVENÇAL 


La  juxtaposition  de  deux  ou  même  de  plusieurs  suffixes 
est  un  Élit  qui  n'est  ni  rare  ni  difficile  à  expliquer.  Du  parti- 
cipe natus  le  latin  tire  Tadjectif  natal is,  puis  de  l'adjectif 
natalis,  employé  substantivement  au  sens  de  «  jour  anniver- 
saire de  la  naissance  »,  il  tire  un  nouvel  adjectif  naialicius, 
qui  signifie  «  relatif  au  jour  anniversaire  de  la  naissance  »  : 
le  procédé  est  très  simple.  Mais  la  complication  se  produit 
bientôt.  L'esprit  humain  —  pauvre  boussole  que  le  moindre 
courant  analogique  suffit  à  affoler  —  saute  d'un  bond  du  mot 
primitif  au  second  dérivé  et,  ne  s'arrêunt  plus  à  considérer  la 
juxtaposition  des  suffixes  dans  l'ordre  où  elle  s'est  formée,  il 
ne  &it  pour  ainsi  dire  qu'un  bloc  de  la  dérivation. 

Voici  un  exemple  frappant  et  qui  date  de  loin. 

Du  substantif  gens  le  latin  a  tiré  l'adjectif  gentilis,  puis 
de  l'adjectif  gentilis  un  nouvel  adjectif  gentilicius.  Les 
textes  nous  montrent  que  gentilicius  s'emploie  couramment 
au  sens  de  «  propre  à  une  famille,  à  une  nation  »,  c'est-à-dire 
qu'il  est  purement  et  simplement  synonyme  de  gentilis; 
donc,  il  peut  être  considéré  comme  dérivé  de  gens  avec  un 
suffixe -ilicius.  Ce  point  de  vue  est  artificiel,  dira-t-on;  sans 
doute,  mais  de  quoi  vit  le  langage,  sinon  d'artifices?  En  fait,  on 
ne  saurait  douter  de  l'existence  d'un  suffixe  composé  -ilicius, 
affranchi  de  toute  subordination  vis-à-vis  de  ilis  et  vis-à-vis  de 
-ici us,  dès  la  fin  du  premier  siècle  après  Jésus-Christ.  Martial 
qualifie  les  efféminés  qui  passent  leur  vie  en  litière  (cathedra) 

ILmumiaXXXU  12 


178  A.    THOMAS 

de  Tépithète  pittoresque  de  cathedralîcius  ';  cathedra! î- 
ci  us  a  dû  jaillir  de  son  cerveau  sans  Taide  de  cathedralis, 
qui  est  absolument  inconnu  an  latin  classique*  Après  tout, 
cathedra] ici  us  est  d'aussi  bonne  venue  que  legatorius,^ 
employé  par  Qcéron  et  pieusement  recueilli  par  nos  antiquaire 
pour  qualifier  une  provitice  administrée  par  un  légats 

Les  textes  latins  antérieurs  au  ^moyen  âge  ne  présentent  que 
très  rarement  la  combinaison  de  -aris  ou  -arius  avec  -îcius. 
Je  n'en  ai  relevé  que  trois  exemples  :  capsaricius,  fabari- 
cius  et  sigillaricius.  Le  premier  mot  signifie  a  gardé  par  te 
capsarius  ou  gardon  de  vestiaire  »,  ce  qui  est  tout  naturel  »; 
le  second  n'est  pas  bon  à  grand*  chose^  car  i!  ne  se  trouve  que 
dans  Texpression  fab[a|rieîi  circenses  d'un  ancien,  calen- 
drier* et  le  sens  n*est  pas  plus  sur  que  la  forme;  le  troisième 
vaut  à  lui  seul  plus  que  les  deux  autres,  Spartien  dît  dans 
la  vie  de  l'empereur  Hadrien  ;  «  Saturnalicia  et  Si gi Ma- 
ri cia  fréquenter  amicis  inopinantibus  misit  ^  )»  Il  faut  sous- 
entendre  munera  ;  il  s'agit  de  cadeaux  faits  i  roccasîon  des 
fêtes  dites  Saturnales  et  Sigillaires.  Il  n'y  a  là  rien  de  parti- 
culierà  remarquer  :  le  rapport  entre  Sigillaricius  et  Sigil- 
laria  est  exactement  le  même  qu^entre  Saiurualicîus  et 
Saturnalia,  aussi  simple  pour  le  sens  que  pour  la  forme. 
D'autre  part,  on  lit  dans  la  vie  d'Au rélien  par  Vopiscus  :  <t  Uxori 
et  filiae  aonulum  sigillaricium  quasi  priwatns  instituit  *  ,  » 
Ici,  nous  avons  à  faire  à  un  sens  très  différent,  si  bien  qu'on 
pourrait  dire  qu^il  s  agit  réellement  d'un  autre  mot*  Un  annu- 
lus  sigillaricius  est  un  anneau  qui  sert  de  cachet  :  sigilla- 
ricius   est    donc   tiré  directement    de    sigillum,    comme 


1.  Epigr,  X,  13,  1. 

2.  L  c  g  a  t  o  r  i  u  s  est  fa  ît  à  t*  imitâti  on  de  sénat  o  r  î  u  s.  L' Acûâètme  fran- 
çaise j  iccucillj  \a  locmion  pr&vime  iégatoirt  ;  coEûmc  il  ^c  ficheux  qu'on 
tie  dise  pas  aussi  provint^r  Unatmrt  f  1 

j.  SdioL  de  Juvénal,  S,   \é%. 

4.  CWy.  imcr,  lai.,  I^  p.  $44  et  $4S  ;  cf-  Olcoti,  SMm  in  tht  w^td/orum' 
ihn  0/ ihf  Lu,  Inii^r,^  p.  a  17.  Ui litre  textt  dûnn^  fabarîci»  que  De  Vit 
oonsldère  comme  k  nom*  p!ur.  d*un  fa  ba  ri  eus  (d'ailleurs  inconnit)  mais 
que  M.  Olcott  ratuche  à  faba rictus. 

5.  Chap,  17. 

6.  Châp,  îo. 


LE  SUFFIXE   -AiHaUS  EN    l^RAKÇAIS   HT  EK    PROVENÇAL      179 

cathedralicius  est  tiré  de  cailiedfa.  Le  suffixe  -aricLus  esi 
né. 

Les  textes  du  haut  moyen  âge  nous  permettent  de  suivre, 
ou  du  moins  d'entrevoir  son  développement.  Un  des  manu- 
scrits de  la  Loi  Salique  remplace  caballum  qui  carrucam 
trahit  parcaballum  carrucariciom,  38,  i*  Le  plus  ancien 
recueil  de  formules  que  nous  possédions,  les  Formulai  Anâtra- 
vmses  (\'i^  siècle),  parle  de  vigncii  affermées  k  moitié  fruits  sous 
le  nom  de  vîneasad  parciaricias  (form.  30);  Tévêque  saint 
Pirmin,  fondateur  de  Reichenau,  mort  vers  758,  tire  de 
mimus  le  substantif  mima  rit  lae  ;  une  charte  lombarde  de 
765  appelle  tectoras  pallearîcîas  des  toits  couverts  en 
paille i  une  autre,  du  roi  Didier  (mort  en  774),  mentionne 
simultanément  massaricias,  hovokaricias^  aldiaricias. 
Dans  la  Lex  Alammmorum^  le  chien  à  chasser  le  porc  sauvage  est 
appelé  canis  porcaritius,  le  chien  à  chasser  Tours,  ursari- 
tius;  en  outre,  nous  y  voyons  le  suffixe,  sous  la  forme  femi- 
nine,  servir  à  désigner  un  Heu»  un  établissement  :  une  vacherie 
se  dit  vaccaritia,  terme  qui  est  également  employé  dans  le 
capitulaire  Df  Viîïis  et  dans  le  poliptyque  de  Tabbé  Irminot>. 
Dans  ce  dernier  document,  -aricius,  substantivc  sous  la  forme 
féminine  (très  rarement,  neutre)  incline  vers  le  sens  abstrait  : 
le  service,  la  corvée  de  Tost  s'appelle  hostiUricîum';la  cor- 
vée du  bois,  lignaricia*;  la  cor\^ée  du  vin,  vinericia  ^  Parla 
suite,  les  mots  de  ce  genre  deviennent  rares  dans  les  textes 
latins  :  pourtant,  vinericia  est  encore  au  xwv  siècle  dans  le 
pouillé  de  Tévèchè  de  Ne  vers,  et,  au  xiv%  le  roi  d'Angleterre 
Edouard  III  appelle  ses  chiens  à  chasser  le  daim  canes  dama- 
ricios*. 

Nous  n'avons  pas  de  témoignage  direct  sur  la  quantité  de  IV" 
dans  le  suffixe  -aricius.  Le  Litin  classique  distingue  -ici us, 


t ,  Ce  mot,  où  trois  suffixes  se  sont  agglu fines,  ne  se  trouve  qu'une  fois  ; 
Je  terme  ordinaire  est  h  o  s  t  i  1 1  u  u  m. 

3,  Va  fi  in  te  lignericiâf  où  Von  voit  déjà  un  témoigiiage  de  rafFaiblis- 
scmcm  français  de  Va  protonique  en  f. 

\.  Cette  forme  est   constante;  il  est  curieux  que  Ton  tic  trouve  jamais 
viniriciâ  comme  lignariciâ. 

4,  Tous  les  exemples  se  retrouvent  facilement  à  Taidc  de  Du  Gange;  c'est 
pourquoi  je  ne  donûe  pis  de  références  particulièrt'5. 


î8o 


A,   THOMAS 


qui  s'ajoute  aux  thèmes  nominaux,  de  -icîos,  qui  s'ajoute  aux 
thèmes  verbaux  en  prenant  pour  point  d  attache  !e  thème  du 
participe  passé*  :  il  dit  caementicius,  d'une  part,  et  facticius, 
de  lautre  ^  La  forme  la  plus  ancienne  de  notre  suffixe  est 
probablement  -a  ri  ci  us  ;  mais  comme,  dans  le  latin  populaire, 
-îcius  a  beaucoup  empiété  sur  -ici  us,  il  n'est  pas  surprenant 
que  -ariciusse  soit  fait  une  place  à  côté  de  -aricius,  La 
péninsule  ibérique  ne  semble  connaître  que*arîcius  :  portu- 
gais cavallariço,  pormriço  ;  espagnol  asnm;p,  cabreriio^  vaqu€ri^ô 
ttvaqu^riia^  etc.  ^  L'italien  a  les  deuxformeSj  selon  les  régions  : 
pagliericctOy  seakrkcio^  Faccari^^o  (ville  de  la  Calabre),  à  côté  de 
mmperecm^  casercccio^  (ester fccio^  secchercccio,  vaccareccia  (Oudin), 
etc.  Le  provençal  a  quelques  traces  de  *aricius,  que  je.  signa- 
lerai plus  loin  chemin  faisant;  mais  il  donne  la  préférence  à 
-aricius*  Cette  dernière  forme  est  la  seule  quî  paraisse  avoir 
des  représentants  dans  le  domaine  français  ^ 

C'est  i  M.  Horning  que  revient  le  mérite  d'avoir  signalé  en 
français,  sinon  comme  sure,  au  moins  comme  probable,  rexîs- 
tence  de  représentants  du  suffixe  laiin  -ici us  sous  la  forme 
féminine  allongée  -créa*.  M.  Tobler  a  précisé,  depuis,  les  don- 
nées un  peu  vagues  de  M.  Horning,  en  citant  un  certain 
nombre  de  mots  en  -crc:^  aussi  bien  qu'en  -ereceK  M.  Meyer- 
Lùbke,  se  référant  à  ces  deux  auteurs,  a  écrit  :  «  Le  français 


1 ,  N  o  V  le  i  u  s,  de  p  o  V  «  s,  constitue  une  exccpt  ioti  isolce. 

2.  Les  formes  espagnoles  sont  influencées  par  ainerx^,  cabnrù,  eic*  Le 
portugais  est  plus  fidèle  âu  type  primitif. 

5,  Tottttkl  brassfrkh  dans  un  texte  de  1456»  que  Godcfroy  m  die  que  de 
seconde  main,  n'est  pas  asicz  sûr  pour  qu'on  table  sur  lu».  Quant  â  ûvmeris 
u  champ  d*avoine  »,  que  l'on  pourr^iit  être  tenté  d'e?cpli<]uer  par  'ivcnt- 
rlctus,  c*est  en  réalité  le  pluriel  de  mrnfriî.  C(.  Godefroy  avaixeriiub, 
où  est  cité  un  passage  de  Motha  ;  j'ai  cotlationné  ce  passagi:  sur  sii  manu- 
scrits qui  ont  tous  la  désinence  uniforme  en  -til  (Bibl  nai.  fr.  1297,  i^  87 
v«  :  aurnntt;  1198,  i*  84  i*  :  aufnfrti\  1299,  f<»  î2l  ro  :  attuenml;  lioo» 
fo  128  ro  :  aufnril;  ijoi,  fo  gs  v»  :  nu/ntHi;  1  jo2jfo  90  r<*  :  aurtttHl\  12599^ 
fo  89  v?  :  aufftrri!;  Ar$eRal  5079,  fo  215  vo  :  auetfcriîi  5197  f^  jS  ro  :  aum- 
ril).  Avfuri  est  encore  vivant  en  Normandie  cî  en  Blaîsoîs;  le  type  latîn  est 
lùrement  "avenarile. 

4*  UurMurhhU,  année  1690»  p.  105  ♦ 

f,  A  propos  dn  mot  banmrM,  àtn%  Sitiun^slK  tkr  Aaiii.  IVmrmih.  |ii 
Berlin t  phîbs.-bist.  Gasse,  année  1S9J,  p.  î|'24  (19  janvier). 


LE  SUFRXH   'AHiCWS   EN    FRANÇAIS  IT  IK   PROVENÇAL       l8r 

offre  peu  d'exemples  ;  le  français  moderne  hnmret  représente 
rancienne  forme  hanfre:^;  viennent  ensuite,  en  ancien  fran- 
çais fenere:^  (juillet),  pasqnerei  (s^mum^  A^  Pâques),  les  adjec- 
tifs chevakreiy  jamhere^i  et  quelques  autres',  jj  J'ai  déjà 
eu  l'occasion  de  dire  que  le  dévelopement  de  ce  suffixe  en 
Gaule  était  beaucoup  plus  considérable  qu'on  ne  se  le  figu- 
rait jusqu'ici  f.  Je  voudrais  aujourd'hui  passer  en  revue  tous 
le  mots  français  et  provençaux  qui,  à  ma  connaissance, 
sont  formés  à  Taide  de  ce  sut  fixe  et  fournir  ainsi  une  con- 
tribution à  la  lexicologie  de  la  Gaule,  sans  distinct  ion  entre 
la  période  ancienne  et  la  période  moderne,  entre  le  français 
proprement  dit  et  les  patois,  entre  la  langue  courante  et  la 
toponymie.  Mais  avant  de  passer  cette  revue,  il  me  faut  exa- 
miner trois  questions  préliminaires  :  t*  de  Texistence  en  Gaule 
de  représentants  du  suffixe  -ici us;  2"  de  la  confusion  entre 
le  suffixe  fém.  -artcia  et  le  sufHxe  -issa;  3**  de  la  confusoin 
entre  le  suffixe  masc.  -a  ri  ci  us  et  le  suffixe  -ittus. 

ï"  Du  suffixe  *icius,  M.  Tobler  a  montré  que  Texpression 
fhemlitr  bannerd  se  présentait  toujours  dans  les  anciens  textes 
sous  la  forme  dxvaïitr  bamre^  \  il  en  a  conclu  que  baner^  était 
dérivé  de  ktniere  ù  Taide  du  suffixe  -e^  correspondant  au  latin 
-îcius.  Cette  explication  est  logique,  mais  elle  ne  me  paraît 
pas  conforme  h  la  réalité  des  faits.  Banerei  n'est  pas  très  ancien; 
il  se  trouve  pour  la  première  fois  dans  les  Coutumes  de  Beauvaisis 
de  Beau  manoir,  éd.  Salmon,  §  1242.  Le  français  possédait-il 
réellement  au  XIIP  siècle  un  suffixe  h:^^  issu  du  latin  -icius  ? 
Cest  difficile  à  croire  ^  puisque  nous  ne  voyons  pas  ce  suffixe 
s'ajoutera  d'autres  mots  qu'a  ceux  qui  contiennent  déjà  le  suffixe 
'ître  et  qui  donnent  naissance  à  des  dérivés  en  -fff^,  comme 
faschere^^  de  jaschtere,  pendant  exact  de  banerc^,  A  vrai  dire,  le 
français  possède  seulement  le  suffixe  ht f ^  ;  mais  quand  ce  suf- 
fixe s'ajoute  à  des  mots  en  4er  -iert,  il  se  produit  une  sorte  de 
superposition  syllabique,  et  Ton  dît  banerei^i  bruere:;^^  jaschfre:^^ 
unert:^  au  lieu  ic*baneîere:;^y  ^  bruera-ei^  *  jaschererei^  ^vourera^. 


1.  GramnK  ées  kff^.  roiiî.,  II,  S  4^7* 

2.  Mi^angn  lâyrn.frtinçat'st',  p.  aj,  29,  48,  49,  ^8,  9S,  119,  136,  15b. 
j.  On  a  un  cuncux  exemple  de   Tadj.  fém.    ctmircsif^  dans   Godefroy; 

mais  il  faur  y  voir  le  latin  cinertcitis  et  non  un  dêmè  français  de  cendre. 


l82 


A-   THOMAS 


Quand  h  désinence  re  appartient  au  thème  et  non  à  un  pre- 
mier suffixe,  le  suffixe -rr^:^  conservera  l'origine,  sa  forme  inté- 
grale  :  bien  qm  nous  n'ayons  pas  d*exempli;  de  * gaufnre:;^,  les 
formes  gaufcrais  {i^}^) ^^t  wanffrrrais  {iiéo)  témoignent  clai- 
rement que  *^ûufrerei  a  existé,  car  elles  ne  peuvent  s'expliquer 
que  par  un  phénomène  de  dissîmitation. 

2^  Contusion  entre  -arïcia  et  -îssa.  Dès  le  xn'  siècle  on 
trouve  en  français  des  substantifs  féminins  en  -trtsse  qui 
reposent  sur  des  thèmes  verbaux  :  bakresse^  ïechenssc^  iombertsst^ 
etc.  Ils  peuvent  s'employer  adjectivement  :  femme  kcheressc 
dans  Marie  de  France,  Fables^  i,  27  (édit.  Warnke),  Quelques 
manuscrits  ont  la  graphie  -tresce,  ce  qui  pourrait  nous  incliner 
à  croire  que  les  mots  de  cette  catégorie  reposent  sur  des  types 
latins  en  -arîcia.  Il  n'en  est  rien  cependant  :  ces  mots  sont, 
en  réalité,  formés  d'après  les  masculins  correspondants  {halere, 
kchn^  etc.)  àTaide  du  suffixe  -es&e^  qui  est  le  latin  -issa,  grec 
et   ils  correspondent  à  un  type,  peut-être   fiail,  -ato- 


\S^^f 


rissa  ',  Les  preuves  de  ce  fait  ne  manquent  pas.  Au  point  de 
vue  phonétique,  la  graphie  fréquente  -erresse  et  ia  rime  t;n  -esse 
et  non  en  -rrf,  picard  -erhe  {kckrcsse  :  pmmesse^  Marie  de 
France,  Fables^  l,  27  ;  felunene  :  lenceressCy  Marie  de  Fmnce, 
Fables f  \c\\  3  ;  asiesse  :  maisîresse  :  axJmmse  :  venderesse  :  espesse  : 
trekercsse^  Rendus  de  Moiliens,  Caritê^  CLVi)  sont  des  faits  déci* 
sife.  Au  point  de  vue  sémantique,  il  y  a  une  différence  sensible 
entre  un  adjectif  féminin  en  'ircce  et  un  adjectif  féminin  en 
-eressf  :  une  flèche  hrserece  est  une  flèche  dont  on  se  sen  pour 
chasser  {berser)^  tandis  qu'une  femme  tmcercsse  est  une  femme 
qui  ianci^  qui  ainw  à*iancer.  M.  Meyer*Lùbke  rattache  à  -îssa 
le  lorrain  hnirosse  (écumoire)  et  le  poitevin  vmt'rase  (pelle  à 
vanner  ').  Il  n*est  pas  douteux  pour  nous  que  ces  deux  mots 
contiennent  le  suffixe  ^aricia  :  cf.  l'expression  picarde  pairie 
sûimertchc^  synonyme  de  pakk  saifntoin,  poêle  à  écumer.  U 
faut  avouer  cependant   que    lorsque    la  phonétique  nous  fait 


I.  ri  n'est  pis  imposssible  qii*  -âtorTssâ  ait  rédkmmt  exisÈÉ,  âskm  le 
bTtn  viilg;iîfc  Je  la  G^ule  septeatHorute,  i  côté  de  -airic^m^^ui  était  U 
forme  dj5si  que,  éuni  donne  le  peu  de  viEaljt^  de-atricem  dans  te  domaine 
de  U  bngue  d'oîl . 

3,  Gntftrot,  en  Imf,  mm^^  H,  S  567. 


LE   SUFFIXE   'ARICIUS   EN    FRANÇAIS   ET   EN    PROVENÇAL     183 

défaut  —  et  c'est  toujours  le  cas  lorsque  nous  quittons  la 
région  normanno-picarde  —  nous  sommes  plus  d'une  fois  inca- 
pables de  nous  prononcer  entre  les  deux  formations  concur- 
rentes. Il  en  est  ainsi  notamment  lorsqu'il  s'agit  d'animaux  de 
sexe  ou  de  genre  féminins.  D'après  l'expression  oiseau  chaceret, 
et  substantivement  chaceret,  qui  désigne  l'épervier  dans  l'Est, 
et  où  il  faut  sûrement  reconnaître  un  type  *captiarïcius,  on 
peut  croire  que  dans  jasse  bateressCy  nom  de  la  pie-grièche  en 
Poitou  S  nous  avons  affaire  au  type  *battaricia;  l'analogie  de 
freline  couveoire^  geline  couveresse,  d'une  part,  de  paiele  sainieoire, 
paiele  sawurcchcy  de  l'autre,  semble  appuyer  le  type  *cubarï- 
cia,  plutôt  que  *cubatorïssa.  Cependant  la  sémantique  ne 
conseillerait-elle  pas  plutôt  de  faire  appel  à  *battatorïssa, 
*cubatorïssa  pour  rendre  compte  des  mots  bateresse,  couveresse} 
La  question  reste  pour  moi  indécise,  et  c'est  pourquoi  je  ne 
fais  pas  figurer  les  mots  de  cette  catégorie  dans  les  listes  qui 
suivent. 

3°  Confusion  de  -arïcius  et  de  -ittus.  Le  suffixe  -ittus 
ajouté  à  un  mot  en  -zVr,  -iere  produit  des  diminutifs  en  -erety 
'CretCy  dans  l'Est  -trot y  -eroiCy  -erat,  -erate.  Un  mercerot  est  un 
^tm  mercier  et  une  banerete  est  une  petite  bannière;  les  types 
étymologiques  sont  clairement  *merciarittus,  *bannaritta. 
Mais  que  faut-il  penser  de  chardonneret  et  de  pâquerette  ?  Le  nom 
ds  l'oiseau  doit-il  s'interpréter  par  le  «  petit  chardonnier  »  (cf. 
le  wallon  cherdonîy  chardonneret),  le  nom  de  la  fleur  par  «  la 
petite  fleur  de  Pâques  ?  »  Ou  bien  avons-nous  affaire  à  des 
formes  altérées  depuis  une  époque  récente  dont  les  types  fran- 
çais primitifs  étaient  * chardonere:;^,  * pasquerece}  Je  ne  suis  pas  en 
état  de  me  prononcer.  J'hésite  aussi  pour  l'explication  de  noms 
d'instrument  comme  coulerette  (couloire)  àumerette  (écumoire), 
percerette  (vrille);  aussi  ne  les  ai-je  pas  admis  dans  mes  listes. 
En  revanche,  j'ai  admis  quelques  mots  en  -eret^  même  quand  ils 
ont  des  féminins  en  -erette,  lorsqu'il  m'a  paru  que  la  séman- 
tique appuyait  solidement  l'hypothèse  de  formes  primitives  en 
-ere:;;^,  par  exemple  dameret,  dittienchret,  filleret  et  quelques 
autres.  Des  recherches  ultérieures  dissiperont  sans  doute  les 
ténèbres  qui  obscurcissent  encore  une  partie  du  domaine  où  je 

1.  Rolland,  Faun.  pop.,  II,  147. 


î84  A.   THOMAS 

me  suis  aveiuuré,  ei  permettront  d*en  mieux  fixer  les  limites. 
J'ai  divisé  les  mots  formés  à  l'aide  du  suffixe  -aricius  en 
deux  séries,  selon  qu'ils  ont  pour  base  un  thème  nominal  ou  un 
thème  verbaL  Chaque  série  se  subdivise  en  trois  sections  : 
adjeaiis,  substantifs  masculins,  substantifs  féminîtis.  Les  for- 
mations les  plus  anciennes  sont  celles  qui  reposent  sur  des 
thèmes  nominaux  :  certaines  remontent  à  Tépoque  impériale, 
comme  le  prouve  l'emploi  de  sigillaricius  par  Vopîscus»  et 
les  textes  mérovingiens  et  carolingiens  ne  semblent  pas  en  con* 
naître  d*autres.  Il  est  difficile  de  dire  it  quelle  époque  on  a 
commencé  à  employer  le  même  procédé  de  dérivation  en  l'ap- 
pliquant à  des  thèmes  verbaux  :  le  jour  où  le  verbe  sigillare, 
que  nous  ne  connaissons  que  par  les  glossaires,  a  été  d'usage 
courant,  sigillaricius  a  dû  faire  l'effet  d'un  dérive  de  thème 
verbaL  La  coexistence  de  sigillaricius  et  de  sigillare  con- 
tenait en  germe  la  dérivation  de  thèmes  verbaux,  qui  est 
l'extension  du  procédé  primitif.  Dans  la  période  française  elle' 
même,  il  est  parfois  impossible  de  dire  si  tel  adjectif  en  -err^ 
vient  d'un  substantif  ou  d'un  verbe:  latera,^  paîert:^^  nn^kre;^^ 
par  exemple,  appartiennent  par  indivis  à  JaUy  pal^  îingh  et  à 
lûter^  pitkr^  Ungkr, 


h  THÈMES  NOMINAUX 

K    AdJECTÎFS 

AKG0ILLEREZ,  dcstîné  à  prendre»  conserver  les  angttilles  :  haeq  anuHUtrtch 
(  1 5  9Î ,  dans  Gôd. ,  AN wiLERKcM  )  ;  iac^Uf  mmlhrtih  (15^4,  iUà. ,  ville» ec, 
lu  iac^Hfau  vUUrfeh);  its^que  anXHÎÎfr/  (1619,  ihtd,^  lu  iacqumu  villtrty, 

ASKEREZ,  reUtïf  aux  àries  :  râhim  quon  upfeiU  aumtls  {xvi*  s.  Du  Pînet, 
dam  God.«  ASNERET).  CesHa  Tmduction  du  latïn  a&înusca  vltis,  Icxru- 
lioti  où  le  uins  exact  de  iAsinu^ca  est  mcertairi.  Œ  ptuiï  ba^  k  subsuntif 

A13VZV.ËI,  propre  Â  faire  des  aubes  de   roue  de  moulin   :  sef  mù  amvnchts 
()|I4,  dans  God*,  AevERECHE»  saos  définïticn). 

aAKCHERE2,  prûpre  à  travatiler  sur  un  banc^  sur  un  établi  (?)  :  mgut'f  hanclut' 
rem  {1,1  \$^  dans  God.,  bascmeresse,  siin s  définition  précise)*  Bîen  quH 
ioit  qoestron  4:1  dvi^ous  de  a%nfr  MitruH^  ce  qui  semble  la  même  chose 
au  point  de  vue  ojitiijnelt  Tétymolr^ie  nt.  p«ut  être  la  inèmc^ 

BAKEREZ,  qui  4  Ic  droit  d  ivoif  unc  bannJÈrc,  aujourd'hui  Imnnereî,  Voir 


LE  SUFFIXE  JRÏCIUS  EN  FRANÇAIS  ET  EN  PROVENÇAL  iSj 
Toblcr  dans  Sd^tmgsb,  àtr  Akad,  dtr  SVissemch.  ^u  Berlin^  philos.- h istor. 
Cbssc,  19  janvier  1895. 

BASTAKEz,  BASTEREZ,  proprc  4  coudrc  Iës  bits  :  aguh  hasiûfeuo  iyihXTÛ,  Trt- 

iùr)  ;  aiiiilk  hutfffu  (SiiîtaCf  dans  GaJ.»  yASTERECE). 
'bataillerez.»  garni  de  batailles  (sorte  de  fortification)  :  partes  haieiUtnjM 
(God.,  batailleoh):  taur  hateUMresse  (J.  des  Prcis»  GesU  de  Lîègf,  1872), 
Panni  les  exemples  de  God.,  batailleor  et  bataîllerft^  je  me  contente 
d*en  relever  deux,  qui  accusent  nettement  Li  présence  du  suffîîie  -ari- 
cius  :  nrf  pnUlUrtchf  ei  ouvraige  bataiîkrf^. 
jHECHEREZj  recourbé  en  forme  de  bec:  cognû  Ivcbe fesse  (1^9,  dans  God., 
BECHERESSE,  sans  définition  précise),  Dans  ce  teîtte  unique,  Ja  cognée 
Mterfisf  s'oppose  à  la  cognée  plate  ;  il  s'agit  vraisemblablement  de  Ter- 
minette. 

^BL AEREZ,  propre  .i  moudre  le  blé  :  mouîim  bîitrfi  d  foHÎére^  Cn*?»  ^^^^  God., 
HLAiERET,  oû  On  Ut  aussl  uu  exemple  ânglo-nor mand  postérieur  qui  porte  : 
MoHn  hlayerd  et  molyn  Mafertiy 

BQSEHEi,  sait  de  bousc.  Deuît  ex.  dans  Godef*,  bocseret;  dans  Tun  on  lit 
bmtstrt't^  dans  Tauire,  hn^m^*  Comparer  îc  nom  de  famille  Bettsrq^,  porté 
par  un  imprimeur  de  Tours, 

RRA1SERË2:,  propre  à  moudre  îc  brais  :  maUitî  braifrtch  (145 1,  dans  God*j  bmas- 
SEîiECHj;  mohn  ht  ma  H  (144*^*  Corbie,  dans  Du  Gange,  v-^  molekdinl'm 
brasakil'm).  Il  faut  distinguer  bruierech  (qui  vient  de  brais)  de  broîsertch 
(qui  vient  de  brasser}^  ce  que  ne  fait  pas  Godefroy, 

ftRUEREZ,  qui  vît  dans  les  bruyères  :  ccfcq  brutrect,  kok  bmertche  (1517»  dans 
God,,  bruerece),  La  forme  masculine  est  refaite  d'après  le  féminin. 

BUCLiREz,  fait  d'une  corne  de  l>uffle  :  cor  htgUrtç  (quatre  exemples  dans 
God*,  bugleret.) 

CESSA ftEZ,  payé  à  titre  de  cens  :  timtm  sfxtarium  frummii  cessartti  {ObU,  ât 
SûHgnac,   dans  Anh,   htstor.  tin  Lmmt^in,  Vî,  556;  il  y  a  cnsarH  à  la 

chalmerez,  qui  se  trouve  dans  les  chaumes  :  (^ierrÉ  chaumentie,  cailbu  que 
Ton  ramasse  à  la  surface  des  chaumes  0aubert,  Ghss.  du  Centre^  suppL, 
p.  jé). 

CHEVALKHEZ.  I .  Faît  pOur  un  cheval  :  sek  cfxt'ûhrfs^i  (Gratidfs  Chron.  de  Frana^ 
dans  God.)  2-  Qui  se  porte  à  dos  de  cheval  :  bkrr  chevakrtC4  (Chrétien  de 
Troyes,  Brec,  4725). 

chevrékez,  qui  nourrit  des  chèvres  :  Haie  QuinTekch  (noé)»  aujourd'hui 
Haîf  Bqniverksse,  hameau  de  la  commune  de  Fonteneîle  (Aisne). 

GaiJ)llEKOf  qui  fréquente  les  coudres  :  wallon  raine  a^ece;  champenois  et 
lorrain  ritim  càrûAse^  normand  rat  ne  cmidretk  etc.,  grenouille  verte,  rai- 
nette (Roliand,  Faune po^.^  lll,  74), 

GOLEREZ,  ^UA  scrt  ^1  CDU  1er  ;  patUe  cdkmse  (xv^  s,,  dans  God,,  coULlERFiîSE). 

cosTEREZ,  qui  est  de  côté.  Sîgn.iîé  par  TobkT  d ■après  l'adverbe  costerfctme^t, 
employé  par  R.  de  Condè. 


i8É  a,    THOMAS 

CROCAR£^.  muni  d*un  croc  :  arhakstas  crùcarfssas  {CarluL  ih-  Moniji^llier,  diins 

Rjyiio^ard,  lit  SI9). 
DAMmai,  propre  aux  dames.  Le  mot  n'apparaît  qu'à  la  fin  du  xv^siède,  i£t  il  a 

dési  lors  la  ïormi:  tiameri^t^  iiattii'r£ttt(0*  de  Saînt-Gelais  d^is  God*,  cotnpi.). 

On  dannn  d'abord  le  nom  Je  ckir  âamtréî  au  carrosse  suspendu  (Littré). 
DiMA>{CHEREï,  habillé  comme  pour  un  dimanche.  Mol  ^ui  ne  se  trouve  ^ue 

dans  b  locution  varitt  dbnaml^rtt,  au  xv<:  siècle  (God.)* 
DOSSEREZi  qui  forme    dos  (?)  :  une  tichhu  dtK^ressi  (i^Sû^  dans  God.,  Dos- 

SERESse),  Il   faut  certainement  lire  mhlv(^  ^u  Heu  de  esthtm  ;  c'^r  un* 

varknte  de  eichife^  non  mentionnée  par  God.,  mai^  qui  se  trouve  dans 

Tfjèhes^  4004* 
DRAPA RliZ,  propre  à  fouler  le  drap  :  tnolis  drapar^i  (xilf  s,,  CartuL  de  VArtigt^ 

charte  n^^  5Î*  dans  Bull,  soc,  anh.  du  Litmmin,  XL VIII,  317). 
ESCORCEHEZ,  propre  à  broyer  l'écorce,  le  tan  ;  moultn  tscorceniiç  (1257,  Tour- 
nai, dan^God.,  ËSCORCËRAïc). 
ESPiNEREZ,  formé  par  des  épines  :  humon  tspincrech  (Froissan.  dans  God,). 
HUCEK^f  de  la  dimension  d'une  cheville  {tuce)  :  tarere  tuçhertç^  QUfcereç,  htmf' 

rti  (Thomas,  Esmis^  p.  293  et  295  ;  Horning,  dans  Zeitîchr.jùrram.  PhiL, 

XXil,  56ÛCEXXV,  614) 
EVEHiz^  mû  par  l'eau  :  moiyn  tràtrfi  (ijos,  dans  God.^  ewerei);  uti§  5o« 

^iïtiuvr^'iJY  (ijSs,  Liège,  dans  God.,  um  2).  J'ignore  ce  que  c'est  qu'un 

fl  Èùu  eauwercsse  ». 
FEKEREÎ,  propre  à  couper  Hierbe  pour  feire  du  foîn  :  fax  fainatct  {DîaL 

mini  Grfgotrf.  22.  20^  cité  par  Homing,  Tobîer  et  God*), 
FES'EREî,  FfiKî^EREs^,  FL.\VEREZ,  ELOEREZ  (?).  Ccs  cjuatre  adjcctifs  se  fTOUVeUt 

seulement  au  féminin  da us  la  locution  anârt  Jmntce^  etc.,  enregistrée  pir 

God.  j'ignore  de  quoi   il  ^'agit;   mais  il  n'est  pas   douteux  que  nouf 

soyons  en  présence  du  sutîixe  -  a  rie  î  us,  et  il  est  probable  que  ce  sont 

des  thèmes  oominauit  auxquels  nous  avons  affaire, 
riKEHEï,  qui  marque  les  limites  ifim).  Ne  se  trouve  que  dans  la  locution 

tJmnin  fifterei^  particulière  à  la  Bourgogne,  sous  la  forme  pnttoi^  fimrot 

(God.*   FINEROT). 

roiKEREZ»  qui  donne  la  foire  :  vosgien  htrhi  fofrmw^  mercuriale  (H aillant), 

FROM ESTEREZ,  mélangé  de  froment.  Ce  mot  ne  se  trouve  que  dans  b  looj* 

tioiî  atmm  frOfUiffUrtu^  particulière  i   la  ncgion  du   Nord.  Ot%  dit   par 

extension  coupe  Jrnm fat freif,  htihitl  fromenhtti,  coupe,  boisseau  d'a^'oinc 

frOfHénUfikf  (God,,  r  ROM  ENTER  ECE). 

FRurrEREZ,  qui  sert  a  mettre  des  fruits  :  m-hhum  Jruikns  (î|t4.  Tournai, 

dans  God.  ^  richart). 
FtjiuERE7.  qui  sert  à  charrier  k  fumier  -,  fûttfkt  Juntifiche  {^iJ^t^^  dim  God., 

FUMERICHE), 

GAUrREREZ,  qui  sert  a  faire  les  g;mfres  r  um  fins  ^auffrak  (1534,  Tournai, 
,    dans  God.,  WAominr»  où  il  y  a  six  autres  exemples,  tous  de  la  tn^me 
région). 


LE   SUFFIXE  -ARICWS   EN    FRANÇAIS  ET    EN    PROVENÇAL      iSy 

COTEREZ,  qui  supporte  la  gouttière  :  mur  goutterot  (1462,  Meuse,  dans  God., 
gouterot).  Cf.  ci-dessous  l'article  gotere^  substantif. 

GRF^EREZ,  qui  Sert  à  tailler  le  grès  :  martel  gressrrech  (1335,  Artois,  dam 
God.,  grf^serech). 

JAMBEREZ,  qu'on  fixe  à  la  jambe  :  escljocfs  jamberesces  (Renart,  vu,  582,  cit4 
par  Homing,  Tobler,  God.).  S'emploie  comme  substantif  masculin  et 
féminin. 

LAMPREIEREZ,  qui  tient  de  la  lamproie  :  anguille  lampresse,  locution  de  la 
basse  Loire  (Rolland,  Faune  pop.^  III,  97  ;  cf.  mes  Mélanges,  p.  98). 

LATEREZ,  qui  Sert  à  clouer  les  lattes  :  cleu  lalerech,  cUus  laterés,  cloi  lalerat, 
claux  laitrés  (xiv«-xvc  s.  Artois  et  Franche-Comté,  dans  God.,  lateret). 
Ajoutez  clam  lallerés  en  1319  (ibid,y  paler). 

LOGEREZ,  qui  est  en  forme  de  cuiller  Qoc/)  :  tarrahrum  quod  vulgo  dicitur 
loccrety  de  quo  factures  rotarum  perforant  rotas  suas  (Du  Cange,  tarra- 
brum;  God.,  loceret).  C'est  la  cuiller,  tarière  des  sabotiers  actuels,  que 
beaucoup  de  patois  appellent  encore  louce  (Labourasse),  losse  (Haillant), 
cf.  ci-dessous  locere^  substantif. 

.MALEREZ,  qui  fait  office  de  malle  :  sas  malere's  (i  358,  Nord,  dans  God.,  male- 
ret);  selle  mallerecf  (1393,  Douai,  ibid.,  malerece). 

.meiteerez,  affermé  à  moitié  fruits  :  vigtu  moiterasse  (xiii*  s.  Metz,  dans  God., 
moiterece).  Cf.  le  subst.  fém.  nieiteerece. 

OBLiEREZ,  qui  sert  à  payer  la  redevance  dite  oublie  :  six  pains  oubliere:^^  de  rente 
(Cartul.  de  Chartres,  dans  God.,  oublieret). 

PAROissEREZ,  attaché  à  la  paroisse  :  pre^tres  paroissere^  (Guillaume  Le  Clerc, 
Besanty  dans  God.,  paroisseret). 

PASQUEREZ,  qui  se  mange  à  P;\ques  :  clx>ulx  pasquerés  (Mènagier  de  Paris ,  II, 
143;  cité  par  Tobler).  God.  a  un  exemple  de  temps  pasqueret;  mais  je 
crains  qu'il  ne  soit  pas  sûr  et  qu'il  faille  suppléer  de  entre  les  deux  mots  : 
l'emploi  de  pasquere^  comme  substantif  masculin  sera  noté  plus  loin. 

PEAGEREZ,  grevé  d'un  péage  :  chmius peagere;^,  paaigere^  (1330  et  1338,  dans 
God.,  peageret). 

PLOMBEREZ,  qui  sert  à  clouer  le  plomb  :  cleu  ploumerech  (1304,  Artois,  dans 
God.,  PLOMMERECH,  OÙ  il  y  a  deux  autres  exemples  auxquels  il  faut  ajou- 
ter en  outre  ceux  qui  se  trouvent  à  l'article  plommeret). 

PORCHEREZ,  destiné  à  contenir  des  porcs  :  fosse  porcherece  (1303,  Fontevrault, 
dans  God.,  porcherece). 

POTEREZ.  I  Qyx\  sert  à  faire  des  pots  :  terre  poteresse  (Roman  de  /.  C^ar,  dans 
God.,  POTERF^SE  ;  l'adjectif  est  encore  vivant,  dans  le  môme  sens,  à  Bou- 
logne). 2  Qui  sert  à  puiser  dans  le  pot  :  louce  poterece  (Poésies  du  Xllh  s,, 
dans  God.,  ibid,). 

ROCHERRZ,  qui  vit  dans  les  roches  :  colombe  rocheraye  (Cotgrave).  Le  féminin 
rocheraye,  dû  à  une  méprise,  a  fini  par  s'imposer  même  au  masculin. 
C'est   ainsi  qu'on  lit   dans  Mozin,  Koui'.  Dict.   complet  (1811-1812)  î 


î88  A*   THOMAS 

«  Riximaie  ou  pigeon  de  roche,  oisc;iu  de  passage  de  la  grosseur  du  Inset  4 

ROSERHZ  (?)  God,  ne  cite  qu'un  exemple  :  «  Gdtklks  nnerfcfi^s,  1551,  compte, 
LUlc,  ap.  l^  Fous,  Gloss*  ms.,  BibL  Amiens*  w  II  traduit  imperturhablc- 
meni  par  «  de  roseay  *k  D  autre  piirt,  A  Tarticlc  gerûele,  il  voit  dans 
gitrMlf  une  sorte  d'épke,  ce  qui  ne  cadre  ^ère  avec  le  sens  attribué  : 
Tadjectif  qualificatif  roser^. 

SALMOïJEttEZ,  qui  lient  du  ?iaumon  :  truite  samtiûmierâssf  (Taille^'enE,  Viandkr^ 
êd,  Pichon  et  Vicaire,  p.  190,  etc.).  Manque  dans  God. 

TAfltEREZ,  qui  sert  à  clouer  les  boiseries  {iabks)  :  daux  Uékrei^  hwlerés,  muL. 
(1597-1 5 5 î,  Tournai ♦  dans  God,,  tableret),  L'adj.  s'eroploie  comme 
substanûf  masculin. 

TANERF^,  propre  à  broyer  Técorcc  pour  faire  du  tan  :  tmitlhi  hmmrtx  (1298, 
dans  God.,  tasnrret).  On  trouve  dans  Du  Cange  mohndmum  hmnerfi 
cl  nmUmlhium  tun^rei, 

TAVERKEtiEZ,  qui  haiîte  la  taverne  \jol  H  iavtniertî  {EUtM.  de  mnf  LotifSt  dans 
God.,  TAVERNERIT,  OÙ  l\  }'  a  troisaun-çs  cnanples), 

TRRCERKI,  affermé  au  tiers  des  fruits  :  vtgttf  i^ui-  Sl^vinhn  Manon  Univet  in- 
cirasse  (1 338,  Metx>  dans  God.,  tierceresse).  L^adjecdf  s  emploie  substan- 
tivement aux  deux  genres, 

TERRAGERËZ,  qui  Sert  A  recueillir  le  droit  de  terra ge  :  paniie  knQgtrti$t{C0ui, 
de  Montargis^  dans  God.,  terrageor).  L'expression  a  ét^:  recueillie  par 
Cotgrave,  Furetière  et  le  Dktiommlre  de  Irê^^oux  :  ce  dernier  l'ail  de 
tfrnigfreue  le  féminin  de  ttrraget\ 

TERREREZ,  quî  Sert  à  charrier  de  la  terre  :  hrowtte  krtsse^  Htrrtfh^  itrtHλ 
(1406-1442,  Flandre  et  Anois,  dans  God.  terrage,  i), 

TIKCLEREZ,  quj  scTt  à  cbuet  les  tringks  {tingtts)  :  dmtx  ttngkrà  (1452, 
Tournai,  dans  God.,  tînglerkt)-  l^  variante  iingmrà  (lire  iingufrésX 
attestée  eti  1341  et  1492,  est  difficile  àeîtpliquer. 

TOKBiREï,  OÙ  U  y  a  de  la  tourbe  ^  frssi:^  tmtrheréi  (1304,  Corbie,  dans  God,, 

TOUMBERrr), 

TRUAXDKRtï,  de  truand  :  mhacUs  truandirf^  (Gautier  de  Coînci,  d^ns  God., 
trcandkret). 

VACAREi,  VACHEREZ,  OÙ  passcHt  les  vaches  ;  Porte  Fackerece,  nom  d*une  porte 
de  Douai,  mentionnée  dès  1155  sous  cette  forme  (God.,  vagheresse); 
f7n  ViiCiirrsSG^  nom  d'une  route  romaine  qui  se  détachait  de  celle  de 
Nîmes  àMontpellirret  aboutissait  à  Aiguesniortes- (Germer- Durand,  Dki. 
du  Gard ^  p.  57  ;  Mistral).      * 

VEtERË^,  <iui  appartient  à  la  volerie,  à  la  juridiction  du  voyer  :  d^emifts 
ftaux,  tviérfi  ii fkmi^tff^  ('îî^^  Cari,  de  Si-JosepJi  en  Vûi^  dans  God,, 
%*ounl-'T,  OÙ  il  n*y  a  que  cet  exemple  emprunté  à  Du  Cange  et  où  Tau- 
leur  îraduit  par  «  frayé^  par  lequel  on  a  coutume  de  passer  **). 

VEK0KKGERE1&,  qui  scH  à  rccueiUtri  i  emmagasiner  la  vendange  :  fianitr  ifii- 


LE  SUFFIXE  -ARICIUS  EN  FRANÇAIS  ET  EN  PROVENÇAL  189 
Jangeret  (Rabelais,  dans  God.,  vendangeret) ;  grancfje  vetuiemaresse 
(1397,  ibid.y  vendemaresse). 

viGNEREZ,  qui  sert  à  tailler  la  vigne  :  serpe  vigneresse  (Cart.  de  St-Maur,  dans 
God.,  vigneresse).  L'adjectif  s'emploie  substantivement  au  masculin; 
voyez  ci-dessous. 

VINEREZ,  qui  sert  à  emmagasiner  le  vin  :  ulle  vineresse  {Sermons  de  saint  Ber- 
nard y  p.  1 30,  cité  par  Horning  et  Tobler).  La  graphie  ss  dans  un  texte  aussi 
ancien,  qui  ne  confond  pas  5  et  f  est  surprenante,  comme  on  Ta  remar- 
qué ;  le  scribe  a  dû  penser  à  la  désinence  des  noms  féminins  d'agents. 

vooGEREZ,  qui  ressemble  à  un  vouge  :  serpe  vougeresse  (1472,  Anjou,  dans 
God.,  vougeresse).  Carpentier  a  relevé  dans  des  lettres  de  rémission  du 
Trésor  des  chartes,  JJ,  189,  no  120,  année  1456,  bailliage  de  Mâcon,  le 
substantif  féminin  vougesse,  qui  désigne  un  instrument  identique  à  la  serpe 
vougeresse  de  l'Anjou  *.  Mon  confrère  M.  Gerbaux,  qui  a  vu  le  registre  JJ 
189,  m'affirme  que  Carpentier  a  bien  lu  et  que  le  texte  donne  à  trois 
reprises  vougesse  et  non  vougeresse  :  il  est  bien  probable  que  l'original  de 
la  requête  présentée  à  la  chancellerie  royale  portait  vougeresse  avec  le  sigle 
abréviatif  de  er,  et  que  les  notaires  ne  l'ont  pas  remarqué. 

2.  Substantifs  masculins 

ABLEREZ,  aujourd'hui  ahUretj  filet  à  prendre  les  ablettes  :  nous  deffendons  les 
dblere's  essener  (corr.  essever)  a  terre  (13 17,  dans  God.  Compl.).  La  forme 
ung  ahl ter e  cités:  par  CarpHîntier  dans  Du  Gange,  ableia,  d'après  un  inven- 
taire.de  1 5 11 ,  est  certainement  fautive  ;  mais  faut-il  corriger  utte  ahliere^ 
itng  ablier,  ou  ung  àbleret}  On  ne  connaît  par  ailleurs  ni  ablier  ni  abliere. 

ASNEREZ,  plante  recherchée  par  les  ânes  :  an^Oy  sorte  de  gros  chardon 
(Roussey,  Gloss.  de  Bournois). 

Bezaretz,  lieu  où  il  y  a  des  bouleaux  (^be^)  :  Bessare's,  commune  de  Saint- 
Étienne-de-Maurs  (Cantal). 

bocarez  :  «  boucaréSy  houcharés,  variété  de  raisin  noir  »  (Mistral).  L'étymo- 
logie  paraît  être  bouc  :  cf.  bouchard,  qui  a  le  museau  noir. 

cabrarez,  oiseau  qui  tète  (ou  qui  passe  pour  téter)  les  chèvres  :  prov.  mod. 
cabrarety  hulotte  ou  chat- huant. 

CHAPEREZ,  drap  à  faire  des  chapes  :  for^  chapere^  por  faire  chape  <i  <Mii  (1243, 
Châlons,  dans  Godef.,  texte  republié  récemment  par  M.  Fagniez,  Doc. 
rel.  à  Findustriey  I,  151). 

CHALMEREZ,  oiseau  qui  vit  dans  les  chaumes  :  cJhiumerety  espèce  de  bruant 
(Littré).  Cf.  panière^. 

CHASEREZ,  éclisse,  moule  à  faire  les  fromages  :  lx>ttereaulx,  chasere^  (1467, 
dans  God.).  Jean  Thierry  a  introduit  la  forme  picarde  caseret  dans  le 

I.  God.  a  omis  ce  mot,  il  faut  se  rapporter  à  Du  Gange,  vougetus. 


IÇO  A.    THOMAS 

Dkitmtnuire  JhittîOfS'Uuin  â^  RobvTî  Esticnn^' ,  d'où  elle  a  p.is^c  dans 
Nicot,  dans  CoigTrisx*  et  d^ns  Antointr  Oudin^  qui  donnent  au^si  chiisfret. 
Rkhelct,  Fureticrc  et  TAcadd^mie  dédai^ncru  ct^s  rvrmcs  ruraux.  Trévoux 
reprend  cfhiifreî,  qu'on  €st  A^ionnC*  de  ne  pas  trouver  dans  Linné,  Ce  der- 
nier donne  en  revanche  castrtl^  qui  n'est  probablement  qu*un*;r  ctïquîlJe 
rv^graphique  pour  casent.  Peut-être  faut-il  considérer  notre  mot,  iJoni 
la  forme  primitive  est  douteuse,  comme  un  diminutif  de  chnkr^  ckisH'rei 
cependant  àkisier  et  chasit'n-  diisignv'rn  ordinairement  un  ustensile  ditïc- 
rentj  la  cage  où  Ton  fait  sécher  les  fromojîes  sortis  du  ckufUl,  ce  qui  me 
fait  croire  à  un  type  latin  'casearktnm. 

DAMEREZ,  aujourd'hui  àûmertl^  homme  dont  b  tenue,  les  manières  rap- 
pellent celles  d'une  dame.  Ce  mot  n^ipparaît  comme  substantif  qu'âtJ 
XVJc  siéde  (1)64,  J>  Thierry),  et  tl  a  dés  lors  la  forme  actuelle  damtrtt, 
(VoytJ!  ci-dessus  rartide  DAMhRKif,  adiectîfj.  -  Un  cépage  porte  en 
Limousin  le  nom  de  thimfret  (Ltttrét  suppL). 

D0SSBIIE2»  tapisserie  garnissant  le  dos  d'une  chaise^  d'un  dai?-,  etc.  Quoique 
Froissart  emploie  déjà  thsse/d\  la  forme  picarde  dosserech^  mentionnée  au 
xvr  siècle  par  Du  Tillet  (God.,  oossKKET)  ne  laisse  aucun  doute 
sur  la  présence  du  sufliAe,  -arlcius.  Les  sens  actucb  du  mot  technique 
Jossfret  portent  à  le  considérer  comme  un  diminutif  de  dtu&itr  ;  cepen» 
dant  àùsierfcc^  dont  il  sera  question  plus  loin,  montre  qu*iî  n*e5t  p^fô 
impossible  que  dmîerti  se  soit  substitué  à  dositre;^. 

FAVERE7-.  lieu  où  il  y  a  des  fcves  :  Fiftrrau,  comnïune  du  territoire  de 
Bel  fort,  hiveroh  en  1295,  Vdvtytuh  en   i^oj,  Fdjhds  en  1594. 

VESfeH£Zj  le  mois  où  Von  ûh  les  fottts,  juillet.  Cité  par  Tobîef  diaprés 
Godefr.,  qui  ne  donne  que  deux  exemples  (Jentréchf /inerte) ^  de  la  Flandre 
et  de  la  Champagne". 

FIGARE2,  lieu  où  il  y  a  des  figuiers  :  Figarh,  ferme»  commune  de  Beile* 
garde  (Gard), 

tiLLEKE^,  homme  dont  la  tenue,  les  maniéa^v  rappellent  celles  d'une  tUlc. 
Le  mot  nVst  employé  que  par  G.  Bouchet,  cité  par  God,,  sous  la  fornic 
fiUinî  i  il  semble  fabriqué  sur  le  modèle  de  damtrii. 

OËN  ESTEREZ,  oiseau  qui  fréquente  les  genêts  :  ç' net  rôt  ^  fauvette,  syhie  des 
jardins  (Maillant,  Essai  sitr  un  pijtoiî  %mgim^  Dkt.,  p.  289). 

GonriRÊZ^  mur  qui  supporte  la  gouttière  (cf.  ci-dessus  gotert^,  adjecrif).  Le 
mot  est  encore  vivant  dans  la  Meuse  (fotitteroi^  nmr  sur  lequel  s*appuient 


1 ,  A  cauMr  même  de  sa  rareté  dans  les  testes,  Jhiet^  ne  ngurc  pas  dans 
le  Ghisairf  tiés  liaifs  du  MaHU£Î  de  diplûmatiqm  de  Gir>' ;  on  n*y  trouve 
que  son  svTionyme  ftiiat.  D  après  Gîry,  final  désignerait  «  lin  juin  « 
iutllet  dans  les  Flandres,  juillet  et  août  dans  les  chartes  lorraines  »  ;  cette 
distinction  n'est  pas  fondée.  Partout  /emî  veut  dire  «  jumet  »  ;  La  J*îfiitl 
PUrr$  final  mtrant  n'est  pas»  comme  le  croit  Giry,  le  i^*^  aoiït,  maïs  le 
29  juin. 


LE  SUFFIXE   'ARICIUS   EN    FRANÇAIS   ET   EN    PROVENÇAL     I9I 

les  chevrons,  les  gouttières,  Labourasse).  Il  y  a  un  autre  substantif 
gotere:;^  tiré  du  verbe. 

JAMBEREZ,  instrument  pour  suspendre  par  les  jambes  :  rouchi  cambré,  bâton 
courbe  auquel  on  attache  les  porcs,  veaux,  moutons  pour  les  écorcher 
ou  enlever  les  entrailles  (Hécart)  ;  meusien  jambrot,  traverse  mobile 
retenue  par  un  crochet  de  fer  au  sommet  de  la  potence  et  à  chaque  bout 
de  laquelle  on  attache,  pour  les  suspendre,  l'un  des  pieds  de  derrière 
d'un  porc  tué  pour  fendre  ce  porc  et  en  ôter  les  viscères  (Labourasse). 
Dans  un  autre  sens,  meusien  jamhrot,  croc-en- jambe  (Labourasse). 

JASCHEREZ,  le  mois  où  l'on  laboure  les  jachères,  juin  (Flandre  et  pays  val- 
lons). Cité  par  Tobler  qui  ajoute  un  nouvel  exemple  à  ceux  de  Gode- 
froy.  Ce  dernier  a  relevé  gasker  dans  une  charte  de  1366,  mais  il  est 
probable  qu'il  y  avait  un  signe  d'abréviation  qu'il  n'a  pas  remarqué. 

LOBAREZ,  lieu  où  il  y  a  des  loups  :  LoubaréSy  quartier  du  territoire  d'Arles  et 
montagne  près  de  Saint-Jean  du  Gard  (Mistral). 

LOGEREZ,  aujourd'hui  laceret,  lasseret,  tarière  en  forme  de  cuiller.  Voir 
ci-dessous  l'article  logerez  adjectif  ;  cf.  Littré,  lageret,  lasseret. 

OSSEREZ,  aujourd'hui  osseret,  couteau  de  boucher  qui  sert  à  trancher  les  os. 
Le  mot  n'a  pas  d'historique  dans  Littré  ni  dans  Godefroy  ;  il  apparaît  en 
1752  dans  Trévoux  (Hatzfeld-Darmesteter). 

PAILLEREZ,  oiseau  qui  se  plaît  dans  la  paille  (des  chaumes)  :  pailîeret,  bruant 

(Littré).  Cf.  GHAUMEREZ. 

PASQUEREZ.  I.  La  semaine  de  Pâques.  Cité  par  Tobler.  God.  en  donne  de 
nombreux  exemples,  pasqueret,  mais  on  ne  voit  pas  pourquoi  il  a 
omis  celui-ci,  que  CarpHîntier  a  inséré  dans  Du  Cange,  pasgha  intrans  : 
«  Pour  sis  vins  deus  livres  dis  sous  tournois  febles  prestez  a  Mons''  en 
Pasquerez  entrant  cccxliij  ».  Dans  cet  exemple  il  ne  faut  pas  construire 
entrant  avec  pasqufre^,  comme  le  fait  Carpentier,  mais  avec  cccxliij.  God. 
admet  en  outre  un  substantif  féminin  pasqiierie,  avec  trois  exemples  pour 
l'appuyer  :  «  ung  messagier  envoyet  a  Paris  en  paskeries  »  (1320)  »  ;  «  le 
vint  cinquiesme  jour  d'avril  en  pusqueries  o  (1492);  «  le  mardy  en  pasque 
ries  »  (1539).  Peut-être  faut-il  lire  pasquerie's  partout  et  fondre  ces 
exemples  dans  l'article  pasqueret  ;  toutefois  la  diphtongue  ie  ne  serait 
pas  régulière  puisqu'elle  correspondrait  ici  à  un  ï  et  non  à  un  é  latin. 
2.  Cadeaux,  consistant  sunout  en  œufs,  faits  à  l'occasion  de  Pâques. 
God.  n'a  pas  d'exemples  pour  le  moyen  âge,  mais  il  se  réfère  aux  patois 
actuels  de  la  Beauce,  du  Perche  et  de  la  Normandie.  On  peut  ajouter 
le  Bas-Maine  :  «  Pakri\  œufs  que  les  fermiers  donnent  à  leurs  proprié- 
taires vers  Pâques  ;  quête  que  font  à  domicile,  vers  Pâques,  les  bedeaux 
et  les  sacristains  »  (Dottin). 

PORGHEREZ,  porchcrie  :  Porcherais-CsiSSOy  hameau,  c"c  de  Pont-Château, 
Lx)ire-Inf. 

TERCERBZ  :  «  tiercercts,  certaine  crosse  branches  on  the  outside  of  a  vault  » 
(Cotgrave,  traduit  dans  Godefroy). 


s  92  A.    THOMAS 

VA^AkKT/,  VACHLRF.Z  :  /'ji^Vf i,  cung  Je  la  Onurguc,  jiiiM  nomme  des  troi 

peaux  Je  vjches  sauvages  qui  habitent    sur  ses  rives  (Mistral^;  Vdciyerr 

hameau,  c-*-  de  Demigny,  5>aône-et-Loire.  Cf.  plus  haut,  v.\c\rez,  ad 
viONfcREz  :  «  vigiurfty  serpette  d'une  forme  particulière  dont   se  ser\'eDt  k 

vignerons  pour  tailler  la  vigne  »  (Jaubert,  Gha.  du  Centre). 
viNHAKEZ,  \'ignoble,   prov.  vi^ndnSy  gasc.  Hpijn's,  dauph.    vigturet  (Miî 

tral;. 

5.    SUBSTAN'TIt'i    ItMISINs 

KKKOKKw:!.,  bergerie.  Nom  d'un  domaine  non  identifié  :  La  Bergcresse  en  Bn 

Ci 42},  Ijongnon.  Paris  sous  la  doiuinatiou  an^laisey  p.  100). 
HKZARk/A,  lieu  ou  il  y  a  des  bouleaux  :  Hesseresse,  nom  de  deux  hamcau3s 

commune  de  la  Clourtine  et  de  Saint-Priest-la-Plaine  (Creuse). 
boscARKZA,  lieu  où  il  y  a  du  bois  :  Boucherfsse,  hameau,  anc.  paroisse,  coin 

munc  de  Clairavaux  CCreusej,  Bostdhiresses  en  1484." 
Bos<^AKhZA,  lieu  où  il  y  a  du  buis  (})  :  Bousseresse,  hameau,  commune  d 

Ij  Souterraine  COeuse;,  Bossaressas  en  1427. 
BovâReza,  chemin  des  bcvufs  :  via  de  la  hounci  :  la  hozjreci  que  tendit  a 

Vcm:  itinere  de  la  /H>;i/ri'ii/(Teirier  du  Temple  de  Vaulx  de  1552,  f*»  8 

16,  46;  communication  de  M.  Tabbé  Dcvauxj. 
fk.>VhRhCK,  bouverie  :  lU^uresse,  hameau,  c"*:  de  Lussac-le-Château  (Vienne) 

Boerecia  en  904  ;  Bouvresse  (Oise);  La  Bouvrtsse  (Oise,  c^^  de  BeauHeu-les 

l'ontaincsj. 
..MjKAKhZA,  lieu  où  i!  y  a  des  chèvres  :  La  Cabroulasse^  hameau,  c"»:  de  la  Sal 

vetai  rilêrault;,  (lxibi\ue'i;d  en  1157:  Cabdresse  (pour  Cahraresse),  hameau 

c"t  de  Salazac  CCiarJ;. 
c.Ai.MAKEZA,  lieu  OU  il  v  à  des  terrains  incultes  (dilni)  :  Chaufnaressefhnmcau 

c'»«-  de  .Ma^siac  ((Santal;. 
^osiFKHJ..  I.  (.L  qui  a  des  côtes  :  wallon  coisterfsse,  sorte  de  pommes  i 

cotes.   2.  Ce  qui    a  la  forme  d'une  côte  :  anc.  wallon  coestresse.  angk 

saillant  d'un  toit,  dit  aujourd'hui  côte.   3.  (x  qui  garnit  le  côte  :  wallor 

ioiiti'ft'^st'^  rampe  â  jour  d'un  escalier  portatif  (Grandgagnage,  I,   120 

II,  516  et  567;. 
iK)SsKkK(.h,  jambage  de  maçonnerie  :  jambes ^  piirpiiif^nes  ou  dosseresses  (Çoui 

Je  MoHtjoit  rAmtiur\\  dans  Cod.,  i)c)sshRhssH).   La   variante  dosserassi 

des  coutumes  de  Paris  et  de  Dourdan  est  probablement  due  i  une  substi- 
tution de  suffixe  récente. 
iAG.NhKh(.K,  oiseau  qui  vit  dans  les  marais  C^J;' m-;  :  \\allon//j^''M<'/«y^,  litomi 

(Kolland,  Eut  ne  pop.,  II,  2^8;. 
lAVfKK.L,   lieu  ou  il  y    a  des  fèves  :  I-\ivreise.  commune,  et  Faveresse  01 

/■./i'/yy*i',  hameau,  c-  de  (irauves  (Mamej.  Je  suis  très  surpris  de  voir  qui 

M.    I.ongnon  place  /•"./: vi^u-   dans  la   série  des  vocables  géographique! 

remontant  â  un  nom  de  propriétaire  pris  adjectivement  et  cmplo\*é   ai 


LE  SUFFIXE  -AMiaVS  EN  FRANÇAIS  ET  EK  PROVENÇAL  IJJ 
féminin  et  qull  suppost;  un  type  *Faberîtia'.  Non  seulement  le  nom 
dlïomme  *Faberîtius  est  invraisemblable',  mais  h  persisuncc  d*un  f 
devant  IV  jusqu'au  xm^  siècle  (Fitirresc^^s  1145,  Kiîvmvj  1163,  Fatt- 
tf^es  I3l3i  Fiiwressfs  Iî68,  Ftivntsse^  t4>9)  n^ontre  clairement  que  k 
type  étymologique  est  *  Fa  b  a  ri  c  i  a  & . 

FORTAREZA,  FORTFRECKt  français  moâi:m€ forttrfss^,  lieu  forrifii-.  M*  Toblera 
consacré  une  petite  dissertation  à  l'ctymologie  du  mot  foriermi  '  :  il  y  voit 
une  forme  allongC'C  de  fortrta^  sorti  de  for  tac  par  Tépenth^sc  d'une  r, 
comme  le  normand  jurdrin,  de  jardin.  M.  G.  Paris  accepte  en  gr-tnde 
partie  la  manière  de  voir  de  M.  Tobler  *  ;  il  se  borne  à  rattacher  la  fonne 
fùrklece,  où  M.  Tobler  voit  une  dissimilation  de  forlfrfa\  à  un  type 
*fortancia  existant  déjà  en  latin  vulgaire*  Je  crois  qu*il  fliut  aller  plus 
loin  et  admettre  en  latin  vulgaire  Texistence  de  'fortaricia  à  côte  de 
•fortalicia.  Qjjoique  le  provençal  dise  ordinairement  farfiileia,  il  con- 
naît aussi  fortarc^a^  qui  figure  datis  une  charte  d*environ  117^  (GaiL 
christ.^  ni,  1074)  :  fortùrfyii  «  heu  fortifié  ïj  fait  pendant,  en  provençal,  à 
irtAiir^j  «lieu  desséché  ».  La  forme  française /iV/r^r  est  cerîainenieîii 
sortie  de  fm-knce^  par  syncope,  et  non  de  Jtvit{f,  par  épen thèse. 

FOtREiŒCEr  herbe  qui  donne  la  foire  :  messin  Joennsf^  mercuriale  {Chan 
HeurUtu  chant  i  ). 

t%'ERKARF:ZÀ  I  lieu  OÙ  ïliiver  est  rigoureux  (?)  :  Hyvtnmmt ,  nom  dW 
hameau  delà  c"^  J^  G  ion  x  (Creuse),  au  xv*^  siècle  Ivtrmrt^sts'i,  prononcO 
aujourd'hui  en  patois  huirmima. 

JAMBERECE,  wallon  jambrfsm  «  planches  mises  k  plat  qui  forment  le  bord 
supérieur  d'un  bateau  et  qui  débordent  v«?rs  Fin  teneur  ;  on  dit  ausiii  jm- 
iirtsscs  ïï  (Grandgagne,  II,  551)'  Jotfdrtsse  se  rattache  au  verbe  fûttJ^, 
joindre  (voy.  ci -dessous).  Quant  à  jamhrfjs^^  il  vient  ce  naine  ment  de 
Jamhf^  bien  que  le  rapport  exact,  au  point  de  vue  sémantique,  ne  soit  pas 
très  clair  :  compare/  Icmploi  de  gemm  à  côté  de  jamhttsse  dans  cette  défi- 
nition :  «  âéitê^  terme  de  râtelier,  bois  servant  à  revêtir  les  fnoE  et  à  sou- 
tenir hilamhresse  ii  (Grandgagnage^  11^  522), 
f|A>lARE2A,  lieu  où  \\  y  a  des  loups  :  Umbarfise^  nom  de  deux  communes 
(Ardèche,  Cantal)  et  d'un  hameau  (Cantal).  M,  Tabbé  Devaux  me  signale 


1.  Dkt.  top.  de  ht  Mat  Ht  ^  introd.,  p*  vui. 

2.  On  a  effectivement  Faberius,  tiré  de  laber;  mais  avec  le  suffixe 
*îciu$,  le  latin  dit  FabricîuSi  d^aprèsla  déclinaison  faber  bri. 

3.  Sitiungk  de  r Académie  de  Berlin,  2}  juillet  1896. 

4.  Hemam'iî,  XXV,  621* 

5.  Mém,  dt  h  jac.  i^*  tuit,  ft  arch,  de  là  Crttisf,  X,  pS*  —  Ce  village  a 
iloiiilè  soti  nom  à  une  famille  k  laquelle  se  rattache  Thelléniste  Courtaud- 
Divemèresse  (1794-1879)  dont  le  buste  a  été  érigé  en  i88i  sur  une  place  de 

iFdletin. 

Him$mmt  XXXtl  1 1 


194  A'    THOMAS 

les  mencions  tr  forcsti  de  k  Lin*iir^£t\  serv^a  de  la  Uwarici  n  dans  un 
docuiiiem  dauphmois  de  1 543  ;  un  mas  du  canion  é^  Morestel  (Isère)  est 
iim\  appelé  Lovartcia  en  i  ^48  ;  il  ne  parait  pas  avoir  sub&ist<£  av^  ce 
nom.  (UL  Chevalier,  CoîL  des  CûriuL  dûuph..  Vil,  88  ei  89)- 

MALEREct,  selle  faisani  offiee  de  malle  :  smt  sur  twe  malikuice  (Perveforcstj 
dans  Vtoà,^  malerech). 

MEiTEHKEGE,  femic  à  moitié  fruits  :  lorrain  et  romand  moikrfssf,  môitetaiS4, 
etc.  dâins  Gûd.  moite  r  esse,  exemples  dei23îâi49i. 

PAKERtXE,  aujourd'hui  punnneîie,  pierre,  brique,  etc.,  employée  en  parement, 
c'csi-â-dire  de  façon  à  laisser  voir  son  pan  le  plus  large,  Pitmteusse  s'op- 
pose A  hufhie.  Cf.  ÏJttré^  Hat^fcld^Darmesleter,  elc. 

K>HCAKE^A,  PORCHËRÊCE,  porcherie.  Godefroy  a  plusieurs  exemples  de  pt^r- 
chertctf  comme  nom  commun  dans  des  textes  bourguignons.  Noms  de 
lieux  T  Ftifàxresu  (Charente,  Charente-Inférieure^  c«*e  de  Genou i Hé  ;  Loi- 
ret, cnc  de  Vilianiblain ;  Luxembourg  belge);  Pottrcfkiresxas  (Corrète, 
c»s  de  Lcstars)  ;  Poufcfiaféssf  (Ardéche ,  c"*  de  Dompnac  ;  Pmm-hirmei 
(Lozère);  Poun-hresnf,  c^f  de  Vabrcs,  Haute- Lo i re ;  c"'^  de  Celles,  Puy-ile- 
Dôme  ;  PottufxrtssfS,  c»«  de  Pébrac,  Haute- Loire. 

RÔOAKEZA,  lieu  où  l\  y  a  une  fabrique  de  roues  ;  Rtuitrsus,  hameau  de  b 
CT«  de  Royére  (Creuse),  dont  le  nom  est  écgt  Rintddrasiis  dans  tous  les 
anciens  documents,  et  Roiaricias  dans  une  charte  de  626^  republiée 
par  Julien  Havet  *  ei  commentée  au  jxjint  de  vue  topographique  par 
M,  Zenon  Toumieux^  1^  forme  actuelle  reproduii  approximativement  la 
contraction  et  k  changement  de  ou  en  u  usuels  dans  k  patois  de  la 
commune  de  Royère  j  on  écrit  aussi  RotuiersaSy  Red fr sas.  Dans  les  com- 
munes limitrophes,  k  moi  se  réduit  souvent  à  Ders^, 

sljLAMiiA,  SECHERECE,  français  moderne  sÀ-})erfssr,  lieu  desséché  (en  ainciext' 
provençal)*  état  de  ce  qui  est  sec.  A  Bordeaux  on  dit  sfqtierisso,  ce  qui  sup- 
pose un  type  siccarîcia.  On  sait  que  l'italien  hésite  entre  sec€hert€£iù  et 
i^ï^Àf^iVcfV} comme  adjectif  ;  comme  substantif,  avec  sîgni6cation  collective 
(branches  sèches)  et  abstraite  (sécheresse),  il  n^emploie  que  stahtrkdo. 

TERCERÈCE,  ferme  au  tkrs  des  fruits  :  lorrain  lercertsu,  Urceram^  ctc*»  daiis 
God-  TiERCERESSE,  exemples  de  1240  à  1588. 

VACâKt^A,  VACJtiRECE, vacheHe.  Nous  avom  dà|à  signalé  vaccariita  dans  \m 
textes  du  haut  moyen  âge*  Le  mot  ne  parait  pas  s*étre  conservé  dam 
la  langue  commune),  mais   il    est  très  fréquent  dans  la  toponmle  : 


I,  Mémoire  paru  dans  la  BihL  dt  fEwk  des  Cbari^St  Ll,  41,  rémiprimè 
dam  ŒwîTf-j  d^  Jaikn  HlIïW,  1,  152, 

3.  Mémoire  paru  à  la  fois  dans  les  M/m.  de  U  SêC.  âii  se*  mi.  el  arch.  4^ 
la  Cnntif,  Vll^  597  el  dans  le  BalL  dr  k  5d<.  itt(iî>  fi  ht  st.  du  Limousim^ 
XXXfX,  4Î9- 

l^  L'îtatien  conïiaîi  Tadj.  iMU^jn^^to  «  de  vache  *,  et  le  substantif  m^^O' 
Wfcié»  «  cluir  de  vathé  »  (A>  Qudin);  Te^pagnol  a  iMqtifn^ù  comme  adjectif 


LE  SUFFIXE  'ARICIUS  EN  FRANÇAIS  ET  EN  PROVENÇAL  I95 
Lavaqueresse  (Aisne)  ;  Vacharesse,  c»*  de  Berzème  (Ardèche)  ;  Vacheresse 
(Charente,  cn«  de  Touzac  ;  Doubs, .  c»*  de  Montandon  ;  Loire,  c^c  de 
Saint-Hilaire-Cusson  ;  Haute-Loire,  c»»cs  de  Les  Estables,  Félines,  Saint- 
Julien-d* Ance ,  Saint- Voy,  Siaugues-Saint-Romain,  Venteuges;  Puy-de- 
Dôme,  cn«de  Saint -Alyre;  Haute-Saône,  cnc  de  Fayraont  ;  Haute-Savoie  ; 
La  Vacheresse  (Creuse,  c^c  de  Janaillat  ;  Nièvre,  cne  d'Azy-le-Vif  ;  Seine-et- 
Oise ;  Vosges) ;  Vacheresse-les-Basses  (Eure-et-Loir);  Vacqueresse  (Sommt, 
cnc  de  Q.uevauvillers). 

II.  THÈMES  VERBAUX 
I.  Adjectifs 

APOIEREZ,  qui  sert  à  sappuyer  :  caiere  appoiraiu  (1427,  Tournai,  dans  God., 
TABLETE  ;  le  mot  n*est  pas  relevé  à  son  ordre  alphabétique.  Le  sens  n'est 
pas  douteux  :  cf.  la  locution  synonyme  caiere  apoieoire  (écrit  qmyere 
appoyoire)y  dans  God.,  apoioir. 

BAIGNEREZ,  qui  Sert  à  se  baigner»  :  cuve baignereche  (1434,  Valenciennes,  dans 
God.  baignereche). 

BAREREZ,  qui  Sert  à  bairer  (les  tonneaux):  vrille  harreresse  (16 16,  dans 
Thibault,  Gloss,  du  Blaisois), 

BATELEREZ,  adjectif  de  sens  incertain ,  que  Ton  trouve  appliqué  aux  villes 
qui  n'avaient  pas  de  commune,  dites  viles  hatelereus  ou  bateices  (Beauma- 
noir.  Coût,  de  Beauvaisis,  §  647,  éd.  Salmon,  variantes)  ;  hatelere^  semble 
tiré  d'un  verbe  hateler,  comme  batei:;;^  de  hatre. 

BATEREZ,  qui  Sert  à  battre,  à  fouler  le  drap  :  molin  hatere^.  Bien  que  le  mot 
manque  dans  Godefroy,  voici  un  exemple  qui  ne  laisse  aucun  doute  :  in 
moUndinis  batere:^  de  Brana  (Matton,  Dict.  top,  de  VAistu,  Batrez).  Le 
mot  s'emploie  aussi  comme  substantif  masculin. 

BERSEREZ,  qui  Sert  à  tirer,  à  chasser  (berser).  Voir  God.,  berseret,  et  complé- 
ter i  l'aide  des  observations  de  Tobler.  Le  mot  s'emploie  aussi  comme 
substantif  masculin. 

BOTEREZ,  qui  sert  à  bouter,  i.  A  bouter,  à  appuyer  une  construction  :  ars 
boutere^,  pilliers  boutere^,  2.  A  bouter,  à  fouler  le  drap  :  molins  boiitere^. 
(God.,  bouterez).  Le  mot  s'emploie  aussi  comme  substantif  masculin. 

(de  vache)  et  comme  substantit  masculin  (vacher)  et  vaqtieriia  (vacherie) 
conune  substantif  féminin.  Il  semble  que  le  gascon  ait  eu  un  substantif 
analogue,  à  en  juger  par  le  nom  d'un  archidiacre  d'Aire,  Peregrinus  de 
Vacarissa  (1^0^ y  Limborch,  Hist.  Inquisit.,  2c  partie,  p.  8). 

I.  Cf.  le  lieu  dit  Calmis  Baniaritia,  mentionné,  dès  le  milieu  du 
vii«  siècle,  dans  la  vie  de  saint  Colombau,  I,  1 5  {Scripta  rerum  Merovingi- 
carum,  IV,  80).  On  est  surpris  de  voir  M.  Holder  relever  ce  mot  comme 
celtique  dans  son  Altult,  Sprachschati, 


1^6  A,    THOMAS 

anASSEKE^:,  qui  sert  à  braisscf  la  bière  :  tmmd  bras$crkh  [coiT-  hrass^ridf  7^ 

(14^6»  d^ns  God.«  tHUSSERECH). 

&OEtt£Z«  4|ili  sert  à  fake  b  ïessive  (Wr)  :  siïhuruu,  saîhuruu^  mUmrmst 
[c*cit-â-dtrc  j^/f  /m*'r^^4f],  «f  trépied  syr  lequel  cm  pUcc  le  cuvcau  à  lessive  »j 
dans  N  Meuse  (Labourasse).  Cf*  Méhingtt  Xéfy^n./ran^\^  p.  136. 

CHACEftEZ,  j.  qui  sert  à  chasser  ichifns  ckiceroi:^  (God.^cHACEUots).  2,  Qm 
diasse  :  ojtmt  i^oti'm,  nom  de  Tépervier  dans  le  Doubs  (Tissot,  p.  |is). 
Le  moi  s*emplde  comme  substantif  masoilin. 

ciURGËJiËZ»  qui  sert  à  charger,  à  garnir  le  méfier  à  tisser  :  traistne  ^artherisu 
(God.,  CARcHiHESSE,  sans  définition)* 

cHAKtEAC^t  qui  sert  à  charrier  ;  seîUî  (dttfmhes  {lire  €arûri£ht$},  €armkiMg^ 
caritu^m  (God.,  ganereche,  caîu esche). 

CHEVAUCHEREZ.  J  *  Dooi  011  ^  SOI  pour  chevaticher  :  mmitUt  cheiMUfhtrtt^ 
mppe  dyeimtchertiu,  2.  Par  extension,  qyî  est  porté  par  des  chevaui  ;  liù- 
tkn  tfmMtiihâressr  (God.,  chevaucheresse,  cHEVArcHERET).  Ajouter  h 
variante  bkrt  chemuchtria  pour  bitn  clmaUrfc^t  dans  Chrétien  de  Troycs, 
Erec  4715 . 

DANSEREZ,  où  Ton  va  danser,  k  A  Epinal,  'ûyahpUrre  dans^rossf^  rocher  sur 
lequel  on  allait  danser  à  la  fête  des  Brandons  »  (Haillant,  Dtet,^  covrosse, 

ESPQSEREï,  dont  On  se  sert  pour  épouser  :  tinritl  npmstrrch  (God.,  ESPOSB- 

RIT). 
foERF.K,  dont  on  se  sert  pour  mesurer  les  terres  fouies  (?)  :  vint  honkrs  et  §rt 

virf^iî  juertnn  tn  krn  a  le  mrsurf  tk  Liq^e  (1248,  Rmmnia,  XJX,  86), 
FOI.  ER  kit»  qui  sert  à  fouler  le  drap  :  mot  in  pkre^.  God.  a  plusieurs  cxetnplcs, 

Vii/mikniSj  fmikfff.  En  voîci  d*autres  encore  :  k  moitH  fokrt^  dé  Saini- 

Boiifre  (Arch,  tiai,  JJi*  f"   13^  v»)  :   ks  nmlins  Ji^krf:^  àt  Qhirîrts  {(hiâJ)\ 

tmkndinuifi  Jûkre^  (Du  Gange,  GUROmill,  î).  Le  mot  s'emploie  comme 

substantif  masculin  dans  le  mime  sens,  —  Terre  f ou htrcht  (1 2S1 ,  Si  Omer. 

dans  God.,  fouleresse,  sans  définition  :  sur  îVmîploi  de  terre  grasse  pour 

fouler  le  drap,  voir  Tarticle  f&uJm  du  DicL  du  cûmtfient  de  Savarj^  des 

Brusbns). 
FOftSERECE,  adj.  fem-,  destinée  à  frayer  (Jcfrsêr)  :  wallon  carpi  /ûusseressê 

(Grandgagnaige,  II,  526). 
IMASEREÏ,  qui  sertflà  fraser  »,  ^cosser  ou  briser?  :  une  piiiek  fraieresche  (1^1 5t 

Anoîs,    dans    Bihi.    de   fEc.   des   Chartes^    Utl,    600*    manque    daos 

Ood.). 
WBJOÊQ^JEÊfM,   qui  donne  un  air  fringani  :  cordem  frinpitrà  (Amant  remim 

ûotiêlm^  V*  léai). 
lUMRREz:,  qui  peut  se  fumer  :  bois  fumer&t^  nom  de  h  clématite  dans   1c 

Doubs  (Rolland,  Ehre  pop.^  l,  6), 
GtntÊREi,  aujourd'hui   j^uUkreL  M.  Tobler    rattache  guilkni    à  guUkr^ 

guikff  tromper,    L*hypoth<^sc   est   vraisemblable,    bien  que  le   rapport 

sémantique  oc  îoiï  pas  très  clair.  GuUkrei^  sous  k  forme  fém.  gmUerttu^ 


LE  SUFFIXE   -ARICWS   EN    FRANÇAIS  ET  EN   PROVENÇAL      197 

se  trouve  pour  la  î^rtmière  fois  dans  le  Motiolû^iie  ik  rjuiouft^ux^  que 
M»  E,  Picot  croit  être  des  environs  de  i46o{Romiima,  XVI,  481), 

joiKDEREZ,  qui  peut  Se  jmidrt,  c'est-à-dire  s'accoupler^  se  mettre  ati  Joug  : 
\0^iiin  Viiidie  jédroîse^  jédrassf  (HûïVàTii,  Dkt.,  p.  ^40). 

MACHEREZ,  qui  sert  k  teindre  :  nn'e  îtuuhensî^ ,  à  Kanuir.  Grandgagnage 
n'enregîiitre  pas  le  mot,  mais  il  emploie  Texpression,  vo  faubjte  ;  au  supplé- 
ment, il  à  :  a  mar^f  ouvrier  teinturier  ».  Je  suppose  un  verbe  mâcher 
w  teindre  »  sans  en  connaître  rétymologic. 

MALHAKEZ,  quî  Sert  à  fouler  (malhar)  le  drap  :  molm  tmilharei  (1471,  Fcïle- 
liîî,  dans  M/rn,  des  se.  naî.  et  arch.  de  ia  Cratse,  X,  361), 

NAGERiz,  sur  lequel  on  peut  naviguer,  i .  En  parlant  de  feau  :  foss^  na^frd 
(1340,  Corbie,  dans  God.^  nageret)*  2,  En  parlant  du  bateau  :  rmi'/f 
fkîj^irfsst  (Gloss,  lat.  fr*  dans  God.^  ihid,).  Le  mot  s'emploie  aussi  comme 
substantif  masculin. 

fALEREz,  qui  scn  à  pakr  (garnir  de  pievix)  :  chiux  paltrei^  paieras  (i3979 
Picardie,  dans  God.,  fa  LE  s  et,  ï)* 

riKDEEtEî,  qui  sert  à  pendre  :  gihfts  mt  arhrts  pindereti,  pfttdrets  (CmL  dt 
barrai  ne,  âé  Gor^e^  dans  God,,  pemdeïiet)- 

FESCHEREZ.  I*  Opi  Sert  à  pécher  :  kl  kl,  kiUlri,  cîau  peschtret  ;  hûrqm^  ré  pés- 
çhertce;  îmffs  ptschertces  (God.,  pescheresse,  pescheret).  2.  Qjjî  pèche  : 
cûrheau  ptschrtt  [cormoran]  (God.,  ihîd,);  crot  pfs^herot  [cormoran] »  en 
Bourgogne  (Rolland,  Fitune  pop.,  IT,  %%Z)i  cran  péch^oî,  cro  p^schtr&t^ 
ai^k  /vjf^r^jK  [balbuzard]  (id.  Hk^  II,  8);  %'erî-copècheris  [martin- pécheur] 
(Libourasse,  p.  545,  v*^  fafhptxkîw)  ;  miiriin  peiditrtt  [martin-pccheur] 
à  Mompellier  (Bibl.  de  VÉc.  des  chutts^  LV,  240)  ;  mtrU  pkl>€ret  [martin- 
pécheur)  en  Limousin  (Rolland,  Fûum pùp.^  II,  72). 

prrARiï,  qui  pète  :  rti  pétard,  rùi  pèirret,  troglodyte  (roitelet)  en  Forei 
(Rolland,  Famifptf.,  II,  288)  et  en  Lyonnais  (N.  de  Puitspelu).  En 
Lyonnais,  rd  ptUint  désigne  et  îe  roitelet  et  le  hanneton  a  corselet  plus 
soyeux,  que  les  enfants  considèrent  comme  le  mâle.  N,  du  Puitspelu  se 
refuse  à  voir  dans  petaret  Tidée  de  «  péteur  *  ;  dans  ses  (rraUi,  M  retire 
rétviuologie  absurde  qu'il  avait  donnée,  et  se  rallie  à  une  idée  de 
M,  Homing (Zfte/^r,  /.  r.  P/;.,  XIV,  %i\)  d  après  laquelle  petarei  se  ratta- 
cherait au  radical  de  pdit.  Mais  rd^peUint  veut  incontestablement  dire  «  roi- 
péteur  *  :  comparez  le  nom  de  vûco  pihmso^  petonso  donné  au  roitelet  dans 
le  Midi  de  la  France,  —  dme-petrmsi^  cane-péirosse,  cune-pi^îroie,  nom  de 
k  mtepidht  dans  le  Berry,  la  Beauce,  TAnjou,  etc.  On  sait  que  cet  oiseau 
fait  entendre,  dans  la  saison  des  amours,  un  crépitement  guttural  qui  lui 
a  valu  son  nom  (Rolland,  Faunt  /h^.,  II,  ^45), 

FiQUERtz,  qui  pique  :  daux  piqmrh  (1441^  Bé thune,  dans  God.,  piqueret), 

PLEIERE2,  qui  se  plie  :  té}k  phyéresdx  (iss^i  Tournai  dans  God,,  PLOiE- 
resse).  Se  trouve  aussi  comme  substantif  masculin. 

FOlTERl^,  qui  se  porte  :  dmett  porUrme  (God.,  porteressë). 


198  A,    THOMAS 

RICAKEREZ,  rieur  :  doux  yiux  bkns  et  riquaneré  (Amant  rendu  mrdeîier^ 
V.  I6i8> 

ROLLlREZ,  roulant  :  {ititris:  rmileresses,  etc,  (God-,  ROLEftEssE  2,  et  rolèRET), 
Le  mot  est  particulièrement  fréquent  dans  les  inventaires  angevins  du  roi 
René  ;  chariii  roukrei,  sourlit  rotêllrrr^^  comheik  roulerfsse,  cic.  C'est  I 
tort  que  God.  a  cru  y  voir  un  substantif  masculin  :  fvuUrei  qualifie  tou- 
jours fÈûr//i  qui  vient  d*être  exprimé. 

SAîMERll,    qui  sert    à    écrémer  (â  enlever  le    sain)   i    paydltJ    saymfrfthiî^ 
(1434,   Valencicnnes,  dans  God.,  smmereche).  Il    faut    recoanaitre  le 
même  mot,  mal  lu>  dans /WiW/«  mumitrtc^s  {1^63,  Valenciennes^   iiàn% 
Gûd.,  SAUMIERECE,  sans  définition).  Le  mot  s'empîoie  aujourd'hui  commt 
substantif  féminin, 

SEiEREZ,  qyi  sert  à  scier  :  eoulîtl  soirei  {1459,  Reims,  dans  God,,  soiret), 

soRDEREZ  (?)  :  dirlUrts  sôrdreresus,  dtrlière  iordrt$si  {i%%%^  Namur^  datii 
God*.  sordreresse) ;  derît  sordtr esse  {1-^2^^  Namur,  dans  God.^  deri^). 
La  dtrk  est  de  la  terre  glaise  ;  faut- il  rattacher  Tadjectif  sordere^  à  souràrr^ 
souiller,  où  â  iourdn^  ou  tué  me  clierirber  une  autre  étymologie  ? 

TAILLEREZ,  qui  seH  â  tailler  :  serpe    idUeroHe   (1614,  Nevers,  dans  God., 

TAILLERDT), 

TÈCERÊZ,  qui  tète  encore  :  véh  tos'ro  (Rousscy,  Closs.  à€  Bourmis)*  La  Éonnej 
•/ffjVr^  *kxîei\  est  répandue  dans  l'Est  :  elle  repose  sur  un  iyçt  •tittîare,' 
tandis  que  le  français  propre  ieîtr  repose  sur  'tittare. 

TIREREZ,  qui  sert  à  traire  {tirer)  les  vaches  :  ddh  (tresa  (1  î  13,  Tournai^  dans 

God.,  TIRESCE). 

VENDEREZ,  qui  est  à  vendre  :  pain  vendird  (ij'^ï^  Laon,  dans  God.,  VEND£- 

RiT).  Cf,  fital,  vetderecm* 

2,  Substantifs  MASOJLtNS 

RATEREZ»  ce  quî  sert  à  battre,  i.  Patois  des  Fourgs  (Doubs)  hctfrft^  batte  ; 
partie  de  b  baratte  (Tissot),  2.  Moulin  à  battre,  à  fouler  le  drap  (voy.  ci- 
dessus  haîerci  adj.)  %  tnoUndhmm  de  Battre^  {xiî«  s,),  aujourd*hui,  par  dian- 
gement  de  suffi xei2>  BUre^m^c^^  d'A%'cnay  (Marne);  Bairet,  moulin, 
CM  dTvot-k'pTé  (Cher).  — 

BERSEREZ,  chien  de  chasse  (voy,  d-d^sus  berserez.  adj,).  Le  sens  de  *  car- 
quois »,  donné  par  God.  et  d'autres,  et  celui  de  «  javelot  «,  admis  par 
M*  P.  Meyer  (Gîrari  de  RonssiUmh  ç^.  2  57),  ne  sont  pas  justifiés  (voyez 
à  ce  sujet  G.  Paris  dans  Hûmamii  Xl\\  602,  et  XXJ»  291). 

BOCÊREZ,  animal  tjui  pousse  la  terre  '  :  hausitroi,  un  des  noms  de  la  taupe 
dans  le  Doubs  {Rolland,  Famfr  pop,,  I,  ^)* 


t.  Boiicer,  pour  houier,  forme  des  Vosges,  du  Doubs,  etc.,  remonte  soît  au 
haut -ail.  boian,  soit  à  un  type  verbal  'bot  tiare,  foirné  en  roman  avec  k 
suffire  -iate,  appliqué  au  thème  germanique  primîrtf  boit-»  » 


LE  SUFFIXE   'ARICIUS  EN   FRANÇAIS   ET   EN    PROVENÇAL      I99 

BOTEREZ,  moulin  à  foulon  :  Boutrais,  hameau,  a^  de  Saint-Pierre-des  Loges 
(Orne). 

CHACEREZ,  oiseau  chasseur  :  vosgien  chaisserot,  chassera,  épervier  (Maillant)  ; 
vosgien  chasserot,  autour  (Rolland,  Faune  pop,,  II,  38). 

GRAVEREZ,  outil  pour  creuscr  (chaver)  la  terre  :  chavro,  patois  de  Tannois, 
près  de  Bar-le-Duc  (Meuse),  dans  Zeitschr,  f.  rom.  Phil.,  XVI,  475. 
Labourasse  écrit  chavrot  et  définit  :  <'  houe  employée  pour  le  provignage.  » 

coiLLEREZ,  registre  des  redevances  à  percevoir,  à  cueillir.  Ce  substantif  s'est 
conservé  jusqu'à  la  fin  de  l'ancien  régime  sous  la  forme  cueiîleret,  qui  est 
dans  Trévoux,  et  qu'on  s'étonne  de  ne  trouver  ni  dans  God.,  ni  dans 
Littré. 

COPEREZ,  aujourd'hui  couperet,  outil  pour  couper.  Le  mot  ne  paraît  pas 
attesté  avant  le  xvie  siècle. 

FENDEREZ,  outil  pour  fendre  :  fenderets,  coupoirs  (1391,  Reims,  dans  God., 
FENDERET).  Cf.  refettderei. 

FOEILLEREZ,  aujourd'hui  feuilleret,  outil  pour  feuiller,  faire  des  feuillures.  Ni 
Littré,  ni  le  Dict.  gén.  ne  distinguent,  au  point  de  vue  de  l'étymologie, 
feuiller  a  faire  des  feuillures  »  ait  feuiller  «  couvrir,  se  couvrir  de  feuilles  »  : 
ce  sont  pourtant  deux  mots  bien  différents.  Tandis  que  le  second  vient  de 
•foliare,  le  premier  remonte  à  *fodiculare,  c'est-à-dire  qu'il  est  une 
simple  variante  phonétique  de  fouiller. 

FOLEREZ,  moulin  à  foulon  :  Les  Foulerets,  moulin,  c^c  de  Parigné-l'Évêque 
(Sarthe);  Foulleray,  c^c  de  Montigny-le-Chartif  (Eure-et-Loir),  en  1477 
Moulin-Foulleret  ;  Le  Foulleray ,  moulin ,  c^c  de  Saint-Jean-sur-Mayenne 
(Mayenne). 

FORMEREZ,  aujourd'hui  formeret,  terme  d'architecture.  La  définition  donnée 
par  le  Dict.  gén.  est  la  suivante  :  «  Arête  saillante  d'une  voûte  gothique  ». 
V.  Gay  dit  plus  largement  :  «  Bandeau  en  saillie  sur  un  mur  ou  au-dessus 
d'une  fenêtre,  à  la  naissance  d'une  voûte  d'arête  dont  il  épouse  la  forme 
ogivale  (Gloss.  archéol.,  p.  733).  Il  a  un  exemple  de  1397,  plus  ancien 
que  ceux  des  autres  lexicographes,  où  l'on  lit  :  «  fenestres  fourmes 
(corr.  fourmees)  d'estanficques,  fourmoyrets  et  rem  plages.  »  Le  voisinage 
du  verbe  fourmer  précise  l'étymologie;  la  graphie  fourmoyrets  semble 
contaminée  par  *fournjoir,  qui  a  pu  se  dire  dans  le  même  sens. 

COTEREZ,  avant-toit  formant  gouttière  -.  goutter  et  (1415,  Meuse,  dans  God., 
goutteret);  vosgien  gottWot,  même  sens  (Haillant).  God.  a  plusieurs 
exemples  bourguignons  de  gocterot,  etc.,  mot  qu'il  ne  définit  pas,  et  qui 
s'applique  à  une  partie  d'un  parement  d'autel  ou  d'un  dais  :  il  s'agit 
vraisemblablement  de  la  partie  antérieure,  comparée  à  la  gouttière  d'un 
toit. 

graverez,  oiseau  qui  grimpe  (gravit),  grimpereau  :  gravelet  (forme  dissimi- 
lée),  nom  du  grimpereau  en  Poitou  et  en  Saintonge  (Rolland,  Faune  pop., 
II,  78). 

GRIMPEREZ,  oiseau  qui  grimpe,  grimpereau  :  grimperé,  nom  du  grimpereau 


200  A.   THOMAS 

en  Picardie;  ^rimp^Ui  ((orm^  dissimulât),  nom  dy  mémçoîstau  en  Nor- 
mandie et  en  Savoie.  Ik  miîme  qu'on  a  la  forme  verbale  griper^  à  côté 
de  grimp^r^  on  trouve  gripdd  dans  le  Luxembourg  et  j^ripeîat  à  Meus 
comme  nom  du  mcme  oiseau  (Rolland,  Faîme  pop.^  Il,  78). 

HUCHËîŒZ^  oiseau  qt,i  bûche,  qui  hue  :  uiâitrùh  nom  du  chat-huaïît  â 
Mon tbel îard  {R olland ,  Fmme pop.^ll,  ^X  '). 

JETEREZ:,  instrument  qui  sert  à  jeter  :  nieusien  jitrût^  bîion  fendu  par  un 
boui  cî  que  Ton  tient  par  l'autre,  au  moyen  duquel  on  lance  une  pierre 
placée  dans  sa  fente  (Labourasse), 

LAKCEIEZ,  oiseau  qui  lance,  quï  poursuit  les  autres  :  lorrain  lunarot^  raMt- 
rat^  C'pcrvier  (Rolland,  Fmm^  pop, ,  II,  ^4), 

MUCERËi,  oiseau  qui  se  cache  (qui  se  musst)  :  vosgîen  mtimtrùl^  troglodke 
(Labourasse). 

NAGËRiz»  bateau  pour  aller  à  k  rame  (pour  n(^tr)  1  mgereî,  petit  bateau 
pour  chasser  le  gibier  d'eau  (Littrê), 

KAJiiiU-ï,  bateau  où  l'on  risque  de  se  noyer  :  lyonnais  myrrH,  petit  bateau 
fort  dangereux  dans  lequel  il  ne  peut  tenir  qu*une  personne  (N.  du  Puîts- 
pelu). 

PARTAREZ,  FARTEREZ,  instrunieni  pour  partager,  couper  :  lyonn- /êr/iJrrf» 
parierH^  hache  de  boucher  (N,  du  Puitspelu,  Littré ,  suppU)  ;  dans  le* 
Terres  Froides  du  Dauphiné  pûrdinii  et  parklè  (communication  de 
M.  l'abbC'  Devaux)  ;  portraits  marteau  de  paveur  ser\'ani  â  ébarber  et  à 
tailler  (Littré)  ;  manceau  parint^  patirei^  couperet  (Moniesson)  ;  blaisois 
palkiret^pûHrif^  polirait,  couperet  (Cotgt^ve,  Thibault).  Cf.  mes  MUm^ts^ 
p,   119. 

PERCEHEï,  outil  qui  sert  à  percer  ;  patois  At&  Fourgs  passtrH^  vrille  (Tlssoi). 

PISSEREZ,  vase  pour  pisser  :  patois  des  Fourgs  pseunt^  baquet  â  urine,  vase 
de  nuit  (Tissot), 

FLOIËRE7.,  ce  qui  sert  à  faire  ployer,  charni^:rc,  penture  :  âtttx  ploytréi  emphyù 
à  peitdrt  um  ftmtdrt  {lé^i^  Tournai,  dans  God.,  ploieret).  On  trouve 
plus  souvent  dans  te  même  sen^phkruil,  d*un  type  *pl  tcari  olum . 

RAJrtENEiiEï,  ce  qui  sert  a  ramener  :  ramhifrfi^  trait  au  cordeau  que  îc  char- 
pentier fait  pour  prendre  la  longueur  des  arêtiers  d*un  toit  (Littré)*  Le 
moi  apparaît  dans  la  première  édition  de  Furetiùre,  en  1690. 

ERBATEiŒZ,  outil  pouf  rebattTê  '  ;  nhatUret^  ouril  pour  façonner  Tanloise 


I .  M.  Rolland  groupe  avec  raison  ukîjfr&f  (Montbêliard)  et  t 'ancien  fran- 
çais ÎUiheran  (Cûigravx),  auquel  correspond  aujourd'hui  lutiéran^  lut^/rûn^ 
dans  la  Suiisc  romande  ;  mais  je  ne  puis  croire  avec  lui  qu'il  s*agissc  du 
radical    luc>   briller.  Je  vois   dans   lucheran   une   forme   agglutinée  poyrj 

3*  Rétsttre  doit  être  entendu  dans  le  sens  de  «  rabattre  «  et  non  de 
«  battre  de  nou^^u  »  ;  le  réûtUrH  scn  en  dfet  à  équarrir  ou  i  ammdîr 


LE  SUFFIXE  -ARICIUS  Eti   FRANÇAIS  ET   EN   PROVENÇAL    201 

(Littré).  Le  mot  a  été  relevé  pour  la  première  fois  dans  VEncyd,  méthod,^ 
Arts  et  métiers  mécan.^  t.  I  (1782),  p.  55,  où  il  est  écrit  rebattret QAozin^ 
Souviron  et  d*autres  conservent  cette  orthographe)  et  donné  comme 
usité  dans  les  ardoisières  de  Rimogne  (Ardennes). 

REFENDEREZ,  outil  pour  refendre  :  re/etideret,  coin  de  fer  à  Tusage  des  ardoi- 
siers  (Littré).  Même  provenance  que  le  précédent  ;  d*abord  écrit  refendret, 

TRACEREZ,  outil  pour  tracer  :  traceret  (on  dit  aussi  traceîet  et  traçoir\  poinçon 
servant  à  tracer  les  divisions  des  instruments  de  mathématiques  ;  outil  de 
fer  pointu  dont  les  charpentiers  se  servent  pour  piquer  et  ligner  le  bois 
(Littré). 

VERSEREZ,  saison  propre  à  verser  (labourer)  les  terres,  le  mois  de  juin  :  en 
waim,  en  mars  et  en  verserés  (1322,  Rethel,  dans  God.,  verseret).  La 
forme  verserot  dont  God.  fait  un  article  à  part  n'est  qu'une  variante  pho- 
nétique. Ce  terme  correspond  à  jascherei  dans  la  région  plus  septentrio- 
nale ;  il  est  omis  par  Giry  dans  le  glossaire  des  dates  de  son  Manuel  de 
diplomatique.  Maillant,  Dict,,  p.  616,  woeyé,  indique  des  exemples 
inconnus  à  God. 

VOLEREZ,  objet  qui  vole  (en  Tair)  :  berrichon  volerety  volant  rustique  Qau- 
bert,  Suppl.). 

3.  Substantifs  féminin 

AVALERECE,  puits  de  mine  que  Ton  creuse  :  avaleresse,  bure  que  Ton  avale, 

c'est-à-dire  que  l'on  est  occupé  à  creuser  (Grandgagnage  ;  cf.   Littré, 

suppl.). 
BATERECB,  action  de  battre  ;  battresse  ou  batteresse,  action  d'une  pluie  violente 

et  surtout  de  la  grêle,  qui  battent  le  sol  et  les  récoltes  (Jônain  ;  cf.  God., 
bateresse).  —  Nom  de  lieu  :  Batresse,  étang,  c^  de  Mouline  (Vienne)  ; 

Baptresse,  hameau,  ci-devant  paroisse,  c^c  de  Oiateau-Larcher  (Vienne), 

anciennement  Batri^ia^  Batreiia,  Bateret^ia,  etc.'. 
boterece,  nom  de  lieu  :  La  Bouteresse,  c^  de  Sainte- Agathe-la-Bouteresse 

(Loire). 
BRUiERECE,  bruit  :  Tel  tempeste  et  tel  brueeresse  »  (Ovide  moralisé,  dans  God., 

bruierresse). 
CHAPLERECE,  action  de  chapler,  carnage.  Voir  les  exemples  de  Troie  cités  par 

Tobler. 


I.  Certains  historiens,  notamment  l'abbé  Le  Beuf,  interprétant  le  nom  de 
ce  hameau  au  sens  de  «  action  de  se  battre  »,  y  ont  vu  une  raison  de  placer 
dans  le  voisinage  la  bataille  livrée  par  Clovis  à  Alaric  (Longnon,  Géogr.  de  la 
Gaule  au  r/«  siècle,  p.  579).  Il  est  probable  que  Baterece  désigne  l'emplace- 
ment d'un  moulin  à  foulon. 


202  A.    THOMAS 

CQULERËCEt  ouïil  pour  coder  :  patois  de  Pont-Audemer  cmkresst  ou  cûtde- 
nlUn  pa^oire  (Kobin). 

CRlMERECE,  Outil  pour  écrémer,  écumcr  i  meusîcn  mimerméj  vûsgien  kAn- 
TQUC  (dissimiUition  pour  krf'mrossr)  écumoire  (Labourasse,  chamatth; 
Haiilant). 

CRiNERECij  outil  pouf  crettfr  (entaiH^f)  :  wallon  krtunress,  scie  à  refcïulit 
(Grândgagnage^  rïcranner).  Cf,  ci-dessous  recrekerece* 

CRIIOIECE,  action  de  crier.  Voir  God.,  crierece»  et  ajouter  uti  exemple  quî 
se  trouve  sous  BRLnF.RRESSE. 

CROissERECE^  action  de  grincer.  Voir  Toblcr,  et  God.,  groisserece. 

EscHA^rERECE,  outtî  pour  exover  :  walion  ^rni^tresse,  écrit  xhavresst  en  1  %€^ 
(God.),  pic  à  l'usage  des  houillcurs  (Grandgagnage,  maver  3). 

ESCCMERECEj  écutïioîre  :  wallon  ItottmfHsît  (Grandgagnagc). 

Es^rEssrNERECE,  TESSiKERECE,  Cuiller  pour  arroser  {eikssimr^  kssttm)  le  rôlî 
(Grandgagnage). 

^oautRECE.  1.  Carde  pour //o^«4f  (briser)  la  laine  (Duhamel  du  Monceau, 
Âfi  de  la  Draperie,  1765,  p.  27.)  2.  Pièce  de  fer  employée  pour  arrêter 
ou  maintenir  (ttoquer)  d^autrcs  pièces  (Noutfeûu  Larûussr).  Un  ledcographe 
distrait  a)'ant  écrit  cordf  au  lieu  de  carde ^  k  sens  i  a  été  défiguré.  On  lit, 
par  exemple,  dans  Littré  :  «f  Etoqurnisn^  terme  de  marine,  cordes  longues 
de  huit  à  neuf  pouces  »  ei  dans  le  Noùvettu  Larausu  :  v  Ekquirtsse 
(Marine),  nom  donné  à  certaines  petites  côrdcs,  »  Uozm  a  correctemctit  : 
it  EtoquiresUj  f.  Card.  Espèce  de  cardes  de  8  pouces  et  demi  de  long  sur 
5  de  large.  »  Et  dire  que  >  pouces  de  large  n*ont  pu  empêcher  de  con- 
fondre une  cardi  avec  une  cordai 

C0ÏN&EKECE,  outil  pour  guinder  :  «  guinâtresst  :  de  ce  nom  est  appelée  attx 
tiadres  une  poulie  qui  sen  à  guindcr  la  voile  du  mast  où  elle  est  amarrée  » 
(^îcot,  1606;  cf.  Litre,  Dki.  gét.^  etc.,  et  Iltalicn  ghinderficia,  cité 
^ifwartwj,  XXXI,  IJ5). 

HACHERECE,  Outil  pour  hacher,  i.  Wallon  de  Liège  hochernu^  couperet. 
2,  Wallon  de  Namur  haclxressi^  pbnthe  épaisse  sur  laquelle  on  hache  la 
%natul€  (Grandgagnage,  hacher). 

jotNDERECE,  cc  quî  joint,  ce  qui  sen  à  joindre  :  wallon  pndrfsse^  bordage, 
dit  aussi  jamhruse  (Gnmdgagnage,  II,  531,  janbrèsez);  wallon  ptiârtsit^ 
vadûpe  (Grandgagnage»  I,  257). 

PASSiRECE,  outil  pour  passer  une  manoeuvre  :  «  passeress^,  mo>T:n  ou  petit 
cordage,  pour  bien  serrer  la  voile  contrv  le  miSl  w  (Villaumo»  Dki,  de 
mantu), 

pt.Aa^i^RE55i,  carde  ^qut  ptaquer  la  laine  (Duhamel  du  Monceau,  Jri  ii  U 
Draperie^  p.  27)*  Souvetit  altéra,  par  la  suite,  en  phqmresst. 

MCM^mâCE,  outil  pour  recfper  (scier  tratisversalemcnt)  :  walloï^  rtùpertsu^ 
gnndê  scie  pour  riûper  (Grandgagnagc,  rts^per), 

RECREKEflECE,  outil  pûur  ricrittfr  (entailler  en  suivant  une  ligne  courbe)  : 


LE  SUFFIXE   'ARICIUS   EN    FRANÇAIS   ET  EN   PROVENÇAL     203 

wallon  ricrantteresse,  espèce  de  scie  servant  particulièrement  à  préparer  les 
bois  de  fusil  (Grandgagnage,  ricranner).  Cf.  ci-dessus  crenerece. 

rejetIrece,  outil  pour  rejeter  (gobeter,  crépir)  :  wallon  r'getlress,  petite 
truelle  (Grandgagnage,  ri  jet,  i). 

REPARERECE,  outil  pour  réparer  (recrépir)  :  wallon  ripareresse,  réfareresse, 
outil  à  Tusage  des  ripareù^  ou  recrépisseurs.  A  Namur,  répareresse^  par- 
tie de  la  machine  appelée  hrâie,  qui  sert  à  élever  les  bois  (Grandgagnage, 
riparer). 

REPASSERECE,  carde  pour  repasser  la  laine  (Duhamel  du  Monceau,  Art  de  la 
Draperie^  P-  27). 

RETENTERECE,  retentissement.  Voir  God.  et  Tobler. 

SAiMERECE,  outil  pour  saifiur  (aiguiser)  :  wallon  sémeresse^  pierre  à  aiguiser 
(Grandgagnage,  semer  2). 

SOPERECE  (?)  :  wallon  sopresse^  partie  d'un  chariot,  pièce  de  bois  transversale 
sur  laquelle  repose  et  pivote  le  hamai.  —  A  Namur  sopresse^  levain,  proba- 
blement (Grandgagnage,  soprèse  i  et  2). 

TRAiERECB,  action  de  traire  (tirer).  Voir  God.  et  Tobler. 

VENTERECE,  outil  pour  venter  (vanner)  :  poitevin  venfresse^  pelle  à  vanner. 

A.  Thomas. 


LE    ORIGINI    DELLA    NOVELLA 

NAHRATA    DAL    «  FKANKELEW  d 
NE!  CANTERBURY  TALHS  DEL  CHAUCER 


I 

H  volume  XVI  dette  Publications  of  îhe  Modem  Language  Asso- 
ciation of  Anurica^  Baltimom,  1901,  contiene  nette  pagine  405* 
449  uno  scritto,  che^  sotto  il  titolo  Chauce/s  Franklin^s  TaU^ 
lia  per  îniento  di  mostrare,  donde  questa  novella  sia  tratta.  Ne 
è  autore  Witttam  Henry  Scliofieldj  detla  «  Harvard  University  », 
uno  studioso  assai  ricco  d'ingegnoecoltura,  col  quale  si  ha  caro 
di  consentire  e  dal  quale  non  è  tecîto  dissentire  senza  inatura 
riflessione,  Perù  a  me,  elle  di  quel  probtema  avevo  toixaio 
quando  appunto  lo  scritto  detlo  Schofield  ebbe  a  sopraggiun^ 
■  germi  ',  s  impose  it  dovere  di  ripîglîare  e  approfondire  maggior- 
mente  Tesame^  coït'  animo  pronto  det  pari  a  riconoscerc 
erronée  le  idée  che  avevo  manifestato,  corne  a  raffermarmi  in 
esse.  Questo  esame  fu  condotto  a  termine  ed  esposto  nella 
forma  in  cuî,  air  infoori  di  semptici  ritocchi,  qui  lo  presento, 
già  da  un  intero  anno.  Che  una  recensione  molto  autore  vole 
sopravvenuta  poi  di  Ferdinando  Lot  '  mi  abbia  preceduto  nel 
manifestare  —  in  succinto  —  un  giudiiîio  per  una  pane  piena- 
mente  conforme  al  mio,  non  è  cosa  di  cui  10  deva  essere  tltro 
che  lieto* 

LpO  Schofietd  sostiene  che   it   racconto  messo  in  bocca  al 
«  Frankelyn  »,  ossia  al  ^  Possidente  »,  risale  ad  un  lai  di  antica 


î.  Rtmmnia,  XXXt,  41-4Î* 

3.  V.  nella  Rontania  la  nota  1  alla  pagîoa  47. 

3.  Mùym  Agi,  marzo-aprtle  t$03,  p.  10^  12. 


ORIGINÏ    DEL   EiLiNKELEYNS  TALE  20 5 

iraJIzione  celtiai,  conasciuto  nondimeno  dal  Chaucer  in  una 
elaborazione  francesc  *  del  génère  di  quelle  di  Marie  de  France^ 
se  pure  non  dovuta  propriamente  a  leî  *.  In  questa  elihorazione, 
piii  probabilmente  che  nella  fase  anteriore  %  accadde  che  la 
materia  venîsse  a  combinarsi  con  elemenri  secondari  di  deriva- 
zione  orientale;  e  da  clà  nasce  Taffinità  coi  nurnerosi  riscontri 
'  spettanti  ail*  Asia,  e  quel  la  colla  novella  boccaccesca  ritenuta  io 
passato  da  molti,  ai  quali  a  me  accadde  di  aggiungermi,  Tori- 
ginale  del  Chaucer. 

Deile  due  pani  in  eut  la  tesi  viene  cost  arisolversi,  essenziale 
è  manifestaiiiente  la  prima;  Taltra  mira  soltanto  a  rimuovere 
obiraoni.  E  nella  sostanza  Tassunto  è  ben  lontano  dall'  essere 
nuovo.  In  fondo  si  tracta  onicamente  di  ridar  credîto  ail'  atfer- 
mazione  clie  îl  Chaucer  mette  in  bocca  at  suo  narratore  nel 
proemio  al  racconto.  Egli  ha  nella  memoria,  e  dira  il  meglio 
chegli  riesca,  uno  di  quei  lai,  cheglî  antichi  Brettoni,  prendendo 
materia  da  svariate  avventure^  solevano  ri  mare  nella  propria 
lingua^  e  cantar  poî  eon  accompagnamento  di  st  ru  menti  niusi- 
calî»  oppur  leggere  ^,  Che  aile  parole  rispondesse  il  vero,  non 
$i  prese  a  dubitare  se  non  dopo  avvenita  la  molta  conformità 
col  Boccaccio*  Ma  sebbene  alquanto  scossa,  la  fede  perdur6  in 
molti;  sia  facendo  che  il  Chaucer  attîngessesîmul tan ea mente  al 
BoccaccÎQ  e  ad  un  lai'\  sia  attribuendo  a  comunans:a  o  affinità 
dt  fonti  le  convenienze  tra  il  poeta  inglese  e  il  prosatore 
italiano  ^. 


%*  V,  p,  437  e  b  5tie  lietla  nota  a  p,  4|i. 

4,  V,  11021-27  seconde  h  numera^ione  contîtxuau  ed  uiuale. 

5*  Cosi  pensa,  per  csenipio,  il  Landau,  DU  Quelhn  d€s  IkkameroHj  î»  éd. 
p.  ja,  2*  ed*  p,  94.  Nel  Dunlop,  Historyôf  fiction,  2«  éd.,  II ^  J42,  traduzione 
Lîcbrecht^  p,  251,  il  vedere  die  al  TjTwhhi  pareva  proprio  esser  noto  un  M 
dt  contenutocorsimile,  vkû  conie  a  turbarc  (quanto,  non  si  capisce  bene)  la 
cotivin7Jorte  a  cui  Tamore  em  condotto  per  suo  coiito,  c  cbc  aveva  esprcsso  în 
Ibrma  aflTermatîva,  délia  deriviuione  boccaccesca. 

6.  Taie  è  ropinione  professât»  dallo  Skcat  (Schofield»  p.  456)  neir  ©di- 
zîpne  maggiore  dclle  Opère  éé.  Chaucer  {The  Compkte  Wt^ki  ofG^ffny 
Cfjiiti€fr  Bdittit  Jr0m  numerom  Matutsaipts,  Londra,  Frowde,  1894-9 J^  sel 
volumi),  che  ml  spiace  di  non  avère  a  dîsposidone  mia.  Ma  anche  il  Wrîght, 
The  Omterbury  TaUs^  Londra,  Gritïîn,  setiz'  anno  {neïk  Univcrsul  Uhan)^ 


20é  P-    RAJNA 

Se  non  è  nuovo  l'ossunto,  sono  quasi  in  tutto  nuovi  i  mezzi 

COI  quali  lo  Schofield  si  studia  di  darglt  saldeieza»  Ed  egli  pensa 
di  aver  mesîso  allô  scoperto  uno  scoglio,  su  cui  la  coscruziune 
poserebbe  sicura. 

Puô  dnrsî  che  a  qualche  œnoscitore  del  Chaucer  non  fosse 
sfu^ito  che  il  nonie  di  uno  dei  protagonisti  del  Franktkyns 
Talc  occorre  anche  nell'  Historia  Britonum  di  Goffredo  di 
Monmouth,  dove  è  chiamato  a  questo  modo  un  principe  fatto 
regnaresui  Britanni  neir  età  di  Claudio  e  di  Neronej  del  quale 
si  sa  dire  parecchio  e  che  si  rappresenta  con  colori  smaglianti  : 
«  Nullus  eo  in  bello  ferocior  tuii,  nullus  in  pace  mitior,  nullus 
jocosior,  nullus  in  dandis  muncribus  profusior  *.  "Ma  nessuno 
doveva  essere  venuto  neir  idea,  che  dall*  Historia  resuiti  nota 
a  Goffredoj  e  riferita  appunto  ad  Arviragus^  la  novella  nostra. 

Perché  cio  sia  pensabile,  è  chiaro  che  abbiam  bîsogno  di  una 
moglie  ;  ela  moglie  di  Arviragus  occupa  realmente  nellanarra- 
zione  del  cronbta  un  posto  cospicuo,  ancorchè  non  cospicuoa 
quel  segno  che  verrebbe  fatto  di  pensare  a  chi,  pago  di  ciô  che 
lo  Schofield  riferisce,  non  ricorresse  al  testo,  La  donna  6 
figliuola  deir  imperatore  Claudio.  Il  quale,  trovandosi  a 
guerreg^iare  contro  quell'  avversario  terribile,  colT  offerta  délie 
noifize  lo  ammansa  e  lo  induce  a  riconoscere  la  sovranità 
romana  :  «  Erat  autem  nomen  puellae  Genuissa,  eratque  tan  ta 
cius  pulchrttudo,  ut  aspictentes  in  admirationcm  duceret*  Et 
ut  maritali  lege  copulata  fuit,  tanto  fervore  amoris  succendit 
regem,  ita  ut  solam  cunctis  rébus  praeferret.  ^i  E  cosi  qucsti. 


p,  114,  avcvA  ftcritto  :  i  The  by,  from  which  Cliauccr  infomis  us  thit  he 
took  thîs  ulct  appears  lo  be  enttrely  lost  ;  but  Boccaccio  who  made  up  hls 
Duàmeron  itom  Lhc  popuUr  fabliaux  and  talc3  ot'  the  time,  bas  prescrved  a 
version  oi  this  siory  m  that  work,  Bay  x,  nura.  5,  as  wcU  as  m  tbc  fiftli 
book  of  his  Phihœpo.  *  Kù  dîversa  era  stata  ropinione  del  Sandras^  Êtmte 
$ur  G.  Chauar  mnsidrrf  comme  imitateur  dfi  Trouvera^  Parigi,  1^5 9,  second© 
m  vedo  sohanto  attra verso  alla  recensioûe  dell'  Ebcn,  Jahrb.  Jûr  roman,  umi 
engL  Lîkr.^  IV^  106.  V*  anche  una  délie  note  preziose  (p.  éjî),  dl  cul 
W,  Heruberg  corrcdô  la  sue  lodatissîma  traduziûnc  tedes^  {CanUrbuiy^ 
Gtscbkhtm)  dei  CanUrbury  Tak$,  înscrita  nella  Bihi,  auslând^  Ctais.^  Hildbur]^ 
hduscn  (ora  Lipsîa  e  Vienna),  «r  Bibliogr.  iListhut»,  1866-67. 

I.  L,  IV,  c.  16,  p.  î7  neir  edubne  San- Marie,  La  prima  mciuionc  di 
Arviragus  s'c  avuia  nel  c,  !l. 


ORiGitJI   DEL   FRANKELEYNS  TJLE  MJ 

per  eternare  la  memoria  del  matrimonio,  suggerisce  a  Claudio 
di  fonda re  nel  luogo  dove  esso  fu  cdebrato  una  cittàj  che  «  de 
noraînc  eius  m  è  detta  «  KaergîoUj  id  est  Gtoucestria  '  «,  Délia 
donna  sarâ  pot  fatto  ancora  un  cenno.  Aven  do  Arviragus  scosso 
di  nuovo  il  gioga,  Claudio  manda  contre  di  lui  Vespasiano. 
Una  battaglia  sanguînosa  rimane  di  esîto  incerto  :  «  Mane 
autem  facto,  mediaute  Genuissa  regiiia  concordes  tStciv  sunt 
Auœs  ^  »,  ossia,  corne  si  capiscc  dal  contesto^  Arviragus  consente 
un'altra  volta  a  riconoscere  l*aho  dominio  impériale. 

In  ciù  che  Goffrcdo  dice  di  Arviragus  e  Genuissa  loSchofield 
vcde  spiccatissimo  Tîntento  di  rappresentarci  una  rara  félicita 
matrimoniale^  :  «  The  historîan's  chicf  solicitude  is  to  exalt  the 
happiness  of  this  supposed  niarriage  '.  »  Confesso  che  io  non 
ce  lo  vedo  punto.  Che  se  nella  versione  inglese  del  Giles, 
ri  porta  ta  dallo  Schofield  in  cambio  del  testo,  Gloucester  è 
fatta  edificare  «  for  a  monument  to  posterîty  of  so  great  and 
happy  a  marriage  »,  neir  originale  trovo  invece  «  civitatem^ 
quae  tantarum  memoriam  nuptiarum  in  futura  tempora  prae- 
beret  »,  Dell'  affezione  della  moglie  per  il  marito  non  una 
parola  ;  e  al  più^  ripensando  aile  donne  sabine,  si  potrà  sperare 
d'indovinarne  qualcosa  dalP  ufficio  di  pacificatrice  adempiuto 
nella  spedî/Jone  dî  Vespasiano*  Ma  îvi  le  cose  son  cosl 
poco  tnanifcste,  che  di  quclla  spedizione  lo  Schofield  non  fa 
neppur  cenno.  Dal  fantasioso  cronista  ci  è  bensi  rappresentato 
espressamente  un  marito  tutto  devoto  alla  moghe,  stregato,  si 
potrebbe  dire,  dalla  sua  bellezza:  il  che  è  ben  divcrtio,  pare  a 
me,  da  un  idéale  di  matrimonio,  E  da  questo  Arviragus  cosl 
înnamorato  di  Genuissa  «  ut  ipsam  solam  cunctis  rébus 
praeferret  »,  riesce  abbastanza  diverse  quello  del  Chaucer,  che, 
dopo  poco  pîù  di  un  anno  di  luna  dî  miele  ■*,  pianta  la  sua 
Dorigen, 


2.  Cl 6, 

4,  L'espressionc,  v,  11 118,  «  A  yecr  and  more  lasicd  this  blisfd  lyf  m,  si 
canvc:ne  di  accrescitiva  in  iimiuttva,  sc^,  ïiivece  di  rafFrontarh  alla  durata 
tncdia  di  siŒine  lune,  la  ragguagiîarao  ad  un  corso  di  vita.  Ccrto,  se  l*aono 
oellfl  mente  dd  pœta  fosse  suto  varcato  di  molro,  egli  non  si  sarebhe  es  presse 
a  quel  modo. 


208  p.    tAjVA 

To  sdce  m  arn»es  woi^ip  azid  honour  : 
For  al  Jûs  liist  be  sent  in  swicb  bbour  ' 

«  For  al  hîs  lusi  he  sctte  in  smich  lahom  »  !  Corne  avrebbe 
potuto  esprimera  più  esattametïte  il  poeta,  se  ivesse  avuto  il 
proposito  delîberato  dî  metterst  in  opposbione  col  cronîsta  ? 
lUc  parok  corrispondono  i  fâtti,  poichè  FArviragiis  chauceriano^ 
rttnane  în  Inghilterra  bcn  due  antii  :  «  the  book  seiih  thiîs  ■ 
(vv  Uï2î);  «cosi  portail  libro  ». 

Non  diciamo  per  ciô  che  qui  da  Anriragus  la  mc^Ue  non  su 
pîù  amata.  Quando  alla  fine,  ricco  dî  onore,  egli  ritoma,  si 
potrà  parlare  anche  dell*  amor  suo  vivissimo  nell*  apmirofar 
come  ineflabilmente  fettce  la  donna  : 

O,  bltsFu]  artow  oow,  ihoii  Dorigcn, 
That  hâst  thy  ]tiÂiy  hiBboodc  in  ihyne 

The  frcsshc  knight,  thc  wonh}^  min  ofarmcs^ 
Thaï  lovtih  ihee,  as  hîs  owenc  henes  lyf  ï 

(V*  ii4oa-405.> 

Manifeste  tuttavia  che  nella  rappresentarione  del  Chaucer, 
al  rovesdo  di  ciô  che  segue  în  quella  di  Goffredo,  Pinnamora» 
tissima  è  la  mogUe.  Qtiindt  la  lunga  descrizione  dello  statc 
doloroso  in  eut  e^a  é  ridotta  dalla  panenza  di  Arviragus  : 

For  bis  absence  wepeth  she  and  syketh  ; 


Shemoomnh,  waketh,  wayleth,  fisieth,  plcvnaeih. 

(V.  nu^,  iiïîi.) 

E  gli  sîoni  încessanti  e  molteplici  che  fanno  glt  amici  suoi 
pcr  trarla  da  quello  stato  ottengono  solo  di  rendeda  nel  dolor 
suo  pîù  ragîonevole. 

Gîà  da  ciô  sî  vede,  quanto  sia  lontano  dal  vero  to  ScholieMl 
quando  sol  principio  egli  afferma  che  «  Un'  analisî  accurata  del] 
Franklin* s  Talc  manifesta  che  in  fondo  esso  non  è  altro  che  lal 


I*  V,  11125-14.  Mi  aîtengo  nel  citare,  solo  pcrmeUcndomi  qyalchc  voltaj 
di  fîtoccan:  rîïUerpufif  îone^  al  tcsto  di  un  a  deik  cdmoni  minori  ddb  Skcat  îf 
TTwf  itwtattt  Cmaucêb  Brïwf  û  Cotuphte  Editiûtt  (*f  his  fVarks  £ditid  fit 
nutticrmis  MânmcripU;  Oiiford,  Clarendon  Presi,  1897* 


ORIGIKI   DEL  FRANKELEYNS  TALE  20^ 

storîa  dî  un  matrimonîo  singolarmente  felice  tra  îl  gemiluomo 
britanno  Arveragus  e  la  sua  belltssinia  nioglie  Dorigen  '  «.  E 
questo  concetto  ritornerà  poi  di  continuo  nel  corso  del  lavoro. 
«  L'âBalisi  accurata  »  è  invece  —  mi  duole  assai  il  dirlo  —  un 
franrendimento  complète.  Crederebbe  mai  lo  Schofield  di 
potersi  Ibndare  su  certi  verst  che  troviamo  presse  la  fine,  âl 
momemo  di  prender  commiato  dagli  sposi  ? 

What  sliolde  I  lenger  ûf  ihis  cas  etidyte  ? 
Arveragus  and  Dongene  his  wyt 
In  sovereyn  b lisse  kden  fonh  hir  lyf, 
Never  eft  ne  was  ther  angrc  hem  bitwcnc  ; 
He  cherisscth  hir  as  though  &hc  wcrc  a  quenc, 
And  she  was  to  hini  trewe  for  evermore, 
Of  thïsc  iwo  folk  ye  gctc  of  me  na-more. 

(V.  uBs4-6oO 

Bisognercbbe  non  saper  vedere  altro  che  la  superficie,  anzi,  la 
superficie  in  un  punto  solo,  per  darimponanza  aqueste  parole, 
le  quali  si  riducono  ad  una  formola  di  conclusione,  comunis- 
sima  nelle  novelle.  Interroghiamoqualche  tcstîmonioingenuo! 
votgîamocî  alla  novellistica  popolare,  aprendo  il  primo  libro 
che  capka  sotto  mano,  La  mmellaja  fwrentina  delT  Imbriani*. 
Nov,  I  ;  «  ....  Divennero  padronc  di  tutta  quella  ricchezza 
e  vissero  e  se  la  godettero  e  in  pace  sempre  stettero-  » 
Nov.  III  :  ti  E  cosi  una  cosa  di  celia,  le  riusci  di  divenire  una 
Regina.  E  visse  bene.-.  »  Nov.  IV  :  et  Giovannafece  levistedi 
stare  malata  per  qualche  tempo  e  alla  perfine  fattala  pace  coUo 
sposo,  vissero  alicgri  e  contenti,  e  credo  ancora  lo  sieno,  » 
Nov.  V  :  «  E  cosi  loro^  gli  sposi,  senza  più  paura  e  cimore  se 
je  vissero  insieme  in  pace.  »  Nov*  W  :  «  Cosi  se  ne  stiedero 
mi  uniti  fino  che  camparono.  E  lei  gli  fece  deglî  altri  figli; 
rîmasero  ricchi  di  tutta  la  ricchezza  délie  sorelle,  che  avevano 
cose  assai*  »  Si  vuole  che  contînui  ?  Puo  continuare  il  lettore 
da  se,  posto  che  ne  seiîta  il  bisogno  '. 


K  P.  406* 

2*  Nclla  rîstampa  del  1877,  Livomo>  Vigo. 

j,  Sî  vedano  nello  sciritto  di  Enrîco  Fi i i pp înï,  «  Corne  finlsconole  nostre 
fiabe  ■,  ArcL  Mh  Trad.  popoL^  XX,  489*506,  le  pp.  495  sgg.  Aile  indïca- 
Boni  bibîiografiche  délia  p.  490  aggiungerô  Petsch  (Robert),  FonmUmfte 

hlûiu  im  Vf}lkiftmrd)tu  \  Bi-rlin,  Weidniannsche  Buchhandlung,  1900. 
#Mj  XKXIL  I  j 


2IO  P.    fUplil 

Ben  diverse,  per  poco  che  si  osservi,  è  il  contenuto  de! 
racconto.  Ridotto  ad  un'  cspressioïie  più  semplice,  S4i  non  forsc 
alh  più  scîTipIîœ  in  assoluto  %  esso  ci  présenta  una  mogUe^ 
che,  sollecttata  d'amorCj  crede  di  sbarajsjsarsl  del  solJeciiatore 
col  menere  alP  amor  suo  una  condizione,  che  crede  di  adem- 
pîmento  impossibile.  AU'  innamorato  înveoe,  con  grande 
sniarrimento  délia  donna^  riesce  di  effetmarla;  ed  allora  il 
marito  concède  e  vuole  che  essa  a  sua  volta  adempia  la  proniessa^ 
Sennonchè  Tinnamorato,  preso  di  ammirazionc,  riaunzia 
conseguimento  di  cio  che  aveva  ardentemente  desideraU^J 
Abbiamo  insomma  un  atto  di  singolare  leaJtà,  che  ne  provoctl 
uno  di  generosità  singolare  altrettanio  ;  e  k  designazione  di 
a  generosità  »  pu6  usarsi  în  entrambi  i  casi,  si  da  far  apparire 
più  piena  la  corrispondenza.  Che  ai  due  generosise  ne  aggionga 
un  terzo  nella  persona  di  colui  al  quale  si  devc  Tartnazione  del* 
r  împossibile,  è  cosa  secondaria'.  Essenziali  bensï  i  sentimentî 
che  vedîamo  regnare  fra  i  coniugi.  Se  la  moglie  non  fosse  leale  e 
devota^  cederebbe  nella  prima  fase  aile  sollecitazioni  insistenti,  o 
perlomeno  si  piegherebbe,  in  cambio  di  disperarsi^quando  la  sua 
richiesta  è  siata,  contro  ogni  presunzione,  sodisfatta;  se  il  marito 
non  volessc  bene  alla  moglie,  gran  magnanimità  la  sua  ne! 
concederla  per  una  volta  a  chî  ha  acquistato  il  diritto  di  averla  ! 
Ma  essenziali  quanto  si  voglia,  queste  sono  pur  sempre  cireo- 
stanze,  sulle  quali  non  è  neppur  necessarîo  d'insbtere,  Facen- 
dane  addirittura  la  parte  sostanziale^  lo  Schofield  mette  uHi 
uomo  colla  testa  ail*  ingiû,  il  capo  in  alto,  e  vuol  poi  persua- 
derci,  ed  ê  per  suo  conto  persuaso,  che  quella  sia  la  posizione 


r.  Ncl  fare  questa  rîscrva  —  dubitativa  —  ho  davantî  alb  mente  î  lisom- 

1*  Oltre  che  secondaria,  parrà  anche  da  giudicare  di  data  rdativamcme 
rccctïte.  Qui  cutiavia  6  da  distinguerez  Nella  specificas^ione  nostra  h  ooa 
tnoJta  aoîichîtâ  par  rcsuk^ç  dalF  esscrc  ancora  maalfc^u  i  segai  di  una  sal- 
datura.  Checché  sî  fa  ccia  per  csaJtare  la  con  doua  dclJ'  Sncantatore  c  soîlev^k 
it  livello  délie  attre  due;  mal  non  accadrà  che  si  riesca  ;  giacchè,  cht  è  douto 
di  un  potcre  cosï  meraviglioso,  non  dovrebbe  curare  di  unn  rîcompensa  mate- 
rialc^  m  pure  siragrande,  Iroppo  più  di  quanto  dovrebbero  aver  bisogoo  di 
^ualchc  miserabile  Lira  î  pretesi  dîstributori  di  terni  e  di  quademe  per  U 
giuoco  del  lotto.  Va  con&îderato  tuttavîa  che  una  rispondenxa  questo  termine 
intermcdto  La  trova  ancbe  nei  parallcli  orientali  ;  V.  più  oitrc,  p.  220. 


ORIGINI    DEL   FRA^KELEltl^S  TALE  21 1 

vera*  A  me  par  dî  vedere  corne  Tillusione  si  deva  esser  pro- 
dotta,  Lo  Schofield  (e  fu  cosa  meritoria),  inibnttutosi  nel- 
TArviragus  di  Gotfredoj  corse  colla  mente  al  Cliaucer.  Il  rawi- 
cînamento  generô  Pidea  legittima  di  un  possibile  rappono. 
Tirando  poi  a%^anti  per  qiiesta  via^  %^enîie  a  concepîre  il  rapporto 
corne  intrînsecuj  ossia  taie  da  riguardareil  contenuto  narrativo  ; 
e  siccome  le  narra^îoni  poco  o  punto  corrispondevano,  la 
fantasia  supplt,  metamorfosando  Tuno  dei  termini,  e  pîti  aocora 
Faftro,  skché  alla  fine  i  due  riuscirono  ben  simili  e  tali  da 
potersi  sovrapporre.  Corne  anche  qui  si  vede,  la  Schofield  è 
dotato  di  una  mente  molto  agile.  Perché  Tagilità  di  virtu 
preziosissima  non  si  con^'crta  in  vizîo,  hisognerà  ricorrere  al 
morsti  e  aile  brigHe, 

Mglaconvenienzadel  nome«  Amragus  »  ? — Poniam  pureche 
poco  le  tolga  la  sconvenîenza  che  ad  essa  si  accompagna  rispetto 
alla  moglie,  «  Genuissa»  inCoffredo,  «  Dorigen  w  o  «  Dorigene» 
nel  Chaucer,  in  quanto  i!  «  Genuissa  »,  se  coglie  nel  segno^ 
come  rîtiene  il  Lot  %  la  spiegazione  etimolugica  propostane  dallo 
Schofield  %  sarebbe  ad  ognî  modo  farina  del   solo   sacco  di 

Jioffredo.  Ci6  non  importa.  Per  l'apputuo  la  convenienza  si 
ppone  in  modo  energîco  alT  idea  cui  dette  nascîmento*  Ad 

"un  comparatore  già  cosi  sperimentato  doveva  apparir  subito 
inconcepibiie  che  il  nome  si  mantenes&e  ta!  quale  nella  supposta 
tradirione  celtica  primitiva,  nelT  claborazione  in  lingua  d*oïl, 
nella  novella  inglese.  Perfino  le  piètre  niutan  forma  precipi- 
tandogiij  giù  tra  i  massi,  dentro  ad  un  torrente.  Si  veda  se,  in 
condi^ioni  analoghe,  si  possa  addurre  un  casosolodipersistenia, 
E  qui  le  cose  sono  aggravate  oitremodo  dalla  forma  prettamente 
latinain  cui  il  nome  ci  si  offre,  Altri,  vedendo  come  Goffredo, 
nel  trattare  di  Arviragus^  si  rtferisca  espressamente  a  Giove- 
nale  ',  e  non  trovando  d'altronde  nell'  uso  celiico  dell'  età  sua 


1.  R  no. 

2.  P,  414-16, 

l.  C,  16  ;  ■  Famaigitur  dus  [per  totam  Europam  divulgata,  dilîgebatii 
eum  Roniâni  ^i  timebant,  îta  ut  prae  omnibus  reglbus  sermo  de  eo  Romae 
fieret.  Unde  juvenalis  caecum  quendam  Neroni  dixisse  in  libro  suo  comnie- 
itiorilcurn  de  capio  rhumbo  loqucretur,  inquiens  : 

Regcm  aliquem  ci  pies,  aut  de  temonc  Britanno 

Decidei  Arviragùs.  - 


212  P.    EAJKA 

lîïilla  che  ben  corrisponda  ',  pensera  cbe  da  Gioveoale  soluniû» 
al  <]uale  Iq  stesso  Schoâeld  aon  puô  a  meoo  di  cofiœdier  pixrec- 
diio^,  sia  emaDato  il  personaggio  V.  Ma  suppcmîaixi  parc  cfac 
GioveDale  sia  int£r\'enuio  solo  per  rifoggiare  :  o  chi  pocrà  mai 
capire  che  «  Arviragiis  »  s avesse  alla  maniera  ste^  nd  M 
francese,  attraverso  al  qiiale  la  sorgenïe  celdca  de\e  aver  man- 
dato  l'aa|tia  sua  nella  vasca  del  Chaucer  ? 

Siamo  dunque  sopra  una  strada  ermnea*  Coq  mtto  db  il 
ravvidnamerito  tra  il  Chaucer  e  Goft-edo  puô  coodurre  anche 
ad  una  meta.  Pareva  che  il  poeta  ingtese  avesse  preso  il  nome 
«  Arviragus  »  da  Giovenale,  Non  sarebbe  in%'ece  che  a 
Giovenale  ta  deva  solo  mediatamente  e  che  fonte  diretta  sia 
VHistaria  Briimum  ?  Possibite  che  al  battesimo  de^e  una  spinta 
il  discorrere  che  il  cronisu  laceva  délia  moglie  Gentiissa;  colb 
quale  ipotestf  pur  rimanendo  dallo  Scboâeld  a  distanza  gran- 
dissima^  si  verrebbe  ad  âvvicinarsi  a  lui  di  quakhe  passo.  Ma 
»ia  di  cio  quel  che  si  vuok,  che  il  Chaucer  ripeta  da  Goffredo 
P*  a  Arviragus  i»^  ml  pare  vetamente  probabile^.  Mi  pare» 
perche  alla  convenienza  consideratà  fin  qui,  una  seconda  dello 
stesso  génère,  avvenita  anch'  essa  dallo  SchofîeId$»  sebbene» 
secondo  me,  frantesa^  viene  ad  aggiungersi.  Ualtro  protago- 
nîsta  del  racconto,  ossia  1'  innamorato,  si  chiama  «  Aurelius  »  ; 
ed  «  Aurclius  »  è  nome  ancor  esso  di  un  re  bretione,  che  ha 
un  posto  de'  principali  nell*  Hûloria  Britonum  ;  dell*  eroe  che 
ritoglie  la  Gran  Biettagna  agi'  invasori  Sassani"^  del  fraiello 
e  predecessore  del  re  Uterpendragon,  padre  di  Arturo.  E  si  non 


I*  Ndk  dcvt:  tver  trovito  lo  Schoficldi  ridoito  â  Cure  e  liportar  congetttm 
itoma  alb  dcrivizicine  del  vocaboto,  p.  431  (oon  c^attil  riavti).  E  cosi  il 
it  avvcrte  sollanto  che  Andragus  sarebbe  îq  gallesc  divcnuEO  suppergiù 
rgurmuf.  Hou  k>  ^  ci  sia  da  cavarc  qualche  panjto  da  uoa  mon  eu  colîa 
Àriv^  citau  da!  San-Mane»  p,  lût.  Non  sarà  la  stessa  «  SUbennûcize 
derSantones  »  che  alT  AU^iUmher  Spraïkickati  del  Holder,  ],  ai6,  formsce 
c  Ark*&s  ? 
2.  P.  4  EO* 

|,  V.  anche  t)  Lot,  p.  i  to* 

4,  E  çQû  pare  al  Lot,  p.  1 1 1 . 

|.  P.  41». 

6^  No»  frantesdi  invece  dal  Lot^  /.  cii. 


ORIGINI    DEL  FRANKELEYNS  TALE  21  3 

alîresi  ch'  egli  è  nominato  per  la  prima  volta  —  colP  epiieto 
di  «  Ambrosius  n^  di  cui  gli  era  facile  spoglîarsî  e  di  cuî  si 
spoglia  difatti  anche  în  GoflFredo  '  —  poco  dopo  che  s'  è  oarrato 
di  Arviragus  e  in  maniera  ed  in  sede  cospicua^  Che  di  lui  non 
si  discorra  soltanto  dair  autore  delT  Historia^  poco  o  nulla 
detrae  ail*  argomento.  Solo  nelT  Hisiorta  abbiamo  ad  un 
tempo  M  Aurelius  »  ed  ft  Arviragus  >ï^  E  la  conoscenza  di 
queir  opéra  per  parte  del  Chaucer  non  è  già  costretta  a  rimanere 
^semplice  congettura,  sia  pur  probabile  quanto  mai  si  vôgHa. 
w  English  Gaufride  »,  unico  tra  i  concîttadînî,  ottîene  dal 
poeta  una^statuadentro  alla  Hûus  of  Famé,  v.  1470^  con  Stazio, 
Vîrgilio,  Lucane,  ecc.,  e  più  speciaîmente  coi  narratori  dei  fatti 
di  Troia,  «  the  gret  Omeer  »,  Darete  e  «  Tytus  »  ossia  Ditti^ 
i*  Guido  de  Columpnis  »,  ed  un  «  Lollius  »,  di  cui  s'  avrà  da 
par  lare  avantî  di  giungere  alla  fine. 


n 


Mentre  Tingegnoso  Crltico  fermô  cosi  fissamente  la  sguardo 
sopra  un  punto  affatto  secondario,  e,  per  un  fenomeno  che 
ratienzione  troppo  prolungata  ed  intensa  produce  assai  spesso, 
fini  per  vederci  quejlo  che  non  c*  era,  egli  ebbe  U  torto  di 
trascurare  invece  elementi  di  suprema  importanza  per  il  pra- 
blema*.   Non  so  dire  quanro  si  sia  occupato   dei   numerosî 


1.  Ndredizîoae  Saa-Marte  «  Aurelius  A  m  brosîus  »  occorrc,  se  ho  contato 
bencj  diecî  vohe;  «  Aurelius  »  ventidue,  tut  te  nell*  ottavo  libm,  ossia  oelb 
parte  dov'egli  sta  propriamente  siilla  scena.  In  uu  caso,  VIII,  2,  trovo 
«  Ambrosius  a  soltanto. 

2.  tf  Eorum  nomina  et  acius  in  libro  reperiuntur  ^juem  Giïdas  de  Victoria 
Auretii  Ambrosii  liiscnpiiit  i  ^uod  aiiteni  tam  luddo  tmcutu  paraverst^ 
nullateous  opus  fuit  ut  inferiori  stylo  renovareiur.  w  E  con  queste  parole  si 
chiudc  il  libro  sesto, 

}.  Di  un  altro  ravvîdnameneo,  segnalato  già  esso  pure  dallo  SchoBeld 
nel  lyogo  indicaio  e  che  contribuîsce  alla  pcrsuasione  del  Lot,  p.  iio-ii, 
dbcorTtrè  verso  la  fine. 

4.  Q.ue&to  secondo  torto  è  cornu  ne  al  Lot,  il  quale  senza  dî  cî6  sî  sarebbe 
guardato  bene  dal  conchiudere  (p.  i  n)  che  «  Le  conie  de  Franklin  n'a  ps  de 
sources  à  pnopreitient  parler  » . 


214  P*    lAjNA 

paralleli  che  il  Frankekyns  Taie  ha  nelle  région  i  oriental  i  '  ;  ma 
certo  egli  è  sorvolato  impaztentemente  suUe  variant!  boccac- 
cesche,  di  tanto  più  prossime  al  racconto  inglese.  Erro  forse, 
dubîtando  forte  che  quella  de!  Filocolo,  ricordata  meramente 
in  una  laconica  nota^  non  sîa  neppur  stata  letta?  Bisogna  che 
io  suppltsca  al  difetto,  e  che  nii  faccia  a  istituire  un  confronte 
accurato,  da  limitarsi  per  ora  al  contenuto.  Anmutto  è  neces- 
sario  nondimeno  che  siano  rilevate  le  somiglianze  e  divergenze 
délie  due  redazioni  italiane.  E  ragîon  %^uole  che  si  muova  dalla 
più  anticaj  dacchè,  Tautore  essendo  il  medesimo,  s'  ha  in  essa 
proprio  una  forma  antécédente. 

In  una  città  non  designataci  altrimenti  che  come  luogo  nativo 
del  narra  tore,  e  che  solo  alla  geografia  del  romanzo  dove  la 
novella  é  inserita  va  débitrice  dell*  esser  posta  in  Ispagna  \  un 
cavalière  dl  nobile  schiatta  e  ricco  assai  prende  in  moglie  una 
concittadina  nobile  anch'  essa  e  bellissima,  da  lui  amata.  Ne 
innamora  pazzamente  un  altro  cavalière  per  nome  Tarolfo,  e  in 
moite  manière  le  dà  a  conoscere  il  suo  amore  e  cerca  di  ottenere 
il  ricambio.  La  donna  sopporta  in  silenzio,  sperandocoll*  indif- 
ferenza  di  indurlo  a  désistera;  ma  poichè  Tarolfo  continua, 
ella,  dopo  aver  voluto  rivelare  la  cosa  al  marito  ed  essere  stata 
trattenuta  dal  timoré  del  maie  che  ne  potrebbe  nascere,  pensa  di 
cavarsî  dalT  imbarazzo  con  un  anificio*  Fa  dire  a  Tarolfo  che 
ci6  ch'  egli  desidera  non  potrà  mai  conseguire  da  lei,  se  non 
donandole  «  del  mese  di  gennaio  în  quella  terra  un  bello 
giardino  e  grande^  d*erbe,  di  fiori  e  d'alberî  e  di  frutti  copîosOj 
eome  se  del  mese  di  maggio  fosse  »>.  Se  la  richiesta  sarà  adem- 
piuta  (deir  impossibilità  che  sia,  si  tien  plù  che  certa)^  giura 
solennemente  di  sodisfarlo.  Tarolfo  vede  bene  alla  sua  volta  che 
gli  è  stato  chiesto  Timpossibile  e  perché  gli  si  è  chiesto;  ma 


2.  A  p.  4^s. 

5*  Cîù  è  detto  cspressanfieme  nelU  disputa  intomo  alla  pneiwinenzi  di 
generoshâ  che  tien  dietm  al  racconto.  Ivi,  tra  le  ragîonî  addotte  m  vantaggia 
ddl*  incantatore,  c' è  II  suo  essersî  soctoposto  al  lungo  e  pericoloso  viaggio 
«  di  Tessaglia  infino  în  Ispagna  »  (FihKoh\  éd.  Moutier,  lî,  65),  Karratorc 
é  Menedtsn^  uno  dd  compagni  cht-  Fiorîo  ha  condotto  seco  dal  regtio  paternô 
(I.  3  44),  che*  nonostante  perturbajsîoni  di  cul  <3ui  non  mi  dcvo  occuparç^  à  la 
Spagna  pur  sempre. 


ORIGINl    DEL  fRANKELEYm  TALE  21  S 

pure  risponde  alla  donna,  «  che  giammai  non  poserebbe,  ne  in 
preseaza  dï  lei  cornerebbe,  infino  a  tanto  che  raddimandato 
dono  non  le  desse  ^*  E  messosi  a  girare  il  mondo»  dopo  aver 
percorso  invano  moki  paesî,  èconsigliato  di  andarc  inTessaglia; 
dove  una  mattina,  quando  oramai  dispera  di  irovar  ciô  che 
cerca,  slmbatte  per  la  campagna  in  un  vecchierello  di  povcra 
apparenzaj  che  va  raccogliendo  crbe  e  radicL  Prende  a  interro- 
garlo,  sente  come  si  chiami  Tebano,  e  corne  quelle  erbe  raccolga 
per  farne  medicamenti  e  cosi  procacciarsi  di  che  vivere;  e  alla 
sua  vol  ta  finisce  per  manifestargli  rutto  Tessere  suo.  «  Che 
doneresti  »,  chiede  Tebano,  a  a  chi  quello  che  tu  vai  cercando 
ti  recasse  ad  effet to  ?  »  Tarolfo,  pur  pensando  che  sî  vogtia  solo 
farsi  beffe  di  lui,  offre  la  meta  dei  suoi  grandi  averî,  Tebano  butta 
via  le  erbe,  prende  i  Hbri  e  gli  al  tri  stru  menti  delT  arte,  e  senza 
indugio  si  mette  in  cammino  coll'  impaziente  Tarolfo,  Giunti 
alla  città  innominata,  vi  si  tengono  celatî  per  il  niomento.  Ma 
quando  è  entrato  il  gennaio,  Tebano,  di  nottetempo,  a  luna 
picna,  esce  scalzo  di  città ^  fa  appropriate  prcghiere,  sppra  un 
carra  tirato  da  draghi  visita  TAsia^  TAfrica^  TEuropa»  e  ritornato 
prima  che  si  compia  il  terzo  giorno,  manipola  un  liquido,  che, 
sparao  sopra  il  tratto  di  tcrreno  scelto  per  farne  il  giardino, 
con verte  il  suolo  in  un  prato  fiorente,  e  in  alberi  s%'ariati  coperti 
di  fruxti  i  basionî  secchi  che  vî  s'  eran  confitti.  Conipiuta 
Topera  —  nel  dar  conte  délia  quale  si  spende  nientemeno  che 
un  migliaio  di  parole  —  Tebano  va  ad  avvenire  Tarolfo. 
E  questî»  tutto  lie  ta,  si  présenta  alla  donna  e  le  annunzia 
Tadempimento  délia  richiesta.  Essa,  stupita  ed  încredula, 
assegna  rindomanî  per  accertarsi  ;  eandata  allora  in  compagnia 
<ii  molli,  vede  con  loro  e  sperimenta  in  più  modi  la  reaîtà  del 
miracolo.  Costretta  dunque  a  riconoscere  I  obbligo  proprio^ 
domanda  in  grazia  (per  guadagnar  tempo)  ed  ottiene  che  il 
mantentmento  sia  rinviato  a  quando  un'  assensca  del  marito  ne 
dia  Topportunità.  Afflitta  si  ritrae  alla  sua  caméra;  cerca  e  non 
tîova  uscita;  il  dolore  l'opprime;  il  marito  se  ne  accorge,  la 
tringe,  e  finisce  per  cavarne  una  relazione  pienîssima,  Cono- 
ciuto  che  l*intenztooe  fu  pura,  trova  che  il  patto  vuoi  essere 
mantenuto  e  spinge  egli  medesimo  la  moglie  rilunante»  ammo- 
nendola  tuttavia  a  guardarsi  in  future  da  promesse  cosiffatte. 
E  la  donna  va  a  Tarolfb  e  si  dichiara  pronta  a  corapiacerlo, 
Taroifo  sospetta  nella  venuta  qualche  mistero;  e  il  mistero  gli 


2tè  V,   RAJNA 

è  manîfestato.  Pieno  allora  di  ammîrazioûe,  rinunzia  al- 
l'esercizio  delsuodirittoe  commette  per  il  marito  rmgraziaraenti 
e  scuse.  Rtngrazia  lui  ta  donna  e  se  ne  torna  felice.  Il  raggua- 
glîo  della  doppia  generosità  stimola  alP  emutazione  anche 
Tebano,  inducendolo  a  rifiutare  qualsiasi  ricompensa.  E  ne 
résulta  il  problema^  quale  fra  i  tre,  marito,  Innaixiorato^ 
iacantatore,  abbia  compiuto  Tatro  più  magnanimo. 

L*  andamento  del  racconto  è  nel  Dtmmcràn  (X,  j)  il  mede- 
simo.  Nèlle  parole  tuitavia  1*  esposizione  combina  solo  tratto 
tratto  e  fugacissimamente  ;  e  dove  è  più  diffusa  e  particola- 
reggîara  la  prima  forma,  dove  la  seconda  ;  e  vengono  poi  anche 
ad  aversi  differenze  vere  e  proprie.  Specifîcando  per  quel  canto 
che  metta  conto  di  farlo,  la  scena  è  posta  dal  Decanurkt  nel 
Friuli,  ad  Udine;  e  il  marito  e  la  moglie,  innoniinati  nel  filacûlo^ 
sono  chiamati  Gilberto  o  Giliberto  e  Dianora,  mentre  perde  il 
nome  suo  ed  è  detto  genericamente  «  nigromante  a  il  Tebano 
deir  altra  redazîone  e  Tarolfo  si  muta  in  Ansaldo,  —  Al  levarsi 
del  sipario  Gilberto  e  Dianora  ci  sono  rappresentari  marito  e 
moglie  di  già,  in  cambio  di  di  venir  tali  sotto  i  nostri  occhi*  — 
L'accenno  a  ft  messaggieri  n  mandati  da  Tarolfo  alla  donna  per 
sollecitarla  d*amore,  si  viene  a  determinare  in  una  «  lemmina  »^ 
allaqualesentiamo  parlare  in  forma  diret ta  Dianora.  —  Il  giar- 
dino  è  chiesto,  non  per  un  gennaio  in  génère,  bensi  per  il 
prossimo.  —  Ma  le  divergenze  maggiori  vengono  poi.  Ansaldo, 
in  cambio  di  andar  per  il  mundo  lui  stesso,  si  limita  a  mandare; 
e  al  posto  délie  peregrinazioni,  dell'  incontro  con  Tebano,  del 
ritorno  in  sua  compagnia,  che  riempiono  ire  pagine  nel 
Filocôhj  vengono  a  mettersi  poche  linee*.  Similmente  se  ne 
vanno  le  pagine,  ricavate  da  Ovidio  \  in  cui  ci  si  rappresenta- 
vano  le  fattucchierie,  e  il  giardino  ci  sorge  dinanïsi  subitanea- 
mente  proprio  la  manina  del  calen  di  gennaio.  —  Ritorniamo 


1.  «r...  hi  j»ù  prii  pt;r  1q  inondo  m^ndà  cercandu,  se  in  ciô  akun  il  tro- 
vasac  che  aiuto  o  consigUo  gU  desse  :  e  vennegli  uno  aile  ttiani,  il  quale» 
âove  ben  s^iUnaio  fosse,  per  arte  nîgromantîca  profercva  di  fado,  Coî 
quale  messer  Ansaido  per  gniidissima  quamità  di  moneta  con  venu  losl...  j> 

2i  Nei  irattarc  qycsto  pymo,  Romanm^  XIVp  43  j  sgg.,  lo  ZiîigareUî  non 
dovtttc  accorgersî^  corne  non  ci  badai  |»oi  neppar  io  (Rom.,  XXXI,  40,  n*  2), 
che  alla  dcrivaiionc  accen nasse  gii  il  Landau  :  Qu/lîm  des  Dr k,^  i"  cd.  p,  io§> 
2»  cd*  p,  J40. 


ORlGmi   DEL  FRANKELEYNS  TALE  lïj 

a  differenze  meno  grâ%-L  In  cambio  di  andare,  come  Tarolfo, 
alla  donna,  Ansaldo  la  fa  invitare  al  giardino  —  già  vbto  da 
molti  —  per  m^zzo  altrui,  înviandole  simultaneamente  in 
prova  frutti  e  fiorî.  —  È  de!  solo  Filocolo  h  demanda  di  un 
indugio  per  resecnzione  délia  promessa.  Per  contro  sokanto 
nel  Di'camerdn  il  manto,  alT  atto  kale  deir  inviare  la  moglie, 
accompagna  la  sollecîtazbne  che  essa  tenti  anzitutto  di  farsi 
prosdoglîere.  —  E  ancora  accennero  che  è  più  ampiamente 
descritta  ne!  Decmntrôn  la  sceoa  tra  V  innamorato  e  la  donna, 
che  vi  si  accenna  ad  un*  amicizia  «  strettissima  e  leale  »  fra  î 
due  gentiluomini  a  cui  la  rispettiva  condotta  dà  luogo,  e  che 
non  vi  rimane  sottintesa  la  sparîzione  del  giardino  —  mante- 
nuto  per  tre  giorni  —  e  la  panenza  del  negromante. 

Tutto  sommato,  per  stretti  che  siano  i  rapport! ,  il  Boccaccio 
non  ha  seguito  se  stesso  più  di  quello  che  ahri  novellierî 
abbiano  in  molli  casi  seguito  lui  senza  incorrere  tn  reato  di 
plagie*  Notevoie  come  in  qualche  luogo  egli  si  sia  fatto  addirit- 
tura,  e  saviamente,  antagonlKta  soo  proprio.  Dianora  va  al- 
Tinnamorato  «  senza  troppo  ornarsi  »,  mentre  Taltra  donna  ci 
andava  w  ornatasi  e  fattasi  bella'  ». 

Se  noi  ora  ci  volgiamo  al  Chaucer,  troviamo  un  racconto  che 
a  prima  vista  par  diverse  assai,  ma  che,  considerato  da  vicino,  ci 
vien  rivelando  convenîenze  sempre  maggiori.  Rivestito  d'altre 
carni,  abbîamo  il  mcdtrsimo  schelet^o^  E  în  moka  parte  non 
si  iratta  nemmeno  di  carni.  Sono  abiti  e  nulla  più,  di  cui  il 
Chaucer  ha  rivestito,  e  parecchîo  anche  infiigottato  la  sua 
creatura,  Di  copiose  aggiunte  bisogna  che  lo  Schofield  stesso  si 
a\*\Tgga5;   e  addita  segnatamente^,  «    i^,  la  dîscussione  sulla 


I.  Per  il  confronto  estetîco  cra  le  due  forme,  v.  Rom.,  Xl\\  440  (Zinga- 
tdïï)t  e  qualche  osservadone  mia  temperatrke^  XXXI,  40,  n.  2  e  j, 

3.  Talc,  con  mînori  ri  serve,  é  anche  il  giudîzio  del  Dunlop  i  II,  ^42 
Gelfedhîone  inglcse^  p,  251,  ixella  versione  del  Liebrecht.  Ne  diverse  appa- 
riscon  le  cosc  ad  Alfons  Kissncr  neUa  bella  disscrtazione  dottoraîe,  Chiucrr 
in  $imtH  Beiitimtti^fn  \ur  ihiHmi^cïîeH  Liknjluf\  Marburg^  1867,  p.  74. 

j,  P*  444.  Ma  corne  mai  çglt,  cosl  corrivo  per  solito  aile  afTemiaiionî 
assolute,  qui  dîvicn  unto  cauio,  da  limitarsi  nel  principio  a  rappresemare  te 
iggîunte  come  tali  dit  potersi  attribuire  al  ChaucÊr  a  with  some  confidence  »  ? 
Meno  maie  che,  fatta  renunierazione,  soggiunge,  *  Thèse  passages.**  are 
dearlv  additions  made  by  the  English  author  «. 

4»  Traduco  con  qualche  piccola  libenà. 


2l8  '^'^       '^^.    RAJNA 

causa  del!'  esistenza  del  maie  nel  mondo,  a  proposito  degU 
scogli  pericolosi  suUa  cosia  brettone  »  (v.  11177-202);  «  2**,  gli 
abbondanti  richiami  ail'  astrologia  **  (v,  11093,  11369-370, 
11441-446,  11466-467,  irss7*s6i,  11S78,  11582-605); 
«  3^j  rinvocazione  dî  Aiirelius  ad  Apollo  »  (v.  11 343-391); 
«  e  4'',  il  lamento  di  Dorigen  alla  Formna,  in  cm  ella  cita 
esempi  di  donne  che  si  uccisero  piuttosto  che  esser  macchiate 
—  lunga  ed  inutile  digressione  di  un  centinaio  di  versi 
(11667-768),  presa  dal  tratt^to  di  S,  Girokmo  contre 
Gioviniano  »»  Giâ  questi  passi,  sommati,  a  costituiscono  un 
quarto  ail*  incirca  dell'  intera  composiztone  »;  c  lo  Schofield 
non  in  tende  di  a  ver  fatto  che  una  scelta. 

Ma  cio  clie  spetta  in  proprio  al  poeta  înglese  non  si  riduce 
davvero  aile  aggiunte  vere  e  proprie.  Le  aggiunte  valgono  a 
farci  meglio  penetrare  nella  maniera  sua  dî  procedere;  e  ci 
dissuadono  risolutamente  dal  ripetere  coUo  Schofield  ',  che  egli 
«  sembra in  générale averseguito  assai  da  vîcino  il  suo  modello  ». 
Con  ben  altra  verosimiglianza  diremmo  piuttosto  che  egli 
tutto  deve  aver  rimaneggiato,  tutto  rimpolpato.  Quale  ci  si 
îTiostra  manifestamenie  in  molci  casî^  taie  suppergiù  vien  fatto 
di  supporlo  anche  quando  il  suo  operare  si  sottrae  ai  nostri 
^uardi.  E  in  ver i ta  io  non  so  corne  sia  possibile  non  riconoscere 
in  tutta  quanta  Tesposizione  un  amore  intenso  dei  fronzoli, 
dei  particolarij  délie  moite  parole»  insomma  délia  ridondanza. 

Pero  Toperazione  dello  spogliare  e  dello  spolpare  apparisce 
doverosa*  E  quai  sia  il  residuo,  se  essa  è  spinta  air  ultimo 
segno,  abbiamo  visto  di  già  (p.  210)  :  uno  schéma  che,  parola 
per  parola,  è  applicabile  giUa  duplice  novella  boccaccesca.  Ma 
qui  giova  arrestarsi  a  uno  stadio  interraedio  :  togliere  soltanto 
gli  abiti,  rispettare  le  car  ni. 

Siamo  neir  Armorica.  Un  cavalière  ama  una  bellissima 
damigella,  e^  dopo  lunghi  sforzi,  riesce  a  toccarne  il  cuore  e  ad 
ottenerne  la  mano.  Per  un  an  no  e  più  i  due  vivono  insieme 
beati;  ma  poi  il  cavalière  lascia  la  moglie  per  andarsene  in 
Inghilterra  a  guadagnar  gloria  nelT  armi*  La  poveretta  se  ne 
riniane  sconsolata*  Solo  dopo  lunghi  sforzi  riesce  agli  amîcî 
suoi  di  scuoterla  un  poco.  Essi  la  conducono  a  passeggiare  lungo 


1.  /..  ciL 


I 


ORÏGINI   DEL  FRA.KKELEYm  TAL^  21 J 

h  Costa  ;  ed  ecco  che  la  vîsta  délie  iiavi,  tra  le  quali  nessuna 
riporta  il  suo  dîletto,  quella  degli  scogli,  cosi  funesti  ai  navi- 
gantij  suscitano  nella  mente  sua  pensieri  dolorosi.  Gli  amki 
cercano  atlora  al  tri  svaghi  :  dan^e  e  giuochi.  Un  giornOj  scgna- 
tamente,  si  festeggia  in  ognî  maniera  dentro  ad  un  ridentis- 
simo  giardino  ;  e,  col  dolore  nelT  anima^  deve  la  donna 
rimanere  présente.  Ivi  si  trova  fra  gU  altri  un  giovane  scndiero, 
dutato  di  ognî  pregio,  innamoratissimo  di  lei*  Quel  giorno 
egli  osa  manifestarle  la  sua  passioite.  Ella,  corne  impietosita, 
finisce  per  dirgli,  che,  se  rimuoverà  tutti  gli  scogli  délia  ces  ta, 
avrà  Tamor  suo.  Povera  consolazione  per  il  giovane,  che, 
ritornato  a  casa,  si  dà  ad  invocare  gli  dei,  rimanendu  pur 
senipre  in  uno  stato  da  far  pietà  [  Lo  sorprende  un  fratello, 
uomo  dotto,  e  partecipa  simpaticamente  alT  affanno.  A  lui 
sDvviene  un  giorno  di  un  libro  di  arte  magica^  che  a%^eva  visto 
ad  Orîeans  nelle  mani  di  un  compagno,  e  di  meravigliose 
illusion! j  che  con  queir  arte  sapeva  bene  potersi  produrre.  Di 
qui  spera  salvezza  péril  fratello  suo,  cIV  egli  induce  ad  accom- 
pagnarlo  alla  città  de'  swoi  studi.  Vicino  ad  essa  incontrano  un 
gîovane  studioso,  che  dà  loro  subito  prova  délia  propria  scienza, 
mosirando  corne  gli  sîa  nota  la  cagîone  délia  %^enuta.  E  questi, 
condottili  a  casa^  offre  di  quel  la  scienza  saggi  ben  maggiori  ;  e 
patteggia  poi  una  ricom pensa  di  mille  sterline  per  adempiere 
dô  che  gli  è  chiesto.  L'indomani  tutti  e  tre  si  dirigono  verso 
la  Brectagna;  ed  ivi  il  mago,  aspettatoil  puntoastrologicamente  , 
opportuno,  fa  si  che  pîù  non  paiano  esserci  scogli*  LietOj  Tinna- 
morato  va  alla  donna  —  ora  non  più  afflîtta,  perche  il  marito  è 
con  îei  —  e  le  annunzia  radempimento  délia  condizione*  Ella^ 
rimasta  sola^  si  dispera  ed  altro  scampo  non  sa  veder  che  la 
morte.  Ma  sopraggiunge  il  marito,  e  saputa  ogni  cosa,  le  dice 
di  mantenere,  celatamente,  la  promessa.  La  donna  savvîa, 
s*imbatte  par  Tappunto  nelP  innamorato,  e,  in  mezsîo  a  lamenti, 
gli  dichîara  corne  venga  per  osservare  il  patto,  mandata  dal 
marito  suo  stesso.  L*innaniorato  è  compreso  di  pietà  per  Iei, 
d'ammirazione  per  il  marito,  e  con  generose  parole  la  proscio- 
glie,  lasciandola  ritornare  a  casa  felice  ed  a  render  felîce.  Egli 
invece,  oltre  al  resto,  si  trova  sulle  spalle  il  grosso  debito 
vei^o  il  fattucchiero  \  Sennonché  questi,  ragguagliaio  dei  fatti. 


î.  Qjjî  il  Chaucer  ha  deturpato   grettamenie   il   personaggîo  :  Pyoïna 


î»  F.   RAJKA 

dichiam  dî  non  vdere  un  ^IJo.  E  perô  il  narratore  concbiud^ 
domandando  :  Chï  fu  il  più  generoso  ? 

Que^*  ordimra  è  pcrfetiamente  analoga  a  quella  dd  duplke 
n£COnto  bocciccesoo  ;  mentre  non  si  pué  già  dire  cosi,  se  ci  si 
volge  alla  cater%a  det  riscontri  asiatici  e  delte  loro  direite 
prop^g^ni  K  Ivi  si  mtta  di  una  £uiciulla  che  ha  promesso  di 
darc  se  stessa,  prima  che  al  tnanto,  a  un  comle  (talon  a  un 
innamorato,  talora  a  persona  che  ha  solo  appagaio  un  suo 
€apricdo)>  atlorchê  si  farà  sposa.  La  sera  délie  nozze^  al 
momento  di  coricarsi,  si  mostra  turbata  o  tîmbanie;  e  lo  spdso 
ha  da  ki  la  confesstone  del  motivo.  Bonario,  le  consente  dî 
mantenere  Timpegno,  Ella  si  mette  in  via;  e  per  la  strada 
trova  penœlosi  intoppi  :  in  cene  veisionî  un  ladro  soltanio, 
tn  altre  succ^sivamente  un  lupo  od  un  mostro»  ed  un  ladro* 
Sennonchè  costofo,  udito  délia  sua  singolarissima  andâta,  altret- 
tanto  singolarmente  la  lasciano  proseguir  libéra.  E  colaî  che 
ne  aveva  riœvuto  la  promessa,  ragguaglîato  di  ogni  casa,  vuol 
gare^are  cogli  altri  e  la  rimanda  o  riaccorapagna.  Quindî  il 
solito  problema,  se  il  vanto  délia  generosità  voglia  concédera  alj 
marito,  al  non  mariïo  (per  comprendere  tutte  le  versioni,  non 
posso  dire  ramante),  o  a  chî  viene  a  intefporsi  fia  loro< 

La  somiglianza  colle  narrazioni  che  ci  stanno  a  cuore  è  ben 
manifesta  ;  ma  non  è  meno  manifesto  che  ci  troviamo  assaî  piàj 
discosti  da  esse  che  non  siano  esse  fra  loro.  Corne  si  \  ede,  nou 
hanno  qui  pane  alcuna  gV  incanti.  Non  già  che  l'incantatore 
manchi  di  qualsivoglîa  riscontro  :  al  posto  suo  abbiamo  il  ladro, 
oppure  il  ladro  ed  il  lupo  od  il  mostro,  i  quali  comptono 
ancor  essi  un  atto  stupefacente  davvero;  ma  quanta  diversîtâ 


d*aflarif  it  riscodtore  d\  gabelle  facapolino.  Aureltus  è  dîsperato;  non  sa  a  die 
panitû  appigliarsî;  glî  loorherà  di  veodere  î  suoi  posscssî  e  di  ridtirsî 
mendtco.  Tentera  (etenti  reàlmente)  tin  moâo  di  condlbre  per  quantosî  pu6 
ogni  cosa^  chicdcndo  di  poter  pagare  a  raie,  m  duc  o  tre  annil  —  Ben 
dîvcrso  4i  lui  ê  Tarolfo*  ben  dîverso  Messer  Ansaldo,  i  quali^  senxa  titubania 
dî  aîojm  spedcaffrooo  il  compenso,  e  insîstono  per  Ut]o  acœitane,  almeno 
in  pane. 

t .  ïl  mlo  jnnoverare  tra  le  propgginî  direttc^  nonostante  la  proveniciu-^ 
tmmciJlau  popûlare,  anche  tl  raccomo  del  Campbell  (V.  Rc*m.^  XXXI,  42}^ 
avri,  atéù^  facile  assena  datto  Schofietd,  a  giudicare  dal  modo  €ome  a  ^udb 
vcoiooe  egli  accenni  a  p.  4)}. 


ORIGÏNI   DEL  FRâNKELBYNS  TALE 


221 


s*âccoppîa  alla  rispondenza!  Poi,  la  promessa  délia  donna  è  un 
fatto  antécédente  aile  nozze;  e  costei  promette  di  dansi  la  sera 
stessa  délie  nozze,  prima  ancora  che  al  marito;  e  il  promettere 
avviene  con  proposito  di  mantenere  e  non  è  sottomesso  per 
nnlla  a  condipîioni  che  si  ritengano  fermamence  non  avverabili* 
Perè  si  casca  dalle  nubî  quando  si  trova  che  lo  Schofield^  in 
cambio  di  porre  in  una  classe  Boccaccio  c  Chaucer,  in  un*  altra 
le  redaxioni  orientali,  dichiara  che  il  Frankdeyns  Talc  tt  sta  in  un 
gruppo  da  solo,  separato  affatto  da  tutti  gli  altri  raccontt^  »,  e 
rannoda  invece  alla  famiglia  orientale  la  novella  boccaccesca*. 
A  lui  pare  di  potersi  facihnente  render  conto  délie  cose  a 
questa  maniera  *.  Una  redazione  del  raccooto  orientale  affine 
a  quella  che  il  Boccaccio  dovrebbe  aver  elaborato  —  an^i,  ne!  la 
sostanza,  riprodotto  fedelmente,  quale  correva  allora  perl'Italia 
—  fu  conosciuta  e  mes.*îa  a  profitto  da  chi  dette  forma  francese 
al  îâi  cekico  S  studiandosi  di  abbellirlo  e  di  rifoggiarlo  in  modo 
conforme  al  gusto  del  tempo  suo  ^  Di  li  pressochè  di  sicuro  il 
prohlema  finale  e  lutto  ciè  che  vi  si  connette^;  di  li  probabil- 
mente  l'incantatore  ^  Lasciamo  pure  che  alla  narrazione  il  pro- 
blema  sia  toUo  per  surrogare  in  sua  vece  una  conclusione 
îmmaginariâ  ^j  ancorché,  sottopasta  a  questa  operazione,  la 
poveretta  mi  rassomigli  ad  un  disgraziato  a  cui  si  strappassero 


1,  P.  43Î* 

2.  P,  4î6-7- 

},  P.  456  :  tt  The  vcry  obvious  agrcettient  beiween  tbcm  n  —  Chaucer  c 
Boccacdo  —  n  h  easily  explained  »,  ecc. 

4.  5«  que&to  hî  fosse  fondato  sopra  un  tetna  propriamente  indigenoj 
opptire  itnportaio,  lo  Schofield,  pur  girando  c  rigirando  datioroo  alla  quc^ 
stione  (p.  435-j$),  Don  dlce  in  modo  espHcito.  Mi  pare  tuniivia  ch'eglî  deva 
mdinane  pîuuosto  alla  prima,  che  alla  seconda  idea.  E  allora,  quelle  analogie 
<)ualstast  che  paiono  pure  da  supporre  tra  il  prête  sa  ki  orlgtnario  e  il  racconto 
orientale,  sarebbero  da  considéra re  conae  fortuite. 

5.  V.  p.  415  e  p.  41^. 

6.  P,  437  :  !t  It  is  therefore  in  the  hîghest  degree  probable  that  in  the 
Ffcnch  lay  for  the  ^rst  titne  the  débai-matw^j  and  ail  ihat  h  emaitst  was 
connected  wîth  ihe  Arviragus  story,  » 

7.  P,  44  j.  Veramcnte  non  ci  sarà  un  grande  accordo  tra  ci6  che  qui  si 
dke  e  quantû  si  è  venuto  esponendo  nelle  p.  4  [7-29. 

S,  SI  crede  di  arrivare  ad  essa  per  via  di  pretese  analogie  nelle  p.  4)7-4 J* 


222 


P.    RAJHA 


colle  tenaglie  le  unghie,  sovrapponcndfo  poi  aile  orridc  piaghe 
un  po'  di  cerotto.  Ma,  quanto  alF  incantatore,  il  maie  si  è  che 
di  lui  i  paralleli  orientali  non  sappiano  proprio  nullal  Vkirvena^ 
la  sparizione  délie  rocce,  in  oii  si  vuol  ravvisare  an  tratto  origi- 
nario  del  prototipo  indigène  *,  trova  invece  un  riscontro , 
quanto  mai  appropria to  nel  giardino  meraviglîoso  delîe  forme 
îtalîane.  E  aguzzando  gli  sguardi,  si  vede  il  giardino  maniie- 
starcisi  più  genuino  di  ciô  che  presse  il  Chauccr  oe  tiene  il 
lu<^o.  Rilevai  nel  mio  primo  lavoro*  corne  il  domandare  b 
rimozione  dcsideratissima  degli  scogli,  cosi  pericolosi  pcf  î 
navîganii,  venga  ad  essere  per  parte  di  Dorigen  un  mettere 
«  un  altissimo  prezm  al  suo  amore  »,  là  dove  cio  che  il  conte* 
nuto  richiede  è  la  pura  e  schietta  domanda  di  cosa  che  si  creda 
tmpcssibile,  e  che  —  aggiungo  ora  —  tanto  poco  si  desidera, 
da  essemc  l'avveramento  causa  di  dolore  intenso.  Ma  poniam 
pure  che  qui  si  accorra  al  riparo^  dicendo  che  abbia  solo  torto  il 
Chaucer  di  rappresentare  desiderosa  délia  cosa  la  donnai 
oppure  che  quel  desiderio  non  abbia  fano  se  non  suggcrire  li 
per  II  alla  mente  di  lei  la  matena  per  specificaie  Timpossibilitâ 
che  si  aveva  in  antmo  dî  chiedere-  Resta  un  guaio  più  serio.  La 
sparizione  délie  rocce  é  illusione  e  nulT  altro,  Ciô  agîi  occhî 
dello  Schofield  costitubce  —  e  puô  ammeiiersi  —  un  tratto 
caratteristico  cehico  5,  sefabene,  non  proprio  dei  Ceki  sokamo*; 
ma  noi  dobbiam  domandarcî,  se  il  tratto  sia  qui  opportuno. 
Ora,  mentre  la  condizione  posta  dalle  donne  del  Boccaccio  è 
stata  adenipiuta  a  pumino,  Dorigen  viene  ad  essere  obbro- 
briosamente  truSata;  e  quando  Aurelius  dîcc*  \\  ïi64>. 


e,  V.  iiéso, 


I  hâve  do  so  ils  y^  cotiundcd  me. 


«,.  wcl  I  woot  tht  rokkcs  becn  awcyc. 


cgii  è  mentîtore.  Ne  pretendiamolo  in  quella  vece  ingannato 


I.  V.  p.  40  e  417-20. 

3.  P.  41,  n.  4* 
î-  P.  4i«-i9^ 

4,  P.  42a.  Per  mlù  crniw  mî  limîtefà  a  nitvki^  alîc  inustrârîonî  del 
DWnoonâalk  nov^lla  XXJ  del  NtKflhnii  :  Roméniaf  III,  169;  StttJf  di  Criikm 
#  St0rid  Uiifmrm^  Bologna,  1  SSo,  p«  109. 


ORIGINi    DIÎL    FRANKELBYNS  TALE 


225 


lui  pure  non  meno  di  Dongen;  ingannato  dd  fratello,  che  fino 
dal  principîo  non  penso  che  a  mère  apparenze  (v.  11450-76), 
e  dal  negromante.  Se  anche  mancano  dichiarazioni  esplkite  délia 
sua  complîcità,  le  trauative  furono  condotte  unitamente  dal 
fratellô  e  da  lui  (v,  11531-43);  e  apparenze,  c  nuIF  altro, 
vengooo  a  presagire  e  promettere  i  saggi  che  il  mago  dà 
deîTane  sua  corne  avviamento  al  contratto  (v.  11501-20), 
E  del  resto,  anche  ingannato,  Aurelius  rinunzierebbe  a  cosa  alla 
quale  Qon  avrebbe  in  realtâ  akun  diritto.  Si  è  dunque  lontani 
ie  mille  miglia  dal  potersi  sbarasf^care  délie  redaztoni  boccac- 
cesche,  Certo  esse  pos&ono  riuscire  importune  :  a  quel  modo  che 
riesce  importune  a  un  debîtore  che  vorrebbe  sottrarsi  al  paga- 
mento  il  creditore  che  si  présenta  munito  dei  document!  che 
rendono  chiaro  U  suo  diritto  e  accompagnato  dagli  esecutori 
délia  legge* 

Solo  dunque  per  essersi  fuorviato  a  rincorrer  fantasmi  lo 
Schofield  non  ha  visto  le  persone  che  in  carne  ed  ossa  gli  stavan 
davanti.  Vano  il  fantasticare  tpotesi  intricatissime,  e  pur  nondi- 
meno  inette  a  spiegar  nulla,  là  dove  i  fatti  parîano  un  lin- 
guaggio  semplice  e  aperto.  Net  la  stirpe  di  cuï  d  si  occupa  il 
Frankcleyns  Taie  e  il  duplice  racconto  itaUano  sono  legati  da 
una  par  en  te  la  atfatto  spéciale,  La  questione  fondamentale  si 
présenta  ancora  nella  forma  in  cui  si  affaccîava  prima  che  fosse 
pubblicato  il  nuovo  lavoro'.  Ancora  siamo  a  domandarci,  se 
voglia  ritenersij  con  taluni  che  il  Chaucer  e  il  Boccaccio  abbiano 
attinto  a  fonti  consimîli,  oppure  con  altri,  ai  quali  venni  ad 
aggregarmi  anch'io  nello  scrîtto  suite  Tredici  Question!  del 
Filocôlo^  che  il  novelliere  inglese  seguisse  il  suo  predecessorc 
italiano.  Meritorio  bensi  nello  Schofield  Taver  addotco  un  certo 
numéro  di  nuovi  argomenti  favorevoli  aU'idea  che  a  me  parve 
da  respingere,  e  propriamente  a  quella  sua  spéciale  determina- 
zionej  che,  conformemente  aile  parole  stesse  del  Chaucer, 
interpretate  corne  raglon  vuole  che  s'intcrpretino,  gU  assegna 
quai  fonte  un  lai  m  lingua  d'oïl ^  sut  tipu  di  quelli  che  in  buon 
numéro  ci  sono  pervenuti,  Quesu  argomentt  bisogna  conside- 
rare  e  pesare  con  scrupolo. 


<i 


I.  V.  p,  10^, 


224 


P,    lÀJHA 


in 

In  suffragîo  ddia  sua  tesî  lo  Schoficld  si  richiama  ad  analogie 
tra  il  contenuto  narrativa  del  Franhkyns  Taie  e  quello  di 
taluno  fraquestî  nostri  lais.  Qui  verrebbe  dunque  a  manifestarsl 
un' aria  di  famiglia.  Seiiaonchè  ndla  fami^lia  sono  entrati  pcr 
via  di  meraadozione,  comt^  lo  Schofield  stesso  mette  in  rilievo  *, 
non  so  quanti  stranieri.  Quindi  Targomento  non  puo  avère 
efficacia  se  non  in  determinate  condizioni  ;  e  in  primo  luogo 
sâremo  tratu  a  ricliiedere  che  le  analogie  abbiano  vera  consî- 
steniîa. 

Ne  ha  poca  quelia  che  si  segnala  ^  colla  prima  parte  del  Doctpi. 
L'orgogliosa  che  per  sottrarsi  al  giogo  del  matrimonio  nieite 
quai  condîzione  aï  pretcndenti  prove  olrremodo  ardue,  che 
nondimeno  trovano  clii  le  supera,  spetta  a  ben  altro  teraa  che 
il  nostro  '.  Ivi  è  cosa  essengiale  che  si  îratti  di  nozzt  e  che  U 
vinciïore  del  le  prove  (prove  d*alt  ronde  ben  diverse)  venga  dopo 
un  buon  numéro  di  vittime* 

Partecipano  sostanzial mente  a  questi  ciratteris  e  già  per  cî6 
si  trovano  tenuii  a  distança  dal  FrankéJeyns  Taie,  i  Dous  Anmn^ 
di  Marie  de  France*.  Ho  decto  <«  sostanzialmente  »  :  perché 
vi  fosse  piena  rispondenza  bisognerebbe  che  chi  affronta  il 
cimento,  che  in  questo  caso  consiste  nel  portare  la  donna 
desiderata,  senza  mai  riposarsi,  sulla  ci  ma  di  un  monte,  ne 
uscisse  vittorioso.  E  u&cirne  potrebbe,  se  bevesse  dt  un 
certo  liquore;  ma,  nell'  e^saltazione  delP  imprcsa,  eglî  prima 
dimentica,  c  poi  rifiuta  di  bere,  e  cosi  cade  morto  avanti 
dî  raggiunger  la  meta<  Accanto  a  lui  muore  anche  colei 
ch'egli  anclava  a  conquistare;  poichè  qui  la  donna  riama  il 
giovane  che  ora  per  lei  si  cimenta;  e  l'ardua  prova  è  imma^^i- 
nata  ed  imposta  dal  padre,  il  quale,  affezionato  morbosamente 


1.  P,4>HS< 
a.  P.  416. 

|.  Si  vcdâiiii  le  osservazioni  prcmcsse  dal  P^ris  al  teito,  Kom.^  VIII,  59- 
E  giova  cit;ire  aïtresi    Gorra,  Stmii  di   Critka  UUerarm,   Boîognit^  1892, 

p.  241-44* 
4,  P.  253  ndr  cdiïione  dd  Roquefort  i  uj,  ndU  i*  dd  WarBkc,  Halk^ 


ORIGINI   DEL   FRANKELEYWS  TALE  225 

alla  figlia,  vorrebbe  evitare  di  staccarsene  * .  La  fanciulla,  simile 
per  un  certo  rispetto  a  Medea  ed  Arianna,  ha  invece  suggerito 
ella  stessa  Tespediente  di  quell'  andata  a  Salerno,  che  procaccia 
air  amante  il  beveraggio  meraviglioso  che  gli  darebbe  modo  di 
trionfare.  E  queir  andata,  per  il  riscontro  che  présenta  col 
viaggio  di  Aurelius  ad  Orléans,  ha  illuso  lo  Schofield^  Ma, 
ohimè!  si  tratta  di  analogia  in  un  punto  affatto  accessorio;  e  il 
Critico  americano  è  manifestamente  in  errore,  quando  si  crede 
in  diritto  di  affermareche  «  i  due  lai  incarnano  terni  congeneri  ». 
I  temi  sono  per  contro  profondamente  diversi. 

Veniamo  air  Eliàtic,  o,  se  si  preferisce,  corne  preferisce 
Tautrice  —  la  stessa  Marie,  —  al  Guildeluec  e  Guilliadun^. 
Stavolta  il  parallelismo  ci  si  presenterebbe  sotto  la  forma,  certo 
non  meno  significativa,  di  contrapposto  :  «  In  ambedue  le 
storie  un  leggiadro  e  valente  cavalière  di  Brettagna  è  marito 
felicissimo  di  una  moglie  bella  e  di  alto  lignaggio.  Trascorso  un 
certo  tempo  egli  va  in  Inghilterra  a  prender  servizio  e  ac^ 
attendere  a  guerra.  In  ambedue  i  casi  la  fida  moglie 

Forment  demeine  grant  dolur 
al  depanir  de  sun  seignur  ; 
mes  il  Taseûra  de  sei 
qu'il  li  portera  bone  fei. 

(V.  8i  sgg.) 

Neir  uno  dei  casi,  durante  la  separazione,  la  moglie  è  tentata 
da  un  avvenente  cavalière,  ma  si  serba  fedele  al  marito  —  e 
cosi  i  due  trascorrono  in  una  félicita  ineffabile  il  resto  délia  vita 
loro.  Neir  altro  il  marito  è  tentato  da  una  bella  donna,  e  cède 
aile  seduzioni,  con  questo  effetto,  che  la  félicita  délia  moglie  è 
annientata  ed  ella  è  ridotta  a  ritrarsi  in  una  badia  e  a  farsi 
menaça.  » 
Cosa  sia  da  pensare  di  cotesto  modo  di  rendere  Torditura 

1 .  Qui  c  'è  tanto  o  quanto  di  mezzo  VApoUonio  di  Tira  ;  al  quale  siamo 
rawicinati  anche  dalla  circostanza  d.ir  csser  vcdovo  il  padrc  ed  unica  la  6glia. 
Che  se  il  re  dei  Dotis  Aman;;  non  si  macchia  d'incesto  corne  Antioco,  la  sua 
condotta  dà  pur  sempre  luogo  a  mormorazioni  :  «  Plusur  a  mal  li  atur- 
ncrent  »  (v.  33). 

2.  P.  417  e  425. 

3    V.  22-23  :  Roquefort,  p.  400;  Warnke,  p.  186. 

Remania  XXXJl  j  c 


i 


226  P.    RAJKA 

del    Frankekyns  Talr^    sappiamo  da   un   pezzo*;   ma  neppur 
quella  del  lai  t  resa  troppo  meglio.  Si  rappresenta  assai  maie 
la  condoita  di  Eliduc  diccndocheegli  é  tentato  e  cède  :  bisogna 
considerare  le  condizionî  specîficlie  del  fatto,   che  d'nltronde 
rimane    nella    fase    preparntona;    e   assai    maie    si    raffigura, 
ponendocela  mnanzî  corne  una  tentatrice,  la  povera  Guilliadun, 
non  rea  d*aliro  che  d'essersi  innamorata  di  un  cavalière  ricco 
di  ogni  pregio,  cW  ella  ignora  affatto  vincolato  da  altri  legami; 
Guillijdun,  che  appena  viene  a  cogniiîione  délia  realtaj  cade  in 
unu  stato  che  par  essere  mone,  Bensi  il  tema  fondamentale 
puo  essere  concepiio  in\1oppia  manierai  Lo  chiederemo  noi  a 
Guildeluec,  la  prima  c  legittimn  moglie,  la  quale,  amantissima 
del  marito,  scopeno  ch'egH  ha  posto  ahrove  il  cuore,  immola 
eroicamcnte  se  medesima,  dopo  aver  ridato  ella  stessa  la  vita 
alla  rivale^  ?  Ne  resuken'i  effettivamente  iina  convenienï:a  col 
FrankeUyms    Talf;  e    non    importera  nulla  che  sia  di  génère 
contrario  a  quella  immaginata  dalto  Schofield,  appanenendo 
essa  al  solito  tipu  délie  analogie,  anzichè  ail'  altro  nien  solito 
degli  antagonismi;  ma  si  traitera  di  qualcosa  di  molto  eva- 
nescente;  e,   come    indicano»  senza   che  s'abbia   neppure  lo 
scomodo  di  distrarre  gli  occhi,  i  riscontri  che  il  FranMeynii 
Talc  ha  in  remote  région  i,  dal  golfo  celtico  ci  troveremo  trar' 
sportati  nelT  aperto  Oceano.  Aile  acqije  celtiche  saremo  ripor- 
tati   bensi  j   date  che  nel   lai  si  rîguardi  come  secondaria   la 
catjstrofe^  e  come  parte  qiialitativamente,  e  non  solo  quantitatif 
vamente  precipua,   quella  specie  di   amore  fatale,  che  attrae 
Eliduc  a  Guilliadun,  Il  nostro  pensiero  corre  allora  a  Tristano 
ed  Isolta  la  Bionda*.  E  ramore  fatale  non  è  già  il  solo  tratto 
comune.  Si  confronii  quella  parte  del  Trhtano  dove  sta  m\h 


2.  Dovrei  icncr  coiiïo  deïle  pagine  (97-107)  m  cuî  Alphonse  Bavot,  î^ 
n^tmn  de  Gitimt  lU  Tia^tgtîifs.LQuyâln'pATÏs^  190},  disciite  I'  m  Origine  de  la 
légende  du  chevalier  bigame  »,  se  t1  librû  non  fosse  *opravvcnu|o  soîo 
durante  la  stampa. 

5 .  In  quci^f  ordîne  di  idcc  è  tl  Paris,  «  La  légende  du  mari  au»  deux 
femmçs  n,  neîla  PiMé  au  Mînat  é^e^  Dtuxumt  s/rîf,  Parigi,  1^9^»  p.  137* 

4,  Si  vcda  Tclcganie  e  profondo  scritto  del  Paris,  Trhhm  ri  hntt,  piibhli  - 
cato  prima  nclb  Rét^tttdr  Paris,  1894,  c  risumpato  poî  nel  volume  Pi^^mis  tt 
Ugfiitii-s  Jn  MvyefHïge^  Farigî»  sensea  indica^ione  d*anno  (1900);  in  questa 
seconda  fojnia,  p,  u^  sgg.,  e  segnatamenie  IJ7*4D. 


ORIGÏNI    DEL   PJUi^KELEYKS  TALE  227 

scena  laltra  Isotta,  Isocta  tlalle  Bianche  Mani,  Amhedue  1 
termini  ci  offrono  un  dramma  con  tre  personaggi  princîpali  : 
un  cavalière  e  due  donne,  en  tram  be  tnnamorate  di  lui.  Délie 
due  donne  Tuna  è  del  pari  fanciulla  innocente;  e  il  modo 
com'ella  conosce  îl  cavalière  ha  trattî  somigllantissimi  :  Eliduc 
e  Tristano  passano  il  mcdesimo  mare  e  vincono  i  nemici  da  cui 
il  padre  délia  fanciulla  stava  per  essere  sopraffatto  e  che  lo 
sîringono  nella  sua  stessa  residen^îa.  Né  Timpulso  alla  venuta 
è  différente;  chè^  se  i  Tristam  prosaici  fanno  chc  il  loro  eroe 
si  conduca  dalla  Grande  alla  Piccola  Brettagna  per  cercarvi 
rimedio  ad  una  fertta  avvelenata  r,  la  tradizione  arcaica  non 
sa  di  cotale  occasione',  che  ripete  il  «  motivo  )>  delTandata  in 
Irlanda  dopo  il  duelto  col  Morholc,  e  (se  immediatamentej  oppur 
no,  poco  monta)  ripurta  Tandata  aile  accuse  dei  tniile%*ulij 
causa  del  resto  per  cosi  dire  periodica  di  allontanamenti  dalla 
corte'-  ossia  alla  ragione  medcsîma  per  cuî,  viceversa^  EHJuc 
va  dalla  Brettagiia  Piccola  alla  Grande*.  E  ancora  pu6  aggiun- 
gersi  che  Eliduc  e  Tnstano  sono  del  pari  mariti  ad  una  délie 
donne,  e  che  il  loro  cuore  è  con  quella,  colla  quale  Icgittima- 
menie  non  dovrebb*  essere.  Ma  se  per  tal  modo  il  Gmldelmr  e 
Cmlliadun  si  trova  più  che  mai  trascinaro  dietro  i!  gran  carro 
celtico  %  il  Frankeïeyns  Tak  non  lo  segue  per  nulla.  Ha  esso 

I.  Basd  riiivîare  al  Lôseth,  Le  roman  m  prme  dt  Trhtan  ecc»  p.  44-4 S* 
2^  Essa  rîmantf  cstranc^  affatto  cosl  al  riflessa  datoci  da  Eilîurt  von  Oberge, 
comc  al  gruppo  di  reJa^ioni  clie  mette  capo  alToptra  dî  Thomas.  La  bscia 
qyindi  toulnieme  in  dispane  anche  il  Bédier  nclla  sua  mcritamentc  fonunata 
rickboraiiûiie,  L'  toïFHiu  tL*  Tthhtu  d  Iseut  irajuit  d  restauré. 

% .  Oltrv  a  de  che  et  c  dam  daîle  esposbioni  segulunl^nce  bio grandie, 
s'abbiaa  même  quello  che  dîcono  i  v,  n-14,  loo^îot  de!  Chînr^Joiî  di  Mari*!, 
i  quali  âvrinno  valorc  generico  o  specîfico,  a  seconda  délia  disputabile  collo- 
cazJone  cronologica  deli' episodio,  non  ben  chiara  forse  ktlla  mente  stessadel- 
1'  autrice,  CtV*  Sudre,  in  R^m.,  XV,  550-56- 

4.  V.  41  sgg, 

5,  Ed  ecco  sorgere  il  problema,  quale  dïllc  due  forme  vogîU  ntenersî 
AUtcriore.  A  primai  giunta  si  direbbe  risoluiiimirnte  qyella  dd  Tnsfduo;  nel 
Gmldthiec  e  GuiUiiuhm  non  veniam  punro  a  sapere,  e  non  sa  lo  stesso  Eliduc 
fv*  4î),  in  che  consîstan  le  accuse  che  producono  queiresilio  dalla  corte, 
dondé  ha  nascîm^nto  i*aziorve;  nel  Ttistatto  lo  sappLam  troppo  bcneï  Ma  poî 
Altrc  considerazbm  suscitano  Jtibbi;  e  anxiiutcoi  nomi,  schiettaniente  celtici 
fsei  hti^  menire  del  Trhiarto  ciô  non  si  puô  dire. 


228  P.    RAJMA 

che  vedere  con  tutto  questo  ordine  di  cose?  Unico  rapporte  k 
somiglianza  net  passaggio  in  Inghilterra  di  Eliduc  ed  Arviragus, 
che,  se  é  essenz^iale  per  il  primo,  riesce  invece  un  punto  afFatto 
secondario  per  il  secondo. 

Ed  io  mi  sarei  guardato  bene  dal  chiamare  a  raflronto,  per 
do  elle  spetta  a  siniazioni,  VEqutian.  Che  il  protagonîsta 
înnamori  di  una  donna  niaritata,  soffm  per  cagion  sua  *,  le 
apra  lanimo  e  la  supplichi  di  aver  pietà  di  lui  o  egli  morrà,  è 
una  semplice  riva,  donde  si  pu6  salpare  per  cento  direzionî. 
E  iiel  caso  présente  ne  prcndiamo  una  opposta  addirittura 
quclla  del  Frankelrym  Tak.  Tra  Equitan  e  la  donna  si  stabilbce 
una  tresca,  la  quale,  appunto  per  macchinazione  infernale  di 
lei,  avrebbe  termine  col  F  assassin  lo  del  marito,  se  Teffetto  non 
riuscisse  precisamente  il  contrario  dell'inten^ione,  e  f'infcdele 
ed  il  drudo  non  trovassero  essi  la  morte  in  que!  medesimo 
bagno  di  acqua  bollente,  che  era  stato  preparato  per  raltro. 

Ancora  il  Lanval^  e  la  rassegna  potrà  dirsi  finita.  Qui  il 
confronta  rîguarda  unicamente  la  scena  délia  dichîaraieione 
amorosa,  délia  regina  Ginevra  a  Lanva!  nel  lai,  ài  Aurelius  a 
Dorigen  nel  Frmtkdeyns  Taie.  Il  fatto  avviene  del  pari  in  un 
giardinOj  dove  Lan  val  e  Dorigen,  condorti\T  al  modo  stesso  dal 


l.  Badîamo  tuttaviache  qui  lo  Schofidd  [navvenitamentt;  ira  visa.  P,  426: 
V  Stmile  ad  Aiirdîus,  Equîun,  die  dimorava  egli  pure  m  Breitagna,  »  — 
circostans^a  di  nessun  p€sio  —  «  soffriva  pft;r  lungo  tempo  in  causa  del  le  suc 
ansîe  amorose,  avanti  di  m4tiire5tare  alla  Une  il  suo  afTcttn  alla  moglic 
deiramîco.  j»  E  p.  428  :  «(  Cbscimo  di  loro  *  —  Aurelius  ed  Equiuû  — 
«  ...soffré  acute  angoscîe  priniii  <hc  «si  rivelare  la  sua  passîooc.  ^^  Ora,  EquStan 
si  dichiara  ed  ottienc  cîè  cbe  branu  subito  llndomani  del  giamo  in  cui 
A  more  a  Une  saiete  a  vers  lui  traite.  Qui  mutt  granl  plaie  li  a  faite  » 
(v.  S9'^)<  ^  ^  ^u^i  pattmenti  si  riducono  aJ  una  notie  e  p^Ko  più.  Cbe  %e. 
anche  per  faddicrro  egli  itvcva  desiderata  la  donna,  di  cui  luttl  ccle^ravan  le' 
lodi,  non  poteva  dawcro  quello  chiamarsi  innamoramcnto,  neppur  stando  aile 
parole  dcî  t£Slo{v.  42-4S)*  ^ovc  a  me  par  di  scorgere  contoreitnentî  c  contra- 
ditîoiiL  Ridotto  nei  suai  veri  tcrmini  —  ossia  a  nulla  —  il  periodo  delta 
pasùone  recondita,  cessa  anclie  ogni  ragione  di  dire«  irr^lla  cieden^a  di  srabf- 
lîre  un  altro  punio  di  comaito  t  v  La  donna  è  inconsda  afîauo  deir  amore 
che  ha  destaio  »  (p.  42S).  Dura  bensi  rinconsapevole^/a  del  rriariïo,  che  lo 
Scho5e!d  associa  con  qucila  délia  tnoglie  ;  ma  è  tncoiisapcvolezjEa  di  y  no  stato 
di  côse  diver^ssimo  da  qucHo  del  ftixnhttiym  Tak. 


ORTGINI    DEL   FRANKELBYSS  TALE  229 

volere  degli  amici,  se  ne  stanno  in  disparte'  senza  prender 
parte  ai  sol  lazzi  aitrui,  perché  hanno  altrove  il  cuore,  Somi- 
glianza  ce  realmente.  Ma  che  si  tratti  dî  cose  accessone,  è  reso 
quanto  mai  manifesto  dal  vedersi  chc  non  abhiam  nulla  di 
corrispondefitCj  da  una  parte  nel  Imï  de  Gratkni^  che  svolge  il 
medt:simo  tema  del  Latwal^  dalTaltra  nella  duplice  novella  dei 
BtKcaccio,  pur  a  noi  tanto  prossima. 

Cosi  è  al  di  là  di  possibile  che  il  rîscontro  non  sia  fonuito  * 
e  che  nondîmeno  non  abbîa  che  vedere  col  modello  da  cui  il 
Chaucer  ritrae%*a  lo  schéma  del  racconto,  E  il  medesimo  puo 
pensarsi  rispetto  ad  aîtri  ravvicjnamenii  di  particolari  che  lo 
Schofield  vien  facendo  %  le  rare  volte  che  sotto  la  somi^lian^a 
sia  suppoïiibile  un  vero  e  stretto  leganie.  Che  il  poetn  prenda 
da  esempiari  estranei  affatto  alTorditura,  riconosce  lo  Schofield 
iiiedesimo,  il  quale  sa  bene,  per  esempio,  donde  sia  tratta  la 
gi;\  menzionata  enuinerazione  délie  suicide  per  castità  ^  Ed  eglî, 
pur  pretendendos  per  via  di  qualche  vaga  analogia  con  un 
luogo  àtW  Equiîan^  che  il  ragionamento  al  principio  suUe 
coîtdi;îioni  necessarie  perché  Tamore  persista  non  sia  stato 
introdotto  senza  un  appigUo  nell'  originale^,  deve  consentire 
ai  predecessori  suoi  (ben  difficile,  per  verità,  disconoscerlo). 


ï,  Questo  éa\  Chaucer  {cit.  tanvaî^  v.  ass-s6,  Roquefort,  p.  233, 
Warnke,  p.  96)  non  è  detto  in  modo  esfiresso.  Ma  résulta  bene  dal  contesïo, 
e  più  poL  dii  CLo  che  abbîamo  pi  Ci  ohre,  dopo  che,  udita  la  sentenza,  IHnna- 
moratQ  se  n'è  m,  v,  11^4-26  : 

Tbo  conif;  htr  mhere  freendcs  nutiy  ooti. 
And  ifi  the  akycs  romcdcn  up  ^nd  daun^ 
And  no-tlii]:îg  wîïte  of  thb  coadusioun. 

2.  Q^a  e  là,  deniru  aile  pagine  42;-;  1. 

j,  V.  qm  dktro  p.  218* 

4,  P.  417*18*  Un  moiivo  di  toccarvi  di  uguaghania  tra  \  comugi  potrebbe 
OSTC2.TÛ  nel  fondo  del  raccoato,  La  persuasione  che  su  Ha  moglie  non 
ilcv'essere  escrcitata  sîgnoria,  riuscirebbe  opporiLina  îspiratrice  délia  condotta 
chc  dai  marito  si  ticne.  Temo  tuttavb  chc  auribuendo  intendînienti  siffatti 
ali*  au  tore  del  presumo  lai,%\\  û  faccia  un  onore  soverchio.  Si  noti  corne  da 
quelle  sue  premesse,  e&plicitamente  almeno  (cfr.  Ten  Brink,  Geub.  der  mgl. 
LitUr.,  II,  175-6),  non  deduca  poî  nuUa  lo  stesso  Chaucer,  e  il  inodo  di 
âgîrc  dî  Arviragus  riportî  solo  at  rispetto  per  la  papola  data.  Ed  è  bene  chc 
cosi  sia.  La  devoziorxe  ossequiosa  dei  vv*  11051-64  toglierebbe  molto  alla 
magnanimiti. 


a 30  P*    RAJNA 

che  s'aveva  présente  il  Koman  de  la  Rose  \  Segnala  d'altronde 
lui  stesso  due  convenienze  con  composizioni  di  Guillaume  de 
Machaut>  e  in  una  almeno  délie  due  si  mostra  assai  propenso 
a  ravvLsiire  un*  imiiaziontr  diretia'.  E  se  un  fatto  consimile 
s'a%*esse  anche  cola  dove  ci  sendam  rinviare  ad  un  lai  conie  a 
vera  e  propria  fonte  ?  Guardiamo  le  cose  da  vicino. 

Fa  dire  il  poeta  al  Frankeleyn  al  momento  di  principiare  la 
marrazione  : 

Thîse  oMe  gentil  Britons  Îq  hïr  daycs 
Of  diverse  aveii turcs  maden  ïayes, 
Eymeyed  in  hir  firste  Briton  tonge; 
Which  layes  with  hir  instniments  they  songe, 
Or  elles  reddt'n  hera  for  hir  plesaunce; 
And  oon  of  hem  hâve  1  in  reraembrautice^ 
Which  1  shal  seyn  with  good  wil  as  1  can. 

(V.  11021-27.) 

Un  comînciamentû  siffatto  trova  rîspondenza  nei  priml  o 
negli  ultimi  versi,  ed  anche  negli  uni  e  negli  al  tri,  di  quasi 
tutti  i  lais  in  lingua  d'oïL  In  générale  nondimeno  ogni  singolo 
esempîo  ci  dà  meno  assai  che  qui  non  s'abbîa.  Conta  già  fra  gli 
esemplari  più  ricchi  la  chiusa  del  Gmgemar  : 

De  cest  cumequ'oî  avex 
Fu  Guigeniar  li  lais  trovez, 
Qye  hum  dist  en  harpe  e  en  rote; 
Bone  eu  est  a  oïr  U  note  ». 

Ma  c'è  un  caso,  solo  ed  unico  ch'io  sappia,  nel  quale  —  e 
proprio  anche  lî  al  principio  —  troviam  qualcosa  di  molto 
prossinio  a  noi.  Voglio  alludere  alT  Eqtntan^  su  cui  anche  lo 
Schofield  ha  fissato  gli  sguardi,  tanto  da  rîponare  il  passo  a 


u  V.  An^lui,  XIV,  2 S 0-9,  nello  scriito  Chmcnuma  dtl  Koeppd.  I  vcrsi 
ijct  Roman  tk  ht  Rose  di  cui  quefli  del  Fnmkftcym  TaU  11075-79  rendono 
Tcco  bcn  chiarOp  sono  nelF  cdi^ionc  Michtl  9198-205  (Koeppel,  8457*42), 
toiyç-Êo  (9469-70),  10187-93  (9477-85),  I.'csamc  dei  luogh»  de  rivât  i  nei 
Canîffhury  TdUi  da!  Rmnûn  ât  ia  Roît  va  nello  siudio  de)  Koeppcl  da  p.  2|8 
a  p.  26s  ! 

2.  P.  44S'46.  Fu  menio  del  SatiJras  (V,  p,  106^  in  nou)  Taver  richiamato 
c  fcmiato  raiteniione  sugli  obblighi  che  verso  il  Mai:hayt  ha  il  Chaucer. 

j*    RogjL^EFÛRT.  p.   112;  WaRXKE,  p,  4O* 


ORIGINI   DEL  FRASKELEYSS  TALE  23  I 

fronte  di  quello  del  Chaucer.  Sennonchè  stavolta  egli  ha 
atienuato  il  valore  del  rafFronto,  col  dire,  assai  inesattamente, 
che  «  ogni  lay  ha  un  prologo  di  questa  specie  »  '  : 

Mult  unt  esté  noble  barun 
Cil  de  Bretaigne,  li  Bretun. 
Jadis  suleient  par  pruêsce, 
Par  curteisie  e  par  noblesce 
Des  aventures  que  oeient, 
Ki  a  plusurs  genz  aveneient, 
Faire  les  lais  pur  remembrance, 
Qu*um  nés  meïst  en  ubliance. 
Un  en  firent,  ç'oï  cunter, 
Ki  ne  fet  mie  a  ubliër, 
D*Equitan,  qui  mult  fu  curteis. 
Sire  des  Nans,  justise  e  reis  ^ 

Corne  si  vede,  alla  siessa  maniera  che  presso  di  noi,  dal  fatto 
singolo  si  risale  al  generico.  Certo  è  possibile  che  il  Chaucer 
abbia  fatto  ciô  di  proprio  impulso,  avendo  davanti  una  délie 
formole  consuete.  Che  del  suo  ce  ne  sia  li  dentro,  dice  Tindica- 
zione  espressa  ed  insolita  del  linguaggio  originario  dei  lais,  e 
più  apertamente  poi  raflfermazione,  rispondente  al  présente  e  al 
passato  prossimo,  erronea  nell'  applicazione  al  passato  remoto, 
che  i  lais  fossero  destinati  anche  alla  lettura.  Ed  è  da  considerare 
corne  al  Lai  del  FraisnCy  che  nell'  originale  principia  laconica- 

mente 

Le  lai  del  Fraisne  vus  dirai 
Sulunc  le  cunte  que  ieo  sai  ), 

e  poco  meno  laconicamente  finisce. 

Quant  l'aventure  fu  seùe, 
Cornent  ele  esteit  avenue, 
Le  lai  del  Fraisne  en  unt  trové  : 
Pur  la  dame  l'unt  si  numé  ♦, 

il  traduttore  inglese  premetta  un  proemio  di  ben  28  versi,  che 
ha  comune  col  nostro  la  caratteristica  che  ho  segnalato  : 


1.  P.  427. 

2.  R0Q.UEF0RT,  p.  114;  Warnke,  p.  41. 

3.  Roquefort,  p.  138;  Warnke,  p.  54. 

4.  Roquefort,  p.  176;  Warnke,  p.  74. 


232  P.    RAJNA 

We  redeih  oft  and  findeih  ywrite 
And  this  clerkes  wele  it  wite, 
Laycs  that  ben  in  harping 
Ben  yfounde  of  ferli  thing. 
Su  m  bethe  of  wer  and  sum  of  wo, 
And  sum  of  joie  and  mirthe  also, 
And  bum  of  trecherie  and  of  gile, 
Of  old  aventours  that  fel  while, 
And  sum  of  bourdes  and  ribaudy, 
And  mani  ther  beth  of  fairy  ; 
Of  al  ihinges  that  men  seth 
Mest  o  loN'e  for  sothe  thai  beth. 
In  Breieyne  bi  hold  time 
This  laycs  were  wrought,  so  seith  this  rime. 
When  kinges  might  our  yhere 
Of  ani  mcrvailes  that  ther  were, 
Thai  token  an  harp  in  gle  and  game, 
And  maked  a  lay  and  gaf  it  name. 
Now  of  this  aventours  that  weren  yfalle 
Y  can  tel  sum,  ac  noiighi  aile. 
Ac  herkneth,  lordinges,  sothe  to  sain, 
Ichil  you  telle  Lay  le  Frayn. 
Bifcl  a  cas  in  Breteyne, 
Whereof  was  made  Lay  le  Frain, 
In  Ingliche  for  to  tellen  ywis, 
Of  an  asche,  for  soihe  it  is 
On  ensaumple  fair  with  aile, 
That  sum  time  was  bifallc  '. 

Ma  questo  riscontro  ha  per  effetto  di  mettere  in  maggior  luce 
le  convenienze  pcculiari  del  proemio  nostro  coll'  Equitan  :  aile 
quali  accresce  valore  anche  il  fatto,  rilevato  dal  Wolf,  che 
Taltro  proemio  inglcsc  di  contenuto  analogo  che  noi  si  possiede, 
quello  del  Sir  Orpheo,  corrisponde  quasi  alla  lettera  col  «  Lay  le 
Frayn  »  *,  sicchè  Fraisne  inglese  e  Sir  Orpheo  da  una  parte, 
Frankeleyns  Talc  ed  Equitan  daU'altra,  costituiscono  duecoppie. 
Fcrô  viene  ad  avvalorarsi  il  sospctto  che  proprio  Y  Equitan  fosse 
présente  al  pensiero  del  Chaucer. 


1.  Afii^h'j,  IIL  p.  415. 

2.  L\-ht-r  il  il'  Liis  ecc,  p.   11.  Ed  ivi  il  proemio  del  Sir  Orpheo  si  trova 
riportaio. 


ORtGlNl    DEL   FRANKELEYNS  TALE  23Î 

E  che  il  Chaucer  fosse  conoscîtare  di  lats  frnncesî,  poirebbe 
meno  di  ogni  altro  contestare  lo  Schofield,  in  forza  délia  tesi 
sua  propria.  Vorrà  egli  immaginare  che  non  conoscesse  assolu- 
tamente  se  non  quel  suo  supposto  originale'  ?  Ne  a  lui  sfugge 
corne  le  somîglianî^e  die  s'è  studiato  di  mettere  in  mostra  con 
taiuni  dei  lais  di  Marie  de  France,  corrano  gran  rtschio  di  non 
provarcj  se  mai,  altro  che  familiariià  del  Chaucer  coU'  attraente 
scrittricej  sebbene  cotale  idea  sia  indebitamente  da  loi  formu- 
lata  solo  in  maniera,  da  essere  a  buon  diritto  respinta\ 
Orbene  ;  conoscitore  di  lais^  non  poteva  il  pocta  sentire  il  Jesi- 
derio  di  vestire  una  voka  alla  foggia  loro,  ossia  di  un  génère 
di  cûinposizione  spettante  ad  una  razza  che  era  elemento  cosïî- 
tutîvo  délia  nazione,  o  al  meno  dello  staïo  inglese,  un  racconto 
di  tutt'  altro  tipo?  Piii  che  naturate  allora  il  prolngo;  neces- 
saria  la  irasposizione  della  scena  nei  paesi  brettoni;  ovvîo  che 
nonii  brettoni,  o  creduti  tali,  s'imponessero  ai  personaggi, 
Perô  starebbe  benissimo  che  il  Dorigen^  o  Dorigene^  corne  anche 
si  scrîve,  fossej  gîusta  la  convinzione  delIo  Schofietd',  di  deri- 


T .  Quale  dato  d'ordine  posîûvQ  mi  guarderô  bene  àalV  âdiiurre  îl  raccomo 
della  Donna  di  Bath  ;  giacchè,  se  non  è  inverosimîle  che  esso  metta  capo  ad 
un  lai  m  Ungua  d'oïl  (v,  G.  Paris,  in  Hist.  iitt.  de  h  Fr*^  XXX,  102),  deve 
mettercelo  aura  verso  ad  ahri  aneili.  Questo  almeno  ml  pare  poiersi  ntencre 
în  me^zo  aile  oebbie  die  avvolgono  il  soggetto  anche  dopo  il  récente  ^^tudio 
di  G.  H.  Mayiîadier,  Thf  Wij€  t/  Bûih\  Taie,  ih  sources  and  îitutltfwSf 
Londra,  Nutt,  1902,  c  la  sagace  recensione  dî  J.  Koch^  EngHsche  SbtâîtH^ 
XXX,  460-64*  QpaQtû  ai  rapporto  fra  Tepisodio  della  resurrezîoiie  nel  eosid- 
dciio  Chdmtr's  Dnam  e  VEUduc  (V,  Kôhler  nelT  t^d.  Warnke  del  i&Bs, 
p.  cvn),  é  posto  fuor  di  causa  dopo  cbe  lattribuzione  di  quel  pocmetto  al 
l*âUtore  dei  Caukihury  Ttiks  ha  perd uto  ogni  ombra  di  credito, 

2.  Egli  immagina  un  avversano,  stando  al  quale  il  Chaucer  mise  insîeme 
una  stoHa  nnova,  di  cui  le  singole  parti  K>no  sempîici  ecbt  délie  pot:^ie  di 
Marie  de  France,  w  e  per  cotale  motivo  cbiam6  un  hy  hnUmte  ci 6  che  in 
reaiti  era  Invemione  sua  propria  n  (p.  452,  n*  t).  Ma  no  :non  si  tratta  di 
questo»  bcnsl  deirimromissbne  di  eleraenti  secondari  affano.  Si  sent  a  anche  il 
Lût,  p.  m  :  «  Quant  aux  nipprochemcms  de  d<^iail  avec  tel  ou  tel  liii  breton 
signalé  par  1  auteur,  ils  sVxpHquent  facilement  par  des  r^^minisceGces  plus 
ou  moins  conscientes,  i^ 

5.  P»  414,  Il  richiamo  ad  un  Dorguen  o  Drognen^  su  cni  la  convinjcione 
si  fonda,  e  cbe  sarebbe  stato  tl  nome  delJa  mogUe  di  Alano  I,  è  preso  dal 
Tyrwhitt, 


234  ^'    RAJNA 

vazione  celtica',  e  chc  i  modclli  greci  sui  quali  io  lo  avevo 
stjpposto  fabbricato%  avessero  servîto  soUanto  a  dargli  una 
mano  di  vernice-  Ma  sîa  quel  che  si  vuole  di  Dorigm,  parlano 
un  Hnguaggio  chiaro  VAtviragus  e  ÏAurelius^  dei  quali  bcn 
conosciamo  la  provenienza.  Essi  mostrano  in  modo  raanifesto 
corne  il  battesimo  sia  di  fresca  data  e  sîa  stato  eseguito  con 
acqua  di  serbatoio,  non  già  di  sorgente.  Corne  mai  nomi  siffatti 
siano  ancora  oggidt  pomti  parer  prova  di  provenienza  cettica 
schietta^  capisco  assai  poco  ', 


lY 


Questa  tuttavia  chc  son  venuto  csponendo  è  una  mera 
supposition  e.  Di  fronte  ad  essa  mantiene  a  buon  dritto  il  suo 
posto  iattrâ,  che  il  Chaucer,  additando  quai  fonte  un  lai^ 
dlca  la  verità.  Non  la  dice  egli  forse  quando  fa  che  il  «  Clerk  n 
dichiari  di  aver  dal  Petrarca  la  storia  di  Gnselda*  e  chc  il 
«  Monk  »  si  richiami  a  Dante  per  il  Conte  Ugolino  K  e,  so- 
sianzîalmente,  altresi  quando  pone  che  il  a  Doctour  of  Phisyk  *> 
si  riferisca  a  Tito  Lîvio  per  Virginioc  la  figlia^?  E  polchè  a  me 
é  rimasto  affatto  oscuro,  donde  il  Boccaccio  abbia  cavato  la 
novellasua^,  non  potro  essere  che  Heto,  se  Tidea  dcllo  Scho- 
field,  debitamente  corretta   per  cîù  che  concerne   lo  scriitore 


'l.  Il  Lot  contesta.  Li  mcîgîic  di  Abno  si  chiamava  eflfertivamente  Olmri^'ften, 
SentîOQchè  il  et  Dro^*itnt  o  Doii^urtt  i*  de!  Tyrwhitt,  anche  sproposiut»^  con- 
serva no  lo  stcsso  vaJorc*  purchè  letti  in  vecchie  cronadie.  Eiî  Lot  stossoctta 
un  Doriftn,  sia  pure  <quâl  nome  mascoîino. 

2*  Kammiû,  p.  41.  Oltrc  chc  dcH' atteggiamento  assunto  ncï  resto  delk 
paroli,  chlederei  loro  conto  dell*  0  linalc,  che  le  rime  mostrano  dcl  resto 
mcramente  grafico, 

3.  SCHOFTELD,  p.  420-22- 

4.  V.  7902-16.  E  si  vcda  dà  chectico  più  ohre,  p.  245. 

S.  V.  147^-73^ 

6.  V-  II9ÎÎ,  Chi  voglia  saper  benc  come  le  cosc  stiano»  rkorra  a!îc  illu- 
strazîani  M  Hertz berg  aile  Cantffbury-Gfuhtchîrn,  p.  619-40.  V,  per  l'indi- 
caiione  bibltograflcâ  b  p.  206.  m  nota,  La  verîlâ  era  gîà  în  parte  stata  vîna  c 
mes»  în  lucc  dal  Sandras  (V,  l'fr.).  M«  lo  ù  conoscere  lo  stesso  Hertiberg, 

7.  V.  Rominia,  XXXI,  4t  c  41- 


ORIGINJ    DEL   FRJKKBLEYNS  TALE  25  J 

itâlianûS  condurrh  a  rbolverc  questo  enimma\  Bîsogna 
dunc|ue  smdiarsi  di  accertare,  col  raffronto  dei  particolari  e 
dellc  parole,  non  plù  dell'  orditura  soltanto,  quale  ipotesi  n- 
sponda  meglio  ai  fatti  :  che  il  Boccaccio  e  il  Chaucer  prendatîo, 
dtrettamente  o  quasi,  da  un  originale  comune;  oppure  che  il 
Chaucer  si  affisi  nel  novellatore  nostro^  Mi  rifaccîo  dal  Fiiocûh. 
Le  osservazioni  spécial!  concernenti  il  Decaimrdn  si  soggiunge- 
ranno  poi;  e  non  richiederanno  un  lungo  dîscorso. 
Il  u  Frankeieyn  »  cosi  principia  a  narrare': 

la  Armorik,  that  called  is  Britayne, 
Ther  was  a  kmght  tliai  loved  and  dide  hb  payne 
To  serve  a  lady  în  his  beste  wyse  \ 
And  many  a  labourj  maiiy  a  grcet  empryse 
He  for  his  Ijdy  wroghte,  er  she  were  wonntf. 
For  she  was  ooii,  the  fai reste  under  sont>e^ 
And  eek  iherïo  corne  of  so  heigh  kinrede^ 
That»», 

E  Menedèn,  Pin terlocu tore  del  FHocolo  : 

Nella  lerra  là  dove  io  nacqui,  mi  rîcorda  esserc  ano  ricchîssimo  e  nubile 
cavalière,  il  i^tiale  di  perfeuissimo  amore  amando  una  dorina  nobîle  dclla  terra, 
perisposa  îaprese  :  délia  quai  donna^  essendo  bdiissima..  .* 

Limpostatura  è  idenrica;  ma  raentre  ïl  Boccaccîo  vien  subito 
âl  fatto,  il  Chaucer  si  ferma  a  lungo  sulla  fase  proemiale.  Ladif- 
fcren^a  si  pu6  immaginare  del  pari  uscita  da  un  amplihcazionej 
corne  da  uno  scorcîamento,  Sennonchè  lo  scorcîaniento  c  sup- 
pôsiziooc  prêt  ta  :  ramplificazione,  ohre  ad  essere  conforme  al 


1.  V.  p.  2aT  f  223. 

2.  Vano  il  credere  che  alla  soludone  poni  un  conmbuto  il  Boiardo.  La 
sîoria  di  Prasîldo,  Iroldo  e  Tisbina,  OrL  Inn,^  I,  xti,  4-89,  ia  quamo  abbîa 
rapporti  cou  quella  del  giardino  incantato,  an^îchè  un  raccomo  indipendente 
e  paralleîo^  corne  afferma  lo  Schoiidd,  p.  436,  è  d^  ritenere  col  Dunlop, 
DcNLOP-LiEBRECHT,  p.  251,  C  col  Panizzi,  nota  finale  al  canto,  una  dériva- 
fïone,  E  di  succhi  boccacceschi  s'è  nutrita  auche  in  alira  mariera.  V.  Savj- 
Lopo,  La  novêUa  di  PrmiUoedi  Thbina,  neïla  RaceoUa  àiStudii  mtkiàedkaia 
ûâ  Akuattdro  d'Ancùna^  P*  ^}  sgg. 

%.  Neiresameche  qui  intraprcndo  riescono  îneviubiU  akync  ripetizioni  di 
co$e  dette  nel  mlo  primo  studio,  p.  42^  n.  i  e  a« 


2jé  P,    RAJNA 

procède  re  abituale  del  Chaucer,  si  trova  per  una  parte  messa 
fuor  di  dubbio  dagl'  imprestiti  presi  dal  Roman  de  la  RoseK 

E  c'é  di  piû.  Concepito  il  racconto  come  dev*  essere^,  glî 
sforzi  a  cm  Arviragus  è  soitomesso  per  conseguîre  la  donna, 
nonchè  essere  inutili,  turbano.  Ce  bcnsl  qualcuno  da  cui  logi- 
camente  ci  dobbtamo  aspettare  che  molto  s'adoperi,  %'ale  a  dire 
rinnamorato*  Ed  ecco  dirci  di  Tarolfo  il  Boccaccio  : 

E  di  t^nto  amore  fatÇAva,  che  oltre  a  leî  non  vedeva  niunâ  cosa^  né 

ptù  di&iavii»  e  ïn  moite  maniert,  forse  con  sovenie  pâ^sar  dâvantî  aile  sue  cas«^ 
o  giosirando,  o  anneggiandOj  o  coq  akrî  attî^  s1ngcgnd%^a  d'avcre  Famor  di 
leî  ;  e  speaso  manda^ndole  raessaggierij  forse  promet tendolc  graodissimi  doïîi, 
e  per  sapere  U  sua  imeodîmento,.... 

O  sarebbe  mai  che  quaiuo  si  fa  fare  inopporttinamente  dal 
Chauccr  a  chî  diviene  marlto,  fosse  propaggine  dell'  agire  più 
che  opportuno  dell*  innamorato  boccaccesco?  Il  sospetto  délia 
trasposizione  s*accresce,  vedcndo  che  là  dove  raffaticarsi  è  al 
posco  suo  vero,  non  abbiamo  che  un  soffrire  soUtario.  Aurelîus 
ama  da  due  anni  passionatamente  Dorigen  (v.  11251-52)^  le 
sta  vicino  di  casa  ed  è  ben  conosciuto  da  lei  (v.  11273-75),  sa 
assente  da  un  pezzo  il  marito,  e  nondimeno  non  le  ha  osato 
manifestar  le  sue  pêne  (v.  11255*55),  ^  ^'^  limitato  a  sterîli 
sfoghi  poecicî  (r  1256-60)  e  a  domandare  pietà  con  sguardi  non 
avvertin  od  iniesi  (v.  11267-71). 

Nel  giardino  rîdente  a  cui,  per  tentar  di  svagarla,  gli  amici 
hanno  conduite  Dorigen»  Aurelius  trova  finatmcnce  il  coraggio 
di  dichiararsi-  Uoccasione  è  certo  ben  immaginata;  e  come  raie 
non  ha  riscontro  presse  U  Boccaccio.  Ma  non  ci  offre  questi 
nulla  a  cui  la  mente  possa  volgersi  ?  In  quel  giardino  una  lieta 
comiiivaè  venuta  a  passare  nel  sollazzo  tutta  una  giornata  :  in 
un  giardino  ridente  akrettanto(siamo  del  pari  di  primavera  ^)  si 
è  condotta  al  modo  stesso  a  darsî  spasso  per  un  giorno  iniero 
la  brigata,  di  cui  una  parte  prenderà  trastuUo  durante  le  ore 
calde  porgendo  orecchio  alla  storia  di  Tarolfo.  E  si  badi.  Al 
colloquio  tra  Aurelius  e  Dorigen  mette  fine  il  soppravvenire  di 
amici,  che  nulla  sanno  e  di  nulla  si  accorgono. 


î.  V,  p.  129-50. 

a.  V.  p.  ito, 

j,  Cmi.  r.,  V,  riilB-t9  :  Fi7,j  t.  Il,  p.  23-2 j. 


ORIGINI   DEL   FRANKELEYNS  TALE  237 

But  sodeiniy  bigonne  revel  newe 
Til  that  the  brighte  sonne  loste  his  hewe; 
For  th'  orisonte  haih  reft  the  sonne  his  light  ; 
This  his  as  muche  to  seye  as  it  was  night. 

And  hoom  they  goon  in  joye  and  in  solas 

(V.  11327-31.) 

O  perché  «  revel  newe  »?  Non  vedo  che  il  festeggiare  sia 
mai  stato  interrotto,  se  non  forse  dal  passeggiare  di  taluni  su  e 
gîù  per  i  viali,  del  quale  d'altronde  non  ci  si  dà  punto  un 
perché'.  Non  ci  sarebbe  allora  il  caso  che  Tinterruzione  fosse 
riflesso  di  quella  che  nella  méridionale  Mergellina  divien  neces- 
saria  quando  «  Âpollo  col  carro  délia  luce  salito  al  meridiano 
cerchio  »  dardeggia  raggi  cocenti  %  sicchè  la  ripresa  fosse  da 
rannodare  con  ciô  che  nel  Filocolo  segue  dopo  esposte  e  dispu- 
tate  le  tredici  question!  ?  Ivi  dice  allora  Fiammetta  : 

Noi  veggiamo  già  Febo  guardard  con  non  diritto  aspetto,  e  sentiamo 
l*aere  rinfrescato,  e  i  nostri  compagni  avère  ricominciata  la  festa,  che  qui 
vegnendo  per  troppo  caldo  lasciammo,  e  perô  ci  pare  di  noi  tomare  simile- 
tnente  a  quella. 

Né  qui  s'arresta  la  corrispondenza  : 

Sonarono  i  lîeti  strumenti,  e  Taere  piena  d'amorosi  canti  da  tutte  parti 
si  sentiva,  e  niuna  parte  del  giardino  era  senza  festa,  nella  quale  quel  giorno 
infîno  alla  sua  fine  tutti  lietamente  dihiorarono  :  ma  sopravvenuta  la  notte, 
mostrando  già  la  loro  luce  le  stelle,  alla  donna  e  a  tutti  parve  di  partire, 
tornando  alla  cittâ  ). 

Poiché  qui  s'ha  a  fare  con  un  tratto  che  nel  Filocolo  non 
appartiene  alla  novella,  il  legame  sarebbe  di  tal  natura,  da 
mettere  fuor  di  dubbio  la  dipendenza  délia  rima  inglese  dalla 
prosa  nostra.  Perô  esso  riesce  ben  più  prezioso  di  certe  conve- 
nienze  minute,  spiegabili  anche  solo  colla  conformità  dell*  ordito, 
nel  colloquio  —  se  diretto,  o  attraverso  a  mediatori,  poco 
monta  —  tra  la  donna  e  il  suo  sollecitatore  ^. 


1.  «  Tho  corne  hir  othere  frecndes  many  oon,  And  in  the  aleyes  romeden 
upand  doun  «,  v.  11324-25. 

2.  P.  31. 

3.  P.  119. 

4.  Cant,  T.,  V.  11 299,  «  Tak  this  for  fynal  answer  as  of  me  »  :  Fil., 
dentro  ad  un  contorno  différente,  «  ponessesi  in  cuorc  di  non  stimobrla  più 


238  F,    RAJKA 

Accompagniamo  il  poveretto  ne! la  peregrinazîone  în  tracciâ 
di  chî  possa  operare  il  portcnto  rkliiesto,  Aureliuseii  fratello, 
partiti  alla  volta  délia  dotta  Orléans^  giuuti  li  presse, 

A  yong  £lerk  roniînge  by  hîm-seif  ihey  mette, 

(Y.  U48î) 

nel  quale  essi  trovano  il  loro  uomo,  a  quel  modo  che  Tarolfo 
lo  trova  nella  Tessaglia  —  la  regione  magica  per  eccellenza  — 
in  un  vecchierello  che  vagando  per  la  campagna  w  egli  si  vide 

davanti  a  piè  d*un  monte^ il  quale  andava  cogliendo  erbe  ». 

Se  i  due  si  manifestano  poi  col  fatto  pari  di  scienza,  non 
vengono  a  contrapporsi  solo  soito  U  rispetto  del!'  età.  Lasciando 
altrOj  del  vecchierello  greco  sentiamo  che  «  i  suoi  vestiiaienti 
giudicavano  lui  esser  povero  »  ;  e  che  la  sua  sia  po verra  vera> 
non  solo  apparente,  perqiianto  sia  lecito  tneravigliarsene  in  chi 
tanto  puo,  mostra  subito  lî  modo  corne  accogUe  le  proffene 
délia  ricompensa,  larghissima  di  certo  :  «  ...Sequesto  facessi^ 
a  me  non  bisognerebbe  d*andare  più  cogliendo  l  erbe.  »  Invece 
il  giovane  d'Orléans  nuota  negli  agi  ;  délia  sua  casa  ci  è  detto^ 

So  wcl  arrayed  hous  as  ther  was  oon 
Aurelius  in  liis  lyf  sattgli  never  noon. 

(V,  11499-500.) 

Che  se  quanta  si  mostra  poi  agit  ospiti  —  foreste,  parchî, 
cacce,  un  ballo  a  cuî  partecipa  Madonna  stessa^  e  Aurelius  con 
leij  —  e  mera  tllusione,  nulla  indica  che  illusione  sîano  queste 
magnificenze  e  la  copia  di  cibî  delicati.  Ora,  alF  andaniento  del 
raccontû  corrisponde  nieglîo,  resultando  cosi  più  verositnil- 
mente  originale,  la  versione  italiana  che  Tinglese;  in  quanto 
sarà  ben  aîtrîmend  magnaninio,  rinunziando  al  compenso^  il 


avant]  ».  —  Cant.  7.,  v.  ii}oi,  «i  Aurelîe,  quod  she,  by  heighegod  abov€, 
Ycl  wotdc  [  gratmte  yow  to  bec  11  your  bvê  j*  ;  1 1  joç»  «  Thari  wol  I  tove 
>nou  bcst  ôf  any  man  ;  Hâve  hccr  my  trouihe  in  al  thaï  cvcr  I  caii  u  ;  1 1  )tf , 
*  For  wcl  I  woot  ihat  it  shal  iievcr  bitydc  »;  1 1531,  «  Madame,  quod  he> 
this  WLTe  an  in  possible  m  :  Fi!.,  n  Ella  m^ndô  cosl  d  kendo  a  Tarolfo»chc..* 
db  voltra  da  lui  yn  dono,  il  quale  corne  Tavesse  ricevuto,  glurava  per  î  5Uoi 
iddîi.  e  per  quel  la  kanxa  che  in  gentildonna  dee  espère,  che  et  la  fsrebbe 

ogni  suo  piacere  ..,. frt  se  dicendo  ;  Qucsta  è  cosa  impossîbile.^... 

Tarolfo,  ...  ancorcht  impassibile  gli  paresic...  » 


ORIGINI   DEL  FRANKELÈYNS  TALE  239 

miserabile  vecchierello  che  il  ricco  giovanotto.  Ed  ecco  che 
infatti  la  povertà  è  Targomento  cardinale  che  s'adduce  da 
Menedôn  per  assegnare  a  lui  il  primato  nella  discussione  a  cui 
la  novella  dà  luogo. 

Cosl  Aurelius  corne  Tarolfo  sono,  e  troppo  ben  si  capisce, 
impazienti  d'indugio  : 

But  loketh  now,   or  no  necligence  or  slouthe, 
Ye  urie  us  hecr  no  lenger  than  to-morwe  ; 

(V.  11544-45) 

Amico,  a  me  si  fa  tardi  che  quel  che  m'imprometti  si  fornisca  ;  perô  senza 
^  indugio  pajtiamo 

Partono  dunque;  e  arrivano  alla  patria  loro  nella  stagione 
medesima;  e  possiamo  anche  dire,  non  nella  stagione  soltanto. 
Chè  r  «  assai  vicini  del  mese  »  —  il  gennaio  —  «  del  quale 
era  stato  dimandato  il  giardino  »,  non  è  nel  Filocolo  riferibile 
ad  altro  che  al  dicembre  ;  che  è  il  mese  per  l'appunto  indicato 
espressamente  dal  Chaucer, 

And  this  was,  as  the  bokes  me  remembre, 
The  colde  frosty  seson  of  Décembre, 

(V.  11555-56) 

di  cui  si  fa  una  descrizione  particolareggiata  (v.  11557-67). 
Ma  perché  dal  poeta  inglese  si  è  scelto  questo  tempo  ?  —  Un 
buon  motivo  poteva  essere  Timperversare  maggiore  délie 
tempeste,  per  cui  riuscivano  allora  viepiù  funesti  gli  scogli  che 
Dorigen  aveva  desiderato  fosser  rimossi.  Ma  si  sarebbe  dovuto 
dire;  e  non  se  ne  dice  nulla;  sicchè  resta  il  dubbio  che 
Timpulso,  secondato  forse  perche  offriva  Topportunità  di  una 
descrizione  adornativa,  da  far  come  riscontro  alla  rappresenta- 
zione  délie  attrattive  primaverili  dataci  prima  (v.  1 1218-29), 
sia  venuto  dalla  storia  del  giardino  incantato,  ossia  dal  Boccaccio. 
Il  a  the  bokes  me  remembre  »  rispondercbbe  allora  al  vero,  e 
ne  sarebbe  in  certo  modo  una  spia. 

Le  fattucchierie  seguono  in  maniera  diversa.  Da  rilevare 
tuttavia  che  di  fronte  alla  lunga  esposizione  degl'  incantesimi 
nostri  sta  nel  Chaucer  un  discorso  non  troppo  brève  di  materia 
astrologica  (v.  11582-603).  Sia  come  si  vuole,  gl' incantatori 
adempiono  il  loro  compito  e  i  due  innamorati  s*afFrettano  a 
darne  avviso.  Parlino  qui  da  soli  i  testi  : 


240  p.    RAJNA 

And  to  the  temple  his  wey  forth  hath  he  holde, 
Wher-as  he  knew  he  sholde  his  lady  see. 

(V.  11618-19.) 
Madame, 

(V.  11643) 
I  hâve  do  so  as  ye  comanded  me  ; 
And  if  ye  vouche-sauf,  ye  may  go  see. 
Doth  as  yow  list 

(V.  11645-47-) 
He  taketh  his  levé,  and  shc  astonied  stood. 

(V.  11652.) 
...  E  dovendo  essere  il  segucnte  giorno  nella  città  una  grandissima  solen- 
nità,  egli  se  n'andô  davanti  alla  sua  donna,  la  quale  già  gran  tempo  era  chï 
veduta  non  l'avea,  e  cosi  le  disse  :  Madonna,  dopo  lunga  fatica  io  ho  fomîto 
quello  che  voi  comandastc  :  quando  vi  placera  di  vederlo  o  di  prenderlo, 
egli  è  al  vostro  piacere.  La  donna...  si  maravigliô  molto... 

Facciasi  quel  conto  che  pare  di  queste   altre    convenienze 
dentro  a  cornici  disuguali  : 

And  hoom  she  gooth  a  sorweful  créature 

(V.  11658.) 
...  I^  gentildonna...,  tomando  nella  sua  caméra  piena  di  noiosa  malin- 
conia... 

For  out  of  toune  was  goon  Arveragus. 

(V.  11663.) 
...  Vi  piaccia  tanto  indugiarvi  a  richiedermi  del  vostro  disio,  che'l  signore 
mîo  vada  a  caccia,  o  in  altra  parte  fuori  délia  città... 

La  comice  conviene  invece  in  questi  altri  passi  : 

Allas,  quod  she,  on  thee.  Fortune,  I  pleync, 
That  unwar  wrapped  hast  me  in  thy  chcyne  ; 
For  which,  t'escape,  woot  I  no  socour, 
Save  only  deeth  or  elles  dishonour... 

(V.  11667-71.) 
...  E  pensando  in  quai  maniera  tornar  potesse  addietro  ciô  che  promesse 
avea,  e  non  trovando  lecita  scusa... 

And  told  him  al  as  ye  han  herd  bifore... 

(V.  11775.) 
...  dal  principio  infinoalla  fine  gli  narrô  perché  dolente  dimorava. 

Ye  shul  your  trouthe  holden,  by  my  fay  1 

(V.  II 784.) 


ORIGINI   DEL   ERJSKELEYNS  TALE  24 1 

...  Ye  sholde  your  trouthe  kepe  and  save. 

(V.  11788.) 

Ne  make  no  contenance  of  hevinesse, 

That  folk  of  yow  may  demen  harm  or  gesse. 

(V.  1179S-96.) 
...  Va,  e  copertamente  serva  il  tuo  giuramento,  e  a  Tarolfo  ciô  chc  tu 
promettesti  liberamente  attieni. 

Attenere,  madonna  Dianora  non  vorrebbe  a  nessun  patto  : 
«  ...  In  niuna  maniera  io  faro  questo  :  avanti  m'ucciderei  che  io 
facessi  cosa  che  disonore  e  dispiacere  vi  fosse  »;  parole  queste 
che  ci  ricordano  corne  Dorigen  abbia  consumato  un  centinaio 
di  versi  (i  1670-766)  a  pensare  appunto  alla  morte  ed  a  passare 
in  rassegna  le  eroine  che  la  morte  preferirono  al  disonore. 

Nella  scena  tra  la  donna  e  Tinnamorato  vogliono  partico- 
larmente  segnalarsi  queste  rispondenze  : 

Aurelius  gan  wondren  on  this  cas  ; 
And  in  his  herte... 

(V.  11818-19.) 

AUora  disse  Tarolfo  :  Senza  fine  mi  fate  maravigliare 

La  quai  cosa  udendo  Tarolfo,  più  che  in  prima  si  cominciô  a  maravigliare  e 
a  pensar  forte,  e  a  conoscere  cominciô... 

And  in  his  herte  lie  caughte  of  this  greet  routhe, 
Consideringe  the  beste  on.evcry  syde, 
That  fro  his  lust  yet  were  him  lever  abyde, 
Than  doon  so  heigh  a  cherlish  wrecchcdnessc 
Agayns  franchyse  and  aile  gentillesse. 

(V.  11824-28.) 
...  £  fra  se  cominciô  a  dire,  che  degno  di  grandissima  riprensione  sarebbe 
chi  a  cosi  libérale  uomo  pensasse  villania. 

I  yow  relesse,  madame,  in-to  your  hond 
Quit  every  sûrement  and  every  bond, 
Thaï  ve  han  maad  to  me... 

(V.  11837-39.) 

...  r  ho  pcr  ricevuto  ciô  che  io  di  voi  desiderava. 

She  thonketh  him  up-on  hir  knees  al  bare, 
And  boom  un-to  hir  housbond  is  she  fare, 
And  tolde  him  al  as  ye  han  herd  me  sayd... 

(V.  11849-51.) 

Rammnim,  XXXU  16 


242  p.    RAJNA 

Ringrazîôla  donna  molto  Tarolfo  di  tanta  corcesia,  c  lieta  si  parte  tomando 
al  suo  marito,  a  cui  tutto  per  ordine  disse  quelio  clie  avvenuto  l'era. 

E  il  «   philosophre  »,  che  ad  Aurelius,  il  quale  gli  chiede 
facilitazioni  per  il  pagamento,  demanda  (v.  11891), 

Havc  I  nat  liolden  covenant  un-to  thee  ? 

è  più  vicino,  se  si  guarda  bene,  che  non  ne  abbia  Taria  a 
Tebano,  che  dice  a  Tarolfo, 

Dunque  per  qucsto  avrô  io  perduto  ciô  che  da  te  mi  fu  promesso  ? 

Ma  non  c'è  bisogno  di  aguzzar  l'occhio  per  ravvicinamenti 
corne  questi  : 

Evericli  of  yow  dide  gentilly  til  other. 
Thou  art  a  squyer,  and  lîe  is  a  knight  ; 
But  God  forbede,  for  his  blisful  might, 
But-if  a  clerk  coude  doon  a  gentil  dede 
As  wel  as  any  of  yow,  it  is  no  drede. 

(V.  I 1912-16) 
Unque  agi*  Iddii.non  piaccia,  che  là  dove  il  cavalière  ti  fu  délia  sua  donna 
libérale,  e  tu  a  lui  non  fosti  villano,  io  sia  meno  che  cortese. 

Sire,  I  relesse  thee  thy  thousand  pound, 

(V.  11917.) 

For,  sire,  I  wol  nat  take  a  peny  of  thee 
For  al  my  craft,  ne  noght  for  my  travaille. 

(V.  1 1920-21.) 
...  Voglio  che  ciô  che  in  guiderdone  del  servigio  prcnder  dovea  tuo  si 
rimanga  siccome  mai  fu.  Kè  di  quelio  di  Tarolfo  voile  mai  alcuna  cosa 
prenderc. 

Lordinges,  this  question  wolde  I  aske  now, 
Which  was  the  moste  free,  as  thinketh  yow  ? 

(V.  11925-26.) 

Dubitasi  ora  quale  di  costoro  fosse  maggiore  liberalità... 

E  per  ciô  che  spetta  a  quest'  ultimo  raffronto,  non  sarà 
inutile  rilevare  corne  il  vocabolo  «  questione  »  datoci  dal 
Chaucer,  in  questa  parte  del  Filocolo  ritorni  non  so  quante 
voltc  e  sia  messo  in  un'  evidenza  particolarissima.  O  non  costi- 
tuisce  la  storia  del  Giardino  Incantato  una  délie  Tredici  Que- 
stioni  d*amore  ? 


ORIGINI   DEL   FRAWKELEYNS  TALE  243 

Fino  a  qui  il  FiloœlOy  con  cui  un'  osservazione  propriamente 
scrupolosa  conduce  a  riconoscere  maggiori  le  sotniglianze  '  ; 
aile  quali  gioverà  ancora  aggiungere  Tambiente  similmente 
pagano.  Ci  sono  tuttavia  alcuni  passi  dove  il  Decameràn  par 
meglio  convenire.  Uno  s'incontra  subito  al  primo  principio.  Le 
parole 

In  Ârmorik,  that  called  is  Britayne, 

combaciano  con 
In  Frioli ë  una  terra  chiamata  Udine, 

in  maniera  da  suscitar  gelosia  nel  cominciamento  riferito  a 
p.  235. 

Poi,  è  similmente  di  puro  danaro  la  ricompensa  che  Aurelius 
ed  Ansaldo  pattuiscono  col  negromante;  Tuno  s'impegna  a 
sborsare  «  a  thousand  pound  »  (v.  11336  e  11539),  Taltro  una 
somma  a  noi  non  precisata  coU'  espressione,  «  grandissima 
quantità  di  moneta  »  ;  mentre  Tarolfo  offre  a  Tebano  la  meta  di 
quanto  possiede,  «  castella  »  non  meno  che  «  tesori  ». 

Dopo  che  è  stata  eseguita  Topera  d'incanto,  Aurelius  dice, 
tra  Taltre  cose,  a  Dorigen  : 

Ye  woot  right  wel  what  ye  bihighten  me  ; 
And  in  myn  hand  your  trouthe  plighlen  ye... 

(V.  11639-40) 

hâve  vour  biheste  in  minde  ; 

(V.  11647) 

e  Ansaldo  manda  a  significare  a  Dianora  che  deva 

ncordarsi  délia  promission  fattagli  e  con  saramento  fermata... 

Dorigen, 

Allas  I  quod  she,  that  ever  thés  sholde  happe  ! 

(V.  11654.) 
Dianora, 
s'incominciô  a  pentere  délia  sua  promessa. 

E  quando  Tuna  e  Taltra  vanno  per  adempierla,  Dorigen  ci  va 
con  «  a  squyer  and  a  mayde  »  (v.  11 797),  Dianora  «  con  due 


1 .  Maggiori  le  avevo  dette  di  già,  avanti  di  essermi  addentrato  nel  soggetto 
corne  ho  dovuto  &r  poi,  nella  seconda  délie  note  richiamate  a  p.  235,  n.  3 


244  P-    RAJNA 

suoi  familiari  innanzi  e  con  una  cameriera  appresso  »;  il  che 
viene  a  offrira  corrlspondenza  netta  di  linee,  là  dove  il  FilocolOy 
col  suo  «  e  presa  compagnia  »,  ci  dà  una  sfumatura. 

Finalmente  (ed  è  forse  la  convenienza  più  notevole),  saputo 
dalla  dolentissima  Dorigen  il  corne  e  il  perché  délia  venuta 
sua  ',  Aurelius 

...  in  his  herte  had  greet  compassioun 

Of  hir  and  of  hir  lamentacioun 

And  of  Aneragus,  the  worthy  knight, 

(V.  11819-21) 

a  quel  modo  che  Ansaldo,  saputo  dalla  donna  «  vergognosa  e 
quasi  con  le  lagrime  sopra  gli  occhi  »  la  grande  «  liberalità  di 
Giliberto  »,  «  commosso,  il  suo  fervore  in  compassion  cominciô 
a  cambiare  ». 


Questi  i  fatti.  Si  tratta  ora  di  cavarnc  le  conclusioni,  senza 
lasciarsi  annebbiare  la  vista  da  alcun  preconcetto.  E  qui  veniamo 
a  dar  di  cozzo  in  un  problema  bcn  altrimenti  comprensivo  che 
il  nostro  non  sia.  Ebbe  il  Chauccr  conoscenza  del  Decamerdn} 

Se  Dio  vuole,  è  passato  per  sempre  il  tempo  in  cui  al  cieco 
amor  proprio  nazionalc  di  George  Lillie  Craik  e  di  Sir  Nich. 
Harris  Nicolas  *  poteva  esser  lecito,  abbandonando  le  sane 
tradizioni  del  Tyrwhitt  e  del  Warton,  di  pretendere  che  il 
Chaucer  nulla  dovesse  airitalia  nuova,  délia  quale  avrebbe 
ignorato  del  pari  e  la  letteratura  e  la  lingua.  Uno  stuolo  di 


1.  Qui  il  Chaucer  le  fa  dir  tutto  in  due  versi  (11 816- 17),  propriamcnte 
mirabili  pcr  concisionc  cd  efRcacia.  Aurelius,  incontratala,  domanda  dovc 

vada  : 

Un-to  tlic  g.irdiii,  as  myn  houshond  bad, 
.My  trouthc  for  to  hulde,  allas  !  allas  ! 

Un  vero  scoppio  di  singhiozzi  e  di  pianto.  Diventa  perfîno  supcrfluo  il  «  half 
as  she  were  mad  »  del  verso  précédente. 

2.  Al  primo  (i 799-1 866)  originariamcnte,  credo,  nella  History  of  Literature 
and  Larning  in  EnirLnuly  pubblicata  ncl  1844-46;  al  seconde  (1799-1848) 
nella  biogr.ifiJ  del  Chaucer  premes^a  ai  Pck-m^  nell*  ediztone  Aldina  del 
Ftckering,  1845. 


ORIGINI   DEL   FRANKELEYSS  TALE  245 

studiosi  tedeschi  ha  niostrato  quanto  siffatte  idée  offendessero  il 
vero  e  messo  bene  in  chiaro  corne  Tazione  italiana  determini 
nella  vita  letteraria  del  Chaucer  il  trapasso  da  una  fase  médié- 
vale ad  una  moderna.  Ma  riguardo  al  punto  specifico  che  ora 
ci  occupa  il  dubbio  è  rimasto  possibile  anche  dopo  che  tanta 
luce  si  è  sparsa  *.  Non  ci  meraviglieremo  dunque  di  certo  che  un 
anglo-tedesco,  John  Koch,  nonchè  del  dubbio,  si  sia  fatto 
sostenitore  délia  negazione  recisa  precisamente  nel  conchiudere 
un  lavoro  tutto  intento  a  indagare,  cosa,  nelle  mani  del 
Chaucer,  divenisse  la  Teseide  *. 

E  invero,  nessuno  dei  Canterbury  Taies  è  resultato  finora 
emanazione  diretta  délia  raccolta  nostra.  Dalla  novella  del 
«Frankeleyn  »,  attualmente  in  causa,  dobbiamo  qui  fare  astra- 
zione.  Del  Rêves  Tale^  v.  3919-4322,  H.  Varnhagen  nega, 
dentro  ad  uno  studio  particolareggiato  \  che  abbia  dipendenza 
dalla  storia  di  Pinuccio,  Dec,  IX,  6.  Ne  io  vorrei  ricondurre, 
corne  fu  fatto,  lo  Shipmannes  Taie,  v.  1293 1-13 364,  ^  Dec, 
Vin,  I.  Quanto  alla  Griselda,  è  cosa  nota  come  sia  stata  con- 
dotta  sulla  traduzione  latina  del  Petrarca,  anzichè  sull'  originale 
boccaccesco  *. 

Per  la  Griselda  sono  tuttavia  da  osservare  due  cose.  Se  essa 
fil  realmente  composta  come  opéra  a  se,  prima  di  metter  mano 


1.  Fa  piacere,  in  quanto  mostra  la  spassionatezza  délia  critica  italiana, 
che  non  dia  bando  ad  ogni  incertezza  Cino  Chiarini,  La  Casa  âella  Fama  di 
Cfjauccr,  Bari,  1902,  p.  4,  pur  avendo  egli  stesso  —  Intoruo  aile  «  KaveUe  di 
Canterbttry  »  di  Goffredo  Cfxtiicer,  nella  Xucn'a  Antologiit,  vol.  CVI  (nov.-dic. 
'^97)>  P'iî3ï"34  —  niesso  in  luce  ragioni  validaniente  suffragatrici  delF  idea 
che  a  noi  deve  riuscir  più  simpatica.  Risolutamcnte,  ma  pur  sempre  serena- 
mente  affermativo  è  Carlo  Segrè,  Oniucer  e  BoccacciOy  nel  Faufulla  délia  Dome- 
nicûy  25  nov.  1900. 

2.  Ein  Beitrag  itir  Kritik  Chaucer' Sy  nel  vol.  I  (1877)  degli  EngUsche  Studien^ 
p.  249-293.  Tradotto  in  inglese  da  lui  medesimo,  il  lavoro  del  Koch  prese 
poste  un  anno  dopo  tra  le  pubblicazioni  dclla  •  Chaucer  Society  a. 

3.  DU  EfxàSilutig  von  der  Wiege^  negli  Englisclie  Studien^  IX,  240-66. 

4.  Proprio,  si  badi,  sulla  traduzione  scritta,  non  sopra  un*  esposizione 
orale,  cotne  credctte  il  Warton  e  non  discredcttc  il  Dunlop,  2«  éd.,  II,  349 
(vers.  Liebrccht,  p.  253).  Misero  le  cose  a  posto  il  Hertzberg,  nelle  note  aile 
CanUrhury-Gtschichtaiy  p.  625-26,  e  il  Kissner,  nella  dissertazione  già  indicata 
(p.  217,  n.  2)  eche  quind'  innanzi  sarà  da  avère  ben  présente,  p.  75. 


246  F.    RAJXA 

ai  Canterbury  Taks  S  al  suo  non  provenire  direitamente  dal 
Decamerôn  è  toi  ta  pcr  cio  solo  ogni  portata  che  tra^cenda  1 
Umiti  suoi  propri,  E  nella  conduione  in  cui  ora  si  alfaccla, 
quale  Clerkes  Tak^  mi  présenta  una  circostan^a,  che,  se  è 
dovuta  a  mero  caso,  riesce  singolarc  di  certo*  Essa  è  s^;:uita 
immediatemente  dal  Marchantes  Taie,  che  conta  corne 

Whîloni  ther  was  dwelliog^  in  Lumbardye 
A  wortby  knight,  îhat  boni  uas  of  Pavye, 
In  which  he  lived  m  greet  prosperitec  ; 

(V.  9121-23) 

c  nel  Drcamcfbn  si  trova  del  pari  contigua  —  solo  seguendo, 
in  cambio  di  precedere  —  alla  storia,  affano  ererogenea  del 
resto,  di  un  ricco  signore  lombardo,  e  precisamente  pavesc, 
cioè  di  Messer  Torello*. 

E  la  forza  dîmostrativa  délia  mancansca  di  una  derivazione 
immediata  incontesrabile  è  d^alç ronde  actenuata  da  più  che  una 
riâessione.  Dice  il  Koch  :  a  Non  è  uwia  la  congettura»  che,  se 
il  nostro  poeta  avesse  realmente  conosciuto  »  il  Decamnèn^ 
tt  cgli  îiei  suoi  cosi  numerosi  prodotti  ne  avrebbe  preso  dirctta* 
mente  perlomeno  una  novella^  in  cambio  di  rielaborare  scritture 
piii  vecchte?  »  Oui  col  «  cosi  numerosi  prodotti  »,  in  parte  d 
si  conduce  fuor  di  strada,  in  parte  si  esagera;  se  ci  Umitlamo, 
com'è  dovere»  ai  Canterbury  TaUs^  rammentiamoci  che  i  Talrs^ 
non  sono  ncmmeno  il  quarto  di  cio  che  porta  va  il  disegno 
primitive;  sono  cioè  ventiquattro  in  cambio  di  centoventi 
air  incirca;  e  î  ventiquattro  si  riducuno  a  poco  più  che  la  meta, 
se  deduciamo  quelli  spettand  a  generi,  che  îl  Boccaccia  non 
avrebbe  mai  accotto.  Poi,  dirimpetto  alla  congetmra  del  Koch, 


s,  Taîe  Qon  lifannosolo  coloro  che,  m  iKs<!quiô  al  Pmloga,  ^otio  iJomi-  < 
nati  dal  pensiero  4i  mettcrne  la  coraposizloiie  in  immcdiato  rapporto  calU  I 
supposta  c  non  improbabile  vbiu  al  Pctrarca  :  con  tma  dctcnnîna^ione  crono- 
logic3  Jîvcrsa  pensa  cosî  anche  il  Ten  Brinfc,  conie  resnlu  dalle  p.  125-27  e 
171  ddta  Gesch.  dtr  tngï,  LiUr.^  t.  IL 

2*  G,  X,  nov.  9  :  «  E  avendo  *  il  Saladino  con  piccoU  compagnîa  *  ccrcbc^ 
moite  provincie  cnaianc,  e  per  Lombardia  cavalcando  pcr  pastarc  ohf« 
a'  inDDti,  awviine  che»  aiîdandoda  Melano  a  Pavia,  ed  esscndo  gïà  vespro» 
SI  scomrarono  in  un  gcntik  uotno,  il  cul  nome  era  messer  TorcEo  d'IsifU  da^ 
Pi%'ia^  il  quale  con  suoi  famigHarî  e  cofi  cani  e  con  falconi  k»  tsoc. 


ORIGINI    DEL   FRASKELEYSS  TALE  247 

demanda  posto  quest'  altra,  che  precisamente  dal  Decûtncrôn  il 
Chaucer  sentisse  molto  ritegno  a  prendere.  Non  appartengono 
i  Canterbury  Taies  a  quel  période  délia  vita  in  cui  il  Chaucer, 
pienamente  maturo,  sa  essere  più  originale,  e  risolutamente 
afferma  il  suo  io,  schernendo  i  rivali  d'umile  specie  '  e  non 
risparmiando  i  maggiori  *  ? 

D'altronde  la  convenienza,  o  non  convenienza,  dei  racconti 
costituisce  solo  un  aspetto  délia  questione,  e  davvero  non  il 
più  importante.  Quale  metamorfosi  abbia  prodotto  nel  Chaucer 
la  conoscenza  délia  letteratura  italiana,  s'è  ricordato  poc'  anzi. 
Délie  tre  nostre  massime  glorie  trecentistiche,  stampô  orme  nel 
suo  spirito  Dante  '  ;  gl'  inspirô  affettuosa  reverenza  il  Petrarca  ; 
ma,  per  via  di  una  peculiare  affinità  d'ingegno  e  tendenze,  e 
insieme  in  grazia  dello  star  meno  in  alto,  e  sopra  un  colle 
anzichè  sopra  rocce,  esercitô  su  di  lui  un'  azione  di  gran  lunga 
maggiore  il  Boccaccio-».  Ed  ecco  il  Filostraio  convertirsi  nel 
Troilus  and  Criseyde  5;  la  Teseidt^  essere  elaborata  anzitutto  quai 
poema  a  se  in  una  forma  perdu  ta  6,  allogarsi  in  nuova  veste  nei 
Canterbury  Taies  quai  narrazione  del  «  Knight  »,  e  dare  ancora 
perlomeno  le  mosse  a  quel  misteriosoframmento  che  è  VAnelida 
and  ArciteT,  E  accanto  aile  derivazioni  più  ricche  e  patenti  ce 
ne  sono  altre  che  meno  appariscono.  Quanto  al  concetto  géné- 
rale il  Monkes  Taie  vuol  essere  ricondotto  al  De  casibus  virorum 


1.  Ten  Brink,  op,  ci  t.  y  p.  180-82. 

2.  Ih,,  p.  164-65. 

3.  Contributo  a  questa  parte  dell'  indagine  è  il  récente  lavoro,  ricordato 
qui  dietro  (p.  245  n.  i),  del  Chiarini  sulla  Casa  délia  Fatna,  che  porta  altresi 
il  titolo  Di  una  imitm^ionc  inglese  délia  Divitta  Commedia. 

4.  Il  parlare  cosi  è  un  far  eco  al  Ten  Brink,  p.  51  sgg.,  che  ha  veduto  più 
addentro  e  più  largamente  di  ogni  altro.  Sarebbe  tuttavia  ingiusto  non  rilevarc 
che  egli  aveva  avuto  ottinii  predecçssori  nel  Kissner,  dissertaz.  cit.,  p.  66 
sgg.,  e  nel  Hertzberg,  proemio  aile  Cauterhury-Geschichten,  p.  43  sgg. 

5.  Lo  studio  di  questo  soggetto  riempie  per  buona  parte  (p.  13-58)  il  lavoro 
del  Kissner. 

6.  V.  Ten  Brink,  p.  69-70,  e  lo  scritto  citato  del  Koch,  che  è  appunto 
in  particolar  modo  una  ricerca  sui  rapporii  fra  le  due  rcda/.ioni. 

7.  Per  il  Koch,  p.  280-91  (cfr.  Ten  Brink,  p.  196-98),  noi  avremmo  qui 
anzi  il  principio  di  un  rimancggiamento  délia  materia  stessa,  anteriore  al 
Knightes  Taie, 


248  P-    RAJNA 

iUusîrium^  donde  esso  anche  ripete  taliina  délie  «  tragédie  1» 
di  cm  si  compone  %  mentre  poi  un'  aitra  ne  deve  al  De  mulk- 
rikis  Claris  %  suscitacore  alla  sua  vol  ta  délia  Ligend  af  gôod 
fVaomen^  ;  parecchi  riflessi  delT  Atnorosa  Vhïont  ha  st^gnalaco  il 
Koeppeh;  qualcosa  délia  vedova  —  vedova,  si  noti  di  duc 
mariti  —  cosi  sanguînosamente  vimperata  dal  Cm^haccio,  pare  a 
me  di  sentire  neUa  Donna  di  Baîh  *,  sulla  bocca  délia  quale 
d  alrronde  la  confession e  sfacciata  délia  sua  vica  e  de'  syoi 
appetiti  potrebbe  fors' anche  essere  stata  messa  A^Wa  RuffiamUa^ 
cioè  da  una  composizione  attribuita  al  Boccaccio  con  moka 
insistenza^.  Facile  profezia  \\  presagire  che  nuovi  rapporti 
resulteranno  dagli  saidi  ulteriori. 

Ma  se  il  Chaucer  ebbe  famîliari  le  opère  miiiori  del 
Certaldese,  non  so  quasi  comprendere  corne  si  possa  imma^iiiare 
possibile  che  ne  abbia  ignorato  la  maggiore^  Ignoraro,  in 
quanta  non  laleggesse;  poichè  del  resto,  arrivât  fino  al  segno 
di  pretendere  che  resistenza  ste$sa  gti  rimanesse  celata^  sarebbe 
inescusabile  balordaggine,  per  via  di  ciô  che  ne  è  detto  tiella 


1.  Ten  Brink»  p.  1S5*  «  Hene  begrnneth  the  Monkes  Talc,  de  Casibus 
Virorum  lîbstrmm  »,  dicono  aj^erutnumc  i  manoscrittî  ;  e  il  «  casibus  *  si 
riflette  nel  0  isy-fallen  »  del  v,  15982,  nd  «  filkn  «  del  15999.  Le  rebxioni 
s'illustr;tnâ  ânche  per  il  coiifronto  â\  tutia  k  parte  proemîitk  del  Chaucer 
(compresi  î  v\\  t5997-ï4c>04)  colla  prefit^ionc  boccaccesca.  Quamoad  ema- 
tïazîom  specïHchc,  provjenc  dal  De  casibus  (1. 1,  c.  1  e  17)  il  trano  tonccr- 
nente  Adamo  (v,  1401^*14100). 

2.  Zenobla  (v.  142  $^-580),  dl  cuî  sarà  da  rîparlare  più  olcre,  p*  léa. 

3.  Si  capt&ce  abbastania  che  lo  ammcite  il  Ten  Brink,  p.  11 2-1  j. 

4.  Xel  o.  V  dd  Chmufrmmt  :  ArtgtiHj  XIV,  2^5-38. 

5.  Ddle  fonti  dd  Prologo,  încui  co^td  presçnia  dnicamentesè  stcssa,  ha 
îranato  per  uhimo  W.  E.  Mead  in  una  scritto  che  nelle  FtthL  &/  tbi  M*^i. 
iMti^,  Assoc.  of  Amer,  précède  immédiat  amen  te  (p.  ^88-404)  it  nostro  dcllo 
Schofidd. 

6*  Per  la  Ruffiandh%  e  per  l'atiribuzione  mî  basti  rioviare  al  Gaspan'i 
Gisâh  d,  il.  LiUr.,  II,  64  s,  e  al  Giorn.  stor.  J.  Ittkr.  iL,  XJI»  2î9»  n.  2, 
doridc  si  ricaveranno  anche  le  altre  îndicazioni  bibliografiche  occorrenti- 

7.  Pcrô  si  meraviglia  anche  lo  Skeaî  (p.  xvi  ddr  Introduxîoneallo  Stttdenfs 
Chaucer)  tiell*  auo  stesso  in  cui  dà  a  vedcre  di  pensarlo  :  •  Strtiioabbastatu», 
non  c*è  nul] a  che  niostri  che  il  Chaycer  cono^cesse,  dî  pnma  niano,  tl 
Dtfmnermf  del  Boccacdo.  •  Sytl'  incredibihti  deUa  cosa  insistono,  com*  é 
naiurale,  lanto  il  Chîarini,  Su&i*ti  Ani.,  CL VI,  352,  <)uanto  il  Segré,  ûrtk.eit. 


ORIGIl^l   DEL   FKAmELEYSS  TALE  345 

Icttem  dlnvio  e  di  dedka  air  amîco  autore  premessa  dal 
PeCTârca  alla  versione  sua  délia  Griselda.  E  sapendo  deir  opéra, 
non  <avrebbe  desiderato  di  conoscerla  da  vicino  ?  egli  cosi  singu- 
lannente  portato  al  novelbre  dalle  inclinazîoni  naturali,  corne 
mostrano  in  modo  incontrovertibile  i  fatti  ?  Vorrei  sa  père  in  che 
tempo  gli  dîventasse  nota  la  pietosa  storia  délia  marchesa-vilLma. 
Se  cïb  avveîine  comunque  avanti  il  1578,  a  nessuno  sari  lecito 
pretcndere  che  ail'  appâta  mento  del  desiderio  man  cassera  le 
occasion i.  In  quell*  anno  il  Chaucer  fu  mandato  in  Lombard ia 
ai  Visconti;  e  pressa  i  Viscunn  di  libri  non  si  paiiva  diferto  \ 
E  quand'  anche  si  pensasse  che  appunto  cola  gli  venisse  alla 
mano  ta  Grisclda  pcirarchcsca,  ù  poco  concepibile  che  subito 
conosciuta  tjuella  egU  non  sî  desse  alcun  pensiero  di  scorrerCj 
non  foss'  altro.  Topera  per  la  qualt^  il  mirabile  saggio  doveva  aver 
suscitaco  in  lui  interesse  vîvissimo'.  Ma  poi,  ritardando  fino 
a  questo  moniento  la  conoscenza  del  Decameron,  si  va  contre 
ad  ognî  verosimiglianza.  Se  nel  1378  il  Chaucer  fu  in  Italia, 
cera  venuto  di  gtà  sei  anni  înnanzi.  Ed  allora  vi  era  rimasto 
molli  mesij  conducendosi  pressochè  di  sicuro  anche  nella  To- 
scana  e  precisamente  in  Firenze  ^  ;  ed  appunto  a  questa  andaia 
si  riporia  univcrsalmente  la  sua  trasforniazione  lettcraria*  Che 
in  Firenze,  nella  cîttà  del  Boccaccio,  egli,  poeta  appassionato, 
venutosi  certo  a  manifestare  uonio  di  lettere  con  coloro  coi  quali 
ebbe  a  iraitare,  non  sentisse  alnieno  parlar  molto  di  Messer  Gio- 
vanni e  non  acquistasse  notizia  délie  opère  suc  principali,  pensera 
isoltanto  chi,  per  amor  di  una  tesi^  non  rifugga  dagli  assurdi, 

E  accanto  a  quest'  ordine  di  considerazioni  viene  a  coUocarsene 
un  altro.  Dello  schéma  dei  Canlcrbury  TaUs  dîce  il  Koch  :  «  Si 
dovrebbe  mai  a  un  cosi  insigne  poeta,  al  fondatore  dell*  arte 
poetica  inglese,  al  crcatore  di  quella  Ungua,  al  padre  dell*  umo- 
rîsmo.  si  dovrebbe  mai  a  un  genio  cosiffatto  non  voler  consen- 


î*  V,,  a  buon  como,  oWdda^  Indii^hii  sulh  Uhntîa  Vhcmko-Sfmxtica 
M  Gisiflh  di  Piivfj,  t.  H,  Milano,  1879,  p.  Vï  sgg.  ;  Magesta,  /  Fhcùnîi  e 
ih  S/oma  fief  Citsîelh  di  Pavhu  Mibrio^  îSHj,  I^  112-17, 

2,  «  EmesçinerUeblingsdiditiingen  »,  chiama  il  leti  Brink  k  Griselda, 

n,  171- 

î*  V,  Ten  Bri>;k,  Ckmtr*  Situikn  ^nr  Gt^schkhk  sehttr  Entu^kkim}^  nmi 
^r  Chren^l^-k  uimr  Sthnjkn,  Pane  prima,  rimasîd  unica,  Mûnsttr.  1870, 
p.  180-81  (n*  VI  ), 


250  p.    RAJNA 

tire  tanto  di  fantasia  da  poter  ideare  da  se  questo  piano  '  ?  »  Belle 
frasi  e  nu  IF  altro.  Il  foito  si  è  che  il  Boccaccio  stesso,  seconde 
spero  di  aver  mostrato  nello  scritto  sulle  Tredici  Questioni, 
non  arriva  al  suo  disegno  se  non  per  gradi;  e  il  fatto.si  è  che 
prima  di  lui  non  abbiam  nulla  in  Europa  che  propriamente  cor- 
risponda.  I  Sctte  Savi,  voluti  mettere  al  posto  dell'  opéra  sua 
dal  Sandras^  —  insieme  colla  Disciplina  Clericalis,  coWocsLia  loro 
irragionevolmente  al  iianco  — ,  sono  ben  altra  cosa;  ivi  la  comice 
è  essa  stessa  parte  essenziale  del  quadro;  il  libro  non  ci  pré- 
senta già  una  brigata  novellatrice  per  mero  passatempo.  E  senza 
paragone  più  lontana  ci  sta  la  progenie  del  Paiiiatanira,  Corne 
poi  fu  apparso  il  Decanienm,  tutte  le  raccolte  congeneri,  e  moite 
anche  délie  non  congeneri,  si  manifestano  figliuole  o  nipoti  sue. 
I  Canterbury  Taies  flirebbero  eccezione.  Il  fenomeno  —  g'uardate 
caso!  —  del  pari  che  in  Italia,  e  solo  pochi  decennii  dopo,  si 
sarebbe  prodotto  presso  di  un  popolo  in  condizioni  tanto  difFe- 
renti  dalle  nostre  c  di  tanto  più  immaturo. 

Il  caso  riuscirebbe  nondimeno  amniissibile,  se  Tincorniciatura 
inglese  trovasse  un*  altra  spiegazione  sodisfacente.  E  trovaria 
parrebbe.  L*oste  di  Southwark  propone,  od  anzi  impone,  ai  pel- 
legrini  il  partito  del  raccontare  novelle 

to  shorte  with  your  weye 
In  ihis  viage; 

(V.  793-94) 

•((  per  accorciare  la  via  )).  Ora,  non  soltanto  il  discorrere,  cosa 
di  cui  sarebbe  perfino  ingenuo  far  parola  ',  ma  proprio  anche 
il  novellare,  doveva  con  questo  scopo  essere  in  uso  durante 
gl' interminabili  viaggi  del  medioevo^.  Il  Chaucer  si  sarebbe 
dunque  inspirato  alla  realtà. 

La  realtà  non  vorn\  essere  perduta  d'occhio;  ma,  guardando 
con  attenzione,  si  vede  come  tra  essa  e  la  supposta  sua  immagine 
vi  sia  molta  diffcrenza.  Altro  c  il  fatto  che  là  dove   due,  tre. 


1.  l'.mrl.  St.,  I,  293. 

2.  Ncir  FJiuk  a  me  nota  solo  di  seconda  mano.  Mi  ragguagliano  sul  punto 
attuale  l'Ebcrt,  ]ahr.  f.  nvn.  u.  f//;^/.  Lit.,  IV,  104,  e  il  Koch,  nel  luogo 
citato  dianzi. 

3.  V.  nel  nostro  Prologo  stesso  i  v.  773-76. 

4.  Rinvierô  aile  mie  Fonti  iJelF  OrhimJo  Furioso,  2«  éd.,  p.  236. 


ORIGINI    DEL   FRAWKELEYSIS  TALE  25I 

quattro  persone  cavalcavano  o  camminavano  insieme,  questi  o 
quegli  fra  loro,  ed  anche  tutti  successivamente  *,  intrattenessero 
con  un  racconto  il  compagno  od  i  compagni,  altro  il  porre  chc 
una  brigata  di  trenta  persone  (anzi,  par  bene,  qualcuna  più) 
si  appigliasse  a  un  partito  sifFatto.  Che  razza  di  voci,  non  mai 
sentite  sulla  terra,  bisogna  prestare  ai  narratori,  se  si  vuole  che 
essi  potessero  essere  uditi  da  tutti  !  Fossero  ahneno  a  piedi  !  Ma 
no  :  sono  montati  su  cavalcature;  il  che  rende  senza  confronto 
più  lunga  la  schiera,  ed  aggiunge  per  soprappiù  uno  strepito  di 
passi,  quale  ognuno  puô  figurarsi. 

Si  dira  che  il  mio  è  un  sofisticare  e  che  non  tengo  conto 
deir  elaborazione  fantastica  ;  e  mi  si  ricorderà  che  nemmeno 
la  brigata  novellatrice  del  Boccaccio  riproduce  la  realtà  vera  ^. 
Ma  in  quel  caso  appunto  si  vide  corne  al  disegno  non  reale  del 
Decutnerôn  sia  preceduto  quello  ben  reale  del  Filocob  K  Per  il 
Chaucer  nuUa  ci  dà  un  motivo  qualsiasi  di  supporre  una  fase 
antécédente;  una  fase,  poniamo,  in  cui,  invece  di  novellare 
soltanto,  si  novellasse  e  si  discorresse  di  argomenti  svariati. 
Tutto  ciô  che,  tenendosi  su  codesta  strada,  s'immaginasse  per 
rendersi  conto  délie  cose,  dovrebb'  esser  cercato  tra  le  nubi,  e 
più  lontano  ancora.  E  una  volta  che  li  accanto  sta  il  Decameroriy 
al  quale  non  ce  che  da  volger  gli  oCchi  per  vederci  e  poterne 
togliere  ciô  a  noi  occorrc,  io  non  so  perché  gli  occhi  si  dovrebbe 
ostinarsi  a  farli  spaziare  pel  vuoto. 

Ne  fra  la  cornice  del  Decamerbn  e  quella  dei  Canterbury  TaleSy 
pur  cosi  diverse,  mancano  convenienze  speciali.  Di  eloquenza 
inconfutabile  sarebbe  una  segnalata,  non  so  se  primamente,  dal 
Ten  Brink*.  Una  pestilenza  fornirebbe  l'occasione  anche  al  pel- 
legrinaggio  inglese  :  i  personaggi  del  Chaucer  sarebbero  incam- 
minati  a  Canterbury  per  ringraziare  san  Tommaso  «  fur  die 
glùcklich  uberstandene  Seuche  ».  Non  capisco  tuttavia  corne 
ciô  si  possa  dire.  La  turba  (i  personaggi  nostri  ne  sono  una 
frazione),  che,  venuta  la  primavera,  s'avvia  a  quella  volta 


1.  Trasporto  alla  vita  reale  ci6  che  mi  è  dato  dal  Pahiwedh  :  V.  Fow/i, 
p.  267. 

2.  /?oy/iJ/i/i7,  XXXI,  75-76.  ♦ 

3.  Ih.,  p.  35,  70-74,  77- 

4.  Gesch.,  p.  146. 


F,    RApîA 

The  holy  blisful  martîr  for  lo  seke, 
Tliàt  hem  halh  holpen,  whao  ihat  thcy  were  sckc, 

{V.  ,7-18) 

a  me  par  costituita  da  persooe  guarite  da  infermità  loro  perso- 
nalij  non  da  una  malattia  epidemica  '-  Lasciando  stare  che  allora 
si  sarebbe  costretti  a  supporre  che  anche  il  Chaucer  avesse  avuto 
la  peste  o  si  prendesse  il  gusto  di  attribuirsela,  poichè  al  pelle- 
grinaggîo  panecipa  lui  pure,  ognuno  vedc  quanto  sarehbe  strano 
il  porre  che  i  pellegrint  fossêro  staii  tutti  malati  effettivamente, 
anzichè  essere  in  buona  parte  gente  che  avesse  faito  voio  di 
andare  al  Santo,  se  il  flagello  li  avesse  risparmiaii,  E  s'aggiunge 
che  nel  tratto  înîzuile  a  cui  appariengono  anche  i  versi  citati, 
il  poeta  parla  di  quel  che  avvicne  ad  ogni  ritorno  délia  buona 
stagione,  non  di  un  faito  seguito  in  un  derermînato  anno. 

Ma  se  quesio  riscontro  non  regge,  o  si  riduce  a  una  sempUcc 
ombra,  altri  due  mi  accade  di  scorgerne.  A  quel  modo  che  nd 
Lkcatnerèn  ciascuno  dei  personaggi  deve  ogni  giorno  recitare  la 
sua  novella  e  si  trova  alla  fine  aveme  dette  dieci,  nei  Canierhury 
Talcs,  stando  al  disegno  primitivo^  che  è  il  solo  valevole  per  noi, 
il  turno  si  doveva  ripetere  quattro  volte;  e  che  ci6  s*annunzi  e 
siabilisca  anticipatamcnie,  v.  792-97  ^  mentre  poi  non  si  riescc 
punto  a  fare  che  sîa,  indica  bene  la  présenta  di  un  esemplare 
dove  qualcQsa  di  analogo  s'avesse  iit  realtà  :  condizîone  oitima- 
menie  adempiuta  dal  libro  boccaccesco,  mentre  i  Sfiti  Sifi'i 
radempirebbero  maie,  e  anicamente  in  redazioni  delle  quali  non 
è  punto  attribuibile  al  Chaucer  la  conosccno,  O  ci  sarebbe  ami 
chi  volesse  supporgli  noto  il  Syntipas  greco,  o  il  Lihro  de  lus 
mgûnfws  spagnuob,  che  primi  crasportarono  in  lingue  europee 
quel  lipo  orientale,  dove  ad  ogni  Savio,  in  luogo  di  un  solo 
racconto,  vennero  ad  assegnarsene  due,  narrati  tuttavia,  si  noti 
bene,  da  ciascuno  di  seguito  nel  giorno  già  suo,  non  con  rinno- 
vata  vicenda  ^?Nè  la  mente  sarà,  credoj  più  disposa  a  corrcrc 
alla  SkTria  uosrra  di  Sufano^  dato  che  dietro  alla  redaisione  in 


I.  Perd  mche  il  Brjuidl,  FMXTL^Gmndrm  âtr  ftrmm.  Phtlel,^  i*  cd,,  II,  ^ 
éjS,  ^codo  suo  U  fîseontfo  dcl  Tcn  Bdnk,  gU  moiza  sciua  ftviwdeTscne  le 
gantlie,  a  «  Sci>die  »  snslitucoda  «  Krmnkhcit  ». 

t.  V.  CoMFAitrm,  Ruén-he  mi.ytrtif  0I  Lihrû  Ji  SMihjJ,  ncïle  Memte>H§ 
dél  R.  Utii.  Umi*.  di  Se.  e  UtL,  CL  J*  Ltti,  vo!,  XI»  Mibno.  1S69;  p,  9-10, 


ORIGINI   DEL   FRANKELEYNS  TALE  2$^ 

ottava  rima,  troppo  tarda  per  entrare  in  campo,  ce  ne  sia  stata 
una  anteriore,  di  cui  quella  sia  semplice  versificazione  \ 

Ho  detto  che  nei  Canterbury  Taies  il  quadruplice  compito  per 
ogni  individuo  della  comitiva  è  anticipatamente  annunziato  e 
stabilito.  Lo  annunzia  e  stabilisée  Toste;  il  quale,  dopo  essersi 
fatto  concedere,  ed  avère  esercitato,  Tarbitrio  di  stabilire  la 
legge,  vien  corne  ad  imporsi  da  se  stesso  quai  sovrano  per  tutto 
il  viaggio  : 

And  for  to  make  yow  the  more  mery, 
I  wol  my-selven  gladly  with  yow  ryde, 
Right  at  myn  owne  cost,  and  be  your  gyde. 

(V.  804-6.) 

Ed  ecco  un  altro  riscontro  col  nostro  libro,  e  un  riscontro  che 
accennaancoressoaderivazione.  Chè  il  concetto  di  quella  curiosa 
creazione  di  un  signore,  dove  il  popolo  non  fa  se  non  consen- 
tire,  e,  meravigliosamente  docile,  ail'  assenso  accompagna  perfino 
le  preghiere  (v.  812-20),  presuppone,  oso  dire,  il  libero  e  spon- 
taneo  insediamento  dei  re  e  delle  regine  del  Decamerbn.  E  c'è 
motivo  che  si  parli  anzitutto  del  Decameroriy  piuttosto  che  del 
FilocolOy  perché  in  questo  le  novelle  sono  eccezione,  non  regola, 
quai  semplice  varietà  delle  Questioni  d'amore,e  perche  la  sovra- 
nità  deir  oste,  del  pari  che  quella  dei  suoi  riscontri  nelle  «  Dieci 
Giornate  »,  si  estende  ad  ogni  ordine  di  cose,  a  tutto  Tanda- 
mento  della  vita.  Anche  il  Filocolo  tuttavia  puô  pretendere  ragio- 
nevolmente  ad  una  partecipazione,  per  via  dell*  ufficio  di  «  giu- 
dice  »  che  Toste  attribuisce  a  se  stesso  e  che  dalla  turba  gli  è 
confermato  *  ;  egli  giudicherà  della  bontà  comparativa  delle 
novelle,  a  quel  modo  che  la  Fiammetta  del  giardino  napoletano 
giudica  le  Questioni. 

Sicchè  il  Chaucer  conobbe  —  non  posso  dubitarne  —  il 
Decamerànj  e  al  Decameron  è  da  riportarc  la  concezione  dei 
Canterbury  Taies,  Cosi  nella  sua  serenità  ha  continuato  a  pen- 
sare  la  scienza  germanica  '  ;  cosi,  segnatamente,  giudico  il  Ten 


1.  V.  Ramanid,  VU,  569-70,  388-89. 

2.  V.  798-803,  807,  816,  820.  Toglie  ogni  dubbio  che  gli  altri  luoghi 
potessero  lasciar  sussistere  il  v.  3 16,  «  And  of  our  taies  juge  and  r^portour  ». 

3.  Segnalerô  VEben,  Jahr.  f.  rom,  u.  en^l.  Lit.,  IV,  104;  il  Kissner  —  al 
quale  da  W.  Hertzberg,  ib.,  VIII,  1 54,  si  attribuisce  ben  meritamente,  contrap- 


2)4  P'    RAJNA 

Brink  *  ;  e  il  parère  di  un  uomo  di  ranto  valore,  in  un  domi- 
nio  nel  quale  ognuno  gli  riconosce  singolarissima  competenza, 
basterebbe  da  solo  a  hilanciare  non  so  quanti  dissensi*  Clie 
quakhe  impulso  indetermîiiato  poss.i  essersi  ricevuto  d  altronde, 
che  altri  coefficient!  si  siano  poi  venuti  ad  aggiungere^  non 
sigïiifica  nylla  per  il  problema  fondamentale.  Ne  mi  fa  ostacolo 
la  differen^a  di  fattezxe.  Anche  net  monde  délie  idée  si  puô 
esser  figli  di  taie  a  cui  poco  o  punto  si  assomigli,  anzichè 
di  quakunQ  con  cul  la  somiglianza  apparisca  maggiore*  Mag- 
giore  per  più  di  un  rispetto  sarebbe  colla  cornice  imma- 
ginata  dal  Sercambi,  Questi  pure  conduce  ia  sua  comiliva  a 
viai^iare  *;  e  se  parte  délie  novelle  sono  narraie  nelle  città  dove 
la  brîgata  si  ferma,  altre  sono  dette  în  cammino  V,  non  divcr- 
samente  dalle  chauceriane,  e,  beninteso,  col  medesimo  intento 
di  cacciare  la  noia  e  di  far  parer  brève  la  strada  ♦.  S'aggîunga 
poi  che  la  persona  cui  è  commesso  il  governo  —  a  il  preposto  », 
corne  qui  si  cliiama  —  rimane  sempre  la  stessa,  in  cambio  dî 
mutar  giornalmente  ^  Che  se  dalla  cornice  si  pona  un  pochino 
lo  sguardo  sul  quadro,  il  Sercambi  si  a%^ncîna  al  Chaucer  di 
quanto  si  allontana  da!  Boccaccio  nel  trovar  buona  qualsivpgUa 
materia  narrativa,  senza  distinzione  di  sorta:  e  cosî,  per  limi- 
tarmi  a  pocbi  esempi  spiccati,  colla  storia  di  Piramo  c  Tisbe  d 
offre  un  riscontro  per  quella  che,  pur  non  essendo  profferito  il 


poGcndoIo  al  Sandris,  «  eîn  klârer  durch  keînc  vorgefa&ste  Meiaung  oder 
panikubre  Interosen  getrùbier  Blick  »  — -,  p,  76  ^  il  Brandi,  /*  £^^7-  Stuotiâ  tl 
Kûrtlng,  Gruftdrhs  dtr  Gt^hkhie  drr  tn^lhchiu  LiUrdtttt  ^  MûnstçT,  1SS7» 
p.  169. 

1,  Si  Icggano  anenumentc  le  pagme  14  V4^*  ^*^^  •  attcn lamente  1^ 
perche  in  utu  riîcensione  pubblicata  nell'  AngUa,  t.  XII,  du  R*  W[ùlkcr]  ne 
vcdo  rbssunto  in  modo  mesatio  il  con  tenu  10  (p.  475), 

3.  V.  b  «  Prcfaiione  »  ûtà  Renier  aile  Nm^îU  itadite  di  Gïovanki 
SERCJkMjt]  tratt€  dû!  Codk4  Trmdihtm  CXCIlh  Torino,  iSS^,  p,  ui-Ltn. 

î*  ih.^  p.  LV-LVi.  Ma  â  me,  desîdcroso  di  rjgguaglî  icstunii,  ne  ha  forako 
k  pronia  e  iroppe  volte  sperimcntata  cortesta  dd  dotto  bibliotecario  delb 
TrivulEiana,  Emilîo  Mona. 

4.  Tra  gli  e&empi  favoriumi  dal  Mot  ta,  scdgp  qu&to,  che  précède  mDa 
novelU  V,  De  mmm^  jusHtiû  i  «...  Et  peniQCo  che  il  camma  non  Increscha 
aQa  brigata,  fiie  pregaïo  Vûiùtc  che  dovesse  passarc  il  caniino  eoo  quakhe 
dilettevote  novclla,  fine  che  â)  bel  Ci^icUr  di  Prjio  f^ix  la  su4  posjia.  • 

|.  P.  Lti,  e,  testo,  p.  j-6* 


ORIGINI    DEL   FRANKELEYNS  TALE  253 

nome,  dirô  di  Coronide,  emanata  del  pari,  sebbene  ingrossata 
con  tutt'  altre  acque,  dalle  Metatmrfosi  di  Ovidio  '  ;  al  fianco  di 
Virginia  mette  Lucrezia  ^;  al  miracolo  del  fanciuUo  devoto  délia 
Vergine,  che,  sgozzato  da  Giudei,  puô  far  conoscere  lui  stesso 
il  delitto  e  provocarne  la  vendetta,  dà  per  compagno  il  miracolo 
délia  Vergine,  che,  parlando  e  stendendo  la  mano  a  benedire 
da  una  pittura,  induce  un  Giudeo  a  convertirsi  '.  Con  tutto  ci6 
non  isperi  il  Giovanni  lucchese  di  sbancare  il  fiorentino,  sebbene 
una  conoscenza  dell'  opéra  sua  sia  cronologicamente  possibile-», 
e,  con  un  po'di  sforzo,  si  lasci  anche  mettere  in  rapporto  col- 
Tandata  in  Lombardia  del  1378.  Se  mai  (ne  inclino  troppo  a 
pensarlo)  al  Sercambi  non  sarebbe  da  consentire  che  un'  azione 
modificatrice  ;  e  a  rifiutargli  la  parte  principale  sono  indotto  da 
ragioni  d'ordine  générale,  anzichè  dalla  divergenza,  non  abba- 
stanza  conclusiva,  per  quanto  ragguardevole,  dell*  essere  nel  suo 
novelliere  commesso  ad  una  persona  sola  TufBcio  dell'  intratte- 


1.  Chaucer,  Maunciples  Taie  :  Sercambi,  Novelle  inédite,  93,  p.  326. 

2.  Chaucer,  Phisiciens  Taie  :  Sercambi,  Nov.  itieJ.,  26,  p.  109. 

3.  Chaucer,  Prior esses  Taie  :  Sercambi,  Nov.  in. y  25,  p.  105. 

4.  V.  Renier,  Prefaz.,  p.  l  e  lviii.  Naturalmente,  sarebbe  da  pensare  alla 
redazione  del  misterioso  Codice  Baroni  (//'.,  p.  xlix  sgg.),  posto  che  Tipotesi. 
schizzata  dal  d'Ancona  e  dal  Renier  accuratamente  disegnata,  che  quella 
redazione  costituisse  una  forma  primitiva  deir  opéra,  risponda  alla  verità.  Ma 
essa,  pur  avendo  molto  per  se,  non  è  al  di  sopra  dei  dubbi.  Ci  sarebbe  il  caso 
che  si  traitasse  invece  di  un  rimaneggiamento,  Dio  sa  di  chi.  Che  il  codice 
non  fosse  autografo  del  Sercambi,  corne  Bernardino  Baroni  pretendeva, 
résultera  poco  dubiubile  a  chi  esamini  bene  e  confronti  colla  lezione  trivul- 
ziana  Tunica  novella  trascritta  di  là  —  poniam  pure  con  molto  arbitrio  e 
scarsa  awedutezza  —  che  noi  si  conosca.  Curioso  che  il  Codice  Baroni,  sem- 
preaLucca  sul  finire  del  secoloxviii,  sia  sparito  per  l'appunto  (Renier,  Prcf., 
p.  lu)  quando  venue  sul  mercato  toscano  il  manoscritto  posseduto  ora  dalla 
Biblioteca  Trivulzio.  Mi  comunica  il  Motta,  che  esso  fu  offerto  al  Marchese 
G.  G.  Trivulzio  dal  libraio  fiorentino  Molini  con  lettera  del  17  novembre  1807  ; 
e  Taffare  fu  conchiuso  al  principio  del  1808.  Naturale  che  la  vecchia  idea  che 
i  due  codici,  e  conseguentemente  le  supposte  due  redazioni,  siano  in  realtà 
una  cosa  st^a,  sia  tentata  di  rimettcr  fuori  il  capo.  Ma  essa  deve  anche 
ritrarlo;  poichë,  per  quanta  poca  fiducia  si  voglia  riporre  nell'  accuratezza 
degl'  inforraatori  nostri  Bernardino  e  Luigi  Baroni,  restano  a  stabilire  la 
distinzione  dati  non  contestabili  di  fatto. 


256  P,    RAJNA 

nere  con  racconti  la  brigata,cîoè  a  \n\  medesimo  \  Un  servigio 
tuttavia  il  Sercarabi  rende  in  ogiii  caso  a  noi;  giacchè  la  dériva- 
zione  non  tmpugnabile  m  nessuna  maniera  del  disegno  suo  dal 
boccaccesco^  mostra  lôIT  evidenza  delT  esempio  corne  ne  possa 
âlcrettanto  bene  derivare  quello  del  Chaucer.  Non  occorreva 
neppurej  corne  si  vede,  un  grande  ingegno  per  sostituire  una 
comitivain  moto  alla  brigata  fissa  del  Decameràn.  E  al  Chaucer, 
meravigliosamente  disposto  air  osservare,  i  viaggi  suoi  propri^ 
olrre  air  idea  fondamentale,  ebbero,  credo,  a  fornire  il  mezzo 
dt  anûvaria,  facendogli  successivamente  incontrare  tipi  anche 
più  svarîati  di  quelîi  che,  scegliendos  eglî  venne  a  rapprescntare 
tutti  rîuniti  insieme.  Mi  si  lasci  andare  più  in  là  coU'  immagi- 
nazione,  e  figorarmî  che  le  reminiscenze  del  Decameràn  e  la 
realtâ  vissuta  si  assocîassero  nella  mente  del  Chaucer^  produ- 
cendo  Tembrione  dei  Canlerbury  Taies,  appunto  per  via,  mentre 
il  cavallo  avanza  passo  passo  e  il  suo  cavakatore  ha  tutlo  Tagio 
di  mcditare. 

Ho  detto  tt  le  reminiscenze  del  Decameràn  »*  Per  consentira 
air  opéra  del  Boccaccio  Tazionc  che  io  son  convinto  spet tarie, 
non  occorre  davvero  che  il  poeta  inglese  se  la  trovi  attualmcnte 
(ra  le  mani.  E  la  conoscenza  acquis  ta  tane  pu6  esserc  di  fresca 
data  (chi  ci  assicura  che  il  pensiero  di  emularla  non  nascesse  fin 
dal  primo  viaggio  in  Italîa?),  e  puo  anche  risalire  a  molti 
anni  addtetro,  Quindi  si  vede  più  che  mai,  quanto  sia  lUegit- 
tima  la  deduzione  vol  ut  a  ricavare  dal  non  essersi  accertàte 
relazioni  dirette  di  novella  a  novcUa  ^  Bensi  la  memoria  non 
basta  nel  casa  spéciale  donde  siam  mossi,  e  a  cui  è  ora  da  far 
ritorno.  Si  avverta  tuttavia  che,  pur  non  avendo  più  a  dispo- 
siziooesua  il  Decmmrèn  tutto  intero,  il  Chaucer  potrebb'esser- 


I.  Rekïer,  Prêt,  p,  ui-un,  lv,  e  poi  il  tcsio,  verso  U  fine  dd  Procniio. 
p.  8,  Dato  che  la  redarione  baroniana  fosse  Toriginaria,  avrebbc  per  \vm 
importanza  il  sapert  sç  il  novellatore  ri manesse  coûtante  andic  \n  essa.  Chi  per 
una  frase  dt  Bernardino  Baroni,  «  novelle.  raccontacc  DA  una  brigata  «^ 
ùp,  d/.,  p,  XLCX,  si  credesse  in  diritto  dl  afferaiare  nsolutamcnte  che  no, 
farebbe  iroppo  assegoarnentû  sul  rigûre  ddte  parole. 

1.  hx  confûrmiïa  cra  ben  maggiore  col  ïesto  baron îa no;  il  qilâlc  perunto 
neir  jpotL-si  che  ravvisa  m  cssa  \\  primo  getio  assume  Tuffido  di  foriDa 
mcdiairicc,  o  dî  trapasso.  \%  la  soliia  Prçfazionc,  p.  xux-Ur  Lvni. 

f.  P.  145. 


ORIGINI    DEL   FIUNKELEYXS  TALE 


257 


I 
I 


sene  procaccîato  qualche  parte.  E  si  capîrebbe  che  attraesse  in 
modo  particolare  il  suo  desiderio  la  Giornata  dccima,  che  dava 
compimento  ail' opéra,  che  conteneva  !a  Griselda^  che  per 
nobiki  costante  di  contenuto  s'inal^ava  suif  altre  tutte.  Ad  essa, 
ramnientiamocene,  insieme  colla  novella  di  Messer  Ansaldo, 
appartienc  anche  Taltra  di  Messer  Torello,  a  cui  siamo  statî  por- 
tât! da  un  curioso  indîzio^ 

Quell*  indizio  nondimeno  è  un  vîrgulto,  aggrappati  al  quale 
noi  non  vorremmo  dî  ccrto  star  sospesi  sopra  un  abisso. 
Quanto  aile  ragioni  ricavabili  dal  Fratàekyns  TaUt  convien 
riflettere  che  il  più  délie  somîglianze  sono  comuiii  al  Deçà- 
mmm  e  al  Filûcoh,  e  che,  data  un'  ordittira  consimile,  conve^ 
nienze  minute  vengono  facilmente  ad  accompagnarcisi  per 
nuova  produzionej  e  non  per  derivazioiie  soltanto.  Ne  viene  che 
anche  un  fautore  dell'  origine  boccaccesca  di  c|uel  racconto, 
deva  essere  dispos to  a  rinunziare  alla  presenza  attuale  delF  uno 
ti  deir  altro  dei  due  modelli  possibili.  Ne  la  scelta  saprebbe 
allora  esser  dubbia,  Ben  più  che  il  fatto  délie  convenienzc  mag- 
giori,  riesce  éloquente  la  circostanza  che  solo  col  Filocolo  ci  si 
siano  manifestati  di  quegli  appigli,  che  costituiscono  un  aggan- 
cîamento  con  questa  opéra  %  e  conseguen  te  mente  con  questa 
versjone. 

Di  fronie  al  Frankdeym  Taie  il  FUùcoÎq  potrebbe  dunque  ba- 
stare  a  retîder  conto  cosi  dellesomiglianze  proprie  corne  di  quelle 
del  Decanurîm.  Ma  per  il  fatto  stesso  che  allora  tutio  riposi  sulle 
sue  spaile,  diventerà  più  che  mai  difficile  e  pericoloso  il  disfarsi 
di  lui  pure.  Se  anche  dopo  il  rafFronto  minuzioso  rimane  spazio 
per  la  congettura,  cosi  legittima  prima  *,  che  i  rapporti  fra  il 
Boccaccio  ed  il  Chance r,  quantunque  prossimi  e  pur  avendo 
Taria  d'esser  diretn,  siano  dovuti  invece  a  comunanza  di  modelli, 
quello  spazio  si  è  venoto  facendo  assai  angusto.  Délia  libertà  di 
foggiare  a  piacimento  un  modcllo  supposto,  del  quale  non 
s*abbiano  a  temere  le  smentite,  è  da  usare  con  grande  cautela. 
Per  preferîre  questa  ipoiesi  alK  altra,  di  tanto  più  ovvia  e  suf- 


i.  P.  246. 

2,  V.  p.  2^6*37. 

j;  V.  p.  2H-ÎÎ 

nia  XXXIÎ 


17 


2j8  ï>.    RAJMA 

fragata  anche  dalle  coadizioni  storiclie,  occorrono  ragioni  ben 
font.  Vediamo  se  s'abbiano, 

Una  pu6  cotisiscere  in  convenien?îe  estranee  al  Boccaccio  clic 
venga  facto  di  scoprire  tra  il  Frankekyns  Taie  e  i  parallcrli  orien- 
tali.  In  générale  non  è  dubitabile  che  lo  sent  tore  iuliano  ci 
da  una  forma  pio  arcaica  che  il  poeta  ingluse.  Mentrc  i)  giardino 
rigoglioso  di  pieno  invcroo  si  rannoda  ad  una  tradizioiie  lar- 
gamente  diffusa  ',  la  sparizione,  o  diciam  meglio  dissimulaïîione 
dellf  rocce,  costicuisce  un  tratto  necessanameute  legato  ad  una 
determinata  localizzazione,  e  perô,  anche  alF  infuori  di  alrri 
argonienti  *,  sî  dà  a  conoscere  per  cosa  relativamente  tarda. 
Tuttavia  certe  somiglianze  peculiari  coî  remotissinii  cugini  nel 
Frankfleyns  Taie  accade  di  scorgerle. 

Qutvi,  non  ahrimenïi  che  nei  riscoutri  astarici»  la  donna  è 
richiesta  e  promette  se  siessa  dirctta mente,  non  già  per  via  dî 
m<^diatori,  corne  presso  il  Boccaccio.  E  costoro  m' lianno  ben 
raria  dlntrusi.  Souo  intrusi  nondimeno  deî  quaïi  era  facilisstmo 
sbaraxzarsi;  e  pero  sulla  îoro  asscnza  non  vorrei  mai  londarmi. 

Ce  deir;iltro;  ed  c  curioso  che  ci  mctta  din*inzi  in  funxionî 
sccondarie  un  giardino  \k  dove  appunto  con  ufficîo  principale 
esso  non  apparisce*  Richiesta  e  promessa  avvengono  in  un  gîar- 
dino  cosi  nel  Frankekyns  Taie,  come  nel  gruppo  indiano  delLi 
Vetâla-panéaviittçati  ^  e  in  quello  persiano  del  Tûtî-nâmfb  ^.  E 
il  giardino  s'ha  di  nuovo  quando  la  promessa  deve  essere  adan- 
piuta  :  a  quella  volta  s'awiano  tanto  Dorigen,  quanto  Lftvanya- 
vatî  in  Gambhaladatta  ^  e  îe  consorelle  persiane,  per  le  quali 
ultime  la  cosa  ha  una  ragion  d'essere  intrinseca^  dacchè  Ioro 
creditore  é  li  appunto  il  giardiniere.  In  quesco  secondo  momcnto 
il  giardino  mi  pare  nel  Chaucer  semplice  co m segu en za  del  tanto 
discorrere  che  se  n*era  fattu   nel  primo  ^.  £  dunque  di  quel- 


1.  QuakhemikindicaiioncinDu>3iOP-LiEBRECHT,p,  251  c  475  (n,  lîvi). 

2.  W  p.   221. 

î.  V  nelbvaradi  V.  Bcttd,  Ftfdkpii/iàivim^atikd^  le  pp.  t^Ssgg.  :  Simli 
Itaiiatii  dt  Ffloît^ia  hutù-irmkû  df'trtti  du  Fr.  L.  PuLLê,  vol,  III  (1^99). 

4,  Rûttuma,  XXXÏ,  4î. 

$.  D^TîEi,  p.  14^.  Desïderando  mgguagtî  su  questa  ri'daiione  dd!â 
yttiik'fHtfUavimdîtf,  %\  potunno  avcrc  âàWo  siesso  Bcttei^  Giotu.  deita  Soc, 
Atmt.  îtitL,  voL  Vil  (ifi^î),  p.  99-1  Où. 

6.  In  ctJiil  modo  di    vcdcnf  mi  £Dn A:rma  il  duverci  vcnire    jnche  ptrr 


ORÎGIHI    DEL   FRÀNKELEms  TAIE  2^9 

Taccordo  soltanto  che  dobhîam  renderci  conto.  E  altora,  a  con- 
trastare  i  diritti  a  le  pretese  délie  redazîonî  remote  e  dissînuli^ 
si  présenta  quel  la  prossima  e  si  mi  le  del  FUûcoh^  che,  se  non 
ha  il  giirdino  essa  stessa,  se  lo  trova  dattorno,  e  in  maniera  taie, 
da  dar  luogo  a  ravvicinamenti  come  abbiam  visto  seducentis- 
simi  '. 

Stremato,  a  dir  poco,  quest*  ordine  d'argomenti,  Tipotesi 
dclP  indipeiidenza  ancora  non  rovina.  Studiosi  assidui  del 
Chaiicer  giudicanOj  o'giudicherebberOj  aliéna  aifatto  dai  proce- 
dimenti  suoi  la  meiamorfosi  délia  materia  che  la  dorivazione 
boccaccesca  condurebbe  ad  amniettere  ^.  Ne!  Chaucer  la  parte 


GâmbhalâdMta^  consîderato  che  tra  le  versionî  iodbne  ta  sua,  tion  prïmitiva 
davvero,  scrabra  esser  ta  sola  a  mener  !e  cose  cosi.  E  si  noti  con  quali  parole 
il  tesio  è  rîassuntû  dal  Bettei  :  «  Il  Itiogo  delF  appuntann^nto  era  Tangoio  sud 
del  giardîno  ove  sVraîï  visti,  *  A  un  appumamenio,  o  qtialcosa  di  simile, 
allude  anche  il  Chaucer  quatido  avvîene  Tandata,  v.  1 1807-8  : 

As  sbc  W4S  boan  to  g£>oti  th'Ç  wcy  forthrigbt 
To\\iirJ  tbe  gardid  ther-as  ihe  hid  bight; 

ne  d^ahronde  senza  accorde  prevt-niivo  si  capîrebbe,  come  Dongen  possa 
pensaj-e  dl  trovare  Aurelius  in  quel  luogo.  Ma  il  fatto  si  è  che  11  riferîmento 
non  ha  riscomrQ,  ch'  io  veda»  in  cl  à  che  prcc^ede.  Bisogna  che  il  pocta  abbia 
crcduto  di  aver  deito  cïà  che  in  rcaîtâ  non  ave  va.  E  ne  resuha  ch'  eglî  aveva 
ta  mente  pîeiu  deirîdea  del  giardîno  :  cosa  per  noi  non  indifférente. 

t.  V,  ancora  p.  256-37. 

2,  Se  la  nota  che  si  legge  alla  p.  4^2  muove  nello  Schofield  da  una  conce- 
lione  di  versa  da  quella  di  ctii  qui  si  tratta  (V.  la  nota  mia  a  a  p.  2  j  5).  egh  non 
è  meno  rîsolutamente  awerï^  a  quest'  altra,  «  Familiar  as  I  am  with  Chaucers 
mcthods,  I  regard  it  as  impossible  that  he  has  în  ihîs  instance  proceeded  as 
you  suppose  i»,  mi  dice  in  una  leitera  scritta  dopo  avi:r  Icuo  le  pagme  mie 
ncl  lavoro  sulle  Tredici  Questioni  del  Filocoh.  Col  «  giudicherebbcro  » 
întendo  di  riferirmi  segnaïamente  al  Kochj  dd  quale  é  opportuno  rîponar 
testuat mente  le  parole  p recède nîi  a  quelle,  che  a  p.  246  ho  dato  tradotte  : 
(t  Wcnn  auch  einîge  erzdhlungen  der  Canterbury  Taies  âhn  lichen  in  halls 
MQd,  wie  ein  poar  novellen  des  Boccaccîo,  so  ist  doch  durch  nichts 
nachgewiesen^  dasf  er  eine  dièse r  direct  bcnutzt  hat.  Die  ûbereinsiimmungen 
bcïder  autoren  sind  vielmehr  dadurch  zu  crklàrenT  da&s  sie  denselben  qukikn, 
fran^sischen  fabliaux,  gefolg:  sind,  Wûrde  Chaucer  dem  Decameron  sdbsc 
entiehnt  haben»  so  hàuc  er  sîchcr,  wie  wir  a  us  der  sonstigcn  bchandlung 
seiner  originale  mit  gewissheît  folgern  kOnnen,  dassclbe  in  den  hauptstilgen 
gcnau  nâchge^mt  und  dieselben  personennamen  beibehahen.  lï 


260  p.    RAJHA 

inventiva  è  per  solito  minore,  A  me  pare  nondimeno  che  il 
dedurre  d;i  questû  fatto  aiialogico  un  cnnone  assolyto,  senza 
distin^ione  di  circostanze  e  in  partkolare  di  tempi,sîa  un  far 
torto  al  poeta  \  quand'anche  non  riesca  contradittorio,  corne 
si  trova  esscre,  allorcht^  Tafermazione  venga  da  cali,  che  vogliano 
invece  supporlo  dotato  di  tan  ta  forza  créatrice,  da  aver  archi- 
tettato  da  se  i  Canîerbury  Talcs  ^,  Non  perdîamo  mai  di  vista 
che  il  nostro  racconto  appartiene  al  tempo  délia  maggiore 
maturità.  Ma  poi,  si  dovrà  bene  riconoscere  da  tutti  che,  data 
al  Fiiocolo  rimportanza  che  gli  spettava  e  scnitati  ben  addenîro 
i  rapport] 5  il  nuovo  è  vcnuto  a  scemare  d'assaî  5,  Taie  continua 
ad  apparire  la  partenza  di  Arviragus  per  Tlnghilterra  t  lo  staio 
in  cui  rimane  la  mogUe.  E  se  qui  Tispirazione  fosse  venu  ta 
dalla  Fiammetta^  tutta  intenta  a  rappresentarci  un  dolore  simîle 
a  quelle  di  Dorigen,  ancorchè  non  legittimo  allô  stesso  modo  ♦, 
e  sforzi  non  mcno  molteplici  per  procurarne  lo  svago,  fatti  se- 
gnatamente,  invece  che  da  amici  dc%'Oti,  dal  troppo  dabbene 
marito  >  ?  Un  ahra  opéra  boccaccesca  verrebbe  ad  aggiungersi 
a  quelle  che  sappiamo  essere  state  nelle  mani  del  Chaucer*  Si 
tratta  d'altronde  pur  sempre  delTatrio.  Quanto  ail'  edlficio  vero 
e  proprio,  la  sola  diversiti  ragguardevole  colle  forme  boccac* 
cesche    û    riduce    realmente    alla    sparizione  degli  scogli  di 


1,  Si  cfr.  il  moào  dt  vcdcre  che  manifesta  \\  Teiî  Brink  in  patecchi  luoghi  ; 
p,  es.,  p,  170,  180,  l8î,  E  forse  che  gîà  al  Trmhn  tmd  Crisfyik,  per  tan  ta 
parte  mera  traduz:îone,  îl  Chaucer  oon  aveva  dato  un'  împroma  sua,  dctcr- 
mir»ata  beue  dal  Kissner  in  quel  suo  esame  coniparativo,  che  il  Ten  Brink, 
Stmiifu^  p.  72  ^  dkhiara  eseguito  «  in  musterhafter  wcisc  ^  ?  Utruitîvo  poi  îo 
sommo  grado  il  fatto  che  ci  prcsentano  le  emanazioni  dclla  Taetde  :  col 
Knighks  Tnk,  chç  vicne  a  sunrogarsl  alla  prima  redixionet  confermaia  ben 
piii  ftdelç,  corne  avevano  pensato  îl  Tyrwhitt,  TEbert  (Jûhrh.,  IV,  t^%%  il 
KïssnO'  (p.  S9X  «i^llo  studio  approfondito  del  Koch  (V.  spcdalmente  p.  183); 
e  con  qucir  Amiida  and  Antie^  che^  dovunque  si  coHochî,  comunque  si 
gîudichi,  apparis<:c  una  iratiaziotie  Hberîssima  délia  tnatena  e  dei  personaggi. 

2.  11  paiso  del  Koch  che  ho  riportato  dîanzî,  précède  di  poche  ri^he  îe 
parole  enfatkhe  che  ho  tradotto  a  p.  249-50. 

%.  V*  în  particolarc  p.  235  c  ^\%* 

4*  Qualche  nguardo  mérita  dtresl  Griseida  nella  prima  fase  ddla  scpa- 
rarîonc  da  Troioto  (cosi  è  da  dire,  aniichè,  corne  %t  suolc^  «  Trojlo  »)  : 
FiimhatQ^  p»  6*,  sL  i  sgg* 

f,  V.  neircd.  Moutier  le  p.  91  sgg. 


ORIGINÎ    DEL   FRJNKELEYNS  TALE  26 1 

fronre  al  gîardino  iiivemale  '  :  diversit;\  da  non  richiedcre  per 
essem  inirodotta  nessuno  sforzo  énorme  dî  fanusia.  Già,  poiche 
gli  scogli  una  novicà  sono  di  sicuro,  se  Don  verranno  dal  Chau- 
cer,  bisogncri  attribuirli  a  qualche  rimatore  minuscolo.  E  basta 
immaginare  il  Chaucer  posto  un  giorno  lui  stesso  sopra  una 
scogliera  nell*  atteggiamcnto  di  Dorigen,  v,  11169  -"^gg-j  P^r 
aprlre  un  hen  âge  vole  adito  (e  quanti  altri  se  ne  possono  fan- 
tasticare  î)  alla  coace2ione^  ;  corne  basta  supporte  che  sia  srata 
di  fresco  tra  le  mani  sue  una  raccolta  dî  lats^  perche  cutto  cio 
che  sa  di  /ai,  principiando  dal  Prologo,  riceva  spiegazione  più 
che  sodisfacente. 

Eppure  quel  Prologo,  coU'  affermazionedi  un*  origine  che  non 
è  punro  la  boccaccescaj  continuera  a  far  da  spauracchio  per 
molti,  Accostiamoci  dunque^  e  vediamo  cosa  lo  spauracchio  sia 
in  realtà. 

Rilevaî  altrove'  come  nel  Chaucer  s'abbiano  allegazioni  di 
aatori  rispondentî  alla  verîtà.  Qui  è  il  luogo  di  soggiungere  corne 
âccanto  aile  indicazioni  vcricicre  vengano  a  mettersene  non 
poche  affaito  cervellotiche  e  îraviatrici  ^.  E  talune  di  queste  s'în- 


I*  IluNU>Pj  U,  J43,  w  *„  The  drcunistances  are  predsdy  ihe  same  as  in 
ihe  Decameron,  escept  that  the  impossibk  thing  required  by  the  hdy  is^  that 
her  lovL'f  should  remove  the  rocks  froni  ihe  coasi  of  Britany  »  ;  Kissner, 
p*  74,  "  The  Fmnkfiifws  Tah  siimmi  zu  Decameron,  X^  >»  nur  d^ss  die 
Lpkalitât  von  Itatkn  mch  dcr  Bretagne  verltrgt  ist  und  die  Bedingung  stait 
des  blûhenden  Gartens  bei  Bcccaccio  eine  Felsetiverseuung  isi.  »  Non  pare 
significative  quesu  concordanzj  d'inipncssioni? 

1,  A  ricordi  personaU  ha  pensato  anche  il  Lot,  p.  1  it^  n,  i  ;  il  quale  in 
pari  tempo  suppone  altresl,  p.  iio-n,  che  ia  conce^ionc  sia  da  ncormetiere 
con  un  trasporto  merliiiîaûo  di  enormi  macigni  dall'  Irlandaall'  Inghilterra.  dt 
oii  narra  pârtiiTolareggiatamente  —  con  attenuazîone  tuttavia  del  meraviglîoso 
—  Gaffrcdo  di  Monmouih,  VIII,  lO-ia,  e  che  è  tseguito  m  servbîo  di 
^u^W  cf  Airelius  »,  che  deve  aver  fornito  il  nome  air  innamorato  del  Chau- 
cer (V*  p.  2t2-n).  SilTatisL  assodaiione  di  elcmenti  è  certo  notevole,  e  non 
era  sfuggita  alio  Schofidd,  p.  418.  Posto  il  legame  dei  due  portemi,  non 
sanebbe  poi  facile  deciderct  se  si  venisse  dagii  scogli  ai  macîgnî  e  da  quesd  ai 
tîomî  «  Aurelius  »  e  quindi  «  Arviragus  i>,  oppufe  se  daî  no  mi  si  passasse  ai 
raacigni  e  agli  sa>gli^ 

j,  R  334. 

4*  V.  segnatamente  Hertzb£rg,  CanUrbury-Gtsdnchtm^  p.  42 1 44  (n.  67 
«71). 


262  P.    RAJKA 

contnino  prcdsamente  in  coniposizioni  di  cui  ïl  Chnucer  va  Jebî- 
tore  al  Boccâccîo^ 

Nel  Monkts  Tak  b  ricavata  dal  capitolo  98  del  libro  suo  De 
Claris  nmîieribus  la  parte  concerncnte  Zenobia%  v.  1^253-580^ 
e  in  quel  capitofo  si  conta  à\  lei  con  maggior  larghezzn.  Sennoa- 
chè  il  Chiucer  rimanda  chi  voglia  saperne  di  più 

utt-to  my  tnaistcr  Peïmrk..., 

Thaï  writ  y-nough  of  this,  I  undertake. 

(C.  r.,  V.  T4HÏ-Î30 

O  dove  mai,  se  %^orremo  far  nostro  pro  del  riiivio,  troveremo 
nel  Petrarca  di  che  appagare  il  desiderio? 

Cosa  fosse  destin  ato  a  di  venta  re  Witielida  and  Arciîe^  noi  non 
sappiamo';  e  Tignoranza  impodiscc  di  giudicar  neitamente 
anche  délia  dichiarazione  che  abbiamo  in  principio, 

First  foïow  I  Stace,  and  aftcr  him  Corinne. 

I.  KissMER,  p.  7-9;  Hertzberg,  p.  44;  Ten  Brlnk,  Sludiin,  p.  ^-M. 
Tra  le  allegarioni  crcdute  ksivt?  dd  diritti  boccaceeschî  lascb  in  dispane  i! 
«  Trophée  ji  dato  dal  v.  14123  dei  Cankrhury  Taks;  non  perché  col  Ten 
Brink  10  lu  crcda  sen^'  altro  élimina to  dalla  lezione  «  as  trophée  »,  quai 
trôfeo,  che  il  Hemberg,  Cunt.-G.,  p.  6^6,  tjahrh.  f.  r.  u.  e.  Lit.,  VWl,  155, 
SOSliEubcccongctturdl  mente  a  «t  sailh  Trophée  »;  ma  perché  il  Boccaccio  non 
è  U  in  causa,  A  \oxXo  lu  creJuto  dal  Sandras  (V.  jdhrh.  qcç.,  i,  cit**  p,  152)» 
se^îto  dal  Ktsïficr,  p.  8,  che  il  Chaucer  prunde^se  dal  Dr  atsthus  iUusîrium 
virorum  il  tratto  che  nel  Mùtikes  Tak  riguarda  Ercole.  Quai  fonte  fu  addîtico 
dallostesso  Ikruberg  il  «  metmm  •  col  qtJiile  nel  De  comd.  PhiL  di  Boe^io 
icrmiïia  il  quarto  libro  ;  e  di  coU  cmanano  infatli  i  versi  14101-16.  Quanto 
alb  stabilîmento  ddle  famo^e  colonne,  a  cui  si  annoda  rallcgazioDCi  non 
proviene  piiii  da  Boedo*  ma  nt^ppurç,  che  io  veJa  (ho  riscontrato  anche  il 
De  geatalogia  D^ûfum),  dal  Boccaccio.  Pcrô  il  «  saith  Trophée  »  c'interessii 
solo  indirenamente,  daio  che  possa  aver  spinto  il  Lydgate  a  dichîarare,  pnelu^ 
dtando  a  que*  suoi  Fa!h  0/  Princes  che  ^ono  appunto  traduitone  del  Or  cmibus^ 
w  a  boke  whlche  called  is  Tr^plie-  in  Lumbarde  tonge  »»  originale  del  Troiîus 
and  Cristytîe  :  opinione  professât-*  dal  HerubergC/à/fr/»,»  p,  1 56),  e  non  punto 
Inconciliabile  coiridea  di  W.  M.  Ross  cui  {Athnaeum,  ifiéS^  a*  scm.»  p,  401 
e  465),  che  qticl  «  Trophe  ».  w  trophy  1*,  trofco,  voglta  come  traduire 
«  Fîlostraioi»,  che,  a  dctia  del  Boccaccio,  «  lanco  viene  a  dire,  quanto  uomo 
vinto  c  abbattuto  da  amore  ». 

i.  Il  Boccaccio  traita  di  Zenobla  anch^  nel  De  casibui,  h  VIII^  c*  6. 

î-  V,  p.  247^ 


ORIGINI   DEL   FRANKELEYNS  TALE  263 

Poniam  pure  che  alla  fantastica  Corinna  s'intendesse  di  asse- 
gnare  un  dominio,  sul  quale  il  Boccnccio  non  avesse  giuris- 
dizione  alcuna.  Di  supporte  il  medesimo  per  Stazio,  non  ci  è 
consentito  dal  Knightes  Tale^  che,  se  Dio  vuolc,  si  lascia  para- 
gonare  in  modo  ben  positivo  colla  Teseide.  Ed  ivi,  allorchè, 
prima  del  solenne  combattimento  finale  che  deve  decidere  fra  i 
due  rivali  Arcita  e  Palemone,  Emilia  sagrifica  a  Diana,  il  Chau- 
cer,  che  vien  seguendo  da  vicino  Tesemplare  '  accorciandolo, 
dà  a  siffatto  procedimento,  usuale  per  questa  redazione  %  anche 
un'  espressione  aperta  col  dire  : 

And  dide  hir  thinges,  as  men  may  biholde 
In  Stace  of  Thebes,  and  thise  bokes  olde. 

(C.  r.,  V.  2295-96.) 

Ma  no  :  non  a  Stazio  ricorreremo  ne  ad  altri  antichi,  se 
vorremo  sapere  i  particolari  che  qui  si  tacciono;  bensi  aile 
stanze  73-76  del  libro  VII  délia  Teseide. 

L'essere  spogliato  a  benefizio  di  Stazio  è  cosa  che  il  Boccac- 
cio  vorrà  portare  in  pace,  conscio  com'  egli  è  che  dal  poema  di 
Stazio  ripete  effettivamente  parecchio  la  Teseide  K  Gli  cocerà 
più  assai  un  altro  caso,  ben  più  curioso  di  certo,  che  da  un 
pezzo  costituisce  per  gli  studiosi  del  Chaucer  un  enimma  tor- 
mentatissimo. 

Là  dove  nel  libro  I  del  Filostrato  Troiolo  ^  si  riduce  dal  tem- 
pio  dove  i  suoi  occhi  si  son  fissati  su  Griseida,  nella  solitudine 
délia  propria  caméra  avendo  la  donna  nel  cuore,  pi  ace  al  Boc- 
caccio  di  fare  ch'egli  dia  sfogo  ail'  animo  suo  anche  col  canto  : 

E  quindi  lieto  si  diede  a  cantare. 

(St.  38.) 

Cosa  egli  canti,  il  Boccaccio  non  dice  ;  bensi  nel  Troilns  and 
Criseyde  il  Chaucer  gli  mette  in  bocca  tre  strofe,  non  liete  di 
certo,  che  afferma  di  tradurre  fedelmente  dal  suo  autore,  desi- 
gnandolo  col  nome  di«  Lollius  »  : 


1.  Si  vedano  nello  studio  del  Koch,  Englische  Stiidien,  t.  I,  le  p.  265-66. 

2.  KiSSNER,  p.  59-62. 

3.  Si  veda  in  particolar  madoil  Crcscini,  Contribuio  agli  sludi  sul  Boccaccio, 
Torino,  1887,  p.  224  sgg. 

4.  V.  p.  260,  n.  4. 


2^4  P-    RAJNA 

And  of  his  song  noughi  oui  y  the  semence. 
As  writh  myn  autour  called  LoUius, 
Bue  pïevnly»  savc  our  congés  différence, 
I  dar  wcl  ^^yn, .................... 

E  le  tre  strofe  sono  realmente  tradujcione;  traduzione,  corne 
si  Si!  Ja  gran  tempo,  del  sonecto  tlel  Petrarca, 

S*amor  non  c,  che  dunque  è  t^uel  ch'io  sento? 

Non  per  questo  s'immaginj  che  con  u  LoUius  n  venga  qui 
dunque  ad  essere  desîgnato  il  cantore  di  Madonna  Laura; 
a  myn  autour  »  non  puo,  quanto  alT  intenzione,  riferîrsi  che 
alla  fonte  deî  poema  in  générale,  Ciô  è  cliiaro  dî  per  se  *  ;  e 
rîceve  poi  conferma  solenne  dalla  st.  237  del  L  V  : 

The  whiche  cote,  as  tdleth  LoUius, 
Deiphebc  it  hadde  y-rem  froni  Diomede 
The  strae  day, 

pone  il  Chaucer;  che  è  un  far  eco  al  Boccaccio,  VIIl,  8.  Ne 
pago  di  queste  allegazioni,  egli  éleva  al  suo  «  Lollius  w,conic 
g\h  accadde  di  ricordare  *,  anche  una  statua  nel  Hous  of  Fatne, 
dandola  compagna  a  quella  di  Omero  e  degli  altri  che 

Was  besy  for  to  bere  up  Troye* 

{V.  1472  ) 

Dopo  vaiie  ricerche  e  fantasticaggini,  tutti  oramal  s'accordano 
nel  rîienere  che  il  «  Lollius  »  provenga  dal 

Troiani  belJi  scnptorem«  Maxime  LoQi, 


1,  Corne  sarebbe  mai  concepibile  che  il  Chaucer  volcsse  a  quel  modo 
chiamare  *î  myn  autour  n  uno  scrittorc  éi  cni  avesse  trasportato  egli  stesso 
nel  pocma  una  liriea,  che  non  aveva  nulîa  che  vtîdere  con  es*o  ?  Pcrô  sî  è 
pcriomeno  esprcsso  poœ  fclicemente  il  Kissncr,  colle  parole,  p,  8,  n,  t» 
«...  wenn  er  ntin  dodi  ats  seincn  Autor  Lollius  n  en  m  und  damit  hier  £ur 
Abwei^h^liing  Petrarca  begreift...  »  Plù  logica  l>cn'vi  la  congcttum  dcl 
Kbsncr  stcsso»  che  rintru^lone  patcsse  forse  essere  avveriuta  di  g\à  neïF  cfero* 
plare  dd  Fihitrai& che  il  Cbaucer  si  tnovava  davami.  Più  logica;  ma  smenlita, 
conic  del  nesto  m'aspettavo^  dal  comune  consenso  di  tutti  i  manoscritti  —  una 
trentina  I  —  da  me  riscontfati  nelle  biblioteche  di  Fireme- 

2,  P-  11}. 


Otrcmi    DEL  FRANK ELEYNS  TAÎM  Séj 

che  «dîamo  dalla  bocca  dî  Orazio  al  prîncipîo  délia  seconda 
Epîstola  del  libro  I  '.  Fosse  poi  quel  verso  letto  in  forma  cor- 
rotta*  o  intcrpreutto  sbadatamente  n  sproposito  dal  poetâ  o  da 
predecessori  suoi,  o  servisse  sempHcemente  —  che  non  sarà  k 
supposizione  meno  probabile  —  a  suggerire  un  nome  alla  fan- 
tasia, poco  importa,  Sia  corne  si  vuole,  è  ben  certo  che  i! 
Chaucer  non  si  trovo  fra  le  maoi  l'opéra  di  nessun  a  LolHus  w. 
Al  Koch,  venuto  tra  Talcre  cose  a  immaginare  che  forse  in  capo 
air  esemplare  suo  del  Filosiraio  si  leggesse  «  Hic  incîpir 
Lollius  »  ï,  temo  assai  che  non  sarà  mai  accaduto  ne  accadrà  di 
irovare  anche  solo  un  Êiutore. 

Lo  scopo  délie  allegazioni  dalT  aspetto  solennej  cosi  di  quelle 
che  riguardaoo  il  Boccaccio  corne  délie  numerose  conripagne, 
meglio  che  da  ahri  è  stato  messo  in  luce  dal  Kissner*.  Si  vuol 
prendere  un' aria  dotta  e  accreditare  le  cosu  che  si  dîcono.  In 
forma  deteraiinata  si  mira  cola  dove  itideterminatamente  si 
tende  anche  colle  tante  allegazioni  degli  «  olde  bokes  »,  che  a 
noi  stessi  è  accaduto  di  veder  dati  per  rincalzo  a  Stazio  î.  Il 
TuQïino  dei  poemi  romanzeschi  puo  adempire  Tuftizio  d'  illu- 
strazione  efficace.  Abbiam  dunque  in  générale  un  capriccio  inno- 


f  »  Uidea  fu  prima,  a  quanto  pare,  faita  pubblîca  da  H.  G.  Lathâm,  AUjenaturHf 
i8é8, 2à&çm., p.  45 î ,  indotto  a  parîare  da  una  congetltira  infellce  strombûwtata 
uoa  5€Uirnana  prima  dil  gîornalc  insieme  con  quella  sul  o  Trophejï;  CûDget- 
tura  che  graverebbe  la  coscienza  di  W,  M.  Rossetti,  se  candidamenie  egli  non 
SI  ibsse  ftffrqiiato  a  far  pubblica  conftrisîone  del  suo  errori;  (p.  46s}.  H  subito 
cgli  dichiarà  anche  la  sua  conversione  alla  fede  del  Latham.  Il  tjuale,  con 
modcstia  non  fréquente,  Tavcva  mcssa  innaml  corne  cosa  probabilmente  non 
propHji  di  lui  solo  :  «  My  own  view,  and  ihat  I  believe  of  others,..  i>  Infatti 
giâ  pensa  va  cosi,  com'  ebbe  a  dire  pîù  tardï  (Siudmif  p.  87),  Il  Ten  Brink* 
E  i'idçâ  è  tantû  naturale^  che  a  me  pure  s*affaccià  avantî  di  vedere  che  fosse 
CQSâ  vecchia. 

a.  Il  Ten  Brink,  op.  ai.,  p.  87-88^  projjone  Tipotesi  che  il  codice  usato  dal 
Qiaucer  portasse  tf  scriptorum  w  invece  di  «  scripiorem  >i,  e  cosi  nel  verso 
scguente  «  le  legi  »  in  camblo  di  «  relegi  jj. 

î.  Prima  che  nell'  Jnglia,  III,  190,  ci6  dovrcbl>*  esser  stato  detto  nella 
vcrsîone  inglese  (V»  qui  addieiro,  p.  145,  n.  a)  del  favoro  che  10  conosco 
dâgli  BîfglmheSiuiikn, 

4.  P.  9^ 


266  P*    RAJÎJA 

cente.  Ma  pruprio  innocente  possiam  noi  dichiararlo  anche  net 
caso  del  Boccnccio  ? 

Taie  îu  lo  direi  di  biion  grado,  se  vi  fosse  qiiakhe  luogo  în 
coi  del  Bûccaccio  si  parlasse  con  termiiii  paragonabdl  a  qiielli 
che  si  usano  per  Dante  e  per  il  Petrarci  :  l'intéresse  del  Chau- 
cer  a  far  discendere  da  fonti  alte  c  fécondité  le  sue  narraseioni 
verrebbe  allora  ad  essere  couciliato  coi  doven  délia  graiitadine. 
Ma  un  luogo  siffatto  non  esiste.  Mai  e  poi  mai  il  nome  di  colui 
verso  il  qi^ale  s'hanno  gli  obblighi  di  gran  lunga  niaggîori  esce 
dalla  bocca,  La  cosa  lia  suscitato  meraviglia  da  un  pezzo  *.  E  si 
badi.  Il  Boccaccio  non  è  defraudato  unicamenre  a  beneficio  di 
personaggi  che  appartencssero  o  senibrassero  appartenere  al- 
iantichità  :  abbiam  visro  il  Petrarca  messo  al  posio  suo  per  ta 
Zenobia^;  e  conforme  alla  giustizia  non  sarà  nemmeno  cne  al 
Petrarca  sol  tan  to  rimanga  tutto  il  merito  délia  Griselda.  Che 
verso  Messer  Francesco  il  Cliaucer  potesse  senti rsi  attraito  da 
senti  menti  particolari,  di  cui  vien  naturaîe  il  chieder  conto  alla 
presunta  visita,  che  ne  riesce  efficacemenre  suffragata  e  che  lo 
vorrei  mettere  in  rapporte  con  un'  andata  a  Veneziaj  non  è  certp 
un  buon  motivo  per  far  torto  ad  un  altro.  per  toglier^ii  "îaUe 
difficolL\  il  Koch  non  vedescampo  se  non  in  un'  ipotesi,  ch'  egli 
stesso  riconosce  do  ver  a  prima  giunta  parer  strana  L  II  Chaucor 
avrebbc  ignorato,  di  chi  fossero  le  opère  boccaccesche  da  lui 
messe  a  profitto,  in  quanto  fossero  anonime  ncl  manoscritto  o 
iiel  manoscritti  che  gli  stavano  fra  le  manî.  In  cotai  modo  di 
pensa  re  il  Koch  dovrebbe  sentît  si  con  fort  a  to  non  poco  dalla 
notiîîia  che  il  FHosîrato  è  anonimo  rcalmentc  in  nientemeno  che 
sedici  dei  ventiiiette  codici,  che  io  conosco  a  Firenze  ♦•  Can 
tutto  ciô  îo  giudico  l'ipotcM  inammissibile»  Essaè  inconciliabile 


1,  Tbn  Bjumk,  Stttdif»^  p.  85  i  «  Es  ist  schon  vi^kn  au  Hall  end  gewesen, 
da&x  Chducer^  wâhrend  er  Dante  utid  Pctran^â  mit  verchrung  ncnm,  mcht 
ciii  ciniigcs  mal  dc5  Bocciccio  gcdenki  und  in  dcn  dîcscin  Ici/icrn  nachge- 
âhmten  dkhitungca  Hch auf  jf^tui  andcrc  nameti  à\s  idnc  qudlcïischrifciidkr 
berufi  •. 

a.  P,26i- 

|,  EngL  Stud.t  1,  391* 

4*  Il  moiivo  di  codcsta  condî^iQne  dî  cost  è  da  ct?rc*trc  iï*;i  Ikitû  cïw  U 
Bo<cacdo  dovettc  taccrt  il  propria  nome,  allorchèp  giavane  cÛ  ignolo,  pubbUcû 
prîmamentc  il  poema. 


ORIGINI    DEL    FRAXKELEYS5  TALE  267 

colla  conoscenza  che  il  Chaucer  manifesta,  non  già  semplice- 
mente  di  questa  o  quella  scrittura,  ma  di  tanta  pTte  délia  pro- 
duzione  letteraria  di  Messer  Giovanni;  e  ne  confermaiio  Tin- 
sostenibilità  la  dimora  prolungata  del  1372-73  in  Italia  e  la 
venuta  in  Firenze  stessa  ^ 

In  qualche  accidente  che  allora  seguisse  sarebbe  mai  da  cer- 
car  la  causa  del  singolare  contegnoPO  starà  essa  invece  nella 
moltiplicità  dei  debiti  ?  Il  problema  è  increscioso,  non  comporta 
una  soluzione  positiva  *  e  perô  io  lo  metto  volentieri  in  dis- 
parte'.  Ma  nessuno  potrà  contestare  che  il  Boccaccio  è  leso  nei 
suoi  diritti  coi  silenzi,  è  leso  colle  parole.  E  cosi  penso  non  sia 
troppo  contestabile  la  conseguenza  che  viene  a  resultarne  per 
la  questione  intorno  alla  quale  mi  sono  tanto  affaticato.  Che  il 
Chaucer  dia  come  derivata  da  tutt'  altra  fonte  che  il  Boccaccio 
la  novella  narrata  dal  Frankeleyn,  non  è  punto  un  motivo  che 
dissuada  dal  credere  che  Tabbia  potuta  prender  da  lui.  Strano 
sarebbe  invece  che,  dovendola  al  Boccaccio,  il  Chaucer  lo 
dicesse. 

Pio  Rajna. 


1.  «  Chaucer  mag  nun  wohl  den  berûhmten  Boccaccio  in  Italien  haben 
preisen  hôren  »,  dice  anche  il  Koch,  dandosi  un  poco  la  zappa  sui  piedi. 

2.  «  Die  ursache  dièses  verfahrens  zu  entschleiern,  sche  ich  keinen  weg  », 
dichiara  il  Ten  Brink,  di  seguito  aile  parole  che  ho  riportato  poco  fa. 

3.  Non  tralascerô  tuttavia  di  riferire  le  parole  espliciie  del  Segrè  ncll*  arti- 
colo  del  Fanfulla  délia  Domenica  (V,  p.  245,  n.  i),  conosciuto  da  me  solianto 
mentre  correggevo  le  bozze  :  «  Ma...  come  si  spiega  (jucl  Lollius,  che 
interviene  a  rubare  i  diritti  di  autore  del  Certaldese  non  solo,  ma  anche 
una  volta  di  Messer  FrancescoPLa  matassa  è  délie  più  imbrogliate,  ne  si  puô, 
a  mio  credere,  sbrogliare  senza  colpire  un  poco  l'Inglese,  e  accusarlo  di 
mala  fede.  Mi  pare  questo  oblio  frutto  più  di  artificio  che  di  ignoranza  :  egli 
non  hacitato  mai  il  Boccaccio,  o  nlia  cangiata  la  targhetta  alla  mercanzia, 
perché  ha  voluto  traviare  il  lettore  :  ed  è  questa  forse  una  prova  délia  co- 
scienza,  ch'  egli  aveva,  di  aver  mietuto  con  soverchia  larghezza  ncl  fertile  e 
giocondo  campo  del  poeta  del  Demmerone.  » 


RECETTES  MÉDICALES  EN  PROVENÇAL 

d'après     le    MS.    R.    14,30     DE    TRINITY    COLLEGE    (cAMBRÎDGe) 


Petit  livre  en  parchemin  (hauteur  14  cent.,  largeur  10)  com- 
prenant 136  feuillets  écrits  à  longues  lignes  par  diverses  mains. 
Les  huit  derniers  feuillets  ont  été  écrits  en  Angleterre  au 
XIV*  siècle  ;  tout  le  reste  a  été  copié  à  la  fin  du  xni'^  siècle  et 
(ceki  est  certain  du  moins  pour  les  66  premiers  feuillets),  dans 
le  midi  de  la  France.  Le  volume  a  perdu  iri  feuillets  au  com- 
mencement; en  outre,  plusieurs  des  feuillets  qui  subsistent  ont 
été  grattés  de  telle  sorte  qu'on  peut  h  peine  çà  et  là  reconnaître 
quelques  lettres.  Au  xvi*  siècle  il  était  complet.  A  cette  époque 
en  effet,  appartient  une  foHotation  qui  commence  actuellement 
au  foL  113  et  s'étend  (avec  quelques  irrégularités  vers  ia  fin) 
jusqu'au  foL  242,  C'est  d'après  cette  ancienne  foliotation  que 
je  ferai  mes  citations^  sans  tenir  compte  de  la  pagination  ^ 
moderne  (au  crayon)  qui  n'est  marquée  que  de  loin  en  loin. 

Le  foL  ir3,  qui  est  actuellement  le  premier,  a  été  gratté  des 
deux  côtés,  comme  aussi  les  suivants,  jusqu'au  foL  118  f. 
Mais,  à  la  fin  l'opérateur  s'est  lassé  :  le  verso  du  foL  117  et  le 
recto  du  suivant  sont  imparfaitement  grattés,  et  rien  ne  serait 
plus  aisé  que  de  faire  reparaître  récriture  si  la  chose  en  valait 
la  peine  ' .  On  se  proposait  vraisemblablemenï  de  faire  place 
nette  pour  écrire  autre  chose  :  ce  qui  est  certain  c'est  que  récri- 
ture supprimée  contenait  le  commencement  du  recueil  de 
recettes  médicales    qu'on   ne   peut   plus   lire    qu'à  partir  du 


l.  Grïtc  opération  ne  devrait  être  autorisée  qu'i  là  condition  de  faire  immé- 

diatymeiît  une  transcription  des  pjges  ravivées^  cat  le  seul  THcûf  qui  puisse 
être  employé  sans  inconvénient  (le  sulfliydriie  d'ammoniaque)  ne  doûne 
pas  de  risuJtAîS  permanents. 


RECETTES   MÉDICALES    EN    PROVENÇAL  269 

loi.  r  18 verso.  Ce  recueil  commençait  au  fol,  i  ij  ;  oa  lit  encore 
au  haut  de  ta  première  page  les  mots,,.,,  adsit  mbis  gracia  qui 
annoncent  le  début  d'un  ouvrage. 

Le  manuscrit  devait  être  en  Angleterre  au  commencement 
du  xv^  siècle,  car  on  a  ajouté  à  cette  époque,  dans  la  mnrge 
inférieure  du  foL  210  verso,  à  la  fin  du  traité  de  Trotula,  une 
recette  ad  pilos  dekndos,  dont  récritore  est  incontestablement 
anglaise.  Les  huit  derniers  feuillets,  que  j'attribue  au  xïv^  siècle, 
sont  ajoutés. 

Celui  qui  a  gratté  les  premfers  feuillets  a,  de  place  en  pîace, 
exercé  ses  ravages  en  d'autres  endroits  ;  ainsi  aux  ff.  126  v^, 
147  V**,  149  r°,  160  V*»,  Il  est  à  noter  qu1l  n  a  rien  attenté 
contre  les  parties  latines  du  manuscrit.  Sûrement  il  ne  s*inté- 
ressait  point  aux  textes  provençaux  et  ne  pensait  pas  que  per- 
sonne pût  s'y  intéresser- 

Le  manuscrit  de  Trinîty  est  un  recueil  d*ôpuscules  médicaux 
dont  voici  Ténumération  sommaire  : 

I  (fol,  iTî-f43  r^J.  Un  recueil  de  recettes  en  provençal,  dont 
les  premiers  feuillets,  comme  on  Ta  vu  plus  haut»  sont  mainte- 
nant illisibles.  Rubriques  en  vermillon, 

n  (fol.  143  v^  -t6o).  Un  autre  recueil  de  recettes  proven- 
çaleSj  entre  lesquelles  plusieurs  charmes.  Ce  recueil  a  été  écrrt 
vers  le  même  temps  que  le  précédent,  mais  par  une  autre  main. 
Les  rubriques  sont  de  la  même  encre  que  le  texte.  Sur  le  foL 
i6î  recto  ont  été  écrites  de  deux  mains  différentes,  trois 
recettes.  Le  verso  est  blanc,  de  môme  que  le  foL  162. 

m  (fol.  163*186).  Le  Pomum  ambre  (btin).  C'est  une  com- 
pilation de  remèdes  dont  on  possède  di%"ers  manuscrits  et  qui  a 
été  traduite  en  français  et  en  anglais.  Les  remèdes  sont  classés 
selon  la  forme  sous  hiquelle  ils  se  présentent  :  poudres,  élec- 
luaires»  pilules,  sirops,  emplâtres,  onguents'.  Le  titre  de 
Pomum  ambre  vient  des  premiers  mots  du  traité  :  «  Pomum 
ambre  dupplicaium  ad  rcuma  suspendendum,  et  contra  cerebri 
debilitatem...  » 

IV  (fol.  187-210).  Trotula^  De  ornaîu  muîierunu  Premiers 
mots  :  ^Cum  auctor  universitaiis  Deus,  m  prima  mundi  origine, 

1.  J'ai  é%i  quelques  mots  de  cet  opuscule  dans  YHxsî,  lin.di.  h  Fr*f  XXXII» 
595' 


270  ^^^^     p.    MEYEU 

rerum  naturas  sîngulas  juxta  genus  suum  dbtingueret...  a  Ce 
triiicd,  t^ui  appartient  à  i*Ccole  de  Salerne,  mais  dont  h  date  est 
encore  incertaine  et  dont  l  auteur  reste  assez  mystérieux,  a  été 
très  fréquemment  copié  au  moyen  âge,  sous  des  titres  variables. 
Ainsi,  dans  le  ms*  B*  N*  lat.  7056  (fin  du  xiii''  siècle),  il  a  pour 
rubrique  iniiiale  ;  Incipil  summa  (jue  didîur  Trottda,  Il  a  été 
publié  trois  lois  au  moins,  en  1544*,  1547%  et  15^6  »,  Mais  ces 
trois  éditions  reproduisent  le  menu-  texte,  qui,  je  l'ai  dit  dans 
un  précédent  mémoire^  est  très  rem^inié,  au    moins  dans  la 
forme*  Nous  avons  vu  qu*il  avait  été  traduit,  ou  du  moins  tar- 
gemeni  mis  à  profit  en  deux  poèmes  français  î.  Je  montrerai 
eu  une  autre  occasion  qn*il  a  été  traduit  en  prose  française.  Lej 
titre  A*  ormitu    mulkrum  s'applique  mal  au  traité  tel  qu'il  sel 
présente  dan:  notre  manuscrit  :  il  n  y  est  en  effet  question  que 
des  maladies  ou  infirmités  des  femmes  et  des  soins  à  donner 
aux  jeunes  enfants,  et  il  ne  saurait  y  avoir  de  doute  sur  l'en- 
droit où  il  se  termine,  puisqu*on  lit   au    foL  2to  verso   cet 
ex  pi  ici  t   en  forme  d'hexamètre  :  Finih    Ubro  reddatur  graîiai 
Chrhto.  é4men.  Mais  les  manuscrits  du  traité  de   Trolula  pré*^ 
sentent  des  variantes  considérables,  surtout  vers  la  fin.  Le  ms, 
B.  N.  lat.  7056  contient  (fol.  84  b)  un  Dcntijrkium  ad  denîes* 
nign^s  dealbandos^  et  (fol.   84   r)  un  ungmnîum  ad  Jiickm 
atbandiim^   qui  justifieraient  en  une  certaine  mesure  le  titre 


I.  EtptrhnrnimitiS  meàkinT^  cùniinetn  Iroiuîx  lUramiarum  iFtjriluJinum 
muhehrium^  ûnU^  m  et  ptnt  parfum^  hî\ntm\  umcum  nusqunm  autta  tdilum. 
Argoit[ûraiil;  1 544  ;  in-fol. 

1.  Mciiui  anîiqfti  omnti  qnl  luthis  Htiris  âtwnvrum  ntQrhynttn  ^tnera  cig 
rtmahû  peneiuti  suttt,  uttditiur  am^mifti  H  mw  vùlumim  comprrljtmi^  ut  rarumM 
qui  it  mrdkhtst  Utnih  titdidauttt  œmmoth  cotnuhtittr,   V\*nctiis  (Aldu^j   i  >47* 
in-faL  —  Le  xtâM  iîUitul^  Trotul^  iuratutarum  xgritudimim  ....  Hkr  unicm 
occupe  les  ff.  71-80. 

^.  Gynstcwmm^  f}oc  est  àt  mulknim  tum  aHîs  tum  gravidantm  pariattium  tt 
putrptrdmm  affatibm  et  morHi  Ithri  tf terutu  ac  ncmtlorum  altqitoi,  pattim  nnm 
pnmum  tdiSi\  partim  multo  qtmm  ûHtta  casti^atiorfs.^.'^AÛhx^  pcr  Thomam 
Gmnrramt  MDLXVI;  iiï-4".  —  Trotulj  se  irauvc  dans  ce  recueil  (col.  315) 
sous  ce  lïlru  :  Brùth  mfdia\  tibfrtijtàijt^  ficm  aliqui  Trùtukm  inepte 
nuHt^  muhfhriHm  liber  tmge  quam  anttîiai  emendahor^ 

5.  Li-J«r^us,  pp.  HS,  JOi. 


RECETTES   M£DIC\LES   EN    PROVENÇAL  l'^l 

adopté  par  le  manuscrit  de  Trinitw  De  plus.  J^  h  suite  Ju 
traiié  sur  les  maladies  des  femmes,  le  ms.  70^0  en  contient  un 
autre  attribué  Clément  à  Trotula,  qui  a  spécialement  pour 
objet  les  soins  de  la  beauté;  il  est  intitulé  Alius  îrthMus  ijui 
dkitur  minor  Trotula  \  et  les  chapitres  dont  il  se  compose  ont 
pour  rubriques  :  Je  ornatu  fdcin\  —  Je  ornatit  /<iWi»riiw,  —  i/«j- 
litfr  dentés  dealbantnr  et  munJiticantur,  -  aJ  fetorem  oris^  — 
amtra  fttorem  mulierum, 

V  (fol,  211-220).  Voici  un  nouveau  traité  sur  les  maladies 
des  femmes.  Il  est  attribué  à  un  certain  Ascarit^s  (ou  Ascarus) 
philosophiis  que  je  ne  connais  pas.  Dans  le  ms.  B.  N.  lat.  7056 
il  se  présente  avec  une  tout  autre  attribution  et  un  commence- 
ment différent.  Mais  d'abord  citons  les  premières  lignes  du  ms. 
de  Trinity  : 

ÏHcipit  epistold  quedam  brn'is  Ascari  phihsophi  ',  Ascaritanus  philosi^phus 
scripsit  hanc  epistolam  decerpiam  et  defloraiam  a  libris  phisicalibus  vinutc 
filie  sue  Margarite  de  signis  egritudinum  mulicrum,  et  cure  quas  in  grcniio 
nature  pacientes  rubore  confuse  verentur  medicis  elicere.  Hic  uutcni  Asciri 
(sic)  Qeopatre  regine  hiit  phisicus  denunciaius.  Hune  auiem  libclluni  irans 
tulit  Enricus  Constantinopolim,  familiarius  Manuel  imperatoris,  et  scripsit 
legine  Anglie. 

Do  sigm's  btitnorose  rniUricis,  Signa  humorose  maiiicis  oculorun)  dolor, 
caput  subcalidum 

Je  ne  connais  pas  ce  Henri  qui  aurait  été  familier  de  Tempe- 
reur  Manuel  Comnùne,  et  dont,  par  conséquent,  Tactivité 
devrait  se  placer  vers  le  milieu  et  dans  la  seconde  moitié  du 
xii«  siècle.  La  reine  d'Angleterre  pour  laquelle  il  aurait  écrit 
serait  très  probablement  Aliénor  de  (iuyenne,  femme  de 
Henri  II.  Ce  qui  complique  la  question  c'est  que  le  munie 
traité  nous  présente,  comme  je  Tai  dit,  un  tout  autre  début 
dans  le  ms.  7056  '. 


1.  Premiers  mots  (fol.  84  r)  :  «  Ut  ait  Ypocras  in  libro  ijucin  de  pronosii- 
corum  sciencia  composuit,  omnis  qui  de  medicine  artis  studio  scu  fjloriam 
seu  delectabilem  amicorum  copiam  consequi  desiderat...  »• 

2.  Cette  rubrique  est  écrite  deux  fois  :  une  fois  en  vermillon  et  une  fois  en 
tncre  noire. 

}.  Voici  ce  début  (fol.  86  c)  :  «  Incipit  i^rnecea  Cleopahe  ad  Paklatiini.  Dvsi 
deranti  tibi,  filia  karissima,  et  liabcrc  volcnii  comincntariuin  turaiionis  mulie- 
rum,  laboravi,  et  eligensduosprcclarissimos  libros,  Thcodoten  et  Meuticum, 


272  P.    MEYER 

Le  traité  d'Ascarus  paraît  se  terminer,  dans  le  ms.  de  Trinity, 
au  fol.  214.  A  cet  endroit  en  effet  se  trouve  cette  rubrique  : 
Incipit  Trotula,  Le  traité  qui  suit,  et  qui  est  tout  différent  de 
celui  qui  occupe  les  feuillets  187  à  210,  commence  ainsi  :  «  De 
pas^ionibus  mulierum  utile  previdi  vobis  scribere,  superve- 
nientibus  plurimis  et  diversis  passionibus  sepius  de  matrice,  ex 

quibus aliquando  quedam  insanabiles  sunt De  moiione matricis. 

Quando  matrix  mota  fuerit,  dolor  et  sinthomata  valida  adhè- 
rent et  sicius  non  occuratur,  vulnera  erunt  in  illis  locis...  »  Ce 
début  se  retrouve  dans  le  ms.  7056,  même  plus  correct',  mais 
il  fait  partie  du  traité  attribué  à  Cleopatra.  A  la  fin  de  la  copie 
du  ms.  de  Trinity.  (fol.  220)  on  lit  Exptisit  Trotula.  Celui  qui, 
un  jour,  voudra  nous  donner  une  édition  critique  de  Trotula, 
aura  une  belle  occasion  de  faire  preuve  de  patience  et  de  cri- 
tique. 

VI  (fol.  221-228).  Traciatus  de  secretis  mulierum  cum  aliis. 
Premiers  mots  :  «  Reumatizat  flegma  ad  nares  frequentius  et 
facit  corrizam  quam  sic  curabis.    Accipe  olibanum  et  in  vino 

coque  et  ablue  inde  nares  et  fumum  ejusdem  fac  recipere » 

Tout  ne  concerne  pas  les  femmes  dans  ce  traité,  qui,  au  fond, 
n'est  qu'une  collection  mal  ordonnée  de  recettes  entremêlées 
de  charmes;  ainsi  (fol.  222  verso)  :  Ut  pili  nascantur  in  quo- 
cumque  loco...;  (fol.  223)  Unguentum  probatum  ad  artheticam, 
podagram,..;  (fol.  225)  Experimentum  probatum  contra  epilen- 
tiam...;  (fol.  226  v°)  Ad  volatilia  capienda.  A  propos  de  la 
fièvre  l'auteur  fait  mention  d'un  «  rex  Willelmus  »  que  je  ne 
saurais  identifier  ^ 

magno  ac  diligenti  studio  in  latinum  ex  greco  transtuli,  quia  bona  sunt  in 
memoria  durare.  Memineris  autem  me  tibi  sepius  preccpisse  et  jusjurandum 
a  te  exegisse  ut  nulli  tam  gloriosam  rem  facile  credideris.  Nunc  ergo,  si  eam 
perdideris,  tue  culpe  queraris.  Cupiditas  enim  hominum  non  habet  certam 
fidem.  Paciar  enim  Atheodata  dici  medica,  reginarum  (corr.  regine  ?)  Cleo- 
patre  soror  Arseones  Arsetioes  (5ïV),  que  remédia  medicinalia  quibus  sepe  usa 
sum,  et  ubi  experta,  conscripsi,  et  in  populo  tradidi.  Et  ut  posteritas  mea  bene- 
ficio  hujus  artis  aput  feminas  duret,  ante  miseria  {sic)  de  \âciis  que  mulicribus 
accidere  soient  indicandum  esse  credidi. 

Signa  humorose  matricis.  Oculorum  dolor,  caput  subcalidum...  » 
Ce  texte  est  certainement  corrompu  en  plusieurs  endroits. 

1.  Au  lieu  de  sicius^  il  y  a  si  cito  qui  est  évidemment  la  bonne  leçon. 

2.  (Fol.  227)  «  Quidam  quartanarius  a  nuUo  medico  liberari  potuii,  cui 


RECETTES  MÈDICKLES  EX  PROVENÇAL  27 J 

\TI  (fol.  229-234).  Ces  SIX  feuillets  forment  un  petit  cahier 
indépendant  du  reste  du  manuscrit,  et  qui,  par  l'écriture  est 
certainement  antérieur  de  plus  d'un  demi-siècle.  Ils  contiennent 
un  recueil  de  recettes  médicales  dont  le  texte  est  souvent  cor- 
rompu. La  fin  manque.  Premières  et  dernières  lignes  : 

Okrinn  în  quo  cocta  est  primaveris  facit  cutem  extensam  et  sine  rugis. 
S0C11S  seniper  nive  mixtus  cum  oleo  roseo  dolorem  capitis  qui  est  ex  niniio 
soictollit 

Ad  phistuiosos  microcosmi  da  os  hisdoti  (?)creniati  et  lig.^  sub  sexus  dis- 
CTcdone  cognoscatur  divisio,  et  mosculus  niasculu  et  t'emina  t'emiue  '. 

Vin  (ff.  235-242').  Ceb  feuillets  écrits  au  xiv*  siècle  et  en 
Angleterre,  contiennent  des  recettes  les  unes  en  latin,  les 
autres  (ff.  237-240)  en  français.  Voici  !a  première  des  recettes 
firançaises  : 

Pur  emfturw'  de  jambes  z  de  braz,  pertiet  la  ruge  carsuns«  si  Imincet  menu 
r  metet  en  un  pot  z  des  espèces  liesoseoc(?)  z  bren  de  furmeni  z  le  siu  de 
mutun  ;  si  lesset  quire  ensemble,  que  il  seii  ben  espès  ;  si  pemci  un  drap 
que  paisse  coverir  le  emflure  ;  si  liet  entur  ra[m]plastre,  si  cuset  entur  le 
emflure,  si  lesset  estre  tute  la  nut  ;  si  garra.  Probatum  est. 

Parmi  ces  recettes  il  y  a  des  charmes.  En  voici  deux  : 

(Fol.  2)j  vo)  Al  hum  malade,  que;  vus  ne  savet  si  il  murr.»  u  nun,  pernet 
le  of  que  est  puni  devant  prime  en  col  jur  que  il  est  en  la  maladie,  e  escri- 
\'çt  sur  le  of  od  enke  ces  lettris  +  ^  Go.s.p.p.x.p.x.g.y.x.s.q.r.  Pus  metet 
le  of  tors  en  sauf  dcsuz  la  severunde  de  la  meisun,  e  pus  lendemain  depe^^cet 
le  of.  Si  sanc  s*en  ist,  si  murra,  z  si  il  n'ist  nule  .*>igne  de  sanc  si  garira.  — 
Si  tu  veus  saver  si  li  malades  vivera  u  nun,  al  \'isiter  di  trei  fes  :  .////  c*<)  exopxiu 
toi  arche  -}-.  Si  il  garrar,  si  se  turnerai  vers  tei  ;  si  nun  si  se  turnerat  suii  dos 
vers  tei. 

On  possède  un  grand  nombre  de  ces  charmes  composés  de 
lettres  donty  en  ^énéralle  sens  nous  échappe'.  Il  s'en  trouve 

quedam  vetula  succum  tapsi  barbarici  tribus  dicbus  antc  acccssioncin  dcdit,  et 
statim  liberatus  est.  Quam  rcx  Willclmus  jussit  vocari,  et  confessa  est  quo- 
modo  fecit.  » 

1.  Il  est  évident  que  cette  recette  a  été  mal  transcrite. 

2.  Le  feuillet  235  est  placé  entre  les  ff.  241  et  242. 

3.  Voir  par  ex.  Leecfxhms y  woitcunttini^^  ami  stanraH  oj  ciirly  HugUiml... 

Ramami»,  XXXII  l8 


274  P-    MEYER 

plusieurs  dans  la  partie  provençale  du   manuscrit,  comme  on 
le  verra  plus  loin. 

Présentement  je  vais  faire  connaître  par  des  extraits  les  articles 
I  et  n,  qui  sont  l'objet  principal  de  cette  notice.  Il  me  serait 
impossible  d'en  donner  dans  la  Romania  le  texte  entier,  et  d'ail- 
leurs une  édition  complète  exigerait  des  recherches  auxquelles 
je  suis  mal  préparé.  Toutefois,  les  morceaux  que  je  publie  suf- 
fisent à  montrer  que  ce  texte  présente  un  intérêt  considérable, 
sinon  pour  le  fond,  du  moins  au  point  de  vue  lexicographique. 
Les  autres  recueils  de  recettes  provençales  que  je  connais  sont 
beaucoup  moins  importants  à  tous  égards. 

I.  Recettes  médicales  en  provençal. 

Ces  recettes  sont  en  grande  majorité  tirées  de  V Aniidoiaritw 
Nicolai  et  du  Liber  de  simplici  medicina^  autrement  dit  (d'aprèî 
les  premiers  mots)  Circa  instans^  de  Platearius.  Ces  deu> 
ouvrages  ont  été  souvent  imprimés  à  la  fin  du  xv*  siècle  et  ai 
xvr  ;  V Aniidoiarium,  notamment,  édité  pour  la  première  fois  er 
147 1  à  Venise,  chez  Nicolas  Jenson,  a  été  souvent  réimprima 
a  la  suite  des  œuvres  de  Mesué.  Mais  cts  éditions  ne  peuvem 
être  utilisées  pour  la  recherche  des  sources  de  nos  recueils  er 
langues  vulgaires  de  recettes  médicales.  Le  texte  en  effet  en  es' 
très  remanié,  sinon  pour  le  fond  du  moins  pour  la  langue 
comme  l'a  été  celui  de  Trotula.  j'ai  oonc  dû  faire  usage,  poHi 
l'annotation  des  recettes  provençales  que  je  publierai  ci-après, 
d'un  manuscrit.  J'ai  eu  recours  à  cet  effet  au  ms.  lat.  7036  de 
la  Bibliothèque  nationale,  où  V Antidotarium  occupe  les  feuillets 
123  à  147  ^ 

On  observera  que  nulle  part  l'original  latin  n'est  traduit 
exactement.  En  général  les  formules  sont  abrégées.  J*aime  à 
croire  que  les  recettes  ne  perdaient  rien  en  eflScacité.  Car,  dans 
les  recettes  compilées  par  Nicolas,  il  y  a  beaucoup  de  substances 


collectcd  and  cdited  by   the  Rev.  O.  Cockaync  (Collection  du  Maître  de* 
rôles),  III,  40. 

I .  Je  ne  mentionne  pas  les  feuillets  du  ms.  dans  mes  citations  :  les  article: 
de  l'Antidotaire  sont  rangés  dans  l'ordre  alphabétique  des  noms  de  niédica 
nients  :  ils  sont  donc  faciles  X  trouver. 


RECETTES    MÉDICALES    EN    PROVENÇAL  275 

inerttis  ou  du  moins  peu  actives  que  Ton  pouvait  écarter  sans 
incon-vénieni.  Le  point  est  de  savoir  si  les  retranchements  ont 
été  opérés  avec  intelligence.  Remarquons  aussi  que  le  traduc- 
teur   provençal  substitue  aux  poids  (onces,  dragmes,  etc.)  spé- 
cifiés    dans  les  textes  latins,    des  équivalents  plus  ou    moins 
approximatifs,  évaluant  les  poids  en  deniers  et  mailles. 

Le  manuscrit  de  Trinity  n'est  lisible,  comme  on  Ta  dit  plus 
haiat,  qu'à  partir  du  fol.  ii8  v*>,  et  encore  cette  page  est-elle 
plus  ou  moins  endommagée,  comme  si  on  avait  commencé  à  la 
grAtr^r.  On  y  lit  les  rubriques  suivantes  :  De  unguento  scabiei, 
—  ZI>^  tnacula  oculorum,  —  Contra  ficum,  —  De  lentiginibus 
facîn  .   —  De  ung[u]ento.  je  transcris  deux  de  ces  recettes  : 

C€>9ttraficum.  Ad  home  qucs  aura  fie,  pren  lo  suc  de  la  plantage  c  de  la  pol- 
vera   d^ls  carbos  de  la  figieira,  e  per  .viiij.  jorns  e  tu  n'i  met,  e  guerra. 

De-  i^ntiginibus  faciei.  Ad  home  o  a  femena  ques  aura  lentigines  en  la 
*^^ra,  pren  lo  sanc  de  la  lebre  e  molla  l'en  la  cara. 

Ln.  recette  qui  vient  ensuite,  et  qui  n'est  plus  entièrement 
lisible  ^  est  sûrement  celle  de  Vunguentum  album  de  Nicolas,  mais 
cependant  il  y  a  quelques  différences  : 

-D^  ^^9i^u]etUo.  Enguen  blanc  per  ostar  salsa  fleunia,  se  es  pura  rasca  e  gra- 

tige.  FH-cn  delbon  »  blanc  iiij.  d.  peszans  e  d'ences  .viiij.  d.  peszans.  Aquestas 

cauzas   *leus  pizar  cascuna  em  per  se,  pueis  deus  penre  la  polvera  del  blanc  et 

^^  -)  -   pauc  d'oli  e  tu  la  destempra,  e  met  o  en  .j.  mortier  de  coire  ab  la  polvera 

**cl  lîtiu-gion  e  del  mastic  e  de  Tesces,  e  pisa  o  fort  iro  que  sia  blanc.  Can  sera 

"'^^  nnout  e  ben  espes  (fol.  1 19)  com  el,  e  tu  i  met  .j.  pauc  d'oli  et  autre  pauc 

^  î^ga    rosa,  e  fai  o  boillir  tan  que  non  sia  trop  clar  ni  trop  espes,  e  pueis, 

^^^  te    voiras  onhe  tora  la  rasca  de  graiige  o  tota  ronhna,  e  guerra. 

M3.ÎS  les  articles  qui  suivent  ne  viennent  pas  de  l'Antidotaire 
^^  ]  en  ignore  la  source  :  • 

^    9M4itiotte  pilorum.  Cant  tu  voiras  far  naisser  pels  en  alcun  luec,  pren  la 
lefvida.   de  la  rata  e  destempra  la  ab  mel,  e  aqui  on  tu  onhneras  naisscran  pel. 


^*  Corr.  pion}  Antidot.  :  «  Unguentum  ad  salsum  fleunia  lib.  j.  R.  ceruse 

5  Vf*  signe  désigne  Votice)  ij,  litargiri  3  j»  olibani,  3  (dragme)  iij,  mastici  J  ij, 

ut^ueque  species  per  se  teratur,  pulvis  ceruse  cuni  pauco  oleo  distempe- 

relur;  postea  addatur  litargirum,  deinde  masiix  et  olibanuni,  cum  pistello 

5Ȕwpcr  agitando  paulatim;  ponatur  acetum,  et  cum  incipit  inspissari,  addatur 

okum  et  aqua  rosata,  et  tamdiu  ducatur  donec  liât  nec  niultuni  spissum  nec 

fnultum  liquidum.  » 


[ 


276  P-    MEVER 

De  eodtm,  O  prcn  de  las  abc  lias  c  crema  las  e  fai  ne  pûlvcTii  c  mescla  las  ab 
lo  md.  et  on  h  ne  4qucl  lucc  on  voiras  Uit  naisscr  los  pt-b, 

Df  agiiiiocw.  D'aganos  faj  poison  d'aiul  guis;î;i  :  Prcn  de  cerieiras  agras 
e  gcta  ne  los  clos  ",  c  fai  las  boillir  en  alga  et  en  laig  de  cabri  pur  bollir  ad 
avcm(?)  part';  fai  copier  Jij.  tailbs  de  rafc,  e  casiTuna  cauita  lu  cola  cm  per 
se  ;  pùcis  nu*scia  o  tôt  essems  e  liona  ïo  a  beure  e  fai  li  emplaust  de  la  sa  de  » 
bcn  pasiada  ab  b  vinagrc  blanc,  pucis  esc  al  fa  on*  e  faissa  l'en  lo  ventre* 

f:mphust[r\jiift  ad  mtîdmmm  A  febre  coud  la  na,  cant  ho  m  es  fors  Tcnis, 
pren  del  suc  del  glaujhol  c  del  i^uc  de  la  menta,  e  loi  aquesi  suc  fai  boillir 
e!.Séms  :  pueïs  pren  de  las  roszas  e  de  las  violas,  c  cos  las  ad  una  part  ub  de 
vinagre  blanc,  e  de  tozs  aqucits  suscs  (sk)  e  d*aquesias  rosjias  c  d^aquestas 
violas  fai  empîaust  ab  farina  d  ordi,  e  paujîa  Tal  cor, 

je  ne  retrotive  sûrement  l^Antidutaire  qu'au  foL  126: 

Littotipim  ï*  Aquesi  Içctûaris  dona  ad  home  qucsx  es  tôt  jorn  irâïs  e  pcr 
nialencolia*  Mot  es  prophctios^  c  boîi  per  gran  frevoletat  et  ^d  home  ques  a 
soven  mal  el  ventre.  Ad  home  que  ren  la  memoria  e  sens  )i  aggusita  7;  bos 
es  per  frênes  i  e  per  litar^a  •*  e  per  apoplexia  t:  per  tôt  as  malautias  de  la  testa  e 
per  mou  tas  autras;  si  es  ris,  usze  ne  de  matin  ede  vespre. 

Contra  frfnts\im  itctOiirium.  Mîos  atropos  ",  aqucst  lectoari  doua  ad  una 
malautia  ques  a  non  frênes i  et  als  sariguinosKOs,  e  per  la  peira  franncr  el 
h;!3clc  ♦^  o  S)  %'ols  poîts  ïo  agui'.ar  de  À\\.  obolos  pes/ans  d'esscamonea  *\  e 
pueis  lo  i  dona  ab  lo  vin  caut  de  matin. 


i ,  Ms»  ckyy  avec  une  1  aw-dessus  de  Ty,  qui  toutefois  n*est  pas  cxponctué. 
«  Ch%  noyau,  en  Langiîcdoc  **  (Mistral).  De  même  Sauvages. 

2.  Corrompu  î  coït,  ad  ttm  (où  ad  nuit  a)  /m#7?  mais  cette  correction  ne 
suffit  pas, 

î*  Faut-il  corriger  tasa  ft'ttda  7 

4.  Tour  a.  Cf.  p,  191,  n.  7. 

}.  Double  erreur  ;  d'ahtird  il  faudrait  hVfotripim;  ensuite  ce  nom  est  celui 
d*un  remède  qui  prend  place  plus  loin.  La  rubrique  du  5  correspondam  de 
Nicolas  est  Electmirium  pîtrh  ar&yhatm  (Dorveauît,  S  31). 

6.  Sk,  corr.  pro/fclm. 

7,  «  HMemdriam  réparât»    vcnsum    actiit.    »  Supprimer   ^m^-   avant  rtn, 

5.  []  n'y  a  rien  de  lel  dans  le  texte  latin. 

9,  Ure  Filantrôpù%.  Ce  5  manque  d^ns  la  traduction. 

10.  Tout  cela  est  asse?.  éloigné  du  lextc*  Void  le  latin  :  «  Propric  vaJrt 
nefa-ticis,  strangurio^i^  de  frif^ida  causa,  calculosis  in  renibus  et  vesica»  mir;ï- 
biJiter  ïapidem  friingît  et  fractum  potenter  educit  :  façit  eiiam  ad  duricici« 
splcnis  et  epatis  »,  —  Bisdt,  rate  (Mi^stral).  Ka\Tiouard  (II,  144)  a  un  en.  de 
ht  if  ht,  au  plur.,  qttll  rend  par  «  fressures  •». 

t  ï ,  Cette  pres<rription  n*est  pas  celle  de  TAntidotairt. 


RECETTES    MÉDICALES   EN    PROVENÇAL  277 

Contra  singtdtum.  Gariofilatum  '  ad  home  quesz  a  sanglot,  qucn  meta  en  la 
boca,  e  guerra. 

Contra  malam  eruclnationem.  Ad  home  que  rotara  per  malvaizas  humors 
dona  Ten  lo  vespre  e  guerra. 

Omettant  quelques  recettes,  je  reprends  un  peu  plus  loin. 
C'est  toujours  à  rÀntidotaire  de  Nicolas  que  nous  avons  affaire, 
mais  remarquons  que  les  rubriques  latines  ne  viennent  pas  de 
Nicolas  :  peut-être  se  trouvaient-elles  dans  quelque  compila- 
tion à  laquelle  notre  provençal  aura  puisé. 

(Fol.  127  vro)  Contra  quodUbel  mahim  capitis,  Pigra,  molt  es  bos  aquest 
lectoari  a  tôt  mal  de  testa  ques  hom  a  près  per  freig  el  ventres  ^  —  Pilule 
durée  ».  Per  soj  apella  hom  pillulas  aureas,  car,  aissi  con  aurs  es  plus  [precios] 
ques  autre  métal,  aissi  son  plus  caras  ques  autras  pillolas.  Aquestas  son  plus 
preciosas  ♦  als  oils  et  al  cap,  e  per  aucir  e  per  ostar  la  ventoszetat  del  ventre 
e  del[s]  budels,  e  purgara  $  moût  ricamen  ses  tota  angoissa.  Dona  Tcn  .v.  o 
.vij,  e,  si  es  trop  durs,  .xj.  *. 

{Fol.  128)  Si  7  tu  vols  far  la  recepte  pren  de  l'aloen  e  de  Pescamonea  egal- 
raen  .xx.  d.  pesans,  de  las  rosas  e  de  la  grana  del  :ipi  egalmen  .vij.  d.  e 
mesalla  pesans,  de  bon  safrant  e  de  la  coloquintidaegalment  .j.  onsa,  e  pueis 


1.  Cet  article  et  le  suivant  viennent  du  §  Gariofilatum  de  TAntidotaire. 
mais  la  formule  du  remède  manque. 

2.  Le  texte  est  incomplet  :  Voici  ce  qu'il  y  a  dans  l'Antidot.  :  «  Pigra 
Galieni...  mirabiliter  valet  ad  omnem  capitis  frigiditatem,  et  stomachi  diges- 
tionem  procurât,  vomitumstringit,  frigiditati  matricum  multum  subvenit,  con- 
ceptionem  confortât...  » 

5.  Le  ms.  devrait  marquer  ici  un  alinéa,  car  cet  article  sur  les  pilulœ  aureat, 
est  distinct  du  précédent.  Antidot.  :  «  P Ulule  auree...  auree  dicuntur  quia,  ut 
aurum  preciosius  est  omnibus  metallis,  ita  et  iste  sunt  preciosiores  et  effica- 
tiores  aliis;  precipue  capitis  sunt  purgative,  lumen  oculorum  et  auditum 
acuunt  aurium,  ventositatem  stomachi  et  intestinorum  expellunt  et  sine 
molestia  purgant.  » 

4.  On  ne  sait  trop  comment  ponctuer,  et  son  plus  preciosas  paraît  faire  double 
emploi  avec  plus  caras  qui  précède.  Il  faudrait  quelque  chose  comme  aqueMas 
Villon  als  oils.,, 

5 .  Sic  on  attendrait  purgan  (ou  purgoti). 

6.  Obscur  ;  la  façon  d'administrer  ces  pilules  manque  dans  le  ms.  latin 
dont  je  me  sers,  et  il  y  a  dans  l'imprimé  :  «  dentur  in  sero  .ix.  vel  .xj.  cum 
mulsa  aut  cum  vino.  » 

7.  Cet  alinéa  n'est  autre  chose  que  la  recette  des  pilulœ  aureas  de  l'alinéa 
précédent.  Seulement  la  fin  diffère  un  peu  du  texte  de  Nicolas. 


278  P,    MEYER 

(al  4c  lot  disso  polverd  bt^n  prima,  C  met  la  tcmprar  ab  ù\gik  boillida,  Je  ta 
gtniia  c  del  dîagragnm,  e  pucis  fai  ne  pi  lî  ni  as  a  for  de  cesze,  c  met  tas  en 
cuer  on  h  d'oli  d'otïvas  ode  bagav,  e  pueis  ne  dona  lo  vespre  .v.  o  ,vij . 

De  çasloriis  ^  PiUuk  atUone.  Âquestas  pi  11  nias  son  mol  ban  as  per  to 
paJazin  :  ,(.  o  .iij,  l'en  deu[s]  destemprar  aî>  aiga  cauda,  et  aqueî*  aiga  si  dcu 
mètre  per  \m  nars,  c  faî  lo  jas/,er  envers ^  can  lo  voiras  ^  mcire  dejosial  fuec  ; 
adoni:  si  deu  guirar  daus  ta  terra  et  ubdr  ta  boca  >,  e  gitara  la  ^euma  que 
curara  los  oit  s  el  mat  del  fin  ne  e  mo^s  autres. 

^Contra  irnieiinm  iiculornm.  Pilluh  une  quthm  e^^t  noh,  Aquestas  pittulas 
son  mot  bonas  per  u^ur  h  cruite/a  de!  oï\[$]  e  del  *  cap  purgar  de  fleuma  e 
de  colcra  e  de  totas  nialas  huniors  ^ 

Ad  lu€fm  c^nforiamhm  *.  Aquestas  plltutas»  qui  hus  usa,  gardon  lo  vis  ad 
home  e  b  lesta,  Lo  vcspre^  dona  Ten  ,xj.  o  klW]   ab  ous  o  afb]  fjtrina. 

Ad  debii^m\  confariandum.  RQiaia  mnvilaT^  qui  vomiiara  trop  per  lo  %xn- 
tfeil,  can  sera  trasîomaïs,  btjs  es  per  conforta r  home  ques  a  trop  gran  dcbi- 
lïiai ,  es  bos  per  sanc  »  esuncar  e  per  gardar  la  sariltat  longamen  ;  dona  J'en 
de  matin  e  de  vespre  ab  aiga  freja. 

Conira  fcbrfs.  {V^)  Ruhea  if^hcaia.  Atjuest  letoari  dona  a  las  lersanaj», 
a  las  cotidianas,  sitdona,  ans  quel  prendal  mal,  ab  lo  rodostamata,  Distempr^ 
ne  lo  comot  '  d'una  aillana'". 

Conira  maium  capiiis,  quanJo  non  poUit  d^rmirt.  Ad  tiome  ques  aura  mal 
en  la  testa ,  que  non  poîra  dormir,  las  nars  c  la  testa  Ten  onli  œma  dengeir  "^ 


i ,  Ce  sont  tes  piUuh  diacastont  de  t*AniidouJre- 

2.  Ms.  molrm  ou  uwhas, 

3.  n  . . .  ita  ut  patiens  supin  us  jaceat  atiquantulum  juxta  îgncm;  itçtn 
vcrtai  se  et  ore  aperto  dimitiat  fpsum  flegma  exïre.  « 

4.  Il  faudrait  pei, 

5.  it  Pnecipue  valent  ad  cataracta^i et  ohscuritatesoculorum,  capui  mire  pur- 
gant  a  cotera,  flcgmate  eï  mclancolu  et  ab  omnibus  humoribus,  visum  con- 
fortant et  custodïuni.  • 

6.  C»t  ta  suite  du  S  précèdent* 

7.  C'est  le  5  Rosala  uoveîh  de  t'Antîdotaircj  le  prcmîer  J  de  la  lettre  K. 

%.  Il  faudrait  ifl^  Antidot.  :  «t  vomitum  et  subversioneni  stomachî 
aufett,  dcbilitatem  et  silim  repriniit. 

9.  Ce  mot,  qui  retient  plus  loin,  est  i^vldemmentte  m^me  que  (i*m<mt  dans 
Pierre  d* Auvergne  :  »  Q^i  d'aver  sai  a  ^rant  a^mout  •,  où  te  sens  est  (hndcni- 
mcnt  lï  quantité,  abondiiiôc  •  (E.  Levy,  Pra%K  suffpl.  H^ôrt,),  Fuin  cornet^ 
dins  le  Bffviarî  (ibU  \  signide  h  abonder  *  en  un  lieu*  et  par  suite  se 
trouver  ïpéciatement  en  ce  lieu 

10.  ...  a  data  cum  rodo^tomate  ;id  modum  avellane.  » 

ïi.  Ou  dmgàr.  Je  ne  sais  ce  que  cela  veut  dire,  et  je  n*alpas  trouvé rori- 
ginal  de  ce  passage. 


RECRTTKS    MÉDICALES    KX    PROVENÇAL  279 

mot  li  dara  gran  sanitat  ;  pcr  ostar  la  fleuma  agra  destempra  lo  ab  la  tiszana 
e  gerra. 

Contra  diversas  febres,  Requies^  aquest  lectoari  pozs  donar  a  la  tersana  et  a  la 
cotidiana  et  a  la  cartana  agusa,  e  dona  lo  ab  vin  caut  '. 

Contra  quodlibet  venenum.  Irraca*,  aquest  es  plus  cars  de  trastozs  los 
autres.  Aquest  es  bos  contra  tôt  veri  e  per  morsura  de  serpen  e  de  can  enra- 
biat  e  de  tota  autra  bestia.  Can  tu  loi  voiras  donar,  destempra  lo  ab  suc  de 
menta  e  dona  l'en  a  beure,  e  desobre  la  nafra  tu  Ten  fai  emplausi.  Ad  home 
ques  aura  los  bos  malaig }  si'n  pauza  j.  pauc  desobre.  Ad  home  ques  aura 
cotidiana  o  cartana  ab  lo  vin  caut  lai  destempra  ;  enan  sia  i  cuejha  la  ruda  o 
la  genciana,  e  dona  Ten  a  beure. 

Contra  dtus  febres,  Triofilon*,  aquest  lectoari  es  mot  bos  per  guérir  las 
febres  cotidianas  e  lascartanas;  en  uvern  las  (corr.  lo  /'?)  dona  après  manjar 
cl  vespre  ab  lo  vin  caut. 

Qmîiter  possis  stare  juvenis.  Trifera  sarracenica  i  fai  home  qui  soven  Tuza 
estar  jovencel.  Aquest  es  bos  per  lo  tet^e  refrejar  e  per  guérir  la  malautia 
ques  hom  appella  ictericia,  so  es  mal  de  que  es  home  gruey.  Bos  es  per 
ostar  mal  de  testa  de  que  hom  pren  colera  rubea,  can  aonda  trop  en  home; 
aquest  es  bos  per  ostar  color^(/o/.  129)  d*ome  e  per  ostar  tota  febre  tersana. 
Aquest  lectoari  dona  ad  home  per  restaurar  lo  vis  can  hom  lo  pert  per  trop 
gran  calor.  Donar  ne  pozs  lo  vespre,  lo  comot  7  d'una  castanna  destemprat  ab 
aiga  cauda. 

Contra  tortuositatem  stotnachi.  Trifera  tnagna^  aquest  lectoari  pozs  donar  per 
la  torcion  del  ventre  guérir  ad  homen  o  a  femena  ab  aiga  cuejha  en  que  sia 
cuejha  la  grana  del  anis  e  del  mastic,  de  cascuna  .j.  pauc,  pueis  l'en  dona  a 
beure;  a  femena  propriamen  ques  aura  mal  en  la  maire",  pren  Tartemi/a 
ben  pisada  e  cos  la  e  dona  la  i  ab  la  trifera. 

Contra  malum  matricis  ».  Autra  causa  per  la  maire  :  pren  Tartemiza  bem 

1.  Pris  du  S  Requies  de  TAntidotaire. 

2.  Faute  pour  Tyriaca.  Cet  article  est  tiré  du  §  Tyriaca  diatessaron  de  TAiiti- 
<iotaire. 

3.  Le  latin,  qui  est  obscur,  n'éclaircit  guère  ce  passage  :  «  venenosa  etiam 
apostemata  sanat  superinuncta  ;  bonum  melannum,  quod  Salernitani  scagiam 
vocant,  curât.  » 

4.  Trianfiîon,  dans  TAntidotaire,  le  §  manque  dans  la  version  publiée  par 
le  D^  Dor veaux. 

5.  «  Trifera  dicitur  quia  hominen  juvenilem  facit.  » 

6.  Sic,  corr.  calor} 

7.  «  In  modum  castanee  »;  «  en  quantité  »,  dans  la  trad.  française. 

8.  «  ...datur  contra  omnia  vicia  matricis.  »> 

9.  Cet  article  et  les  deux  suivants  sont  pris  du  §  Trifera  magtia  de  TAntido- 
^ire. 


î8o 


p.    MHYKK 


piiuda,  ^  met  i  j.  pauc  d'oU  d'oUvas  c  df  bagas  o  ilu  murct^olon  %  e  fa»  n*: 
subpcisitori  eii  la  boca  de  la  maire. 

Qumtdû  non  pifkst  tmmperf  muUer.  A  femena  que  nom  pot  aver  éiati, 
M  tu  destemprAs  d'aquc^t  letoari,  .j.  onsa  ab  b  vin  en  que  sia  cyejha  U 
itiandragora,  ^  pucb  lo  met  ab  lo  cnsteri  per  fa  boca  à^  U  ma^lrei  esi  podia 
avcr  .j,  pauc  dt'  basme  ',  en'i  metia,  ses  dupie  auria  cfan. 

Qttiîndi^  pKtr  ierrrlur  dmmienâo.  Aïs  efiinsi  ques  an  paor  en  dormens  c 
non  pttdon  dormir  e  ^arlon  en  dormens,  pren  d'aqiie^t  lectoari  *j*  pauc  c 
desiempra  lo  ab  lag  tk  lemena  tan  con  ten  J,  cesiscr  %  e  tu  Ten  dona  a  beurc 
c  guerra. 

Qmthkr  fiHHt  cirupi  cofUm  fibrem  ♦,  Sï  tu  vok  far  ïssarop  rosat,  pren  las 
rosas  secas  ij.  Ib.  e  d'^îga  .vlj.  Ib,  e  .nj  Ib,  de  sucre  e  faîz  o  tm  essems  bollir 
en  .j.  pat  roi  ;  e  can  comensara  bollîr  ajas  âç  claras  d^ous  .iij  o  .ni},  ben 
batudas  ab  aiga  freja  (f**)  *j.  pauc,  o  s  bat  las  tan  que  fas^n  escuiîia»  et  aquesta 
esc u ma  tu  i  meiras,  e  ain  comessara  bolltr,  aqyela  esc u ma  tu  deus  sovcn 
menarab  .j,  paleta  tro  sia  espes  ;  e  can  fara  lonc  fil  que  tirara,  adoncsescucii. 
Aqnust  tssarop  datas  contra  tota  calor  ostar*;  es  bas  pcf  cofortar  e  per  guérir 
mena,sEos.  Atressi  pozs  tar  issarop  viulatT;  aqucst  sera  bos  a  las  febres 
tersanas  et  ad  home  que  non  potra  issir  a  cambra. 

Contra  pîn^iHum  *.  Issarop  fai  contra  pkvedn  e  tîcis.  Aqtiest  faras  en 
aissi  :  Pren  .nlj  Ib.  daiga  c  .%\].  d  |>esans  de  violeras  c  de  requicia  e  de  papii* 
ver  blanc,  égal  m  m  .i*j.  mesalladas  peszans  de  cascun,  e  de  h  grana  del 
codofg  e  de  la  grana  delà  mal  va  ben  mundada  e  de  la  grânadel[s]  melos,  la 
mezolla*  e  de  la  grana  de  las  bortolatgas*  e  de  la  grana  de  las  cogorlas»  h 
mc^i^ola,  e  de  la  goma  del  dragagan  e  de  la  goma  arabica  cgalmen  .viiij.  d. 
pcs^ans;  totas  aqueslas  causas  pîsza  fort  e  met  o  en  aiga  boïiir»  e  boil  o  Un 
que  faiga  tornc  eiidoas  Ib.  ;  pueis  cola  o  per  *j.  drap,  emeti  Jij.  Ib.  de  sucre; 
puds  i  met  MW].  pies  cul li ers  d'aiga  cauJa, 

Cùtiirû  menasim  cirttpum  *^*  Issarop  per  esiancar  iota  menaszon.  Pren  de 
sucre  una  lb>  e  mieja  de  mJrtîUi«  e  de  rosos  e  de  sumac  e  de  gada  e  de  las 
balaustias  e  de  lîpoquiiiridos  epodii  '*  egalmen  .vlj,  d.  pcs^an,  e  de  sorbas 
vcr$  *it.  e  de  requicia  c  de  dragagan,  de  goma  arabica  egalmen  .vî],  d.  pe*- 


i.  ¥  ...cum  arthemisia  trîta  bene  et  oleo  muscelino  admlxta.  » 
2.  Iln*es«  pas  question  de  baume  dans  l'An tidotaîre. 
5.  w    ..in  modum  ciceris  *>. 

4.  ^Syrnfms  rôsacius  de  TAntidotairc. 

5.  Sic.  corr,  r. 

6.  Il  faudrait  supprimer  oitar,  ou  mettre  prf  au  Heu  écrmtr&. 
7*  Antidot.  Syrtipus  vwkcetis^ 

8.  Ancidot.  Sympfts  cmtta  pliurtsim  il  penp^tumemiam  (sic}. 

9.  «  BouRTOULAlGO...  iat.  potiuhiii,  pourptcr  »  (Mistral), 

10.  Antidot,  Syr tipus  Centra  ôfnmm  venîrh  sûtutumtm, 

1 1.  «  ...rosarum,  sumach^  àcatiei  b«lausiie«  spodii  ypoquîstidôS.  ■ 


RECETTES    MÉDICALES   EN    PROVENÇAL  28 1 

zans,  e  de  nespolas  vers  .v.  e  de  cormas  vers  .x.,  e  tôt  aquo  que  fara  a  pizar 
e  tu  piza,  et  aquo  ■  que  poira  fondre  e  tu  laissa  fondre,  e  pucis  o  boil  tan 
que  no  t  aja  forsa  .j.  Ib.  d'aiga  ',  c  pueis  o  cola  ;  pueis  o  toma  si^brel 
fuec,  e  met  i  lo  sucre,  e  boilla  un  tro  sia  espes,  et  ab  claras  d'ous  batudas  tu 
o  esclargizs. 

Les  recettes  qui  viennent  ensuite  ne  sont  porint  tirées  de 
l'Antidotaire  de  Nicolas.  La  première  toutefois,  est  écrite,  avec 
bien  d'autres,  sur  la  marge  (fol.  140)  du  manuscrit  de  l'Anti- 
dotaire (lat.  7056)  dont  je  me  sers.  Elle  a  pour  titre  :  Sirupns 
de  mirobolano  ad  coleram.  Quant  aux  recettes  de  sirops  qui 
suivent,  je  les  ai  vainement  cherchées  soit  dans  les  additions 
marginales  du  manuscrit  précité,  soit  en  d'autres  livres,  et 
notamment  dans  le  Pamum  ambre^  ou  pourtant  sont  énumérées 
près  de  soixante  espèces  de  syrops. 

Contra  coleram,  {Fol,  1 30)  Issarop  per  curar  la  colera  '  e  la  ventoszitat 
e  la  ictericia  e  tôt  lo  cors.  Pren  de  mirabolas  citris  )  e  de  violas  e  d'eisseis, 
de  cascun  egalmen  .iiij.  s.  peszans  ab  .vij.  Ib.  d'aiga,  e  pueis  met  i  atrestan 
de  suc  de  sumuera  4  con  del  sucre,  e  fai  ne  yssarop. 

Contra  continuam,  Issarop  per  la  febre  cotidiana.  Pren  de  la  grana  del 
apie  de  la  grana  del  ereissel  s  e  de  la  grana  del  fenoil  egalment  .j.  d.  pesan 
e  de  la  grana  del[s]  meios  e  de  la  grana  de  las  cogorlas  e  del  citruli  .viiij.  d. 
pesans,  e  del  reobarbi  .iij.  mesallas  peszans  e  del  sucre  .j.  Ib.;  e  sil  malaute  a 
tos.  met  i  de  las  amen  las  e  de  gragagan  e  de  la  gonha  arabica  egalmen  .j.  d. 
pe^an,  e  pueis  fais  en  aissi  con  es  dig  els  autres  iss;irop[sj. 

De  duritate  splenis.  Issarop  per  mollezir  lo  bescle  cant  e^  durs,  e  per 
guérir  home  cant  es  ictericis  et  es  cruecs  et  a  la  fFebre  cartana  [o]  tersana,  et 
a  totas  malas  urinas  que  son  de  calor.  Pren  las  razis  del  fenoil  e  del  api  e  de 
Tesseil  e  de  scariola  dometgua  :  si  pren  del  (sic)  salvatga  e  de  reopontit  * 
dometgue;  tôt  aisso  fai  boillir  en  aiga  e  met  i  .j.  paùc.de  la  polvcra  scandali 
(awT.  sand-),  e  can  sera  ben  cueg,  e  tu  o  cola;  pueis  met  i  tan  quesassas  n'i 
aja  ;  e  d*aiso  pozs  totas  las  menaszos  guérir. 

1.  Ms   aque, 

2.  «  ...et  bulliant  adquantitatem  libre  unius.  » 

3.  SvLT  \^  miroholanus  citrinuSy  voy.  Dorveaux,  Antidot.  Mr.,  p.  76. 

4.  Corr.f umitera,  La  formule  du  ms.  7056,  f.  iso  h  en  marge,  porte  :  a  R. 
corticem  mirabolani  citrini,  kebul.  (^=  kebule  ou  kcbuli)  ynd[ici]  anaj  xxx, 
ros.  S  XV,  viol.,  podagre,  lini,  fumii.  ana  5  x,  absinthii  ethimocriti  ana  J 
v;  infundamur  omnia  in  tribus  libr.  aque  calide...  •> 

5.  Cette  plante,  que  je  ne  puis  identifier,  reparaît  dans  l'autre  recueil 
(p.  296,  1.  4). 

6.  Rhapontic  (Cent,  rhaponlica  L.). 


282  I».    MEYfiR 

Df  quoUbn  tthth  hnmar^.  Is^jrop  que  fara  purgar  tatas  Us  m*iiiUi  liumors 
ses  grjnangcirssâ,  l*l  es  bos  per  donar  a  bs  nc;is  gens  que  non  voLon  penne 
poizos  amaras  * .  Prcii  lu  pnljp  ïdî  e  del  sinegrcC,  Je  Li  rjKÎs  de  k  grâtia, 
e  de  bs  caïaspudas  *  (î*")  e  Je  b  razîs  dt;  h  baica  »,  e  Je  la  ra^is  de  Uuna- 
bïlla  (?)  egalnien,  c  lavas  las  c  pisza  las  fort  e  met  o  en  un  pairoil  que  Uû  sobnes- 
tarniai  c  ïixh  o  bollir  J.  pauc^  e  pueis  cob  o  e  (m  ne  issarop  ;  e  sii  vgls  met  i 
,j.  pauc  de  CAmiom^  e  puc^îs  e  tu  o  destenipra  ab  aiga  cati  b  voiras  donar. 

Is5arit»f>  aceids*,  Pren  de  bim  vin  aj^reepueis  a  met  en  ^j.  mortier,  c  puds 
veiia  cpattca;  i  met  mais  autra  Ib,  de  buct^  e  mcscla  o  fort^  e  can  voiras  c 
tu  o  dona  ab  atga  tebcza. 

Cûnira  sitim.  hsarDp  cou  ira  set  mtiir  o  vomîî  eatancar  Pren  lo  me  de  Li* 
mitgranas  mieja  Ib.  c  àû  tamaris,  e  Mïi\.  Ib-  de  sucre,  e  d'aigua  de  plueja 
tan  que  pro  n*ï  aja  pcr  mc^^ura,  »?  h\t  o  en  aîssi  co  comanda  els  autrvs 
issarops. 

Ek  coj^iiitionc  Jhumiîtum,  Quant  tu  veiras  home  mot  nègre  et  aura  la  boca 
afïiara  e  la  saliva  er  ajuls^  adoncs  podcs  saber  que  sa  Isa  fleuma  *  Il  aanda.  Si 
h  boca  es  dousa  e  la  saliva  ci  aitals,  adoncs  podes  saber  que  doussa  fleuma 
Il  aanda,  Aquesi  deu  aver  lou  ora  mal  cor,  cossi  voHa  gitar,  e  la  orina  de  lui 
deu  esser  alqties  grossa  et  .j.  pauc  rossa  et  esj'»eisa;  lo  fegge  simple  dcu  pur* 
gan  (cûrr.  purgar)  ab  la  benedecta  et  Ab  lo  catarticum  impérial  t  cl  ab  Taïga  et 
(r^3lT,  en)  que  sera  cueg  lo  polieg. 

A  salsa  ab  la  gerapigra  o  ab  d^odorîtonami  cardjtum  et  ab  icr.stogodion  ». 
Colera  rubea  ques  aonda  dels  ob  deu[s]  purgar  ab  (/a/,  i^i)  tri  fera  sarracc- 
nlca,  ab  Taïga  en  que  sia  cuejha  cassîa  fistuhr.  Melencolia  dcus  purgar  ab 
ierologodion,  Lo  sanc  dtus  purgar  cani  aonda  trop,  fiii  llo  sagnar  o  venîos- 
iar  ",  si  el  a  mal  en  la  testa,  de  la  vena  sephalea  ;  sî  cl  a  mal  el  poimo  o  el 
bescle,  de  ta  vetia  mejana;  si  el  a  mal  el  ventre  del{mrr.  o  el)fetge,  de  la 
si  el  a  mai  el[s)  ronnos,  de  la  vena  de!  pe  jus  ta  la  cavlUa  ;  e  si  non  es  temps 
He  sagnar»  fai  lo  ab  las  ventosas. 

Di  wgmiîmie  poçimii.  Quant  lu  auras  donada  ta  poUo*  aissi  ptairas  contm- 
ser  sîl  mena  ben  :  non  deu  sentir  el  ventre  nulla  torcion.  Adonx  li  deus  donar 


i.  La  préoccupation  dlndiquer  des  remèdes  appropriés  aui  gens  riches  et 
dilïcats  se  manifeste  déjà  plus  haut  (p.  376,  Utrùtiptiti), 

3.  Corr*  ftnugrtc, 

!♦  «  Catapuce,  épurgc  {Buplforbîa  hiihyrii^  L)^*  Dorveauit»  AniiJ,^p,  52. 

4.  Siutco  (Mistral)  est  un  nom  qui  s*appïique  à  diverses  graminées. 

>.  Il  y  a  bien,  dans  le  Po/num  ambrt^  un  ivrwpuj  actt&sus,  mais  la  rrccîie 
est  tout  autre. 

6.  Siî/jww*  ^/^tfiiïdèsigcic  ordinairemem  une  sorte  d* ulcère  ;  voir  la  Chtrut* 
f if  de  Mtïtideville,  éd.Bos,  au  gio^sAÎTc  (fléu^nit  nanssf), 

7,  Confection  laxatîve  sur  laquelle  voir  DorveauK,  Antuî.^  p*  10. 
81  Sur  la  yerup^^ra  et  le  ytrûio^ûdium^  voir  Oorveaux,  Antid. ,  p,  97, 
9.  Le  ins^  marque  ici  un  alinéa  qui  ne  me  semble  pas  justifié. 


RECETTES    MÉDICALES    EN    PROVENÇAL  283 

del  sablier  de  la  gallina  .j.  pauc,  e  pueis  fai  Tendurar  '  .j.  pauc,  que  si  lai 
era  remazut  de  la  poizon  que  s'en  issis. 

De  temptrata  comistione.  Garra  que  non  mange  '  ni  beva  trop,  que  non  lo 
prenda  la  febre,  e  sil  mena,  al  segon  jorn  lo  deus  bannar,  e  gara  lo  del 
freig. 

Quoi  diebus  cusiodiaiur.  Gara  lo  per  .iiij.  dias,  que  non  fassa  nulla  obra, 
c  fai  li  manjar  bos  condugs.  Hncaras  deus  purgar  ad  aquels  que  seran 
escolorit  metra  fi  .j.  d.  pesan  d*escamonea  )  ;  a  la  fleuma  .ij.  d.  peszans;  a  la 
Tnalencolia  .iij.  d.  Si  febre  li  vene,  fai  li  banh.  Si  non  pot  aver  bainh,  onh  lo 
cJel  dialte  *  entre  dos  fuex  devan  e  dereire  ;  si  non  gueria  de  la  lebre  per  la 
primieira  preizon,  pren  Taigua  en  que  sia  cuejha  la  goma  arabica,  e  dona  Ten 
â  beure. 

De  siti  posi  pocionem.  (F»)  Motas  ves  s'esdeven  ques  hom  que  pren 
poizon  a  tan  gran  set  ques  5  nos  pot  estener  de  beure,  e  beu  ques  hom  non  o 
sap;  peraisso  efHa  lo  ventreil  et  a  gran  torcion.  Hn  aissi  lo  deus  guérir  :  pren 
<]*aiga  cauda  et  .j^.  p  ^  plena  d'oli  e  fai  li  beure  d'aquela  aiga  cauda,  et  el 
ineszeis  si  meta  .j».  pluma  en  la  bocao  sozs  dezs,  e  fassa  ne  issir  aquel  beure, 
car  si  non  o  fazia,  ben  poiria  morir. 

De  pocione  nimis  extenta.  Motas  ves  s'esdeven  ques  hom  dona  poizon  que 
s'esten  el  cors  de  Tome,  e  nom  pot  issir.  Aisso  pozs  conoisser  a  la  torcion  del 
ventre  e  dels  budels,  et  eHla  tro  que  ven  em  péril  de  mort.  Aissi  li  pozs 
acorre  :  fai  lo  bannar,  o  si  non  lo  bannas,  onh  lo  al  fuec  ab  bos  onnemens 
cautz  lo  ventre  ab  .j.  teule  caut  o  ab  la  fisicanea,  e  cofortara  li  tôt  lo  cors  e 
las  naturas,  e  deu  lo  menar,  e  si  aiso  no  voira  7,  fai  li  lo  cristeri  en  aissi  : 
pren  de  las  mal  vas  e  del  polieg  e  de  Tagaric,  pisza  e  cos  ne  en  aiga,  cola  o  e 
met  i  .j.  pauc  d*oli,  e  d'aquela  metzina  ques  hom  li  aura  donada  i  met  .j. 
pauc,  e  pueis  met  la  i  desozs. 

De  pocione  débilitante  nimis.  Motas  ves  s'esdeven  que  las  metzinas*  que 
^om  dona  ad  home  lo  mena  trop,  per  so  car  el  es  trop  frevols,  autra  car  es 
trop  agusada.  Sil  pren  dissenteria  ques  es  gran  péril  de  mort,  e  per  aco  deus 
tost  ponnhar  con  guerisca.  Pren  d'aiga  e  fai  cozer  goma  arabica  e  de  las  amen- 
das e  del  blanc  e  dels  teules  nous  e  de  diacodion'  (Jol.  132)  e  de  la  roszada,  c 
<^ona  lo  i  a  beure,  e  s'es  obs  esmet  lo  i  en  bain  e  non  sia  trop  caut.  Aqucsta 
*iîssinteria  pozs  conoisser  al  sanc  que  fara  a  tozs  dias. 


1.  Jeûner. 

2.  Ms.  ma^e, 

5.  La  phrase  n'a  guère  de  sens;  lacune  après  escoloril}  Corr.  fi  en  5/  ? 

4.  Dialthée,  sorte  d'onguent;  voir  Dorveaux,  Antid.,  p.  58. 

5.  G>rr.  que. 

6.  Le  reste  du  mot  a  été  laissé  en  blanc  ;  padeUi  ? 

7.  G>rr.  valia  ? 

8.  Corr.  la  metzina. 

9.  Confection  à  base  de  pavot;  voir  Dorveaux,  p.  13. 


i 


Î4  P'    MEYER 

De  c^niikim  urmirnm.  Si  tu  vols  conobscfr]  las  urinas»  aissi  o  trobaras  : 
câTi  veiràu  en  là  urina  desobre  gran  escuma  c  deso^s  veiras  .j,  sekie  toi 
emom,  sapias  ques  el  a  gnm  veiiîoîtîut  d  ventre  ei  el[s]  budels. 

£>  yjfArjf*  iin^^r  Urina,  can  la  veîras  grossa,  et  .j».  nevolîna  blanca, 
el  aura  ftjbre  Jguda,  mort  significa. 

Di  f0,Um.  Urina,  can  la  va  iras  negra,  can  k  malautc  auran  (iiV)  fcbre 
aguda  ot  c  micig  aura  una  nevoUtia  negra,  mort  sîgni lîca. 

De  vci^ricfa.  Urina  sitrîna,  so  es  grue^a»  plena  d'cscuma  et  e  mîeig  cossî 
a  via  purs  patîjhe^s^gruex,  ictericia  mort  sîgnîfica. 

De  petra.  Urina  h  lança  con  laig,  se  ni  a  pauc  et  es  mot  tenva,  peira 
^igni^ca, 

Dt  dcftorr  tocius  t^rporu.  Urina,  can  sembla  ques  aja  el  mieig  bren,  et  aura 
un  pauc  diarria,  slgnifica,  si  el  fons  de  la  urina  ves  grans  fresum»  signi^ca 
dolor  de  rnnno,^,  pucis*  pur  tôt  es  niesclames  aqud  frt'sum  que  sembbra.] 
pois  per  tôt  lo  cors  es  h  dolors* 

Urma  de  femciKi  piucella  deu  esser  cïara  con  aiga. 

De  nn'Mû  hotmmtm  d  muUaum.  La  urina  dels  honie^  c  de  las  femcnas 
conoiss^ras  can  compannia  auran  essems,  aquela  deu  esser  trebûlla.  e  U 
luîsuria  po^s  conoiîiser  0-^)  desohre  e  deso/s. 

Dp  tithm  ffrti'tmndum.  Urinas  de  las  femenas  prenh,  can  auran  engairat 
après  4,  mes  o  dos  o  très,  aiijiiela  deu  esser  mot  clara  e  per  mîi'ig  veirasiicvo* 
Unas  btancas  ^  inota<i  ;  en  aîssî  o  po7.s  conoisser. 

Di  urtmj  muJifrum.  L'urina  de  las  Tenienas  pojts  conoisser  can  aurati  ta  s 
Hors  :aquelideu  e^sermot  e:spessa,  e  deu  esstr  alqu^^scon  satiguînolenta. 

Dt  ibhrt  maitUh.  Si  en  la[ï]  urinas  de  las  iemenas  vesgoma,  et  es  gn)SSÂ 
el  espes^a*  signa  *  dolor  de  maire* 

De  urim  mûttiftra.  Urina,  can  vtiras  que  n*i  aura  petit  |e]  dcsobre  iriv^o- 
las  anar  coma  de  calort  {îk)y  mort  signât. 

Voici  la  fin  de  cette  partie  du  manuscm  : 

(Fol    141  v*>  CoHÎra  vidum  p^ctark.  Contra  lo  nul  vis^i  del  picig  de  tisïis 
c  d  asmatkis  e  de  dcfcci  (?)*  qui  al  comensamen  s'en  dona  sucînh  bcn  poira 
guérir.  tVeii  delà  mîrra  .vij*  d.  [ve^^ans  e  de  la  gomâ  arabica  .f.  nnsa,^  âc  . 
6gas  ,j.  cartairon  e  de  sucru  j*  «^uartairon  c  de  vin  blanc  tro  que  pro  ni  ajji 


1 ,  Le  robricateur  a  écrit  Dehrt 

2  Des  points  :  la  graphie  ordinaire  est  poncho.  Ce  qui  suit  ii*est  p*  très 
clair;  faui-il  entendre  «  signifie  la  mort  par  la  fiiirvre  «  ?  ou  n'est-ce  p«5  plu- 
tôt :  "  signifie  fièvre  [et]  mort  ■  ?  ou,  enfin,  ne  faut-il  pas  supprimer  nwrt  ? 

f .  Ms.  p,  surmonté  d'une  barre.  Grtie  restitution  est  douteuse  t:i  la  fin  da  , 
paragraphe  m'est  obscure. 

4.  Corr  signifier* 


RRCFTTFS    MÉDICALRS    EN    PROVKNÇAL  28$ 

et  msfto  stra  bona  poison  ad  hc!mc[s]  quc^  aurait  (foi,  14a  *>  mal  el  piuig  de] 
plus  ionts  mabutias  del  ventreil  H  cossomïra  toxs  los  maïs  viszîs^  per  que 

5iieiurft1nrf  cliil3ji?mf  nilrt  frta  i-rrt 
mwn  ff rîu*rm«i  ritmA  i^triiff  n^Jiw  menuea 
ïftfflirftit*  amttti  MniiiOtitt  "  - — -^ 

cmtUifimmfwmfmjg.(^mtCmnr^fVnnt 

A      ft  ?*  iKi  ttu^  qiif  (oum  imimC.  tneTam-ii i ttî  — ^ 
Wi  fîm'mi  tituûitf  mirtrUf  i^yimiirUd  ai  ii^fi«F 
/^  Lj%  ,mÇ  fïwt^^^^mntkiwwimv^  Utf nmlaC 

mrmyvcnla  fvmrm  ïMmtuî  (U  4M^  unm^ 
^iûtmf^  cmmn  mdïmn  iHgiiimtl   -  -    -J 


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ham  prt±n  Ji»  granit  kbrcs  c  las  gotas  en  la  testa  et  els  ob.  Aqucscâ  pobcm 
es  mot  CArn  e  bona  c  guerîzs  tôt  homt  queii  beu  d  icn  san. 

CoH/r*/  paralti^im.  A  pâlay^in  .j*  on^neii  ques  a  non  diarrogonv  Escalta 


1.  Le  nscto  de  ce  fetiillet  est  reproduit  ci *a près  en  fac*simîlé*  11  est  bon 
d^lve^tî^  que  les  rubriques,  qui  ici  ^e  confondent  avec  k  texte,  s'en  dis- 
tîn^ucnt  lort  bien  dans  rorigînaK  puisqu'elles  sont,  comme  les  initiales  des 
par^igrEpheSf  en  vermillon. 

2.  l!  y  a,  dan^  rAmidoiaire  de  Nicolas,  b  formule  d'un  onguent  appelé 
ua^uriitum  ura^atr,  mais  il  est  fort  différent  de  cetui-ci. 


286  P'    ME^^R 

la  tn  ucia  cassa,  e  paés  met  \  de  la  potvem  dd  cufbfbi»  e  pueis  odqc  lo 

nurmbre  en  que  <^  le  milt  t^  guern. 

Cmiirâ  $putitm  mn^mms  f>er  as*  Ad  aqueb  q\âe&  escapon  sanc  pcr  U  boca,  cl 
csdcvcn  si  ora  '  laora  can  lu  venas  rampan,  pcr  so  car  son  trop  plimA*.  Prcn 
|j  "icrmiînna  ■  vert  t  seca  11  e  lai  b  bollir  ab  vin  blanc,  ê  dona  li  a  beyre 

C&uira  ver  m  fi  aurtum.  Ad  home*  ques  aunt  vcnns  tai  raurctlla  pim  lo 
*uc  tïcb  arcctis  »  c  la  poîvcra  deb  nitreon  ujia  sîîÎs*  c  met  loi  pcr  l*auivlla. 

Quid  iiî  ni^ffîé.  Kiclla  ï  ts  caudla  e  seca  ti  icrs  gra*  pos  dut»  .x,  an^  ;  mol  a 
jçfan  venuï  dt  irairc  tas  humors  del  cors.  Pr^i  b  gratia  cl  (ai  ne  poîvera 
mtrsirb  b  ab  lo  me  dtl  arcens  <*,  c  bî  ne  empbust,  c  paujui  o  sobre I  vcntîdll 
p<»ijhenîl  dçl  cbn  qtics  aura  vernis  «  e  morran.  Ab  autres»  proi  b  polvera  c 
mçicîa  b  ab  tnd  e  bi  ne  letoari.  Autra  pozs  br:  Prcn  b  brina  de  b  niclb 
ab  îo  vinagrc  c  h\i  o  ciscalbr?,  e  mei  o  en  la  aurelb  per  los  verms  ad  aussrr. 

Contra  mal  h  m  itij^uims.  A  mal  dt:l  flanc^  pren  b  nielb  c  bj  la  boUir  ab 
vin  blanc  c  dona  la  i  .1  Nrure  .îj.  joms  o  ïrcs, 

Quid  sii  ptrfirum.  Ptrctrum  es  cauzs  e  secx  cl  ters  gra  ;  (t**)  pos  dun  ,v. 
An%.  Ciran  fors'  a  ad  home  que»  a  encombrât  lo  servir)  Je  mala^  h  timoré  de 
Ikutna  c  de  colirra,  cl  aura  lo  ^^cnirc  picn  de  ventosxïtat  *-  Pren  lo  piretrc  e  faî 
lo  u*jr  ad  home  qucs  aura  aqucstas  hum  ors»  e  fai  b  masie^ar  enlre  las  dens,  ' 
e  si  d  a  pabbî,  d  ne  j^utrra  :  e  si!  bs  bollir  ab  vin  blanv  ab  bs  tigas,  e  qyd  ^ 
bs\as  bcurc  îo  vin  e  nmnjar  b  figas,  mot  b  cafortara. 

Cimira  pàraUsitm  »,  Cant  li  pabiiln  fer  home,  pren  lo  piretrum  e  tai  ne 
polvera  e  mescla  i  .}.  pauc  d  oli  ab  aquda  polvera  en  J\.  pauc  de  vin  pur,  c  bu 
o  bollir,  puds  bi  ne  eraplausi  sobre  tozs  los  membres  on  le  pabjzi  ^^ta  e  b 
goU  anciîca;  e  si  podias  aver  de  Tcrba  de  pilctra  tota  vert»  si  la  pi^aton,  pueis 
bî  b  jasicr  en  vin  blanc  .?i\.  j«»mv*  e  pud^  o  boil,  e  pueis  o  cola  e  met  en 
aqud  suc  cobi  .j,  pauc  de  cer^i  et  .j^  pauc  d'oh  e  îam  o  bollir  toi  essems,  e 


t .  Ce  mol  01  à  supprimer* 

2.  Il  budrait  probablement  sermi/ntana^  b  scrmcmtatne. 

j.  G:ttc  leciure  est  certaine,  mai^i  il  esi  probable  que  le  copiste  aura  écrit 

ar(em  au  lieu  d'aktni  :  u  immttiatur  pulvis  nhri  confcctus  eu  m  succo  ûhstnihtt.  » 

5,  Pbtcarius,  I>  simpl,  mii.^  kigella. 

6.  tt  Conini  lumbricos  (kt  empbustrum  ex  farina  ejus  et  suca>  absmthîî 
cireu  umbilicum,  et  precïpue  pueris.  «  Pbtearius,  ihid. 

7,  Ms,  fkalfar, 

8.  Ce  qui  préc^Me  ne  vient  pa^  de  Pbtearius,  où  on  lit  seulement  (sous 
HHfrtKUM)  :  "  Cercbrum  a  superHuitate  Reumatica  mmiditiciil,  *■  Ce  qui  suit, 
au  conimire»  est  pm  de  Platearîus. 

^,  VjÉi  article  est  le  développement  des  dcmid^res  ligne*  du  S  fïmrruuM. 


RECETTES   MÉDICALES   EN    PROVENÇAL  287 

sera  bon  onnheniens  ;  pueis  onhc  lo  palaizin  cl[s]  membres  on  sera  la  gota 
artedca  e  las  autras  gotas. 

Qtud  sit  piper  K  Pebres  es  cauzs  en  lo  cari  gra  e  secs  el  mieig  del  ters 
gra.  De  .iij.  manieiras  n'i  a  ;  mas  le  nègres  a  mais  de  fors;i  ad  home  que  sera 
refrcjazs  de  totas  malas  humors.  Pren  lo  pebre  et  .]*.  herba  ques  a  nom  ellebo- 
rum  album,  e  d*una  espessia  ques  a  nom  euforbium  \  e  del  castor»  e  ùù  ne 
polvera  ben  prima  e  met  las(iiV)  per  las  nars,  et  estomudara.  (Fol.  i.n)  Mot 
es  bos  e  cars,  que  mai  val  que  son  J  peszan  d^argen  ;  et  aquest  esiomut  ne 
fara  issir  lo  mal  de  la  testa. 

Contra  guttam  caducatn*.  Contra  cpilencia,  so  es  una  gota  de  ques  hom 
cas,  e  fai  perdre  la  memoria,  et  ades  aquest  mal  mou  de  passio»  pren  la  ruda 
e  trai  ne  lo  suc  e  met  i  .j.  pauc  de  la  peonia  et  .j.  pauc  de  vi»  e  dona  lo  i  a 
beure. 

Ad  debUes  rohorandos.  Diasatirion  »,  aquest  lectoari  das  ajs  despoderazs  dels 
rennos,  et  ad  home  que  sera  refrejazs»  que  nom  porra  aver  companna  ab  las 
femenas  per  qualques  (51V)  ocaizon;  aquest  lo  guerra.  Dona  l'en  lo  malin  e  de 
vespre  ab  lo  vi. 

Contra  quant Jihet  i^nttam.  Pren  de  cerbe*  et  vin  blanc  e  clar,  plus  del 
vin  en  doble  que  de  la  cerbe,  e  cosz  o  fort,  pueis  pren  d'oli  d'olivas  e  mescla 
o  e  coga  entro  que  remanga  la  liquor  de  Toli  ;  pueis  pren  de  cera  blanca  nova 
et  mescla  o  tôt  et  on  ne  lo  luec  gotos  cotidie  ad  igmm  o  al  soleil  tro  sia 
guerizs. 

Contra  crematuram.  A  cremadura  pren  d'oli  d'olivas  et  atrestan  de  claras 
d*ueus,  e  bat  o  fort  tro  ques  tenga  et  on  ne  la  cremaiura,  e  guerra  e  nom 
praliticara. 

II.  Recettes  variées,  charmes 

Le  recueil  de  recettes  compris  dans  les  ff.  143  v"  à  160  est, 
comme  on  en  jugera  par  le  fac-similé,  d*une  tout  autre  écriture 
que  le  recueil  précédent.  Les  usages  graphiques  difl'érent  aussi 
notablement,  bien  qu'au  fond  la  langue  soit  à  peu  prés  la 
même:  l'un  et  l'autre  recueils  appartiennent  visiblement  à  la 


1.  Certaines  parties  de  cet  article  viennent  du  5  Pn*HR  de  Platearius. 

2.  Ms.  eliforbium. 

3.  Ms.  5. 

4.  Cette  recette  est  indiquée  dans  le  §  ruta  de  Platearius. 

5.  Ms.  DijauinirUm  \   mais  cf.  VAnt'uhUtirc  Nicohis  (l)orveaux),  p.  8.  Cxi 
article  n*a  qu'un  rapport  éloigné  avec  le  ^  saiirion  de  Platearius. 

6.  Il  y  a  bien  dans  Platearius  un  *',  sinai'Is,  mais  il  ne  paraît  pas  que  le  pré- 
sent article  en  vienne. 


288  «^^  p     m^YER 

région  voisine  du  Rhône  en  son  cours  inférieur.  Mais  la  diffé- 
rence la  plus  grande  est  dans  la  namre  des  recettes  qui  les 
composent  :  celles  du  second  recueil  ont  un  caractère  beaucoup 
moins  exclusivement  médical  ;  un  ^rand  nombre  ne  sont  rien 
de  plus  que  ce  que  nous  appelons  des  remèdes  de  bonne  femme. 
Il  y  a  aussi  beaucoup  de  charmes,  le  tout  jeté  pêle-mêle.  Cette 
curieuse  collection  mériterait  assurément  d*ètre  publiée  en 
entier.  Je  ne  puis  en  donner  ici  que  des  extraits.  Pour  la  facilité 
des  renvois  je  numérote  le*;  paragraphes. 

Il  ny  a  pas  lieu  de  chercher,  à  proprement  parler,  les  sources 
d*une  collection  formée  dYléments  aussi  variés.  Çà  et  là  on 
trouve  la  mention  de  remèdes  qui  sont  indiqués  dans  les  livres 
de  médecine  du  temps,  mais  il  paraît  bien  que  Li  plupart  de  ce^ 
recettes  sont  recueillies  d'après  une  tradition  orale.  Le  compi- 
lateur était-il  médecin  ?  Je  serais  porté  à  le  croire;  radmission 
de  formules  superstitieuses,  de  charmes,  n  est  pas  une  objection. 
On  trouve  parfois  des  charmes  intercalés  dans  des  compilations 
dont  le  caractère  médical  n  est  pas  contestable*  Il  y  en  a  un  grand 
nombre  dans  le  k^chbook  qui  occupe  le  second  tome  du  recueil 
publié  par  Oswald  Cockayne  pour  le  Maître  des  n.les'.  Ce 
qui  nie  porte  à  croire  que  le  compilateur  écait  un  médecin, 
quelque  modeste  praticien  de  campagne,  c*est  une  référence  fort 
précise  qui  est  donnée  au  §47-11  y  est  question  d'un  remède, 
inédit  ce  me  semble,  pour  la  goutte.  Ce  remède^qui  n'est  peut- 
être  pas  beaucoup  moins  efficace  que  ceux  auxquels  on  a  recours 
à  notre  époque,  consister  prendre  des  bains  dans  une  eau  où 
un  aura  fait  bouillir  des  tortues  itvv^Stir^larîugas  bos£a\iytnctli*) 
et  à  s'appliquer  la  chair  de  ces  tortues,  aussi  chaude  que  pos- 
sible, sur  les  parties  douloureuses.  Et  Tauteur  ajoute  :  «  Je  sais 
cela  d'une  façon  certaine  par  le  père  de  Berenguier  Pallada  de 
Sainte  Marte  de  la  Mer  \  qui  gisait  dans  son  lit,  perclus,  et  ne 
s'en  pouvait  lever  si  on  ne  Ten  levait;  et  je  le  sais  par  son  fils 
qui  lui  fit  foire  ce  bain,  n  Nous  ne  savons  rien  de  plus  sur  ce 


î.  LffcMofHs.umrtmnnine  ^nd  starcrap  ôf  tarly  Bngiand^  ..XQÏhxx^à  and 
cdUoi  by  che  R.  Owald  Cockayrte.  Ijotidon,  1864-1866* 

1.  Oti  ne  trouve  plus  aauuHcmçnt  La  tenue  terrt^stre  dans  le  Midi  de  la 
France.  H  y  en  a  encore  Cïi  lia  lie,  en  Grèce,  en  Espagne. 

%.  Le*  Saintes^Mari^s-dc-b-Mert  ch.-l  de  c,  de  T-irr.  d'Arks,  lieu  de  pèle* 
tijijigv  célèbre  en  i^rovtmcc  ;  ^oir  Mirtùi, 


RECETTES   MÉDICALES    EN    PROVENÇAL  289 

Berenguier  Pallada,  mais  il  y  a  là  une  indicaiion  suffisante  sur 
le  pays  auquel  appartenait  le  compilateur. 

Dans  la  seconde  oioitîè  du  xiii'^  siècle,  époque  où  fur  rédigée 
notre  compilation»  pouvait  se  dire  médecin  tnut  homme  qui 
pratiquait  Tart  de  guérir,  ou,  si  rLKpressîon  est  trop  ambitieuse, 
lart  de  soigner  les  malades.  Il  n'Otait  pas  besoin  d'uiit  qualifi- 
catÎQit  officielle,  Sansdoutt,  à  Montptilier  une  licence,  obtenue 
à   la  suite  d'examens,  était  imposée;  cela  est  constaté  par  les 
Statuts  donnés  à  rÉcole  de  médecine  en  1220  \  mais  il  est  bien 
probable  que  cette  gaiantie  n'était  guère  exigée  que  dans  le 
territoire  de  la  cité.  On  n*avait  pas  coutume  en  ce  temps  de 
poursuivre  les  gens  potir  exercice  illégal  de  la  médecine.  Que 
notre  homme  nit  été  un  vrai  médecin  ou  un  qttack^  comme  on 
dit  en  anglais,  il  faisait  de  la  médecine  populaire.  Ses  recettes 
sont  d'une  grande  simplicité  :  pas  de  ces  ren)èdes  composés  qui 
rcniplissent  les  traire^  laiins  du  tetnps  ou  des  âges  précédents; 
pas  de  termes  scientifiques;  tous  les  ternies  employés  ^ont  vul- 
I paires ^  parfois  même  très  vulgaires  (voir  arc*    m,  17,  19),  Et 
.  c Vst  ce  caractère  populaire  de  nos  recettes  qui  en  f;tit  le  prin- 
cipal intérêt.  Le  recueil  commence  ainsi,  en  latin  : 

{Fol,  141  i*)  Ad  fistulam  vel  cranirum,  Accipe  md  coctum  bene  dispuma- 
tum.  et*  du  m  meï  ceph  bullîrc,  mitte  in  illud  farinum  t  rit  ici,  et  de  hoc  [Jac] 
I^^rnpbu^t[rjUni,  etponesupermalLim,  Jujsvîces  vcl  tre.s.cilidum,  lît  sanabitur. 
Ut  muUer  dio  pariât.  Homo  solvat  suam  dncitiram  et  ctn^^t  panurieniem 
Icr.  et  dicat  :  «  Ego  le  cingo,  Christus  te  solvat  '.  » 
Après  un  certain  nombre  de  recettes  et  de  charmes  en  latin, 
le  provençal  commence*  ainsi  : 
1.  (FoU  144)  Si  vols  honi[c]  satïar  de  gou  caduzcha  \  puejd  al  tm  de  la 
fonde*,  ncgyn  non  te  vetra^e  preii  un  delz  poUis,  et,  ans  (|ue  toms  a  terra,  toi 

H  I.  Voir  A.  Germain,  UÉcolt  dt  mèikcim  de  Mottip^Ui^r,  s^s  onifhtti,  sa 
U^-^mtiitiUm,  ion  rnsfi^tianmi  (Monî^d\hf\  i8î4o,  extrait  des  Métn.  de  la  Sac, 
■  a^rchéol.  de  Montpellier),  p.  t6  et  suiv. 

a.  Superstition  bien  connue,  Eîle  est  mentionnée  dans  un  livre  rotiergat 
du  xv<  siixic  (Bttit.  dt  k  Sih\  tiits  am,  texits,  1  &90,  p-  94)*  Voir  iussi  T  h  Sers. 
Trmi€  dfs  sîtpfniitions,  I,  274  et  58^. 

}.  La  gui  fil  r^Tf /«m  mentionnée  plus  haut  (p.  187),  le  mat  caduc,  Tépilep^ie* 
4.  I!  y  a  dans  Raynouard,  IH,  sh>*  >5ï.  intmia,  î>c»m/n\  i ronde, 

Hftff  XXXil  i  S^ 


290  p.    MEYER 

H  lo  ca[p],  e  pois  obrc  li  lo  cap,  et  airobaras  ins  doas  peiras  de  las  cals  es  la  una 
roja  e  Tautra  blancca.  La  roja  ajuda  en  las  demandadoiras  cauzas,  si  om  sobre 
se  la  porta  ;  la  blancca,  si  es  lavada  en  Taiga,  da  n'a  beure  ad  aquel  que  a  la 
goia,  e  pueis  sera  sans  ' . 

2.  A  goia  que  longament  esta  en  cors  d*ome  et  de  femena,  pren  de  la 
fuella  de  la  savina,  e  cos  la  en  aiga,  et  en  aquela  aiga  fai  Tomen  bainar,  e  sera 
gueritz. 

3.  A  gota,  quin  qua  :  cuelg  solscgia,  aicesta  erba,  de  la  scima  tro  a  la  razits, 
(yo)  cascuna  per  ;xij.  oras  e  per  .xij.  dies,  e  dona  ad  aicel  oad  aicella  a  beure 
una  vcs  cascun  dia. 

4.  Item,  ad  aquest  mozeus  :  prenlo  cor  de  la  granoilla,  del  mascle  a  rome, 
del  femen  a  la  femena,  e  da  Ten  a  mangar,  e  sera  garitz. 

5.  A  gota  que  es  en  las  gautas  o  en  austres  (sic)  luecs,  prin  (51V)  de  la  ver- 
vena  e  trissa  la,  e  mescla  la  ab  la  clara  del  ou,  e  d*aiso  fai  enplaust  e  pausa 
l'en  desobre. 

6.  A  gota  a  sanar,  pren  de  la  ruda  e  cos  la  ben  ab  oli  tant  tro  que  voilla 
ardre,  c  d'aisel  oli  ung  lo  loc  on  la  gota  fer,  e  desobre  pausa  la  ruda,  e  desobre 
la  ruda  pausa  la  lana  suzolenta  cauda,  e  sanara. 

7.  A  gota  a  sanar,  prin  aloen  e  destempra  ab  clara  d*ou,  e  d*aiso  fai  pego- 
mas  ',  e  pausan  desobre  la  gota,  e  sanara. 

8.  A  gota  pessima,  pren  .xxx.  ous  de  gallina  et  co  )  los  en  aiga,  e  pueis 
vrai  de  quascun  los  moiols.  De  la  clara  fai  quet  vols,  pueis  mescla  los  moiols 
ab  sain  vielg  de  verre  ♦,  en  la  sarta  lo  ferra  5  tant  tro  que  sia  faig  engucnt  cais, 
e  mescla  i  .iij.  fcls  de  porc,  et  ab  aiso  ung  lo  loc  on  la  gota  er  a  calor  de  foc 
o  del  soleil. 

9.  Ali  oculos  lagainoses,  pren  ierziziris  (sic)  e  mescla  lo  ab  la  clara  del  ou, 
e  fai  cnplaustre  c  pausal  desobre  l'oil  tron  quant  sia  garitz. 

10.  A  femna  trop  luxuriosa,  pren  *  locoillo  destre  del  lop  e  mcsclal  ab  oli 
et  ungan  soven  lo  con  7  dedinz. 

11.  Si  vols  forz  dens  aver,  pren  lo  mastege  ç  mastegel  ab  las  dens. 

12.  Ad  aquest  mezeus,  lava  soven  las  dens  ab  aiga  freida. 

13.  Ad  aquest  mezeus,  pren  lo  mentastre  e  fai  en  polvera,  e  mesclal  ab 
lana  suzolenta  et  ablo  mel,  et  ab  aiso  brega  las  dens  soven. 


1.  Sous  cette  forme,  cette  superstition  ne  m'est  pas  connue.  Mais  on  sait 
que  certaines  pierres  trouvées  dans  le  nid  de  l'hirondelle,  selon  d'autres  dans 
son  ventre,  passaient  pour  guérir  diverses  maladies,  et  notamment  l'épilepsie. 
Voir  Eug.  Rolland,  Faiitte  pop.  de  la  Frame,  II,  318. 

2.  «  Pe^oumaSy  emplâtre  de  poix  «  (Mistral).  N'est  pas  dans  Raynouard. 

3.  Pour  cos  (cuis), 

4.  Raynouard  (V,  503)  n'a  que  ver  au  sens  de  verrat. 

5.  Corr.  freja  (plutôt  fre^^  ou  f régi  s)  7 

6.  Ms.  prena. 

7.  Le  nis.  répète  ici  soven. 


RECETTES   MÉDICALES    EN    PROVENÇAL  29 1 

14.  Si  vols  aver  clara  votz,  pren  lo  suc  dcl  polieg  e  beu  ne  en  dejun. 

15.  (Fol,  14s)  Sx  crcmas  ta  cara  ab  lo  soleil,  en  aisin  la  podes  enicndar  : 
escampa  dcl  comin  en  vinagre  quant  quet  voillas,  e  fara  graissa  ;  bregas  la 
cara,  e  si  as  la  cara  tacada,  pausa  i  d'aizo  que  es  dig  desus  en  la  nueg  quant 
vos  ires  jazer  ;  et  al  mati  lava  '  la  cara  ab  aiga  freida. 

16.  Si  vols  que  la  boca  ben  ti  flaire,  pren  lo  polieg  sec  e  manjan  per  una 
ves  cascun  dia,  o«del  sarpol,  o,  sis  vol,  niastegc  la  seniensa  del  api  o  la  foilla 
rubi  tems  '  ô  la,  s'en  lau  J  la  boca  ab  vin  san. 

17.  A  nafra  clausa  obrir  o  sanar,  pren  la  merda  del  porc  ♦  e  niescla  la  ab 
vinagre  et  ab  molsa  J  cocha,  e  pausa  l'en  desobre. 

18.  A  pruzige*  et  a  roina,  pren  la  semensa  de  Tapi  e  trisa  la  ab  lo  vin  et 
ab  lo  mel,et  oigne  tôt  lo  cors,  et  cr  sanatz. 

19.  Ad  aquest  niezeus  pnizigen?  que  es  tom  lo  cul,  pren  la  salvia  et  cos 
la  ab  aiga  e  lava  t*en  lo  cul. 

20.  Si  volsanar  foras *tart,  beu  .iij.  globs  de  bo  vin  soven  en  dejun. 

21.  A  la  nieiras»  ad  aucir,  cos  la  (sc]mensa  del  cogonibre  salvatge  en  aiga 
et  escampa  Taiga  per  la  maison. 

22.  Ad  aquest  meteus,  cos  la  foilla  del  cardo  en  vinagre  et  escampal  per 
la  maison,  e  mor[r]an  totas. 

23.  A  rabia  a  sanar,  pren  la  plena  man  de  la  cemensa  del  comin  salvaige 
e  trissa  la  c  da  Ten  a  beure  ab  aiga,  a  home  o  a  bestia  o  a  can. 

24.  Als  lunaiics  '°  que  sofron  lo  cors  de  la  luna,  pren  la  peonia  e  lia  la  H 
ai  col  d'aquel  o  d'aquella,  e  si  aquesta  erba  esens  portava  ab  se,  unquas 
aquest  mal  non  aur[i]a,  e  si  la  mas  "  enan  ab  vos  tempesiag  nous  nozeria. 

1.  Ms.  lava  lavai. 

2.  Sic,  avec  un  signe  d'abréviation  sur  le  premier  jambage  de  ce  que  je 
prends  pour  une  m  ;  ce  mot  doit  être  le  nom  latin  d'une  espèce  de  ronce, 
rubi,.. 

3.  Subjonctif  de  lavar;  le  nom  de  la  substance  avec  laquelle  on  doit  se 
rincer  la  bouche  manque  après  0  la. 

4.  Pour  les  pustules,  les  furoncles.  Fauteur  recommande  »<  la  nicrda  delb 
cans  cauda  »  et  «  la  merda  de  la  cabra  »  (fol.  1 5  3). 

5.  a  MuUa,  mulsum,  potio  ex  melle  et  vino  confecta  »  (Du  (Lange). 

6.  La  première  syllabe  est  écrite  en  abrégé  (  n),  mais  plus  loiii/)/«-  en 
toutes  lettres  (Mistral,  prusigk). 

7.  Il  y  a  sur  IV  un  signe  d  abréviation  qu'on  ne  peut  rendre  que  par  n.  Ce 
n'est  pas  plus  extraordinaire  que  tron  (9)  «/w/m  (15),  etc. 

8.  Cette  expression,  qui  est  suffisamment  claire  par  elle-même,  n'est  pas 
relevée  dans  les  dictionnaires. 

9.  Les  puces.  Le  mot  n'est  pas  dans  Raynouard. 

10.  Ms.  Umatirs. 

11.  5if,  corr.  Vavias  ? 


292  p.    MEYER 

25.  Ad  fluxum  sanguinis  escrieu  aquestas  quaractas  e  lia  las  li  al  col,  e 
si  non  o  crézes,  escrivas  las  en  un  coltel  que  ajal  mange  blanc,  e  fires  ne  un 
porc  e  ja  non  eisira  sanc  .  Fcilissexhi  1 1 1  n  cco  a  i^  (yo)  hgh  x  g  g  9  •. 
Aqui  meteus  escrieu  aquestas  :  *uhnbsen:(zsrooadshccchxxp 
olxavsihiarcoiliponsior. 

26.  Ad  aquest  meteus  conjurament  de  sanc  a  estancar  :  Sans  Acarias  *  fon 
degolatz  davan  Taltar,  el  sanc  de  lui  fon  cais  peira,  et  en  aisi  lo  sanc  d*aquest 
onic  sia  fagt.  In  nomine  Patris  et  Ft'Ui  et  Spiritu[s]  Sancti.  Amen,  amen.  Fi. 
f.  f.  î. 

27.  Ad  aicel  cui  lo  sen  vaireja  «,  escrieu  aquestas  letras  c  lia  las  li  al  col  : 
Malignitatz  te  gadzaignet  5,  e  nostre  seiner  Jhesu  Crist  te  sanet,  la  Verge 
niadona  sancta  Maria  te  salvei,  m  m  a.  r  vos. 

28.  A  enfantament  '  mort,  pren  la  sadriega?  et  ab  la  soa  semensa  trissa 
la  e  do  l'en  ab  vin  a  beure. 

29.  Ad  aquest  mezeus,  pren  lo  suc  de  la  vervena  e  da  Tenab  aiga  freida 
a  beure,  e  de  mantcnent  sera  deslieura[da]. 

30.  A  febres,  coil  la  vervena  dizen  aiso  :  In  nomine  Patris  et  Filii  et  Spi- 
rittis  sancti^  amcn^  et  ab  una  orazon  domenegal*,  e  trisa  la,e  da  Ten  a  beure 
ab  aiga  benedicta. 

31.  A  trastota  febre  escrieu  aiso  en  carta  vergée  fai  al  febricitant  .viiij. 
dias  sobre  se  portar  *ihc  4-  ihc  4-  ihc  ^  Soter  ynos»  adonai  o. 

32.  A  quarta[na]  febre,  pren  .j.  poma  e  trenqua  la  en  très  para^  et  escrieu 
en  ella  aquestz  nom  desobre  [esjcrig  ab  .j.  ferre  agut,  e  pois  da  n'a  manjar  ab 
pan  al  febricitant. 

33.  Encara  per  febre  escrieu  en  carta  verge  e  pen  lo  al  col  del  febros,  mas 
non  sia  legiz,  ne  cant  anara  ad  alcuna  cauza  non  neta  nol  porte  ab  se  :  7-  Ego 
sum  alpha  et  <•>  primm  et  (fol.  146)  notnssintus^  initium  et  finis  •*>,  Dominus  noster 
JIm'Sus  Cbristus, 

34.  Ung^ujentum  a  febre  a  tolre.  Pren  lo  suc  d'aquesta  erba  jusquiami,  el 
suc  dcl  api,  el  suc  de  la  menta,  el  suc  de  la  febrafuga,  e  mesclal  a  vinagre,  e 
d'aiso  ung  las  gautas  els  piegs  e  las  plantas  e  las  mans  totas,  e  gerra. 


1.  Cette  reproduction  est  approximative:  les/  notamment  sont  douteux. 

2.  [Zyjcarias} 

5.  Fiat,  fiât,  fiât. 

4.  Le  prov.  mod.  vareja,  «  vaciller,  chanceler  »  (Mistral). 

5 .  Cette  notation  par  d^  se  retrouve  ailleurs  ;  voir  la  préface  de  Guillautne 
de  La  Barre,  p.  Ixxvij. 

6.  Faut-il  suppl.  [d'enfant]} 

7.  Prov.  mod.  sadreio,  v  sarriette  des  champs  »  (Mistral). 

8.  Cf.  Jorct,  Les  incantations  botaniques^  dans  Romania,  XVII,  337. 

9.  Corr.  v/o.v?  Ce  signe  tient  ici  la  place  d'une  croix   cantonée  de  quatre 
points  qui  ne  peut  être  reproduite  en  typographie. 

10.  Apoc.  I,  8,  17. 


RECETTES  MÉDICALES  EN  PROVENÇAL  29  J 

3$,  A  fcbrç%  a  sdn.ir  cscrieti  mso  en  qiiartd  verge  e  îi;i  la  aî  col  Jel  ft'broi  : 
Sieptmnui,  Poriuriits^  Sanbucitts^  Duvttius^  Ei^tnitti,  Gfiifiusd  QHitiaiittsK  — 
A  febrts  (sukvui  da  kUrts).  —  A  febres  a  sanar  cicrien  abo  €ti  -iij.  osiia>  :  en 
la  prcmicira  ^  ^u*i/ii  /la/rr  a  ^/  *o  Ti  t^n  b  st;cuîidu  o5tLi  -r  /*t//^  //'/'i  r*Viî 
CMi  ^ ,  en  b  lersa  ostia  -r  i^is  Spirilus  Samius  rtmedium  r  ^^i  t'  î  c  pois  da 
n'  a  manjar  al  fchros  una  aprcs  l'auira»  c  cani  tous  jij.  las  aura  manjadas 
wra  gcrit- 

36.  A  irastotas  febreî.  ts^ncu  aiso  en  pur}a{a}niîn  verge,  e  pausan  sobre 
|'*iutar  dcMît/  \o  calice  e[n]craque  très  mesasi  sien  cantadas  desohre  :  +  on  hna^ 
<mtî^  0m t  me,  &mi,  oftm^  am,  0nc,  omi\  c  puèb  liai  aJ  col  del  febros.  —  hem,  per 
.viirj.  dias,  sobrt'l  cap  dcl  febros,  Quknmqm  vhH  *  trastot  cl  premier  dia,  ,vuîj. 
vcgadas,  al  segon  .viïj,  aî  ters  ,vij,,  al  quart  »v[*,  al  sinquen  dia  .v.  vegadas, 
al  sejen /t'dj.,  al  seten  Ji].,  al  oclien  .ij*,  al  novcti  *j.  En  aisi  sera  deslletireii 
de  trastota  la  febre. 

37-  A  febrcs  escrîeu  aîso  e  pois  lia  al  co!  :  Beahis  Prtnts  Tapostol  jaiia 
davan  la  porta  de  Galilea,  e  vcnc  nostre  scîncr  Jhesu  Crbt  i  e  dis  a  lui  :  «  O 
Pcire»  per  que  tu  jajees  aisi  ?  •>  Sain  Ptirc  rçspt>n  a  lui  :  *=  Seiner,  car  plens  scï  de 
febrcs,  »  Nostre  Seiner  toquet  lui,  c  de  mantenvnt  sain  Pcire  rornei  sans,  e 
Nûstrc  Sçinef  (t«)  dieîs  a  ïui  ;  «  Peire,  quai  causa  tu  vols  de  me  >  o  Sains 
Pcirc  dis  ad  cl  :  n  Setner,  qui  aura  aquesta  paraula  o  la  porta  escricha  non  deu 
avcr  febres.  »  Nostre  Scincr  dis  a  lui  :  «  Peire,  sia  fag  aisi  coni  tu  voîs  -r  »  *. 

Voici  une  recette  qui,  pour  n*avoir  rien  de  médical,  n'en  est 
pas  moins  curieuse  ; 

38.  (fol*  155)  Si  vols  saber  de  Jj,  ornes  ques  vol  on  combatre  cal  sera 
vencutjî,  pren  la  cera  bencdicta  *j.  carga  de  .ij.  sols  s  e  depan  las  en  doas 
jiAru,  de  tal  gisa  que  peso  cascuna  partida  égal  de  .xij,  d.,  e  d'aqui  fai  .rj. 
siris  egaïment grans,  e  pausa  aicel  davanf  .j.  altar  prop  .]■  det  d'espa/.i,  et  escri 
en  cascun  del[s)  siris  lo  nom  d'aicel[sj  que  se  volo  combatre,  et  cNComprent 


I .  Cette  formule  se  trouve,  sous  une  Forme  plus  correcte,  a  la  fin  d*U5 
traité  des  maladies  des  femmes  en  partie  tiré  du  traite  bien  connu  de  Trotula, 
que  renferme  le  nis,  B,  N*  lat,  7056,  foK  looff  :  Très  guitiU  ante  accfsmnrm 
bihat  kicth  rmtltrHi  Ha  ni  ig^nord  tjuid  Nbt'ril  (rien,  dans  ce  qui  précède,  n'in- 
dique le  sujet  delà  phnisc).  ikm  Bugtnim^  Sttfûnus^  PorCAttitts  {Porcnrius}), 
Samhtitiiii,  Dymfism,  Gfksjm^  Biasius  H  Quitymm.  Hec  supfr  iéptvkt.  Il  n'est 
pas  dît  pour  quelle  maladie  ce  charme  est  recommandé^  mais  les  recettes  qui 
suivent  se  rapportent  à  la  fièvre. 

a.  Début  du  symbole  d'Aihanase, 

î.  On  a  en  diverses  bngues  des  formules  du  même  genre,  où  figurent, 
comme  ici»  Jésus  et  saint  Pierre;  seulement  elles  concernent  le  mal  de  dents 
(R,  Kôhler.  KIntu're  Schrijkn,  111,  545). 

4,  Voir  la  suite  sur  le  ùvc  similé.  Il  y  a  de  bien  bonnes  recettes. 

j.  Soit  24  deniers- 


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RECETTES    MÉDICALES    EN    PROVENÇAL  295 

amdos  aicels  siris  egalmcnt.  E  quant  los  auras  escomprezes  • ,  e  tu,  scincr 
Dieus,  en  dcmostra  sobre  nos  la  lo[a]  miscricordia.  Dcdaratio  sermotium  tuo- 
rum  ;  da  intellectum^  Domine.  Gloria  Patri  et  Filio  et  Spirittii  Sartcto,  ab  Pater 
noster  ;  et  aisi  com  come[n]saran  ad  ardre,  de  mantcnent  veiras  aiccl  que  pre- 
mieirament  come[n]sara  ad  ardre  enasprezira  sas  flamas  si  combaire  si  devo  ; 
si  nos  devon  combatre,  cremaran  ambedui  egalmen  et  en  pas;  e  si  se  con- 
baton,  esgarda  los  siris  entro  en  la  fin,  et  aicel  que  preinieiranient  sera  cre- 
matz  signifîca  lo  vencui,  et  aicel  que  pois  cremara  longament  significa  lo  vens- 
cedor. 

Fin  (fol.  158  v°): 

39.  Si  vols  que  blat  non  si  afole%  pren  de  la  fenida  î  del  porc  niascle,  que 
non  sia  crestatz,  ains  l'apele  om  verre,  petit  o  gran,  e  aquele  fenida  lia  en  un 
drap  e  met  la  ins  en  l'arca  o  el  granier  o  el  sol,  o  la  on  lo  blat  sera,  e  non 
s'afoUara  blat  tant  co  aco  i  sia. 

40.  Si  vols  escr  amatz  per  femena,  pren  .j.  meailla*  viella  e  muella  la  en 
cresma,  e  tota  moillada  met  la  e  cera  bezeneita  $,  e  pois  fai  cantar  .xiij.  nies- 
sas  sobr*  ella,  e  pois  met  la  en  ta  boca  e  baia  cella  que  tu  amaras,  e  garda  pois 
que  la  cera  ni  la  mezoUa  non  crem. 

41.  La  dieta*  es  aitals  :  maninc^  carn  de  mouto  e  de  gallinas  e  de  perditz 


1 .  Lacune  ?  Ce  qui  suit  est  une  incantation  qui  n*est  pas  annoncée,  et  dont 
il  se  peut  que  le  commencement  soit  omis. 

2.  Ms.  sia  foie, 

3.  Plus  haut,  fol.  119,  il  est  question  de  «  la  fenida  de  la  rata  »,  puis, 
fol.  150,  de  «  la  fenida  las  cabras  «.Je  ne  connais  pas  ce  mot. 

4.  Les  mots  atnati  p.f.  p.  ./.  tneaillu  ont  été  grattés  par  un  lecteur  qui  vou- 
lait rendre  cette  précieuse  recette  inutilisable.  —  Raynouard  (IV,  175,  sous 
MEDin.LA)  enregistre  meallki  au  sens  de  «  moelle  »  avec  un  exemple  tire  de 
B.  de  Bom  (Un  sifivntes  on  mot^  nonfalh),  mais  ce  mot  est  entendu  dans  Pcdi- 
tion  de  M.  Ant.  Thomas  et  dans  la  seconde  édition  de  M.  Stimming,  au  sens  de 
«  maille  »,  demi-denier.  Cependant  le  sens  de  moelle  ou  de  jaune  d'ceuf 
serait  admissible,  car  plus  bas  notre  texte  porte  meioUhi.  On  pourrait  sup- 
poser qu'ici  meailld  est  une  faute  pour  meoilla. 

5.  Pour  hene^eita, 

6.  Je  ne  sais  pas  à  quoi  se  rapporte  cette  prescription  ;  je  ne  pense  pas  que 
ce  soit  à  l'objet  indique  dans  la  recette  qui  précède. 

•  7.  On  rencontre  plus  haut  (fol.  152  v»)  maninge.  Le  subj.  pr.  manque  (de 
man^ar)  est  employé  dans  le  poème  de  la  Croisade  albigeoise,  v.  4641  (cf. 
^liiaifûi,  VII,  434).  La  forme  plus  ordinaire  maniée  se  lit  plus  bas.  Au  fol. 
1 50  yo  se  trouve  le  pi.  maniggo  :  «  Si  vols  que  las  abeillas  not  manii^go  »  ;  au 
fol.  151,  Tind.  pr.  maninga  :  «  e  pois  geta  aicel  lart  ad  .j.  can,  e  sil  imninga 
l'om  vieura.  » 


296     '  p.    MEYER 

e  de  cabrit  c  carn  de  porc  qitc  aja  est^t  /ij.  dias  en  sa,  et  estenga  '  se  de  cam 
de  vacâ  e  de  carn  de  lebrt%  e  dt  cam  de  conil  manjc  .j.  petit,  e  mange  siJvâgcs 
du^else  d^atjuels  de  Tai^a  .j.  ptcit;  e  manje  sch^iicl  jb  U  borjgc  (/ïj/.  i  j^)  e  ab 
lo  fenol  et  ab  Terebd  cucg  mange  bledas  *  ,j,  p^uc,  Tavjs  e  lentîlUs  c  mil  non 
m^nc  ges;  »exer5  et  amenks  e  rîs  mange,  ou^  cueg  en  aîga  tnanje,  lops  f  e 
pieisos  ah  cscaraa  et  angulllas  e  pasarx  *  mange  d'anguilas,  c  de  bcstina  î  e  de 
rajada  *  se  garde  t:  de  peis  sens  escapa  i  ;  ous  de  rajada  pot  ben  manjar^  vin  blanc 
e  %in  cas  tain  ^  adagat  beva,  pan  de  frottten  e  be  iresc  manje,  codons  e  milgra- 
nas  duQsati  -^  e  razims  scecâ  e  Jigas  secca!^  mange,  datils  niânje  .j.  paitc,  e  non 
îna(njge  cam  ranstida,  gingibri  e  safran  e  cardamonis  e  semcnsa  de  fenoil  en 
sas  salsas;  piment  |iroflai  beva,  mel  escumai  mange.  Si  usât  de  jazer  petit  ab 
femena  tôt  temps  si  a  malegransa  '^  et  ab  aîegrch  ornes.  Uze  diasene  '  '  en  que 
aja  aur  e  musc  et  ambre,  et  aiso  que  sia  tin* 

42.  Use  aquestas  pillolas  contra  malenco::!ia  :  prtn  de  lapis  armcnius*'  c  de 
lapis  la^ulif  de  cascun  egalmeni,  e  dos  ait;ins  de  semé,  e  metes  î  u  pauc  de 
masiec  o  del  lu,  et  aquestas  use  pillas  '^  .j.  ves  la  setmana.  Ab  ta  gauda  manje 
de  pluis(?)  o  de  diamargariton'^;  e  manje  de  safra  e  sos  manjars,  e  gingibri 
et  anis  cai^ît,  cardamoni  en  derier;  si  aiso  non  prophieitava,  fasa  .j.  cochura 
lai  on  los  àj.  tes  se  joignon  ;  prena  pois  ab  carn  de  porc  *s  fresca  pas  salât  ab 
eruga  '*  el  raïs  del  rave  ab  met  e  scba  cruza,  ab  que  b  raiitz  *',  e  fasa  rmiti- 
rium  ï^  de  caotaridas,  cant  sera  sazons. 


i.  Du  verbe  tsteufr  sur  lequel  cf.  ftww.,  XXI,  aai 

2,  Emseî^  voir  p.  281,  n.  j*  —  «  BtEDO,  poirée,  bette,  plante  potagère  » 
(Mistral).  Raynouard  (11,  227),  «  blette  1»  avec  un  ex,  tiré  de  ÏHiucidati. 

3 ,  Des  loups  de  mer, 

4,  Corr,  pastat^^ 

5,  Je  ne  connais  pas  ce  ttioi. 

6,  Raie  (Raynouard  et  MisiraJ), 

7,  Je  ne  connais  pas  ce  mot.  On  ne  peut  corriger  ticamû,  puisque  le  pois- 
son à  écailles  est  permis,  * 

8,  Je  ne  sais  ce  que  c*est  que  celte  sorte  de  vin. 

9,  Pour  dousas. 

10,  Corr,  en  ahgrama} 

î  t ,  •  Dias<^ne  en  Diasenne   »,  conlection  dont  le  séné  était  la  hase  <Dor- 
vcaUK.  ÎJAniiéoî.  NimUn). 

il,  Pierre  d* Arménie*  carbonate  de  cuivre  (Dorveaux,  VAnfiduL  N<a>Lu). 

15.  Construction  singulière  :  on  attendrait  ust  jqttoias pitim. 

t4.  4  Confection  dont  les  d^ax  sortes  de  perles  éuient  là  base  1»  (DarveauK, 
VAniid,  Xk.^  p.  s8). 
tj,  Ms.pocr. 

16.  Chou-roquette,  Brassica  iruca  L, 

17.  11  doit  manquer  ici  quelques  mots, 

18*  Un  cautère  (De  Cange,  ructorium  et  RurroRttJM  ;  Bos»  Gloss,  de  U 
ChiruffU  de  Mondevîlle,  RUPTotHE). 


RECETTES   MÉDICALES    EN    PROVENÇAL  297 

43.  Ad  refrigerendum  lo  postairol,  acùpe  stercus  asine  virgini  mulieri  cur- 
gilla...  »/flc  sihi  balneum  et  homini  asini  inveni  ^ 

44.  Si  vois  de  vin  trebol,  aisi  trcbol  que  no  sia  mudatz  que  aja  perduda 
sa  sabor,  far  tornar  bel  e  clar,  prcn  ad  .j.  sestier  de  vin  .j.  ou  de  galina,  e 
pren  aquest  idem  <  aitant  vin  cot  voiras  esclarzir,  e  ajas  .j.  escudela,  e  bat  la 
darael  moiol  e  gita  ins  el  vaisel  del  vin,  et  ab  una  verga  e  tu  remena  ins  fort 
aisi  co  sic  «  fazias  piment,  et  asi  $  o  fai  lo  vespre  el  sera  clars  e  bels  Tende- 
man,  e  sia  ab  la  fes  o  ses  la  Tes.  Empero,  (t^)  si  esta  va  gaire  que  non  si  voges, 
séria  adeus  agrès,  ef^qui  meteus  va  a  fonsaquo  del  ou  et  esclarzis  lo  vin. 

45.  Si  vols  guérir  de  postema,  pren  la  rusca  de  la  radiz  del  amalin  (?) 
quant  sera  lavada  de  la  terra,  e  co[s]  la  en  aiga  tan  tro  sia  mola  con  pasta,  e 
pois  frigis  la  ab  saîn  de  porc  e  fai  ne  emplaust  e  pausa  sobre  la  postema  on 
pus  caut  poiras,  e  tota  la  traira  (bras,  et  aisso  fai  .j.  ves  lo  jorn. 

46.  Si  vols  gerir  de  mal  de  cranc  que  nais  en  la  niola  ^  o  en  autre  loc 
dins  la  gola,  fai  cozer  Terba  que  a  nom  basillas  en  aiga,  e  can  sera  ben  coita 
fai  ne  emplaust  e  liai  defora  aqui  on  sera  lo  mal  tôt  caudet,  e  ceras  dins 
.vij.  jorn  tôt  gerit,  mais  .ij.  ves  aja  del  sanc  del  drago  be  mont  et  ab  lo 
det  pausan  desus  lo  mal  dins  la  boca. 

47.  Si  vols  gerir  de  gota,  ajas  tartugas  boscarencas,  e  fai  las  fort  cozer,  e 
fai  ne  baig  e  baina  te  ins?  .viiij.  jorns,  e  las  carns  de  las  tartugas  non 
gietes  jes  del  baig,  ans  las  tenga[sj  ab  la  ma  aitan  caut  cant  sofrir  poira  la 
ont  aura  lo  mal;  et  aisosai  ieu  aita  cert  con  per  son  paire  d*en  Berenguier 
Pallada,  qu*es  de  Sancta  Maria  de  la  Mar,  que  jazia  contrag  e[l]  lieg  e  non 
s'en  podia  levar  qui  non  Ten  ievava  ;  e  o  sai  per  so  fil  que  li  fez  far  lo  bain  ;  e 
tota  ora  que  las  tartugas  pusca  aver  pot  far  aquest  bang,  e  si  per  aiso  non 
ger,  bons  meges  er  aquel  quel  ge[r]ra. 

48.  Si  vols  gerir  de  mala  buba  que  ven  en  aisensa  (?)  pauc  e  pauc,  prin 
lili  blanc,  la  foilla  vert,  e  pisa  la  ab  sain  de  balena,  e  fai  ne  emplaust  e 
pausa  desus  .ij.  ves  lo  jorn,  e  seras  geritz. 

49.  Ad  aquest  meteus,  pren  .j.  gai  jove  e  ten  lo  que  non  pusca  tener  la 

1 .  Ms.  uaet  avec  signes  d'abréviation  sur  Vu  et  sur  IV  (yerc^mynt  ?).        • 

2.  J'ai  copié  littéralement  cette  recette,  évidemment  corrompue  et  que  je 
ne  sais  comment  restituer.  Posiairol  se  comprend  aisément,  quoique  non 
relevé  dans  les  dictioimaires.  Inveni  est  écrit  jueni  avec  abréviation  sur  le  ;  ; 
corr.  juveni  ? 

3.  Je  ne  puis  lire  autre  chose  que  id\  c'est-à-dire  l'abréviation  d'idem. 

4.  Corr.  il? 

5.  Corr.  e  si  0  fai^. 

6.  On  lirait  aussi  bien  mola,  mais  cf.  le  prov.  mod.  nivouleto,  niouleto, 
luette  (Mistral).  Une  autre  forme,  en  prov.  ancien,  est  leuîay  voir  le  vocab. 
de  mon  édition  de  Flatnenca. 

7.  Ms.  11115. 


298  p.    MEYER 

soanatura  mai  sus  en  la  buba,  et  adonxs  logal  remanra  se  fortmens,  et  après 
tornara  lo  gai  totz  blancs,  et  adonxs  tu  l'en  osta  e  neus»  er  meravilla 
s'adonxs  non  mor  lo  gai,  et  ajas  atretan  tost  .j.  autre  gai  e  fai  atretal,  et  aise 
te  tant,  si  sofrir  o  pot,  [tro]  tota  la  buba  n'ajatracha  de  radiz;  mais  enans  que 
acomens  aja  on:ies  apareiilatz  que  tengo  lo  malaute  per  gran  forsa,  que 
moût  gran  pena  lies  a  sofrir.  Hoc prohatum est . 

50.  Si  vols  gerier  *  de  mala  buba,  pren  .j.  gavel  de  vitz  viella^,  e  .j  bel 
sol  escobat  tu  las  croma  e  pren  d*aquelas  cenres  et  (Jol,  160)  ab  oli  tu  las 
pasta,  e  pausan  desus,  e  tota  traira  lan  de  razis  mot'  breument,  e  non  li 
durara  »  gaire  d'afan,  e  vol  ne  pausar  .ij.  ves  o  .iij.  lo  jorn  per  refrescar,  que 
coic  ♦  lorna  per  lo  brac  que  tra,  et  hoc  prohatum  est. 

51.  Si  vols  gerier  de  roina,  on  que  Tajas,  o  de  rasca  o  d'esquintadura  de 
cara  e  de  tota  escorgadura,  pren  lo  graujol  \  que  nais  sus  en  las  teulas  de 
de  las  maios  c  pisa  lo,  et  ab  aquel  suc,  cant  Tauras  calfat,  que  sera  tebes, 
destenipra  alaquana  e  pausa  la  sus  cant  cera  a  fort*  d*emplaust,  et  après  .iij. 
jorns  levara  s'en  tôt  lo  mal,  e  géra,  que  sus  non  ferre  ren  dins  aquels  .iij. 
jorns,  e  seratz  geritz,  que  moût  tort  eisuga,  et  es  de  frejor. 

52.  Si  vols  que  femna,  cant  a  jagut  ab  orne,  aja  bel  efant,  cant  se  levara  de 
lieg  on  aura  jagut  om  ab  ela,  si  tant  es  que  aja  jagut  consebut,  gare  se  que 
non  encontre  omc  si  bel  oc,  que  si  encontrava  p[rijmieirament  al  levar  del 
lieg  o  dins  sa  cambra,  o  al  eisir  de  sa  cambra  o  de  sa  raaio  o  en  ?  qualque 
luec  lo  priniier  encontret  ^  que  trobara  si  era  contrah  e  tortz,  o  de  alcun  mal 
aip  de  faiso  d'alcun  de  sos  membres,  aitals  séria  aquel  efant.  Item,  si  era 
encargada  d'efant  feme  et  encontraria  femna  ab  negun  d'aquest  mais  aibs, 
aitals  séria  aquel  efan  ;  si  encontrava  bêla  femna,  bel  efant  feme  aur[i]a.  Et  oc 
custodiutit  Saraceni, 

53.  Si  vols  gerir  de  tota  corensa,  prin  .j.  ola  nova  e  met  ins  de  pes  qu'en 
sia  demieja,  e  fai  la  fort  boillir,  et  ajas  .j.  sella  traucada^,  e  mit  la  desotz, 
e  fai  o  de  giza  que  tôt  lo  fum  iesca  per  lo  trauc,  e  fuman  fort  la  natura,  et 
aquel  fum  totas  las  vcnas  estreinera  et  escalfara,  e  seras  geritz.  Et  oc  proha- 
tum est. 

'  I .  Çjoxx.  nous  ? 

2.  Pour  gerir.  C'est  de  même  qu'on  trouve  plusieurs  fois,  dans  ce  texte, 
dormier,  pour  dormir. 

3.  Corr.  donara} 

4.  Il  y  a  bien  coic,  mais  avec  un  signe  d'abréviation  sur  l'i.  Je  ne  sais  pas 
comment  entendre  ce  mot;  coit,  cuit? 

5.  Ce  ne  peut  pas  être  le  glaieul  (.Mistral,  glaujol,  cf.  graujo)  qui  sûre- 
ment ne  pousse  pas  sur  les  toits  ;  ce  doit  être   une  espèce  de  mousse. 

6.  Corr.  for. 

7.  O  en,  ms.  om  avec  une  barre  sur  Vm. 

8.  Corr.  encontre} 

9.  Chaise  percée;  cf.  le  roman  d'Esther,  v.  92  (Rom.,  XXI,  206). 


RECETTES    MÉDICALES    EN    PROVENÇAL  299 

54.  Si  vols  farbcscueg  e  vols  saber  cant  merma  de  .viiij.  que  de  farin[a] 
auras,  .viij.  que  de  bescueg,  si  ben  es  fag  a  razon. 

55.  Si  vols  far  de  vin  mudat  que  sia  franx  e  ben  clars,  prin  dcl  bo  vin- 
agre  fort,  que  sia  ben  franx,  e  mit  ne  en  lo  mueg  .iiij.  sestiers,  e  de  .ij.  no  si 
cambiara  mais.  Fer  aiso  non  pert  sa  sabor.  Et  hoc  probatum  tst. 

56.  Si  vols  vaisel  de  vin  mudat  adobar,  que  sia  franx,  pren  sal  c  .ij. 
aitans  de  cenres,  et  ajas  .viiij.  aitans  d'aiga  en  .j.  par,  fai  o  boillir  be  e  pois 
met  ins  el  vaisel  e  clau  li  be  tôt  sos  traucs,  e  remena  aquo  ins  per  tôt,  e  pois 
laisa  Testar  tro  Tendema. 

L*écriture  du  verso  a  été  grattée,  de  telle  sorte  qu*on  peut  à 
peine  lire  çà  et  là  quelques  mots.  Au  recto  du  feuillet  suivant 
(fol.  161)  se  lisent,  de  deux  écritures  différentes  (fin  du 
xm*  siècle)  *,  les  trois  formules  qui  suivent  : 

Ad  furtum  istam  horationem  scribe  in  cera  benedicta,  et  claude  in  ea 
argentuni  vivum,  et  dorsuni  ejus  tange,  et  mox  tibi  cofitebita  {corr.  confite- 
bitur)  furtum.  Hec  est  oratip  :  Horemus.  Deus  qui  in  monte  dlvarie  signum 
santé  crusii  {corr.  crucis)  ostendisti,  per  Judam  depreenssum,  qui  Judas  tra- 
didit  filium  tuum,  demo[n]stra  michi  quidquit  perdutum  (m'c)  habes,  et  die 
per  eundem  doniinum  nostrum  Jhesum  Christum  filium  tuum,  qui  tecum 
vivit  et  régnât  in  unitate  [cum]  Spiritu  Sancti  (sic)  Deus,  per  omnia  secula 
seculorum,  Amen.  Set  siendum  est  quod  oratio  ista  débet  esscscripta  super 
cera. 

Si  vols  guérir  home  de  menazon,  pren  del  lag  de  cabra  blanca,  et  ajas  lo  ters 
de  vinagre,  z  fais  Tenbeurc  ganres  ves  lo  jorn,  e  ren  plus  fort  non  est[r]eng, 
z  si  esta   j.  petit,  ades  cera  près  aissi  con  formatgue. 

Bevenda  az  ome  nafrat  per  conoiser  si  deu  guérir.  Pren  cauls  vermeils, 
tanarida  betonica,  cosouda  major  e  menor,  capillis  Vencris  nepta,  semen 
decarbe,  de  cascu  lo  pie  ma,  roza  major,  dos  plenas  mas,  esia  coii  ab  las  dos 
parts  d*aigua,  e  la  tcrsa  de  vi  blanc,  e  coz  a[n]tro  veina  a  la  mitât,  e  met  i  la 
mitât  de  pie  ma  de  Terba  pilosella.  Al  nafrat  dona  a  beure  lo  mati  una  copa 
el  vespre  autra,  entro  que  sia  guerits  ;  e  si  gieta  fora  la  premieira  copa,  deu 
morir,  e  si  la  rete  deu  guérir. 

J'aurais  voulu  joindre  à  ces  extraits  des  observations  gram- 
rnaticales  et  un  glossaire,  mais  la  Romania  est  fort  encombrée, 
et  il  faut  faire  court. 

Paul  Meyer. 


I.  Les  deux  premières  formules  sont  de  la  môme  «ÎCriiure.  L*écriture  de  la 
troisième  est  différente.  Aucune  de  ces  deux  écritures  ne  reparaît  dans  le 
reste  du  manuscrit. 


\ 


MÉLANGES 


FR.  SEMILLANT 

L'adîccdf  sémiHani  gù  aujourd'hui  runique  représentant 
d'une  famille  autrelbîs  nombreuse  ;  Taitcieniie  langue  avait  en 
ertet  le  vcrbi:  semlUkr^  i^adjectif  Jt'wi///e^ïiJ,  et  le  substantif  semilk^ 
pourvus  de  sens  variés,  sur  lesquels  nous  allons  revenir. 

Quelle  est  Tétymologie  de  ces  mots?  DîeXj  partant  sans  doute 
de  Tadjectif  semillau^  veut  le  tirer  d'une  racine  gaélique  jimi, 
«  vif,  légers*  Mais  cette  racine  nVxiste  pas  dans  les  langues 
celtiques,  si  on  en  croit  M.  Bugge  V;  celui-ct  panant  proba- 
blement du  verbe,  le  dérive  du  latin  •sub-miculare,  qui, 
ayant  signifié  d'abord  a  briller,  étînceler  u,  aurait  ensuite  dési- 
gné la  vivacité  des  mouvements. 

Cette  étymologie  soulève  au  moins  deux  objections  :  i**  il 
serait  peu  vraisemblable  qu'un  dérivé  de  micaresubsistât^  alors 
que  le  simple  n'a  survécu  dans  aucune  langue  romane'  ;  2°  un 
dérivé  de  mkatt  se  terminerait^  non  en  -Ulkr,  mais  en  -tillin. 
On  comprend  dune  que  les  auteurs  du  Dictionnam  général  se 
soient  montrés  sceptiques  à  Tégard  de  rbypoihèse  de  M*  Buggc, 
et  qu'ils  aient  rangé  sémillant  parmi  les  mots  «  d'origine  incon- 
nue *>. 

Il  est  pourtant  une  étymologie  qui  se  présente  d'elle-même, 
A  b  suggestion  de  laquelle  il  est,  si  je  puis  dire,  impossible 
d'échapper  si  on  Ht  avec  quelque  attention  rartîcle  semilk  du 


1.  RotmniUt  IV^  ^oj.  Le  fait  que  cette  famille  ïi*est  représentée  qu*cn  fran- 
çais  semblerait  appuyer  Thypotlièsc  d'une  étymologie  celtique  ;  utils 
M,  Thumheyseii,  cxceîleni  jujçv  en  h  matière,  conteste  aussi  l'cKistcoCc  de  b 
racine  |raélique  si  m  (KeltôrmtutthcJm^  p.  1 1 1  ). 

2.  M.  Buggei  il  c»t  vrai,  dit  le  contraire,  nm%  mm  ^Idguer  aucun  cïteniple* 


FR.    SÊMILLAST  3OI 

Dictionnaire  de  M.  Godefroy  *.  ^('w/V/f  n*esi-il  point  le  repré- 
sentant rigoureusement  phonétique  d'un  *scniinicula,  qui 
nous  apparaît  comme  un  dérivé  possible  de  semen  '  ?  Si  d'autre 
part,  on  trouve  attesté  pour  semille  le  sens  de  «semence», 
l'existence  de  ce  dérivé  ne  sera-t-elle  point  rendue  extrêmement' 
vraisemblable  ?  Or  c'est  précisément  ce  que  permet  de  constater 
l'article  auquel  je  viens  de  faire  allusion'.  Il  s'y  trouve  deux 
exemples  où  semille  a  le  sens  de  «  semenc*  »  ou  de  «  race  ». 
Avons-nous  affaire  au  sens  propre  ou  au  sens  figuré  ?  C'est  ce 
qu'il  est  assez  difficile  de  dire,  et,  aussi  bien,  ce  qu'il  importe 
assez  peu  de  savoir,  l'un  se  dérivant,  en  français  comme  en 
latin,  immédiatement  de  l'autre^.  La  seule  objection  que  l'on 
pourrait  faire  à  *seminïcula,  au  point  de  vue  phonétique, 
c'est  qu'il  devrait  donner  un  dérivé  en  -eille.  Mais  aucune  subs- 
titution de  suffixe  n'est  plus  fréquente,  peut-être,  que  celle 
de  -icula  à  -ïcula:  que  l'on  songe  à  *vitîcula,  *cratîcula, 
*anatïcula.  La  difficulté  est  si  mince  que  M.  Thomas,  dans 
son  article  antille\  n'a  même  pas  songé  à  la  signaler. 

La  difficulté,  en  effet,  n'est  pas  d'ordre  phonétique,  mais 
d'ordre  sémantique  :  elle  consiste  à  trouver  le  pont  qui  nous 
conduira  sans  effort  du  sens  de  «  semence  »  aux  diverses  accep- 
tions où  sont  pris  ordinairement  les  mots  semilleus,  semille, 
semilliery  et  que  notre  devoir  est  d'abord  de  préciser 

Une  «  semille  »  dans  la  plupart  des  exemples  cités  par 
Godefroy,  c'est  une  idée,  un  caprice,  une  invention  de  l'esprit, 
le  plus  souvent  fâcheuse  on  perverse  :  Jean  de  Meun  qualifie 
de  merveilleuse  semille  l'audace  de  Jason  partant  pour  conquérir 
la  Toison  d'Or^,  d\'stran^e  semille'h  machination  de  la  vieille 
maudite  qui  introduit  Myrrha  dans  le  lit  de  son  père '.  Froissart 


1.  M.  Godefroy  a  tort  de  faire  deux  articles  de  semille^  «  malice,  tour  » 
et  «  race  ?».  Nous  allons  montrer  que  cVst  le  même  mot. 

2.  Comp.  ge r m i n a r e, germer,  1  u  m i n a r i a,  himure  et  s e m i  n a r e,  semer. 

3.  Tous  les  exemples  cités  s;ins  indication  de  source  lui  sont  empruntés. 

4.  Cf.  notre  locution  «  mauvaise  graine  >>.  Le  passage  de  Vliscoufle  cité  par 
Godefroy  associe  à  semille  le  verbe  iissemillier,  «  germer,  se  développer  »,dont 
il  V  a  un  autre  ex.  dans  (îuillaume  de  Machaut. 

$.   Mélanges  tVetymoh^'ie  fruiiçiiise,  p.  17. 

6.  Roman  delà  Rose,  éd.  Michel,  v.  10262. 

7.  lbid.,\.  22195. 


302  MÉLANGES 

dira  d'un  personnage  aux  rases  redoutables  qu'il  était  çruels\ 

pkins  de  nitnmUmsfs  scmillcs  '.  S'agit-il  dans  tous  ces  exemples 
de  la  conception  de  Tesprit  ou  de  l'acte  qui  en  est  la  consC'- 
queiice  immédiate?  Peu  importe,  ce  me  semble»  Le  substantif 
y  est,  comme  on  le  voit,  précisé  par  une  épithète.  Il  doit  en 
tae  de  même,  A  fortiori^  dans  les  exemples  antérieurs,  et  c'est 
en  effet  ce  ^wt  nous  constatons  dans  ceux  d'Etienne  de  Fou- 
gères et  du  Reclus  de  MoLliens,  où  il  est  question  de  malts 
semilUs.  On  voit  que  Tépithète  est  k  plus  souvent  défavorable  *. 

On  comprend  donc  que  semiUcm  ait  aisément  signifié  «  sujet 
à  de  fkhcux  caprite^.  rusé,  trompeur  >i;  c*est,  à  peu  de  chose 
près,  le  zsX'JiJMfi'/Jiv^;  d'Homère.  Dans  le  Roman  de  Im  Rose,  h 
Fortune  est  umiUemi^  un  personnage  antipathique  tlespitem  H 
ffud  scmUkus.  Parfois  aussi,  il  est  vrai,  le  mot  signifie  simple- 
ment «  agitèj  pétulant  >j  (sans  doute  3  abord  «  désagréable  par  sa 
pétulance  »)  :  Martin  le  Franc  dit  que  le  vin  a  sur  T homme  des 
effets  divers  suivant  les  tempéraments, qu'il  rend  les  uns  dûrmil- 
knSj  les  autres  jrmi7/*^/iJ  :  nous  nous  rapprochons  singulièrement 
ici  du  sens  de  notre  sémillant  (dont  le  premier  exemple  connu 
est  de  1564)* 

Semtllier  a  naturellement  tous  les  sens  apparentés  a  ceux-là. 
Il  signifie  simplement,  dans  le  passage  de  G,  Guiart  die  par 
Godeiroy,  «  s'agiter»;  nous  le  trouvons  aussi  dans  Jean  de 
Meun  avec  celui  de  «  s'ingénier  «  :  tant  mnilla  por  gms  dis- 
traindre^  est-il  dit  de  Jupiter  s'ingénîant  pour  nuire  à  Thuma- 
nité  ',  Il  s'agît  donc  bien  ici,  non  plus  de  mouvements  du  corps, 


i*  A  ccj  exemples»  on  peut  ajouter  les  suivants,  que  veut  bien  me  fmimir 
M,  G.  Paris  :  Se  îrur  tnfant  fait  trop  mniUr^  -*  Et  |7  hatttf  hasurt  et  HiU... 
(Fahtfs  m  vtT§  du  XHh  tikk  publiéts  d*iiprh  un  mu  de  Chartres  pstt  Gfnitei| 
lJ(upk¥îis|,  p,  éi  ;  cf  il*U.^  p.  40:  7Vp/ï  est  comles  €i  mnitîius* 

3-  tA*pcî>dant  à  b  fin  du  xiv^^sièck,  Froîssan  pu* ut  encore  parler  des  ttchît> 
sfmiJifi  de  sa  prcJtcctrict:  h.  a-iiK*  éc  Hjîiijui.  Le  mot  paraît  ctru  svnonymc  de 
w  bonnes^  actions»  bonnes  œuvrus  u.  Schcler  (Poésies  tU  fr&itsstrt^  lll^,  401) 
încline  vi^rs  le  sens,  suggCT^  par  le  contexte,  mab,  selon  moi,  trop  précis,  di: 
•  fondations  picuseii  ».  Nous  rvous  rapprocherions  ainsi  dy  sens  printiuf  de 
^ttttin  cl  h  survivance  serait  wurieuM:  ;  mais  jt  n*osc  y  croire, 

V  lui.  Michel,  v.  1 1068.  CVsï  un  second  ck.  4u  mot.  à  joiiidre  au  stu\  que 
citent  Godcfrov  et  le  Dkt,  t:éit/rai.  (Je  m\tperçois  au  dernier  moment  qa*îî 
a  d^j^  i^le  cité  p^r  Ro*|ucfon  d aris  son  Gic^ssairt^} 


I 


I 


THE    CHANSON    BV    COMTE    HHRNiaUÏN  JOJ 

mais  d'une  opération  de  resprif ,  t^ncendue  dcins  un  sens  nette- 
mcni  défavorable. 

Revenons  maintenant  à  notre  question  r  commcTit  ces  sens 
divers  peuvent-ils  s'être  attachés  ^i  un  dérivé  de  semcnPJe 
suppose  qu'il  faut  partir  de  semillîer^  sorti  lui-même,  comme 
stmilleuSy  de  sanilk  pris  au  sens  propre»  ei  je  m'explique  tort 
bien  que  ce  mot  ait  été  employé  dans  l'acception  de  "  s*a|^iter  », 
Et  cela  sans  doute  par  Tintermédiaire  d'une  métaphore  qu'au- 
raient peut-être  quelque  peine  h  comprendre  ceuK  qui  seraient 
tout  à  fait  étrangers  aux  choses  des  champs.  Mais  quiconque  a 
îamais  plongé  la  main  dans  un  sac  de  menue  graine  bien  sèche, 
de  millet  par  exemple,  ou  même  de  blé  (n'oublions  pas  que 
nous  partons  d'un  diminutif  de  se  m  en),  quiconque  a  transvasé 
de  pareilles  graines  d'un  récipient  dans  un  autre  est  tout  dis- 
posé à  admettre  qu'un  verbe  tiré  de  *seminicula  ait  pu  dési- 
gner le  mouvement  vif^  pressé,  d'un  objet  qui  fuit  entre  les 
doigts  ei  étincelle  en  fuyant.  Le  sens  primitif  de  mniUkr  serait 
wn  sens  concret,  sans  rien  de  dépréciatif;  puis  on  serait  passé 
de  l'idée  d'agitation  matérielle  à  celle  d'agitation  de  l'esprit  : 
^'est  alors  que  se  serait  développée  la  nuance  péjorative  qui 
infecta  d'abord  saniUkr^  seinillt'us;  quant  à  smiiUc,  après  avoir 
longtemps  vécu  dans  son  sens  étymologique  (de  «  semence, 
lignée  »),  il  aurait,  lui  aussi,  souffert  de  cette  contagion  et  fini 
par  désigner  les  caprices,  les  boutades  d'un  esprit  sftfiilleus. 

Si  le  lecteur  trouve  cette  explication  médiocre,  je  souhaite 
qu'il  rencontre  mieux.  Mais  j'espère  au  moins  qu'il  acceptera 
sans  scrupules  Téquation  sf mille  >  *seminicula. 

A.  Jean ROY. 


THE  t:HANSQN  DU  COMTi:  HERNIQUIN 


In  an  erudite  study  of  «  La  Mesnie  Hellequin  «  published  in 
the  Ëîutks  Romanes  déâtm  à  GasUm  Paris  (1891),  M.  Gaston 
Raynaud  remarks  that  our  knowledge  ot  the  lost  CImusùh  du 
mute  Utrmquin  {Hclkquin)^  aliuded  to  in  the  thirteenth-cen- 
cury  poem  on  the  capture  of  Neuville  by  the  Flemings,  would 
be  very  imperfect  but  for  an  analysis  of  it  preserved  by  Sir 
Walter  Scott  :  «  Maïs  nous  jugerions  împartaiïement  de  ce  que 
devait  être  ce  puème^si,  par  un  heureux  h^isard,  le  résumé  ne 


Î04  MÉLANGES 

nous  en  avait  été  conservé  par  Walter  Scott  dans  les  notes  qu'il 
a  jointes  à  son  ouvrage  sur  la  poésie  écossaise.  Très  amateur 
d'anciens  romans  de  chevalerie^  Walter  Scott  avait  dû  lire  ce 
poèmCj  aujourd*hui  perdu  pour  nous^  dans  une  traduction  en 
prose  française  ou  dans  une  imitation  anglaise,  qui  jus<)u'ici 
n*a  pas  été  retrouvée  w  (p,  6i).  He  adds  :  «  r,e  poème,  venu 
du  Nord,  passe  en  Normandie,  puis  en  Angleterre,  où,  sous  une 
forme  très  abrégée,  Walter  Scott  nous  l'a  conservé  »  (p.  63). 
The  passage  in  Scott  runs  as  folio ws  : 

tr  TIk'  chitf  of  tins  band  [that  is^ihe  FamUia  Helk^mmi]  was  original ly  a 
galbnt  knight  anJ  warrior;  bui,  having  spent  hjs  whole  posstîssicins  in  the 
service  of  iKe  emperor,  and  boîng  rewarded  with  ^orn*  and  abandoned  ta 
subordinate  appression,  lie  became  desperate,  and,  with  liîs  sons  atîd  folb- 
wers,  formcd  a  band  of  mbbers*  After  commirting  many  mvagrs,  and  defcâ- 
ûng  ail  the  forces  sent  againsi  hitn»  Hdlcquin,  with  his  whole  iroop,  fdl 
in  â  bloûdy  engagement  wiiîi  the  impérial  hûst.  Hb  fornîcr  good  llfe  was 
supposed  to  savt;  him  from  iittcr  réprobation  ;  but  he  and  his  (ollowers  were 
condemned,  after  death,  10  a  ^taie  uf  wanJering^  whfch  sould  endure  tUl  the 
last  day.  Retaining  their  mîHîury  habits»  they  were  usually  seen  in  the  act 
of  justïng  tûgeiher,  or  in  similar  warlike  employments.  See  ihe  anctent 
French  Romance  of  Rkhard  sauT  Peur  ' 

Unforcunately  M.  Raynaud  overlooked  Scott 's  référence  to 
the  source  from  whîch  he  derived  his  account  of  the  earthly 
career  of  Count  Hcllequin  ;  «  See  the  ancien t  French  Romance 
uf  Rkhard  sans  Peur.  »  Scott  did  not  draw  the  résumé  which 
appears  so  valuable  to  M*  Raynaud  from  any  old  or  myste- 
rious  source,  whether  French  or  English,  but  from  chap,  11  of 
the  Hisknu  de  Rkhard  sans  Pmr  as  printed  in  La  Bihiwîhêque 
Bleue,  eniièremmt  rejondmj  et  coiisidérabkrmni  augfmnîé^^  Liège, 
1787,  I>  14  ft.  This  becomes  immediately  obvious  when  we 
compare  the  Englîsh  summary  with  the  chaptur  in  question. 

The  history  of  the  chapier  is  curions,  and  at  otKe  deprives 
Scott's  words  of  ail  theîr  supposed  significance  with  regard  to 
the  lost  cfmnson  de  gfsk  In  the  sixtecnth-century  prose  romance 
q{  Rkhard  sans  peur^,  the  folluwini;  chapter  cornes  immediately 

ï,  M/wi^r/'^îj  i^/  the  ScûUUh  Border,  2^  éd.  iSo;,  II,  194-J.  The  passage  i* 
noi  m  the  fim  cdition,  (802  (see  II,  1S6). 

2,  My  statenients  about  the  sixteeiitli-cemury  prose  roniance  are  Èi^sed  on 
ati  édition  of  1601  (in  the  Bibliothèque  Nationale),  which  Dr,  A.  C.  L.  Brown 


I 

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I 

I 

I 

I 


THE  CHANSON  DU  COMTE  HERNIQUIN  JOÎ 

after  that  in  whicli  Richard  finds  u  la  mesgnie  de  Hellequin  n 
dancing  in  tlie  forest  : 

Cjf  se  dmm  de  ia  fmsgnie  de  Hdlfqmn,  &  qui  il  esiôii. 

«  On  noirs  disi  rhistoîre  qu'il  fut  un  v^iillant  cheualier  en  son  temps,  & 
eut  gninde  lignée  de  sa  semence.  Ccstuy  cheualicr  Hellequin,  en  vnc  guerre 
que  fit  Charles  Martel  contre  ki>  Sarrazins,  qui  estoient  entrez  en  Fr^mce, 
despi^ndit  tout  son  bien  &  et  cheUiince  a  icf  ux  guerroyer,  &  niesniement  il 
vendit  vn  beau  chasteâu  qui  siet  en  la  Duché  de  Normandie  pour  fournir  à 
SCS  affaires,  tLllemeni  qy*apres  la  guerre  finie,  luy  qui  n*auoît  rien,  il  com- 
mença a  piller  le  peuple,  luy  ^  ceux  de  bon  lignage  commencèrent  a  guer- 
royer &r  ibrcer  les  gentilshommes,  dames,  &  dimoiselles,  &.  prmdretii 
leurs  ctiasteayx,  &  ^ussî  prindrent  les  héritages  de  plusieurs  orphelins»  dont 
tout  chacun  demanda  vengeance  a  Dîeu  contre  luy.  A  donc  il  aduint  qu'il 
mourut,  &  fut  en  danger  d'estre  damné,  mais  Dieu  luy  fîsi  pardon,  pour  ce 
quHl  auoil  b.uaillé  contre  les  Sarra/iiis  &  exaucé  la  foy.  Si  fut  condamné 
de  Dieu  que  pour  vn  temps  déterminé  luy  &  ceux  de  son  lignage  feroiem 
pénitence,  &  iroicnt  toute  U  nuîct  parmi  la  terre  pour  leurs  penîtetKes  faire, 
&  endurer  plusieurs  maux  &  cala  mitez,  dont  aduenoit  qu*en  allant  parmy 
le  monde  ils  faîsoient  plusieurs  merueilles  longues  a  racompter  :  &  ainsi 
endurerenï  maintes  peines  et  trauaux  pour  Ta  ccom  plisse  ment  de  leur  péni- 
tence, &  aucunes  fois  ils  trou  oient  les  gens  par  le  chemin,  &  aussi  Ifô 
irouoit  on  en  maintes  formes,  principalement  eu  dançant ,  comme  fist  le  duc 
Richard,  « 

In  the  fourteench-ccntury  verse  romimœ  of  Rkbard  sam 
Ptur  thcre  is  ,ibsoliitely  iiutliîng  to  correspond  to  [lie  ch;ipter 
just  quoted,  ahhough  everythîng  else  th;it  the  siictcench  ccntury 
prose  rotnance  has  to  say  about  Richard's  aventure  with  Hellc- 

and  Dr.  R  H.  Fletcher  hâve  had  the  kindness  to  eîtamlne  for  me  t  L'His- 
toire de  Richard  um  Peur.  Non  u  elle  m  eut  rei^eu^  corrigé  &  imprimé  a  Lyon, 
par  Banhdemy  Ancelin.  1601.  For  the  verse-romance  1  bave  used  the 
reprint  of  Crapelet,  published  by  Silvtstre,  Paris»  1ÏI58  {Rotnanî  Jr  Ricfîard^ 
etc.).  The  prose  roniancc  is  reprinîcd  by  Le  Koux  de  Lincy  m  the  Xom^eik 
BiMifHffèifuf  Blette,  184^,  p.  S  1*96.  He  uses  a  la  te  copy  and  omits  mosc  of  the 
ehaptcr  «  Cy  se  deuise  de  la  mesgnie  de  Hellequin  u,  and  the  whole  of  the 
f0nawtttg  chapter  («  Commem  Ktchard  uns  peur  paria  a  Hellequin^  &  des 
dons  que  luy  fit  Hellequin  »).  He  aiso  omits  two  cliaptcrs  which  foHow  the 
advcnturc  of  the  Appletree  :  «  Comme  RicharLl  sans  peur  combatil  un  diable 
qui  esEoit  entré  au  corps  d'un  excommunié  »^  and  «  Comme  un  ange  ik  un 
diabïe  s^apparurent  à  Richard  pour  auoîr  îuiement  de  Tame  du  moyne.  »  Ail 
lïiese  oniitted  chapters,  except  the  hrsi,  are  taken  from  the  rominccin  verse, 
wilh  slight  changes  in  phraseology. 


JOÔ  MÉLANGES 

quin  is,  with  one  trifling  exception,  mercly  the  poem  turneJ 
into  prose  *. 

The  whay  in  which  tire  prose  romance  treats  the  poem  may 
be  seen  by  comparing  the  following  passages  : 

, .  au  Jcuam  4e  îuy  vint  vng  sien  escuier, 
M.tis  mori  e^Kîît  pa^s<?  aiioyt  vng  an  entkT. 
CIa,int  RicKart  l'apperceut  niouit  s'aïlâ  merudlitT, 
Mais  n*en  eut  point  paour;  auani  Iuy  demanda 
Dont  venoyi  ne  qu'il  quicrt  ne  qui  Pamena  la 
«  G>mmeni!  se  dit  Richart,  ne  fus  tu  pas  pieça 
Seneschal  de  ma  court  et  moumt  vng  an  a  ?  »> 
Car  il  vcil  passer  par  devant  Iuy  un  sien  esctiyer,  lequel  estoit  trespa^sé  i| 
y  moh  un  an  tout  aitier.  Et  quand  le  duc  Richard  sans  peur  le  veit,  il  «i  fut 
moult  csmerveillé  :  ce  nonobstant  il  n'en  eut  point  de  pt?ur,  mess  très  hardî- 
ment  lui  demanda  dont  il  vcnoit,  ne  qu'il  qucToit,  &  aussi  qui  Tamenoit  en 
ce  !icu-là  :  te  Comment  (dist-il)  ne  fus  tu  pas  (il  y  a  long  temps)  seneschal 
de  m'A  cour,  &  mourus  il  y  a  un  an  passé? 

Clearly,  then,  thîs  chapter  is  a  sixteenth-century  fabrica- 
tion. Yct  even  if  it  were  genuîne,  it  woutd  not  afford  us  tlie 
information  about  Hellequîn's  career  ihat  we  finJ  in  Scutî. 
For  this  we  nmst  go  to  the  eightecntli-century  version  in  La 
Bihlkyihêqu£  Bleue.  Hère  we  hav^e  a  long  account  of  Hellequin's 
[\kj  baseJ  on  the  fevv  vague  statemenis  of  the  sixteenth-cen- 
tury prose.  The  additions  in  the  Biblht})éijuf  Bleut  are  of  course 
oi  no  valut.  They  are  mcrely  the  embellishment^i  of  Je;m  Castil- 
bn,  of  the  kind  mentioned  in  the  pnblisher  s  préface  :  «  L'Au- 
teur ne  s'est  pas  contenté  de  les  rajeunir»  il  a  tâché  de  les 
rendre  dignes  de  toute  sorte  de  lecteurs,  en  les  refondant 
enuèrement,  et  en  y  ajoutant  des  situation^  et  des  épisodes 
nouveaux  u  (vol.  U  p-  ^^\ 

Sir  Watter  Scott  was  early  acquainted  with  Castillou's  pipe- 
clayed  Bibliotbêqtu*  Bleue  of  1787,  and  there  is  a  copy  in  hîs 
library  at  Abbotsibrd', 

G.    L.  KnTKEDGE. 


i,  The  «  prologue  m  of  ihe  édition  of  1601  ends  at  follows  : 

i(  Et  ati^si  qu'il  leur  plaise  prendre  k  petit  liure  en  gré.  en  ci>rfîgeâni  le* 

tautcs,  si  aucunes  y  sont  trouuces,  lequel  a  esté  nouucîlcment  translaté  de 

vieille  rithtne  en  prose.  » 
2,  fj.  G,  Cochranel  Caiaï^w  of  y^v    Uhmry  ai   Abhotifotd^    Eâinhnf^h, 

i8^8,  p.  ï  12. 


COMPTES  RENDUS 


iu\es   PiRsos    La  langue   des  inscriptions    latines  de  la 

Gaule  (Bibliothtjque  de  la  Faculté  de  Philosophie  et  Leur  es  de  l'Univer* 
site  de  Li^e,  fasc.  XI);  Bruxdliîs,  igoi,  tn-8,  xvi-p8  pages. 
Alb.  Cârnoy.  Le  latin  d'Espagne  diaprés  les  inscriptions. 

ïtîude  phonctiquc  et  niorpholûj^ique  ;  première  p;irtre  :   tWaîismf,,  Louvaiii 
IstaSj  î^oa.  ln*8,  119  pages  (tirage  à  p^itx  du  Muséott,  11.  s-,  II,  1901), 

yâi  réuni  ki  les  ûtres  de  ces  deux  ûuvr.iges^  bien  *^ue  le  second  soit  Ina- 
chevé '^c!  j'en  rapprocherai  VHistûîre  Je  lalan^iu'  roumaine  de  M*  E>en5u|ianii  ' 
(i,lîl,  LtLatin^^^  14-15.  Inscriptions  latines  de  la  péninsule  balkanique),  parce 
que  lenr  ptiblication  simultanée  pourrait  marquer  le  début  d'une  série  de 
travaux  nécessaire  ;  une  collection  de  relevés  des  particularités  linguistiqties 
présentées  par  les  inscriptions  btlnes,  relevés  qui  se  répartiniient  asseït  naïu- 
rvllctncnî  suivant  les  grandes  divisions  du  Corpus  (sauf  à  remettre  ù  leur 
pïâct  géographique  les  imcriptionfn  uniïqmmmat  et»  quand  il  y  a  lieu,  Vimirn* 
mtntum  dùmeslkum)  et  qui  en  rempîaceraîent  les  index  grammaticaux  incom- 
plets et  trop  sommaires.  L*étar  d*avancemeni  du  Cûtfin  permettrait  rétablisse- 
ment immédiat  d'un  certain  nombre  de  ces  nouveaux  index  et  Von  peut  espérer 
que  les  autres  n'auraient  pas  à  attendre  trop  longtemps  *.  Ils  nous  renseigne- 
raieail  enfin  d'une  manière  exacte  sur  le  contenu  granmiatîcal  des  inscriptions, 
sur  leur  valeur,  si  discutée,  pour  la  connaissance  du  développement  latino- 
ruman,  peut-être  aussi  sur  quelques  problèmes  posés  par  le  latin  vulgaire,  celui 
de  Tunité  du  latin,  par  exemple  ;  du  moins,  si  sur  beaucoup  de  points  ils  ne 
donnaient,  comme  je  le  crois,  que  des  résultats  négatifs,  ils  auraient  lavan- 


1 .  M.  Carnoy  annonce  la  pubîication  de  la  2^  panîe  de  son  travail  dans  le 
Miofiïw  et  en  tirage  à  part  pour  cette  année, 

2.  Cf.  Romania,  XXX^  1.13,  et  KXXÎ,  645 

j.  J'hésite  a  faire  à  M.  Pirson  un  grief  de  ri*avûir  pas  attendu  la  publica- 
tion intégrale  du  volume  Xlll  du  Corpus;  t\  a  en  effet  recueilli  ses  maté- 
rîatix  aux  mêmes  sources  où  iront  pujser  les  éditeurs  de  ce  volume  et,  ce 
semble^  sans  en  avoir  négligé  d'imponante.  Il  y  auront  cependant  intérêt,  en 
^éral,  à  laisser  le  matériel  épigraphique  passer  à  Tépreuve  des  critiques  du 
Lùfpm  avant  de  Tutiliser  définitivement  ;  de  plus  un  index,  tel  que  je  l'ima- 
gine, devrait,  pour  inspirer  et  mériter  confiance,  être  de  vérification  facile  ;  il 
est  difficile  de  se  reportera  vingt  recueils.  Enfin  la  disposition  typographique 
est  assez    délicate  dans  un  travail   de  ce  genre  pour  que  la   possibilité  de 


JOS  COMPTES  RENDUS 

tagc  de  <Coupcr  court  aux  travaux  de  dépouiIlcmc;nt  que  cïiaquc  romaniste  est 
(oTCù  de  reprendre  pour  son  compte  pcrs^onnel»  après  tant  de  devanciers  qui 
n'ont  pas  tait  connaître  le  bilan  de  leurs  recherches,  et  par  là  ib  éviteraient 
pour  favcnir  un  fâcheux  gaspillage  d'efforts. 

Ces  index  devraient  être  dressC*s  avec  un  ^in  et  une  rigueur  extrêmes,  qui 
manquent  encore  aux  trob  bons  travaux  cités  plus  haut.  M.  Densufîuno 
s*cst  seulement  proposé  de  relever  dans  les  inscriplions  du  troisième  volume 
du  C0rpui>  les  particularités  intéressantes  pour  l'histotre  du  roumain.  Je 
ne  doute  pas  que  son  choix  ait  été  bien  fait  et  précédé  de  recherches 
scrupuleuses,  niais  il  es:  trop  évident  que,  pour  être  définîtifs  et  d'utilité 
générale,  nos  indeit  devraient  être  absolument  complets  On  n'en  devrait 
même  par  exclure  les  fautes  probables  des  lapicidcs  :  en  effets  telle  graphie 
à  qui  on  prêterait  d'abord  ce  caractère  pourrait  par  la  sukc,  rapprochée 
d  autres,  devenir  âu  contraire  T indice  d'un  phénomène  important.  Je 
regrette  par  exemple  de  n^tvoir  pas  trouvé  dans  le  travail  de  M.  Firson 
les  exemples  de  chute  de  r  devant  ti,  mafusio  (Pamans,  an.  537;  XIL 
3193)1  TEstA  (Tourdan,  an,  565;  XII,  2187),  et  peut-être  matjas  (Nar- 
bonne,  an.  541:  XII,  5l4t)  :  il  n'y  a  vu  sans  doute  que  de»*  erreurs, 
tnais  on  a  donné  récemment  (Rumatita,  XXIX,  60  ï)  des  deux  premières 
formes  une  interprétation  toute  différente,  et  il  ne  faut  pas  oublier  que  des 
formes  voisines  se  rencontrent  ailleurs  ^  Même  pour  les  phénomènes 
bien  attestés  on  ne  devrait  pas  se  contenter  de  quelques  exemples,  mais  les 
donner  tous  ou  du  moins  en  établir  la  statistique  et  en  indiquer  la  réparti- 
tion géographique.  Pour  fe  vocabulaire  en  particulier,  i!  me  paraît  însuiBsam 
de  noter  surtout,  comme  Fa  fait  M,  Pirson,  les  mots  et  les  sens  nouveaux,  et 
il  y  aurait  lieu  de  relever  tout  ce  qui  n'est  pas  conforme  k  T usage  classique, 
et  dont  û  importe  de  connaître  Textension,  même  si  Ton  en  possède  des 
exemples  en  dehors  des  inscriptions. 

Il  faudrait  apporter  une  grande  attention  au  classement  des  phénotnénes 
dans  ces  index  :  four  que  la  comparaison  fût  facile  et  complète  entre  Ici 
diverses  seciiotis  du  trésor  épi|;raphîque,  ce  classement  devrait  être  objectif, 
fondé  sur  des  caractères  extérî(jurs  et  non  sur  rinterpréiiition  plus  ou  moins 
lointaine  et  variable  des  faits  ;  cela  entraînerait  sans  doute  A  ranger  un  même 
phénomène  sous  plusieurs  rubriques,  phonétique,  syntaxe  ou  morphologie  ; 
peu  importerait^  et  d'ailleurs  chaque  auteuf  donnerait,  mais  seulement  en 


supprimer  des  références  compliquées  et  diverses  entre  tn  li^nc  de  compte,  — 
Je  profite  de  cette  note  pour  annoncer  Tapparition  du  1*^'  fascicule  de  la  ;«  pr- 
tie  du  volume  XI II  :  In^ripikmi's  trium  Gaîliarum  ti  GtrmumarHm  ùntfummii 
dûrmdîd  collegerunl  Otto  Hirschteld  et  Caroîus  Z;mgemeister,  edidit  Oscar 
Bohn,  1901.  —  Il  offre  naturellement  peu  à  glaner;  jV  ni  relevé  quelques 
exemples  de  syncope  et  dVpenîhése  et,  sur  des  vases  divers»  mais  qui 
semblent  de  niéme  origine  gauîoise.  des  formes  en  -us  et  en  -o»  -onîs  du 
même  ncmi  Arrus,  -o»-onis  (iooio,  (71  et  172),  Miccius,  -o»  -onis 
(luoto,  lîjî  gf,  iîs6a). 

i.  Cf.  Seelmann,  Aussprajchr,  jjo. 


PiRSON,  Langue  iks  imcr.  îat.  de  la  Gaule  309 

seconde  ligne  et  comttie  accessoire,  rinterprétaiion  qui  lui  parait  mit  la  plus 
rcocivenable.  L'on  éviterait  ainsi  qu'un  phcnoméiie  pliorii-Hique  ou  lexical 
passât  inaperçu,  t:onime  cela  peut  se  produire  dans  le  travail  de  M,  Pirson, 
parce  que  Fauteur  y  a  vu  plutôt  une  modification  morphologique  ou  une 
liberté  de  style.  Le  classement  devrait  être  très  minutieux,  groupant  les 
divers  exemples  d'un  phénomène  selon  le^  conditions  où  il  se  produit  : 
structure  interne  des  mots,  entourage,  place  dans  la  phrase,  eic*  De 
pltis  il  faudniit  constituer  autant  que  possible  aux  divers  exemples  leur  état 
civil  ;  date  de  finscrîption,  ïieu  d'origine,  nature  (funéraire*  militaire,  chré- 
tienne^ métrique,  imitée  d'un  modèle,  etc.)i  et  même  qualité»  —  car  il 
importe  souvent  de  savoir  si  on  a  affaire  à  une  inscription  barbare,  mais 
soignée,  ou  au  travail  d'un  ouvrier  étourdi  ou  inimelît^eni.  Enfin  il  serait 
parfois  mile  de  ne  pas  s'en  tenir  aux  formes  exceptionnelles,  mais  d*'in- 
di<)uer  au  moins  dans  quel  rapport  elles  sont  avec  les  fornies  normaks* 
Nous  hésiterons  à  voir  dans  PRArrEKEEKS  (11,  ^ajé)  une  forme  intermé- 
diaire cntfv  praeteriens  et  'praete retins,  comme  on  Ta  dit,  si  nous 
savons  que  le  graveur  a  liîen  écrit  fraetekiens  quelques  lignes  plus  haut,  Ki 
de  même  Topposition  de  toutes  les  inscriptions  d'une  région,  à  une  certaine 
époque,  nous  fera  hésiter  à  attribuer  une  grande  importance  à  un  exemple 
unique  d'un  phénomène. 

CLes  index,  tels  que  je  les  conçois,  seraient  tort  longs  à  établir  et  le  tra- 
vail, tout  objectif,  assez  ingrat.  Je  ne  doute  pas  cependant  qu'ils  soient  réali- 
sables et  le  premier  fascicule  de  Tétude  de  M.  Camoy  pourrait  en  fournir 
une  preuve*  C*est  un  travail  très  soigneux  et  complet,  auquel  un  dépouille- 
ment atitérieur  des  inscriptions  d'Espagne  ne  me  pentiet  d'ajouter  rien  d Im- 
partant. Les  phénomènes  y  sont  en  général  bien  classés;  pourtant  il  y 
aurait  là  quelque  peu  à  reprendre  :  il  est  peut-être  légitime  de  voir  dans  DtE- 
NENSis  (tl,  3115}  pour  Di  an  en  si  s  un  fait  d  assimilation,  mais  on  peut  y 
voir  autre  chose  et  par  exemple  une  influence  du  J  (di)  initial;  dés  lors  je 
voudrais  trouver  ce  phénomène  staus  la  rubrique  chmgfment  de  A  en  E  en 
mène  temps  qu'au  chapitre  de  rassimilation.  M.  C.  ne  s*est  pas  non  plus 
sutlisamment  astreint  à  observer  la  règle*  qu'il  s'était  fixée  lui-même,  de  don- 
ïKr  d  abord  tous  les  exemples  avant  de  les  interpréter  :  cela  rend  en 
ines  parties  de  son  travailj  les  recherches  asseje  difficiles.  Par  contre  ses 
■exemples  sont  munis  de  tous  les  renseignements  nécessaires  à  Testlmation 
de  leur  valeur  et  sur  ce  point  Ïl*  travail  est  irrcprochabie.  Pour  rinterprétation 
des  phénomènes,  jai  quelque  peine  à  voir  dam  fie  et  pour  fecit  !a  preuve 
que  V\  final  de  feci  avait  déjà  agi  sur  ê  tonique  au  début  du  iit^  siècle  (p.  Jj;  ; 
je  ne  vois  pas  pourquoi  ae  pour  è  a  ta  finale  des  adverbes  (p.  75)  parait  peu 
sur  à  M.  C,  Jes  e:teraples  en  sont  répandus  un  peu  partout  ^ 

I.  Je  signale  k  M.  C.  deux  expressions  A  éviter  :  (mr;  bien  Ae  (p,  76  et 
108)  pour  un  dï^f^  grantf  tmmbrf  *ie^  et  dt  htn  devant  un  superlatif  pour  de 
btûucoup  (p,  70). 


îro  COMPTES   RENDUS 

Le  tovail  de  M,  Pirson  pourrait  être  compîéit'  sur  quelques  points  :  chute 
dv  r  devant  n  ;  —  3phérèsi;%  spanilia(XJI»  488);  —  di&similauon*  pei.eger 
fcf.  Le  BL  6s6  et  ,V*  H,  2^2);  —  dédinai&on,  hos  ADïTosfXJt,  499),  ctc, 
—  Je  note  îd  que  j'ai  vainement  cherché  dans  k  îivre  de  M,  P.  la  forme  sim, 
que  M.  Mohl  (RofftanÙi,  KXIX,  604)  a  rapprochée  du  fr.  as,  maîs  je  ne  croiiipas 
quMJ  y  ait  la  unu  lacune  dans  le  dépouillemeni  de  M.  P.  :  il  faut,  bien 
entendu,  ne  pm  tenir  compte  de  l'inscription  56$  de  Le  Blani  (Coudes» 
Vl^  S!è:k%  XIIL  isîo)oû  on  lit  Tix,  exemple  de  numérotatton  n&ti^grade  z^ 
XViK  —  M,  F.  aurait  dû  être  p!us  large  dans  son  étude  du  vocabubire  : 
âdjutarç  (XIIÏ,  906),  adoîesccns  (enfant  de  tjuatn  ans,  Le  Bl.,  N,  M.^ 
wé),  concomis,  (Xllli  2^99),  decesepte  (Le  Bl.^  ,V.  R.^  2)  et  autres 
mots  (cf.  pour  quelques-tms  Le  Blant,  Retufil,  préface,  cxïx),  ^ni  asîtejt 
rarts  pour  mériter  une  mention.  Le  classement  n*est  pas  asse^  rigourcuit 
tt  dé|jend  trop  de  Tinte rpréut ion  des  phénomènes  propre  à  Tauteur. 
Pourquoi  t  pour  e  dans  TRis  =  tret»  esi-tl  rangé  dans  les  modifications 
morpho briques  (p.  119)?  Pourquoi  remploi  si  curieux  de  face re  pour 
Tex pression  des  dates  (facit  J  an  u  a  ri  us  dies  tôt)  dans  les  inscriptions 
chrétiennes  manque- t-il  au  chapitre  du  P'ûc^kikin  et  est-iJ  rd^ué  h  la  fin  de 
la  stylistique  (p.  ^16)?  etc.  L'interprétatioti  des  faits^  juste  eo  général,  est 
parfois  bien  hardie  :  à  Texplication  du  maintien  de  quadriiviuin  par  It^ 
formes  contractées  qu  ad  ru  vis  où  u  serait  normal  (en  latin  ou  en  roman?), 
je  préfère  encore  Thypothése  d'une  influence  de  quatuor;  il  me  paraît 
diljicile  de  voir  dans  CAtLVi  pour  calvt(i)  la  preuve  d'une  mouillure  de  l 
(p.  76);  vntsisrr  est-il  bien  uti  parfait  en  si  et  non  une  dittographie  (p.  ij  i) 
et  faut-iï  décidément  accorder  à  FtFJtiA  plus  d*importance  qu'à  fililiae  ou 
A  VEVENES  (-=  vanh)  et  en  faire  Tancétre  du  diminutif^;ï/l(f?* 

Il  y  a  dans  Texposé  de  M.  Pirson  trop  de  formules  inexactes  et  trom- 
peuses ;  l'expression  langne^inère tt  iangim-fUîti  (p.  10a) devrait  être  bannie; 
Ja  distinction  entre  !e  fait  ^aphique  et  le  phénomène  linguistique  qu^il  repré- 
sente est  trop  facilement  oubliée  dans  des  phrases  comme  celJes<i  ;  k  îtn- 
dançt  de  t  â  poi^trà  i  s'est  accentuée  (p.  2);  -  [e  pour  ï  à  l'atone]  constitue 
un  des  traits  caractéristiques  de  la  tan^ttt  latine  des  v*  et  vt«  stccles  ;  —  la 
knguivul^am  recourait  au  sifftn'  de  i  aspiration,.,  pour  supprimer  Thiatus  â 
rintéricur  d'un  mot,  ei  :  dagnihil  (p.  82);  —  certains  vocabk s...  prennent 
â  Taccusatif  pluriel  la  désinence  is  au  lieu  de  es  (p.  118),  etc.  Ce  sont  li 
d'aiiïeurs  cririques  de  détail  qui  n'ètcnt  pas  beaucoup  au  livnc  de  M.  P.,  dcs- 


1.  Je  signale  à  ce  propos  la  dissertation  de  M,  Léo  Sommer^  Di  fr^tlhni 
fl  aphatrtii  e  j^îossûriîs  l^inis  iîhisirandis^  léna,  190O- 

2.  Il  y  a  dans  le  travail  de  M  Pirson  quelques  pages  un  peu  confuses, 
mais  intéressantes,  sur  rélargissement  des  thèmes  dans  la  déclinaison  des 
substantifs  féminins  au  moyen  de  n.  M.  Pirson  ne  connaissait  pas  encore  k 
travail  de  M.  Phîlipon  sur  les  accusatifs  en  -mt,  ^in,  et,  s'il  n'a  pas  vu  la 
question  aussi  largement  que  ce  dernier,  il  fiut  reconnaître  qu'il  s*€Sl  appro* 
ché  de  la  solution  «  Mab  rhypothése  d'aune  origine  grecque  était  peu  probable. 


CARNOY,  Le  latin  if  Espagne  d\iprè$  la  imcrîpikms       )  1 1 

ûné   â  rendre  des  services,  ^inon  il  servir  en  tout  de  modèle  aux  mivaux 
futurs  sur  le  liitin  C'pigraphique, 

MM.  Camoy,  Detiiitî^ianu  et  Pirson  se  sont  pose  tous  les  trois  la  question 
des  dttïerences  locales  du  ladn.  M.  Densuçianu  est  très  net  dans  sa  réponse: 
le  tome  111  du  Corpm  ne  lui  a  montré  w  que  des  faits  connus  et  qui  se 
retrouvent  plus  ou  moins  souvent  dans  les  inscriptions  des  autres  provinces 
romaines...  Seuls  quelques  mots  d'origine  grecque  apparaisseni  ici  j>our  b 
première  fois  ouplu.*ï  souvent  qu'ailleurs  ï>.  Conclusion  semblable  chez  M,  Pir- 
son :  «  Une  foule  de  particularités  qu'on  serait  tout  d'abord  tenté  de  cori- 
sidérer  comme  spéciales  à  une  province  se  retrouvent  dans  les  textes  prove- 
nant d'autres  régions.  D'autre  part  les  traits  qui  restetu  isolés  après  la  com- 
paraison trahissent  des  altérations  d'un  caractère  si  général  t|u*il  serait  très 
liasardeux  d'y  reconnaître  des  différences  locales,  w  M.  Çarnoy  n^^  pas  encore 
né  sa  réponse  déïinitive  à  la  question,  mais  il  a,  chemin  faisant,  indiqué, 
dès  la  pamiére  partie  de  son  travail»  quelques  traits  du  latin  des  inscriptions 
d'Espagne  ou  Ton  pourrait  voir  des  hispanismes  ;  il  n'a  d'ailleurs  présenté 
CCS  hypothèses  qu'avec  les  réserves  nécessaires  :  nous  avons  déjà  exprimé 
des  doutes  sur  la  valeur  de  ficet  qui  se  trouve  un  |>eu  partout;  de  même  k 
changement  de  écn  i  devant  palatale  (p.  29)poun:att  bien  être  un  indice  de 
la  fermeture  de  i*e  dans  cette  position»  teîle  que  l'espaguol  la  présente^  s*i!  nV 
en  avait  pas  d'exemples  dans  les  pays  où  t  est  resté  ouvert-  M.  C-  remar(|ue 
que  la  graphie  e  pour  ï  en  hiatus  se  présente  surtout  dans  le  nord  de  la  Lusi- 
tanJe»  et»  dans  cette  région,  beaucoup  plus  fréquemment  que  i  pour  e  en 
libtus»  ce  qui  rendrait  ditticile  l'cîtphcation  du  premier  phénomène  par  Tépel 
inverse  :  une  prononciation  ouverte  de  î  étant  vraisemblable  en  celtique  et  en 
ibérique,  nous  aurions  dans  les  inscriptions  lusitaniennes  une  trace  de  ce 
vocalisme;  mais  nous  remarquerons,  avec  M.  C,  que  les  exemples  du 
phénomène  en  question  appartiennent  à  des  noms  propres  non  latins^  où 
(lous  ignorons  si  e  représente  i  ou  tout  autre  son,  et  qui  ne  peuvent  en  tout 
cas  rien  prouver  pour  les  modifications  locales  du  latin  importé*  Les  ins- 
criptions du  nord  et  du  centre  de  l'Eispagne  ne  présentent  pas  d'exemples 
de  confusion  de  o  -  u  A  la  finale»  nV  a-t-il  paj.  là  quelque  indice  du  main- 
tien de  b  distinction  en  asturicn  ?  mais  les  exemples  sûrs,  très  tiombreux 
dans  d'autres  pays,  sont  très  rares  même  dans  les  autres  régions  de  l'Es- 
pagne,  ce  qui  diminue  la  valeur  de  la  remarque.  Enfin  M,  C.  signale  (p.  62) 
octuber  comme  l'ancêtre  de  Ta.  esp.  otuhrty  ptg.  oiituhte^  mais  i;n  recon- 
naissant que  cette  graphie  n'est  pas  inconnue  ailleurs:  i^l  aurait  dû  dire  quelle 
est  en  particulier  plus  fréquente  en  Gaule  qu'en  Espagne.  Si  bien  que  notre 
conclusion  sera  la  même  pour  le  travail  de  M.  C.  que  pour  ceuît  de 
MM.  Pirson  ou  Dcnsu^ianu  :  s'il  a  existé  des  dialectes  du  btin  parlé,  les 
inscriptions  ne  nous  permettent  jusqu'ici  d'en  saisir  aucune  trace  *. 

Mario  RoauES. 

j .  Exception  faite  peut-être  pour  le  vocabulaire. 


ÎI2 


COMPTES   RENDUS 


Les  suffixes  toponymiques  dans  les  langues  française  et 
provençale.  Prt^mitTc  partie  :  dévdoppcmeni  des  suffisei  a  n  u  s  ^ 
-irrys,  -eiisis*..  par  Isak  Coixijs,  Upsal,  Alrnqwit*  1902.  Ia-8.  iio-3tl 
p.  (ihè^é  pour  le  doctoral). 

Les  romatiisies  suédois  nous  ont  dè|â  donné  plus  d*urî  inieressant  travail 
sur  la  topoiïymîtf  française  ;  celui  de  R,  Collijn  vient  s'y  ajouter.  It  est  fait 
avec  conscience  et  savoir,  mais  Fauteur,  bien  qull  m  parfaitemeni  le  sens 
delà  méthode -historique,  ne  s*y  astreint  pas  assez.  Par  «  sufHxes  topony- 
miques  »  il  entend  leii  suffixes  à  Taîde  desquels  on  tire  d'un  nom  de  lieu  au 
de  pays  soit  celui  du  district  dont  le  lieu  est  le  centre,  soit  celui  des  habi- 
tants du  lieu  ou  du  pays.  Or  les  noms  de  cette  dernière  catégorie  sont  très 
rares  dans  T ancien  ne  langue^  où  les  villes  ou  régions  très  importantes  ont 
seules  produit  des  nonas  dèsigmni  leurs  habitants  ;  pour  les  autres,  —  ei 
même  très  souvent  pour  celles-là.  —  on  disait  d'ordinaire  simplement  :  cih 
crm  de  (Mantes,  Brie,  etc).  Aussi  presque  (ous  les  noms  qu'on  a  éprouvé, 
—  dans  des  milieux  lettres  bien  plus  quti  populaires,  —  le  besoin  de  forme t 
à  Tépoque  moderne  sont-ils  de  création  purement  savante ,  reposam  sou* 
vent  sur  den  étymologics  erronées  et  (Quelquefois  extravagantes.  L*étude  de 
leur  formation  serait  une  curiosité  plutôt  qu'une  recherche  vraiment  scienti- 
ûque.  Il  aurait  fallu,  pour  traiter  le  sujet  qu'avait  en  vue  M  C,  suivre  danj 
le  cours  des  siècles  l'apparition  successive  des  noms  en  question^  et  soigneuse- 
ment séparer  ceux  qui  se  présentent  diins  les  textes  vraiment  populaires  de  ceu3t 
qui  n*apparaissent  que  dans  des  documents  d'un  caractère  visiblement  savant. 
Pour  avoir  entassé  péîe-méle  les  formations  anciennes  et  modernes,  M.  C.  a 
enlevé  à  son  travail,  au  moins  en  bonne  partie»  Tintérét  historique  et  phîloso^ 
phique  qu'il  aurait  pu  avoir.  Il  donne  par  exemple  en  une  même  liste  (p.  15) 
comme  dérivés  populaires  en  -nin  des  noms  de  toute  antiquité  conmic 
cljaritiin  (il  ne  cite  que  diartrain^  qui  est  postérieur)  et  higufi-mortmn^  tout 
récent,  loirain  (de  Loirtf^  département  l)»  bellifùtitaitt  (de  Fûitùiint'hHaui  com* 
pris  comme  Fontaine  belle  rtJw,  etc.)*  Il  ne  suffit  pas  de  dire  ensuite  que 
fc  quelques-uns  de  ces  mots  sont  formés  d'une  manière  plus  ou  moins  irré- 
gulière,  même  savante  w;  il  fallaît  en  fairt  des  cat^ories  distinctes.  Ailleurs 
(p.  22),  a  propos  de  la  forme  grotesque  mtmipontm  ou  tNtusipûtJktin  (de 
Pont-à-Mousson),  l'auteur  remarque  gravement  que  w  la  forme  pmvcnçile 
est  mmsipùniitMi  i>,  comme  si  le  provcnijal  pouvait  posséder  un  noiu  pour  les 
habitants  de  Poni-à-Mousson  î  Ou  bien  encore  (p.  26),  en  opposant  c^iàn 
(de  Sceaux),  Jux/m  (de  Foix),  comme  u  de  formation  savante  »  A  sc/tft  (de 
Sceauît),  ayeen  (d'Aï),  Jonta'mehlè^n  (de  Fontainebleau),  il  semble  admettre  que 
ceux-ci  sont  de  formation  populaire.  —  Cela  n'empêcfie  pas  qu'il  n'y  ait  de 
fort  bonne  choses  dans  le  livre  de  M.  C,  et  que  la  liste  même  des  fortnattoûs 
qu*î)  a  patiemment  recueilliçs  (où  ?  on  voudrait  souvent  le  savoir)  ne  soft 
assez  curieuse.  L'auteur  connaît  bieti  les  tejttes  anciens,  bien  qu'il  n'en  ait  pas 


ZENKER,    Die  Lieder  Peirfs  von  Auvngm  ji} 

(kit  à  notre  avis  Tusagc  qullî»  comportaient  La  polfimique  contre  I  explication 
par  Tacc.  fèm.  des  noms  de  rivières  en  nm^  -ttht,  -mi  (p.  ij)  n*cst  pas  con- 
vaincintc,  m*ib  mérite  d*étre  lue.  Parisk  (p.  Jo6)  peut  bien  équivaloir  ii  Pari- 
ii/ et  représenter  (ainsi  que  Parhi,  p.  ta$)  Pârisiàcuii,  Gâvrai,  dans  Ui 
Manche  (p.  29),  n'es*  pis  »  sur  le  territoire  brçton  ».  Pourquoi  les  dérivés 
î^fvrrim,  stigieit,  spatttticim,  vèiavien  etc.  auraient -ils  (p,  43)  «  un  sens  plus  ou 
moins  plaisant  »?  G.  P. 

R.  Zenkeb.  Die  Lieder  Felres  von  Auvergne,  kritiscJi 
herausge^eben  mit  EîBleituog,  Uebersetzung,  Kom- 
mentar  und  Glossar.  Lrbngen,  Junge,  1900.  In-8^^  s-266  p* 
(Extrait  des  Uomanisàye  Forschungtn^  t.  XU), 

Cette  édition»  pour  ïaquelle  M.  Zcnker  n'a  évidemmem  pas  ménagé  ^ 
peine,  est  égaîement  soignée,  sinon  également  réussie,  dans  toutes  ses  par- 
ties. L*une  des  meilleures  me  paraît  être  Tintroduction  (bien  qu*on  puisse 
lui  reprocher  d'Être  un  peu  diffuse  et  non  exemple  de  répétitions).  Eîle 
comprend  quatre  chapitres:  dans  le  premier  (p.  i*i6)»  Tai^teur  discute  diverses 
questions  d'authenticité  et  il  écarte,  pour  des  raisons  qui  m^om  paru  très 
solides,  six  pièces,  quil  a  d*ai Heurs  imprimées  (mais  non  traduites)  en 
appendice;  puis  il  réunit  (p.  16-40)  tout  ce  qu'il  est  possible  de  savoir  ou 
permis  de  deviner  sur  la  vie  du  poète^  et  étudie  ses  ceuvres  au  point  de  vue 
littéraire  (p.  40-66)  et  métrique  (p.  66-78).  Pour  la  biographie,  M.  Z. 
a  tiré  des  textes  tout  ce  qu'ils  pouvaient  donner;  ce  n'est  vraiment  pas  sa 
faute  si  quelques-uns  des  plus  importants  a  cet  égard  sont  précisément  des 
plus  difficiles  à  interpréter*  Il  est  fâcheux  toutefois  que  ces  intéressantes  pages 
soient  déparées  (vov^  p.  î8,  39,  58)  par  une  grave  erreur,  reposant  sur  un 
contresens  :  M.  Z,  attribue  en  effet  ;i  Peire  d'Auvergne  de  nombreux 
cupbits  guerriers  sur  la  foi  d'un  vers  (iîl,  23) qui  îtignt fie  tout  autre  chose'. 
L'étude  littéraire  témoigne  de  beaucoup  de  fuiessc  et  de  godt,  et  M.  Z.  y  a 
fait  preuve  (ainsi  que  dans  son  commentaire)  d'une  rare  connaissance  de  la 
lyrique  proveni;ale,  surttuit  dans  sa  plus  ancienne  période;  j'y  signalerai 
notamment  la  traduction  et  le  commentaire  du  curieux  sirvcntês  de  Bcr- 
Marti  contre  Peire  d'Auvergne,  et  les  pages  consacrées  à  la  comparaison 
ttlre  celui-ci  et  son  modèle  Marcabrun.  Uétude  métrique  n*est  guère^ 
comme  on  pouvait  s'y  attendre,  qu'une  statistique.  M.  Z.  a  raison  de  faire 
resioftir  chci:  le  poète  la  recherche  de  ralljtératîon,  qui  est  évidente;  mais 
il  a  eu  tort  de  citer  des  exemples  oix  la  rencontre  <;^t  certainement  fortuite  : 
il  va  jusqu'à  noter  rident tté  entre  une  consonne  initiale  et  une  consonne 
dans  le  corps  d'un  mot  :  iah,  taiurs  \   csf\mvar^    Cûntra.  A   ce  compte,  iJ 


t.  La  fjute  a  déjà  été  rcïevétî  par  M.  Schulu-Gora  (Liirraturtktt,  1902, 
col  7î). 


fXJ^  COMPTES    RENDUS 

tî'esi  pas  une  pmposuiun  cjui  ne  présente  un  on  plusieurs  esctnplci  d'alli- 
tération... N'y  a-t-îl  pas»  dans  la  phrase  même  Cjue  je  viens  d'écrire,  sans  y 
mettre  le  miindre  jrtifici;,  quatre/»  il  Tmitiali;? 

La  constuuuon  du  texte,  je  regreiie  d'avoir  à  k  dire,  ne  mérite  pas  les 
nièraes  éloges.  Je  ne  reprocherai  pas  à  M,  Z.  de  ne  pa!  avoir  tout  compris  : 
il  faut  bien  reconnalîre  que  Peire  d* Auvergne  est,  avec  Marcâbrun  et 
Rambaut  d'Orange»  un  des  plus  redoutables  représentants  du  irobar 
dm;  beaucoup  de  passages  m'embarrassent  autant,  et  même,  comme 
on  le  verra,  plus  que  M.  Z.,  et  je  crains  bien  que  ces  énigmes  ne 
résistent  longtemps  encore  S  la  sagacité  des  plus  expert^  provençilistes  '  ; 
je  regrette  bien  plutôt  que  M.  7,.  jit  passé  auprès  de  véritables  di  flic  ut  tés 
sans  pamître  les  soup^^onner,  sans  le^  signaler  dti  moins»  et,  d'autre  part» 
quMl  n\iJi  pas  réussi  A  comprendre  des  passages  d'une  très  moyenne  difficulté,^ 
Ces  deux  reproches  sera  rem,  je  crois,  justifiés  par  une  étude  complète  de 
Tédition,  Je  ne  puis  entreprendre  cette  étude,  qui  exigerait  beaucoup  de 
temps;  je  me  bornerai,  comme  l'a  déjà  fait  M,  Coulet\  à  Tcxamen  de  deux 
pièces.  Je  choisie  îa  quatrième  des  chansons  d'amour  (les  deux  premières 
ayant  été  cxaraiïjécs  par  M.  Coulet  ci  la  troisième  n'étant  pour  moi  qu'un 
rébus)  et  la  seconde  des  pièces  religieuses  (XV t  dans  l'édition),  k  première 
ayant  déjà  été  publiée  par  M.  Appel  ï. 

IV,   ï)    t.  ïq^kï  vol  qu'oui  se  cipteahii 
St-gon  qu'cl  poi  semprcs  fiire, 
Q^reii  breu  temps  plus  isijrotiîi. 
Qu'a  pm  d'iJsio  don  ac  fam. 

M.  Z.  voit  dans  st^if^  le  sujet  de  tous  les  verbes  des  vers  1 4*16  ;  ^«ssî  ne 
faut- il  pas  s'étonner  que  sa  traduction  n'ah  pas  grand  sens.  A  mon  avis  (et  je 
vois  que  cet  avis  est  aussi  celui  de  M.  SchultK-Gora)  le  sujet  de /^i  et  deofest 
ûm,  et  celui  damit^ûfia  (pris  au  sens  iniransitif)  est  joh  (v.  12);  de  plus  je  ne 
comprends  pas  les  vers  i^-ié,  et  je  propose,  fort  dubitativement  d'ailleurs, 
de  lire  au  vers  15,  avec  I,  au  lieu  de  brrii,  bm  (K  briu^  ou  de  corriger  ce 
mot  en  hrau;  te  mot  hrtu  a  pu  L-tre  amené  indépendamment  dans  deux 
groupes  de  manuscrits,  par  h   fréquence  de    la  locution  en  breu  temps  ;  au 


î.  Cenajncs  pièces,  h  troisième  par  exemple,  sont  tellement  obscures  que 
M.  Z  eût  mieux  fait,  a  mon  âvis,  de  reproduire  simplement  le  texte  des 
manuscriïs  ;  le  lecteur  n'y  eût  pas  perdu  pjrand' chose,  et  il  eût  été  dans  de 
meilleures  conditions  pour  en  tenter  a  son  tour  I.1  reconstruction. 

2.  Artttahi  du  Midi,  XIV,  ^74. 

î.  J'avais  écrit  ce  compte  rendu  en  vacances,  sans  avoir  sous  les  yeux  celui 
de  M.  Schultj:-Gora.  J'ai  reconnu  après  coup  (cette  constatation  ne  peut  du 
reste  que  me  flatter)  que  sur  plusieurs  points,  je  m'étais  rencontré  avec  lui* 
Je  supprime  naturellement  les  observations  qui  K^raient  double  emploi,  mais  je 
conserve  celles  ou  je  me  sépare  sur  quelques  points  de  détail  de  mon  savant 
collègue,  et  celles  aussi  ou  il  me  semble  que  j'ai  ajouté  quelque  chose  à  ses 
remarques. 


ZENKER,  Die  Lieder  Peires  von  Auvergne  315 

vers  16  je  lirais  avec  le  groupe)',  ab.  Je  comprendrais  :  «  Le  monde  veut 
qu'un  homme  se  conduise  de  son  mieux  (même  dans  l'adversité),  car  la  joie 
mûrit  plus  vite  par  un  temps  contraire  qu'avec  ce  dont  il  (Phomme)  eut  le 
plus  grand  désir  v  (â  savoir  les  encouragements  de  sa  dame). 

25    Moût  fai  ves  mi  gran  temensa 
Car  tan  pauc  si  abandona  ; 
Jois  qu^enaisi  trop  bistcnsa 
Moût  mostra  mal  'entressenha. 

M.  Z.  traduit  :  «  Ma  dame  fait  preuve  à  mon  égard  de  trop  de  timidité  en 
se  montrant  si  réservée  ;  joie  qui  hésite  si  longtemps  manifeste  de  fâcheux 
signes.  »  Cette  traduction,  quoiqu'elle  soit  (ou  par  ce  qu'elle  est)  très  litté- 
rale, n'est  ni  claire  ni  exacte.  Je  comprendrais  :  «  Ma  dame  m'inspire  de 
grandes  craintes  (en  lisant,  avec  x ,  mi  fai  grandà),  en  se  montrant  si 
réservée  :  joie  (la  joie  espérée  par  le  poète,  le  succès)  qui  rencontre  (Jrob  de 
irchar)  de  telles  hésitations  présente  des  signes  fâcheux  »  (c'est-à-dire  j'ai 
bien  peu  de  chances  de  réussite). 

Il  y  a  du  reste  entre  ces  vers  et  ceux  qui  les  précèdent  d'une  part,  ceux 
qui  les  suivent  de  Fautre,  une  contradiction  que  M.  Z.  eût  dû  signaler  :  le 
poète  avait  reconnu  (v.  23-4)  que  sa  dame  faisait  déjà  beaucoup  en  lui 
adressant  la  parole  et  en  tolérant  ses  hommages  ;  puis  brusquement  il  se 
plaint  que  ce  ne  soit  pas  assez  et  n'aperçoit  plus  que  de  médiocres  chances 
de  succès  ;  enfin,  passant  encore  une  fois  de  la  plainte  à  la  résignation  (v.  32) 
W  poursuit  :  «  Mais  qu'elle  me  traite  comme  il  lui  plaît,  car  (M.  Z.  traduit 
â  tort  ce  que  par  «  quoique  »)  elle  ne  me  fait  point  tant  souffrir;  ses  liens  ne 
?5ont  pas  tellement  lourds  :  aussi  suis-je  celui  qui  ne  veut  pas  l'accuser.  » 
Je  ne  puis  résoudre  cette  contradiction  et  incline  à  croire  que  ces  brusques 
sautes  d'idées  sont  voulues  et  font  partie  des  procédés  du  poète. 

Il  y  a  entre  les  deux  parties  de  la  strophe  suivante  une  difficulté  toute 
pareille.  Je  traduis  la  traduction  de  M.  Z.  :  «  Sans  avoir  péché,  j'ai  fait  péni- 
tence et  il  est  inju5te  qu'elle  me  refuse  l'absolution;  depuis  longtemps  je 
l'implore  (cette  absolution);  j'aurai  encore  à  souffrir  longtemps  (le  texte  dit 
plus  énergiquement  :  assat^  cttig  qtie  mal  m*en  prenha)^  car  il  est  perdu  celui 
^ui  désespère  ;  voilà  pourquoi  j'ai  bon  espoir  et  j'implore  votre  don.  »  Qui 
ne  voit  que  le  car  souligné  fait  à  cette  place  un  véritable  contresens? 
Néanmoins  ni  dans  la  traduction  ni  dans  le  commentaire  M.  Z.  ne  signale 
la  difficulté."  Faut-il  prendre  assati  au  sens  de  «  trop  »  et  comprendre  :  «  Assez 
[et  trop],  j'ai  cru  que  mal  m'en  viendrait  :  [je  préfère  espérer],  car...  »?  — 
Le  vers  40  est  bien  plat  et  je  le  comprendrais  tout  autrement  :  don  est,  à 
mon  avis,  non  donum,  mais  dominum,  et  je  lirais,  non  rostre,  qui  n'est  que 
dans  A  B,  mais  nosire  (j'ai  lu  nostre  dans  E)  et  comprendrais  :  «  Je  fais  appel 
à  Notre-Seigneur  qui  a  condamné  le  désespoir.  »  S'il  n'y  a  pas  dans  l'Évan- 
gile de  verset  qui  puisse  être  allégué  ici,  la  condamnation  du  désespoir,  se 
dégage  d'une  foule  de  passages. 


^ 


3l6  COMPTES    RENDUS 

On  voit  que  J*étude  de  ccitu  pitct:  a  surtout  justifuS  le  premier  Je  mes 
reproches;  cdli:  du  m  16  montpcra,  je  l'cspCTC.  que  Je  second  est  égatcrocm 
fonâù. 

V.  ti,  La  leçon  âdopt(.^e  :  d^mtra^ufai  athlr  asi  fKU*  intelligible  ;  ï)  est 
rcmart|uablc  du  reste  que  V  seul  donne  le  d  initial  {duniracufat};  contriire- 
meïît  à  M.  Schultz-Gom  qui  adopte  la  leçon  isolée  de  R  {ïoiraauiat  âaîbir)^ 
je  lirais  t  H  oitîroiujat  aîhir  et  comprendrais  ;  «  les  esprits  présomptueux  ». 

—  14.  L  expression  mîar  dt  gahp  aut^ÏI  eu  grand  besoin  d'un  commentaire 
explicatif. 

16- ï 7.  M.  5khuU^-Gora  a  parfartement  compris  ces  vers  :  «  Rail]€ric  et 
Outrecuidance,  si  parfois  elles  croissent,  poussent  en  feuilles,  ne  fleurissent 
jamais.  i>  Mais  i!  paraît  avoir  renoncé  il  traduire  la  fin  de  la  strophe,  bien 
qu*il  ait  identifié  wVmoi/,  confondu  par  M*  Z.  avec  nausmt.  C'est  qu*cn  effet 
il  faut  résolument  tvarter  îraitof\  qui  donne  du  reste  une  syîlabe  de  trop»  et 
lire  avec  Va  (représentant  deux  tarnilles)  rinhador  \  Le  sens  est  c'est  un 
jardin  d'une  bien  Qcheuse  espèce  (je  traduis  approxiniativement  resptit]  que 
celui  où  rien  ne  pousse,  «  et  tel  que  tous  ceux  qui  y  entrent  en  sonent  boi- 
teux B,  —  27.  Je  lirais  k)caii  (^  k)C4t  H)  avec  T«î.  —  Le  vers  ^t*  est  tra- 
duit à  contresens  :  w  Tl  devrait  souvenir  à  quiconque  ne  serait  pas  insettse..,  » 

—  La  strophe  VI  est  ainsi  traduite  :  «  Il  devraîï  bien  penser  â  la  mort,  celui 
qui  regarde  en  face  le  crucifix  et  voit  comment  Dieu,  pour  nous  sauver,  soulTrit 
ta  mort,  et  comment  il  la  tua  en  se  laissant  crucifier  pour  nous.  Nous  motif- 
ronstous,  car  notre  richesse  ne  nous  protégera  pas  plus  que  la  sienne  n*a  pro- 
tégé JoK  rt  On  voit  combien  le  raisonnement  est  incohérent  :  c'est  que  M.  Z., 
égaré  par  une  expression  fréquemment  appliquée  en  eriTcî  à  Jésus-Christ,  D*a 
pas  compris  les  vers  ^9-40  :  ils  signilîeni  au  contraire  :  «  Puisque  la  mort  a 
frappé  celui-liî  même  qui  se  fit  crucifier  pour  nous,  comment  hésiter  i  croire 
que  nous  mourrons  aussi  f*  li  II  faut  modifier  la  ponctuation,  mettre  un  point 
et  une  virgule  après  tmri  (î9)  et  une  virgule  après  cr^ji*  (41).  —  Au  vers  41 
ff(?«  (donné  par  Ed  +  V)  fournirait  un  meilleur  sens  que  nnus.  —  53,  Ganît 
serait  une  l\»rme  iiicorrecti:  du  subjorïCtif  :  corriger  t^uf  nm  f^urî  (le  ^-ers  n'est 
du  reste  (sous  celte  lorme^  que  dans  V). 

A.  Jeakroy* 


\.  La  bonne  leçon  est  h  peine  ahénée  par  T  Otm  trmdor)\  C  R  manquent  , 
H  trsA  donc  seul  a  donner  îi  tfmiùt.  —  Au  vers  i6  on  est  tout  étonné  de  trou- 
ver une  variante  de  C,  alors  que  la  strophe  manque  dans  ce  manuscrit. 


HASSAU  NOORDEwiER,  BcoordeeUfig  van  den  WilkMm    517 

BiJ cirage  tôt  de  Beoordeellng  van  den  Will^halm.  ProcU 
schrilt  der  verknjging   van   den  graad  van    Doctor    in   de  Nedcriandschc 

Lutierkun4ie,  a^n  de   Rijks-Umversiteii  lu  Groiiingen door  Joh;inna 

Haùz  Nassau  Noordewier,  Te  Delfi  bij  P.  1.  Koumans,  1901.  In  8**, 
128  p. 

L'auteur  de  cette  petite  thèse  hollandaîse  (qui  a  été  présentée  à  la  Facuïté 
des  lettres  de  l 'Université  de  Groniiigue)  s^est  imposa  la  tâche ♦  assez  ingrate 
du  reste,  dex^imincr  de  nouvi*au  et  a  fond  trois  dos  questions  multiples  que 
soulève  une  lecture  minutieuse  du  tVUlfimhn  :  c*est  à  savoir  i^  si  Wolfram 
d'Kschenbach,  en  composant  sa  paraphrase  poétique  lïAUscans^  a  connu  et 
utilisai  d'autres  branches  du  vaste  cycle  de  GuîflaunK  d*Orange;  lo  si  la 
rC*daction  fraii^^aise  dont  il  s'est  servi,  est.  ou  non,  identique  avec  ime  de 
celles  qui  i50us  ont  \L\é  conservées;  y*  si  le  WiUthdlm  est  resté  inachevé* 

En  se  posant  une  lois  de  plus  k  question  de  savoir  si  Wolfram  a  été  au 
couont  des  panies  essentielles  de  la  biographie  poétique  de  Guîlbunie 
'd'Orange,  M^^*  N.  N.  s'est  rangée  A  ropinîon  négative  de  MM.  Suchîer  \ 
Rôlin  %  Jeanroy  ï^  Ph.  Aug  Beckcr*,  non  sans  appuyer  par  des  proposi- 
tions nouvelles  une  argunitntiitîon  qui  tend  à  nous  f;iire  paraître  Wolfram 
sous  on  jour  peu  propice  à  son  ambition  de  poète. 

Mïl«  N.  N.  a  ennchi  le  chapitre  curieux  qui  pourrait  slniituler  «  ïes  fifs 
d*Ainien  dans  les  versions  étrangères  »  J'utie  remarque  perspicace.  Elle  est 
sûre  que  Wolfram  n\i  pas  connu  te  poénie  de  Guihal  tP Atuirena^p,  7,  5^.). 
La  connaissance  de  cette  branche  française  ne  lui  aurait  laissé  aucun  doute 
sur  ce  personnage  intéressant  quil  se  prde  d'énumérer  p^rmi  les  frères  de 
Guilldume.  Car  au  début  de  son  poème,  il  fait  mention  d'un  fils  d^Aimeri 
i|u'il  appelle  tout  simplement  Gybert,  mais  plus  tard^  en  parlant  du  roi 
Siitilhtri^  drr  hfïnk  von  TandatHaî  (JVh.  240,  26;  249,  29),  il  désigne  ce 
dernier  comme  un  allié  de  la  lamille  de  GuilLat^mct  accouru  pour  prêter  son 
appui  contre  les  Sarrasins.  Pourquoi  le  poète  allemand  a-l  il  scindé  ce  per- 
sonnage en  deux?  W^'-'  N,  N.  est  portée  à  croire  à  un  manque  de  mémoire 
de  Wolfram  (p.  27  ff.)». 

Elle  ne  tient  aucun  compte  du   fait  que  le  poète  s'attache  strictement  au 


1.  V^btr  die  Qufïlr  Uirkhs  %*ùn  de  m  TfirUn  und  dif  àUesff  Gfstaîl  der  prise 
iOrati^t^   1872. 

2.  AlhCiim  mit  Bfrûckskhii^uit^  von  tVoi/utms  t*o«  B^cbfnhach  ffiiUhaim^ 
1894. 

|.  Noies  sttr  la  l^tfuie  dé  Vivien^  dans  Rmfimia,  XXVI,  17). 

4.   />r  fiuîftan^ûiiidM'  Sn/^fttknis  und  mur  Frtddrmf^  j%K. 

V,  M,  Reruhardt  (Xum  IVtlhlhfitft  iVùîfrttmi  wni  Esihmhisch^  dans  Ziichrft 
I .  drtti  icbi'  Phihkio  îV ,  X  X  X  H ,  1  ^t^o,  56-5^),  se  dispense  de  toute  explication , 
qtmiquUI  soit  d'avis  que  Wolfram  a  pris  des  libertés  avec  la  généalogie  de 
Heimrich  von  Narbon 


3l8  COMPTES   RENDUS 

nombre  de  sept  fih  d'Aimerl,  undis  que  ïes  manuscrits  d'Ahscam  ne  pré- 
sentent que  six  fiïs  :  Guilbume,  Ernaut,  Buevon,  Bemart,  Guiben  Aîmer, 
Garin  d'Anscune  n'y  est  pas  metitiooné  une  seule  fois.  Wolfram  lui  substi- 
tue un  autre  personnage  nommé  «  Berhtram  jk  Encore  faui-il  ajouter  qu'il 
ne  confond  jamais  ce  Berhiram  avec  Bertran  le  Paladin,  fils  unique  de  Ber- 
nart  de  BmsbanL  Pourquoi  a-t-U  complété  le  nombre  de  s^pi  ?  Est-ce  une 
pure  invention  de  sa  part?  En  parcourant  tout  le  poème  on  n'en  voit  pas  la 
nécessité  '. 

M'**  N.  N-  se  hâte  de  naus  fournir  de  nouvelles*  preuves  dç  Tignoraoce 
lamentable  du  poète  tjuant  au  Covmant  Fwien.  Wolfram  remplace  le  ser- 
meut  solennel  de  ne  jamais  fuir  «  phin  pié  dt'  itrrt  »  devant  les  ennemis  de 
U  foi,  fait  devant  Dieu  et  devant  Guiborc,  par  des  termes  vagues,  é^  expres- 
sions toutes  faites,  comme  par  es.  iVh.^  41,  jo,  *t  Vwmn  ungimt  fiéch  ». 
CXuAnt  i  ï'iivideute  allusion  au  Charroi  de  Nîmes  qu'on  a  relcv(^*e  dans  le  ff'*7* 
îàîalm  (298^  1%)  «  kh  um  nUangi  tin  kottfman-utf^  kh  Nimn  gfwan^  die 
gtioUn  itat'  mit  xmgen  »,  elle  est  censée  problématique  parce  qu'elle  nous 
labse  douter  si  Wolfram  a  connu  le  stratagème  employé  par  Guilfaumc. 
Pour  expliquer  la  mutilation  du  nez  du  héros,  Wolfram  se  sert  évidemment 
d*une  tradition  orale  {IVb.  91  ^  27,  55)  au  lieu  de  profiter  de  rallusion  qui  se 
trouve  dans  Jlùcans  (éd.  Guessard,  4070)  ou  de  riiidicaiion  qui  est  expHd- 
tcmeni  donnée  dans  le  Char rm  de  Nîmes  (v.  tï4,  55),  —  La  traduction 
littérale  du  vers  «  rnuirtrks  kmir^  a  n^kiises  ntûilHen  a  {H' h.  197*  14)  ne 
représente  pas  utic  réminiscence  directe  du  vers  574  du  Charroi  :  il  ne  faut 
point  penser  à  un  emprunt  direct^  parte  que  Wolfram  aime  à  ennoblir  îe 
caractère  des  Sarrasins  '.  —  Et  ainsi  de  suite. 

J'en  conviens,  grâce  a  de  tels  provédés  on  peut  accumuler  les  preuve» 
négatives  à  rinfini.  Je  suis  loin  de  croire  que  Wolfram  ait  connu  et  surtout 
conservé  beaucoup  de  détails  concernant  les  faits  antérieurs  de  h  vie  de  son 
héros,  mais  je  persiste  â  voir  dans  son  prologue  une  composition  spontanée, 
née  dccenaînes  indications,  puisées  à  dirférentes  sources  :  légendes,  tradi- 
tions orales,  branches  françaises  du  cycle  de  Guillaume  d'Orange,  Quant  û 
son  modèle  français,  qui,  dii-on,  a  contenu  encore  d^autres  allusions^  dîspa* 


I.  M.  Jcanroy,  dans  une  étude  magistrale  sur  le  cycle  de  Guillaume  tu 

court  neis  (/fa wijwxa,  XXVM,  1 98), nous  avertit  que  Tidcc  de  faire  de  V'^ivicn 
le  (ils  de  Garin  est  asse^  tardive  et  doit  appartenir  ea  propre  â  rautcor  de^ 
lîtt/anm.  Dans  Aîiscam^  cette  parenté  n*est  indiquée  nulle  part.  -  Quel 
raisonnetncnt  nous  autortMr  donc  à  affirmer  avec  M*  Beruhardt  que  Wolfram 
n'ayant  pas  trouvé  le  nom  de  Garin  d.ius  stin  modèle,  a  eu  Tidée  de  compïé- 
ter  la  liste  en  y  introduisant  Bcrlitram?  —  M  Cloettj  j  démnntrè  (Dit 
Bnjattu'y  l^wifH,  Berlin.  ÏH98)  *jue,  d'abord,  Vivien  était  censé  être  le  fiJi 
d'une  M:eur  de  Guillaume.  Le  IVilkkdm  (îSo,  2i\  fait  mcmion  d«  cette 
parwitc. 

1.  Il  l'aurait  donc  gardé  par  inadvertance;  ou  t'aura  il- il  sauvé  picuH*niem 
pour  i  avoir  trouvé  dans  A  imam  ? 


NASSAU  NOORDEWiER,  Bcoordedittg  van  den  Willehalm    3 1 9 

rues  de  toutes  les  rédactions  françaises  qui  sont  parvenues  jusqu'à  nous,  je 
ne  crois  pas  que  Ton  soit  autorisé  à  attribuer  à  cet  original  toutes  sortes  de 
petites  déviations,  ni,  d'autre  part,  qu'on  puisse  nier  qu'il  s'y  soit  trouvé 
d'autres  variantes  considérables,  en  invoquant  le  témoignage  des  manuscrits 
français  conservés  qui  s'accordent  autrement  sur  tel  ou  tel  point.  On  se 
demanderait  en  vain  par  exemple,  quel  passage  du  récit  d^AUscans  se  serait 
prêté  sans  effort  à  une  interpolation  de  l'histoire  de  l'exhérédation  des  fils 
d'Aimeri  :  même  à  l'occasion  de  l'apparition  du  chétif  Aimer  :  elle  n'aurait 
guère  été  à  sa  place. 

Dans  la  2«  partie  de  son  travail,  M"e  N.  N.  enregistre  les  intéressantes 
découvertes  qu'elle  pense  avoir  faites  en  établissant  une  comparaison  suivie  du 
texte  du  Willehalm  avec  les  Storie  Nerbonesi  et  la  rédaction  en  prose  (Ms.  fr. 

M97)- 

Pour  les  Nerhofiesij  elle  a  relevé  trois  parallèles  avec  des  passages  corres- 
pondants du  IVillehalm.  La  mention  du  stratagème  employé  par  Guiborc 
pour  cacher  â  l'ennemi  le  manque  complet  de  défenseurs,  n'est  pas  nou- 
velle ».  Mais  en  ne  faisant  que  renouveler  (à  son  insu)  cette  constatation, 
elle  a  le  mérite  de  fixer  notre  attention  sur  le  vers  :  «  uml  ruorte\  sd  mit 
sinnen  a  (JVh,  230,  8)  qui  semble  confirmer  l'hypothèse  d'une  source  com- 
mune. —  En  rapprochant  IVh.  465,  19  des  Storie  Nerbonesi ^  II,  526  (où  il 
est  question  de  l'enterrement  des  rois  païens),  elle  s'élève  contre  ceux  qui 
exagèrent  le  mérite  personnel  de  Wolfram  (p.  40).  Mais  je  trouve  que  les 
honneurs  que  l'auteur  des  Nerbonesi  fait  rendre  aux  princes  sarrasins  morts 
sont  motivés  par  les  égards  qu'on  doit  à  leur  frère  Rainouart  :  l'Italien 
invoque  la  sainteté  des  liens  de  famille!  Quant  à  Wolfram,  son  Guillaume 
d'Orange  semble  rivaliser  de  nobles  qualités  avec  Richard  Cœur  de  Lion, 
dont  la  mémoire  encore  récente  devait  être  sacrée  aux  chevaliers  de  l'Europe 
entière.  -  Le  rapprochement  des  Storie  Nerbonesi,  IL  513,  avec  fVh.  328,  9, 
364,  4,  ne  sert  à  rien. 

La  rédaaion  en  prose  fournit  d'amples  matériaux  à  conjectures.  Je  laisse 
de  côté  l'explication  de  l'épisode  relatif  au  message  consolateur  de  l'ange 
qui  apparaît  à  Vivien»  (p.  42,  55).  Ce  n'est  pas  le  moment  de  traiter  à  fond 
toutes  ces  questions.  P.  (Mïï*^  N.  N.  désigne  ainsi  la  rédaction  en  prose) 
s'accorde  avec  Wolfram  pour  diminuer  le  rôle  héroïque  de  Guiborc  en 
attribuant  d  Guillaume  la  résolution  d'aller  demander  le  secours  du  roi.  P. 
adoucit  (et  presque  de  la  même  manière  que  Wolfram)  l'invraisemblance  du 
voyage  de  Guillaume  d'Orange  à  Orléans,  caractérisée  par  le  vers  :  «  que  une 


1.  La  note  de  M.  Raymond  Wceks  (Romania,  XXVIII,  128,  compte 
rendu  de  Becker,  Der  Quellemvttt  der  Storie  Nerltomu')  semble  lui  avoir 
échappe. 

2.  Le  raisonnement  de  M.  Rolin  (cf.  Aliscaus,  Hinl.  XVIII)  me  paraît 
aussi  obscur  que  celui  de  M^^*-'  N.  N. 


\ 


Î20  COMPTES    RENDUS 

titdf  m  priii  il  herbtrgaje.  n  —  P.  ftxc  le  chifTre  exact  (qmrmtt  wîi^  f°  îSo) 
de  11  somme  que  le  Guillaume  de  Wolfram  refuse  de  payirr  au  easUlain,  — 
Dans  P*  aassî  bien  que  datis  le  WHkbdîn^  Orïéans  est  le  domidk  d'Emaut 
de  Gironde.  On  le  voit  déjà»  des  points  de  vue  vrais  et  faux  surgissent  pêle- 
mêle  dans  cette  <întimération.  Il  se  pem  que  parfois  les  reinanicurs  aîeot  fait 
effort,  sans  s*étre  entendus,  pour  effacer  la  naïveté  primai  vc  de  rancieone 
épop4^.  n  y  a  dans  ce  chapitre  une  découverte  quil  faut  adtnirer  sans 
réserve.  Le  dialogue  entre  Tcrramer  et  Guîborc  qui  se  trouve  dans  le  Wilh* 
tmlm(Wh,  215,  5>)t'î  <îui  reparait  dans  P  (f°  Î92)  m t- semble  rc pré s<în ter 
un  épisode  digne  d*ètre  restitué  aux  textes  f rampais.  Je  me  risque  même  i 
en  retrouver  une  faible  trace  dans  les  vers  4052  ss-  ^'Alhcaut.  Ils  me 
semblent  représenter  Técho  de  cet  entretien  du  père  avec  sa  filk  dans  un 
monologue  de  Gui  bore  déscspi^rée  : 


Por  vostrc  amor  miert  h  teste  cope« 
Ht  ma  cars  arse,  a  ta  pqrre  vent  te, 
Ou  jo  serai  ea  la  mer  sifondrce. 
Une  giant  pierre  eator  le  col  ruce; 
Comment  k'il  p  retige,  nVtî  puis  cstre  eiîcapee 
Ke  it  niî  soie  a  doJauf  Upîdêe, 


1 


M'^*  K.  N.  a  eu  tort  de  ne  pas  diviser  ce  chapitre  intéressant  en  deux  par- 
ties distinctes,  dont  l'une  devrait  traiter  les  épisodes  que  le  iViîkftalm  a  en 
commun  avec  les  Ntrtmttni  et  P.,  et  Tautre,  les  omissions  contestables,  Le> 
pagfô  S 2- S 4  de  son  opuscule  contiennent  de  judicieuses  remarquas  sur  les 
*  laisses  similaires  »  et  les  épisodes  qui  concernent  le  côté  fantastique  du  rôle 
de  Rainouart  *.  Cest  ici  encore  que  j*insérerals  Téplsode  du  moutier  Saint- 
Vînceni,  qu'omettent  tous  les  manuscrits  français,  sauf  A. 

Reste  a  savoir  si  M"*  N,  H,  se  prononce  en  favt-yr  d'une  rédacûon  plus 
ancienne  ou  rajeunie,  La  conclusion  trop  laconique  de  îa  p>»ge  58  nous 
laisse  dans  le  doute.  Ce  n'e$l  pas  écî  le  lieu  de  s*étendre  sur  cette  question 
importante  '* 

Dans  son  troisième  et  dernier  chapitre,  Tautenr  a  suivi  Texemplc  des  îtiter- 
prêtes  antérieurs  de  Wolfram  qui  ont  cherché  et  trouvé  pour  les  passages 
concernant  Aéhs  et  Ralnouart,  ^/xaminés  séparément^  des  explications  variées. 
Mais  il  ne  ïaut  point  perdre  de  vue  Tensemble.  Car  de  l'examen  judicieux  du 


1.  Tûrhcîm  ne  ksa  pas  connus  non  plus, 

2,  Je  me  risque  à  indiquer  en  passant  trois  des  circonstances  qui,  A  inoo 
avis,  semblent  accuser  rancîCiinetè  du  modèle  :  i«»  Wolfram  ignore  le  riom 
de  la  sœur  de  Guillaume,  mariée  au  roi  Louis,  2"  Ciuand  Rennewart,  pour 
son  équipetnent,  ne  demande  ni  f^laive^  ni  coursier,  mais  un  grand  tîncl, 
c'est  un  juif  de  Narbonne  (qui  est  au  service  d'Ermen^art  de  Pavie)  qui 
lui  donne  ce  qu'il  demande,  y^  Le  combat  de  Rainouart  contre  si>n  pcre  ne 
se  trouve  pas  d:ms  le  tViJUkih»  fje  réfuterai  prochainetnem  la  théorie  de 
M,  Kold  :  Zu  dtm  WiikthHm  Vhkhs  vmi  Tùrh^tmi  c(.  ZfiikhrJL  /  deuiuht 
hil  Phil,  Xilh  1)6.) 


NASSAU  NOORDE^MERj  Bfoordclhg  vûtt  dcn  WHkhalm     321 

fête  jmouretix  de  Rennewart  dépend  100 te  solution  approstimativc  de  la 
question  coniplkiUL^  de  savoir  si  Wolfram  a  terminé  son  poème  ù  son  gré, 
ou  Ta  laissé  inachevé.  Je  me  dispense  donc  de  récapitttîer  les  remarques  spi- 
rituelles que  M"c  N,  N.  consacre  aux  opinions  de  Gautier,  Guessard, 
CUfus  et  Siin  Marte.  Je  suis  d'accord  avec  elle  pour  repousser  Targii  m  en  ta- 
lion étrange  de  M*  Rolin  ^  Mais  je  m'étonne  que  W^^  N.  N.  cite  plusieurs 
passages  du  WilitMm  •  sans  insister  sur  les  termes  vagues  et  le  style  guindé 
(\m  rendent  méconnaissables  les  inïcntïons  du  poète.  Pourquoi  ne  pas  avouer 
que  Waîfram  ne  parle  jamais  de  la  fête  qui  doit  terminer  le  récit  de  tant  de 
combats  ?  Le  poète  est  toujours  empressé  d'amplifier  les  moments  joyeux. 
Il  r^rette  même  une  fois  la  tristesse  de  son  sujet,  qui  lui  prête  rareniçtil 
l*occa&ion  de  dépeindre  un  moment  de  joîe  : 

WK  3S0,  3t,     Dije  maer  b|  frcudcn  seltcn  ist. 
kh  mûti^tc  habt-'ii  guoicti  Km» 
TWcQiie  Σh  freudedritinti  funde. 

Ho  examinant  les  passages  indiqués  ci-dessus,  Ml>«  N>  N.,  au  contraire, 
arrive  à  la  conclusion  que  Wolfram  a  connu  la  fin  de  la  chanson.  La  mort 
«Jott  avoir  interrompu  son  récit.  Ces  conclusions  ne  sont  pas  nouvelles,  et 
î^ârgumentation  laisse  à  désirer.  Voici  pourquoi  ;  i^  le  choix  des  passages 
qu'elle  accompagne  d'un  commentaire,  est  incomplet  ?  \  a^  elle  n'y  suit  pas 
mcnic  le  Hl  de  la  narration;  3"  elle  néglige  d'étudier  Tceuvre  du  continua- 
teur TûrheJm  ;  4^  en  perdant  de  vue  Tensenible,  elle  ne  s'est  point  aperçu 
combien  le  poète  allemand  aime  à  Improviser  aussitôt  qu'il  s'agit  de  chanter 
J  atTîour,  En  établissant  des  relations  suivies  entre  les  deux  amants»  Wolfram 
^*^t  Souvent  détaché  de  son  modèle  :  il  a  donné  l'essor  à  sa  fantaisie. 

On  peut  regretter  que  les  résultats  ne  soient  pas  en  proportion  avec  les 
pctues  infinies  qu'a  prises  Tauteur.  Le  titre  de  la  thèse  en  question  m'avait 
Mji  ci*abc)fd  espérer  que  Taureur  aurait  enfin  démêlé  le  mérite  personnel  de 
oifrsiro^  et  que,  par  conséquent,  son  travail,  tout  en  résumant  les  recherches 
^'^^'^^cs,  aurait  une  portée  psychologique.  Mais  l'analyse  de  To  pu  seule  en 
^ "es lion  nous  a  démontré  combien  sont  lents  les  progrès  que  permet  de  faire 
tîne  coo  naissance  même  approfondie  de  la  littérature  allemande  du  moyen  âge. 
^  K^iiî^  un  peu  obscur  de  Wolfram  ne  sera  peut-être  jamais  complètement 
5*1^*  P^r  nous  autres  romanistes,  tandis  que  les  germanistes  se  heurteront 
touiotir^  (et  peui*élTC  sans  trop  s*cn  apercevoir)  à  des  obstacles  imprévus 
i^uaiiij   11^  voudront  nous  suivre  de  prés  dans  les  voies  de  notre  domaine 


t , 
m, 

iv; 
17; 


Cr  Roi  in,  AlhcaaSy  Iiitiî.  IX. 

^'h.  184,  SSSî  n^^  3855;  28s,  135s;  29[,2î  420,  ai. 

Voici  Tensemble  des  passages  qui  sont  à  examiner  :  ÏVh.  191,  25;  192, 

^iS,  iî-14;  270^  271;  284,  145s;  28s;  287,  n>s^  318,  lîSSMîï» 

41»,  î4,  15;  4P,  16. 


322  COMPTES   RENDUS 

spécial.  Mll«  N*  N»  me  semMe  être  plutôt  gemianîste  \  mais  en  s'adonDant 
à  des  recherches  aussi  compliquées  que  celle  qu'exige  toute  étude  sur  Jc 
WUUhaîm^  elle  a  faït  preuve  de  connaissances  louables  dans  le  domaine  de 
l'ancienne  épopée  française*. 

Je  me  dispense  d'autres  remarques,  compt^ini  bientôt  reprendre  le  sujet 
int^puisable  au  IVilkhalm  dans  une  étude  spéciale  (dont  les  commencements 
datent  de  1 894),  et  qui»  je  Tcspère,  me  permettra  d*établir  quelques  points 
de  vue  nouveaux. 

M.  J.    MlUCKWlTZ. 

Jean  Glopitiel  dit  de  Metmg.  Lt  Ronmn  de  la  Rme  considéré  comme 
document  historique  du  régne  de  Philippe  le  Bel,  par  Félix  GuiLLON. 
Paris,  Picard,  et  Orléans,  Loddé,  190J,  ïn-8«,  225  pages, 

J'éprouve  quelque  hésitation  à  parler  ici  d'une  pubhcadon  dont  b  valeur 
scienii tique  est  loin  de  répondre  aux  exigences  de  cette  revue;  mais  peut- 
être  épargne  rai- je  quelques  heures  d*une  lecture  sans  profiî  aux  personnes 
dont  le  titre  du  livre  aurait  pu  soUiciter  rattentioti*  M,  Guillon  >  considère 
b  seconde  partie  du  Roman  de  k  Rme  comme  «  une  sorte  de  chronique  riméc 
des  principaux  faits  du  régne  de  Philippe  IV  m  (p<  152),  écrite  sur  Tordre  du 
roi  %  de  qui  elle  devait  servir  tes  projets  contre  la  noblesse  et  ta  papauté. 
Chez  Jean  de  Meun  se  tenaient  «  maintes  réunions  de  bourg^îs,  de  publi* 
cîsiet  et  de  poètes,  sincères  gallicans,  commentant  i>  les  événements  poli- 
tiques :  Engucrrand  de  Marigny,  Guillaume  de  Kogaret,  Pierre  Flotte» 
Pierre  Dubois,  et  d'autres,  dont  Ténumération  occupe  trois  pages  (p,  26-28),  y 
donnaient  «  le  mot  d'ordre  pour  disposer  les  esprits  en  faveur  de  la  cause 
royale  »,  «  L'osiel  de  la  TornelJe  fut  Tarsenal  d'où  panirent  les  mille  traits 
satiriques  contre  la  noblesse,  le  clergé  et  la  cour  de  Rome  qu'on  lit  dans 
Baudoin  dt  Sebmrg,  Rinarl  k  CùHînfait^  le  Roman  dt  h  Rqu^  Fam^l,  la 
Chromqm  métriqm^  les  écrits  pamphlétaires  de  Dubois,  etc.  »  (p,  28).  €^€iil 


i.  Autrement  elle  aurait  su  profiter  des  excellents  conseils  de  M*  Van 
Hamel,  qui,  sous  le  titre  de  ômlkume  d' Orange ^  a  publié  d* intéressants 
articles  dans  le  GiWs  de  1898   (cf*  Rûitmnia,  XXVIII,  ijo), 

2.  Mais  pourquoi  n*a-t-ellc  tenu  aucun  compte  de  l'épisode  du  tlnef  ?  Je 
ne  prétends  pas  éclaîrcir  cette  question.  Mais  quel  motif  aurait  conduit  Wol- 
fram A  supprimer  cette  histoire  d'un  gros  sapin  coupé  par  Rainouart  lui- 
même  et  si  grand  qu*il  couvrirait  cent  chevaliers  de  son  ombre?  Serail-ce  à 
cause  de  k  cruauté  de  Rainouart  qui  tue  le  pauvre  forestier  ?  Mais  d'où  lui 
vient  répisodc  du  juif  dcNarbonnc  qui  est  pour  ainsi  dire  fourrier  d*Ermen- 

fart  di;  Pavie?  Car  cette  tradition  appartient  à  ta  ctianson  d'Aymeri  dt  Nar- 
mne  (cL  aussi  Girori  de  Fitt^w), 

y  En  exposant  le  contenu  de  son  livre,  j'y  suppôt  un  ordre  qui  n'y 
existe  pas. 

4.  <c  Jean  de  Meung  a  continué  le  roman  sur  Tordre  et  d  après  les  vues  du 
roi,  comme  firent  également  pour  Philippe  IV,  dans  le  même  but,  J,  Gîé- 
lée,  G.  de  Rome,  G.  de  Paris,  J,  de  Paris,  F*  ées  Rues  n  (p,  2^,  n*»  t)* 


^ 


GUfLLOK,  Jean  Chpinel  dit  de  Mmng  323 

efi  1 296  que  Jean  de  Meun  commcni^a  son  poème,  Q  le  termiïia  nécessaire- 
ment ivani  novembre  1505,  date  de  sa  mort,  sûrement  après  la  bataille  de 
Cou  rtrai  (1302);  mais,  «  au  fur  et  à  mesure  de  leur  composition  u,  ses  vers 
«  tétaient  lus  avec  empressement  par  le  peupk  »»  à  qui  on  les  communiquait* 
t-orsque  M.  G.  aflfinne  que  la  composition  de  fa  seconde  partie  du  roman 
doit  être  placée  cntTe  1196  et  ipS,  que  fait-il  des  témoignages  nombreux, 
fléôsî/s,  qui  prouvent  que  l'achèvement  du  poème  est  plus  ancien  d*une  tren- 
taine d^année^?  A  qui  rappelle  les  vers  où  est  mentionné  Charles  d'Anjou, 
«  qui  ore  eside  Sicile  rois  «,  il  répond  que  le  passage  n'est  pas  de  Jean  de 
Mêtin  :  fl  Quoiqu'on  n'attribue  généralemetit  à  Guillaunie  de  Lorris  que  les 
4I-I9  (itf)  premiers  vers  du  roman,  des  commentateurs  pensent,  et  avec  juste 
raison,  qu'il  continna  son  poème  jusqu'au  vers  toi  14  w(p.  191).  C'était  bien  la 
peine  que  le  poète  prit  soin  dlndiquer  deux  fois,  en  termes  très  précis,  dans 
le     roman  même,  puis  dans  le   prologue  de  Bolciii  l'endroit  exact  où  com- 
nnëncç  son  œuvre!  D*aillcurs,  la  ligne  de  démarcation  est  tracée  entre  les 
deu^  parties  du  poème  par  !e  contraste  entre  îes  caractères   des  auteurs, 
plta^    encore   par   la  différence  des  rimes,   riches  dans  l'une,  Idonînes  dans 
f^^am^rre;    enfin  cette  ligne  est  marquée  dans  les  manuscrits   soit  par  une 
rtil>riqiit»  soit  par  une  miniature,  soit  par  un  intervalle  laissé  eti  blanc.  Une 
«^uinaaîne  au  vacm^  de  manuscrits  sont  certainement  an  teneurs  â  1296,  mais 
^SL.      G,  sans  les  avoir  vus,  affirme  que  tous  sont  du  xiv^  siècle  ^   Méon 
a  sîgïïali  un  arum^emttU  du  Roman  de  la  Rose  daté  de  laço,  en  donnant 
aa  renunieur  le  nom  de  La  Porte  %  j'ai  eu  moi-même  Toccasion  de  mention- 
ner cette  composition,  en  appelant  l'auteur  Gui  de  Môrî  >  :  «  En  15 10,  dit 
M.    G,  un  poète  nommé  La  Porte  reprit  ce  roman,  en  y  ajoutant,  retran* 
c^ani  et  en  renversant  tonte  la  marche»  (p.  172)...  ff  Gui  de  Morî,  trouvère, 
dte  en  1350  le  Roman  de  h  Rose  comme  un  des  ouvrages  les  plus  populaires 
de  son  temps  (G.  Piu-is).  A  la  bibliothèque  publique  de  Tournai,  on  conserve 
va    manuscrit  de  ce  roman  revisé  et  modifié  par  ce  trouvère  a  cette  date  * 


t  -  AiUeurs  pourtant  il  dit  (d'après  P*  Paris)  que  troU  des  mss.  de  la  BibL 
mt,  sont  du  xiii*  siècle  (p,  176)» 

2  •    I>ans  la  préface  de  son  édition  du  Roman  àt  la  Rose, 

î-  ffisioirt  de  la  latipieH  de  la  UtUmime  fran^aist,  publiée  sous  la  direc- 
tion ci<^  Petit  de  Julleville,  II,  150. 

4  •  1^«  remaniement  de  la  première  partie  du  roman  fut  termine,  et  celui  de 
la  5econ4^  partie  commencé 

Efi  Tan  de  11 uc^rn sinon 

Jbeju  Criîit  par  Jupliaition 

Di!  .V^.ec  .V.  et  .XL., 

Le  jeudi  dev^iit  çou  c^on  chtute 

Rtit^freti 

1^  autvur,  dans  un  prologue,  ne  veut  pas  faire  connaître  son  nom 
Autrement  fors  que  par  mos  teu* 
C'oiî  entre  par  moy  «s  osiçci$. 
|4&iti  a  canctu  de  ce  dernier  vers,  avec  beaucoup  de  vraisemblance,  qa*i) 


324  COMPTES   RiNDUS 

Ccst  ie  commentaire  du  Roman  de  Ut  Rosff  «  considère  comme  documcïil 
liistoriqua  du  règne  de  Philippe  le  Bel  0,  qui  fiût  le  sujet  principal  du  livre, 
el  £|ui  en  occupe  la  plus  gmtide  partie  ;  ce  comiueutaire  est  uue  accumulation 
de  citaiious,  de  traits  souvent  faux  ou  mal  compris,  sur  les  moeurs  ei  la  vie 
du  moyen  ige,  recueillis  dans  quelques  ouvrages  dont  les  auteurs  seulement 
sontdtfe  :  Millot,  Gidel,  H.  Martin,  Velly,  etc.,  Chateaubriand  surtout,  — 
banAlités  qui  d'ailleurs  ne  se  rapporicnï  pas  plus  au  temps  de  Philippe  b  Bel, 
qu'au  %n^  siècle  ou  au  xv**  En  même  temps  que  ces  écrivains,  à  qui  il  doit 
le  fonds  de  ses  connaissances  historiques,  M,  G.  se  eompbh  à  citer  h  tout 
propos,  souvent  hors  de  propos,  des  poètes  du  moyen  âge,  que  très  apparem- 
ment il  n'a  pas  lus  ;  il  parle  à  plusieurs  reprises  des  infortunes  conjugales  du 
Bossu  d*Arra5,  «  Tauteur  de  Saini-Nicoki  »  (iiV,  p.  1 1%  de  celles  k  de  Vil- 
lon et  de  tant  d^auires  qui,  dans  leurs  poésies,  se  plaignirent  grandement  de 
s'circ  engagés  dans  les  liens  en  mariage  »  (p.  125).  Dans  un  exposé  des 
eeuvrcs  de  Jean  de  Meun,  il  compte  «  son  Téstamtnt,  composition  dévote 
de  1708  vers  eu  quatrains  mono  ri  mes,  ou  Tauteur  débute  par  une  invocation 
à  k  Sainte-Trinité,».,  TÉpitaphe  dts  Tre^passe^^.,,  et  une  autrç  composition 
sous  le  titre  de  CodicUk...  de  2  î  20  vers  en  couplets  mono  ri  mes  qui  d  chu  le 
ainsi  :  Ly  père  et  ly  fils  et  ïy  Saîncu  Esperis  v  (p.  155-154).  Qiacun  sait 
que  le  second  de  ces  poèmes  est  ic  CodicUîf,  que  le  premier  est  le  TtUantmi 
tt  que  le  troisième  est  encore  Je  même  Ttstameni.  M,  G.  ne  se  contente  pas  de 
dédoubler  les  œuvres  de  Jean  de  Meun,  il  est  tout  disposé  k  lui  en  donner 
d'autres  :  c  Parmi  les  dits  joyeux  dont  le  poète  fait  mention  au  début  de  son 
Codkiiie  (lire  T^stmttt»it)...  on  pourrait  y  {sic}  comprendre  ceux  de  la  Sor- 
gmu  d'Chitijns  ei  des  Brayis  ûn  Cordfiur  »  (p.  15).  La  raison  unique  de  ces 
attributions  est  que  raction  de  cesfableaux  se  passe  i  Orléans** 

Dans  un  des  appendices  qui  terminent  son  volume^  Tauteur  s*cst  proposé 
de  compléter  un  travail  <^u'il  a  pubhé  en  1885  sur  Guillaume  de  Lorris,  en 
expliquant  comment  Jean  de  Meun  a  connu  le  nom  de  celui  dont  il  conti* 
nuait  le  poème.  Supposer  qu'un  manuscrit  donnait  ce  nom  serait  une  hypo- 
thèse trop  simple;  voici  en  quelques  mots  le  raisonnement  de  M.  Guillon, 
Uauteur  de  U  première  partie  du  roman  s'est  représenté  sous  le*  traits 


i  La  Pone.  Mais  dans  le  poème  N  s,  liomme  «  Gui  de  Moîri  »,  et 
.._.,.  j.,..^ieurs  rubriques  d'un  manuscrit  luctjauu  de  Méon,  écrit  en  I330, 
exposé  au  musée  de  Tournai,  il  est  appelé  e  dant  Gui  de  Mon  ».  Gui 
Liporte,  un  Picard,  était  sans  doute  originaire  de  Mory  (Pas-de-Calais). 

I,  Il  serait  cruel  et  sans  intérêt  de  relever  toutes'  les  méprises  qu'une 
ostentation  déplacée  d'érudition  a  fait  commettre  à  Tautcur;  on  voudrait 
voir  dans  quelques-unes  des  fautes  typographiques,  telle  la  mention,  parmi 
les  critiques  qui  se  sont  occupes  du  kotmm  dt  la  Rose,  de  n  F.  Heinrich  von 


A.  BYHAN,  Tstrorumâmscljfs  Ghssar  525 

d'Amant,  ni^iis  aussi»  du  moins  momsnlandmcm,  sous  ceux  de  Déduit,  qui  est 

vêtu 

D*un  iAmit  portrct  a.  oysîaua 
Qui  cre  tout  a  or  batus. 

Ces  deux  vers  «  diSc rivent  un  blason  :  (Tût  â  trois  aigldîn  de,.,  {gueules)  «, 
qui  es!  celui  du  poète.  Les  armes  des  seigneurs  de  Loun*-au-Bois  sont  ^or  à 
hJacÉ  d'azur,  accùmpâ^né^  de  trûh  aigletUs  de  guitile  ;  un  des  membres  de  cette 
famille,  au  xiii=  siècle,  s'est  appelé  Guillaume^  Donc  Jean  Je  Meun  devait 
savoir  que  Guilïaume  de  Loury^  ou  de  Lorris,  èîail  le  nom  du  poète  ano- 
nyme (p.   198). 

J'âuraîs  désiré,  en  terminant  cette  note,  signaler  dans  le  livre  de  M.  Guil- 
Ion  quelque  renseignement  intéressant»  ne  fût-ce  qu'un  détail;  je  ne  suis  pas 
arrivé  à  l'y  découvrir- 

E.  LANGLOtS. 


A,  Byhan,  IfitronuûÉLiilaches  Glofisar-  (Sechsttr  Jahmhérkhi  dfs 
Insiituis  fur  rum,  SpracU,  p,  1^4- i^B.) 

Le  dialecte  sî  intéressant  des  Istro-Rou mains,  quoiqu'il  ait  déjà  attiré  Tatten- 

d*a5se£  nomhn:ux  savants,  n'a  pas  encore  été  suffisamment  étudié.  Le 

*^ossaire  de  M,  Byhan  est  assurément  très  ntéritoire.  L*auteur  a  prolitè  de 

recherches  antérieures,  mais  il  n'a  rempli  qu'une  panie  de  la  tâche  qu'il  avait 

entreprise  :  son  glossaire  ne  peut  suffire  pour  connaître  dans  son  ensemble  cl 

ses  détails  la  vie  des  Rouniains  de  t'hirie  L 

L'histoire  du  glossaire  istro-roumain  est  plus  ancienne  qu'on  ne  pense. 
Elle  remonte  à  Ireneo  della  Croce.  Depuis  lors,  sauf  dans  les  documents 
d'ordre  religieux  encore  peu  connus,  il  n*esi  plus  question  des  Jstro- Rou- 
mains jusqu'à  la  première  moitié  du  XIX<=  siècle,  époque  h  laquelle  A.  Covaz 
ks  a  retrouvés  et  les  a  rendus  à  leurs  frères  de  la  Dacie,  comme  un  précieux 
cadeau.  Ceta  imposait  évidemment  aux  Daco- Roumains  roblîgatîon  de  mieux 
les  conïiaître.  Nous  ne  parlerons  que  pour  mémoire  des  notices  enthousiastes 
d'Asachi  et  des  travaux  plus  sérieux  de  Maiorescu^  M.  Ascoli,  Mikiosich, 


M.  G.  ignore *quc  la  traduction  de  Végêce  a  été  publiée  par  la  Société  des 
anciens  textes,  mais  il  annonce,  d*après  la  Rotnama  (XI,  629),  que  la  ver- 
Ion  de  Friorat  «  sera  prochainement  publiée  dans  la  Bibliothèque  du  cerdi 
'  wWtmre  ( sir)  de  Stutigard  »  {p.  15). 

i.   Un  voyage  que  j  ai  fait  chez  eux  en  1899  ^^'^  éclairé  sur  bien  des  ques- 
tions qu'aucun  livre  ne  résout.  Je  mets  mes  notes  à  profit  pour  présenter 
"Quelques  remarques  sur  le  lexique  istro*roumain. 

2,  M.  T,  Maiorescu  (avec  le  concours  du  libraire  Socecû)  a  imprimé  pour 

i  deuxième  fois  le  n  Ititi^raf  ift  hiria  ù  vûcabular  isiriano-nmidn  »  de   son 

Ppére  (à  Bucarest,  8*',   1900).  Je  regrette  beaucoup  mj'un  travail  d'une  telle 

importance  ait  eu  une  seconde  édition  si  mauvaise.  Depuis  longtemps  déjà, 


326  COMPTES   RENDUS 

M»  Ive  Cl  M*  Gartner  ont  ensuite  entrepris  quelques  recherches.  Aujourd'hui, 
M-  Wcîgaiïd  et  ses  élèves,  M.  Nanu  et  M,  Byhan,  espèrent  pouvoir  amener  à 
leur  perfeaion  les  études  sur  les  Istro-Roumaîns. 

Lé  glossaire  de  M,  Byhan  est,  après  celui  de  M,  Naîîu,  le  deuxième  essai 
portant  sur  tout  le  lexique  istro-roumain.  L'apparitioti  de  ce  glossaire  a  con- 
tribué aiî  progrès  des  étiides  istro-roumaînes,  M.  B\'han  est  un  traxailleuf 
diligeni,  tnals  il  n'a  pas  toutes  les  qualités  d'un  lexicographe.  Il  se  borne  à 
copier  tous  les  mots  consignés  dans  les  travaux  antérieurs  et  à  les  critiquer 
d'une  façon  souvent  trop  sommAire". 

L'étude  attentive  de  ce  glossaire  nous  amène  k  nous  demander  queUe  est  hi 
rnèthûde  à  suivre  dans  Tétude  du  lexique  istro-roumain.  En  me  basant  sur 
les  faits  réels,  je  puis  affirmer  qu'il  est  impossible  de  rédiger  un  glossaire  istro- 
roumaJn  loin  des  gens  et  de  leur  pays.  Les  observations  directes  faites  jusqu'ici 
ne  iont  pas  suffisantes,  et  plus  d'une  prononciation  fausse  est  encore  admise. 
Même  remarque  A  faire  au  sujet  des  différences  locales  et  de  la  drctjdation  des 
mots.  M,  Byhan  a  accepté  trop  facilement  le  résultat  des  enquêtes  deM.  Wei- 
gand.  Les  formes  notét^par  M.  Wcigand  ont  été  souvent  recueillies  à  un  seul 
endroit,  ce  qui  est  évidemment  insuffisant.  Les  \nllages  istro-rou mains  sont 
d'époque  très  diverse.  Si  nous  comparons  par  exemple  Fépoque  de  Irenco  dclLi 
Croce  avec  la  nôtre,  h  justesse  de  cette  obsen'ation  est  frappante*  Le  domaine 
roumain  de  Tlstrie  était  autrefois  plus  grand  qu'aujourd'hui,  et  s'il  a  diminué, 
ce  n'est  pas  seulement  par  La  dénationalisation  de  l'élèmuni  roumain,  c'est 
aussi  par  le  manque  d'une  immigration  homogène»  qui  raurajt  soutenu.  Je 
penche  a  voir  le  motif  des  différences  locales  dans  l'  «  admigration  n  qui  était 
probablement  suffis^mte  pour  les  causer.  Mais  il  faut  joindre  aussi  aux  causes 
externes  les  causes  internes,  qui  sont  absolues  et  spontanées. 

Le  glossaire  de  M.  Byhan  a  des  défauts  plus  grands  encore.  L*auteur  aurait 
pu  nous  donner  une  classification  historique  et  philologique  des  matériaux 
utilisés.  On  s'étonne  qu'il  n'ait  pas  pris  en  considération  les  différences  de 
temps  et  de  lieu  dans  révolution  du  trésor  lexical  des  Ïstro-Roumains.  Il  aiinut 
dû  contrôler  le  rapport  des  mots  istro- roumains  avec  ceux  des  autres  dklectes 
roumains.  Il  nous  donne  parfois  des  équivalents  daco-roumains  tirés  du 
glossaire  du  Cùdktk  P^oronefain  :  c'est  tout  à  fait  insuffisant.  Four  un  contrôle 
complet»  il  faut  toujours  avoir  recours  à  tous  les  monuments  littéraires  exis- 
tants. 


VîHtt/fûirt  de  Majorescu  avait  besoin  d'être  revu.  Cet  ouvrage,  qui  témoigne 
de  la  grande  diligence  et  de  lamourde  l'auteur  pour  sa  langue^  aurait  dû  être 
mis  au  courant  des  derniers  progrvs  de  la  phîloiogîe.  Une  re vision  aurait  été 
tnès  utile,  parce  i^uc  cet  ïtinéraire  est  le  fondement ^  posé  dés  1875,  de  k  dia* 
kctolc^ie  roumame.  1 

I.  Je  rappelle  la  critique  du  glosîtaire  de  M.  Byhan,  faite  par  M.  Bartoli 
(Studj  di  filo)(fiij  tumania,  Vtll,  fasc.  3?,  cf.  Rom.,  XXXI,  47**)- Ce  compte 
rendu  très  étendu  (90  pages)  CM  basé  sur  Tobservation  des  faits  réels.  Il  est 
nécessaire  pour  comprendre  !e  glosvsaîrc  de  M,  Byhan. 


A.  SYHAK,  Istrornmânischi'î  Glossar  327 

Une  erreur  comme  patiia  (amant*f)  pour  patit-a  à;xCQ'TQ\im.  -^apà^it^  stt/enî, 
(cfi  Bartotl,  i^)  csi  très  semblable  aux  faiiit^s  de  M.  Weigand,  par  exemple 
siraiîf  (Bmiaitr  Dkîtki,  ug)  pour  se  rad{e  =  dr*  se  rade  (ie  rast).  Je  cite 
encore  quc^uLîs  fautes  emprunta  à  M.  Weigand,  sans  la  critï<|Ue  qui  eût  élé 
.  très  nécessaire.  M.  Byhan  citt!  (Jubrésb.,  Vf,  241)  diaprés  M.  Wcigand  (Jb.,  I, 
^114)  «  iJ^s-aifakut  tmi  mtin, no^okfum urdindt  ».  ^Vofomème  avecla  remarque 
de  M.  W^eigand  {Jh.^  VI,  597)  n'est  pas  géndTal,  je  Taî  remarqué  aussi  à 
Villanovâ.  Le  sens  donné  par  M,  Byhan  p>  191,  dVpr^s  p.,  111,  p),  à  ohuilâ, 
est  inexact.  OMnld  n'est  ï»as  «  guêtre  î>»  mais  «  Ungc  de  pied  »,  Je  men- 
tionne encore  iiptuî  de  M.  Wcigand,  Jb.,  JII,  523,  cité  par  M.  Byhan, 
p,  J70,  avec  la  remarqut  que  un  ^  ne  se  change  jamais  en  un  ^  devant  une 
autre  consonne.  En  Banat  existe  tieulemeni  ii^mâ  et  jamais  siptttl. 

Un  dictionnaire  ou  un  jt^lossaire  doit,  à  mon  avis,  représenter  fidèlement 
h  vie  d'un  peuple.  La  vie  physique  des  Istro-Roumains  se  présente  sous  deui 
aspcas.  Les  gens  du  nord,  à  /cjànu,  sont  ehart»onniers,  et  diaprés  une  per- 
mission spéciale,  colporteurs  de  vinaigre  dans  la  banlieue  de  Vienne*  La  vie 
dans  une  grande  ville,  à  Fiume  ou  à  Vienne,  et  pleine  des  soucis  du  pain  quo- 
tidien» leur  donne  une  certaine  souplesse.  Au  contraire,  les  Roumains  de 
Valdarsa,  liés  à  leurs  sillons,  sont  plus  conservateurs.  Outre  leur  miiniùre  de 
vivre^  leur  milieu  est  différent.  Les  Roumains  du  nord  sont  en  contact  avec 
les  Slovènes,  et  ceux  du  sud  avec  les  Croates.  Je  puis  remarquer  en  passant 
que  pour  étudier  les  éléments  slaves  de  ce  dialcae,  il  faudrait  avoir  des  dia- 
lectes sbves  de  r  ht  rie  une  connaissance  qui  nous  manque  encore.  Il  faut 
d*âilleurs  remarquer  que  les  Istro- Roumain  s  sont  comme  noyés  dans  une  mer 
de  Sbves,  S'ils  existent  encore,  c'est  grâce  k  h  force  latine,  qui  les  fait 
résister  à  la  dénationalisation.  Ils  savent  toujours  compenser  leurs  pertes.  Le 
f^it  qu'une  hlîe  roumaine  mariée  dans  une  famiUe  slave  la  dénationalise  n*est 
pas  rare.  On  en  a  aussi  des  exemples  datts  d'autres  provinces,  en  Serbie, 
Hongrie,  etc.  En  revanche,  une  fille  slâ%^  mariée  avec  un  Roumain  devient 
Roumaine,  par  exemple  à  Zeîânu. 

Dans  îes  pari  ers  des  Istro-Rournains,  nous  avons  affaire  à  un  usage 
nonnaL  qui  nous  présente  un  compromis  très  intéressant  entre  les  forces 
internes  et  externes  de  leurs  habitudes  de  langage.  La  filiation  de  ieur  dialecte 
n*cst  pas  conditionnée  par  les  circonstances  loppgraphiques,  inaîs  plutôt  par 
llsôïement  des  villages.  Du  reste,  on  remarque  aussi  en  Valdarsa  de  petites 
dilTércnces  locales. 

Je  me  permets  de  supposer,  d*aprés  Téiat  réel  des  faits,  qu'il  y  a  en  I strie, 
pour  le  dialecte  roumain,  deux  zones,  une  au  nord^  aujourd'hui  limitée 
à  Éejânu,  et  une  au  sud,  en  ViMarsâ^  dam  sept  villages  roumains. 
Je  fais  cette  répartition  à  la  fois  d'après  la  phonétique,  la  morphologie  et  la 
lexicologie.  Je  regrette  beaucoup  de  ne  pouvoir  développer  dans  ce  compte 
rendu  les  preuves,  ce  qui  nous  entraînerait  trop  loin  dans  l'histoire  de  ce  dialecte 
intéressant,  mais  je  me  réserve  de  les  publier  une  autre  fois. 

Le  nmnque  de  communication  entre  ces  deux  lones  a  causé  un  certain 


)l8  COMPTES   RENDUS 

tmttgoinsme«  résultat  des  ambitions  locales,  mats  restreint  et  réglé  par  le 
génk  et  le  sens  esthétique  de  la  langue.  L'un  caniirtérisc  Tauire.  Par  enetnple 
f  ai  entendu  une  crid«^ue  simple,  mais  juste,  d'un  Bouttiain  de  Valdarsa  sur 
les  Roumains  de  Zeiâuu  :  «  Chaque  village  a  une  autre  langue,  mais  notri:  lan- 
gage à  nous  est  plus  clair  et  plus  jolî;  ils  ne  prononcent  pas  si  juste  que  nous,  sm 

Sur  Tanalyse  physiologique  des  sons  du  dialecte  istj-o-roumain,  je  ferai 
quelques  remariiues,  car  la  transcription  de  M.  Weigand  est  quelquefois 
îne.iiacte.  M.  Banolî  a  déjà  corrigé  quelques  erreurs;  je  puis  en  relever  d^aiitres* 

Le  signe  c  de  M,  Weigand,  accepté  par  M.  Byban,  rq>résente  en  réaîttè 
trois  sons  (fait  constaté  par  M.  Bartoli,  54)  :  10  un  e  ouverî  correspondant 
au  dr.  à;  a°  IV  du  p.p,  en  -fit;  }^  un  son  semblable  au  dr.  d  de  h  termi- 
naison sans  article  des  féminins.  Mon  impression  auditive  diffère  peu  dans 
cette  question  de  ceile  de  M.  Banolî.  La  première  catégorie  est  toujours 
ouvene^  ta  deuxième  est  différente,  -eii  est  variable,  mais  Yi  n'est  pas 
si  ouverrt  que  îe  premier*  Pour  t  de  la  troisième  catégorie  de  la  terminaison 
des  féminins,  je  garde  dans  la  pratique  la  transcription  de  J.  Maiorcscu 
jusqu'à  ce  que  le  son  ait  été  étudié  expérimentalenient. 

La  transcription  de  M,  Byhan,  basée  sur  Taudition  fausse  de  M*  Weigand, 
des  mots  krpt^,  t%r^  (pp*  2)4*  3^°)»  ^^t  inexaae,  car  le  premier  r  «st  un  r 
trùs  ouvert»  le  second  est  un  ^f  roumaiiî,  avec  un  €  pour  base^  à  mon  avis. 
La  déîcrmination  de  ces  sons  dépend  des  expériences  qui  se  feront  avec  des 
appareils  phonétiques.  Mais  si  on  ignore  les  différences  de  qualité  de  ces  sons» 
il  ne  faut  jamais  oublier  les  conditions  primordiales  de  l'évolution  des  sons. 
On  sait  que  t^  dans  les  deux  premières  catégories,  est  sous  l'accent»  undîs  que 
k  terminaison  en  roumain  est  toujours  sans  accent,  sauf  dans  les  mots 
empruntés. 

Je  mentionne  encore  le  fait  très  curieux  de  Vd  dr*,  qui  devient  en  tstro* rou- 
main tl.  Cet  â  devient  parfois  une  diphtongue  obser\'ée  déjà  par  Maiorescu, 
M,  Kanu,  M»  Banoli  et  aussi  par  moi.  M.  Nanu  nous  présente  un  cas  koîmku 
{cL  Byhan,  244).  J*ai  entendu  de  la  bouche  d'un  Voldarsicn  s^âre  pour  iorr 
(mk),  qui  est  la  forme  légitime. 

Pour  l,  é,  M.  B\han  généralise  un  li,  ce  qui  est  aussi  inexact*  s  pour  I  est 
incorrect,  s  est  semblable  a  îa  prononciation  vénitienne,  laquelle  n'est  pst% 
générale  pour  les  mots  roumains.  On  peut,  il  est  vrai,  entendre  larpi  pour 
iiirpt^  mais  Uemt  en»  â  mon  avis,  douteux,  du  moins  je  ne  l'ai  jamais 
entendu. 

Le  complément  de  M.  Bartoli  nous  montre  d'une  manière  évidente  que  le 
glossaire  de  M.  Byhan  n'a  pas  exploité  tout  le  matériel  lexicologique  du  dia- 
leae  istro-rouniàin^  De  mon  côté,  je  rectifierai  ki  seulement  quelques  mots 
en  me  plaçant  toujours  au  point  de  vue  exposé  ci-dessus  '.  Pour  la  rédaction 


î .  Dan%  les  Studi  dlfikî^k  r0mania,t.  IX,  sous  le  titre  de  Xuov€  ^nliUr 
al  Dixpmàrh  dtlU  coionit  tutiunt  ii*istna^  j'ai  donné  une  foule  de  mots  incoti* 
nus  à  nos  savants. 


J30  COMPTES   RENDUS 

prononcbtions,  p.  ex,  les  préti^s  prononcent  bUirml,  le  peuple  regulicrement 
hesârikdt  pi.  hêsdriL 

hat,  6»  est  une  forme  secondaire  de  /jïj/  (Bylian,  198),  certaîncmciîl 
empruntée  du  croate. 

kiiié,  inic.  -M,  pL  -£-»  Maiorescu,  94;  man<^ue  dans  Miklosich,  Baiif  n^st 
pas  seulement  chcan  de  coasâ,  mais  généralement  »  maneau  b,  Byhan» 
198,  connaît  hotiil, 

bfk,  Byhan,  193,  est  mal  traiiscrît»  M.  Gartner  nous  présente  pour 
riialicn  iteecù  (mouton,  bec)»  sous  646  (et  non  (i}f}  et  886,  deuxiormcs  dilTé- 
fentes,  Bec  est  certainement  la  fonne  de  6}6;  pour  te,  d.  le  mot  soivant- 
Pour  kc,  il  y  a  chez  M.  Gartner,  886,  kJyun,  mot  inconnu  de  M.  Byhan. 

hikf  Byhan,  J94,  est  aussi  mal  copié*  Maîorescu,  95»  connaît  seulement 
bîk,  Miklosich,  ao,  nous  présente  hîk,  hdk^  erreur  attribuée  par  Byhan  à 
Maiorescu.  Bartoli  a  remarqué  la  faute.  En  effet,  bik  est  tout  à  ùit  inconnu 
aux  Istro-Roumains.  On  Jit  seulement  M -w,  v.  le  mot  précédent. 

bîi^^ft  de  ByJian,  194,  est  corrigé  par  Bartoli,  41,  J'ai  entendu  ce  mot  à  4, 
mais  dans  une  forme  fém.  urâ  hisa^à,  pf,  dcibisitgi.  Je  ne  pub  savoir  la  mison 
du  changement  du  genre,  car  M.  Bartoli  nous  présente  bisêgik. 

hrûii  est  bien  noté  par  Maiorescu,  Byhan  est  dans  Terreur.  Bartoli^  42, 
dotine  r opinion  de  Maiorescu .  Génér,ilement  hrâu  ^=  cordon,  ruban.  Le 
fîiôt  avait  à  Schitazjîa  le  sens  d'échaqie.  En  îr.,  poiîr  écharpe,  on  dit  partout 
seulement  kanttid. 

drùti^  Bvhan,  a  10,  d'après  la  renurque  de  Bartoli,  45,  est  usité  aussi  dans 
Viildarsa.  J'ai  noté  à  4  drob  de  kai  —  morceau  de  fromage. 

Jdtê,  Byhan,  215,  et  BartoH,  45,  eit  inconnu  en  Valdarsa,  où  on  a  pour  ce 
mot  ks  expressions  suivantes  :  omuse  naiU,  bJaga  (bou^  oia^  vaka,  puricu,  etc.) 
«  lle^tf  m^hpora  si  porkele  se  pokiesai^  et  enfin  krilianu  se  port>d{^  Tous  ces 
mots  sont  d'origine  slave,  excepté  se  naite, 

firmintà^  Byhan,  214.  J'ai  remarqué  à  %Ao  ftmtinl(\^^M  lictJ  de  i&f ornent u 
de  M,  Nanu.  L'explication  de  io  fermenki  donnée  par  mes  paysans  était  : 
luhru  a  mise^,  Lc  mot  est  îdetnique  avec  le  dr.  frâmînt^ 

flumtind,  Byhan,  a  16,  Bartoli,  46,  est  entendu  par  moi  à  4,  hîamund^  f^^'l- 

fil/,  Byhan,  la^ ,  n'a  pas  été  obser\'é  par  moi.  On  dit  seulement  ^»uL  Quant 
d  Télyniologiej  c'est  une  autre  question.  Gt*/,  -«,  pL  -uri  et  ^iîurû  obwrvé 
aussi  par  Maiorescu,  107» 

gfrkfan^  By^lan,  235.  nous  prés4;ttte  le  mot  diaprés  M.  Nanu,  TC*'flft.  Le 
mot  est -il  croate  ?  je  llgnore.  Mais  je  crois  qu'il  vaudrait  mieux,  si  le  mm 
cîtiste  en  ir.,  iV^plii^ucr  à.  l'aide  du  ghckan  {et  aussi  ben^attï)  du  dr,  han* 

gubàiî,  6,  fém,  -d,  est  croate.  Chez  Byhan,  123,  nous  trouvons  fûferW, 

gurû^  Bylian,  127,  Nous  avons  beaucoup  plus  d\ipplications  pour  1c 
domaine  roumain,  j'indique  seulement  pour  ir*  gurù  de  jâ^er,  6,  et  gufd  dt 

hmeiâ,  an,  -a,  pî.  -i,  -eîe^  >,  6,  Byluîi,  252.  Le  mot  n'est  pas  général. 
A  8  il  est  perdu,  on  dit  seulement  kciulm. 


A.  BYHAH^  fstnwumânisches  Glossar  jjl 

korn,  dy  Byhan,  247,  avec  les  formes  suivantes  :  kornu  pi,  hrm, 
koruna  Byhao,  248,  est  très  intéressant,  parce  qu'il  représente  différentes 
nuances  de  sens  originaire,  qui  ont  été  oubliées  par  M,  Byhan.  Le  sens  géné- 
ra! du  mot  était  e  couronne*.  îl  nous  présente  dans  les  dialectes  roumains  des 
formes  irès  intéressantes.  Pour  Tir.  les  résultats  des  recherches  de  M*  Nanu 
et  pour  le  mgL  les  résultats  de  M,  Weigand  ne  me  paraissent  pas  satisfai- 
sants. Du  lat,  cûtûna  nous  avons  en  roumain  cununà,  ir,  comna  et    les 
dérivés:  fl  ïiwttium^  a  éTh*!  w«4 -faire  un  mariage,  mettre  une  couronne  sur  la 
tétc,  La  forme  postérieure  cmmui}  désigne  la  monn-iie  et   la  couronne  des 
monarques,  d'où  le  verbe  a  tncoromi  ==  couronner.  Pour  le  premier  sens  je 
puis  donner  les  formes   méglénes   :  curûn   inL  curutmri^  d*où  le  dérivé 
airmmtt{f  s.   pL   dans   le  sens  de  taxe    d*iin   curé   pour   le   mariage;  p, 
ei.  popa  duHd  curunati^î   =  le  prêtre  recueille  les  taîtes,  v.  M,    Papahagi 
Rùmûniï  àin    MegUnia.    (Texte     si    glossar),    Bucuresci,    gr.    8»,    1900, 
p.  39.  En  ir.  le  root  n*existe  plus  avec  ce  sens.  On  dit  seulement  :  aitâx  H 
(Fusagc  du  pronom  relatif  est  un  reste  du  dr.)  mcgu  po^ûkom  (syntaxe  et  mot 
slaves).  Le  mot  hruna  7,  ne  signifie  pas  h  hak  d*épines  i»,  mais  seulement  la 
couronne   d'épines  de  la  haie ,  de  même  en  Banat  cununâ  de  spini  ^  ir* 
Jkoruna  Je  5pu\  Pour  M.  Nanu  il  faut  observer  qu'il  est  difficile  de  parler  de 
la  terre  «  prtnde  se  kona  i>.  A  8  on  appelle  loruna  seulement  les  parois  d'un 
^raod  trou.  Le   manque   de   terre   a  obligé  les  paysans   à    pratiquer  des 
grands  trous  dans  les  roches;  on  apporte  la  terre  sur  les  parois  où  se  développe 
Isi  pauvre  récolte  de  ces  Roumains.  Le  nom  de  hùruna  est  tout  à  fait  justifié, 
p?iir  Taspcct.   Pour  la  couronne  on   emploie  généralement  le  mot  allemand 
.^fCrùttf  sous  la  forme  kruna,  laquelle  existe  aussi  chez  les  Slaves, 

kosWej  ast.-a  4  comme  en  Banat,  cf.  auissi  dlrjulâ  avec  le  sens  de  «  maoche 
^eU  faux.  »  • 

krptây  asi.-iî,  pL  -i,  -fh^  6  Byhan,  254  et  Bartoïi,  5  s*  D*après  la  phoné- 
tique je  crois  que  cette  forme  est  la  seule  générale. 

krtvàr  quelquefois  est  prononcé  comme  le  mot  slave  kmvar.  Maison  peut 
^■^mirquer  que  le  roumain  l'ukar  est  aussi  connu  et  usité.  Dans  le  sens  de 
'taureau  comme  Va  remarqué  aussi  M.  Byhan  est  invraisemble, 

kurudi pipa,  7,  Byhan,  259.  Cette  expression  existe  aussi  en  dr  ban. 
îxdi^^  6,  Byhan,  269,  mal  présenté.  Je  croîs  qu'il  y  a  influence  slave» 
màHàku^   4,   forme  masc.  de  mal^ka^    «  matou  ■.  La  forme  mqtstik-u  de 
3ii.  Weigand  (v,  Byhan,  282)  me  paraît  invraisemblable.  J'ignore  si  la  forme 
«st  â  rapprocher  de  la  (orme  albanaise  maùok  :  mais  je  pense  que  le  mot  est 
le  même  que  le  dr,  mi(oc  (m/foc  suffixaugmO- 

tnâtâf  Valdarsa,  dans  la  locution  f^r  tnârf  mârë  =  noble,  et  aussi,  ironî^jue- 
inçnt,  ariâtûcrate. 

tmx,-ti,  5,  Byhan»  275,  Bartoli.6ô-  Le  mot  me^  de  Maiorescu  n'existe  plus 
^U|ourd'hui,  La  forme  que  j*ai  observée  était  dans  b  phrase  :  korii*i  dé  hrai^ 
^^^u-i  n  luntru  la  gîtndû  ^  dr,  çoaja  j^lnndtî  t  a/anl,  iar  mie^nî  in  hluniru. 


3P  COMPTES    RHKDUS 

Parallèlemctit  à  me{  on  trouve  en  Valdarsa  aussi  ;  mléif  p,  ex»  ânÈr^  kârdê 

di  p&gâU-î  mîéi  =s  dr.  Inîn  çojiU  paplcîî  U  mk^^ 

mktesk^  Byhan^  278^  Bartoli,  60^  existe  aussi  â  a,  ex,  mkk$k  ukâm.  Non? 
avons  en  Eanat  mïdm  :^  ir.  matsohi  ^n  fléau* 

mîrlœsK  st*  mîrktsk  aik,  8»  comme  en  Banat  (coi tus  extra-naturd  des  mou- 
tons). 

multa  ^  MHg  ^  pedfipm  \  ces  troîs  formes  sont  simultanimenî  usitées  dans 
le  sens  d'atnende  pécuniaire, 

wa«  =  mtmt,  lequeî  est  plus  asîié,  eï.  mai  wiim  ^  dr,  nrnl  muit  =  beau- 
coup plus. 

nJdfsk,  -i  sdptmu,  sekstra,  eic«,  aussi  dans  la  forme  a  pure  mJa,  4,  ^souder 
de  nouveau,  h  ûa  prcnëdi  roba  ==  coudre  une  pîèce^  réparer  les  linges, 

nàkmmîa  existe  aussi  à  6  (Byhan,  285)  —  enclume. 

ûhTalà^  pL-^  4.  Le  mot  existe  donc  aussi  en  Valdarsa»  M.  Byhan,  291, 
nous  donne  une  forme  o/^ic,  laquelle»  je  crois,  n*est  pas  justifiée* 

cbruiu^  6,  Byhan,  291,  dans  le  sens  de  cerceau. 

0vtsâr^  optsâr  et  iohân.  M  y  aussi  pekurâff  cf.  dans  le  dialecte  du  Banat 
pikurar  =  berger. 

pastir-u,  pL  -I,  4,  du  m^me  village  que  le  mot  de  M.  Ganner  cité 
Byhan,  jOî,  et  dont  la  forme  est  phonétiquement  fausse. 

parts  de  M.  Wcigand,  cf.  Byhan,  319,  me  paraît  incorrccu  J'ai  entendu 
pîris  8,  il  y  aaussi^îVlJ  4e  {aprr  (évolution  du  î  en  *  jusiiiiée). 

pditùr^  Byhan,  joj,  eiisie  aussi  en  Valdarsa»  par  ex.,  au  lieu  de  km'tam  (mot 
slave),  on  dit  aussi /»iWor«  de  kâF  ^  —  un  berger  de  chevaux* 

ptkâtf  -If,  pU  fk\^  par  B^han^  517,  ex.  dans  la  phrase  pekâuk  st  i^Hakm  an 
pîfgaiùrie  (l^  pêchers  se  nettoient  dans  le  purgatoire). 

pf^a  8  ^  balance*  Le  verbe  est  speitsk  ipe^(u  8  je  n'ai  pas  consul  é  la  forme 
de  M.  Byhan,  506,  pe^tih, 

phkoîiisâ,  aussi  prkolitiâ  4  =  une  histoire  comique.  Le  mot  est  skve, 
V.  aussi  M*  Weigand  dans  les  addenda  au  glossaire  de  Byhan,  p.  J98. 

pïàknisk^  -I,  it  4  =  cracher,  U  forme  de  M.  Gartner  (v.  Byhan,  jio)  et 
fausse,  l*avis  de  M.  Byhan  est  tout  à  fait  justifié, 

prâh-u^  Byhan,  pi,  =  poussière  et  poudre»  ex.  prâ!^  de  pukm  U  pre 
kik'iprâku.  En  Banat  prah-praf  parrintermédiaire  de'pray  a  donné  prnu  ^ 
pûadre  ;  la  poussière  de  la  rue  s'appelle  en  Banat  ptdhàr 

prikinif  Byhan,  319,  a  deux  sens  :  1°  luxer,  disloquer,  et  2*  détacher. 
Pour  le  premier  sens  h  remarque  de  M.  Barioli,  57,  contre  M,  Byhan  rclaiive- 
mcni  à.  ahaie  est  juste,  parce  qu'on  dit  pour  «  disloquer  »  :  p.  ex,  fata  i^ 
prikinii  mùm  6  ^  b  filJe  s'fôt  disloqué  la  maïn,  Frikim  =  détacher,  de 
M.  Byhan  et  M,  Nanu,  est  général  à  8. 

riqd,  Byhan,  332,  n'est  pas  bien  traduit  :  ru^a  désigne  seulement  la  fleur 
du  raisin.  Pour  «  vigne  »,  existe  à  8  le  tnoi  %a,  comme  en  Banat* 


4 


A.  BYHAN,  Istrorutnànisches  Glossar  333 

sârèirâf  Byhan,  346,  a  pris  la  même  extension  que  le  dr.  insàrcina  =  peser, 
charger.  On  dit  p.  ex.  en  dr.  insarcina/U  (o  muierc)  =  grosse,  enceinte  ;  en 
ir.  on  dit  dn  sarèird-i  =  dr.  ban.  grf  de  greu  (Ipurd). 

skof  4^  Byhan,  339,  inexact.  La  phrase  suivante  peut  nous  expliquer  la 
faute  de  M.  Byhan,  shofu-ipre  kâp  la  veskovu,  kârle  fermer  =  la  mitre  est  sur 
la  tète  de  l'évêque,  qui  donne  la  bénédiction. 

skuUky  Byhan,  342,  a  encore  un  autre  sens.  Skutek  est  le  tablier  des 
paysannes  replié  en  forme  de  poche  pour  y  mettre  quelque  chose.  Cette 
habitude  existe  aussi  dans  la  Croatie. 

stupy  Byhan,  355»  a  perdu  son  sens.  Il  est  employé  comme  le  mot  dr.  à 
4  (ruche). 

Joseph  Popovici. 


CHRONiaUE 


La  mon  de  G,  Paris  (j  mars)  a  eu,  par  tout  k  monde  Tcfiré»  il«  éoulciu- 
reuK  retentisse  m  s;  m.  De  toutes  parts  ont  afflue  au  Collège  de  France  les  télé- 
grammes et  les  kttres  de  condoléances ,  les  adresses  ' ,  De  maint  càîè  on  a 
manifesté  le  désir  d'honorer  b  mOmoÎTc  du  défunt,  sok  par  des  publicaûons 
spéciales,  soit  par  des  fondations  ayant  pour  objet  de  permettre  à  des  étu- 
diants en  langues  romanes  de  poursuivre  en  France  leurs  Études.  Cette  der- 
nière façon  de  perpétuer  le  nom  d'un  maître  vénéré  est  assurément  celle  que 
G.  Paris  eût  le  plus  goûtée,  A  tous  ces  amis  connus  ou  inconnus,  fa  famlUc 
adrtsse  ses  vifs  remerciements,  auxqueb  le  directeur  de  la  Rûmattia^  à  qui 
aussi  maints  témoignages  de  condoléances  ont  été  envoyés»  se  permet  de 
joindre  les  siens. 

De  nombreuses  notices  ont  déjà  paru  sur  G,  Paris,  qui  toutes  rendent  un 
juste  hommage  au  savant  êminent,  et  doiH  la  plupart  portent  le  témoignage 
d'une  profonde  sympathie  pour  riiomme.  G.  Paris  n'était  pas  seulement  un 
grand  savant,  c'était  un  grand  cœur.  Il  avait  des  trésors  de  bonté  pour  tous 
les  travailleurs  en  qui  il  reconnaissait  le  désir  sincère  d*apprendre.  Et  cette 
bonté  ne,  se  manifestait  pas  seulement  en  paroles,  eïle  ressortait  en  quelque 
sorte  de  tous  ses  actes  et  de  toutes  ses  pensées.  Entre  ces  notices,  on  signa* 
lera  ici  les  suivantes  : 

France  :  A.  Beaunier  (Figarûf  7  mars);  G.  Deschamps  {Tfmp§^  7  mars); 
A*  Chaumeîx  (D^bais^  7  mars);  Mclchior  de  Vogué  (Dc'^/i,  8  mars); 
Ml  BréSl  (Revue  àt  Paris^  ij  mars);  M.  Sepet  {Polyhibitottf  mars);  J.  Psichari 
(Grande  revm,  icr  avril), 

ALLEMAGîiE  :  E.  Stengel  (Dk  Nation.,  21  mars);  H,  Morf  {Frankfurter 
Zdlui^,  II  et  12  mars);  M.-J*  Minckwitz  (BHhgi  ^ur  Altgtmeinm  Ziitung, 
21  mars). 

Belgique  :  O*  Grojean  {Rn'ttf  de  Belgique)  ;  Wil motte  {Rnmt  de  tituir, 
ùuitL  ttt  ÎUlgique). 

FiKLAKDE  i  W.  Sôderhjclm  (Neuphihiefisehe  MHUUungiH^  Hebiiigfof^). 

HûtXANDI  :  Ji'J*  Salverdit  de  Grave  (De  Niderïatmhi  Spiciaiûf^    *90îi 


t.  Le  jour  des  obsèques,  M.  Levasseur,  vice- président  de  l'assemblée  des 
professeurs  du  Collège  de  France,  a  donnée  à  la  suite  de  son  discours,  t'énu- 
mêratioQ  de  celles  de  ces  adresses  qui,  à  cette  date,  avaient  été  envoyées  par 
divers  corps  savants. 


CHRONIQUE  3  î  S 

n^  ij);  A,-G.  Van  Hamd  (De  Gids^  avril,  en  hollandais;  Muséum  î«  mai, 
en  français). 

Itaj-ie  :  V,  Crescioi  (H  Veneto^  de  Padoue^  lo  mars);  P.  Eajtia  {Mariûcco^ 
Florence,  15  mars);  Fr*  à!0'>i\âiQ{Fûnfuîlû  ddU  £feiTwii«;a,  Rome,  ij  mars); 
A.  d'Ancona  {Giomah£lialia,  Rome,  16  murs);  Ascolî  {Rtnâkonti  du  l'Insti* 
tut  Lombard,  2^  série  XXXVI,  p.  351);  E.  Teaîa  (notice  lue  à  rA<:adêmîe  do 
Sciences  de  Padouc,  le  ai  mars);  E,  Monaci  Q^uova  Antoîogm^  i^  avril), 

RoOMAKi£  :  O,  Densusianu  (Bucarest). 

Suisse  ;  G.  Muret  (La  Semaine  Utiéfahr,  Genève,  14  mars). 

Les  obsèques  de  G*  Paris  ont  été  célébrte  avec  solennité  ïc  ti  mars. 
Dans  îa  cour  du  Collège  de  Francei  à  la  place  où  tui-méme,  etï  i%2»  avait 
prononcé  l'éloge  liinébre  d*E*  Renan,  des  discours  ont  été  lus  par  MM.  Chau- 
mié,  ministre  de  rinstruction  pubHtjue  ;  F.  Brunetière  (Académie  Française); 
».  Perrot  (Académie  des  inscriptions  et  belîii s  lettres);  Lcvasseur  (Collège 
de  France);  G,  Monod  (École  des  Hautes  Études)?  P,  Meyer  (Conseil  de 
Perfectionnement  de  TËcole  des  Chartes);  Morel-Fatio  (au  nom  des  anciens 
t'ièves  de  G.  Paris)  ;  L.  Havet  (au  nom  des  anciens  élèves  non  romanistes 
de  G,  Paris)  ;  E.  Berger  (au  nom  de  îa  Société  de  l'École  des  Chartes)  ; 
G.  Sicffens  (au  nom  de  l' Université  de  Bonne);  A  Thonjas  (Société  des 
anciens  textes  Trançais).  Ces  discours  ont  paru,  en  tocahté  ou  en  partie,  dans 
les  Whats  et  dans  le  Temps  du  1 1  mars  ;  ceux  qui  ont  pour  auteurs  des 
membres  de  rinstitut  ont  été  réunis  par  îes  soins  de  ce  corps  savant.  On 
reproduira  ici  ceux  qui  ont  été  prononcés  par  des  collaborateurs  de  la  Rùmama, 

Discours  de  M.  Pmd  Mtym^y 
mttiért  de  Vïmtitni^  dWtdtur  de  PÈcoU  des  Charles. 

L'Iy:olc  des  chartes  a  sa  grande  pjirt  dans  le  dcutl  qui  nous  afflîgt*  G*siati  Pïrii  avait 

conservé  t*n«  affeaion  lîïialç  pour  celte  école  où  H  avait  bdlR-  comme  élève,  où  if  éuh 

rcfitrc  en  iSSt,  à  h  mort  de  son  p^rc,  comme  membre  du  Conseil  de  perrcctîonnemctit. 

Il  prenait  une  part  active  aux  travaux  de  ce  Conseil,  assistant  aux  examens^  criiiquanl 

<?t  discutant  avcc   uiia  incomparable  autorité  ks  thèses  qui  lui  étaient  soumises.  La 

ctemièrc  fois  que  nous  le  vîmes  p^mii  nous,  c^était  a  la  fin  de  janvier»  sa  fatigue  était 

^î  èTidetiie,  la  pileur  de  son  visage  attestait  si  clairtnicnt  k^  ravages  de  h  maladie, 

«)ue  nous  avions  ]ti  cœur  serré  par  l'angoisseï  tandis  que.  d'une  voix  aiaîbUe,  il  argu- 

i~iicntiit  av^ec  sa  précision  et  sa  logique  habituelles.  Nous  l'admirions,  mais,  le  connais* 

%^tit|  nous  n'éiioni  pas  étonDês.  L'énergie  dont  il  fit  preuve  ce  jour-là,  il   ta  montra 

<la.ns  toutes  les  circonstance»  de  m  vie.  KIlc  4vait  sa  source  dans  un  profond  sentiment 

vlu  dcvoirl  Pour  lui*  le  devoir .  dans  les  petites  choses  comme  dans  les  glandes,  com- 

ï>qrtjil  wne  obligation  absolue,  qui  n'admettait  aucun  tcmpêramein.  Ht  cette  obligation 

I      M 1  l 'étendait  parfois  au  delà  des  justes  limites.  Le  devoir  du  professeur,  chef  d'école, 

^y&nt  pour  ainsi  dire  charge  d'imes,  n'était  pas  limité,  selon  lui,  a  l'ceuvFe  de  l'ensei* 

jgDcnnent  tx  axthedra  ;  il  se  continuait  en  dehors  de  la  salle  des  cours*  Ceux  qui  n  ont 

-  pas  vécu  près  de  G»  Paris  sont  frappés,  assurément,  du  nombre  ci  de  ïa  variété  de  ses 

I  Orcrits  ;  ib  admireraient  bien  d4vantage  s'ils  savaicrît  qu'il  a  été  pour  beaucoup  de  ses 
^l^vcs  un  coîUbonteur  bénévole,  révisatit  et  surveillant  leurs  pnbïicAtions,  Combien 
«le  foi»  ne  l'ai -je  pas  vu  négliger  ses  propres  travaux  pour  rcvoîf  ceux  des  autres  ï  Le 
%crmed*«  «iltruisie  »,  introduit  par  la  philosophie  positive,  semblait  avoir  été  créé  pour 


3}6  ^    CHRONiaUE 

Ddni  ce%  conimiS'StQn&  qui  iiouï  cmlèvcni  U  ntclllcuri:  pirt  de  notre  tctnpSi  £t  où^ 
par  ïOQ  ascendant  naturd,  il  prenait  bîent&t  iific  pUce  prépondcr^nte»  il  se  Uissâit 
cbafger  de  h  plus  lourde  besogne.  Qm'iI  *'igît  d^examincT  une  proposition»  de  fédiger 
nn  rapporti  de  faire  un  di^iconr^,  on  le  trouvait  toujours  pfi-t.  îl  eût  été  incapable  éc 
cotisenrr  une  fonction  qu'il  ne  se  serait  pas  cru  t;n  état  dt  remplir  ssloii  les  ciigencés 
de  «a  conscience.  Pendant  plus  de  vingt-ciîtq  ans  fl  avait  été  l'une  des  lumières  de  k 
Kction  d'bistoifi;  i:t  de  pliilolagîe  du  Comité  des  travaux  historiques,  dont  il  était  vice* 
président.  IL  y  a  quelques  mois,  sentant  ses  forces  diminuer»  il  donna^  je  devrais  dire 
tl  imposa  sa  détnissio.i.  Plus  d'une  fois  il  me  manifesta  rintention  de  se  retirer  du 
Conseil  de  perfectionnement  de  l'Ecole  de*  chartes.  Par  amitié  pour  moi  il  y  renonça* 
n  aurait  pu  du  moins,  et  je  Vf  invitais,  alléger  sa  tache.  Il  ne  le  voulut  pas. 

Entre  ks  nombreuies  commissions  dont  il  faisait  partie,  celle  à  laquelle  il  m  rapporté 
la  collaboration  la  plus  cllîcact:  et  U  plus  prolongée  est  la  commission  AcaJeniiijue  de 
V Histoire  Uitèrain  ÎU  la  France.  U  y  était  entré  comme  membre  adfoint,  petJ  iprès  »on 
élection  à  l'Académie  des  inscriptions  ;  il  y  remplaça  San  père,  comme  membre  tita^ 
laire,  en  1881,  Pendant  les  vingt-cin(|  ans  qti'il  y  a  travaillé»  tl  y  a  accompli  plus  que 
sa  part  de  l'oeuvre  commune.  Les  articles  qull  écrivît  pour  THhiGtrf  Uiiirmrf  ne  sont 
pas  de  ceuï.  qui  valent  à  kurs  auteurs  «i  les  g^lorieuit  suJïrages  du  grand  public  qui  ne 
peut  louer  que  ec  qui  l'intéresse  »,  comme  le  disait  notre  regretté  cottfrcre  Hauréau. 
Mais,  ^au  sentiment  de»  hommes  compétents»  les  mémoires  qu'il  a  publiés  sur  les 
romans  de  la  Table  ronde  dans  notre  trentième  volume^  sur  JoinvUle  dans  1«  trente^ 
dcuTtième,  sont  de  véritables  livres  qui  sofltment  à  illustrer  un  savant- 

G.  Paris  n'obtint  que  tardivement  ces  *^  glorieux  suflFra|çcs  du  grand  public  ■  que 
dédaignait  Hauré;iu.  La  notoriété  lut  vint  d'abord  «  sans  qu'il  la  cherchât,  par  m  petite 
Hiâtmrtde  la  Uttèraiure  fran^aite  du  moyat  âge  également  remarquable  pif  Thabite  clai» 
aîiication  des  faits»  par  la  critique  avec  laquelle  sont  résolues  les  questions  d'origine» 
de  date»  d'attribution,  pat  la  mesure  dans  l'appréciation  des  œuvres.  C'était,  dans  » 
pensée»  la  première  partie  d*un  t  Manuel  d*ancien  français  *  qui  devait  rester  inacbeté. 
Combien  d'<tuvres  iî  commença  qu*il  ne  put  finir»  combi^i^n  de  projets  il  forma  qu'il 
ne  put  réaliser!  C'est  encore  en  vue  du  grand  public  qu'il  publiait,  Il  y  a  peu  de  mois^ 
dans  une  collection  de  ces  résumes  que  ies  Anglais  appellent  des  primer i^  un  uuvrage 
du  même  genre,  mais  plus  étendu  par  le  sujet  :  un  exposé  gênerai,  en  moins  de  Kjo 
pages»  de  la  littérature  de  la  France  pendant  le  moyen  igc  {Mfdixtvit  frntfh  Utetaltir§% 
embrassant  toute  Thistoire  liitèraiire  de  nos  ancêtres  depuis  Tépoque  mérovingienne 
jusqu'^  la  6n  du  \v*  siècle.  Dépourvu  de  tout  appareil  d'érudition,  ce  petit  |ivr«  csi 
une  merveille  d'en  position  claire  et  serrée,  [^rsqull  paraîtra  en  français  il  aura  chez 
nous  le  succèï  qu'il  obtient  maintenant  en  Angleterre, 

Ses  articles  de  la  Rft*ué  dt  Paris  et  de  U  Hefia  dei  Dtux-M&ndes^  qui  attirèrent  aussit&t 
l'attention  générale,  ont  été  composés  dans  ce*  dix  ou  doiiKe  dernières  année».  Il  y  fil 
paraître  des  qualités  de  style  et  une  richesse  d'Idées  qui»  en  dehors  d'un  cercle  restreint, 
étalent  ignorées  de  ceuifi  qui  avaient  entendu  parler  de  lui  comme  d'un  grand  lavant. 
Ceux  de  ces  articles  qne»  p^r  suite  de  circonstances  panicuUéres,  [e  suis  en  état  d'ap- 
précier» son  ei>aî  sur  Fr.  Mistral  par  exemple»  m'ont  frappé  par  leur  parfaite  juftesse. 
En  Angleterre,  où  le$  savanti  les  plu«  illustres  aiment»  plu»  que  chez  nous,  I  répandre 
leurs  idées  en  dehors  du  petit  monde  des  spécialistes,  il  eût  été  classé  parmi  le*  premien 

l[  pcnj4t£»  lui  auaai»  que  le  devoir  de?  savints  est  de  travailler  non  pu  seulement  iii 
perfeetionnement»  mais  encore  h  l'en  pan  sion  —  je  n*oMrais  dire  i  la  TulgariiA^ofi  ^ 
de  b  idence.  Il  croyait  surtout  qu'it  impofUÎt  au  premier  chef  de  réptndie  la  conoalt- 
tance  des  bonnes  méthodes  de  travail.  Avant  même  de  poursuivre  cette  liehe  dant  son 
tnâêignement  —  et  il  avait  professé  dès  l'ige  de  vîngt-sept  ans  —  il  y  avait  travaillé 
par  ses  écrits.  Ce  devait  ètre^  dahs  sa  pensée,  le  but  Éinal  de  la  Rét^uf  miù^m,  qui] 
fonda,  avec  quelques  amis,  il  y  a  trente-tept  ans.  Certes  les  quatre  jeunes  hommi^  qui»  à 
la  tin  de  Tannée  iK6;,se  réunirent  dan  »  Tarn  èft- boutique  d'une  modetie  librairie  pour 
établir   les  bases  d'une  revue  légèrement  révolytioniiaire,  étaient  animé»  des  ntcmei 


CHRONiaUE 


337 


P 


«cnumcnti^  TpuSp  forts  d'une  science  qu  ibiic  pouvaient  pas  posséder  depuU  bien  long^ 
temp»,  tous  avilent  le  fertnc  propos  de  signaler  les  boui  livres,  et,  pins  encore,  de  siig- 
matiser  îe»  mauvais,  de  rcnouvdcf  notre  hiut  cnsçignanient,  de  réfotîiicr  bien  d'Antres 
choses,  mais  celui  des  quatre:  qnt  formula  ^vcc  le  pluj  de  nette  te  le  crtaîo  de  U  jeune 
école,  ce  fut  G.  Paris.  Presque  toutes  les  conceptions  qull  développa  plus  tard  ne 
retronvent  vn  gfrm«  dans  ses  articles  des  quatre  ou  cinq  premières  annë{:s  de  la  Revue 
(rffJfHc.  Et  qnand,  en  1868,  Duruy  fonda  l'ilcok  des  Hautes  Etuies,  c'est  parmi  les 
directeurs  et  conabùrateursde  la  Rfvue  (riiitihf  qu'il  trouva  la  plus  grande  partie  de  son 
Iii:i^onneL  Maiatenant,  et  depuis  nnc  trentaine  d  annce$,  nous  avons  CAUse  gagnée* 
L'ctticignemcni  tcchniquç,  spéciiil.  rigoureusement  scieiitîliqnt%  que  nom  :ivio«s  en 
vue,  a  triompbé  :  parfois  même  nous  avons  pu  craindre  qui-  notre  snccés  ait  élc  trop 
complet.  Lorsqu'il  devint  visible  que  les  idées  pour  lesqjuelles  luttait  la  Rfita  critifuê 
gagnaient  du  terrain,  les  quatre  fondateurs  du  recueil  se  retirèrent  les  uns  après  Ii» 
autres,  cédant  leur  place  à  quelques-uns  de  leufs'  collaborateurs,  et  sciWireni  châctin  it 
voie, 

Cctt  vers  ce  l^^mps  (1873)  que  G.  Paris  et  son  plus  ancien  compagnon  d*étndes  fon- 
dèrent la  Rfimania.  Puis  naquit  la  Soci^^té  des  anciens  testes  français  (187^),  I  laquelle 
Pitris  réserva  jusqu'il  son  dernier  jour  b  meilleure  part  de  son  activité. 

Mais  Paris  n'avait  pas  renonce  A  Isi  critique  des  livres  d'érudition,  œuvre  qu'il  fugeait 
de  pfemîèfÊ  impon;ince  et  à  laquelle  U  sikctc  de  son  jugement  et  Tètonnante  variété 
de  »cs  connaîssancÊS  le  rendaient  éminemmetit  propre.  Il  publia  un  grmnd  nombre  de 
critiques  trè*  spéciales  dans  îa  IhmaHia.  Il  est  tel  de  ces  comptes  rendus  qui  renouvelle 
te  sujet  traité  dans  le  livre  critiqué.  Ailleurs,  dans  h  Jounmî  d€s  SaiMnii ,  auquel  il  colla^ 
h^r^  pendant  plus  de  vingt  ans,  il  pratiqua  un  genre  de  critique  plus  large,  admettant 
Hfïn  seulement  l'examen  des  livrci^,  mais  aussi  une  ample  exposition  des  sujets  traités. 
U  aimait  ce  joutnaU  où  il  pouvait»  sans  négliger  h  pure  érudition,  répandre  le  trésor 
d'idées  générales  dont  il  était  pourvu.  Aussi  êpron\-*i-t-il  un  vrai  chagrin  quand  il  vil 
que  ce  vénérable  recueil  «  né  souis  Louis  Xt\\  interrompu  pendant  la  Révolution  et 
VEmpire,  revenu  k  la  vie  en  iëi6,  était  menacé  de  mort  subite  par  le  retrait  de  la  sub- 
vention ministérielle  qni  !e  faisait  vivre.  II  fit  des  efforts  énergiques,  hors  de  propor- 
tion pcul-étre  avec  îe  but  à  atteindre,  pour  f>rolûtiger  rexistence  du  journal  qui  lui  éuit 
cher.  Et  il  y  était  parvenu  ^  an  prix  de  quels  soucis  1  lorsque  sa  mort  est  venue  compro- 
mettre l'avenir  de  l'œuvre  si  péniblement  reconstituée.  Puisse  le  Jourmt  deï  Sattmii 
trouver  un  directeur  digne  de  celui  qui^  déjà  accablé  par  la  maladie,  ».  su  retracer  son 
bistokfe  d'une  façoti  si  magistraile  dans  le  premier  fascicule  de  la  nouvelle  sériel 

Si  j  ai  fait  quelque  effort  pour  mettre  en  son  plein  jour  la  valeur  morale  du  savant 
hors  pair  que  nous  avons  perdu,  et  que  nous  ne  rempUccrons  pas^  je  n'ai  rien  dit  de  la 
direction  de  son  esprit.  En  raison  même  de  rindépetidauce  de  ses  idées^  ses  sentittienis 
étaient  ceux  d*un  pur  libéraL  II  était  libéral  j  l'ancienne  mode,  i  la  façon  de  Laboulaye. 
Tun  de  ses  prédécesseurs  au  Collège  de  France*  Aussi  n'eutil  jamais  k  désir  ni  même 
la  veilétté  de  jouer  aucun  rôle  politique.  Ceux  qui  ont  joui  de  son  commerce,  on  qui 
roilt  entendu  dans  certaines  assemblées^  pir  exemple  au  Conseil  supérieur  de  Tinsimc- 
tion  publique,  savent  avec  quel  esprit  large  et  ouvert  il  envisageait  les  questions  qui 
ti#us  divisent.  Je  n'ai  guère  parlé  des  qualités  de  l 'homme  privé.  Il  serait  difficile,  en 
ce  moment,  k  celui  qui  pendant  quarante  ans  fut  son  ami  et  son  collaborateur,  d'en 
parler  sans  éprouver  une  émotion  difficile  à  contenir.  Qu'il  nie  suffise  de  dire  qu'il  y 
avait  en  lui  une  noblesse  de  cœur  que  yinms  n*eâeiirjt  une  pensée  égoiste,  utic  sensi- 
bilitê  exquise  qui  parfois  le  rendit  malheureux.  Tonlc  inîustice,  toute  atteinte  à  1« 
vérité,  Texaspérait;  et  si  d'injustes  accusations  étaient  dirigées  contre  ceux  qui  avaient 
Aûn  estime,  il  s'en  indignait  et  en  souffrait  plus  qu'eux-ruèmes,  jamais  je  n'ai  connu  ami 
plus  sûr  et  plus  dévoué.  Irrésistiblement,  lorsque  je  pense  k  lui,  me  revient  en  mémoire 
ce  vers  naïf  d'une  de  nos  vieilles  cbansotu  de  geste  : 

Li  «uers  d'un  homme  vaut  tôt  l'of  d'un  pais* 


Mtmtwit,  XXXIÎ 


22 


33» 


CHROE4IQÏJE 


BiïùQurs  iU  M.  A.  TAcïMWJ.  prûfmt'Ut  à  îa  FtiruUr  M  Uttrêî  4e  Pêrii^ 

^istâenl  di  lu  Sodt'ié  du  tincûns  ttxki  frun^is. 

Au  HQm  ât  U  Soclélè  dés  incieos  lexi^s  frioçiis»  j^  vitîii  idfcs&cr  le  «.:''—       ^^^ti 
à  celui  qui  fut  ton  prttwtpftl  foiiditctii  ci  i|a'cl]ç  ^hoiAit  pour  1j  préside/  <• 

4J!j9lfcit££ï.  Atterré  par  le  c<»up  qui  notii  a  frippcs  lïi  brDSî|ucmeïir.  je  ne  du  .,  .:-^  ^-^  k 
peindre  au  vif  n<H  regrets  et  l'int^rtisitè  d^utie  doyteur  à  jamii^  mC4>utol3bIe  ;  inii&  je  veui, 
CD  rappcUtJt  <[yellc  pla-cc  Doirc  Société  a  «>ecupée  din»  là  vie  kî  daii*  le  c*Kjr  de  Gaston 
ParU»  faire  compfetiirt  rombicn  graodi*  e*t  (imtc  pan  dam  cette  commujiaijtë  de  deuil 
lit  de  détresse  qui  no^s  f^unît^  aujcïurd'huif  autour  de  sa  diêne  dépouille.  Li  Société 
dct  Anciens  Te&ces  Eran^aîi  est  née  pour  ainsi  dire  de  lui  et  c'est  lurtout  pai  lui  qti'dk 
a  vécu  depuis  ut  naisunce,  c'est <^â'dire^pe:Ddant  ving-buit  a.ns.  II  nous  a  donné  à  U 
loti  et  le  preaeîgc  de  «on  nom  univcrïdkmeuE  honoréf  qitî  nous  â  g*gti^  de»  U  prc' 
ittjèic  heur«  les  sympathies  i:mpf»iéËS  d«  tout  !es  hommes  d*étiide  et  de  quelque» 
lutre»,  non  seule fiïcni  en  France  ruai*  k  TétrangeT.  ei  le  concours  efficace  de  son 
libeur  iufitigâble.  auquel  «lous  devons  la  panie  là  pltis  solide  et  en  mente  leitips  II 
plus  trilhnte  de  l'œuvre  accomplie  lusqu'îcL  Un  boo  nombîï  de  no*  volumo  tmt 
p«rti  tous  soEi  nom  ;  niais  U  liste  de  ces  volumes  ne  suffit  pas  à  donner  une  idée  de 
Km  activité.  El  ft'est  ^ucrc  de  volumes  dans  notre  coltecticm  qoi  ne  doive  quelque 
clu»e  h  «a  science  incQinpar^hle,  toujours  prête  à  venir  en  aide  â  ceux  qui  en  avaient 
beMïtn  ci  qui  sadressateni  à  lui  sana  rcHchc,  nMH  itiènai^fTienti  s^ms  merci,  ^vec  l'tl'- 
luiîou  é^uistc  ^uc  cett^  itïurcc  merveilleuse  m  UfïSiiAit  jarn^îi,  l*e  télégraphe  fiou* 
aviii  dc{i  jppofte  U  nouveHe  foudroyame  de  la  mort  que  Tun  de  noy*  recevait  cncotc 
une  tetiitic  dVpreuve^  ai!i  sa  main  défaillante  iviit  itiscHt  de  suprêmes  observatiotis« 
Nos  rejgrett  seraient  des  remords  *i  nous  ne  savions  quelle  joie  intime  c'éun  fwur  lut 
que  dç  se  dontïer  tout  entier  Jl  ce  qu*il  aimait*  Bt  c<3mmc  il  lea  *  ainiés  ces  tctt«s  dt 
latïgue  d*od  ou  même  de  langue  d'oc,  où  sommeillent  d«  parcelles  d'ime  de  la  vieille 
France^  que  nul  mieux  que  lui  ne  sut  éveiller  et  animer!  Lui  que  tim  de  ticbe% 
plus  éclatantes  solliciuient,  lui  qui  n'ignorak  aucune  defi^  jouissances  que  dimnetst  les 
manîfeJitattons  les  plus  liautcf  et  les  plus  dèlicirtei  de  le^prlt  humain,  i!  ne  craigjnait 
pâi,  que  dii-Je?  iî  se  Ëiîsâit  gbite  de  deiscendre  au  r^le  modeste  d'éditeur,  de  c<m»- 
mcnutettr,  voire  de  simpk  copiste  quand  il  s'agissait  de  quelque  le^ie  médiéval  Kim 
COtttçnt  d'en  pénétrer  le  sens  Intime,  il  savait  retrouver  sous  les  défaillances  des  scdbe» 
somnolents,  comme  par  deli  les  audaces  novatrices  des  générations  oubUeus<s,  iâ, 
pureté p  U  sincérité  de  rinspiratti^n  et  de  l'expression  primitives  Pencha  sur  le  ber- 
ceAU  de  notre  latigue  et  de  notre  littérature,  il  &'abiorbaic  dans  Je  laWwr  phOologiqtte 
coftnme  damutn  culte  religieuï,  (Comment  ne  pas  reconnaître  que  l'atnour  dei  ancien» 
textes  f  rinçai  Dr  était  la  forme  concrète  par  eiicellence  que  revêtait  dans  son  cteur  éprta 
dldéal  cette  passitiu  ptjur  la  !icience,  pour  la  vérité,  pour  k  patrie  «  dont  il  a  dotinc 
lAtfl  d'âutet  preuves,  et  qui  illumine  de  reAets  d'auréole  touu  u  carrière  «cientili^ue» 
Intcllcctndlc  et  morde  I  Aussi,  Messieurs,  maintenant  que  nous  lepkuton*,dti  milieu 
de  DO»  Ufmei  surgit,  comme  em^né  de  lui,  un  rayon  de  sérénité  et  de  réconfort.  Oui, 
itiifire  *énê(t«  tioui  ferons  violence  i  noire  douleur,  nous  nous  dêb»ittrons  contre  Tan 
goisse  qui  étreintuo»  cccurs,  nous  »ecoueri>n4  U  stupeur  qui  paralyse  nos  c^iprits  pour 
B<7us  appliquer  de  toutes  ntis  forc<^  à  ce  qui  a  été  votre  pensée  U  plus  chère.  Cette 
tftcbe  que  vous  noua  avca  assignée  et  dont  vous  nous  avez  fait  comprendre  par  votre 
eseoiple  toute  la  noblesse,  toute  la  sainteté,  nous  la  continueroins  «toiquemetit*  sait* 
1PUUS,  héla»!  mai»  en  pensant  à  vou«,^  en  nous  inspirant  de  vous,  en  travaillaut  en 
quelque  sorte  pour  ramour  de  vous,  iân  de  disputer  1  la  mort  le  principe  de  vie  que 
vous  aoîfs  avfâ  laissé. 


CHRONiaUE  339 

Discours  de  Af .  Marel-FattOy  professeur  suppléant  au  Collège  de  France^ 
au  nom  des  anciens  élèves  de  Gaston  Paris. 

Les  anciens  élèves  de  Gaston  Paris  doivent  un  dernier  adieu  à  Tincomparablc  maître 
qu*ils  viennent  de  perdre  et  qu*ils  pleurent.  Nous  sommes  encore  si  meurtris  du  coup 
qui  nous  a  frappés  que  nous  ne  pouvons  pas  mesurer  toute  l'étendue  de  cette  perte» 
mais  nous  sentons  du  moins  très  vivement  qu'un  grand  esprit  a  disparu  qui  nous  gui- 
dait et  nous  réconfortait,  qui  maintenait  l'union  et  la  noble  émulation  parmi  nous. 

Il  fut,  en  effet,  dès  ses  débuts  dans  la  carrière  de  l'enseignement,  un  directeur  de  cons- 
cience tout  autant  qu'un  directeur  d'études,  un  juge  singulièrement  habile  à  discerner 
chez  ses  élèves  ce  qui  les  rendait  aptes  à  collaborer  à  l'œuvre  commune,  un  merveilleux 
excitateur  révélant  i  chacun  sa  vocation  et  les  meilleurs  moyens  d'utiliser  ses  efforts  ; 
plus  encore,  il  fut  l'ami  affectueux  et  dévoué  de  ceux  qu'il  sentait  dignes  de  son  estime 
et  de  sa  confiance. 

Gaston  Paris,  qui  concevait  le  monde  entier  de  l'érudition  comme  une  plus  grande 
patrie  et  honorait  sans  se  préoccuper  de  ses  origines  quiconque  mettait  au  service  de  la 
science  des  intentions  pures  et  dc^ntéressces,  était  avant  tout  profondément  attaché  k 
son  pays  et  soucieux  de  sa  grandeur  morale.  Il  aimait  parfois  à  rappeler  qu'il  éuit  de 
pare  race  française  et  que  les  liens  qui  rattachaient  depuis  tant  de  générations  sa 
famille  au  sol  de  la  Champagne  n'avaient  jamais  été  rompus  ;  bien  souvent,  il  mêlait  k 
ses  conversations  intimes  le  nom  de  son  village  d'Avenay  et  les  souvenirs  des  années 
d'enfance  qui  le  lui  rendaient  si  cher. 

Oui,  II  fut  un  vrai  Français  de  France  ;  il  possédait  éminemment  les  qualités  qui  ont 
toujours  distingué  les  meilleurs  de  notre  nation  :  la  vigueur  intellectuelle  alliée  au  sens 
critique  le  plus  fin,  la  pénétration  prompte  et  sûrs,  l'art  si  difficile  d'assembler  des  faits 
et  d'en  extraire  des  idées,  le  don  du  mot  juste  et  expressif,  et,  comme  couronnement, 
la  grâce  souriante,  la  bonté  exquise  qui  prêtaient  un  charme  si  vif  i  son  commerce  et  ' 
lui  ont  valu  tant  de  précieuses,  tant  d'illustres  amitiés. 

Ce  cœur  généreux  a  cessé  de  battre,  ce  beau  foyer  de  lumière  qui  nous  éclairait  et 
nous  réchauffait  s'est  éteint.  Nous  sommes  comme  désemparés  ;  mais  ne  nous  laissons 
point  abattre  :  ce  serait  bien  mal  répondre  à  ce  qu'il  attendait  de  nous.  Son  ime  vaillante 
et  fière  n'approuvait  pas  les  hommes  qui  s'abandonnent.  Nous  l'avons  vu  dans  ses  der- 
nières journées,  le  corps  déjà  ruiné  par  la  maladie  et  soutenant  à  peine  la  pensée  encore 
alerte  et  précise,  lutter  héroïquement  contre  la  souffrance  pour  conserver  k  ses  élèves, 
k  ses  élèves  étrangers  surtout,  accourus  de  si  loin  pour  l'entendre,  le  bénéfice  de  sa 
parole  et  de  ses  conseils. 

Qpe  cet  exemple  nous  soit  toujours  présent  1  Efforçons-nous  de  remplir  strictement 
tous  nos  devoirs  comme  il  le  faisait  lui-même  sans  trêve  ni  repos  ;  accomplissons  notre 
tiche  dans  le  champ  qui  nous  est  assigné,  en  nous  inspirant  de  ses  travaux  et  de  sa 
doctrine.  Ainsi  seulement  nous  réussirons  à  rendre  à  sa  mémoire  le  culte  pieux  qui  lui 
est  dû,  et  nous  aurons  mérité  le  titre,  qui  est  et  restera  notre  orgueil,  celui  d'élève  de 
Gaston  Paris. 

Discours  de  M.  L.  Havety  vtembre  de  VInstitut, 
au  nom  des  anciens  élèves,  non  romanistes,  de  Gaston  Paris. 

Si  on  me  demande  k  quel  titre  je  viens  parler  ici,  je  dirai  que  je  représente  ceux 
qui  ont  en  le  bonheur  d'être  les  élèves  de  Gaston  Paris,  mais  qui  ont  consacré  leur  vie 
à  des  études  autres  que  les  siennes.  Je  pourrais  répondre  aussi  que  si  je  suis  k  cette 
place,  c'est  que  la  douleur  se  soulage  k  exprimer  l'admiration  et  la  tendresse. 

Je  me  rappelle  qu'en  un  moment  où  j'avais  k  Gaston  Paris  une  obligation  particulière, 
je  lui  offris  une  brochure  insignifiante  avec  cet  envoi  d'auteur  :  «  au  maître,  au  patron, 


340 


CHROKIQJUE 


1  t'âmt  et  i  r^ntfJM  cortew.  *  Dius  Cf^tte  salyutioQ  de  Danic  1  celui  qii'il  ippelW  le  bon 
mdUrc.  )>^'f<^rmaLi  l'idée  f  lii,  pir-desiuï  tout  Autre,  unit  ici  nos  trîsUs  pensées*  Cir 
ce  que  nous  pleurxîtti,  ce  n'est  pas  seulement  le  savani  et  le  professeur.  Ge  n'cit  même 
p*s*  tout  d'abord*  Fami  ïncompiir4ble.  si  délicat  à  pétiécrer  d*t)S  ï*âme  d^autrui,  qai 
iav*it  cultiver  et  fîatiiis  cti  cUdcuti  ce  qu'il  vopit  en  lui  de  mcineuT  ;  qui  aidait  les 
peuncft  âvçc  H  homi  d'un  père  et  U  simplicité  d'un  camarade,  et  qui,  dans  £cs  jdurrt 
ter n blés  qa*on  ti  oublie  jamjis,  et  qti»  peu  i  peu  fout  de  notre  mémoire  un  dmctiére, 
irouTtït  les  mois  qjUÎ  bercent  et  dpaiïent.  Tout  cela  ne  vient  qu'au  secoi^d  tmg-  Pour 
TTia  pilrt,  j*Ai  commencé  a  aimer  Gd&ton  Paris  dans  un  temps  où  je  ne  lui  devais  ricti 
encore  ;  oè  je  me  me  ilgutAîs  p^s  que  je  pusse  î^mjis  me  dire  son  ami  ;  oà  fcUis 
d'aiUeui^  inCftp«b]e  de  mesurer  *«  niji'ttrfsc  et  de  pressentir  IVtinn  qu'il  cicfcexait  luf 
Iji  pensée  uvaiîtc  de  ce  pays  et  de  J'oniversK  Mou  Instinct  navice  a  été  d'emblée  h  \<»u 
eoMtne  Tceil  à  h  fumiere.  Ki  îl  me  semble  que  l'oHet  printipiil  de  tiotfe  deuil  n'est  m 
U  blessure  des  cixiirs,  ni  utie  seîence  décApitée  ;  ni  la  Franee,  autioiodrîe  d'nn  âls  pins 
filial  que  tout  autre,  et  ^jui  a  f*it  plus  que  personne  pour  Kieiller  toute  la  ptȐ*ie  des 
ancêtres,  le  son  di:  leur  voix,  leur  sefitimetit  et  leur  pensée.  Tf  y  a  pis  encore  que  ce 
multiple  désastre  :  il  vient  de  dispartttre  une  nature  tinique^  an  équilibre  ciqnis  des 
(acuités  les  plus  hautes,  où  1  on  it  aurait  pu  dire  ce  qui  était  le  plu«  noble,  de  Te^prit 
OU  bie&  du  cœur. 

Soydim  s*cst  érauoui  un  charme  que  les  années  n*jV4knt  pu  vicîlUr»  et  qttî  *eraîi 
dfmeuté  prinunïer  fusi^ue  dans  Thiver  de  Tige.  Déji  }c  ne  $j;îs  plus^  ou  jie  ne  vcui.  pïuiL 
savoir,  combieu  les  cbevcuï  de  mon  cher  malipc  avaient  blanchi:  mais  }e  vobetic^ 
^-crra*  iiïuïoim  ce  icHîiire,  qui  à  soîsjintc  4BS  restait  plein  de  U  eundeur  premfèfe.  F 
cruauté  de  La  mort  semble  avoir  saisi  iHris  dans  sa  Heur,  ciïiiitiie  le  |cunc  fttuftJfé, 
qui,  dit  te  poète  grec,  les  Bâts  mouvants  ont  dfïcé  la  he4utê  de  U  jettocssc 

L>tj»  l'ordre  de  la  science,  Gaasm  P^ns  était  un  ^f  nte^  Pemploîe  eaprèi  ce  fpraad 
mot.  qui  ne  te  dit  ^éne  que  des  poètes,  des  capitaines  et  des  géomètres,  et  ce  ti*S«l  { 
l 'affliction  d'an|onrdliul  qui  me  le  suggère»  Il  y  a  une  vingtaine  d'années*  fe  ive  il 
pelle  avoir  discuté  ivec  un  Autre  tfcs  cher  maitte,  aujottrdlitu  dispAm,  «i  k 
de  j^nie  était  appUcabJe  au%  qualilès  qni  fendent  supérieur  un  critique,  ni  linguiste, 
un  décHiflfrviir.  mu  «MBOientâieuf,  Bt  comme  U  ^noikm  oe  pouvait  le  rteodfc  pr  U 
tbéorie^  nous  v  tépondloiis  mi^  BerE^i^e  et  mol.  eft  l»ioqtt«ut  oomrae  ffeQTe  Teicoxple 
de  Paris. 

Ces!  parce  qu'il  était  un  génie  ftt'tl  â  fécondé  i'VmttA  Itudes  ^oc  les  tiesacv  A  ne» 
binons  ruma  v^  "-^-t^s  venah  apprendfe  ooiaiaeni  ^s  doit  ptiliUcr  Stwfcupc^we ; 
lNkliiritp<ar  i  vieui  français,  s'orientiit  é«9s  la  phosftifie  hy^taUkoe*  Dttts 

U  ^i»i  4''i     „,  .  -,,^,  Itvic  oâ  il  KmHatt  ne  leinncr  qve  4e  U  {MMsaJèiv  fetnçilte, 
i  .  i  et»elfQeaM»t9^  les  piss  prèdena.  ^bc  faie  îsnivs  fcocweiié*,  isr  ftft 

d  .1  mantts«;iiti  litlns.  LnNoèske,  J'itlkafi,  mvttît  «aut  et  «neût  f^  W«K 

en^ij^ner.  Mieux  que  ptTWOmme,  il  seiiiit  qn^  jû  nm  seieaee  et  non  pu  dei  i 
A  Vingt  *dnq  ani,  H  Tut  o«  àg$  §màÊttsun  de  U  Bmm  m%n 
ca  btôc,  toute  TatmotpbèR  de  «ne»»  les  hitâ^  ïà$m6qme%  et  ] 
tisctkMi  de  tpécialiti»«i  4e  Siens* 

Lt  fèoie  t«  «innHiaiaÂt  dba  1»t  ^ar  aa  i%nc  ^  m'ê  miàwtmi  hiffè.  feaiii  }e  wm 
Vtà  vn  tilt  un  Urre  :  le  lime  était  i&i|â  Is,  eomptK J^,  4|fért,  ci  ce  fni  »>  tfpswl 
d'ofili  «Iknemaéi  éétfc  Cl  «HO^  k  fSMde  in  ttahr^.  laittik  »e  M  rii  pc»  ca  lE^^ 
Aém  de  tmnîl  l  r«s«tt  éi^t  Mtt,  Se  »£mite  était  «nat  pfoâigkne  ^m  crniliiff 
iiitras  ^ttl  Q*  loM  foc  éei  ntooiiev  :  U  fi^a  ie  «oa  jngeiaatf  ètsh  nae  dâfisation. 
Lav%ve«r  nt  h  wiMê  éi  II  pcftiée  êuieu  laéei  i  la  4i«BtmT  Jn  c»«r.  Nol  Fc». 
CàÉ>  n*;!  éi*  pl«i  lanîttnâ  po«r  «on  <x  q^  était  riae  dÉ  k  Ftan«c,  |4e»  MMM2CKA  MQ 
mlMina  de  «0»  clMfi^«n*9e  ée  mvis  ks  Igcs.  wé»  des  prtwers  batbttfteaest»  de 
k  pnn^  ■MfiÉiiii  et  aittil  ém  ctanaai  ^  %iwmt  tmm^mr  d»  lèvsa  fen^iakci  & 
•aaMÉ|^90wttttt.luMiiikffc0nais4  ks  psimn  m  OMkttAeat.  DtM  fr^^lgtif 
m^m  fà^  Moi  dnanal^  «t  fer  U  (Mik  et  p^r  k  ptvtqmt.  k  «ni  eveit  MS  iii)tk 
nifeet,  cOh  4n  «mdr  et  6eiy  Je  k  aacak.  Lial-oïkiwn  cîfii4«é  À  fMé  k  ^^ 


CHRONtaUE 


Î4> 


itlervir  :  •  ha  hommes  sont  ilivîséf,  nous  illMii-il  dans  un  banquet,  pïi  ïes  véritéf 
ont  liste  croient  possesseurs,  msh  h  recherche  de  lu  \érhé  les  uitir.  *  U  siviit  ksulî- 
laritl  nécessiire  du  meosoug^^  ^tvec  l'outrage  et  rinjustke.  On  pouvait  deviner  k  l'cn- 
tendfe  d^ins  s»  chmre^  rhamme  pour  ^m  tout  !vpect;ide  d'induite  et  de  frautle  serait 
«fie  wîtîfÎTtncç  mgnê  et  personnelle*  lî  a  été  au  Collège  de  Fraoce.i  rÉcoîe  de*  hautes 
études,  pendant  hiéii  des  annéu^^  le  mcme  idéili$ic  qu'il  était  îl  y  a  huit  ^ours,  1*4  mari, 
veille  de  ^  mort,  dtas  une  ïe^ou  enfantine,  oil  ce  tendre  pi'rç  enseignait  k  i*amu*er 
de  Don  Quichotte»  mab  à  ne  pas  te  moquer  de  lui. 

U  pitï»  beau  des  enjcignemenis,  c^est  de  hisser  de  ^i  un  souvenir  qii  coilte  des 
l^mmcs.  et  qui  pourtiiitt  réconforte.  Ceft  plein  d'un  tel  souvenir  que  |c  àh  adieu  â 
Uion  maiirc  bien -aune, 

M.  George  Doncieuk  est  mon  le  21  mars,  diiiis  sâ  quarante-septième  innée, 
A  h  îtiiie  d'îintr  longue  mahdle  qui,  depuis  plus  d'un  an,  Itit  ïmerdisait  ton? 
travail  C*ëîâit  lïn  hommu  très  cultivé  çt  doué  d'un  esprit  tris  fin*  Il  s'était 
partkulièrement  appliqué  à  l'élude  Je  la  poCsie  popuîiiire  et  y  apporta ît  une 
critique  minutieuse  dotii  témoigne  son  mémoire  sur  Ld  Fernfiif,  arigim,  his^ 
idrf  il  rtîiitnttôn  cHliqut  J  une  ifmttson  popidatrt  fumant^  publié  dans  le  t.  XX 
de  k  Romania,  Il  s'occupait,  depuis  ptusicurs  années,  d'un  ouvrage  considé- 
rable sur  b  légende  de  Matie-M^dvleinc  qu'il  n'a  pu  achever.  C'est  à  cet 
ordre  de  recherches  que  se  rattache  la  publication  {Rmmrm^  XXII,  t66)d'un 
fragtnent  en  vers  du  miracle  opéré  en  fa%'eiir  d'un  seigneur  de  Marseille, 
par  rimercession  de  la  Madelcme*  il  avait  aus^i  commencé  Timpression  d\in 
Hùmançerù  f^f/fulaiti  dt  la  Franct,  qu'il  laisse  interrompu  et  qu'on  espère 
pouvoir  achever* 

—  Le  congrès  historique  de  Rome^  que  nous  avons  annoncé  précédemment 
(XXXJ,  641)  s'est  tenu  en  eflet  dans  cette  ville,  au  Collège  Romain,  du  2  au 
9  avril,  sous  la  présidence  de  M,  le  sénateur  P.  Vîlbri,  Il  avait  été  divisé  en 
huit  sections,  dont  Tune,  la  troisième,  était  réservée  à  Thistoire  littéraire. 
Nous  relevons  dans  le  programme  paniculier  de  cette  section  les  conimuni- 
cations  suivantes  :  Piaget,  It  ifmps  rtmuvrt\  poème  de  Pierre  O^ashkin^  amt- 
pûs/d  RûtMtf  in  r4)0;  W*  Fôrster,  L'auteritkihi  Jet  iotiid  iPAr barra  '  ;  d'Ancona 
et  Fumagalli,  Sa!  dt^iionanû  Uo-bihUo^reipco  ilaUam  ;  F,  Flamljii,  Di  akune 
imsitrxûU  innia^ioni  Haliane  in  poctî  slrmteri  dd  Cinquectnîo;  P*  Mcyer, 
Etpdmion  de  la  latigue  ffauçùiît  m  liait f^  pfndanî  h  moyen  dgt  \  Luiso,  Di  un 
(ommeniô  ttsedito  alla  D.  C.^Jmiie  deî  pin  anikhi  commentahfL  Le  nombre  des 
congressites  venus  de  Pétrangcr,  en  particulier  de  France  et  d* Allemagne,  était 
conMdérable.  Les  séances  ont  été  très  suivies.  Le  comité  directeur  du  Con- 
grès, de  concert  avec  le  gouvernement  Italien  et  avec  la  municipalité  de 
Rmne,  avait  organisé  d'intéressantes  excursions  et  des  expositions  variées, 
particulière  ment  à  la  Bibliothèque  Victor- Emmanuel  et  à  la  Casanatense.  Le 
congrès  a  parfaitemetu  réussi  à  tous  égards,  et  ceux  qui  y  ont  pris  pan  en 
ont  rapporté  un  agréable  souvenir* 


1,  L'auteur  a  montré  que  dans  la  niasse  de  ces  documents  fabriqués  — 
sur  lesquels  voir  Rmiania^  L  ^64,  ^95;  V,  S06  —  il  en  est  quelques*uns, 
d'une  époque  tardive,  qui  sont  authentiques.  Mais  on  le  savait* 


542  CHRONiaUE 

—  M*  Eugène  Rolknd  vient  de  ptiblkr  le  î.  iV  de  sa  Fhrf  pQpMktri^ 
histoire  mtttreiîc  dtiplinîtî  dans  Uun  rapports  atrc  h  Uti^uîsijtjut'  d  k  joîkUwt 
((îbr.  Statide»  Parb,  a»  rue  des  Chantiers).  Ce  vola  me  contiem  b  6q  des 
Hespèndées,  les  Cïmclliées»  Ruiacécs,  Kliiimniifs,  jugbiidcei»  Térèbîa- 
thacées,  Légumineuses,  Mimosèes,  Zygof>byllèes.  Od  sait  que  dans  cet 
ouvrage,  donc  It;  t.  I  a  paru  en  ÎH96,  M.  Eug.  Rolland  a  relevé  oia  grand 
iiouibrc  de  diciotîs,  de  formules  diverses,  de  croyances  superstitieuse  s,  doni 
beaucoup  remontent  au  moyen  âge. 

—  Non  s  avons  re^ju  le  prospectus  d'une  revue  américaine  qui  sera  consa- 
sacréc  à  des  recherches  sur  les  langues  et  littératures  modernes  :  M^dtrn 
pbihlogy,  A  quarkriy  Jountal  devoifd  to  rtsearch  In  modem  Lanf^uag۔  and 
UkrtiUirts,  Chicago,  The  Unîversiiy  of  Chicago  Press  ;  Lcipsig,  Harrasso- 
wiu;  Loiidon,  Luzac  and  C^.  La  partie  romane  sera  sous  b  direction  de 
M.  Th.  Atkinson  jenkins.  Le  premier  numéro  est  annoncé  pour  le  i*^  juin 
190Î. 


Livres  annoncés  sonmiâï rement  : 

Kristian  von  Trovfô  Yvain  (âer  Làiitnriiter}.  TeKiatistgabe  mit  HnJeitung^ 
Anmcrkungen  iind  vollstândigçm  Glossar  herausgegeben  von  W.  Foers- 
TER.  Zwdte  undgearbeitete  und  vermehrte  Autlage.  HaJk,  Niemeyer,  1901, 
In-ia,  IXVM49  p.  —  Nous  nous  bornons  présentement  i  annoncer  cette 
nouvelle  édition  du  petit  Yt'ùin  ;  le  titre  dit  en  partie  ce  que  te  savant 
éditeur  y  a  ajouté  de  nouveau,  c^esi-â-dire  d'imponantes  nemarquci  sur  le 
texte  cl  un  glossaire  complet  (pour  lequel  il  a  été  aidé  par  plusieurs  de  ses 
élèves)»  qui  sera  certainement  le  bienvenu.  Mais  ce  que  le  titre  ne  dit  pais,  ^ 
c'est  rimportancede  1  introduction, où,  sans  parler  de  remarques  précieuses 
sur  la  constitution  du  texte,  M.  Foctster  émet  sur  les  sources  de  Chrétien 
et  le  sens  de  son  poème,  des  opinions  en  partie  nauvellcs  et  indique  de 
curieuii  rapprochements.  Cette  introduction  appelle  un  exanieii  que  nous 
ne  pouvons  entreprendre  ici  ci  p*>ur  laqueUc  la  publication  très  prochaine 
du  livre  de  M.  5r>^wn  (voy.  Rom.,  XXX,  622)  nous  fournira  une  occasicm 
naturelle.  —  G.  F, 

Manfredi  PoîtiKA*   Délit  manijrstii^imi  plastiiht  âd  smtinunl»  mi  ptrsQtu^gi  I 
ddia  Ditnna  C&mrmdia.  Milan Op  Koepli,   190a.   In-ii,  xij-190  p.  --^  Ce 
petit  livre  se  lit  avec  grand  plaisir.  L*âutcur  y  approfondit  vraiment,  en 
Tétudiani  sous  un  aspect  nouveau,  notre  connaissance  dé  Tan  merv^dUcui 
de  Dante  ;  il  Ml  \*mï  combien^  datis  cet  art,  tout  est  travaillé  jusque  dans 
les  dessous  01:1  on  ne  pénètre  que  par  la  plus  attentive  réflexion*  Il  s  agit,  le 
titre  ledit,  du  rapport  des  gestes  et  de  l'attitude  des  personnages  tnben 
Kèoe  avec  leur  caractère  et  leurs  sentiments,  Li  fine  et  judicieuse  éîiide  de 
H,  I^orcna  méritait  le  prix  qu'elle  a  obtenu  dans  la  gara  DmnUica  de  1900  J 
cot^  tes  prmicsseurs  de  renseignement  secondaire.  Ur.  appendice  est  cou*  { 
XÊCrt  à  Matetda,  dans  laquelle  laiiteur  voit  une  ailèggrie,  non  cooscne  on] 


CHRONIQ.UE  34  î 

le  fait  d'orti maire,  de  îj  vie  active,  mais  de  h  Qlïdtù  terrestre ^  et  il  aliégue 
de  bonnes  raisons  en  faveur  de  sa  ihèse.  Un  second  appendice  donne  la 
descTipnioîi  des  caractères  physiques  des  personnages  dans  les  Prûwmsi 
Spos*.  —  G,  P. 
Simple  conjêctun  sur  ks  origm's  patirneUes  de  François  Viîhn^  par  l*abbé 
Rkure.  Paris,  Channpionj  1902.  In-8»  16  p-  —  L'auteur  remarque  qu'il 
existe  près  du  chAteau  de  Montcorbier,  une  ferme  appelée  In  Loges,  et  îl 
suppose  que  le  père  de  François  de  Montcorbier  (plus  tard  Villon),  qui  est 
aussi  appelé  François  des  Loges,  pouvait  tenir  ce  s^icond  nom  de  cette 
ferme;  il  croit  en  outre  possible  qu'il  descendît  d'un  bâtard  de  la  maistin 
de  Montcorbier,  M.  Ueure  ne  donne  ec  rapprochement  que  comme  une 
u  simple  conjecture  »»;  comme  telle  elle  n'a  nen  d'invraisemblable,  sur- 
tout dans  la  première  partie.  —  G,  P. 
•  Dtf  SkUung  tkj  rthikfrùnomtni  ^u  setntm  Bt^kîmngsuforle  in  dm  âlkikn 
fran^mhchm  Sprachdffthmlîtrn.,.(yQîi)  Karl  Gustave  Ullj^akn.  Greîfswald, 
Kunike.  1901.  In-S,  42  p.  (diss.  de  docteur).  —  Le  titre  de  celte  disser- 
tation dit  asseï  de  quoi  elle  traite;  Il  serait  difficile  de  Tanalyser.  —  G,  P. 
î^i  plm  aticiens  monumi'nti  tie  la  latigm  française,  publiés  pour  îes  cours  uni- 
versitâires,  parEdwird  KoscHWirii.  L  TtMes,  diphtfmtiqnes^ûyà^miiiàhmn, 
revue  et  augmentée  avec  deux  fac-similés.  IL  Textes  criiiquis  et  Ghssatn^ 
Lcipjtig,  Reistand»  1902.  Pet,  10-8,  52  et  viii-92  p.  —  A  la  sixième  édi- 
tion de  son  petit  livre  si  commode,  M.  Koschwitz  donne  pour  complément 
im  second  fascicule  qui  cotitienf  des  textes  critiques  et  un  glossaire.  Il  a 
eu  ridée,  dont  j'avoue  que  je  ne  saisis  pas  bien  rutilité,  de  reproduire  la 
restitution  de  Saini*Uger  qtie  ['ai  donnée  îl  y  a  trente  ans,  et  celle  de  la 
Pmsimt^  que  M.  Lùcking  a  tentée  il  y  a  vingt-cinq  ans  :  des  essais  de  resti- 
tutions nouvelles  eussent  été  plus  intéressants.  M,  K.  en  donne  pour  les 
Sertmnti,  pour  Eidaltt  et  pour  le  fragment  de  Valencicnnes  (pourle  S/wnjuj 
ïi  adopte  celle  de  M.  Cloetta  amendée  par  M.  Morf).  lî  y  aurait  beaucoup  à 
discuter  surtout  sur  les  deux  premiers  testes  :  changer  To  de  pohh^  ttosiro^ 
ctc  ,  Va  de  Siihhtmrni,  cadhima,  contra,  etc.,  en  e,  est  très  contesuble;  lef 
de  sagrament  doit  être  gardé  ■  sandre  (ou  stinâro)  serait  préférable  à  sendrt  ; 
dansHwl.  heikisour^  appuyé  au  glossaire  sur  rètymologie  'bell  iatiorem, 
n'a  aucune  raison  d'être;  menace  pour  manaîa-,  verginiiet  pour  vtrgrnitet  ne 
se  justifient  pas,  non  plus  que  les  graphies  h  pour  i  et/  simple  pour  //;  etj 
figure  cdomh^  A\tc  la  suppression  de  if^,  est  contraire  à  la  grammaire  (Ef 
pour  r  au  V,  ti  est  une  faute  d'impression).  Le  travail  le  plus  méritoire  est  la 
r.'stitution  du  Joms  ;  il  appelle  un  examen  attentif.  Pour  le  glossaire,  M.  K, 
reconnaît  les  obligations  quil  a  â  celui  de  M,  Stengeî  ;  il  Ta  revu  avec  soin 
et  amélioré;  je  ne  Tai  pas  lu  avec  assez  d'atteniion  pour  voir  si  Ton  peut 
y  relever  des  erreurs  d'interprétation  (Bi'ffage  dans  la  Passion  n*est  pas 
Béthanie).'^G.  P. 
A  ,  SalvI'Irîïa  de  GitAVE.  De  f rame  i  tu  /jf/ AWi^H^jWj,  1902.  In-8,  29  p. 
(extrait  de  la  Tijdich.  v.  Ni'd.  Taal-  en  LeiUrkunde^  t.  XXI),  —  Datis  ce 


344  CHRONÏdUE 

noyveau  chapitre  des  CcnîribuiuHîs  à  !a  cmnmis&ttct  dn  mets  f rameau 
empruntés  au  nêérkndms,  M.  de  Grave  étudie  ce  qu'est  devenu  Vi  des  mots 
françats.  Cette  étude  intéresse  surtout  Thistoire  phonétique  du  néerlandais, 
It  des  mots  (lAn^ih  en  lui-mémc  n'offraot  rii^n  de  notable.  On  rdè* 
vcra  cependant  quelques  «marques  qui  intéressent  le  français  et  même 
kromao,  comme  celles  (p,  20)  qui  concernent  sicerâ  et  k  rcprésentatît 
néerlandais,  assez  singulier,  de  ce  mot,  cdsfr,  —  G.  P. 

a  Canciontm  ClaïS^nst  26}.  Nota  dî  Antonio  Hestorj.  Roms,  1902,  ln*S, 
40  p*  (extrait  des  Rattimnli  ddh  P,  Accûdettm  dd  Umd,  vol*  XI.  fasc.  |), 
—  Liste  compkîe  des  pièces  contetiues  dans  cet  intéressant  recueil, 
compilé  en  t>S9  à  Madrid^  pjr  le  Pisan  a  Alon^o  de  Nabarcic  v,  appr* 
tenanç  â  une  fimilk  Navaretti  dont  d'autres  membres  ont  possédé  des 
manuscrits  espagnole  qui  se  trouvent  aussi  à  Ravenne.  —  G.  P. 

E*  fiouitccEZ.  Ln  mots  espagnvh  t-omparés  aux  mets  gascatn  {époqtn  andmnt), 
paris,  Pontçmoing,  1901.  In-8,  2}  p.  (extrait  du  Bulktin  hisptimqîie^  t,  (Jl), 
-—  Cette  t'tudc,  ou  plutôt  cette  esquisse,  du  savant  professeurs  TUniver- 
site  de  Bordeauit,  esc  tout  à  îmi  neuve  et  intéressante.  M.  Bourdei  cberchc 
à  montrer  quVntre  l'Espagne  et  la  Gasco{;ne  il  y  a  un  certain  fonds  com- 
mun de  mots  et  déceptions  qui  indiquent  une  ancienne  communauté 
entre  les  peuples  d'origine  ibérique  au  sud  et  au  nord  des  Pyrénées.  Il  y 
réussit  certainement  en  partie,  bien  qu'on  puisse  se  demander  s'il  n'y  ap^ 
une  bonne  pan  de  hasard  dans  tes  rapprochements  qu'il  fait,  et  si  on  n'en 
obtiendrait  pas  de  presque  aussi  nombreux  et  frappants  en  étudiant  cora- 
ptrativemem  le  lexique  de  deuK  régions  quelconques  de  {ARomaniû  f  n'i-t-on 
pas  signalé  des  ressemblances  entre  le  roumain  et  le  sarde  et  même  le  por* 
tugai^?}  Jeme  bornerai  â  faire  remarquer  que  plus  d'un  mot  h ispano- gascon 
dont  M.  B.  admet  T existence  dans  tout  le  midi  de  la  France  a  aussi  estUté 
dans  le  nord  et  n'est  tombé  en  désuétude  qu'à  une  époque  plus  ou  nioîna 
récente  :  tels  son t  napus,  narix,  mulgere,  calcaneum,  rlion- 
chare,  passa  rem  (existe  encore  dans  le  fr.  pasit,  pa%S€tmu)^  etc.  La 
t  coïncidence  qui  est  peut-être  à  certains  égards  la  plus  curieuse  de  toutes 
(p,  30)  Dp  celle  du  nom  du  chèvre  feuille,  en  esp.  et  pon.  m&drtstik'ê  ou 
maâresilva^  en  béarn.  îfithtmay\  cesse  d'être  frappante  si  l'on  remarque  que 
non  seulement  tmirtstuvo  ou  formes  analogues  se  retrouvent  en  languicilci* 
cien  et  jusqu'au  dehl  du  Rhô  ne  ^  sàiwmaiu  en  languedocien,  mais  que 
rit*  a  également  maârtalva^  qu'on  lit  :  »  peridmtrpôtt,  id  est  matrmthm  vel 
mprifoiium  »,  dans  les  gloses  de  Tours  du  xir«  s.  (Foerstcr,  AUfrm^,^ 
VtbuHgshuch^  coL  2 14)»  et  que  muirisyïva  et  formes  semblables  se  trouvent 
(voy.  Diefenbach)  dans  divers  glossaires  btins-aîkmatîds,  glosant  saprifo- 
Hum  ou  gaîUtrklnum  (rorîgine  du  nom  s'explique  sans  doute  si  on  cotn- 
pre  rit.  ûbbracàalmc^  ou  Mnjccmhoschi),  —  L'essai  de  M.  B.  n'en  est  pa* 
moins  fort  remarquable;  l'auteur  lui-même  n'exagère  pas  la  valeur  démon- 
strative de  ses  ingétiieuîc  rapprochements,  il  y  fait  prt-uve  en  générai  d'une 


critique  circonspecte 


et  d'un  savoir  sûr.  —  G,  P. 


CHRONiaUE  345 

Di  un  récente  lavoro  sui  dialetli  di  Lugatio  e  di  Mendrisio^  par  C.  Salvioni. 
Lugano.    In-4,    8    p.   (Extrait   du    Bollettiuo   storico   délia  Svi:;p;(ra    it,y 
vol.  XXXIII,  pp.  141-149).  —  M.  Salvioni  montre  que  la  dissertation  de 
K.  Brôsel,   Die  hetonten  Vohale  der  SpracJje  in  Kanton  Tvssin  sîuUich  von 
Mante-Cenere  (MandrisiO'Lugano)^  outre  qu'elle  a  une  base    insuffisante, 
fourmille  d'erreurs  de  tout  genre  (l'auteur  a  notamment  confondu  très 
souvent,  dans  les  mots  qu'il  a  recueillis  lui-même,  les  explosives  sourdes  et 
les  sonores),  et  conclut  que  c'est  une  de  ces  publications  clx  délia  scieuia 
hanno  solo  Tapparen^a  t  la  pretesa.  On  trouvera  dans  cette  critique  plusieurs 
observations  d'un  intérêt  plus  général  et  un  petit  complément  â  la  Bihlio- 
grafia  dei  dialetti  ticitu^i,  —  G.  P. 
Carlo  Salvioni.  Nomi  locali  lombardi.  Milano,  1902.  In-8,  18  p.  (Extrait  de 
YArchivio  slorico  lomhardo,  t.  XXIX).  —  Importante  étude  sur  les  noms 
de  iWi^fto(metula  -|-  -ato)  et  Vigevano  (Vicus  Gebuin).  Telle  est  la 
solution  que  donne  l'auteur  de  deux  problèmes   qui  ont  beaucoup  occupé 
les  savants;  il  la  justifie  par  une  discussion  serrée  où  il  touche  plusieurs 
questions  intéressantes  pour  la  philologie  romane.  —  G.  P. 
Carlo  Salvioni.  DelT  antico  dialello  pavese.  Pavia,  1902.  In -8,  64  p.  (Extrait 
du  Bolletino  délia  Società  Pavese  di  Storia  patria^  1902,  fasc.  MI).  —  Cette 
étude  est  fondée  sur  trois  manuscrits,  de  caractère  pieux,  du  xiv«  et  du 
xve  siècle.   M.  Salvioni  donne  d'après  eux,  comme  caractérisant  l'ancien 
dialecte  de  Pavie  en  regard  du  lombard,  les  quatre  traits  suivants  :  chute 
du  ^  entre  voyelles  ;  d  r  >  r  ;  /  remplaçant  d  tombé,  primaire  ou  secon- 
daire; -oma  ou  -omo  à  la  i^  pers.  plur.  de  l'ind.  présent  et  futur.  L'étude 
grammaticale  est  suivie  d'un  précieux  lexique.  —  G.  P. 
Mélanges  Léonce  Couture.    Études  d'histoire   méridionale  dédiées   à    la 
mémoire  de  Léonce  Couture  (18} 2- 1902).  Toulouse,  Privât,  1902.  Pet. 
în-4,  XLiv-360  p.  —    Ce  beau  volume  avait  été  préparé   pour  fêter  les 
soixante-dix  ans  de  M.  L.  Couture,  homme  d'un  rare  mérite,  professeur 
à  rinstitut  catholique  de  Toulouse,  dont  les  études  ont  porté  sur  tous  les 
aspects  de  l'histoire  du  Midi   et  particulièrement  de  la  Gascogne,   mais 
qui,  médiocrement  philologue  (voy.  /?o/w.,  IX,   339   et  non  VIII,  432, 
comme  porte  la  notice  de  Mgr  Batiffol),  était  surtout  un  excellent  cri- 
tique en  matière  littéraire  (voy.  Rom.y  ih.y  p.   338),  historique,  philoso- 
phique et  théologique.  Le  destinataire  est  mon  avant  l'achèvement  du  recueil, 
et  c'est  ÙL  sa  mémoire  que  Pont  offert  ses  anciens  disciples,  et  ceux  qui,  de 
près  ou  de  loin,  l'aimaient  et  l'estimaient.  Ils  sont  extrêmement  nombreux, 
mais  vingt-trois  seulement  ont  fourni  des  contributions  écrites  (sans  parler 
de  la  Bibliographie  des  écrits  de  Couture  et  de  la  notice  de  Mgr  Batiffol, 
remarquable  i  tous  les  points  de  vue,  qui  ouvre  le  volume).  De  ces  con- 
tributions, la  plupart  sortent  de  notre  cadre  ;  nous  nous  bornons  à  signaler 
celles  qui  y  rentrent.    —  P.  115-126,  A.  Jeanroy,  Un  sirventés  historique 
de  1242  (montre  que  le  sirimtés  de  P.  de  Vilar,  qu'on  attribuait  jusqu'ici 
à  1226,  se  rapporte    sûrement  à  la  guerre  faite  en  1242  par  Henri  III 


Î46  cHRONiaui-: 

à  Louis  IX,  où  k  roi  d* Angleterre  fat  aidé  p,ir  les  barons  miTidionaux  j 
eï  les  rois  espagnols;  M.  J*  donne  de  cette  piùce  intèressame  un  lextc 
amélioré  et  une  traiiuaion  soigneuse).  ~  P.  127-1  $6,  H.  Gocrteault, 
Uni  chronique  béiînmht  im'Jité  du  XI F""  lUck.  —  P.  193-212,  DUCAMIK, 
EktiX  textes  gascons  origittairtj  de  Montesquieu- Fvhvsfre  (documents  du  xv« 
et  du  xvi«  s,,  avec  tradction  en  parler  moderne,  ^  P*  a 57^26^»  A,  Tbo-j 
MAS,  Éfym^cgkA  gascûrm^s  (l'auteur,  avec  sa  pénétration  et  sa  critiqu 
ordinaires^  ramène  quatorze  mots  béarnais  et  gascons,  peu  faciles  h  iden^ 
tifier^  aux  mots  latins  butyrum,  «:onsi(ierium,  cubium,  dogaj 
crvilia»  cxiniius,  gencsta,  lapsus,  liianîas,  merendâ,  papy- 
rus^ vîtîcula,  et  présente  chemin  faisant  plusieurs  observations  dignes. 
d*être  notées,  entre  autres  celle  qui  regarde  Temploî,  non  moins  fH 
quent  en  gascon  qu*cn  espagnol,  du  suffixe*  a  ri  s  «  combiné  avec  un  noîîi' 
de  végétal  pour  désigner  un  lieu  où  abonde  ce  %^êgétal  »),  —  P,  $49-557. 
G.  Paris>  Natmm  em  Ayinerk  (montre  que  la  forme  Naifuen^  fréquente 
dans  les  textes  français  du  nord  pour  le  nom  ti*Aîmeri  de  Narbonne^ 
indique  bien  une  origine  méridionale  pour  les  prénoms  où  die  figure, 
sans  *i*ail leurs  rien  prouver  par  leur  date  ;  p.  ^^4,  K  dem.»  lire  Andr^iS  da 
Bari>enna  pour  Francesc4),  —  G.  P. 
Reîiquie  probahiîi  q  possibili  degH  aniichi  dialeiii  iialici  ne\  modem  i  âmUiti 
UaHani  e  mgf  Uhmi  r^wMM^i  m  gemre.  Memoria  Ictta  alla  R*  Accadernia 
.«  di  Napoli  da  Francesco  d'OvtDio.  Napoli,  1902.  In-8,  il  p*  (Entrait 
des  AUidfïï  Açfûdtmia,  vol.  :txiv^)-  —  Ce  mémoire  remonte  à  vingt  ans; 
il  est  le  prologue  d'une  série  d'études  qu'avait  faites  Tau  leur  en  1S82  et 
qu'il  se  propose  eniin,  ce  dont  nous  lui  serons  bien  reconnaissiints,  de 
mettre  au  jour.  Il  ne  pose  ici  que  les  données  générales  de  la  question; 
n  k  fait  avec  une  admirable  clarté  et  une  parfaite  drcofispeciion.  On 
trouve  b  un  exposé  sommaire,  maïs  vraiment  magistral,  des  résuflâU 
acquis  et  des  principes  dirigeants  de  la  philologie  romane.  Je  suis  pour 
ma  pan  porté  a  être  peut-être  encore  plus  réservé  que  Tauteur  sur  les 
sunivances  prélatines  dans  le  roman.  Le  nippon  du  toscan  avec  les  dia* 
lecces  îuliens  ne  saurait  être  comparé  Â  celui  du  litîn  avec  )*étrysque, 
nbérique,  le  gaiibis  ou  même  Tosque,  non  seulement  pour  les  rmisons 
que  donne  cxLcikmmeni  rauicur»  mais  parce  que  le  toscan  cl  les  dialecte 
Italiens  sont  apparentés  de  bien  plus  près  que  le  latin»  et  ces  lattgaes  ont 
un  fonds  lexical  et  grammatical  commun,  etc.  Il  me  semble  qu'on  â  uii 
pendant  bien  voisin  du  rapport  du  latin  av^ec  ks  langues  indigènes  dans 
celui  de  Tespagnol  et  du  ponugais  ivec  les  idiomes  américains  :  aii 
Mexique,  par  exemple,  comme  en  Gaule,  k  population  est  en  immense 
majorité  indigène  et  a  complètement  adopté  Tespagnol  ;  les  langues  primi- 
tives ont-elles  intluencé  le  castillan  autrement  qu'en  lui  fotimîssant  un 
ceruîn  nombre  de  mots?  —  Quoi  qu*il  en  soit,  on  ne  peut  qu*attcndre 
aiHcc  impatience  les  mémoires  subséquents  où  le  savant  professeur  de  Na  pies 
cntiera  dans  lexamen  des  faits  particuliers,  ^  G.  P. 


CHRONiaUE  347 

Étude  sur  Vemploi  des  pronoms  personnels  sujets  en  ancien  Jrançais,  par  Hilma 
BoREUUS.  Lund,  1902.  ln-8,  16  p.  (Emrait  dt  Frân  Fiîoîogiska  Foreningen  i 
Lundj  II).  —  L'auteur  de  cette  étude  constate  que  Thistoire  de  l'emploi 
des  pronoms  personnels  sujets  en  ancien  français  est  encore  fort  mal  élu- 
cidée ;  elle  pense  avoir  trouvé,  pour  les  propositions  subordonnées,  une 
règle  qui  consiste  en  ceci  que  le  pronom  personnel  est  omis  quand  entre 
le  mot  qui  introduit  cette  proposition  et  le  verbe  est  intercalé  tout  autre 
complément  qu'un  pronom  personnel  atone,  tout  autre  adverbe  que  fw,  y, 
ne  ;  dans  le  cas  contraire  il  est  exprimé.  Les  textes  qu'elle  étudie  montrent 
en  eîfetune  proportion  considérable  (de  65  à  75  %)  d'applications  de  cette 
régie,  mais  il  y  a  bien  des  exceptions.  La  dissertation  est  toutefois  inté- 
ressante et  montre  une  bonne  méthode  et  un  esprit  investigateur.  — G.  P. 
Den  ridderiga  Kàrleken  i  Medeltidens  litteratur,  af  Johan  Vising.  In-8,  1901, 
21  p.  (Extrait  de  la  Nordisk  Tidskrijt).  —  M.  J.  Vising  retrace  à  grands 
traits,  avec  son  élégance  accoutumée,  dans  cet  article  destiné  au  grand 
public,  l'histoire  de  la  conception  médiévale  de  l'amour  «  courtois  », 
depuis  son  origine  en  Provence  jusqu'à  sa  diffusion  dans  toute  l'Europe. 
On  y  trouvera  plus  d'une  fine  observation  et  la  traduction  en  vers  de 
pièces  provençales,  françaises,  italiennes  et  allemandes.  —  G.  P. 
^Vords  and  their  ways  in  engUsh  speech^  by  James  Bradstreet  Greenough  and 
Georges Lyman  KirrREDCE.  London  and  New  York,  Macmillan,  1902. 
Pet.  in-8,  xii-4}i  p.  —  Ce  livre  cliarmant,  écrit  pour  le  grand  public, 
mais  reposant  sur  des  recherches  de  première  main  et  rempli  d'idées 
intéressantes  pour  tous  les  linguistes,  contient  bien  des  pages,  notam- 
ment sur  le  rapport  du  français  et  de  l'anglais,  que  les  romanistes  liront 
avec  profit.  Un  index  très  complet  permet  de  retrouver  facilement  les  mots 
dont  les  auteurs  ont  parlé.  —  G.  P. 
^<r.  Nyrop.  Manuel  pJjone'tique  du  français  parle.  Deuxième  édition,  traduite 
et  remaniée  par  Emmanuel  Philipot.  Paris,  Picard,  1902.  ln-8,  viii- 
184  p.).  —  Nous  ne  parlons  pas,  en  règle  générale,  des  ouvrages  qui  ne  con- 
cernent que  le  français  moderne;  mais  le  livre  de  M.  Nyrop  se  distingue  de 
ceux  du  même  genre  en  ce  que  l'auteur  joint  à  une  pratique  excellente  du 
français  parlé  une  connaissance  de  l'histoire  du  français  qu'atteste  sa 
Grammaire  historique.  La  première  édition,  en  danois,  étak  inaccessible  à 
beaucoup  de  ceux  qu'elle  aurait  le  plus  intéressés  :  M.  Philipot  a  rendu  un 
vrai  service  en  la  traduisant,  mais,  pour  emprunter  les  paroles  de  l'auteur 
lui-même,  «  il  ne  s'est  pas  contenté  d'une  simple  traduction,  môme  avec 
toutes  les  améliorations  et  additions  que  nous  lui  avons  fournies  :  partout 
où  nos  descriptions  lui  ont  paru  un  peu  sommaires,  il  les  a  élargies  et 
remaniées,  et  il  a  introduit  çA  et  là  dans  le  texte  des  obseï  valions  dues  à 
ses  études  personnelles  ».  —  G.  P. 
Beitràge  :^«r  romaniscben  und  cw^Uschni  Philùloirie  dem  X.deutsclun  Neuphilo- 
logentage  ùberreicht  von  dcni  Vcrein  akademisch  gebildeter  Lehrer  der 
neueren   Sprachen   in  Breslau.   Breslau,    Preuss  u.   Gûnger,   1902.  In-8, 


Î48  CHRONiaUE 

tjuairc  2t2  p,  —  Ce  volume  contient  cinq  mémoires  ^oni  trois  întêreiscnt 
h  Romama.  Le  premier  est  une  édîtign  améliorée  de  la  Dû^^a  gmeral  {de 
la  Mmrtt),  pîir  M,  C.  Appt;!,  accompagnée  de  notes  el  précédée  d'înti*- 
ressantus  remarques  sur  le  rapport  des  trois  plus  anciennes  versions  (,fran- 
çaise,  néerlandaise,  c^isii liane)  de  la  Danu  ât  la  Mori  entre  cJles  et  ivcc 
leur  original  satis  doute  frani^ais.  Le  deuxième  c^t  réinde  de  M,  Pilîet  suf 
la  pastourelle,  dont  nous  avons  rendu  compte  (XXX 1^  620)*  Le  troisième, 
dû  à  M.  Rcichel,  est  consacré  à  la  classification  des  manuscrits  de  Firra^ 
bras  ;  il  sera  l'objet  d'un  compte  rendu  spécial.  —  G,  F. 

Ckjniom^  jrux  partis  cl  refrains  inèdin  au  XI U^  sîkk^  publiés  et  annotés  par 
A.  Jeanroy.  Paris,  Picard,  1901,  in-B,  68  p.  —  Nous  avons  ici  le  tirage 
à  part  de  trois  publications  qui  ont  paru  dans  la  Rnm€  dis  hnguts  rùmanês 
en  1896,  1897  CI  1902,  et  dont  nous  avons  parlé  en  leur  temps;  mais  les 
trois  dernières  pages  contiennent  des  corrections  au  texte,  dont  une  partie 
est  due  i  la  critique  ou  ;!  des  communications  privées^ 

AaclMin  in  Philippe  Momkiîi  Reimckronik,  von  Edouard  Teichmann.  Aachcn, 
Cremer^  1902.  Jn-S,  loop,  {Fesischriji  àft  Gemralvenammhtng  des  Geiammi- 
vfrtim  lier  deufscJ>ett  Geuhichti-  und  AHertbitmsvereim  \n  DnsieldorJ  ttw 
22  bh  aj  Septemher  1^02).  —  M.  Teichmann,  le  profond  connaisseur 
de  tout  ce  qui  concerne  Ak- la-Chapelle,  soumet,  dans  cet  écrit,  à  une 
minutieuse  analyse  tous  les  passages  (qull  reproduit  et  traduit)  de  Philippe 
Mousket  oti  le  chroniqueur  tournai  sien  parle  d'Aïx.  On  trouvera  dans  son 
commentaire  nombre  de  remar^jnes  précieuses  non  seulement  pour  Tbis- 
toire  fabuïeuse  d' Aix-la-Chapelle,  mais  paur  Thistoire  poétique  deCharle* 
magne  (voy,  notamment  ce  qui  concerne  le  prétendu  enterrement  de 
Tempereur  assis  sur  un  trône  et  non  couché  dans  un  cercueil,  fabl*^  qui 
est  d'ailleurs  inconnue  k  Mousket  et  qui  paraît  avoir  été  inventée  a  l'occa- 
sion de  rouverture  du  tombeau  de  Charles  par  Octon  II),  —  G,  P. 

Die  dittktt  Redt  al  s  stilistisclxs  Kunstmiitei  in  dtn  Romantn  der  ChrtiHm  dt 
7 foyes...  (von)  AlfonsHtLKA.  Breslau,  1902.  In-8, 63  p.(disserE.  de  docteur). 
—  Nous  n'avons  ici  que  le  commencement  d'un  travail  qui  sera  sans  doute 
fort  élcndu,  et  que  l'auteur  se  propose  de  publier  complet  quelque  jour. 
Dans  cette  introduction  il  n'est  même  pas  encore  parlé  de  Chrétien  de 
Troies  :  après  trois  courts  chapitres  sur  le  discours  direct  dans  l'épopée 
en  général  cl  dans  Tépopée  antique  nous  avons  un  chapitre  sur  le  discours 
direct  dans  Tépopée  populaitc  française,  où  sont  successivement  étudia  k 
monolt^ue*  le  dialogue  et  ïe  if  discours  en  chœur  »  dans  les  chansons  de 
i^cste.  Le  sujet  est  neuf  et  intéressant;  îî  est  traité  par  M.  Hilka  avec 
iJ3>i.iligence  et  jugement,  ci  nous  serons  heureux  de  voir  la  suite  de  son 
travail  (je  noterai  ici  que  j'ai  donné,  dans  un  récent  article  du  Jourmû  du 
SQvant$^  juillet  1902,  quelques  remarques  sur  le  monologue  d*ns  Chrético, 
et  j'ajouterai  que  M,  J.  Mettrop  se  propose  d'étudier  le  monologue  dati& 
ren&emble  de  la  poésie  romanesque  du  moyen  ige  français).  —  G,  P. 


CHRONIQUE  349 

Zuden  Anfàngen  der  jraniosischen  Novdle.  Von  Karl  Vossler.  Berlin,  Dunc- 
ker,  1902.  In-80,  36  p.  (Extrait  des  Studien  ^urvergl.  Litleraturgeschichte^ 
p.  p.  M.  Koch,  t.  II).  —  M.  E.  Langlois  a  le  premier  fait  connaître  le 
curieux  recueil  de  nouvelles  en  prose  du  xve  siècle,  composées  sans  doute 
à  Sens,  et  conservées  dans  un  manuscrit  du  Vatican  ;  il  l'a  copié  et  m'a 
proposé  de  le  publier  avec  lui.  M.  Vossler,  ayant  eu  connaissance  de  ce 
projet,  a  très  courtoisement  renoncé  à  l'édition  à  laquelle  il  avait  songé 
de  son  côté.  Il  s'est  contenté  de  donner  une  analyse  des  nouvelles,  qu'il  a 
fait  précéder  d'une  courte  et  judicieuse  introduction  sur  l'histoire  de  la 
nouvelle  en  France,  ec  à  laquelle  il  a  joint  des  remarques  comparatives 
qui  n'épuisent  pas  le  sujet,  mais  qui  ont  une  réelle  valeur.  La  comparai- 
son de  la  plupart  des  «  contes  décrits  »  avec  les  formes  versifiées  du 
xiiic  siècle  que  nous  en  avons,  montre  que  l'auteur  n'a  souvent  fait  que 
lesdérinier  et  les  abréger.  M.  V.  apprécie  très  bien  le  caractère  du  recueil, 
pour  la  forme  duquel  il  me  parait  cependant  trop  indulgent.  Son  idée  d'y 
reconnaître  le  livre  (ou  une  partie  du  livre)  que  le  chevalier  de  la  Tour- 
Landri  avait  composé  pour  son  fils  me  paraît  n'avoir  rien  pour  elle  :  le 
style  de  la  Tour-Landri  et  celui  de  notre  nouvelier  n'ont  aucune  ressem- 
blance. En  revanche  M.  V.  a  raison  de  dire  que  l'influence  italienne  sur 
le  recueil  sénonais  se  borne  à  peu  près  au  nom  même  de  «  nouvelles  »,  et 
que  le  recueil,  dans  son  fond  et  dans  son  esprit,  est  tout  français  et  encore 
pleinement  médiéval.  —  G.  P. 

^ymologie  du  mol  huguenot  appliqué  aux  prolestants  de  France,  prt)uvée  par 
des  textes  authentiques  antérieurs  à  la  Réforme,  par  Charles  de  Grand- 
MAISON.  Tours,  Péricat,  1902.  In-8<»,  8  p.  (extrait  du  Bulletin  de  la  Société 
de  rhistoire  du  protestantisme  français,  ]an\'\Kir  1902).  —  Des  «  textes  authen- 
tiques antérieurs  à  la  Réforme  »  ne  peuvent,  naturellement,  rien  prouver 
pour  l'application  du  mot  huguenot  aux  protestants;  aussi  M.  Grandmaison 
prouve-t-il  seulement  que  Huguenot,  diminutif  de  Hugon,  était  employé  à 
Tours,  comme  prénom  et  nom  de  famille,  dès  la  fin  du  xivc  siècle  au 
moins.  Cela  ne  laissa  pas  tout  de  même  d'avoir  un  certain  intérêt,  puisque 
le  nom  de  huguenots  donné  aux  réformés  paraît  bien  être  né  à  Tours  ou 
aux  environs,  et  que  s'il  est,  comme  c'est  problable,  une  adaptation  de 
l'ail,  ddegnoss,  il  a  pu  se  modeler  sur  le  nom  de  quelque  réformé  touran- 
geau. Notons  à  ce  propos  les  formes  uganau,  es^anau,  iganau,  qui  ont  dû 
servir  d'intermédiaires  entre  l'allemand  et  le  français,  et  dont  la  dernière 
surtout  est  encore  assez  voisine  de  l'original.  —  G.  P. 
«r  Kenntniss  des  Alllogttdoresisck'n,  von  Wilhelm    Meyer-Lûbke.    Wien, 
GerolJ,  1902.  In-80,  75  p.  (Extrait  des  Sit^ungsbericbte  der  Kais.  Akademie 
der  Wissenschaften,  t.  CXLV).  —  Ce  beau  travail  est  le  dépouillement  phoné- 
tique, morphologique  et  lexicographique  du  Condaghe  di  San  Pietro  diSilki, 
récemment  publié  (Cagliari,  1900)  par  M.  Bonazzi,  qui  contient  de  nom- 
breux actes  en  vulgaire  des  xi^',  xii«  et   xiii^  siècles.  On  y   trouvera    à 
chaque  page  de  précieuses  observations,  qui  dépassent  souvent  de  beau- 


350  CHRONiaUE 

coup  le  domaine  proprement  sarde.  Notons  en  particulier  ce  qui  est  dit, 
p.  33  et  ailleurs,  sur  la  grande  question  du  maintien  du  c  en  logondorien, 
la  discussion  sur  la  persistance  de  Tablatif  (p.  12),  et,  parmi  les  nombreuses 
remarques  étymologiques,  celles  qui  concernent  ilex,  *pulletrus, 
*adcaptare.  Notons  encore  que  l'auteur  donne  (p.  35)  pour  la  particule 
pronominale  iteu,  itteu  la  même  explication  qu'a  publiée  ici  (XXXI,  $91) 
M.  Guarnerio,  qui  nous  l'avait  envoyée  dès  le  mois  de  mai  1902  et  qui 
d'ailleurs,  comme  le  remarque  M.  Meyer-Lûbkc,  l'avait  annoncée  dès  long- 
temps. —  G.  P. 

Dictionnaire  savoyard,  publié  sous  les  auspices  de  la  Société  florimontane  par 
A.  Constantin  et  J.  Desormaux.  Paris  (Bouillon)  et  Annecy  (Abr)'), 
1902.  In-8,  LXii-446  p.  —  A  Constantin  mourut  en  1900,  laissant  de  très 
nombreux  matériaux  qui,  revisés  et  complétés  par  M.  Desormaux,  profes- 
seur au  lycée  d'Annecy,  ont  formé  le  présent  dictionnaire.  Les  matériau.x 
étaient  classés  ou  plutôt  groupés  selon  des  systèmes  différents;  It  plan 
n'était  pas  arrêté,  de  sorte  que  le  labeur  qu'a  dû  s'imposer  M.  D.  ne  laisse 
pas  d'être  considérable  et  on  lui  doit  des  éloges  pour  l'intelligence  et  le 
soin  qu'il  a  apportés  à  la  mise  en  ordre  et  à  la  publication  du  dictionnaire. 
Nous  devons  toutefois  formuler  sur  certains  points  quelques  réserves,  sans 
entrer  dans  une  critique  détaillée,  la  Romania  ne  pouvant  consacrer  aux 
études  sur  les  patois  qu'un  espace  très  restreint.  Le  premier  auteur  avait 
pris  comme  base  le  patois  de  la  vallée  de  Tliônes,  qui  est  passablement  uni- 
lorme.  M.  D.  a  cru  devoir  y  ajouter  un  certain  nombre  de  formes 
recueillies  dans  les  communes  des  environs  d'Annecy;  il  y  a  même  des 
mots  d'autres  parties  de  la  Savoie,  de  sorte  que  l'ouvrage  mérite,  jusqu'à 
un  certain  point,  son  titre  de  Dictionnaire  savoyard.  Nous  n'aurions  pas 
conseillé  ces  additions.  Il  en  résulte  une  œuvre  très  inégale,  plus  complète 
pour  une  région  que  pour  les  autres.  La  notation  des  sons  nous  laisse 
quelques  doutes.  M.  D.  dit  dans  sa  préface  que  les  fiches  de  M.  Constantin, 
tf  datant  d'époques  assez  éloignées,  n'avaient  pas  toutes  été  rédigées 
d'après  un  même  système  graphique  ».  En  ce  cas  nous  aimerions  à  savoir 
comment  a  procédé  M.  D.  ;  quel  système  a-t-il  adopté?  Nous  voyons  d'ail- 
leurs (p.  xxxix)  que,  dans  certains  cas,  M.  D.  s'est  écarté  de  la  graphie  de 
Constantin.  L'unité  de  graphie  est  pourtant  indispensable  dans  tout  tra- 
vail sur  un  patois.  Certains  détails  de  prononciation  sont  expliqués  d'une 
façon  bien  obscure,  ainsi,  p.  xxxv  :  «  Nous  représentons  le  th  dur  anglais 
par  çh  et  le  //;  doux  par  jh.  Qu'est-ce  que  cela  peut  bien  vouloir  dire?  Les 
localités  où  les  mots  ont  été  recueillis  sont  indiquées  entre  (  ),  ce  qui 
ne  peut  qu'être  approuvé.  Mais  la  façon  dont  elles  sont  indiquées  est  bien 
compliquée  et  incommode.  Ainsi  ^7V  signifie  Les  Villards  (cant.  de 
Thônes)  et  4TV  Villaz  (cant.  de  Thorens),  le  chiffre  arabe  désignant 
l'arrondissement  (ici  Annecy),  la  lettre  capitale  le  canton  désigné  par  son 
initiale,  la  lettre  minuscule  étant  l'initiale  du  nom  de  la  commune.  C'est 
ngénieux,  mais  il  n'eût  guère  été  plus  long  d'écrire  le  nom  en  entier.  On 


CHRONIQUE  Î5r 

ne  Saurait  blâmer  en  principu  h  woniparahoir  avec  Jts  patois  apparentés 
ou  même  âvec  l'anc.  fr. ,  mais  il  ne  faut  pas  en  abuser.  Ainsi,  au  mot 
huiîante,  qui  est  tout  fraiiçab^  et  qu'il  eût  mieux  valu  enregistrer  sous  la 
forme  pJtoîse  wHdfUaf  on  nous  cîtc,  d'jprès  Godtifroy,  un  vers  du  Voyage 
df  Omtltmagm à pruitilem  où  figure  uiUmU.  A  quoi  bon?  Divers  ouvrages 
$ur  le  patois  savayard,  en  partie  rêdif;és  d'après  les  notes  de  Consuntin, 
sont  annouccs  :  nous  voudrions  que  M  Desortnaux  trouvât  Toccasion  de 
mieux  expliquer  la  phonùtîque  du  patois  en  tenant  compte  des  variai  té  s 
locales,  et  qu'il  révisât  le  système  graphique  de  Constantin.  La  "  liste  des 
lexies  anciens  >i  (p*  liv)  n'est  pas  complète  :  iïy  manque^  entre  autres,  ks 
deUK  chansons  «  en  savoysien  »  insérées  dans  La  jkur  dts  chamotis 
(vers  iSîo,  voir  Brunet,  MiiwwW,  II,  1286-7),  ~  ^^  ^' 

Giulio  Bertoni.  La  BiNiokm  tslrnse  f  h  collum /êrmrese  ai  Umpi  âd  dma 
Envkî  (1471-1505),  Torino,  Lœscher,  1905,  In-8,  xi-joy  pages.  ™  Cet 
ouvrage,  d'un  jeune  érudit  qui  s*est  déjà  fait  avantageusement  connaître 
par  ses  publications  sur  U  littérature  provençale,  n'est  pas  proprement  une 
bistaire  de  la  célèbre  bibliothèque  d'Esté,  bien  qu'on  y  trouve  rassemblés 
de  nombreux  rcnstrignements»  en  partît:  inédits,  sur  le*  origines,  Tcn- 
tretien  et  les  a^croissemetits  de  cette  bibliothèque  ;  c'est  plutôt  comme 
Tindiijue  le  sous-titre»  uîie  histoire  de  Taciivitè  littéraire  à  la  cour  de  Fer- 
rare  dans  la  seconde  r»iaitiè  du  sv<  siècle*  Il  y  a  là  d* intéressants  chapitres 
^urlaconnais^nce  de  la  littérature  françaiseÇch.  iv)^  sur  la  culture  grecque 
et  kuinc  (ch.  v)  au  même  temps,  qui  seront  consultés  avec  fruit*  L'ou- 
vrage contient  un  appendice  de  documents^  entre  autres  un  fragment  du 
Catalogue  de  la  bibliothèque  de  Borso  d'Esté  (1467)  et  se  termine  par  une 
bonne  table.  Qu'il  nous  soit  permis  d'exprimer  en  passant  le  souhait  que 
le  catalogue  des  mss  de  TExtense,  commencé  par  M.  C.  Frati  (voir  Rom.f 
XX Vin,  l'y 2),  soit  continué,  selon  un  plan  réduit»  toutefois,  car  les  caïa- 
togues  trop  développés  risquent  fort  de  rester  inachevés. 

An  ffigUsh  Comfnenlary  mi  Dantû'i  Divina  Commedta^  by  thc  Rev, 
H,  F,  ToïER,  Oxford,  Clarendon  Press»  1901*  In-8,  vij-6a8  p.  —  Cet 
ouvrage,  imprimé  avec  rèlégance  et  Tentente  des  choses  typographiques 
qui  caractérisent  la  Chrmdon  Press,  est  une  preuve  nouvelle  de  l'activité 
avec  laquelle  les  Anglais  se  livrent  à  Tétude  de  Dante.  Uauteur»  plus 
connu  jusqu*ici  par  ses  travaux  sur  l'archéologie  et  la  géographie  de  la 
Grèce,  n*a  pas  prétendu^  cela  va  de  soi,  présenter  des  explications  nou- 
velles. Il  a  su  faire  un  choix  judicieux  entre  les  gloses  innombrables  qui 
ont  été  pubHées  sur  la  Divine  Comédie,  et  il  a  sur  bien  des  commentateurs 
le  ulent  de  s'exprimer  avec  concision.  Ce  commentaire  est  fait  j>our  accom- 
pagner r édition  de  la  D.  C.  publiée  par  le  D^  Moore,  â  la  Clarendon  Press, 
en  1900 

Itstmnrtth  de  rofficiaHk' de  Besancon  (1^65-1500),  par  Ulysse  Rohert  T.  J^r 
(136$' 1400).  Paris»  impr.  nai,,  1903.  In-40,  551  pages  (Collection  des 
Documiniî  ir$éditsy  La  série  des  testaments  reçus  par  roffiçialîté  de  Besan- 


352  CHROKiaUE 

çoïi  est,  malgré  !ês  pcnes  nombreuses  qu'elle  â  subies  au  x\m'  siècle, 
Tutie  des  plus  importantes  colleajons  de  ce  genre  qui  existent,  Grice  à 
un  ancien  inventaire,  M.  Robert  a  pu  dresser  la  liste  de  tous  les  iJocu- 
ments  dont  c île  se  composait  lorsqu'elle  éldl  entière.  Le  premier  volume, 
qui  vient  de  yâraître^  contient  1 1^  testaments,  précédés  d'une  introduction 
qui  occupe  les  267  premières  pages  du  volume,  introducïion  dans  laquelle 
M*  R,  a  ûiit  rhistoire  delà  collection,  et  Tétudie  à  tous  les  points  de  vue.  Son 
travail  paraît,  sauf  découverte,  peu  probable,  de  nouvelles  pièces,  déâiiitif. 
U  intéresse  sunout  Thistoire  de  h  Franche' Comté,  mais  beaucoup  de 
détails  curieux  pour  llustoire  des  moeurs  y  sent  relevés»  Nous  n*aurions 
pas  annoncé  ici  cette  importante  publication  qui  se  compose  en  grande 
partie  d'aaes  latins  et  qui,  par  conséquent,  reste  eo  dehors  du  cadre  de  la 
Rûmûma^  s'il  ne  s'y  trouvait  bon  nombre  d'actes  qui  sont  en  langue  vul- 
gaire ci  où  Ton  peut  recueillir  des  traits  caractéristiques  de  Tidiome  local  : 
n«  î  (1271),  a  (1282,)  12  (1297),  24  (iîi>)*  27  (1316),  îo  (1520),  H 
(ijili),  etc*  On  y  remarquera  particuliètï^ment  de  nonibrtux  exemples 
de  b  jr^  pers,  sing  du  près,  de  rîndic.  en  m  et  de  b  ;*  pcrs  sing.  du 
prés,  du  subj.  en  cU  :  «  Fais  et  ordtnûi,  et  vuU  que  ainsi  sott  et  demor&it^ 
mon  testament  en  lel  meniere  »  (m  }).  «  Après,  je.,,  doin,  outroî  et  Ar«- 
Sf}f...  »  n"  8;  plus  loin,  également  au  présent,  iahmi^  ete, 

XolicTéfuit  ma tm serti  J^  Tthnty  Ct^Z/rj^v  (Cambridge),  contenant  les  vies  co 
vers  français  de  saint  Jean  T Aumônier  et  de  saint  Clément»  pape,  par 
Paul  Me^^ER,  Paris,  tmpr.  nai,  (Klincksleck)^  190^.  lti-4&,  51  pages 
(Extrait  des  Nûiias  H  extraits,  l,  XXXV  tll).  —  C'est  la  publication  que 
nous  avons  annoncée  précédemment  (R<m.,  XXX.1,  471).  11  est  probable, 
bien  qu'il  y  ait  certaines  différences  dans  la  versification,  que  ces  deux 
poèmcSi  jusqu^ici  inconnus,  qui  comptent  respectivement,  77  j 2  et  [498$ 
vers,  sont  du  même  auteur*  Cet  auteur  était  angbis  (ou  du  moins  nor* 
mand  d^Ângleterre)  et  composait  au  commencement  du  xiU^  stède.  Li 
présente  notice  donne  environ  un  millier  de  vers  de  la  vie  de  saint  Jean 
et  MtS  de  la  vie  de  saîni  Clément,  cette  dernière  composition  èutit 
essentiellement  une  adaptation  des  Ruc^nitûymi. 


Le  BrùpttmirÉ'GtrmU,  V<  E,  BOUILLOÏC, 


X410N,    PKOTAT    IHLKES,    IMl" JtiM | Vll> 


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1 1 ;     njçmbrc      dv 

2rr. 


par   ! 

VOC.J 


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rinstiiut     ïn*4 


V^i?. 


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La  littérature  normande  avant  l*annexion  (011-1204).  P^'^^^^^"' 
-  : — ^      .  <    lu    i    b 

séance    publique    û<    la    Stxirii"    dc^    iintkjUiiïfcî    ^ic    Normand  k    le 

l«  J^cembfc  189S,  p;ir  le  rT^cm*;/Bfocl' -"    ■    n    —  Pri*.  ..     2  (t  60 

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— — ^ — —  ^  .^^ ce 

5   et  pbîi 


atioée   T90Î,  0*r#ïeTïu:  Ot 
—  A, 


Dictionnaire  de  Pancicnne  langue  française,  ***^  * 
ntOY,  Tt>mc  X  et  dernief*  Un  voL  in^,  —  IVix . . .   ... 


6Bfr. 


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N»  187 


JuiUet 


1903 


ROMANIA  ri 


RECUHIL    riUMHSTRlUL 
DILS    LANGUES    ET    DES    LOTÉRATURES    ROMANES 

FOMDil  ES    1S72    MH 

Paul  MïlWiR  \lt  Gaston  PARIS 

PUHUÉ    PAR 

PAUL     MEYER 

Kl  If  rr  des  aïKCBStJTS 

Le  .  li]£  c  l<b^  4iurs 


%'903 


Tome  XXXII 


PARIS    (2') 
UBEAllUE    ïiMJLE    BOUILLON,    ÉDITEUR 

67»    BUE   DE   HtCWEUEi;^    67,    AL'    î*» 

CONDITIONS  D\\BONNEMENT  A  LA  ROMANI J 


Paris  :  20  fr.  —  Départements  et  Uqïoiî  postale  . .  i  tr. 

î                         rs  tie  se  fotîl  que  pour  Tannée  entière  et  à  pariir  4c  jauvicf 
;  V  tt^miinL'c  se  vetiJ,  prise  i  P^iris *    2>  If. 

.^wc«M  nmnetù  n'est  vtndtt  séparàmnt^ 


>i.^M>tAîRB  DU  PRÉSENT  NUl^tÊRO  : 

H  Six:iius    Rc<:berdics  ^lumimM  ife  GaObiRiie  li^Onfitr 

(TpTçniicr  art.)u ,  . ,    ...  ..<,..,♦ ,,.,-....- 

Ë,  Lavclhii.  Kotiei  sur  \K.fm  d^Ut  FtmHUi  iTAdjot  te  bo^u 

F.  L 

443^ 

cnfanr  c^iig*  tu  nnur 
•  rice.  —  Charme  <o  if«rs  ImiKal^ 


COMPTES  RENDUS 

E    Ot*%¥  "    ~     ns4t»Allll)  I 

R.  Wleks  .,..._  > 

]    TîEJtSOT.  (Jnni^fti pt^fuimm  rwcnaUui dûm  io  Alpii /> JWf^itrf  (P^ M* } 

FÉRIQDiaUKS  ,r;n 

CHRONÎQUi. 


Lct  prodiJtiu  numéfos  contiendront  : 

o.  r        ^        ■    ^    ' 

AI  jni  itc  raociciinc  Uaguc  C^tf^l*'}. 

A     ;  liériapc-s. 

A.  I  -il  ffr^T/ct  >estmiutions(iiitl<), 

M.  VK-. 


RECHERCHES 

SUR    LES 

CHANSONS    DE    GUILLAUME    D'ORANGE 


La  question  de  la  formation  du  cycle  épique  de  Guillaume 
d'Orange  compte  parmi  les  plus  obscures  de  Thistoire  litté- 
raire. C'est  une  de  ces  questions  qui  entraînent  naturellement 
les  esprits  aventureux  dans  la  région  des  hypothèses.  M.  Ray- 
mond Weeks  regarde  le  roman  italien  des  Nerhanesi  datant  du 
XV'  siècle  comme  représentant  souvent  un  état  de  la  tradition 
antérieur  aux  chansons  françaises  qui  nous  restent.  Suivant  un 
autre  savant,  M.  Philippe  Auguste  Becker,  le  cycle  entier  de 
Guillaume,  loin  d'être  le  résultat  d'un  travail  lent  et  graduel 
de  la  tradition  populaire  pendant  plusieurs  siècles,  ne  serait  dû 
qu'à  l'activité  plus  ou  moins  factice  de  quelques  moines  du 
XII*  siècle  et  de  leurs  continuateurs. 

Dans  les  pages  qui  suivent,  je  n'entends  pas  ajouter  à  ces 
hypothèses  une  nouvelle  explication  de  la  formation  du  cycle 
entier.  Seulement  je  voudrais  fixer  quelques  points  qui,  bien 
que  se  rapportant  à  des  traits  particuliers,  me  semblent  ne 
manquer  ni  d'importance  ni  de  sûreté.  J'éviterai  toute  polé- 
mique qui  ne  se  présente  pas  d'elle-même  sur  ma  route.  Le 
lecteur  ne  laissera  pas  de  remarquer,  par  exemple,  que  Tédifice 
entier  de  M.  Becker  s'écroulera  du  moment  que  Ton  reconnaîtra 
Aïmer,  frère  de  Guillaume,  pour  un  personnage  en  même  temps 
de  provenance  historique  et  de  tradition  vivante. 

I.  —  Bertrand  de  Bar-sur-Aube 

On  sait  que  l'auteur  de  la  chanson  de  Girard  de  Vienne 
s'appelle  Bertrand  et  qu'il  Ta  composée  à  Bar-sur-Aube.  Lui- 
même  nous  l'apprend  vers  le  commencement  du  poème. 


ta  xxxii 


25 


354  H.    SUCHIER 

Ce  fu  en  mai,  quMl  lait  chaui  et  seri, 
Que  Terbe  est  verz  tt  rosier  sotit  Ûotï  i 
A  Bar  sor  Aybe^  un  chastel  seignori, 
La  sist  Bertrand  en  un  vergier  pensis, 
Uns  genth  dcrs  *|Uï  ceste  chan*;on  fi  st. 

Je  croîs  que  ce  passage  permet  pim  de  conclusions  qu'on 
Ti*en  a  tiré  jusqu*à  présent.  Demandons  d*abord  aux  historiens 
de  la  ville  de  Bar-sur-Aube  des  renseignements  sur  le  château 
seijËîneuriâl,  dans  le  verger  duquel  la  jeune  àme  de  Bertrand  a 
couvé  cette  belle  et  impétueuse  chanson  de  geste. 

Suivant  ces  historiens  '  il  y  avait  à  Bar-sur-Aube  deux  chiV 
leaux.  Le  premier  était  bâti  sur  le  penchant  de  la  montagne 
Saîme-Germaine  au  lieu  dit  le  Chitelet*  Ce  château,  men- 
lionnc  plusieurs  fois  sous  la  désignation  de  vieux  châimu^ 
semble  avoir  été  abandonné  vers  le  milieu  du  xir  siècle*  A 
partir  de  ce  temps,  quand  on  parle  du  ch;^teau  de  Bar-sur- 
Aube,  on  entend  le  château  construit  dans  la  vallée.  Le  château 
nouveau  doit  avoir  existé  en  1091,  car  dans  une  charte  de 
cette  année,  l'autre  édifice  est  dé];\  qualifié  de  vieux  château 
(tn  vettri  casîro  Barri,  Blarnpignon,  p,  78).  11  en  est  encore 
question  dans  une  charte  de  1151,  Cest  la  dernière,  à  notre 
connaissance,  où  il  en  soit  fait  mention.  Partant  il  est  hors  de 
doute  que  cVst  le  château  nouveau  qui  est  entendu  dans  le 
passage  précité  de  Bertrand* 

M.  dWrbois  de  Jubainville,  à  l'ouvrage  duquel  (p.  90-92) 
j'emprunte  ces  renseignements^  donne  du  château  nouveau  la 
description  suivante  : 

Henri  le  Libéral  y  fil  biiir  (dans  le  château)  Téglise  Saitit-Mactou  pour  en 
être  ÏA  chapelle,  ei  y  tnit  des  chanoines  pour  la  dessen*ir.  Le  palais  s*élcviit 
entre  1  église  et  la  rivière*  M  lis,  suivant  la  tradition,  ce  païats  et  Téglbe  ne 
su^salent  pas  à  remplir  renceiiite  du  château.  Cette  tradition  est  confirmée 
par  les  documents  écrits;  en  effet,  H  est  question  dans  les  charte  de  maisons 
que  possédaient  dans  ce  château  divers  particuliers.  Ainii,  en  marf  126| 
(v.  &t,),  Vilain  d 'Espagne »  damobeau,  reconnaît  devoir  aux  chanoines  de 
Saint*Maclou  un  cens  payable  sur  deux  maisons  à  lui  appartenant,  sises  à 
Ejr-siïf-Aube  dans  le  cliiteau  devant  Téglise   Saint- Maclou  (Cari,  Saim- 


ï,  L,  Chevalier,  Histoire  de  fîtif-^î/r-Ju/^,  Bar-su r* Aube ^  i8ît.—  D'AriK»s 
de  Jubainville,  HisiQirf  dt  BaF-sur^Juhr  mts  ks  comtt^  âf  Chûmpûgm  1077- 
ît$4t  Pirîs,    iëS9.   —    Blamplgnon,    Bar-îUf-Àabe^  Bar-sur-Aubc»    1900^ 


LES  CHANSONS    DE  GUILLAUME  D  ORANGE  JJJ 

Maclûu,  xii*s.  ').  En  1270  le  comte  de  Champagne^  toi  de  Navarre,  dojiuc 
âuchiiphrede  Saim-Madoti  tic  terniîn  situé  a  Bar,  devaiiE  TégUse  Saint-Madou, 
lieu  dît  le  Château  de  Bar,  près  h  maison  du  doycuué  de  Saini-Miiclûu,  vers  le 
milieu  JudU  château,  enire  les  halles  d'Yprcseï  celles  où  les  drapiers  de  Cam- 
brai vendent  pendant  les  foires.  Ces  indications  peuvent  donner  Fidt^e  de 
retendue  <jii'av^U  le  château  ;  nous  supposons  qu*outre  régliseSaint-Maclou, 
il  comprenait  au  moins  une  grande  panie  delà  place  qui  porte  actuelleniem 
le  nom  de  place  Saînt-Maciou  et  Tespace  qui  se  trouve  entre  la  rivière 
d'Aube,  réglîse  et  la  rue  des  Mouhns,  Une  des  portes  d'entrée  subsiste 
saus  une  tour  juxtaposée  à  Téglise  Saint-Maclou  ;  une  autre  correspondait 
s^ns  doute  au  ix>nt,  auîourd'hui  détruit,  dont  les  fondatiotis  apparaissent 
dans  les  eaux  basses  à  Te  xt  ré  mi  té  de  la  rue  Saint- M  ad  ou.  La  tour  est  la 
seule  partie  des  bâtiments  civils  du  château  qui  existe  encore..»  Elle  sert  de 
clocher  à  Téglise  jadis  collégiale,  aujourd'hui   paroissiale  de  Sainr-MacloUt 

J'ai  volilu  citer  m  extenso  ce  passage,  qui  me  semble  propre 
à  éclairer  plus  d*un  point,  II  fait  voir  que  dans  Fenceinte  du 
château  il  y  avait  de  lespace  pour  un  verger,  et  ce  sont  peut- 
être  des  parties  du  verger  que  Ton  a  employées  au  Xifi*'  siècle 
comme  emplacements  de  maisons.  Comme  ce  château  était  la 
propriété  du  comte  de  Champagne,  la  question  se  pose  de 
savoir  sî  ce  n*est  pas  le  comte  ou  un  membre  de  sa  famille  qui 
a  chargé  Bertrand  de  la  composition  de  Girard  de  Vienne. 

Les  comtes  de  Champaj^me  aimaient  avisez  le  séjour  de  Bar- 
sur-Aube,  M.  d'Arbois  de  Jubainville  {Huioire  des  dms  et  des 
comtes  ik  Champagne,  t.  III,  p,  251)  énumére  sept  chartes 
données  par  Henri  II  à  Bar-sur- Aube  à  des  dates  différentes. 
Toutefois  on  ne  %^oit  guère  l'intérêt  que  le  comte  !ut-mt"me 
pouvait  prendre  à  l'histoire  de  Girard  de  Vienne.  Mais  sa  tille 
Scholastica  était  l'épouse  de  Guillaume  V  de  Vienne,  comte 
de  Mâcon,  et  les  comtes  de  Vienne  rattachaient  leur  famille  au 
célèbre  héros  épique.  De  là  leur  prédilection  pour  le  nom  de 
Girard  :  c'est  de  ce  nom  que  s'appelaient  le  père  de  Guil- 
laume V,  un  de  ses  frères  et  son  fils  aîné, 

José  donc  présumer  que  Bertrand,  lorsqu'il  écrivit  sa  chan- 
son au  château  de  Bar-sur- Aube,  avait  été  chargé  de  cette 
tache  par  Guillaume  de  Vienne,  geudre  du  comte  de  Cham- 
pagne, peut-être  aussi  par  Scholastifi^,  Pépouse  de  Guillaume. 
La  part  des  dames  a  été  vraiment  énorme  dans  le  développe* 
ment  de  la  littCrature  au  \\f  siècle,  et  Scholastica  était  fille  de 


1.  Évidemment  il  faut  corriger  xn«  s,  en  xtii^  s. 


$$6  H*    SUCHIER 

la  comtesse  Marie,  petîte-fille  de  la  reine  Éléonore,  qui  Tune  et 
Fauîre,  parmi  les  dames  protégeant  les  poètes,  se  trouvent  au 
premier  rang. 

Malheureusement  on  ignore  la  date  du  mariage  de  Scholastica 
avec  Guillaume  deMkon,  Je  pencheà  croire  qu'il  a  été  accompli 
vers  1190.  Scholastica  mourut  en  1219;  le  comte  Guillaume^ 
qui  avait  succédé  à  son  père  mort  en  1184,  décéda  en  1224.  La 
composition  de  Girard  de  Vienne  est  à  placer  entre  ces  deux 
jalons,  ce  qui  ne  change  rien  à  Topinion  reçue.  Guillaume 
a  été  aussi  le  protecteur  du  chansonnier  Guiot  de  Dijon,  et 
son  père  Girard  celui  de  Guiot  de  Provins,  qui  honore  sa 
mémoire  par  un  passage  de  sa  Bible  (v.  334)  et  qui  dédie  une 
chanson  '  ù  un  comte  de  Maçon  qu'il  sera  permis  d'identifier 
avec  Girard. 

On  sait  que  Scholasrica  avait  reçu  comme  dot  des  droits  à 
percevoir  sur  les  foires  de  Bar-sur-Aube. 

Il  est  possible  que  Bertrand  ait  été  logé  au  château  en  qua- 
lité de  chanoine  de  Saint-Maclou\  La-dessus  il  faudrait  pou- 
voir consulter  le  Ginulaire  de  Saint*Maclou  de  Bar-sur-Aube 
écrit  vers  la  fin  du  xiu*  siècle,  et  qui  est  maintenant  en  la  pos* 
session  de  M.  Aubertin,  maire  de  la  comnmne  de  Bayel, 


n.    —    MoHGLAKE 


I 


Suii^ant  le  début  de  Girard  de  Vienne  le  vieux  Garin, 
père  du  héros,  réside  à  Monglane,  la  Jort  die  antie^  où  il  est 
entouré  de  ses  quatre  fils.  Tout  ce  que  nous  apprenons  sur  la 
situation  de  cette  dté^  c'est  que  defors  ks  murs  cùrî  H  Rasnes 
truian^.  Si  célèbre  que  soir  devenu  dans  la  suite  Monglane,  qui 
a  donné  le  nom  à  Fune  des  trois  grandes  gestes  de   répopéc 


I,  Publiée  dernièrement  par  M,  Baydier,  Grnoi  wm  Prmnm^  Halle,  1902» 

a.  Ces  chinoîncs  furent  établis  en  1 1  Sf-  La  chapelle  de  Sjijnt-Mftclou  91)1 
leur  fut  ajsignéc  cjustait  déjà  au  xi«  siècle.  Les  chancHiies  étaient  enterrés  sur 
la  hauteur  de  b  mouiagnc  Sainte-Germaine  où  était  l'ancien  dmefîèfe 
(Bl  an»  pi  g  non,  p,  p,  78).  A  partir  de  1165,  les  chanoines,  pendant  ^tielquo 
annces  acuîemcnt,  occupèrent  Tégllse  Sainie^Madeleine  (d'Arboîi,  p.  6|,  64; 


LIS  CHÂNSOKS   DE   GUILLAUME   D  ORANGE  5Î7 

fra^nçâîse,  personne  n*en  a  encore  retrouvé  la  position.  C'est 
en  vain  que  l*on  feuillette  les  ouvrages  sur  les  chansons  de 

geste  :  ils  ne  nous  fournissent  aucun  renseignement  à  ce  sujets 
sauf  un  passage  de  V Histoire  lùtéraire  de  la  France^  duquel  je 
parlerai  par  h  suite. 

Pendant  un  certain  temps,  (*ai  cru  pouvoir  atteindre  la  solu- 
tion du  prohlcme  :  c'est  lorsque  le  hasard  me  tit  rencontrer  en 
Suisse  le  nom  du  manoir  Glane  et  celui  de  h  famille  noble  de 
Glane.  Tout  d'abord  je  crus  que  c'était  là  l*origine  du  Mon- 
glane  épique,  mais  depuis  je  suis  revenu  de  cette  hypothèse 
qui  m  avait  fait  suivre  une  fausse  piste.  Cependant  comme 
la  supposition  que  j'abandonne  maintenant  reste  du  moins 
dans  le  domaine  du  possible,  je  résumerai  ici  en  quelques  mots 
les  recherches  que  j'ai  faites  à  ce  sujet. 

Que  Ton  se  rappelle  avant  tout  l'ingénieuse  hypothèse  de 
l'auteur  de  Y Hhtmre  poénqm  de  Cfmrjetmgm,  Suivant  G.  Paris, 
la  tradition  originaire  ne  connaissait  ni  les  trois  frères  d'Ar- 
naud de  Beaulande  ni  leur  père  Garin  de  Monglane  (Hhi. 
poêt\f  p.  80  et  32e)*  t^  Arnaud  était  le  plus  ancien  aïeul  qu*elle 
donnât  à  la  geste  :  Girard  de  Vienne,  Renier  de  Gennes, 
Milon  de  Pouille  et  leurs  enfants  n'étaient  aucunement  men- 
tîonnés.  Les  enfants  de  Garin  et  la  geste  d'Arnaud  n'étaient 
pas  réunis  pour  former  une  seule  famille,  celle  de  Monglane. 
Cette  soudure  est  tout  artificielle^  et  Tœuvre  des  arrangeurs 
de  seconde  main;  la  preuve  en  est  que  les  poèmes  où 
figurent  les  nombreux  descendants  d'Arnaud  de  Beaulande 
ne  nomment  jamais  ses  prétendus  frères,  candis  que  ceux-ci  et 
leurs  enfants  figurent  dans  des  chansons  qui  ne  connaissent  pas 
les  premiers*  On  ne  les  voit  réunis  que  dans  des  poèmes  pos- 
térieurs, et  nous  croyons  que  l'auteur  de  Girarî  de  Fiant  est 
celui  qui,  vers  le  commencement  du  xnr  siècle,  a  fondu  ces 
deux  gestes  en  une  seule,  ^ 

Les  recherches  nombreuses  et  approfondies  consacrées  à 
Tépopée  française  depuis  1865  n'ont  fait  que  confirmer  cette 
séduisante  hypothèse-  Elle  ne  serait  pas  affaiblie  non  plus,  si 
nous  supposions  que  Bertrand,  en  réunissant  les  deux  familles 
en  une  seule  généalogie,  avait  de  son  gré  ajouté  Tancèire  de 
toute  la  geste,  Garin  de  Monglane,  et  que  ce  personnage  n'était 
dû  qu*à  son  invention.  Bien  que  la  chanson  de  Girard  de  Vienne 
soit  assez  tardive,  datant  de  la  fin  du  xii'  siècle  au  plus  tôt,  je 


JS8  H.    SUCHIER 

ne  connais  pas  d'allusion  h  ce  nom  de  Monglane  qui  soit  anté- 
rieure à  rou%Tage  de  Bertrand.  Il  se  peut  donc  que  ce  soit  Ber- 
trand qui  ait  inventé  ce  nom,  ou  du  moins  qui  Tait  introduit 
dans  l'épopée. 

Voici  Itrs  faits  qui  m'ont  suggéré  cette  idée  \ 

En  Suisse,  la  noble  maison  de  Glane  (ou  Glanne,  Glannes) 
était  illustre  et  ancienne.  Elle  était  d*origine  étrangère,  et 
c'est  à  tort  qu'on  la  décore  du  titre  de  comte,  qu'elle  ne  prend 
dans  aucun  acte*  Le  manoir  des  sires  de  Gbee  s'élevait  jadis  à 
y  ne  lieue  au-dessus  de  Fri  bourg,  au  confluent  de  la  Glane  et 
de  la  Sarine,  sur  un  rocher  qui  s'avance  en  forme  de  pro- 
montoire. Le  premier  de  ces  seigneurs  dont  il  suit  ait  mentiiHi 
est  Ulric,  qui  épousa  en  1078  Rihlende  de  Villarswalbert 
(Walpertswyi)  et  â  qui  Guillaume  HI  comte  de  Bourgogne 
inféoda  une  partie  du  \'ully  et  de  grandes  possessions  à  Arcoii- 
ciel,  Illens,  Sales  et  Farvagny. 

Pierre  et  Philippe,  fils  d*Ulric,  furent  en  1127  assassinés 
avec  Guillaume  III  de  Vienne,  dit  TEnfant,  fils  de  Guil- 
laume n,  dit  r Allemand,  dans  Féglise  de  Payerne,  Pierre  de 
Glane  bissa  un  fils  unique  appelé  Guillaume  et  quatre  filles, 
dont  Emma  épousa  Rodolphe  II  comte  de  Neuchâtel,  Ita 
Aymon  II  comte  de  Genève»  Agnès  Rodolphe  I  comte  de 
Gruyère,  julienne  le  frère  cadet  de  ce  dernier,  Guilbume  de 
Montsalvens. 

En  II 57,  Guillaume  de  Glane,  se  trouvant  sans  postérité. 


I.  ]'  lamjtièrc  les  ouvrages  suivants  :  J.  Kucnîiû^  Dki»mê~  1 

tmift^L-^     ^     ^ :iJiqut  tt  ki/ori^iu'  du  ionùm  de  Fréouff,  î.  IL  Friiïcwitg , 

i8|l»  articles  Gîam  çî  Hauttr k>e  (om-rn^  fçu  correct).  BcrchEôld,  Huioirt 
dit  cmt&n  àt  Frihourf^^  t,  ï,  Fribourg  (Suisse),  i8s|i,  p.  la  Mémtairm  tî 
âo^mmU  f.  f.  h  Seciéii  ifhitkurê  df  k  Suiae  r^mamU,  i.  l,  p.  49  et  60^ 
i.  XXII,  p.  S7|,  HémondiÊ  Fréùmz.  U  II,  %%%%,  p  S*?»  |41.  Meettbre*. 
Ui  ^tf,'îfut  flodalif  iÊsti  ht  Alpts  pmd^nttUti  p,p.  tAmiénm  wvyûkJê  TWiii, 
série  2,  vol.  XXU  et  XXni,  Turm,  i86î,  p.  24S,  274.  Ârdknm  et  k  SmHi 
rUiiciif*  du  mmsm  ih  FHkmri^  t,  IV,  188S,  p,  16;  l.  V,  1891.  p.  lO-ïi.  ^ 
Je  dois  de  pnècicui  tmsàgaemsat^  sur  les  sires  de  GLioe  en  Stitssc  à  Tarcht- 
vistc  d*Ëuu  M.  Sciuieuwly,  et  une  très  sav^inte  notice  sur  ccui  de  Glaîae,  1 
pc^ffe  là  Grande- Verrière  (SA^ne-ct-Loire),  I  Fauteui  de  VHi%Uirièn  émià  \ 
et  Bom^ifm^  M.  Ernest  l^ctii. 


LES   CHANSOKS  DE   GUILLAUME    d'oraHGE  5S9 

fonda  sur  les  bords  de  la  Sarine  un  monastère  cistercien, 
Hauterive,  où  il  prit  Thabit  religieux  K  II  y  mourut  en  1142  et 
fut  enseveli  solennellement  dans  un  mausolée  qui  se  voit  dans 
Téglise  à  côté  du  grand  autel.  II  fit  démolir,  dit  la  tradition, 
son  château  ;  les  matériaux  furent  employés  à  la  construction 
de  la  maison  consacrée  à  Dieu.  Le  riche  héritage  de  Guil- 
laume   fnt   partagé   entre  ses   quatre  sœurs. 

Or  les  sires  de  Glane  descendaient,  ou  prétendaient  des* 
cendre,  de  h  première  race  des  comtes  de  Vienne,  Cela  se 
trouve  souvent  mentionné  dans  les  ouvrages  consacrés  à  leur 
histoire,  par  exemple,  dans  Guilliraanni  Hdvetia^  MI,  cap^  14, 
texte  de  1598  reproduit  dans  le  Thésaurus  hlstoriae  Helvetkae^ 
Tiguri,  1735.  Pour  pouvoir  me  rendre  compte  de  la  nature  de 
cette  parenté,  j  ai  prié  M.  te  D^  Holder,  bibliothécaire  à  Fribourg 
(Suisse),  de  vouloir  bien  me  procurer  un  '  copie  de  la  Généa- 
îogU  manuscrite  âjts  sirts  deGlanty  appartenant  à  la  Bibliothèque 
cantonale,  et  M,  Holder  a  eu  Textréme  obligeance  de  répondre 
  ce  désir*  Selon  ce  texte,  disposé  en  forme  de  table,  Utric  de 
Glane  était  fils  de  Guillaume  de  Vienne  et  de  Mau relie  de 
Glane,  et  Guillaume  de  Vienne  fils  de  Guillaume  le  Grand 
comte  de  Bourgogne  mort  en  1087  et  d'Étiennette  de  Vienne, 
qualifiée  d*héritiére  du  comté  de  Vienne  dans  VArt  de  vérifier  fc 
daies,  éd.  in-S^,  XI,  109, 

Je  laisse  à  d'autres,  et  surtout  au  savant  archiviste  de  Fri- 
bourg, M.  Schneuwly,  la  tâche  dVxaminer  le  fond  historique  de 
cette  généalogie.  Ici  j*en  retiens  seulement  le  fait  que  les  sires 
de  Glane  prétendaient  descendre,  ou  bien  descendaient  réelle- 
ment, de  la  première  race  des  comtes  de  Vienne.  Quant  à 
Etiennette  (ou  Stephania)  nommée  dans  la  Géftmhgk,  on 
trouve  sur  elle  les  renseignements  les  plus  authentiques  dans 
le  savant  ouvrage  de  M.  Ulysse  Robert,  Histùire  du  pape 
CalixU  //,  Paris,  1891,  p.  2  et  j.  M.  Robert  énunière  neuf 
enfants  d'Etiennette.  Le  mari  de  Maurelle  de  Glane  n'en  est  pas. 

Revenons  maintenant  au  poète  Bertrand.  Ne  pouvant  con- 
naître le  nom  du  père  historique  de  Girard  de  Vienne  disparu 


!.  Astrolabe,  quatrième  abbé  d 'Hauterive,  est  probiblement  le  fib  de  ce 
nom  d*Abailard  etd'Hèloïsc. 


jéo  H,    SUCHIEK 

dins  la  tradition  (il  s'appelait  Leuthard)»  Bertrand  '  devaii 
donner  à  son  héros  un  pèrr  imaginaire. 

Je  supposais  donc  que  peut-être  notre  clerc  qui  connaissait 
les  relations  des  Glane  avec  les  Vienne,  avait  attribué  au  père 
de  Girard  le  nom  de  Garin  de  Monglane.  La  différence  entre 
Glane  et  Af^^ffglane  ne  fera  guère  de  difficuhc.  Bertrand 
place  Monglane  sur  le  Rhône,  peut-être  parce  qu'il  le  croyait 
situé  dans  les  environs  de  Vienne  Si  le  père  de  Girard  dans 
la  chanson  est  appelé  Garin,  Bertrand  peut  avoir  choisi  ce 
nom  parce  que  le  premier  comte  de  Mâcon  s'appelait  Warin 
(A ri  de  vérifier  les  dates ^  XI,  9).  Toutefois  la  sûretc  de  celle 
présomption  est  en  raison  inverse  avec  la  fréquence  du  nom 
Garin. 

Tout  compte  fait,  il  se  peut  que  le  nom  de  Garin  de  Mon- 
glane soit  un  nom  factice  forgé  dans  une  vue  généalogique  par 
un  poète  familier  avec  le  passé  et  la  parenté  des  comtes  de 
Vienne. 

Une  autre  explication  de  Monglane  a  été  proposée,  avec  hési- 
tation il  est  vrai,  par  Paulin  Paris  {Hist.  iiU.  de  la  France, 
XXU,  444)  : 

Q^ant  à  Morttgkne,  l'inctnitude  des  indications  topograplviques  chez 
les  troyvàres  ne  nous  permet  pasd*;iffirmer  que:  ce  soît  îe  Glanum  des  anciens, 
près  du  Rhône,  sur  une  élévation  voisine  de  Samt-Remy  et  de  TaniKon  ;  Heu 
(|ui  conviendrait  à  notre  texte  [Enjmtc^'i  Garin  de  Monglatu],  comme  *uni 
sur  la  Uniitc  des  provinces  îotigtcmps  occupées  par  les  Sarrasins  d*Espagiie« 
et  comme  ayant  dû  rentrer  des  premiers  mus  h  domination  des  souverains 
d'Aquitaine  , 

Cette  hypothèse  tnérite  un  sérieux  examen  >  La  ville  de  Gk- 
num  a  été  détruite  au  v*  siècle-  Elle  était  située  un  peu  au  sud 
du  Saint-Rcmy  actuel,  près  d*oLi  passait  au  moyen  âge  un  bras 
de  la  Durancc  appelée  la  Duransole.  La  distance  de  Saint- 
Remy  au  Rhône  est  de  quinze  kilomètres.  Or  te  Girard  histo* 
ri  que  a  eu  des  relations  avec  Sainî-Remy,  comme  je  le  mon- 
trerai par  la  suite.  Bertrand,  en  sa  qualité  de  clerc,  a  pu 
connaître  celles-ci;  il  est  possible  même  quVlles  aient  été 
conservées  dans  la  tradition.  Il  est  vrai  que  le  nom  de  Glanum 

t.  Ou  bien  uneiraditioa  qu'il  suivait,  ce  qui  reviendrait  presque  au  même. 


LES   CHANSONS    DE    GUILLAUME   d'oRANGE  361 

ne  semble  pas  avoir  survécu  à  la  destruction  de  la  ville*  ; 
cependant  le  nom  de  la  ville  disparue  a  pu  se  transmettre  à 
un  château  fort  qui  pourrait  avoir  été  en  la  possession  du 
Girard  historique. 

Tout  compte  fait,  je  laisse  la  question  en  suspens.  Au  cas 
où  Monglane  serait  l'ancien  Glanum,  il  faudrait  croire  que  le 
nom  avait  subsisté  dans  la  tradition.  D'autre  part,  si  Monglane 
provenait  du  manoir  situé  en  Suisse  sur  la  rivière  de  Glane  à 
laquelle  il  doit  son  nom,  il  faudrait  croire  que  le  nom  de  Mon- 
glane a  été  forgé  par  le  poète  que  protégeait  Guillaume  V  de 
Vienne,  comte  de  Mâcon. 

Ce  qui  peut  singulièrement  servir  d'appui  à  l'hypothèse  de 
Paulin  Paris,  c'est  que  le  nom  primitif  de  Saint-Remy  était 
Fréta  et  que  dans  quelques  chansons  notre  Girard  est  appelé 
Girart  do  Frete^  comme  le  fera  voir  le  paragraphe  suivant. 

m.  —  .Les  trois  Girards 

Parmi  les  fils  de  Monglane  le  plus  renommé  est  Girard  de 
Vienne,  le  protagoniste  de  la  chanson  de  Bertrand.   On  sait 

3ue  ce  héros  est  un  personnage  historique,  Girard,  gouverneur 
u  royaume  d'Arles  de  853  à  870.  L'épopée  le  chante  sous 
trois  noms  différents  :  Girard  de  Vienne,  Girard  do  Frète 
^Fraite,  Frate),  Girard  de  Roussillon.  L'identité  originaire  de 
ces  trois  héros  épiques  a  été  prouvée  en  1878  par  M.  Longnon  *, 
mais  mise  en  doute  en  1884  par  M.  Paul  Meyer'.  Je  me  range 
tout  à  fait  du  côté  de  M.  Longnon,  qui  montre  que  la  chan- 
son de   Girard  de   Vienne  contient  au  moins  autant  de  traits 


1.  Le  comte  de  Villeneuve  cite  une  charte  de  1198  (p.  11 38  et  1 141  du 
t.  II  de  sa  Stastisiique  du  département  des  Bouches-du-Rkhic,  Marseille,  1824), 
dans  laquelle  les  habitants  de  Saint-Remy  firent  valoir  les  anciennes  immu- 
nités de  Glanum  ;  le  souvenir  de  Glanum  n'était  donc  pas  tout  à  fait  éteint. 
U  serait  important  de  connaître  la  teneur  de  cette  phrase.  Je  ne  sais  pas  si  la 
charte  est  publiée. 

2.  Girard  de  Roussillon  dans  Vhistoire,  dans  la  Revue  historique,  t.  VIII, 
p.  274-279. 

3.  Giratt  de  Roussillon,  chanson  de  geste  traduite  pour  la  première  fois,  Paris, 
1884,  p-  xv-xvi. 


-.\ 


362  H.    SUCHIER 

historiques  que  celle  de  Girard  de  Roussillon.  Vienne  est  la 
ville  antique  de  ce  nom  dans  le  département  de  l'Isère  ;  c'est 
le  fief  de  Girard;  son  lieu  d'origine  s'appelle  Monglane.  Le 
nom  de  Roussilloa  a  été  expliqué  par  M.  Paul  Meyer,  p.  xxx  : 
c'est,  d'après  la  chanson  provençale,  un  château  situé  sur  le 
mont  Laçois  à  deux  kilomètres  environ  de  Pothières  (Côte- 
d'Or);  la  Seine  passe  tout  près. 

Reste  à  considérer  le  surnom  do  Fraite  connu  surtout  par 
son  emploi  dans  la  chanson  d' Aspremont ,  «  Girart  do  Fraite  », 
vassal  rebelle  de  l'empereur  Charles,  réside  à  Vienne.  Turpin 
dit  de  lui  dans  Aspretnont  :  si  est  estrai:(  de  .y.  empereurs  (éd. 
Guessard  *  i  ? ,  47),  et  un  peu  plus  tard  Girard  dit  lui-même 
(17,  50)  :  je  sui  eslrai^de  ,ij\  empereri:(.  Bien  que  cette  dernière 
donnée  ne  soit  peut-être  pas  historique  prise  à  la  lettre,  il  y  a 
toujours  dans  ces  paroles  une  grande  part  de  vérité  ;  pour  s'en 
convaincre,  on  n'a  qu'à  relire  les  pages  246-249  du  mémoire 
de  M.  Longnon. 

L'endroit  le  Fraite  a  été  identifié  par  M.  Longnon  avec  le 
Saint-Remy  actuel,  dont  le  nom  primitif  était  Fréta  ou  Frétas. 
M.  Paul  Meyer  combat  cette  opinion,  mais  à  tort.  Il  y  objecte, 
p.  XVI,  qu'  «  il  est  absolument  impossible  que  la  forme  Fréta 
ait  produit,  soit  en  français  soit  en  provençal,  la  forme  fraite  ou 
frète.  On  sait  que  le  /  entre  deux  voyelles  s'efface  en  français  et 
devient  d  en  provençal  ».  La  portée  de  cette  objection  me 
semble  nulle.  Voici  pourquoi. 

Fréta  comme  nom  de  lieu  ne  saurait  être  antérieur  à  la  fon- 
dation du  lieu  qu'il  désigne,  c'est-à-dire  au  v"  siècle.  Il  se  peut 
que  le  /  latin  entre  deux  voyelles  fût  déjà  atteint  avant  ce 
terme,  et  personne  ne  niera  qu'un  mot  introduit  après  l'accom- 
plissement d'un  changement  phonétique  n'y  participera  plus. 
Prenons  le  uîot  chapitre  que  je  suppose  avoir  été  introduit  en 
français  vers  le  vin«  siècle.  Est-il  impossible  que  ce  mot  pro- 
vienne de  capitulum,  parce  qu'il  n'a  plus  participé  aux  chan- 
gements antérieurs  atteignant  les  p  et  les  /  entre  voyelles? 
Pour  Fréta  il  se  présente  pourtant  encore  un  autre  expédient  pour 
satisfaire  à  la  conscience  phonétique  la  plus  rigoureuse  :  le 
nom  de  lieu  en  question  dans  les  documents  ne  se  rencontre 

I.  Sur  cette  édition  qui  n'a  jamais  été  publiée,  voir  Rom.  XIX,  203,  note  2. 


LES    CHANSONS    DE   GUILLAUME    D  CHANGE  365 

pas  avant  le  x"  sièclt;,  et,  ce  que  M.  Paui  Meyer  sait  mieux 
que  personne,  rien  ne  nous  force  à  admettre  que  la  forme 
employée  dans  une  charte  du  x^  siècle  ait  été  la  forme  authen- 
tique du  nom  primitif.  Elle  peut  fort  bien  ctre  due  h  une  lati* 
nisation  d'une  forme  vulgaire.  Si  par  exemple  la  forme  éty- 
mologique au  lieu  d'un  /  en  avait  eu  deux,  le  scribe  du  x* siècle, 
lequel  ne  prononçait  plus  i  Titatienne  les  ît  du  latin  vulgaire, 
a  pu  fort  bien  remplacer  t  double  par  t  simple,  je  continue 
donc  à  croire  que  ie  Fraik  n  est  rien  autre  que  le  Freins  ou 
Fréta  des  documents.  Ce  nom  de  lieu,  comme  Ta  montré 
M,  Deloclic'j  était  en  usat;e  au  xîV' siècle.  Sa  situation,  sans 
être  absolument  celle  du  lieu  de  naissance  de  Roumanille,  en 
était  très  rapprochée,  partant  très  voisine  aussi  de  Fantique  Gla* 
num. 

Uopinion  de  M.  Longnon  restera  donc  debout,  l'opinion 
que  îe  nom  k  Fraiîe  de  la  chanson  d^Asprcmonf  est  le  nom 
Fréta  ou  Freîus  des  documents  et  que  ces  dénominations 
gibignent  un  endroit  situé  dans  le  voisinage  immédiat  de  Saint- 
Remy,  Cet  endroit  comme  lieu  de  naissance  de  Girard  ne 
pourrait-il  pas  avoir  un  fond  historique  ?  L^histoire  ignore 
le  lieu  de  naissance  de  Girard  comme  celui  de  Charle magne, 
La  vie  latine  de  Girard  de  Roussillon  le  fait  naître  à  Avignon, 
éloigné  de  Satnt-Remy  de  cinq  lieues  au  plus;  on  croit  qu'il 
s'y  retira  et  qu'il  y  mourut.  Son  père  Leuthard  et  sa  mère 
Grimildis  peuvent  avoir  habité  la  Provence,  et  la  tradition 
épique  cette  fois  avoir  eu  une  base  dans  un  fait  réel.  Girard 
paraît  avoir  possédé  un  manoir  près  de  Saint-Remy.  car  Téglise 
de  Reims,  qui  avait  des  possessions  à  Saint-Remy^  les  lui  avait 
confiées  pour  être  par  lui  protégées  et  administrées  (Deloche, 

Je  soutiens  donc  contre  M*  Paul  Meyer  Topinion  reçue  et 
généralement  acceptée  dès  le  moyen  âge  :  les  trois  Gîrards 
ont  pour  hase  un  seul  personnage  historique,  Girard  gouver- 
neur du  royaume  d*Arles  et  en  même  temps  avoué  du  prieuré 
de  Saint-Remy. 

Le  lecteur  a  déjà  vu,  sans  que  je  l'aie  dît  expressément,  que 


I ,  Sainî*Rtmy  de  Provence  att  moyen  d^e,  dans  les  Mémoires  tk  F  Académie 
dgâ  insCftpHons^  u  XXXJV,  1892,  p*  94,  note. 


364  "•    SUCHIER 

ridentitt^  de  h  Fraik  avec  Saint-Remy  phiitlt*  (on  en  faveur  de 
latitre  identité  de  Monglane  avec  GlantwK  II  est  très  curieux 
que  nous  ayons  ici  deux  traditions  épiques  absolument  indè^ 
pendantes  qui  aboutissent  A  un  seul  endroit.  S*il  était  permis 
de  supposer  que  Leutliard  iivait  eu  un  niiinoir  appelé  Monglane 
perpétuant  le  nom  de  Tancienne  ville  Glanum  et  situé  près  du 
lieu  appelé  Frète  ou  le  Fraite\  tout  s'eîtpliqueraît  à  mer- 
veille. Quoi  qu'il  en  soit,  on  ne  saurait  nier  que  l'une  de  ces 
coïncidences  est  un  fort  appui  de  Tautre. 

D'autre  part  il  paraît  évident  que  le  chAteau  de  Roussi  lion, 
situé  près  de  Pothières  et,  suivant  la  chanson  provençale, 
possédé  en  alîeu  par  le  père  de  Girard,  manque  de  toute  base 
historique.  Ce  château  n'a  jamais  existé.  Il  y  a  des  ruines 
antiques  sur  le  mont  Laçois,  et  comme  Girard  devait  être  très 
populaire  à  Pothières  et  dans  les  environs,  il  s'est  formé  là  une 
tradiiiun  locale  prenant  ks  ruines  sur  le  mont  Laçois  pour  les 
débris  du  château  du  pîeux  fondateur  de  Pothières.  Quant  au 
nom  Roussillony  je  n'ai  rien  à  ajouter  à  ce  qu'en  dit  M.  Paul 
Meyer,  p.  xxxi. 

IV.  —  Aimer  le  Chaitif 

Suivant  une  théorie  de  G,  Paris  la  formation  des  familles 
épiques  est  souvent  due  k  la  réunion  de  héros  isolés  en  un 
groupe*  Tel  personnage  peut  avoir  existé  à  Tétat  isolé,  avant 
d'avoir  été  introduit  dans  la  famille  où  nous  le  trouvons*  Ainsi 
un  frère  de  Guillaume,  Garin  d'AnseÛne,  se  rencontre  à  l'état 
isolé  dans  la  Ctmnsmi  des  Saxifus^  un  autre  frère,  Hernaut  de 
Gironde,  dans  Girard  de  Roussilhn.  Quelquefois  un  même  per- 
sonnage a^  dans  différentes  chansons,  une  position  différente. 
Ainsi  Hernaut  de  Gironde,  dans  les  cliansons  du  cycle  de 
Guillaume,  est  fils  d'Aïmeri  de  Narbonnc»  dans  Gaufrty  il  est 
fils  de  Doon  de  Mayence,  et  dans  Maugis  beau-père  de  Mau- 
gis* 

Je  signale  ici  une  curieuse  coïncidence  que  j'ignorais  lors 
de  l'impression  de  mon  édition  des  Narbonnats.  Dans  les  Nar- 


*  I.  Le  nom  vulgaire  ne  se  renoontrerait-îl   plus  dins  les  chance  <ie  la 

contrée  dy  xin*  siècle  ou  du  xiv*  ? 


LES   CHANSONS   DE   GUILLAUME   d'oRANGE  365 

bannaiSy  Bueve  de  Comarchis,  frère  de  Guillaume,  devient  le 
gendre  et  le  successeur  d'Yon  roi  de  Gascogne,  et  le  païen 
Clargis,  baptisé  sans  changer  de  nom,  devient  duc  d'Auvergne. 
Dans  la  chanson  à^Aspremont  (éd.  Guessard  i8,  54-71),  il  est 
question  de  deux  neveux  de  Girard  do  Fraite,  fils  de.  son  frère 
Milon,  appelés  l'un  Bu eson  ouBuevon,  TautreClairon  (cas  sujet 
Claires)  ;  celui-là  est  appelé  de  Gascogne,  celui-ci  d'Auvergne. 
Comme  la  chanson  d'Aspremont  est  antérieure  aux  NarbonnaiSy 
je  penche  à  croire  que  les  données  de  celle-là  ont  plus  de  droit 
à  être  regardées  comme  primitives,  et  que  les  données  de  celle- 
ci  en  sont  imitées. 

Pour  l'un  des  frères  de  Guillaume  je  crois  pouvoir  démon- 
trer qu'il  a  existé  non  seulement  dans  la  tradition  épique, 
mais  encore  dans  la  réalité  historique,  avant  qu'on  l'ait  ratta- 
ché à  la  famille  d'Aimeri.  C'est  Aïmer  le  Chaitif. 

Dans  les  Narbonnais  nous  apprenons  l'adoubement  d' Aïmer 
par  la  main  de  Charlemagne.  En  vain  l'empereur  Tinvite-t-il  à 
rester  auprès  de  lui  et  à  le  servir  comme  l'un  'de  ses  grands 
feudataires.  Aïmer  refuse.  Il  fait  vœu  devant  Dieu  et  les 
hommes  qu'aussitôt  sorti  de  la  terre  des  chrétiens  il  ne  cou- 
chera plus  jamais  sous  un  toit. 

Chevron  ne  late  n'en  sor  moi  por  oré, 

Ne  ne  jerrai  desoz  fête  levé, 

Se  Sarrazin  ne  m'ont  enprisoné  ; 

Mes  an  niontaignes  o  en  bois  o  en  pre 

Lez  les  rivières  ferai  tandre  mon  tre   (2918  ss.) 

Et  cette  téméraire  promesse,  Aïmer  la  tiendra  à  la  lettre.  Au 
siège  de  Narbonne,  quand  il  arrive  avec  ses  hommes,  ceux-ci 
n'ont  pas  le  inême  air  que  ceux  des  autres  conducteurs  de 
troupes. 

...  Lor  escu  sont  noir  et  anfumé, 

De  ledes  armes  sont  trestuit  adobé, 

Si  en  resarablent  plus  fier  et  desreé 

Qpe  cil  qui  sont  si  richement  armé.  (6823  ss.) 

Aïmer  dit  à  Hermanjart,  qui  voit  arriver  cette  troupe  noire  : 

Ci  voi  venir  le  gentil  bacheier 

Que  Tan  apele  le  Chetif  Aymer. 

Ainz  ne  doingna  dedanz  vile  osteler; 

Tozjorz  se  paine  de  Sarrazins  grever.  (5926  ss.) 


366  H.    SUCHIER 

De  même  dans  Aliscans  ' ,  Aimer  n'est  pas  avec  son  père  à 
Paris  : 

En  Espaîgnt  est  entre  les  Sarrasins, 

U  se  comba!  et  par  nuit  et  par  dis.  (3602- j.) 

Quand  il  arrive  ù  Orange,  Guillaume  veut  le  loger  dans 
son  pakb;  mais  Aimer  refuse  d  y  entrer  : 

Defors  les  autres  (îestresort  murs)  fist  sa  gcm  osieler,  (4158) 

Et  qyand  Yost  se  forme  pour  la  bataille,  ses  guerriers  ont  le 
même  air  sauvage  *^ue  dans  les  Narhttnms  i 

(H)  n'ont  escu  ne  soit  frais  et  crolsis. 

Leur  hauberc  sont  enroïlIi*Ss  et  pris, 

Leur  elmes  quas,  nVuretu  pas  brans  forbïs» 

Attis  est  cascuns  de  sâiu  becé  noircis.  (4916  ss.) 

Presque  chaque  fois  qu*il  est  question  d'Aïmer,  il  se  montre 
avec  ces  mêmes  traits  héroïques. 

Dans  le  Courmtmuent  de  Lmis  Guillaume  renseigne  Corsolt 
sur  sa  personne,  ènumérani  ses  frères.  It  se  contente  de  les 
nommer,  sauf  pour  Aimer  au  nom  duquel  il  ajoute  quatre  vers 
peignant  ses  qualités  héroïques  : 

Qui  n'entre  en  loge  ne  (este  clievroné, 

Ainz  est  iot\orz  aL  vent  et  a  Tore 

Et  si  deirenche  Sarrajîins  et  Esc!ers, 

La  vostre  geni  ne  puci  il  poini  amer.  (827  ss,) 

Et  dans  Aimeri  dt  Narhnne  le  poète  lui  consacre  ces  vers  : 

[II]  ne  vûst  oaques  gésir,  tant  corn  fu  vh^ 

En  lor  entic  ne  en  pjliîs  voiii, 

Ain^guermij  sor  Sarraiins  toz  dis«  (459]  S$.) 

C'est  une  des  plus  belles  figures  de  Tépopée  française,  œ 
héros  franc  qui,  dès  son  adoubement,  fait  vœu  de  ne  jamais 
coucher  sous  un  toit  et  de  sacharner  contre  les  infidèles  sans 
trêve  ni   repos*  Tandis  que  les    autres  troupes    portent  des 


i .  Je  die  Aîùtûm  d *a près  Tédit ion  que  trois  de  mes  élèves,  MM.Wienbcck, 
Harînackc,  Hasch,  publient  â  Halle  et  dont  Timpression  est  presque  i*;nni- 
née.  t>*aillcars  cette  cditioti  conserve  la  nu nit; rotation  des  vers  de  rédition 
Guessard. 


LES  CHANSONS   DE  GUILLAUME    D*ORANGE  367 

armes  neuves  et  reluisantes^  les  guerriers  d'Aimer  sont  noircis 
de  rouille  ei  de  sang. 

Or,  ce  grandiose  personnage  n'est  pas  un  produit  de  l'imagi- 
nât ion  ;  c'est  un  homme  réel  :  c'est  Hadhemar  comte  de  Nar- 
bonne,  le  même  qui  combattait  à  côté  de  Guillaume  dans 
rexpédiiion  de  Barcelone  en  801. 

J  espère  que  Ton  ne  m'objectera  pas  les  soi-disant  «  lois 
phonétiques  ».  Les  changements  phonétiques  n'étaient  plus  les 
mêmes  dans  la  période  franque  que  dans  la  période  romaine, 
qui  l'avait  précédée.  Un  nom  H  ad  hem  a  rus  mtroduit  du 
temps  de  Dagoburt  ou  de  Pépin  ne  donne  plus  k*  même  résul- 
tat  qu'un  Hadhemarus  (plutôt  Hathumerus)  introduit  du 
temps  de  Vcrcingétorix,  Je  renvoie  à  ce  que  j'ai  dit  plus  haut 
(p,  362)  pour  répondre  aux  objections  dt*  M.  Paul  Meyer. 

En  8or  le  Sarrasin  Zaddo,  gouverneur  de  Barcelones  avance 
jusqu*aux  environs  de  Narbonne,  où  il  est  fait  prisonnier.  On 
prépare  une  expédition  contre  Barcelone  avec  trois  armées.  La 
ville  est  assiégée  ;  les  habitants  envoient  à  Cordoue  pour  avoir 
du  secours.  Le  roi  des  Sarrasins  fait  partir  aussitôt  une  armée, 
qui  parvient  jusqu'à  Saragossc.  Là  ils  apprennent  qu'une  armée 
franque  leur  barre  le  chemin.  C'était  Guillaume,  premier  porte- 
drapeau,  Hadhemar  et  avec  eux  une  forte  troupe  : 

Vcnicntîbus  porro  his  qui  missi  fuerani  CaesaraugusEani,  latum  est  cis  de 
eiercitti  in  via  sibi  obviam  eonstiEuio.  Erat  enim  M  Wilîelmus  primas  signi- 
kf,  Hatihemarus  et  cum  eîs  valîdum  iUixilium  {A slrtmom ^ ^  c^p.  tj,  dans 
Pçrtjr,  MûtnttHmla  G^rttmttijt'  hhfùrica^  IL  p.  6t2|  32). 

Après  la  paix  de  Barcelone  les  Francs  y  laissent  le  comte 
Bera  comme  défenseur  de  la  ville. 

Le  comte  Hadhemar  reparaît  à  plusieurs  reprises  dans  les 
annales  du  règne  de  Charlemagne,  En  800  il  est  envoyé  par 
Louis  t?n  mission  auprès  de  Charlemagne^  qui  se  trouve  a 
Rouen.  Dans  les  deux  expéditions  de  809  et  de  8io  contre 
Tortose^  il  est  Tun  des  chefs  de  l'armée  franque  '. 

En  809,  Louis  divise  ses  troupes  en  deux  armées,  dont  lui- 


K  H  serait  ton  curieux  que  Aimer  dans  les  chansons  eût  été  qualiiîè  de 
seigneur  de  Tortose,  commelepréitîtîdail  ?^u\m  Paris  (Hisî.  îiit.,  XXIÎ,  49B), 
Cctaît  cep«ndanî  une  erreur  :  die  a  été  rectifiée  par  M.  Sielc  <C/Ww  e/r> 
Chsnwtt  Giiibert  tPAtuiremi^,  Marbourg,  1891,  p,  a 3). 


ifft  H<    SOCHIER 

même  conduit  la  plus  grande  contre  Tortose,  tandis  qu'il 
envoie  Isembard,  Hademar,  Bera,  Burell  avec  les  autres,  le 
plus  vite  possible,  vers  Tintérieur,  a6n  qu'ils  passent  TÊbre 
et  que,  pendant  que  lui-même  attire  rennemi  du  côté  de 
Tortose,  ils  Tattaquent  subitement  par  derrière  ou  du  moins 
qu*ils  l*effrayent  en  dévastant  la  contrée.  Par  conséquent, 
pendant  que  le  roi  marche  sur  Tortose,  les  dits  guerriers  se 
rendent  dans  la  région  de  l* fibre  supérieur,  marchant  la  nuit  et 
se  cachant  le  jour  dans  les  forêts,  jusqu'à  ce  qu'ils  passent  à  la 
nage  le  Cinca  et  rÈbre,  Ils  firent  ainsi  six  jours  de  marche;  le 
septième  ils  passèrent  les  rivières, 

Intcrea  in  loco,  eu  jus  est  vocabulum  Sanctae  Col  unibae»dî\nsit  copias  suas 
in  duo,  quam  maximam  quldem  paneiTT  stcum  contra  Torîosam  duccns» 
pon'O  fscmbarduTTi,  Hadem^rum,  Beram,  Burell um  cum  rdi<|yb  tïxpediiis- 
fime  ad  supcriora  dirigeas,  ut  Hibero  flumine  transito,  àum  hostes  jd  *e 
dcfigcrentur,  ab  istis  insidiis  *tx  inproviso  aggredcremur,  aut  ccrie  lurbau 
regtonc  in  pavorem  solverentur,  Igitur  rcgc  1  ortcisam  tendcnte  mcmorati  vîri 
tamdîu  supefii-îres  Hiberî  partcrs,  noctibus  eumc$  et  die  bus  silvarum  losira 
sectantes,  obambiilaverunc ,  usquequo  Cîngam  et  Hiberum  natatido  pariter 
transierum.  In  quo  itincrtt  s^x  diés  transige nces,  scptima  transmi:arunt 
{Asirmom.^  cap,  14,  dans  Ptru,  Mon.^  Il,  p.  61  j,  |o  ss*). 

En  8ro,  les  hommes  d'Hademar,  de  Bera  et  des  autres  chefs,^ 
après  une  marche  de  trois  joors,  prives  de  tentes  et  n'ayant 
d^autre  toit  que  le  ciel,  n'osant  faire  du  feu  pour  ne  pas  être 
trahis  par  la  fumée,  se  cachant  le  jour  dans  les  forêts,  employant 
la  nuit  à  des  marches  forcées,  atteignent  le  quatrième  jour 
rËbre,  qu'ils  passent  en  bateaux,  sauf  la  cavalerie  qui  le  pa 
à  la  nage  : 

At  vero  hnq\x\  ad  opus  supradictam  sum  députât i,  Hadcmarus  scilictt* 
Btfra  Cl  reliqui,  tnuiîi  dierum  em«iso  itinere  —  erani  enim  sine  sagTiiatjbi» 
^  coclo  pro  tecto  ut  entes*  foco,  ne  fumo  deprrhctideri^ntur,  renunlianteSi^j 
si] vis  se  die  occuleaies,  i^oac  quantum  posse  dabacur  iter  agentes,  qu 
die  Hibero  conpactis  navibus  ipsi  qnidcm  ininspûâitif  equos  autem  natatui 
cominisenim  Çiitrmtom.^  c^p    1^  dans  Pcrt-c,  Mon,,  I,  p.  614,  yi). 

Cette  méthode  de  faire  la  guerre  est  à  peu  près  celle  que  Ton 
nomme  aujourd'hui  la  guérilla,  la  même  que  dernièrement  les 
Boers  ont  employée  contre  les  Anglais.  Je  cite  le  premier  jour- 
nal qui  me  tombe  sous  la  main,  la  Saaleidtung,  de  Halle»  du 
iS  juin  1902. 


LES   CHANSONS   DE  GUILLAUME  d'oRANGE  369 

«  Ces  dernières  poursuites  privèrent  les  Boers  de  toutes  leurs  provisions. 
Dewet  ne  couchait  jamais  dans  un  édifice,  craignant  d'être  fait  prisonnier. 
I,e$  détachements  ne  dormaient  jamais  au  même  endroit  deux  nuits  de 
suite.  Ils  tâchaient  de  la  sorte  d'empêcher  de  la  part  des  troupes  anglaises 
les  terribles  surprises  nocturnes.  » 

Il  faut  que  les  récits  des  exploits  d'Aïmer  aient  fait  une 
forte  impression  sur  les  iimes  des  contemporains.  Plus  d'une 
fois  il  avait  passé  une  série  de  jours  en  pays  ennemi,  n'osant 
faire  du  feu,  couchant  le  jour  en  plein  air,  coelo  pro  tecto  titenSy 
employant  les  nuits  à  faire  des  marches  forcées.  Tel  apparais- 
sait Hadhemar  aux  Français  du  ix*  siècle,  tel  apparaît  encore 
Aimer  dans  les  chansons  du  xu*.  Seulement  la  tradition  a 
grossi  les  proportions.  Aïmer  fait  vœu  de  ne  jamais  coucher 
sous  un  toit;  il  emploie  sa  vie  entière  à  verser  le  sang  des 
infidèles.  De  même  qu'ils  sont  décrits  dans  les  chansons  de 
geste,  les  armes  toutes  couvertes  de  rouille  et  de  sang,  de 
même  devait  être  l'aspect  qu'oflfraient  en  réalité  ce  chef  intré- 
pide et  ses  braves  guerriers. 

Reste  à  mentionner  un  trait  qui  regarde  l'Hadhemar  de 
l'histoire  :  il  était  en  812  comte  de  Narbonne.  M.  Emile 
Cauvet  en  a  donné  la  preuve  dans  son  Étude  historique  sur 
ritablissetnent  des  Espagnols  dans  la  Septimanie  aux  VIII^  et 
/X*  siècles  {Bulletin  de  la  Commission  archéologique  et  littéraire  de 
r arrondissement  de  Narbonne ^  t.  I,  Narbonne,  1877),  p.  512- 
315.  Nous  avons  un  document  du  2  avril  812  qui  énumcrc 
les  noms  de  huit  comtes,  un  autre  du  10  février  816  qui 
nomme  les  sept  comtés  correspondants  (auxquels  il  faut  ajou- 
ter Besalù),  un  troisième  du  11  septembre  (et  non  pas  du 
30  août)  834,  qui  montre  à  l'évidence  qu'Adhemar  avait,  été 
comte  de  Narbonne  *.  Voici  les  noms  des  huit  comtes  en 
question  :  Bera  de  Barcelone,  Gaucelin  de  Roussillon,  Giscla- 
fred  de  drcassonne,  Odilo  de  Besalii  (comp.  Hist,  gén.  de 
Lang.y  1.933),  Ermengar  d'Ampurias,  Adhemar  de  Narbonne, 


I.  Ces  documents  sont  imprimés  dans  V Histoire  générale  de  hinguedoc, 
t.  II,  Preuves^  col.  73.  109.  185.  Le  troisième  (texte  et  fac-similé)  se  trouve 
aussi  dans  le  ^(///^/tn...  </t'  Narbonne,  I,  p.  112.  La  littérature  ayant  rapport 
au  premier  et  au  second  est  relevée  par  Sickel,  Àcta  rei^um,  Kar.  241,  ïjui. 
79,  et  par  Bôhmcr-Mûhlbacher,  Rcgesta  imperii,  I,  n^  .47(1  (456),  608  (588). 

mia,  XXXII  24 


370  H.    SUCHIER 

Laibulf  de  Béziers,  Erlin  de  Gerona.  Erlin  est  peut-être  pour 
Erluin  ;  autrement  on  pourrait  penser  à  THernaut  de  Gironde 
des  chamons  de  geste. 

La  portée  de  cette  circonstance  saute  aux  yeux.  Guillaume  a 
combattu  prés  de  Narboiitie,  Aïmer  était  comte  de  Narbonne. 
Ces  rapports  avec  la  ville  de  Narbonne  ont  fini  par  faire  de  ces 
deux  héros  des  Narbonnais.  Ils  avaient  combattu  côte  à  côte  en 
Espagne  :  de  frères  d'armes  on  en  a  fait  de  véritables  frères'. 

Aïmer  a  le  surnom  de  C/jaitif  pour  avoir  été  prisonnier  des 
Sarrasins;  mais  la  chanson  qui  nous  racontait  sa  captivité  est 
perdue-  Il  va  sans  dire  que  des  captivités  immédiatement 
suivies  de  la  délivrance,  telles  qu  on  en  trouve  dans  Tépopée, 
ne  comptent  pas. 

Suivant  la  Morî  Ainteri  (v.  1384)  Aïmer  est  tombé  en 
Espagne  contre  les  Sarrasins.  Un  Hadumar,  autre  que  le  comte 
de  Narbonne,  était  comte  de  Gènes  et  tomba  en  8oé  contre 
les  Sarrasins  de  la  Corse,  Il  est  possible  querépopée  ait  con- 
fondu les  deux  homonymes  et  attribué  à  THadhemar  de  Nar- 
bonne la  mort  de  celui  de  Gènes.  Pourtant,  Thistoire  ne  rap- 
portant rien  sur  ia  mort  du  premier^  la  tradition  pourrait  tout 
de  même  avoir  raison,  ! 

Au  XII*  siècle  on  a  composé  une  chanson  racontant  comment 
Aïmer  enleva  à  un  païen  qui  sVtait  emparé  de  Fmkf,  appelé 
Rogon  ou  Drogon,  sa  femme,  la  belle  Soramonde,  qu'Aimer 
fit  baptiser  et  épousa.  Cette  chanson  romanesque  est  perdue  ^ 
nous  en  connaissons  le  contenu  par  des  allusions  plus  ou  moins 
vagues  (dans  Aliscans^  les  Karbonnais^  Aimeri  (k  Narhninr^  la 
Chronique  d'Aubri  de  Trois- Fontaines,  etc.).  Ces  allusions 
placent  d*une  commune  voix  Venice  en  Espagne,  Je  suppose' 
qu'il  s'agît  en  effet  de  Benisa,  ville  espagnole  située  près  de 
Dénia  et  ayant  appartenu  aux  Maures  jusqu'en  1245.  Au 
xn^  siècle  on  a  confondu  ce  Venice  avec  la  ville  italienne  du 


I.  II  est  probable  que  Garin  d*Aoscûne,  fiénc  de  Guilbumc,  est  aussi  tui 
personnage  hisiorîqut*  Jl  dcmeun-  aux  environs  de  Narbonne  :  Ait^cûne^ 
appelé  au  x*  siècle  Àm;eduna,  est  j'Oupïa  aaud  (Hérault).  Uarchevèquc 
Aimeri  de  Narbonne  ftt  don  de  cet  alku,  en  9^8,  lu  chapitre  de  Samt*Pâiit« 
Voir  Tabbé  Sabanhés,  Etudr  hhtorique  sur  f^hhayf  Je  Smnt-Ptmî  de  Nar- 
^rir,  Narbonûc,  iS^j,  p.  171,  et  RGmania,  l\\  p.  191. 


LES   CHANSONS   DE   GUILLAUME  D  ORANGE  37 1 

même  nom  ',  et  ainsi  s'explique  le  nom  Saint-Marc  de  Venice 
(Fenis)  qu'on  trouve  en  plusieurs  passages  à'Aliscans  (4179, 
4920,  var.  du  v.  2602).  Par  contre,  le  cri  de  guerre  d'Aïmer, 
Venice  la gastui  {Aliscans  5132'),  peut  être  dû  à  la  vieille  tradi- 
tion. 

V.  —  LES  TROIS  GESTES  d' APRÈS  LA  MORT  AIMERl  DE  NARBONNE 

M.  Couraye  du  Parc  a  publié  la  chanson  de  la  Mort  Ainteri 
de  Narbonne  à  Paris,  en  1884*.  Cest  une  chanson  d'un  carac- 
tère assez  archaïque,  mais  très  personnel  en  même  temps,  comme 
je  le  ferai  voir. 

On  sait  que  l'épopée  populaire  est  censée  former  un  grand 
ensemble  dont  les  branches  particulières  ne  sont  pas  toujours 
nettement  séparées  de  ce  qui  précède  et  de  ce  qui  suit.  L'auteur 
de  la  Mort  Aimeri  place  la  sienne  tout  à  la  fin  du  grand  courant 
épique  : 

Seignor,  oez,  qui  chançon  demandez  1 

Soiez  en  pes,  et  si  m'oez  conter 

D*une  aventure,  onques  ne  fu  sa  per. 

Cornent  les  jestes  vindrent  a  décliner, 

Les  anciênes  dont  Ten  soloit  parler. 


1.  On  sait  que  le  français  du  moyen  âge  appelait  la  ville  des  lagunes 
Venice  et  que  cette  forme  s'est  conservée  en  Angleterre. 

2.  Je  propose  en  note  quelques  corrections  au  texte  imprimé.  Je  laisse  de 
côté  tout  ce  qui  regarde  le  choixdes  leçons  et  la  ponctuation.  133  un]  lisez  une 
— 159  ce  vers  est  identique  à  un  vers  de  la  chanson  du  comte  Rainaut  —  242 
lisez  Aspor^d'Ossau  —  304  lisez  vohes  —  311  Un]  lisez  Une  —  450  points  — 
469.  C]  mil  cp.  781  —  530  mes  —  562  espie  —  641  .LX.]  .xxxx.  cp.  621  et 
6s8  —  673  supprimez  Li  et  lisez  Rois  Galafers  cp.  798.  956  —  794  Tante  — 
1027  Qui  Pot  —  1074  Pent  Va  —  1 107  mènent]  muei'ent  —  1 228  [/]  sofit  — 
1230 .iiu.].  ni.  —  1236  .XXII.]  .xiiii.  cp.  1228-123 1  —  13 16  seij^nor,  peut-être 
à  corriger  en  saignas  (sanglent)  —  1320  est]  es—  1396  etc.  Oieneliu  —  1478 
[i]est —  1589  Pristretit  iluec  milhorjois  —  160S  supprimez  Biax  —  1607  et 
l6c&nostre  —  i6i5.xin.]  .xmi.  —  1637 /«  —  5168  de  ramananderie^phn^ 
tatioQ  d'amandiers).  Ce  mot  se  retrouve  dans  Brisebarre  de  Douai,  voir  Ch. 
Bonnier  dans  Otia  Merseiana^  III,  Liverpool  1903,  p.  34.  —  1674  Et  arri- 
vèrent —  1687  Li  amiraJs  monte  de  maintenant  —  1797  ne  la]  la  ne  —  1874  et] 


372  H.    SUCHIER 

Il  répète  k  même  pensée  à  la  fin  du  poème  : 

El  l'esioîre  est  d  endroit  aconpiie. 
Damedcx^  gart  toi  cds  qui  Tont  oîe 
Et  mot  avuec  qui  la  vos  ai  fcnie. 
Ne  troverez  qui  avant  viîs  en  die, 

S* il  ne  fausse  rcsioîre* 

Cest  donc  la  dernière  chanson,  non  par  k  date  de  k  com* 
position  (je  la  croîs  composée  entre  1 150  et  1170),  mais  suivant 
la  date  des  événements  racontés;  c'est  h  fin  du  %^aste  ensemble 
que  nous  appelons  Tépopée,  La  ^^uestion,  qui  divise  encore  les 
savants,  de  savoir  si  le  cycle  des  croisades  doit  être  compris  dans 
Tépopée,  est  résolue  dans  les  passages  cités  en  sens  négatif. 

De  la  Mort  Aimcri  il  nous  reste  deux  versions  :  k  plus 
récente  dans  deux  manuscrits  (C  et  D)  du  milieu  du  xiii'=  siècle^ 
la  plus  ancienne  dans  deux  manuscrits  {A  et  B)  écrits  vers 
1300,  Nous  avons  en  outre  deux  fragments  de  manuscrits,  se 
rapprochant  Tun  et  Tautre  du  texte  de  D  :  celui  trouvé  à  Dus- 
seldorf  (xïv^  siècle)  a  été  mis  à  profit  par  M,  Couraye  du  Parc; 
il  embrasse^  à  quelques  lacunes  près»  les  vers  511-791;  l'autre, 
écrit  pendant  la  seconde  moitié  du  xni*  siècle  et  coté  Nouv, 
acquis,  franc.  6298  à  k  Bibliothèque  Nationale,  contient  les  vers 
2324-2757. 

Avant  d'aborder  quelques  particularités  de  la  chanson  qui 
me  semblent  remarqiiableSj  je  relève  ici  un  passage  fort  curieux, 
mais  un  peu  obscur  où  le  poète  fait  une  division  de  Tépopée 
en  trois  gestes  antérieurement  au  célèbre  début  de  Girard  de 


û —  1878  Aguiere —  1999  U\  Les—  201755.  La  rime  csî  en  u€^i  jW- 
gwiilenfj  htutilîtt  tmeilk^  s'eslurngftf  —  lioQ gradti]  mercki  —  2211  suppri- 
tïici  iî  —  2249  tiser  ImlUtr  —  2267  Jamajts  —  2J96  Aupmirt  ^  ^\J^i  suppri- 
me* Ai  —  2461  roche]  mmtaignt  —  2704  sôr]  son  —  2756  tmmt  —  2744  cl 
275 î  *XX*]  .X.  cp.  2182  et  2756  —  277$  remi's  —  2848  hmm  —  2908  stra 
m,  T,  sfFvif  ^  2954  Asex  —  29 Î9  soUk'icp,  5142  —  29S0  ^^i^  —  %22'j  of] 
*ï  —  ÎI38  n>tt\  f$fn  —  VÎ41  supprimez  k  premier  et  —  '5288  mti]  oent  — 
HJ4  '«]  w^  —  Ijai  anfo/if,  aujourd'liuî  anchùis  —  5 $59  Qui] Que  ~  }lSoA\ 
hr  it>rfit\  A  la  fôrési  cp.  J651  —  3471  Va}  ht  —  3481  nt  %*ùis]  rien  as  — 
J511  retnà  —  5658  atuê  —  5857  enioise  —  4074  aprmhitr  —  41  ^4  Giir,  — 
En  comp;tfint  le  songe  d^\i^leri  avec  le  récit  de  b  chanson,  je  crois constauf  ^ 
<|yç  certaines  parties  de  celle-ci  oni  été  mutilées  par  un  rtiiiMnieur> 


LES   CHANSONS  DE  GUILLAUME   D  ORANGE  373 

Vienne.  Voici  ce  passage  constitué  à  nouveau  d'après  les  manu- 
scrits '. 

XCVIII      Oés,  seignor!  Que  Diex  vous  beneïe, 

Li  glorieux,  li  fîlz  sainte  Marie  ! 
3055      Nus  hons  ne  puet  chançon  de  geste  dire, 

Qjae  il  ne  mente,  la  ou  li  vers  define, 

As  mos  drecier  et  a  taillier  la  rime. 
3057*      [Mes  ce  qu'espont  l'escriture  Latine], 

Ce  est  bien  voirs  ;  gramaire  le  devise. 

Vies  hons  la  fist  de  Tanciëne  vie  : 
3060      Hués  ot  non,  si  la  mist  en  un  livre 

Et  seela  el  moustier  saint  Denise, 

La  ou  les  gestes  de  France  sont  escriptes. 

Or  est  bien  drois  que  vérité  vous  die. 

Qui  eles  furent  et  de  quel  baronie. 
3065      Charles  li  rois  a  la  barbe  flourie 

De  Jursalem  aporta  les  reliques 

De  cel  saint  fust  ou  Diex  souffri  martire 

Et  la  corone,  qu'il  ot  el  chief,  d'espines 

Et  les  sainz  clos  et  la  sainte  chemise, 
3070      Qp*emprés  sa  char  avoit  sainte  Marie 

Qpant  ele  fu  de  son  chier  fil  délivre. 

Ce  aporta  en  France  la  garnie. 
Ce  fu  une  des  gestes. 

XQX      L'autre  si  fu  du  fort  roi  Charle  Maigne, 
3075      Cel  qui  conquist  Baiuiere  et  Alemaigne, 
Basde,  Navarre  et  Poitau  et  Bretaigne 
Et  Normendie  et  Anjou  et  le  Maine, 
Oncle  Rollant,  qui  fu  mors  en  Espaigne 
En  la  bataille  fiere. 


3056  B  que  il,  A  quil  —  30S7»  manque  —  3059  Vies]  AB  Mes  —  3065 
Charles]  A  k',  B  k'  F  —  3066  A  jursalem ,  B  lerl'm. 
3067  Diex]  AB  il  —  3074  AB  k'im'—  3078  AB  Roll'. 

I.  Manuscrits  :  A,  à  Londres,  Musée  britannique,  Old  royal  20  D  XI 
f.  256^'  ;  B,  à  Paris,  Bibliothèque  nationale,  fr.  24370,  f.  23^;  C,  Musée  britan- 
nique, Oid  royal  20  B  XIX,  f.  185*;  D,  Musée  britannique,  Harl.  1321 
f.  211  (autrefois  204)*>.  Les  fragments  I>  et  Di  ne  correspondent  pas  au  pas- 
sage en  question.  Je  dois  à  M.  Max  Fœrster,  professeur  d'anglais  à  Wurtz- 
bourg,  la  transcription  des  textes  de  Londres. 


374  "•    SUCHIER 

C      La  tierce  fu  dant  Aymeri  le  riche. 
3081       La  soie  geste  fu  la  plus  seignourie. 

Il  ot  .vii.  filz,  bons  chevaliers  nobiles  : 

Cresiiênté  essaucierent  et  tindrent. 

Otes  li  rois,  H  sires  d'Yspolite, 
3085       Icil  fu  oncles  aus  chevaliers  nobiles; 

Moines  devint  dedenz  sa  saine  vie, 

Si  en  fu  s  anie  et  sauvée  et  garie, 

En  paradis  coronnee  et  florie. 

Des  or  coniencc  bonc  chançons  nobile, 
3090      Si  corn  les  dames  de  terre  Femcnie 

Sont  en  prison  dedenz  Esclabarie  >. 

Le  vers  que  j'ai  intercalé  après  le  vers  3037  est  nécessaire  au 
contexte.  Autrement  on  ne  comprendrait  pas  ce  qui  suit,  et  le 
a  du  vers  3039  resterait  sans  relation.  —  Gramaire  (v.  3058) 


3083-85  manquent  dans  B  —  3084  AB  Li  rois  oies. 


I .  Les  manuscrits  C  et  D  ont  remplacé  ce  passage  par  un  autre  tout  à  fai  t 
insignifiant  que  j'imprime  en  note,  pour  compléter  le  dossier. 

XCVIII-C  5055  Ocz,  seigneur,  que  Dex  vos  bencïc, 

3054  Li  gloriëus,  li  filz  sainte  Marie! 

a  Geste  chançôn  est  de  grant  seignorie, 

b  De  bone  estoire  et  de  grant  baronie, 

c  C'est  del  paraje  de  la  jeste  enforcie 

d  Ht  del  plus  iier  qui  onques  fust  en  vie: 

e  Coni  Aymeris  a  la  barbe  florie 

f  Si  fu  ocis  dcsoz  Hsdabarie, 

g  1^0  l'ocistront  la  pute  jent  haïe. 

Il  Ainz  tex  doniajes  en  France  la  garnie 

i  Ne  fu  por  home  qui  onques  perdist  vie 

j  Puis  le  tens  Charle  a  la  barbe  florie 

k  Et  puis  Rollant  a  la  chiere  hardie. 

5081  La  soe  jeste  (u  tozjorz  esbaudie  ; 

3085  Crestiënté  fu  par  lui  essaude. 

«  a  Moût  Tama  Dex  li  fll%  sainte  Marie, 

$087  Qjic  s'ame  en  fu  et  sauvée  et  garie, 

5087  En  paradis  coroncc  et  florie. 

3089  Hui  mes  cOmencc  la  chançon  seignorie, 

a  Bone.  bien  fcte,  de  grant  chevalerie, 

b  Q^'onques  par  home  ne  fu  meillor  oïe. 

505  5  D  Oiez  —  5054  b  C  bone.  D  grant  —  d  D  do  plus  trcsfler  —  e  CD  Ay\  D 
forie  —  f  C  si,  D  com  ;  I)  Aclabarie  —  go  manque  dans  C  —  j  C 1*  tens  k',  D  le  Uns 
ckr  —  k  C  lioir,  l)  Roi'  —  5085  C  lui,  D  aus  —  $089  a  D  bone  et  —  b  qu'onquet] 
C  que,  D onques 


LES  CHANSONS   DE  GUIT-LAUME   D  ORANGE  37  J 

signifie  la  langue  ladne,  comme  chez  Philippe  de  Thaon  et 
ailleurs. 

Laissant  de  coté  les  vers  banals  de  C  i),  nous  allons  consi- 
dérer le  texte  primitif. 

Hues,  qui  y  est  nommé,  a  été  pris  par  plusieurs  savants  et 
par  l'éditeur  même  pour  l auteur,  réel  ou  prétendu,  de  la  chan- 
son de  geste.  On  n'arrive  pourtant  pas  à  ce  sens  sans  forcer  la 
signification  des  mots.  Une  autre  explication  que  je  vais  sou- 
mettre au  lecteur  me  semble  de  toute  évidence.  Je  crois  que  ce 
Hues  n'est  autre  que  rhisiorien  Hugues,  moine  à  Fleury.  On 
lui  doit  plusieurs  chroniques  latines^  parmi  lesquelles  Touvrage 
Moiknunum  rtgum  Fmmorum  acius  dédié  à  l'impératrice 
Mathilde,  par  conséquent  écrit  après  1114.  La  première  laisse 
du  passage  cité  est  la  traduction  française  d'une  phrase  qui  se 
trouve  au  commencement  de  Touvrage  de  Hugues  de  Fleury, 
Voici  ce  commencement  après  le  prologue  que  je  supprime  : 

Karotus  igitur  Cal  vu  s,  Liigdovici  Pii  imperatorîs  filius,  post  beHum'Foma- 
nidiim  Francomm  obtinuit  regnum  anno  iticarracbtiis  divinae  84a,  et  régna- 
vit  ûnnh  ferme  58.  Qui  cum  csseï  vir  gloriosus  atque  tnagnanimus  valdc, 
edihcavit  in  regno  suo  Conpcndium  villâni,  et  eani  Karnopolim  suo  de 
nomine  vocari  precepii;  quam  etbm  prcciosa  dorniDÏ  nostri  lesus  Christî 
simbtt^  nobiliter  insignivit.  Obiulil  eiiam  seretiissimus  rex  iSLuao  martiri 
Dionisio  imum  Je  dans  quibus  in  cruce  fuit  adfixum  corpus  dominidum  et 
qiiandam  Hgni  samtiif  amis  port  i  une  uhfn  eu  m  quadam  p^irtiçub  spinme 
iormûfno&ïfl  redcmptons  (Peniz,  Mni.^fr^M.  htii.^  SS.  IX,  377). 

Là  chanson  nomme  ces  mêmes  reliques  :  un  morceau  du  bois 
de  la  croix,  une  partie  de  la  couronne  d'épines,  les  saints  clous, 
mais  elle  ajoute  la  chemise  de  la  vierge  Marie  ^  Ces  mêmes 
reliques  jouent  un  grand  rôle  dans  Tépopée  française,  comme  le 


t.  Suivant  Pûckert,  A  marte  littd  Gfllmt  (Lcipiîg,  1899),  p.  J2î  note,  le  Iwîs 
de  la  croîï  n'aurait  éié  apporté  à  Saint-Denis  qu'après  4124.  Serait-il  permis 
de  rajeunir  VHistorûi  mo^kma  de  Hugues  de  Fleury  au  point  de  la  croire 
postérieure  i  ce  terme  ?  Mais  le  bois  de  la  croix  se  trouvait  à  Saint-Denis  au 
XI*  siècte,  suivant  un  texte  {Descripiio  qmlîter  etc.  *ians  Hausclien,  Dit  Ltgenâe 
Kdrhdis  Grosîfff,  Leipzig,  1890^  p,  114),  qui  connaît  aussi  la  chemise  de  b 
sainte  Vierge  {inUnihim  qmqut  bedimimt  Marie  mûtrh  iptius  Doniim\  sfntper 
virgiuii,  quam  in  ipsû  pariu  hatuil^  p.  120,  22)  et  que  Puckcrt,  pour  la  partie 
en  question,  croit  postérieur  â  1124. 


Î76  H.    SUCHIER 

témoignent  le  Voyage  de  Cbarkma^ne  à  Jérusalem  et  Fieralfraï\ 
Notre  poète  avait-il  lu  Hugues  de  Fleury?  Ce  ne*it  guère 
admissible:  il  ne  sait  pas  même  la  ditÏÏTence  entre  un  livre  et 
une  charte,  puisqu'il  croit  (v.  306 1)  que  le  livre  est  scellé*  Un 
clerc  de  Saint-Denis  peut  lui  avoir  communiqué  le  contenu  an 
passage  latin.  Ce  clerc  peut  avoir  connu  à  Saint- Denis  le  savant 
Hugues  en  personne;  car  il  est  de  toute  probabilité  que  ce 
dernier^  qui  a  rédigé  une  Hishma  rt'gum  Francorum  monasttrii 
suncii  Dionysii^  a  habité  Saint -Denis  pendant  quelque  temps. 
Je  constate  que  l'auteur  de  la  Morl  Aimeri  a  été  à  Saint-Denis, 
et  comme  sa  langue  paraît  appartenir  à  Tlle-de- France  —  sauf 
quelques  petits  traits  dus  sans  doute  a  un  léger  remaniement 
dans  les  manuscrits  J  et  Bj  —  il  est  probable  qu'il  habitait  Saint- 
Denis^.  Partantj  la  Mort  Aimeri  est  une  chanson  proprement 
fnin<;aise,  le  premier  texte  français,  que  je  sache,  qui  montre 
l'imparfait  en  -oc  correspondant  au  latin  -abam  (comp.  les  rîmes 
de  la  laisse  XLV)  \ 

Dans  le  récit  latin  de  Hugues  de  Fleury,  il  s'agit  de  Charles 
le  Chauve.  Dans  la  Mort  Aimeri^  au  vers  joés,  il  est  question 
de  Cbark  h  roi  a  la  barbe  ftorie.  Ce  n'est  pourtant  pas  Charle- 


1,  Voircneorc  G*  Paris  dans  la  H&mima,  IX,  p.  52,  note  5.  sur  des  r^écîts  de 
Jean  des  Pre^,  Une  exfHÉduion  de  Charles  le  Chiiuve  à  Constant inopîe,  d'où 
Il  iurait  rapporté  des  reliques,  est  racontée  dans  le  Lîber  â(  compost! hnt  casiri 
Amhiisiae  (publié  dans  le  Spkikgtum  de  d'Achcry). 

2,  L'auteur  de  FkrtéraSj  à  coup  sûr,  n*étijit  pas  dtf  Siint-Deuis^  à  considé- 
ror  sa  langue.  Le  nôtre,  soit  dit  en  passiint,  kii  tîgiirçr  un  chevulier  fran^ais^ 
Jofroi,  appelé  tantôt  «  de  Saint- Denis  »,  tantôt  «  de  Paris  ».  Jofroî,  prisonnier 
des  Sagittaires,  est  délivré  par  une  demoiselle  française,  Blancheflor,  qy*il 
cmmcne  en  son  pays  et  qu'il  épouse*  Il  est  traité  avec  une  prédikctlon  visible  : 
lorsque  le  chef  des  Sagittaires  a  mis  i  mon  Aymeri  et  Garin  son  fils,  c*est  à 
Jofroi  de  Saint^Denis  qu'est  réservé  1* honneur  de  les  venger  en  tuant  le  terriMe 
adversaire.  A  moins  que  le  poète  ne  se  cache  sous  ce  nom  tui-mème,  ce  sera 
toufours  un  argument  de  plus  eu  faveur  de  Saint-Denis  comme  son  Heu  d'ori- 
gine. Je  note  en  passant  levers  3272  où  le  roi  de  France  jure  fmr  Sûint-Dmis, 
ati  horn  jt  mi  dd  chitf  (c*est-â-dire,  dont  je  suis  le  vassal  hnmèdiai). 

î.  Voici  encore  quelques  particularités  de  sa  langue  :  vermtni  au  fém.  141. 
cf,  5î70  —  to/f'f^  (tcneat)  667  —  dônes  (dominas)  1097  —  etttrt  hr  1341  — 
tlttsés  j668.  Î167.  Cette  dernière  forme  est  un  emprunt  au  provençal,  comme 
d'autres  noms  d'armes  (psb^c  etc.). 


LES  CHANSONS   DE  GUILLAUME   D  ORANGE  377 

magne,  que  le  poète  introduit   aussitôt    comme   chef  de  la 
deuxième  geste,  et  qu'il  distingue  visiblement  du  premier. 

L'autre  si  iu  du  fort  roi  Giarle  Maigne, 
Cel  qui  conquist... 

Je  n'ose  pas  conclure  de  là,  bien  que  ce  soit  toujours  une 
possibilité,  que  la  barbe  florie  des  chansons  de  geste  ait  tiré  son 
origine  de  la  superbe  barbe  de  Charles  le  Chauve.  Charlcmagnc, 
suivant  les  images,  ne  portait  que  la  moustache  franque  \ 

Les  trois  gestes,  telles  qu'elles  sont  distinguées  ici,  embrassent 
évidemment,  la  première  l'histoire  exacte  représentée  par  les 
chroniques  rédigées  en  latin  et  en  prose,  la  deuxième  et  la 
troisième  l'ensemble  des  chansons  de  geste,  la  deuxième  étant 
consacrée  aux  exploits  de  Charlemagne,  la  troisième  à  celle 
d'Aimeri  et  de  sa  postérité.  Ces  deux  gestes  sont  les  mêmes  qui 
sont  qualifiées  à'anciênes  au  début  de  la  chanson. 

A  la  troisième  geste  appartient  It  roi  Otes,  li  sires  £  Yspolite 
qui  se  fit  moine  dans  la  force  de  l'âge.  Oncle  des  fils  d'Aimeri, 
par  conséquent  frère  d'Hermanjart,  il  faut  qu'il  ait  été  fils  de 
Didier  roi  de  Lombardie,  qui  lui  aussi  se  fit  moine  «  dedenz 
sa  saine  vie  ».  D'ordinaire  nous  lisons  qu'Hermanjart  est  sœur 
de  Boni£2ice  roi  de  Pavie  et  que  ce  dernier  mourut  célibataire, 
sans  laisser  d'héritier;  c'est  pourquoi,  suivant  les  Narbonnais^ 
Garin  d'Anseûne  sera  son  successeur. 

Un  roi  Oton  revient  en  plusieurs  endroits  des  chansons  de 
geste,  qualifié  quelquefois  de  sire  d'Espolice  (JSpoletium,  en  Ita- 
lie). Rarement  il  est  désigné  comme  fils  du  roi  Didier.  C'est  le 
cas  dans  Lohier  et  Mallarty  chanson  de  geste  perdue,  mais  dont 
il  nous  reste  un  remaniement  en  prose  en  traduction  alle- 
mande. L'auteur  de  cette  chanson  semble  avoir  puisé  à  la  même 
source  que  notre  poète,  quand,  au  début  de  la  Mort  Ainuri, 
celui-ci  parle  de  l'antagonisme  entre  les  deux  princes  impé- 


I .  Une  seule  fois  dans  la  chanson  Charlemagne  est  appelé  a  le  barbe  florie, 
ao  vers  2413  où  Féditeur,  on  ne  sait  pourquoi,  a  remplacé  Car  Charlemagne, 
Icçoo  de  b  version  primitive,  par  Charles  li  rois,  leçon  de  la  version  rajeunie. 
Vt^'ù^!it  a  la  barbe  florie  peut  fort  bien  avoir  remplacé  ici  une  autre  épithéte 
de  Forigioa],  comme  a  la  chierc  Ixirdie. 


378  H*    SUCHIER 

riauK  Lohier  et  I^uis*,  et  encore  quand,  dans  Liyhter  et  Mal 
lart,  il  est  question  d'Oion  fils  du  rui  Didier,  lequel  y  joue 
d'ailleurs  un  rôle  peu  honorable. 

Dans  Amm  de  Carîage,  !e  même  vers  (9347)  se  lit  dans  l\ 
des  manuscrits  ; 

Droit  a  Pavîe  manda  le  roi  Oton, 

et  dans  un  autre 

En  Es  polisse  manda  le  roi  Oton» 

On  voit  que  ce  dernier  scribe,  du  moins,  identifiait  Oton  de" 
Pavie  avec  Oton  d*Espolice\ 

Ce  personnage  doit  sans  doute  son  existence  à  la  tendance 
qu*on  avait  à  rattacher  la  généalogie  des  maisons  nobles  d'Italie 
aux  ducs  de  Spoîète  et  aux  rois  de  Lombardie.  Beaucoup  de 
familles  italiennes  faisaient  remonter  leur  lignée  à  Didier,  comme 
hciiucoup  de  lamilies  françaises  la  leur  à  Girard  de  Vienne  K 
Je  renvoie  au  Stamna  Deskitrianum  d'Eccard,  1708,  et  à  Tou^ 
vrage  analogue  dlmhof,  Hisîorm  Italiae  et  Htspaniai  gaicùlogiù 
Nuremberg,  1701.  Voici  la  série  généalogique  que  Ton  dres 
en  Italie  : 

Didier»  Everard,  Guidi),  kilo  Ansdiaritis. 

Ce  dernier,  père  d'Adelbert  marquis  d*Ivrée  %  pourrait  Hi 
rOton  des  chansons  de  geste  appelé  quelquefois  Aim  ou  Hatû 
(voir  L.  Willem^,  Vêtement  historique  dam  le  Corommatt  Ijl 
Gand,  1896,  p.  7J  ss,  Baist  dans  la  Zeitschrifi  fur  Rùmanische 
Philologie,  XVUr,  272). 

Notre  poète,  ayant  appris  quelque  part  qaOton  d'EspoIice 
était  fils  du  roi  Didier,  et  sachant  d'ailleurs  que  la  femme 


I»  Voir  Zenkcr,  dans  Ikiirâ^^  lur  Rtfumnîicben  Phitota^k,  Ffstgûàe  ftir 
Grohtr  (Halle^  1^99)»  p-  iSS-igu^ei  le  même»  Dus  Bpoi  von  i^afdmrà  und 
Gormund  (Halle,  iiïi?6),  p,  1^6, 

2,  \Sï\  duc  OUi  di  Pavie  joue  un  rôle  dans  Gui  de  Wirwlck.  Cf.  au 
Gûydm,  p.  144,  cl  Hâte  de  Favie,  dans  Fm^on  de  Candie,  p.p.  Tawhé,  p.  ^ 
Otm  dé  Pai'î',  p.  ng, 

\.  Ijaî^nnc,  dans  le  Diciimmire  historiette  de  ta  francf^  an.  Vittinf,  étvu- 
mère  ju^u  a  vingt  et  une  fimilles  nobles,  toutes  issues  de  b  maison  de  Vienne. 
Voirausït  Golîut,  MM^irei  biitonqim  dt  la  r/pubtiquf  séquamis^^  1.  VI,  chiip,  4e 

4,  Siiivam  Imhof,  p.  3^ 


LES   CHANSONS    DE    GUILLAUME    D*  OR  ANGE  379 

d'Aimcri  en  était  la  tille,  a  cumbiut:,  ingénieusement,  il  fnut 
Tavouer^  ces  deux  données  pour  ajouter  ainsi  un  nouveau  tiirc 
de  gloire  à  ceux  qui  distinguaient  déjà  la  race  des  Narboniiais, 

Car  notre  poète,  s  il  n'était  pas  un  sa%Mnt,  était  du  moins  un 
curieux  qui  aimait  a  intercaler  dans  son  récit  ce  qu'il  avait  appris 
ailleurs.  Ainsi  quand  Aimeri,  pour  débarrasser  les  maisons  et  les 
rues  de  Narbonne  des  cadavres,  les  fait  brûler  dans  les  champs 
près  de  Narbonne  —  dtfors  Nerlmtf  les  ardrnt  par  ks  chans  —  » 
le  poète  ajoute  cette  remarque  d'archéologue  :  c'esiûit  cûsîmne  de 
tanciénvr  iens  (v.  2732), 

A  côté  de  Hugues  de  Fleury  il  *  avait  à  sa  disposition  un 
ouvrage  latin  de  géographie  ou  d'ethnographie,  fabuleux  cela 
va  sans  dire,  semblable  aux  dérivés  du  Psatdocallistljêne,  à  la 
Letiff  du  Priîre  Jfan^  ou  à  Vhmgo  mundi  d'Honorius  d*Autun 
ou  d'Augsbourg  ^  C'est  un  ouvrage  à  retrouver.  Là  il  a  pris  le 
nom  de  pays  Orfofrm  2470,  2488^  291 S  provenant  d^Artùhn\ 
peuple  antique  d'Espagne,  Les  deux  0  de  la  fornte  Ortohric  au 
lieu  des  deux  a  de  la  forme  latine  du  mot  semblent  prouver 
que  le  poète  ignorait  le  latin,  et  qu'il  dut  ses  renseignements 
ï  la  communication  orale  d'un  autre. 

Les  quatorze  mille  puccllcs  du  pays  de  Femenie  forment  un 
peuple  gouverné  par  une  femme*  Elles  rappellent  les  Annuîones 
aussi  en  ce  qu'elles  exécutent  des  danses.  Autrement  elles  ne 
leur  ressemblent  guère;  car  elles  ne  sont  pas  belliqueuses.  Cette 
nation  de  pucelles  n'a  d'autre  raison  d'être  dans  la  chanson  que 
de  fournir  des  robes  de  femmes  aux  guerriers  d'Aimerij  quand  il 
veut  employer  ce  stratagème  pour  reprendre  Narbonne  K  Leur 
apparition  pourrait  fort  bien  provenir  d'un  récit  populaire;  elle 
est  dans  le  genre  des  traits  qui  s'ajoutent  au  cours  de  la  tradi- 
tion orale. 

Les  Sagittaires,  par  contre,  n'y  figurent  que  pour  donner  au 
poète  Toccasion  d'étaler  son  érudition.  Ils  n'ont  rien  a  faire 


I,  Ccst-i-dire  lui  ùu  %ii  jourcr.  Q|ie  k  lecteur  veuille  bien  suppléer  ces 
trois  mots  toujours  là  où  il  y  a  lieu. 

1.  Honarius  était  probablement  Allemand,    voir  lit-dessus  Dicierich  dàûS 
Mm,  Gtrnt.  bisî.,LibeUi  dt  lUt,  t,  lli,  p,  p, 

\,  V*  I5î9  2540  i^j   tmUi  €^r(nî  pucetts  tt  mtschimi  s' m  trmmt  droi  df 
àmrsn  baillm. 


jSO  H.    SUCHIER 

avec  Narbonne.  Ib  s'emparent  deîs  puceHes  laissées  en  Ortobrie 
sans  protection  suffisante,  et  îb  les  mènent  dans  leur  ville 
Esciabarie  dans  les  cachots»  Cest  pour  Aîmeri  un  motif  d'en* 
treprendre  contre  eux  une  expédition  belliqueuse,  pendant 
laquelle  il  succombe  avec  deux  de  ses  fils  sous  leurs  traits  enve* 
nimés.  Remarquons  que  dans  cette  partie  de  la  chanson  la 
géographie  est  toute  fantaisiste  ;  Aimeri  avec  les  quatorze 
mille  pucelles  va  â  Esciabarie  et  de  là  en  Ortobrie^  X  ce  qu'il 
semble,  rien  que  pour  changer  de  vêtements. 

Les  Sagittaires  sont  décrits  avec  tous  les  détails  désirables 
(2416-2468).  Cette  description  se  base  sur  les  deux  sîgnitîca* 
tiens  qu'a  eues  le  mot  latin  mgiitattus  :  comme  traduction  de 
xévTaupq;  et  comme  traduction  de  Scytha.  L*une  et  Tautre  se 
trouvent  dès  Tantiquité;  cette  dernière  est  déjà  dans  Pline. 
Notre  poète,  ou  bien  sa  source,  a  combiné  et  confondu  les  deux 
significations.  I!  dit  des  Sagittaires  ;  Dnmiî  sonî  hvnes  et  chtml 
par  dtriere  (2  5b2).  On  trouve  dans  le  Dictionnaire  de  Godefroy 
des  exemples  de  Temploi  en  ancien  français  de  yajttaire  pour 
centaure.  Les  autres  traits  se  rapportent  aux  Scythes.  Les 
Sagittaires  cueillent  les  «  herbes  et  épices  »  qui  croissent  aux 
environs  d*Esclabane  %et  ils  vont  en  Egypte  les  échanger  contre 
du  fer  et  de  Tacier  dont  i!s  font  leurs  armes.  C'est  donc  un 
peuple  qui,  avant  ce  commerce  avec  l'Egypte,  avait  vécu  dans 
l*âge  de  la  pierre.  Ils  sont  surtout  d'excellents  archers;  ils 
emploient  des  flèches  envenimées.  Ce  peuple  ne  cultive  pas  la 
terre  et  ne  mange  pas  de  pain.  Les  Sagittaires  font  la  chasse 
aux  ours  et  aux  cerfs,  dont  Us  mangent  la  chair  crue  et  dont 
ils  boivent  le  sang. 


i>  D'après  AUsmm  (570$  ss.),  U^s  Sâgîctâlreâ  ne  connaissent  pas  le  !fO- 
ment  :  ITespkéi  vivent  tt  (Todour  de  pimmenL  Ici  encore  Hugues  de  Heujy 
pourrait  avoir  fourni  à  notre  pûète  des  renscignemeois  ;  il  parïc  des  Scytbci 
en  même  temps  que  des  Amaîones,  et  il  dit  de  ceux-là  ;  «  Scytlia;  pcr  incul- 
tas  solitudlnes  errarc  solili  non  âgrum  exercent,  a  Cf,  Hugmis  fbrimimif 
Cinvnmfn^  ex  musûeo  Bernh.  Rotienàorffii^  Munster  1638,  p.  19,  Comme  le 
icKie  imprimé  de  cette  chronique  reproduit  une  version  très  abrogée,  ii  Éaq- 
dniit  pouvoir  consulter  1^  tnanuscrtts  complets,  surtout  le  tns.  parisien  bt, 
4890,  où  k  deunîème  livre  est  précédé  de  la  rubrique  :  De  iitu  Scitk  et  irtrr- 
m  dusâem  r^i&nisfentibmit  êarum  m0riliiu{Mon.  Germ,  hisi.^SS^t  IX,  p.  559, 
note). 


LES    CHANSONS   DE  GUILLAUME   d'oRANGE  381 

D'autres  tnits  se  retrouvent  dans  le  chapitre  consacré  aux 
Sagittaires  dans  la  rédaction  provençale  de  la  Lettre  du  prêtre 
Jean  (imprimé  dans  mes  Denhnàîer  dit  Promft\ùîisd}en  Littratur^ 
tome  I,  Halle  1883,  p.  J48).  Suivant  ce  texte  les  Sagittaires,  du 
nombril  aux  pieds»  sont  faits  comme  des  chevaux.  Près  d'eux 
demeurent  des  hommes  sauvages  dont  la  race  ne  plaît  pas  à 
Dieu  et  qui  craignent  surtout  les  grands  serpents  de  ce  pays-là- 
Ces  serpents  jouent  un  grand  rôle  dans  la  Mort  Amert^  où  ils 
sont  décrits  en  détail  (25ÎOSS*),  et  après  la  défaite  des  Sagit- 
taires Tannée  chrétienne  s'efforce  de  les  extirper. 

Je  ne  connais  pas  la  source  immédiate  de  ces  parties  de  la 
chanson;  mais  je  crois  que  quelques  données  pourraient  prove- 
nir en  dernier  lieu  de  Pomponiiis  Mêla,  Ce  géographe  nomme 
les  Artabri  que  Ton  ne  connaissait  guère  au  moyen  /ige.  I! 
mentionne  les  Amazones  et  les  Moschi  leurs  voisins  habitant 
entre  la  mer  Noire  et  la  Caspienne,  Dans  une  énumération  de 
montagnes  il  fait  suivre  les  montes  Anmionici  immédiatement  des 
(mopitfs)  Moschi^  et  je  me  demande  si  le  nom  de  Miicikrne^  capi* 
taie  de  Femenie  dans  la  Mort  Aimcri  {w  1674),  ne  pourrait  être 
un  composé  de  Moschi  et  de  ttrrc  changée  en  terne. 

Plusieurs  traits  qui  sont  rapponés  des  Sagittaires  rappellent 
les  mœurs  des  Magyars,  telles  que  nous  les  peignent  les  chro- 
niqueurs du  x^  siècle  :  ceux-ci  étaient  d'excellents  cavaliers  et 
de  fort  habiles  archers;  ils  mangeaient  de  la  chair  crue  et  ils 
buvaient  du  sang;  ils  ne  cultivaient  pas  la  terre,  mais  se  nour- 
rissaient des  produits  de  la  chasse.  Ici  un  passage  me  semble 
assea  remarquable.  Le  poète  avertit  le  lecteur  de  se  donner  garde 
de  confondre  les  Sagittaires  avec  les  païens  ou  les  Sarrasins;  ils 
sont  plutôt  Turcs  : 

Ce  ne  sont  pâs  païen  dc  Sarrazii]^ 

Mes  Turs  fdons  du  regnè  4'Orqoanîe  * 

Et  SogUaire,  a  qui  ja  Dex  n'ait,  (v.  ]  js5  ss.) 

Cette  distinction  entre  les  Sarrasins  d'une  part  et  les  Turcs  et 
les  Sagittaires  de  l'autre  rappelle  un  passage  du  chroniqueur 
Ekkehard  IV,  qui  proteste  contre  la  confusion  fréquente  chesc 
ses  contemporains  des  Hongrois  avec  les^  Sarrasins  »  écrivant  : 


i .  La  rime  est  fausse  ;  on  pourrai l  lire  du  ngm  Orquanm. 


jBl  H.    SUCHIER 

•f  qui  Ungros  Agarenos  putant,  longa  via  errant  »  (Pertz»  Mmt* 
Germ.  hisî.^  Il,  p.  119,  Î4).  Dans  la  littérature  du  temps  les 
Hongrois  sont  souvent  appelés  Turcs  (voir  Diimmler,  Geschkhtc 
des  Ostfrânkischen  Rfirhts,  2^  édition,  IIF,  p.  450).  Suivant  notre 
chanson,  le5  Sagittaires  guerroient  contre  le  peuple  congénère 
des  Turcs  d*Orquenlc,  qui  habitent  une  Ile  fortifiée;  cette  guerre 
est  terminée  par  une  trêve  (2457-2468). 

Ces  coïncidences  m*ont  suggéré  une  idée  au  sujet  d*Esclabarie, 
ville  des  Sagittaires.  Cest  une  ville  détruite  et  abandonnée, 
une  cité  frète  et  gasît.  Elle  est  située  en  Espagne  (vv,  J023,  3417 
s.).  Charleniagne  Tavait  incendiée  et  démolie  dans  la  même 
campagne  que  celle  où  il  prit  Narbonne,  Tout  cela  est  de  la 
fantaisie  pure.  Les  Sagittaires  se  sont  emparés  de  cette  ville  en 
ruines  et  ont  redressé  quinze  tours  de  ses  fortifications  (v.  2417), 
Or  on  sait  que  Sabaria  en  Pannonie  était  une  ville  importante 
détruite  au  v*  siècle  et  dont  les  ruines  imposantes  n'ont  pas 
encore  tout  à  fait  disparu.  Si  1  on  pouvait  supposer  le  nom 
Sabaria  défiguré  en  *Stabana  et  rapproché  par  là  du  nom  des 
Slaves  (en  latin  Slahi  ou  SflaH)^  ce  serait  là  une  explication  du 
nom  Esclabarie,  Malheureusement  je  n'ai  pas  réussi  à  trouver  un 
*Slaharia  pour  Sabaria.  Le  pays  des  Slaves  est  d'ailleurs  appelé 
Eîclai^nir  (3098), 

Quoi  qu'il  en  soitj  je  crois  avoir  démontré  que  pour  de 
grandes  parties  de  cette  chanson  de  geste,  nous  nous  trouvons 
en  pays  d'érudition  plutôt  que  de  tradition  épique* 

\  L  —  Ragnar  Lodbrôk 


On  n*a  pas  encore  remarqué  que  le  célèbre  viking  Ragnar 
Lodbrôk  est  mentionné  dans  la  Mort  Aimeri  au  vers  1059* 

Puis  lace  l*elnic  RagueneL  de  Mondetp 
Un  roî  pâkn,  tillague  fu  de  mer  : 
Sel  vTOi  galîçs  scult  avuec  loi  mcner^ 
Qijam  il  aloit  sor  crestïéns  rober; 
Fait  î  avoit  un  charbocle  fermer  : 
De  la  clarté  soloii  veoir  par  mer. 

L'éditeur  renvoie  les  deux  derniers  vers  aux  variantes;  je 
crois  que  c'est  à  tort,  car  le  manuscrit  qui  les  contient  n*a  guén? 
coutume  de  faire  des  additions  de  ce  genre. 


LES  CHANSONS    DE   GUILLAUME  d'oRANGE  583 

Il  me  semble  hors  de  doute  que  Ragucnel  n'est  autre  que  le 
terrible  Ragnar.  Ln  forme  Ragurml  rappelle  la  forme  irlandaise 
du  même  nom,  laquelle  est  Raghnall  (Steetistrup,  Normanticrne 
II,  p.  î82). 

Ragnar  s*est  fait  connaître  et  redouter  en  France  surtout  par 
son  invasion  de  84  î^  remontant  la  Seine  jusqu'à  Paris,  qui  alors, 
k  veille  de  Pâques,  vit  les  vikings  pour  la  première  fois  (Steens- 
trup,  II,  p.  154).  Suivant  Prudentius  Galindo,  continuateur 
des  Annaks  Btriiniant\  Ragnar  avait  avec  lui  cent  vingt  bateaux, 
nombre  qui  ne  s*éloigne  pas  trop  du  nombre  sei  vint  de  la  chan- 
son. Steenstrup  (I,  215)  mentionne  Tcxpédition  d'un  viking, 
qui  n*est  pas  nommé,  expédition  dirit^ce  contre  l'Irlande  en 
849;  cette  dernière  flotte  consistait  en  cent  quarante  bateaux* 
Le  nombre  donné  par  la  chanson  est  donc  dans  le  domaine  du 
vraisemblable* 

Cela  me  ramène  à  la  question  de  savoir  si  pour  ce  passage 
le  poète  n'a  pas  eu  recours  a  une  source  latine.  Si  !e  nombre 
des  bateaux  semble  Taffirmer,  f  avoue  d'autre  part  que  la  forme 
Ragi4€ttel  a  plutôt  Tair  populaire,  et  le  passage  entier  ne  peut  en 
aucune  taiçon  provenir  d*une  chronique  latine.  Il  est  possible 
qu'à  Paris  des  traditions  aient  gardé  le  souvenir  de  ce  pirate,  et 
qu  ason  nom  se  soit  rattachée  la  légende  du  carboncle  qui,  fixé 
au  casque,  lui  permet  par  sa  clarté  de  faire  route  sur  la  mer  pen- 
dant la  nuit  *, 

Wace  et  Benoit,  qui,  à  la  suite  de  Guillaume  de  Jumitges, 
l'appellent,  Tun  Loîroc,  Tautre  iMlrocus,  ignorent  le  nom  Ragui- 
mljOn  bien,  s*ils  Tont  connu,  ils  n'ont  pu  identifier  le  porteur 
de  celui-ci  avec  le  porteur  de  celui-là. 

H.    SUCHIER* 

{A  suivre,) 


I*  Un  •  carboncle  «  qui  éclaire  est  aussi  mentionfjé  aiî  vers  S^,  ce  qut 
plaide  en  faveur  de  ramhentiché  des  vers  !o63  et  1064  rejet*5s  par  rédiieur* 
Consulier  sur  de  teUes  pierres  Uhl  dans  îa  Feihchrijl  inm  sîeb^igsien  GthtrU' 
tagt  Oskar  Sdidde  dargebrachi  (KànlgihçTg^  1S9É),  p*  ^oi-joy  ;  Rajn»!  Origim 
âilV  epopta  francae,  p.  446;  Cotrsuns,  Roman  dt  T^nki,  II,  p.  536;  Paul 
Meyer,  Girari  de  Roumlhrî^  p.  25,  note;  Oskar  Jaenicke  ââu%  Alideuisdïc  Sht- 
duH  (Berlin,  1871)^  p.  45  ;  ïe  Chtvaîkrdu  Paprgait^  p*  p  Heuckcnkamp  (Halk, 
lS96),  p.  47»  6. 


NOTES  SUR  LE  JEU    DE   LA  FEUILLÉE 
D'ADAM   LE   BOSSU 


I 


Jadis  Paulin  Paris  \  Magnîn  '  et  d'autres,  choqués  des  rôles 
attribués  à  maître  Adani^  à  son  père,  à  sa  femme,  dam  le  Jeu 
de  la  Femlléc,  ont  conçu  des  doutes,  mais  sans  s'y  arrêter,  sur^ 
la  paternité  de  cette  pièce.  Pour  les  mêmes  raisons,  M.  Guesnon 
a  nié  récemment,  en  termes  fonnels,  que  le  drame  fût  du 
célèbre  poète  :  «  Dans  ce  qu'on  a  appelé  Li  Jus  Adan,  c'est 
Adam  que  Ton  joue;  il  n'est  pas  Tauteur,  mais  le  sujet  des 
scènes  où  on  le  parodie,  où  lui  et  les  siens  sont  bafoués.  S'il  y 
a  jamais  collaboré,  c*est  malgré  lui^  et  le  comble  de  Tinvraisem- 
blance,  à  nos  yeux,  serait  de  supposer  que  lui-même  et  soo 
père  en  aient  été  les  auteurs  ^  », 

Une  affirmation  aussi  tranchante,  jetée  en  travers  de  roplnlon 
générale,  méritait  quelque  justification  plus  amplement  déve- 
loppée. 

On  a  généralement  exagéré  fa  portée  de  quelques  plaisanteries 
d'Adam  sur  les  charmes  de  sa  jeune  épouse.  Il  ne  la  voit  plus, 
dit-îL  maintenant  que  ses  désirs  sont  assoupis^  parce  qu*elle  a 
fait  pour  lui  «  trop  grant  marchié  de  ses  denrées  >^  des  mêmes 
yeux  dont  il  la  regardait  quand  «  pris  fuau  premier  bouillon  »» 
Son  teint  ne  lui  semble  plus  aussi  frais,  sa  taille  aussi  fine,  sa 
chevelure  aussi  dorée.  Certes,  Taiticisme  de  ces  facéties  n'est 
pas  du  plus  pur,  mais  elles  ne  contiennent  rien,  en  définitive. 


1.  Jourmt!  da  Savants^  1846,  p,  îjO. 
j.  Moyen  Ai-e,  190a,  p,  l72*J7î* 


ÎÎOTES  SUR   LE   JEU    DE    LA   FEUiLLÉE  jSj 

de  blessant  pour  h  jeune  femme,  qui  savait,  comme  aussi  les 
spectateurs,  ce  qu'il  en  fallait  retenir.  Le  poète  a  soin,  d'ailleurs, 
pour  éviter  qu'on  s'y  trompe,  d'ajouter  aussitôt,  par  la  bouche 
de  son  âmî  Riquier,  qu'il  serait  surprenant  qu'on  pût  oublier  si 
vite  if  faitures  si  délita  vies  ».  Ces  plaisanteries,  sur  lesquelles 
personne  assurément  ne  pouvait  se  méprendre,  ne  sont  qu'un 
prétexte  à  Adam,  je  dirais  volontiers  une  précaution  oratoire, 
pour  présenter  de  Marie  un  portrait  dans  lequel  la  plus  belle 
femme  du  monde  se  reconnaîtrait  avec  plaisir.  Aussi,  quand 
Riquier  dit  à  Adam  :  t<  Maître,  si  vous  me  la  laissiez,  elle 
serait  fort  à  mon  goût  n^  celui-ci  lui  répond  :  «  Je  vous  en 
crois  sans  peine  ^,  Et  finalement  le  poète  annonce  qu'il  n'exécu- 
tera pas  son  projet  d'aller  à  Paris,  parce  qu'il  n'a  pas  le  courage 
de  s  arracher  aux  bras  de  sa  femme,  «  qui  est  mole  et  tendre  »* 

De  maître  Henri,  le  jeu  plaisante,  en  termes  inoffensifs  et  visi- 
blement sympathiques,  la  répugnance  à  délier  les  cordons  de  sa 
bourse,  l'amour  de  la  bonne  chère,  la  crainte  de  se  compro- 
mettre auprès  des  puissants. 

Au  sujet  d'Adam,  il  nous  dit  qu*il  interrompît  ses  études  de 
"t  clergie  w  pour  épouser  une  jeune  fille  dont  la  beauté  Tavait 
troublé;  qu'il  avait  promis  à  ceux  qui  le  dissuadaient  de  bri- 
ser ainsi  son  avenir,  de  s'éioîgner  de  sa  femme,  après  son 
mariage,  pendant  deux  ou  trois  ans,  pour  aller  à  Paris 
«  aprendre  b  ;  qbe  le  moment  arrivé  de  tenir  sa  promesse,  il 
est  très  hésitant;  enfin  qu*il  est  très  amoureux,  gai  et  bon  fai- 
seur de  chansons,  Est*ce  ainsi  qu'on  «  bafoue  n  un  homme  ? 

Quel  que  soit  du  reste  le  jugement  qu'on  porte  sur  les  par- 
ties du  jeu  dont  le  poète,  son  père  et  sa  femme  font  les  frais, 
l'argument  de  M*  Guesnon  ne  saurait  être  pris  en  considération, 
d'abord  parce  que  nous  ne  connaissons  pas  suffisamment  Adam 
pour  affirmer  que  tels  écarts  de  langage  et  de  goût  ne  peuvent 
lui  être  imputés;  en  second  lieu,  parce  que,  si  les  propos  tenus 
sur  le  compte  des  siens  surprennent  sous  sa  plume,  on  doit 
trouver  non  moins  extraordinaire  qu'un  autre  ait  osé  les 
écrire. 

Avec  des  arguments  de  cette  nature,  qui  reposent  uniquement 
sur  une  appréciation  personnelle  des  convenances,  on  peut  faire 
de  la  critique  littéraire,  mais  non  pas  de  l'histoire,  et  c'est  une 
question  d'histoire  qu'il  s'agit  ici  d'élucider. 


I,  MXU 


^5 


î86  ,  H.    UKGLOIS 

Voici,  par  concrej  une  preuve,  assise  sur  une  base  plus  solide, 
en  faveur  de  rattribution  à  maître  Adam  le  Bossu  du  Jm  de  la 
FeuilUc,  Dans  les  trois  manuscrits  qui  nous  l'ont  conservé  inté- 
gralement ou  partiellement,  le  poème  est  intitulé  Li  jus  Aâan 
(Bib,  oat.,  fr.  25)66)»  Le  jéu  Adan  U  Boçn  iTArra^  (Bib.  nat,, 
fr.  837),  Le  jeu  Aâan  le  Boçu  (Vatican,  Reg.  1490).  Pour 
M*  Guesnon,  le  nom  d'Adam  désigne,  dans  ce  titre,  non  pas 
l'auteur,  mais  le  sujet  du  drame.  Il  n'a  pas  remarqué  que  la 
grammaire  s*oppose  à  cette  traduction.  Le  nom  de  personne 
employé  dans  cette  construction,  avec  fonction  de  génitif  pos- 
sessif, est  nécessairement  celui  de  l'auteur;  s'il  désignait  l'objet 
du  poème,  il  serait  précédé  de  la  préposition  ifc,  qui  lui  donne- 
rait la  valeur  d*iin  ablatif:  Le  jeu  d'Adam.  Cest  ainsi  qu'on  a, 
d*yne  part,  le  Doctrinal  Sauva^Cj  la  Somme  Laurent  ^  la  Bihle 
Gukn^  le  Livre  Alhuma^ar^  VÈ^ltre  malUr  Jean  d^  Meun^  la 
Régie  yaint  Benoit,  les  Étahlissem^nts  le  roi  de  France^  le  Bestiaire 
maître  Richard  de  Fonrnival,  etc,  et,  d*autre  pan,  le  Jeu  de  saint 
Nicolas  y  ï*  Histoire  d\4iol,  le  Livre  de  Baîlaam  ei  Josaplmt^  le 
Roman  de  Renard,  etc.  Les  deux  cas  peuvent  se  rencontrer  natu- 
rellement dans  un  même  litre,  pour  indiquer  à  la  fois  l'auteur 
et  le  sujet  de  la  composition  :  Li  Lai  Ernoul  le  Vielle  de  Gasii- 
noiSf  et  cis  est  de  Noslre  DaffieK  Que  l'on  compare  les  titres  des 
différentes  œuvres  d'Adam  le  Bossu  dans  le  manuscrit  Bib. 
nat.,  fr.  25566»  où  elles  sont  réunies  :  Les  Catuf^ons  tnaistl^^ 
Adan  de  le  Haie,  kt  Panures  Adan^  li  Rondcl  Adan^  li  MomÊ^ 
Adan,  Qi  Jus  du  Pèlerin)^  li  Gieus  de  Robin  ei  Marion^  U  Jus 
Adan,  du  roi  de  5r^î7r,  li  Ver  d' Anmtrs ^  H  Cmgiis  Adan^  li  Fit 
de  k  Mort. 

Donc  le  titre  Jeu  Adam  signifie  Jeu  dont  Adam  est  l'auteur; 
c'est  celui  de  toutes  les  copies;  contre  cet  accord  des  manu* 
scrits  Tûpinion  de  M.  Guesnon  ne  saurait  prévaloir. 


Que  le  Jeu  de  la  FtuiUk  ^  ait  été  composé  pour  une  séance 
solennelle  du  Puy,  on  ne  doîi  aucunement  le  contester,  et,j 


I.  G.  Raynaud»  Btbîkgraftne  dn  ChamoHnifrs  françait,  l,  159. 


KOTES  SUR    LE  JEU   DE   LA   FEUILLÈE  ^87 

vrai  dire,  chacun  tombe  d'accord  là-dessus  '  ».  Malheureusement 
la  plupart  des  critiques  qui  se  sont  rencontrés  sur  ce  point 
n'ont  accepté  cette  opinion  que  parce  que  d'autres  1  avaient 
émise  avant  eux;  ceux  qui  ont  essayé  de  la  justifier  nVnt  pas 
produit  de  raisons  sérieuses,  L'afiîrmation  de  M.  Guy  est 
empruntée  à  M.  Bahlseo,  qui  la  doit  à  P.  Paris,  Je  voudrais 
une  autre  preuve  que  celle  du  consentement  unanime.  Mais, 
dira  M,  Guy,  «  les  plaisanteries  que  !e  fils  de  maître  Henri 
adresse  au  nouveau  prince  de  l'académie  littéraire  sont^  i  cet 
égard,  concluantes^  ».  Peut-être,  en  effet,  concluantes,  mais 
dans  un  sens  opposé. 

Le  nouveau  prince  du  pui^  est  Robert  Soumeillon,  dont  le 
nom  revient  à  deux  reprises  dans  la  pièce*.  Une  première  fois 
Adam  se  contente  de  railler  cr  sen  pui  ^  »,  et  ceux  qui  se  pro- 
posent d'y  porter  des  chansons  ;  un  concours  de  jeu  de  dés 
serait  mieux  leur  affaire.  Mais  plus  tard  il  revient  à  la  charge, 
et  cette  fois  pour  accabler  Robert  Soumeillon ,  non  pas  de 
simples  brocards,  mais  de  sarcasmes  blessants,  de  traits  inju- 
rieux. Il  ne  lui  suffit  pas  de  tourner  en  ridicule  ses  prétentions 
de  bourgeois  singeant  les  paladins  et  les  chevaliers  de  la  Table 
ronde,  son  habit  vert  à  raies  rouges,  sa  vanité^  sa  dissimulation; 
de  rappeler  une  aventure  récente  dont  le  souvenir  devait  lui 
être  cuisant;  il  Taccuse,  en  termes  exprès,  d'être  Thomme  le 
plus  hypocrite,  le  plus  fourbe  qui  vive  entre  la  Lys  et  la 
Somme. 

De  tous  ceux  qu^Adam  a  touchés  du  fouet  de  sa  satire,  per- 


i,  H.  Guy,  Essai  iwr  k  vie  €t  ks  mtvns  HUérairts  du  ttùmire  Adan  dek 
Htûi  (Paris,  1898,  in-ôo),  p.  537.  —  Je  fcrat  cependant  remarquer  que  dans 
U  Littérature  française  du  nwyen  dge,  M.  G*  Paris  [le  fait,  -ï  propos  du  Jeu 
de  U  ftuUye^  aucune  allusion  au  dit  pui. 

1.  Ibid. 

3.  M.  Guy  croit  que  le  nouveau  prince  du  pui  fut  élu  le  jour  même  de  la 
représenution  (îoc,  cit.,  p.  xl).  S*'û  mi  était  ainsi,  comrnent  son  C'Ieclîon 
auraii*clle  pu  ^tre  mentionnée  dans  la  pièce  ?  Comment  Wauiier  as  Paus  ai 
Thomas  de  Clan  auraieni-ils  pu  se  vanter  ■  rautr*icr  »  de  présenter  des  chan- 
sons à  son  pui.  Si  quelque  pan  un  prince  dcvah  être  élu  à  k  Chandeleur^ 
c^ëtait  bien,  semble-t-îl,  dans  la  confrérie  de  k  sainte  Chandelle. 

4.  Vers  404-41  s  et  71 7-7  î9. 

î .  Remarquer  l'expression  d^ïdaigneuse  :  «  scn  pui  ». 


'i|8  E.    LAHGiOIS 

sonne  n*a  été  cinglé  comme  Robert  Soumeîllon  ;  c'est  avec  une 
évidente  antmosité  qu'il  parle  de  lui;  ce  n'était  pas  le  prince  de 
son  choix  et  il  s  est  probablement  bien  gardé  de  rien  faire  pour 
«  son  pui  »  :  c'était  bon  pour  des  Wautîer  as  Paus  et  des 
Thomas  de  Clari, 

Quoi  qii*il  en  soit  des  sentiments  du  poète  à  regard  du  nou- 
veau prince,  qu'il  ait  boudé  ou  non  son  pui,  peut-on  considérer 
comme  un  point  d'histoire  incontestable  que  Robert  Sou mei lion 
ait  organisé  à  ses  frais  *  une  ftte,  qu'il  aurait  présidée,  pour  s*y 
faire  bafouer  et  diffamer?  A  quiconque  lira  le  texte  même  du 
jeu  sans  se  préoccuper  des  commentaires  d'un  tel  ou  d*un  tel, 
pareille  hypothèse  paraîtra  plutôt  déraisonnable. 

Ajoutons  que,  si  Ton  admet,  et  c'est  aujourd'hui  Favis  de 
tous,  que  la  pièce  a  été  spécialement  écrite  pour  être  représen* 
téc  aux  fêtes  des  kalendes  de  mai%  il  ii*est  pas  nécessaire  de 
chercher  dans  la  tenue  d'un  pui  une  autre  occasion  de  la  même 
représentation. 


m 


On  a  conclu  d'un  vers  du  Jeu  de  h  FmilUt  que  la  pièce  fut 
écrite  cni  vue  d'une  représentation  où  les  femmes  devaient 
assister.  Ce  vers  indiquerait  plutôt  le  contraire*  En  tous  cas  il 

est  susceptible  de  différentes  interprétations,  desquelles  j'exclus 
précisément  celle  qui  a  été  communément  adoptée  et  qui  me 


I .  «  Le  prîncç  que  les  membres  du  Puy  venaîeat  d*C*lire  a  cert.^iticment 
contribué  de  ses  deniers  à  îa  reprC^scntaiion  de  b  Fatiltà  »  (Guy,  toc.  «V., 
p,  140,  n,  î).  Cette  note  a  pour  objet  d*auènuer,  tout  en  rapprouvant, 
raffirmation  de  M*  Bahlsen  que  Riquicr  *  a  couven  les  frais  de  rcntrcprise  ■, 
Si  la  représentation  avait  eu  ticu  â  Toccasion  du  pui,  Riquîer,  simple  monbiv 
de  U  confrérie^  n*avait  pas  à  s'occuper  des  dépenses  occasionnées  pour  cette 

2*  Avec  cette  due  du  ù'  mai  s'accorde  parfaitement  une  autre  date  men- 
tionnée dans  U  pièce  et  que  je  n*ai  vue  relevée  nulle  part  :  dame  Douce,  dcms 
la  grossesse  commence  à  se  manifester,  cl  à  qui  on  demande  «  Quant  fust 
avenus  chisaUires  a,  répond  :  «  Il  n'a  encore  waires^  Cbe  tu  un  peu  devant 
quaresme  *  (v.  283-285), 


NOTES  SUR   LE  JEU   DK   LA   FEUIUIe  jS? 

semble  inadmissible.  Je  tais  allusion  au  passage  où  le  père  du 
ce  dervé  »  dit  à  son  fils  :  «Taisiés  pour  les  dames'  ». 

Si  ces  quatre  mots  indiquent  qu'on  doit  s* imposer,  en  pré- 
sence des  femmes,  une  certaine  retenue  de  langage,  si  peu 
gênante  soit-ellcj  ils  prouvent  nécessairement  que  les  femmes 
n'assistaient  pas  à  la  représentation.  Celles  qui  auraient  pu 
entendre  le  vers  44^  le  vers  26e  ;  celles  qui  auraient  pu  voir  le 
geste  dont  le  vers  419  était  accompagné  pouvaient  tout  entendre 
et  tout  voir  ;  elles  n'avaient  pas  à  craindre  que  la  grossièreté, 
Tobscénité  de  l'expression,  du  geste  et  de  l'idée  fussent  dépas- 
sées. Rapproché  de  ces  vers,  l'avertissement  du  père  à  son  fils, 
tel  qu'on  Ta  compris  de  nos  jours,  devient  un  non-sens. 

Les  personnages  qui  évoluent  sur  la  scène  d'un  théâtre 
forment  un  groupe  absolument  indépendant  de  ceux  qui 
peuplent  les  gradins  delà  salle;  ils  sont  censés  ignorer  que  des 
spectateurs  les  écoutent  et  les  regardent.  Si,  dans  un  jeu  de  la 
même  époque  que  celui  de  la  Feuillée,  un  aveugle  dit  à  son 
guide  : 

Nus  ne  m'oc  fors  que  tti  ^eulcneot, 

il  n'en  résulte  pas  que  la  pièce  était  jouée  devant  des  ban- 
quettes vides;  quand  un  acteur  dit  à  son  partenaire  1  n  sois 
convenable,  on  nous  entend  »,  cet  «  on  >j  désigne  des  person- 
nages en  scène  et  non  des  spectateurs.  Ce  n'est  donc  pas  dans 
les  rangs  de  ceux-ci  qu'il  faut  chercher  les  dames  pour  qui  le 
père  du  fou  impose  silence  a  son  fils.  Il  y  avait,  à  ce  moment, 
sur  la  scène,  tout  au  moins  une  femme,  dame  Douces  il  y  en 
avait  probablement  d'autres  parmi  a  le  commun  »,  si  cette 
expression  désigne  une  foule  de  personnages  muets.  On  pourrait, 
il  est  vrai,  supposer  qu'elle  s'applique  seulement  à  l'ensemble 
des  acteurs,  car  c*est  à  une  invitation  qui  semble  s*adresscr  à 
ceux-ci  :  <«  faisons  tous  le  veau  w,  que  répond  *<  li  kemuns  »,  en 
mugissant  :  «  moie  »  \  Mais,  outre  que  la  première  interpré- 


t.  V.  425.  —  «  Cet  avenissement  du  prud^homme  nous  montre  que  le 
beau  sexe  assistai!  à  la  représentation,  ex  que  r.iuteiir»  psir  déférence»  sun^eil- 
bit  un  peu  son  langage  m  (Guy,  Im-.  cit.,  p.  xu). 

a.  V,  576-378.  —  M.  Guy,  n^ayant  pas  compris  ce  passage,  en  conclut  *que 
'le  tCîttc  est,  a  n'en  point  douter,  corrompu  *,  et  «  que  les  expressions  Li 


390  E.    LANGLOIS 

tation  est  plus  naturelle,  d'autres  deuils  de  la  pièce  semblent 
foire  allusion  à  des  figurants.  Le  moine  trouve  parmi  les 
oflVândes  qu'il  a  reçues  un  «  crespet  w^ 

Que  ne  saî  ^uels  caitis  offrî  (v,  894), 

Lorsque  tous  les  autres  acteurs  ont  quitté  k  scène,  il  voit 
encore  autour  de  lui  «  baisseletes,  en  fans  et  garchonnaîlle  » 
(v.  1093-1094). 

Mais,  à  l'instant  où  le  père  impose  silence  à  son  fib»  celui*ci 
précisément  ne  disait  rien  de  grossier.  En  vain  prétend ra-t-on 
qu'il  s*apprêtait  «  à  proférer  des  énormirés^  »;  rien  n'autorise 
cette  supposition.  Il  avait  simplement  poussé  le  crî  «  bau  »• 
Cest  Ih.  une  donnée  essentielle  dont  la  solution  du  problème  ^ 
doit  tenir  compte  :  ce  n*est  pas  pour  empêcher  te  fou  d*êire 
indécent  que  son  père  parle  des  dames,  c*est  simplement  pour 
le  calmer,  pour  rintimider.  J'ai  montré  d'autre  part  que  ces 
dames  ne  peuvent  être  des  spectatrices.  Ces  deux  considéra-' 
lions  m*ont  amené  à  les  identifier  avec  les  «  bêles  dames  parées  ï> 
du  vers  587,  c'est-à-dire  avec  les  fées,  L*heure  approche  où  elles 
devraient  arriver: 

Car  c'est  droite  coustume  esta  vie 

QM*elcs  vicneni  en  ces  te  nuh  (v.  566*567); 

et  bientôt  Riquier  va  imposer  silence  au  fou  '  et  au  moine,  en 
disant  à  celui-ci  que,  sans  lui. 

Dame  Morgue  et  se  compalgnie 

Fusi  ore  assise  ^  cesie  m  vie  (v,  564*565), 

Les  fées  inspiraient  de  la  terreur  aux  simples  et  aux  gens  du 
peuple ^  et  lorsque  Rainnelet  apprend  qu'on  les  attend,  il 
tremble  de  tous  ses  membres  : 

Aimi  î  sire,  il  i  a  péril  1 

Je  vauroie  ore  estre  en  maison  (v.  584*585). 


Ketmns ...  nrnie.,.  que  les  copiste  ont  arrtngées  à  leur  guise,  ne  sont  que  le 
débris  d'une  phrase  mutilée  »  (/oc,  cit,^  p.  14a).  Les  vers  sont  complets,  les 
rimes  exactes,  et  rien  ne  révèle  une  lacune, 
i.  Guy,  îoc.  ai.,  p.  xlu 
î*  Prcdsémem  au  moment  où  il  pousse  de  nouveau  le  même  cti  «  bau  m/ 
5,  Cf.  Auciiisili  ei  Nki>hik,  p.  lî,  1.  jo  Je  Véd.  Suchier* 


NOTES   SUR   LE  JEU   DE   LA    FEUILLÈE  39 1 

Si  cette  conclusion  est  acceptée,  le  seul  argument  ayant  une 
apparence  sérieuse  sur  lequel  on  se  soit  fondé  pour  prétendre 
que  les  femmes  assistaient  à  la  représentation  du  Jeu  de  la  Feiiillà 
ne  pourra  plus  être  invoqué.  Il  sera  permis  de  supposer  que  le 
public  devait  être  en  principe  exclusivement  masculin  ;  et  le 
reproche  de  grossièreté  qu'on  fait  à  Adam  le  Bossu  s'en  trouvera 
considérablement  atténué. 

iV 

En  discutant  la  question  de  savoir  si  le  jeu  d'Adam  fut  repré- 
senté à  l'occasion  d'une  assemblée  solennelle  de  la  confrérie  des 
jongleurs  et  bourgeois  d'Arras,  et  si  l'on  a  le  droit  d'affirmer 
que  les  femmes  faisaient  partie  du  public,  je  n'ai  eu  en  vue 
que  la  première  représentation,  celle  qui  fut  organisée  par 
Tauteur,  et  pour  laquelle  le  drame  fut  spécialement  composé. 
Mais  j'entends  bien  que  la  pièce  a  pu  être  jouée  plus  d'une  fois, 
même  en  l'absence  du  poète,  et  mes  observations  ne  visent  pas 
ce?  reprises.  Je  me  crois  même  en  mesure  de  signaler  dans  le 
poème  une  interpolation  commise  à  l'occasion  d'une  de  ces 
représentations  ultérieures. 

La  fée  Morgue,  promettant  à  dame  Douce  de  la  venger  d'un 
homme  qui  Ta  offensée,  lui  dit  : 

Je  Tarai  bien  tost  a  point  mis 

En  sen  lit,  ensi  que  je  fis 

L'autre  an  Jakemon  Pilepois, 

Et  l'autre  nuit  Gillon  Lavier(v.  863-866). 

Ce  dernier  vers,  qui  fait  allusion  à  un  événement  antérieur 
seulement  de  vingt-quatre  heures  à  la  représentation  du  drame, 
ne  peut  s'expliquer  que  comme  une  addition  faite  après  coup;  à 
moins  de  prétendre  qu'en  un  jour  la  fin  de  la  pièce,  230  vers  au 
minimum,  a  pu  être  écrite,  et  la  pièce  entière  étudiée,  montée 
et  jouée. 

L'interpolation  étant  constatée  \  la  question  se  pose  de  savoir 


I.  En  admettant  même  que  l'expression  w  l'autre  nuit  »  ne  désignerait  pas 
nécessairement  la  nuit  immédiatement  précédente,  l'interpolation  n'en 
paraîtra  pas  moins  évidente,  je  crois,  lorsqu'on  aura  lu  les  lignes  qui  suivent. 


Î92  E-    LANGLOIS 

si  elle  est  d'Adam  lui-mc^me»  Elle  se  trouve  précisément  dans 
un  passage  rimé  en  sixains  âab  C€h\  Voici  le  sixiiin  dont  fait 
partie  le  vers  866  : 

E  l'autre  nuit  Gtlïon  Lavîer. 

MÂGLOftË 

AlODs,  nous  vous  irons  aîdier. 
Prend  es  avoec  Agnès  vo  fille, 
Et  unç  qui  mmnt  en  chil^ï. 
Qui  ja  n'en  avéra  pité. 

MORGUE 

Faroc  Wâutfer  Mulet»? 

DAM£  DOUCE 

CcstcHIlcCv,  866-871 J, 
Ce  sixain  a  éloigné  du  vers  865, 

L'autre  an  Jakemon  Pilepois, 
avec  lequel  elle  rimai t^  la  phrase  chantée  par  les  fées  : 

Par  chi  va  la  mignoiise,  ♦ 

Par  du  ou  je  vois  (v.  875-874). 

Il  fallait  donc  y  ajouter  un  septième  vers  eo  -ois  : 
Aies  devant  et  je  m'en  vois(v,  872)* 

On  remarquera  dans  ces  vers  les  rimes  fille  :  chille,  ims  :  vois* 
Fois  a  dans  les  deux  cas  identiquement  ie  même  sens;  rimant 
avec  lui-même,  il  constitue  contre  les  lois  de  la  versîficatioîi 
une  faute  qu'un  bon  Timeur,  tel  qu'Adam,  ne  se  permettait 
pas*  Le  fémmin  clnlh\  formé  surffeV,  était-il  employé  par  Adam? 
On  n'en  trouve  aucun  autre  exemple  dans  ses  rimes.  Avait-il 
une  /  mouillée?  Cest  peu  probable.  Jacquemart  Gielèe  accouple 
ci  lie  avec  fille  (Retmrl  le  Nouvel  ^  v.    s^39'4*^)  ^^  ^^'^^  concilie 


1,  Et  non  pas  en  tercets  M\  ace  \die\  djf^  comme  le  dît  M.  Guy  i^ùc.  mi,, 
p.   361,  n.  i).  Ce  rythme  est  emprunté  au  Jm  di  saint  Nkt>kii  de  Je 
Bodcl. 

3.  Un  Wauiier  Mulet,  sans  doute  celui  donc  \ï  est  ici  question^  est  mon 
en  Î274  (Lf  Moyen- Age ^  1900^  p.  55^  n.  2),  mais  l'expression  *  Urne  Wai^-j 
ticr  Mulet  9  n'implique  pas  que  le  mari  soii  encore  en  vie. 


NOTES   SUR   LE  JEU   DE   LA   FEUILLÈE  393 

(v.  S7'S8),  mais  aussi  concilie  avec  ghille  (v.  6637-38,  7259- 
60)  ;  pour  lui,  fille  n'avait  pas  17  mouillée,  ce  qui  n'était  pas  le 
cas  pour  le  poète  d'Arras. 

^addition  n'est  donc  pas  de  l'auteur  du  jeu  ;  elle  a  été  faite 
à  son  insu,  lors  d'une  reprise  de  sa  pièce. 

Gillon  Lavier  devait  être  un  personnage  connu,  sinon  l'allu- 
sion n'aurait  pas  touché  les  spectateurs.  On  peut  par  conséquent 
espérer  que  M^  Guesnon  trouvera  son  nom  dans  le  Registre 
des  jongleurs  et  bourgeois  d'Arras  ;  et  si  la  date  de  sa  mort  est 
celle  où  il  fut  «  mis  en  sen  lit  »,  elle  sera  aussi  celle  de  la 
représentation  qui  fat  l'occasion  de  l'interpolation. 

n  est  utile  de  remarquer  que  le  seul  manuscrit  qui  donne 
intégralement  le  Jeu  de  la  FeuilléCy  c'est-à-dire  le  seul  où  se 
trouve  cette  interpolation,  est  précisément  celui  du  Jeu  de  Robin 
et  Marion  dont  le  texte  a  été  interpolé  par  l'auteur  du  Jeu  du 
Pèlerin. 

Ernest  Langlois. 


A  NEW  MANUSCRIPT 


OF    ADGAR'S    MARY-LEGENDS 


Tlie  coUeccion  ofMînclesof  the  Virgin  inoctosyllabics,  by  the 
Anglo-Norman  versifier  William  or  Adgar,  whidi  is  conîaioed 
in  Egerton  ms.  612  (Brîtish  Muséum),  bas  been  much  studied 
sînce  Wri^bt's  article  '  on  ^  William  the  Trouvère  ff  first 
called  attention  tu  it*  There  îs  no  need  hère  toattempt  a  com- 
plète bibliography  of  the  subject  ;  but  référence  must  be  made 
to  Dr.  Neuhaus's  édition  of  the  text  %  to  Prof,  Mussafia's  dis- 
cussion *  of  ils  relations  with  other  collections  of  Mary-legends, 
and  to  Mr  Ward's  description*  of  the  nianuscript.  But  Eg,  612 
is  unfortunately  imperfect  at  the  beginning,  and  also  wants  a 
leaf  after  f"  j.  Thèse  deficiencîes  were  not  made  good  by  the 
discovery  of  four  leaves  from  another  copy  among  the  mss,  at 
Dulwich  Collège  K  This  fragment,  however,  which  was  edited 
by  Dr.  Neuhaus  in  1887*9  is  of  great  înterest,  supplying  a 
new  introduction  and  dedication,  and  helping  to  correct  ihe 
text  for  two  of  the  taies  ^. 

The  ms.  which  we  are  now  enabled,  through  the  counesy  ^ 
of  its  présent  owner,  to  bring  to  notice,  appears  to  be  in   a 


K  Th,  Wright,  Biagr.  Brit  Lit.  Aogto-Non^aa  pcriod  (1846),  p,  464. 

2.  Adgar*s  Marienl/genJen,  ed,  C,  Neuhaus»  Bd.  IX.  ofDr,  W,  Fôi5tcr*s 
Akfr.  Bîbliotbek  (Hdlbronn,  ï886). 

J.  A.  Mussafia^  Studun  ^u  dm  mittelaU,  MarimL^  IV  (Wicn,  1^91)1 
pp.  U-lJ,  36-85. 

4.  H.  L*  D.  Ward,  Cfl/,  cj  Romands,  II  (tBqi\  pp.  708-7 17, 

5»  G»  F.  Waracr»  Cai.  of  thf  Dulwkk  Cdttigt  mn.^  iSSi,  p.  )46. 

é,  Das  Duhvkh*fr  Adgêr^Fragmffit,  Aschcrsiebcn. 

7.  Sise  Mussafia,  IV,  51-52. 


adgar's  marv-legends  395 

complète  state.  It  does  not^  however,  extend  to  more  than 
half  the  length  of  Eg.  612^  being  a  copy  of  a  shorier  collec- 
tion made  for  the  lady  named  as  patroness  in  the  Dulwich 
fragment  t,  Iwîll  perhaps  be  found  convenîent  if  we  préface 
the  description  of  this  new  manuscript  with  a  brief  summary 
of  the  contents  of  the  two  others* 

Eg.  éî2  contains  forty  »  taies,  three  of  whîch  (n^*  ij  s  and 
6)  are  imperfect,  Prefixed  to  n°  2  is  an  introduction,  în 
which  the  author  states  that  he  was  «  primeseinei  is  Wilbrae 
and  baptized  Adgar,  and  that  he  ha^  taken  the  miracles  which 
he  narrâtes  froni  a  book  in  the  anmbry  of  St*  PauTs  Cathedral 
în  London,  A  second  introduction  précèdes  n°  11  ;  hère  Adgar 
says  that  his  original  is  in  Latin,  and  that  he  is  translating  it 
for  his  friend  Gregory*  After  n°  40  is  an  épilogue,  in  which 
Adgar  congratulâtes  himself  on  ha%'ing  reached  the  end  of  the 
St,  Paut's  book,  the  compiler  of  which  he  names  «  Mestre 

Albri Ki  divins  esteit   muU  vaillant  »;  and  déclares  that 

lie  100  willend  his  work  now,  though  he  could  recount  many 
more  miracles  of  Our  Lady  from  other  sources.  This  is  fol- 
lowed  by  a  dedication  to  Gregory  and  a  prayer  to  the  Vîrgîn. 

The  Dulwich  fragment  (henceforth  called  D)  contains  : 
i**  the  latter  half  of  the  Theophilus-legend  (^'11.  559-1102 
of  Eg.  n*"  17);  i""  an  introduction  to  a  book  of  Miracles  of 
the  Virgin,  which  the  anchor  names  u  Graciai  »  and  dedicates 
to  tt  Dame  Mahaut  »  j  3**  rather  more  than  half  of  the  Vision 
ofWenin  (=  IL  i-i8é  of  Eg.  n^  23). 

The  library  of  the  late  Sir  Henry  Hopc  Edwardes  was  sold 
by  auction,  by  Messrs*  Christie,  Manson  and  Woods,  in 
May  1901-  Lot  598  wasthus  described  in  the  sale-catalogue': 

Vîes  dé  Saints  en  vers,  Mânuscrîpt  of  ihe  xnî»*»  cçntury,  on  velïutTï 
{16  leaves)  wriïten  tn  double  columns,  brown  morocco  «nstra^  gilt  c4gcs, 
by  Bcdford. 


i*  Not  coynting  the  mirack  of  the  abbcis,  the  authorship  of  which  b 
doubtruli  sïnct  h  cornes  after  épilogue  and  dcdîcaijon,  and  îs  scparated  from 
them  by  a  cùfiv  of  the  RoniaDce  of  Gregory,  Netihaus  omits  ii;  bui  it  is 
printed  as  an  appendix  to  the  présent  article. 

2.  Catalo^iif  0}  the  choke  and  valêtëbU  LH^rary  af  Sir  Henry  Hope  Edwardn^ 
BarL  dtfeoitd,  p.  73.  The  purchaser  vcry  ktndly  placed  ît  for  somc  tnûnihi 


396  J.-A,    HERBERT 

The  manuscript  consîscs  of  i6  vellum  leaves,  measuring] 
23  by  î6  centimètres,  the  first  eight  leaves  in  double  columtis, 
the  last  eight  in  triple,  34  to  43  Unes  to  a  column*  In  two 
hands  of  the  ij""  cent,  (probabiy  arc.  1240),  the  change 
occurring  at  f"  3»  lop  of  col.  2  (beginning  of  art,  2),  Initiais  in 
red  and  btae,  The  contents  are  I.  Vie  de  S"'  Marguerite, 
P  i;  IL  Miracles  de  Nostre  Dame,  by  Adgar,  1°  3,  col,  2. 


L    UFE  OF  SJINT  MAROARET. 

This  lire  does  not  seem  to  be  known,  It  Is  in  85  mono- 
rhymed  quatrains.  The  opening  stan^ias  are 

I      A  b  Dcu  locnge  c  a  b  sue  gîoîre 
Faire  volums  d'une  virgînc  mémoire, 
A  qui  Die  us  dona  '  venu  e  victoire. 
Co  qu*€n  dirum  estrait  est  de  Vestoîrc. 

n      Pc3i$  icd  hure  ke  Dieiis  ai  tarre  vînt 
E  pt^on  pur  pécheurs  sustîai. 
Qmi  Deu  ama  e  dreite  vêle  tîat, 
Baptizé  fut  e  crestîen  devint. 

VI    Eh  Antiochc,  une  cité  muh  ridie, 
Ot  un  p^en  une  mult  gente  fille. 
De  giant  buntë  çn  tute  rcpknie; 
Lé  non  de  lî  si  est  dît  MarganEe. 

The  last  threc  stanzas  are  : 

•  E  Deu  !  m  dist-il,  «  par  ta  samte  pitîi. 
Ne  m*«tablîr  ceste  chose  a  peduè!  • 
Dressa  l'cspée.  Le  chîef  U  ad  trenchté, 
li  ai^e  I>eu  i  funcnt  aparillîé. 

Celé  sainte  aime  en  uni  el  csd  portée; 
Devant  cdi  Tunt  mbe  e  aloèe, 
Eq  kî  servùe  de  fu  tâot  pcoée, 
Otc  est  d  ôd  letne  co/rxmtt. 


ai  tbr  dbpoal  of  llie  pnsent  wriier,  oaly 
ootbedbcloied. 


dur  liîs  itaiee  1 


ADGAR^    MARY-LEGEMDS 

A  ctile  glorie  peusscnt  tuit  cil  venir 

Qiù  îi  aidemni  k  soeti  liu  jchcîr, 

E  cel  église  acrcstre  e  asurdir, 

Ou  l'un  deît  Deu  e  la  virgme  servir»  AmetL 


397 


n.    MIRACLES  DE  KOSTRE  DAME,    BY    AI3GAR. 


The  Prologue  is  în  thrce  pans  :  i"*  11.  1*62,  a  général  întro* 
d  action  j  i 
dedîcates  i 


ich  tho  author  nnmes  his  book  «  Graciai  w  and 


^  the  Holy  Trinity  and  to  Our  Lady  ;  2°  IL  63- 
78,  an  appeal  to  good  people  in  gênerai,  and  to  «  Dame 
Mahaut  »  in  particular,  to  listen  to  the  miracles  which  he  is 
going  to  narrate  as  he  finds  them  in  his  «  essamplaire  »;  3" 
IL  79-86j  an  in%'ocation  of  the  Virgin. 

This  is  identical  with  Part  2  of  D.  But  ît  is  printed  in  full 
belowj  coUated  wîth  Dr.  Neuhaus's  édition  ot  the  Dulwich 
text  —  the  édition  being  rare'  and  the  ms.  mutilaied. 

Of  the  twenty-two  taies  which  folio w,  n"*'  to-22  are  aiso 
found  în  Eg.  ;  and  n^*  1-9  are  only  new  versions  of  well- 
known  storîes,  being  the  first  nîne  of  the  séries  of  seventeen 
ules  which  Prof.  Mussafia*  has  called  H  M.  As  the  ms.  has 
no  rubrics  or  other  headings,  the  taies  are  indicated  in  the 
following  list  by  the  short  tîtles  used  by  Mr  Ward  in  the 
Catalogue  of  Romances. 

î.  Hildefotisus  of  Toledo  (=  HMi.  Ward,  li,  604),  f"  j  v^  b.  Printed 
bclow. 

2,  The  drowned  Sacrbtan  (^  HM2;  Ward,  II,  604),  f°  4  vo.  Prîmcd 
below, 

î-  Clerk  of  Chartres  (—  HMj  ;  Ward,  II,  605),  fo  5  r«  h,  Prmted  bclow, 

4,  Fivc  Gauties{^  HM4;  Ward,  U,  605)1  f°  S  ^  **  Prihted  below. 

%.  The  Charitable  Aimsman  (=  HM5  ;  Ward,  11^  605),  f^  6.  Printed 

6,  Ebbo  the  Thief  {—  HM6;  Ward.  II,  606),  r«  6  r^  K  Printed  helow. 

7.  Monk  of  St.  Peter's  at  Cologne  (=  HM7,  Ward,  H.  606),  fo  6  ^k 
Printed  below. 

8  Pilgrim  ofSt,  James  (=  HM8;  Ward,  II,  606),  Jû  y  \^  j^  Printed 
bdow. 


I.  The  Britîsh  Muscum  does  not  potsess  a  copy, 
a.  Siudim,  m,  s$;  Ward,  II,  590,  604-9. 


398  J*-A,    HERBERT 

9,  The  Pricsi  who  ottly  kncw  ont  Mas$(=  HM9;  War^,  II,  607X  f^  & 
V».  Printed  btrlow. 

to.  Two  Brothers  at  Rame  (^  Eg.  612,  no  ij,  fo  9  r>  K  2 lé  Ikies»  «M 
whîch  the  uni  66  are  printed  beiow^  £g.  wanting  the  ftrst  65. 

Next,  as  in  Eg-,  cornes  the  introduction  in  47  Unes,  in 
which  ihe  author  names  himself  Guilleaume  or  Adgar,  and 
speaks  of  his  (c  esan plaire  »  at  Si.  Paul's,  Begins  :  w  Surent 
fet  D^n  merveiles  meintt?s  d,  f*  lo,  It  wHl  be  seen  from  the 
photograph  which  accompaotes  thls  notice  that  ihe  text  hardly 
differs  at  ail  from  that  of  Eg.,  which  has  been  printed  more 
ihan  once  *. 

n,  Prior  of  Sl  Sav»our*$,  Pavia(=  Eg.,  «<*  2).  119  litics,  bcg.  Am*ti  dirai 
{4>  k'tn  tnprh,  fw  to  fw  c, 

12.  Hicronymus  ma  Je  Blshop  of  Pavia(=  Eg.,  n<?  %).  é%  lîoes,  bcg.  £«  la 
ciU^  (iuiit  0fi  cvntm\  f>  ïo  vof. 

ij.  St^med  Cûrporale  (^lEg.^  n»  4).  91  ïlncs,  beg.  ^b  mv  tffîmrmumét^ 

14.  Jew  of  Bourges  {-^  Eg*,  no  5),  f^  ri  vo,  Pnnted  bclow,  ^.  wam- 
tîng  ail  but  the  fîrst  19  lines. 

15.  Milk  :  3}  pUois  în  flower(=  Eg.,  w>  t).  |oo  liocs,  the  1iT«  dgtii 
of  which  are  printed  hi^low,  Eg.  being  imperfuct.  f«  i3^ 

16.  The  Nun  who  saw  ihe  world  (^  Eg.,  n»  40,  but  wiihout  Ihc  intro- 
duclory  IL  1  «96,  and  concluding  more  briefly).  pi  tines,  bcg.  De  h  tsumîn 
vui  deifunUr,  (^  i^  !<>  K 

17.  M-iry  îmage  insuhetl  (=  Eg,,  n**  î7),  68  Unes,  bcg.  En  CûtknHtiaNÊ 

18.  Wife  Jinà  Mîstress  (=  Eg,»  n"»  54),  42  Unes,  b^.  A^  itm  fimmm 
dirai  brtfmeni^  f**  14  v*  ^» 

19.  HustJcChurch  enlarged  (^  Eg,,  n*  30,  bui  omitlîng  the  iatrodoé* 
lion),  310  Unes,  beg,  Bitn  mi  kt  Dm  nul  nt  dnpit  (amwcring  to  I.  |5  of 
EgO,  f"iS. 

20.  MaUr Misericordim  (=  Çg.,  n»  15),  41  Unes,  beg,  Unt  mûhdê$  ma^ 
OMgoiii^,  fo  1$  y^  c. 

at.  Dcâth  of  Julîan  the  Apostate  (=  Eg.,  np  16).  88  Unes»  hcg.  Enét" 
mriirs  h  Julktsi^  f*  16, 

22.  A b bol  «  Elstmuii  »  and  ihe  Feast  of  the  Conception  (^  Eg,,  a«  2t), 
J46  Unes,  bcg.  Li  nis  GuilUoiinté  dt  EngUierrt,  ^  î6t^  c. 


J*  P.Mev*^,  lE&r,  d'âne,  trjttfi,  II,  ^4^  ;  Keubiu»,  Ai^ifr^i  MuntnUi'enden, 
p.  8. 


'  U*iw>Wri>— . 


• 

c 


Romania.  XXXlf,  398. 


ADGAR  S   MARY-LEGENDS  |ff 

Ends  :  E  Deu  ta  nus  diiinst  si  tenir 

Qpe  turner  îi  puise  à  pleisir.  Amefi, 

fo  16  vo  c  (prolonged  one  Une  beyond  cols,  i  and  2). 

It  îs  curious  that  tKe  Edwardes  ms,  includes  neither  ot  thc 
two  taies  found  in  D(Theophilus  aod  Wettin).  Thb  omission 
would  lead  us  to  suppose  Edw.  imperfectj  bue  for  the  <^  Amen  » 
at  the  end  ol  n^  22^  and  the  prolongation  of  the  bst  column 
in  order  to  finish  the  taie*  Perhaps  the  archétype  of  Edw,  was 
incomplète.  But  itseems  possible,  on  the  other  handj  that  Adgar 
made  a  seleaion,  for  the  Lady  Maude,  from  the  longer  séries 
which  he  dcdicated  to  Gregory;  and  that  Edw,  represents  this 
sélection.  The  order  in  D  is  certainly  confused*  It  can  hardly  be 
supposed  that  ihe  prologue  to  the  a  Graciai  »  was  meânt  by 
Adgar  to  corne  anywhere  except  at  the  beginning  of  that 
book;  and  it  seems  unlikely  that,  while  so  popular  a  legend  as 
that  of  Theophilus  was  expressly  excluded  from  it,  it  should 
hâve  begun  with  the  Vision  of  Wercin.  We  know  of  no  Latin 
collection  of  Mary-legends  in  which  the  latter  taie  cornes  firbt, 
and  there  is  no  obvions  reason  for  giving  it  spécial  promiiience 
in  a  book  designed  for  the  amusement  and  édification  of  a  lady. 

The  text  of  D,  as  regards  Wettin  at  ail  events,  is  undoub- 
tedly  nearer  the  original  ihan  that  of  Eg.  (see  Mussafia,  IV, 
32-}),  although  the  ms.  isassigned  by  Mr  Warner  to  a  much 
bter  date,  The  Edwardes  ms.,  on  the  other  hand,  probably 
represents  a  later  rédaction  than  Eg.,  being  considerably  shor- 
1er  in  six  of  the  taies  (Edw,  i  j-19,  22J,  But  it  would  of  course 
be  impossible,  withont  a  minute  comparison  of  the  two  texis, 
10  say  positively  whether  the  discrepancies  are  due  to  abridg- 
mcnt  or  interpolation.  For  the  other  taies,  so  far  as  they  are 
still  extaut  in  Eg.,  the  two  mss<  hâve  practicalty  the  same 
text,  It  is  noE  easy  to  account  for  che  variations  in  the  order. 
Neither  Eg.  nor  Edw.  seems  to  follow  throughout  any  Latin 
original  now  extant;  and  perhaps  neither  of  them  exactly 
represents  Adgar's  own  arrangement. 


400 


I.-A.    HERBERT 


Pr&kigue. 


Mat  fci  bien  kî  sun  wfns  4«pent 

En  tel  liu  dunt  Peo  dt  ^  ameode- 
[tneni, 

Meîllur  livre  ne  ftut  hume  Im 
4  duc  sd  et  autre  a  Deu  atrere. 

Qjji  stib  i  lient /tncfie  '  a  drette  vie, 

Micidre  kt  î  mctne  cumpnie. 

Pur  ^  qui  set  se  deii  pener 
%  Que  plu^urs  puisse  a  Dcu  fneoer. 

Ki  bco  set  et  ne  s'enin^nei, 

MieU  K  venist  estre  muet, 

Kar  de  Deu  tî  en  repnivè 
ts  Pur  queî  sun  savdr  )  ait  ceté. 

Si  cTî  jvra  nia!  gueiredun  ; 

Deu  le  fra  juger  a  lairun. 

Q^i  sages  est  ne  Ta  de  sd  ; 
16  De  sul  Deti  Tad,  sachez  «  en  fci. 

Par  sei  ne  put  grant  sensaprendre; 

Pur  ço  ie  dcîï  ai  autres  rendre, 

Q)je  de  Deu  dd  <x\  ne  ait  mal  grû. 
20  Endrdt  inei  m'en  sul  purpensé 

Que  aukune  chose  voil  trdter, 

Cfcïe  de  Deu  se  aie  repni\*er. 

Uvraîne  ai  emprise  '  gloriuse, 
24  Dunt  vui  mener  vie  penuse, 

Q^e  m'aime  en  ait  *  guerredun 

E  de  mes  péchiez  veir  ?  pardisn. 

H  nuD  dcl  père  faz  l'escrlt, 
aS  Dd  fiz  et  dd  saint  esperit, 

De  la  dame  sainte  Marie  * 

Ki  desux  Deti  est  ixmre  aie. 

De  ses  vertui  voil  *  amier» 
p  Ki  duces  suni  a  escuter. 


Enï  d  livre  poet  rem  oîr 
Cyme  Tem  deit  la  dame  servir. 
Gcst  livre  a  nun  «  Graciai  •, 

}é  Pur  ço  qij*en  grâce  est  oimunal. 
Tut  cstret  '"  de  grâce  seînte 
De    mcint   humme^    de    femme 
[mcintc,  (t  |  v^') 
Si  est  commun  a  tute  gent  < 

40  Ki  de  Deu  servir  unt  taJeot. 
Estrdte  est  d'îcele  reîoc 
Ki  est  pfetne  de  grâce  fine; 
I>e  la  Deu  gracv  est  repEenie, 

44  Cume*'  sa  mère  et  sa  duce  amk; 
Pur  ço  est  ■  Gradal  »  numea 
Cest  cscrit*  si  rapdcrez. 
A  Dampnedeu  Fescrii  présent 

48  E  a  sa  mère  ensemcnt  i 
A  ]m  loeoge,  a  lur  hunur 
Sdt  le  livre  feï  par  dulfçjur**. 
Sel  pre^ntase  a  che^^alcr, 

ÎZ  Tost  roe  dunast  un  chcv-al  cher  ; 
A  riche  dame  u  a  meschine, 
Tost  me  dunast  pelice  hermine; 
Mes  td  dun  serdt  tose  dé* 

16  Al  rei  le  fai  de  majesté 
E  a  sa  mère  gloriuse, 
Kî  tant  est  sainte  ei'*  prtciuse» 
A  la  dame  en  hz  presem*^. 

60  Deu  sdt  a  mun  cutncncemcni, 
E  la'^  dame  sainte  Marie, 
De  qui  treiter  vol  par  sa  mfe  f 

EscuteXf  bone  geni  senée» 
64  Ki  en  Deu  estes  asemhlée, 

E  vus»  dame  Mahauî,  premers, 


I.  D  gent  aient.  The  Une  it  îco  hng  (En  tîu  dunt  dt  amendemeat  ?)^  — 
2,  Su^rm  mené*  —  5,  D  aaef.  —  4*  O  co  îddcx.  —  S-  Rtml  emprise  ai,  ^ 
6.  Iniert  [ban]  ?  — 7.  D  en  ait  —  8,  Linti  j$?  and  jo  ère  u^ntittg  in  D,  bav- 
11^  htm  mi  mwofhy  tke  Mnéer;  ihc  htgtHmHgî  ûfhnes  i^aS  arf  ummUngfÊr  ^èi  j 
MMM  rmsom.  —  9.  D  i  uoiL  —  lo.  Dest  estraii.  —  1 1 .  Hiri  and  dsmtàirt  rmâi 
cum.  -—12,  The  haf  has  hem  mutUaied,  mmâ  afifrwardi  rtpair^^  fmt  ai  ibu' 
poittt;  D  im  dulcur.  —  t),  Z3  ^ftftUs  et.  ^  14*  D  ccst  prcscm,  —  tf.  D  OM. 


ADGARS   MARY-LEGENDS  4OI 

Se  ço  ne  scit  cssanple  u  dit 


A  vus  dirai  plus  volentiers 

Des  miracles ,  des  >  grai^  sueurs, 
68  Ke  fet  nostre  dame  a  plusurs  ; 

A  tuz  et  a  tûtes  ki  Teiment, 

E  ki  de  bon  quor  la  reclaiment.       80 

Ûnkes  ne  fu  hum  ki  Tamast 
72  Que  ele  bien  ne  li  guerredunast. 

Pur  ço  voil  jo  de  li  treiter 

QJa»  mun  busuin  aie  luier.  (f.  3  84 
vo  h) 

Mes  n'en  voil  treiter,  ne  ren  faire, 
76  Fors  dreitsulum  mun  essamplaire; 

I.  Hildefonsus  of  Toledo.  For  the  Litin  text,  see  Pez,  PoIIjo- 
nis...  Liber  de  Miraciilis  S.  Dei  Genitricis  Mariie^,  cap.  i. 


Ki  bien  se  cuntenge  en  Tcscrit. 

Sainte  Marie  curunéc, 
Reine  d'angles  bonurée  », 
Mère  Jesu  nostre  Seinur, 
Entendez,  dame,  a  ccst  pechur  ! 
Preez  pur  mei  vostre  fiz  cher, 
Qye  de  vus  me  duinst  si  treiter 
Ke  meindre  puisse  el  ciel  amunt, 
E  tut  cil  ki  lire  l'orrunt. 


En  Tulette,  la  grant  cité, 
U  li  pupics  est  mut  loé, 
Ert  uns  arcevesques  eslit 

4  Qui  ama  Deu  de  quur  parfît. 
Mut  ert  de  grant  religiun, 
Danz  Hildefuns  aveit  nun. 
Mut  se  pena  el  Deu  servise 

8  E  muteshaucha  sainte  église. 
Od  tut  ce  k'il  fist  si  grant  ben 
Nostre  Dame  ama  plus  ke  rien, 
La  mère  Deu  sainte  Marie. 

1 2  Cist  prudom  ert  de  sainte  vie  ; 
En  sa  loenge  un  livre  fist, 
U  sa  virginité  descrist. 
Tant  plot  a  la  dame  cel  fct 

16  Del  livre  ke  cil  ot  estreit, 
QM*en  un  jur,  la  u  il  se  seeit 
E  le  livre  en  sa  main  tcncit, 
Vint  la  dame  a  lui  vcirement  ; 

20  SU  mercia  mut  ducement. 
Li  archevesques  s'en  esjohi, 


E  de  [cco]  mut  plus  la  servi  ; 

E  establi  ke  en  Tuitimc  jur 
24  Einz  la  feste  nostre  Seinur  (f.  4  r©) 

Qjie  l'en  la  feste  dune  feïst 

De  la  vailante  mère  Crist  ; 

Uit  jurs  ainz  la  nativité 
28  Fust  fête  la  solemnité, 

E  d'an  en  an,  et  refust  anvel, 

Tuz  tens  .viij.  jurs  ainz  le  nocl, 

Que  se  l'ennunciaciun 
32  Venist  dedenz  la  passiun, 

U  en  la  semaine  de  pasche, 

Ainz  noel  fust  fcte  par  tasche  ; 

E  mustra  ben  en  sun  cuvent 
36  La  raisun  pur  quei  et  cument  : 

Si  cum  Dei  deina  de  li  ncstrc. 

Si  deust  la  feste  ainz  la  suc  estre. 

Puis  en  cuncille  gênerai 
40  Fist  celé  feste  cumunal  ; 

Uncore  i  est  si  célébrée 

Par  les  mustier[s]  de  la  cuntrée. 


1 .  Read  dei  ?  —  2.  Z)  E  a.  —  3.  Lims  80  ami  Si  are  wanting  in  D,  eut  away  by 
the  hinder, 

4.  At  the  end  of  a  volume  entitled  Veit,  Agnetis  Blaniihekin...  Vita  et  Rêve-' 
lationes  (y icnnx,  1731).  This  collection  is  analyscd  fully,  and  the  attribution 
to  Potho  disprovcd,  by  Mussafia,  Shidieny  I,  22-30,  II,  53-5.  —  For  another 
text  of  the  same  Miracle,  sec  Romania,  XXIX,  35. 

Rmêmm,  XXXIi     ,  26 


^^^^^H                                                                                         ^^^^^^^1 

^^^^^^H                  Dune  vînt  a  lui  U  dame  heie, 

Bo  Cestui  ad  diable  deceD,                    ^^^H 

^^^^^^H            44  U  il  Sïst  eu  J'çve5{|ual  sde 

(luan4  en  U  chaere  s'asist,                ^^^H 

^^^^^^^H                  Kj  de  f  auicr  estetc  près  mise. 

Que  nostre  Dame  ain^  cunircdisi,           ^H 

^^^^^^H                  Sil  mcrcia  de  cel 

La  sainte  aube  voleit  user,                ^^^H 

^^^^^^^H                  Une  bêle  aube  en  sa  main  tmt  ; 

B4  H  cumençha  si  a  parler                       ^^^H 

^^^^^^H             48  Dist  lî  ke  de  par^iis 

Eosement    ;    «    Cume  sui  hum          ^H 

^^^^^^H                 Diss  :  vt  Cesi  vestt^ment  que  ci  ai, 

[vivant,          ^H 

^^^^^^H                  De  parais  ça  la  portai, 

Si  fu  dt  ki  mei  Tu  devatit,                       ^M 

^^^^^^H                   De]  parais,  mun  très  cher  ûz. 

Dune  me  puis  jo  bon  aturner            ^^^H 

^^^^^^^H             $2  Dedenz  ^vras  joie  et  dditz. 

$6  Oé  veste  ment  qu'il  sout  user,          ^^^H 

^^^^^^H                  Ve&t  ce&lc  aube,  kc  ne  forveies, 

Ëvesque  snl ,  eu  m  il  csteit,                ^^^H 

^^^^^^H                  AI  Testes  m  un  ûz  et  as  meies. 

E  ordené  en  tel  endreit.                    ^^^H 

^^^^^^H                  En  ceste  chaere  serras 

Je  ruserai  tut  ensemcni  »,                 ^^^H 

^^^^^^H             ^6  Quant  le  plaîst  et  quant  vuJras, 

92  E  vesù  sei  del  vestement.                 ^^^H 

^^^^^^^H                   Mes  saciez  tre^  bien  que  après  tei 

Mes,  si  tost  cum  il  le  vesti,              ^^^| 

^^^^^^F                  Ne  sera  nuk  hum  sanz  derci  ; 

De  la  chaere  aval  chai,                      ^^^H 

^^^^^^B                   Hum  nH  purra  sanz  peine  cnit^T, 

E  si  Testreinst  le  vestement              ^^^H 

^^^^^^H            60  Ne  4:este  aube,  fors  tu,  user. 

96  Que  mort  ebaî  susdeement*              ^^^H 

^^^^^^^^^H            Se  aucun  le  fet  par  fol 

La  gent  k*t  fureni  i^o  virent,            ^^^H 

^^^^^^^^^^H           Jo  en   prendrai        vengement  )i. 

De  poure  %  de  dute  fuïreni.               ^^^H 

^^^^^B 

Cd  saint   vfâtemeni  iduac  pris-     ^^^B 

^^^^^^^^m          Cum  dît  lî  ot  la  profede, 

[mm,          ^M 

^^^^^^^r           é4  Si  s'en  parti  la  Deu  ;iniîe. 

100  El  ircsor  del  mustïer  le  mistreat  ;          ^M 

^^^^^^H                  £  laissa  lui  le  vertement 

{t  4  V»)            ■ 

^^^^^^H                  K^aporté  li  01  en  présent. 

Si  guardcnt  h  u  d  urablemeat  «                 ^H 

^^^^^^H                  H  cil  mut  foroient  l'enchéri» 

Uncore  i  est  il  veremcnt.                ^^^H 

^^^^^^H             6S  £  mut  nettement  k  vestî 

Sï  ben  îgiie  ment  h  u  n  u  ra                    ^^^^| 

^^^^^^H                   El  servîse  al  Deu 

IÛ4  La  dame  celui  qu  ek  ama,              ^^^H 

^^^^^^H                   Icbt  hum  devint  seint  et  bon  ; 

Hîldtluiis,  suu  très  cher  amî,          ^^^H 

^^^^^^^H                 'Fus  ala  boneureement 

Pur  ço  que  de  grê  la  servi  ;             ^^^^ 

^^^^^^^H             7a  Del  seck  al  Deu  satm  cuvent. 

Sîâgrius,  qui  li  ^st  ton,                    ^^^H 

^^^^^^H                  Mut  bone  essanple  a^  sun$  laisa 

loë  Ne  put  guarîr  de  maie  mort,          ^^^H 

^^^^^^H                   D'à  mer  cde  k*il  tani  ama. 

Par  ço  nus  raustre  apenemeot              ^H 

Ke  quiqtinke'  la  sert  boncuijcat          ^H 

^^^^^H                  Arcevcsque  estât  esJii 

La  grâce  Deu  avra  pur  veîr                  ^H 

^^^^^^^^              76  Uns  clers  aprC^  su  11  saint  obit  ; 

j  1 2  £  la  suc,  matin  et  seir.                  ^^^H 

^^^^H                         Siagrius  esteît  numé. 

E  Deu  servir  la  nus  duinst             ^^^H 

^^^^H                           Mut  lî  fu  poi  de  la  humé 

E  de  nos  pecch<»  mis  tsluimt  1        ^^^B 

^^^^H                        ,   Del  saint  ki  anz  archevesche  I  fu. 

1 

^^^^K^                 t*  Head  pim.  —  a.  Read  qui  q  uac.                                                                ^^^H 

ADGARS   MARY-LEGENDS 


2.  The  Drowned  Sacristan. 
cap.  2. 

En  un  mustier  un  muine  esteit, 

Q.u[i]  la  segresteinerie  avcit 

Del  mustier  et  des  apentiz. 
4  Trop  ama  seculers  deliz. 

Diables  Tôt  forment  espris, 

En  grant  lecherie  Tôt  mis. 

Ja  seit  ço  ke  feîst  folie, 
8  Mut  cria  a  sainte  Marie  ; 

Quant  devant  sun  auter  ala 

De  mut  bon  qur  la  salua, 

E  dist  suvent  :  «  Ave  Marie, 
12  Pleine  de  grâce,  Deu  amie, 

Damnedeu  seit  ensemble  od  te. 

Ma  chère  dame,  pens  de  mei  ». 

Un  fluvie  esteit  près  del  mustier, 
i6  U  dst  frère  seut  repairer. 

Quant  il  alot  en  sa  folie 

Pur  parfere  sa  lecherie. 

Avint  une  nuit  k[e]  il  vot 
20  Aler  al  mal  k'il  fere  soit  ; 

A  Tauter  Nostre  Dame  ala, 

E  la  dame  bel  salua  ; 

Tuma  s'en  puis  ver  cel  mestier, 
24  Uveri  les  portes  del  mustier, 

Vint  al  âuvie,  passer  quida  ;  (f.  4 
vo  b) 

Mes  diable  ens  le  trébucha. 

Il  neia  [tôt]  sudeement, 
28  Cum  cil  qui  ert  en  gref  turment  ; 

Par  sun  pecché  perdi  sa  vie. 

D*enfern  vint  Torde  cumpanie 

Pur  icele  aime  seisir, 
52  Cume  celé  qui  fist  sun  pleisir. 

Malfé  la  pristrent  et  en  menèrent. 

Envers  enfe[r]n  la  débutèrent. 

Li  angles  Deu,  ki  ço  virent, 
36  Par  la  Deu  grâce  i  descendirent, 

Kar  il  pensent  par  aventure 

Sucurre  icele  créature. 

Li  diable  plein  de  felunie 


403 
For    the   Latin  text,   see  Pez, 

40  Distrent  as  angles  grant  folie, 
E  dient  :  «  A  quei  i  venez  ? 
En  ccste  aime  rien  n'avrez, 
Kar  par  iço  qu'ele  a  urée 

44  Nus  est  ele  a  reisun  dunée.  » 
E  li  angle  se  turent  tuit. 
Que  en  li  ne  truverent  frut, 
Dunt  li  puissent  faire  aïe. 

48  Estes  vus  tost,  santé  Marie, 
E  dist  par  grant  autorité 
As  mauves,  qui  furent  desvé 
Od  esperit  de  culvertise  : 

52  «  Pur  quei  avez  cestealme  prise?  » 
Li  diable  li  respundirent. 
Qui  tuttensles  aimes  haïrent  : 
«  Pur  ço  que  si  fîna  sa  vie, 

56  A  nostre  pleisir,  en  folie.  » 
E  la  dame  lur  respondi  : 
«  Vus  i  mentistes,  enemi  ! 
Bien  sai  [que],  quant  cil  i  ala,. 

60  A  mei  vint,  si  me  salua, 
E  quei  qu[e]  il  unkes  mesfist, 
Tuz  tens  ainz  a  mei  cungé  prist 
Al  aler  et  al  revenir  ; 

64  Pur  ço  le  vusf[e]rai  guerpir.  (f.  5  r«; 

N'ert  mie  de  vostre  purchaz. 
S[i]  vus  dites  ke  tort  vus  faz, 
Metuni  le  jugement  avant 

68  Devant  mun  fiz,  qui  est  puisant.  » 
Si  cum  il  estriverent  si, 
Si  plut  a  Deu,  la  »  sue  merci. 
Pur  Tamur  sa  mère  chère, 

72  Ke  l'aime  au  cors  venist  ariere, 
Ke  el  secle  prcïst  pénitence 
De  ses  mesfctz  en  pacience. 
Endementcrs  que  ccsi  estrif 

76  Dura  si  entur  cest  chaiiif. 

Vint  li  tens  que  li  '  moine  el  muster 
Durent  lever  al  Deu  mester. 


I.  Suppress/a.  — 2.  Supprcss /t. 


■ 

404                                                J,-A.    HERBERT                                              ^^^^^| 

^^^^^1 

Pur  chanter  matines  la  nuit. 

louKî  mut  voleoter^  s'en fuïst;            ^^^| 

^^^^^1 

80  Mui  s*esmer veilleront  trestuit 

Mes  cil  les  preni  a  cunfortier         ^^^| 

^^^^^H 

Ke  lur  seins  oe  sunercnt  mie* 

£  par  ordre  tut  a  cunter,              ^^^| 

^^^^^H 

D*cus  levèrent  nnc  partie 

Cum  \\  avint  par  sa  folie,              ^^^| 

^^^^^1 

E  (juistrent  mut  ïursegrestciii 

104  E  de t  sueurs  salnti*  Marie;            ^^^| 

^^^^^H 

84  Amunl  et  aval,  lut  fu  "  en  vein. 

E  cil  loerenc  Dcu  forment  (!.  >        ^| 

^^^^^^B 

Equant  ilukes  nel  truvcrent, 

rv^)       ■ 

^^^^^^H 

Aval  a  Teue  s*cn  alcrent; 

E  la  chère  dame  ensemeni.                ^H 

^^^^^m 

Tru[v]ercat  ïe  mort  et  neiè 

Li  frères,  ki  si  fu  guari,               ^^^^ 

^^^^^H 

8S  E  ciiï  en  Teuc  aukes  plungé. 

luB  De  bon  qur  la  dame  $«T%i;           ^^^| 

^^^^^H 

Treîstreni  en  Teuc  le  dolent. 

Sdement  ne  laîsa  il  mîe               ^^^H 

^^^^^H 

E  s^esmervcilereot  durement 

Sun  délit  de  celé  folie,                 ^^^H 

^^^^^H 

Par  quel  achesun  i  venîsi 

Mais  chascun  autre  mauves  fet*       ^H 

^^^^^B 

92  Cil  niuînes,  et  qmi  i  queîsi. 

]I2  Suvint  lui  ;isse£  del  malveis  plet        ^| 

^^^^^1 

Sï  cume  il  de  ço  plus  p;irlerent, 

Dunt  h  diable  estrivercm,                    ^| 

^^^^^^1 

E  cume  plusurs  choses  mu  sire  rem 

Quant  envers  enfem  le  menereni.       ^| 

^^^^^H 

De  cel  niuine,  de  cd  chattif» 

Mm  démena  puis  bone  vie.                  ^^k 

^^^^^1 

96  Saut  il  sus  entre  eus,  sain  et  vif. 

u6  Si  kc  Deu  ad  la  cumpaîme.                  ^^k 

^^^^^H 

Li  autre,  ki  aînz  de  lui  parlèrent, 

E  Dcu  la  nus  dutnst  purchaccr           ^| 

^^^^^^^^^^^^^H 

De  pour,  de  du  te  ircmblcrcm. 
kel  '  i  ot,  ke  ke  it  deîst, 

Ke  matifc  n'i  eit  que  engin  nier!       ^| 

^^^^B 

3.  The  Clerk   of  Chartres. 

For  the  Latin  text,  see   Pe2,      ^| 

^^^^r 

cap.  3,  oï  Rmmnia^  XXIX^  jé 

^H 

^^^H 

Et!  Chartres,  la  belc  cité. 

Li  pu  pies  î  vint  de  la  cumr^.      ^^H 

^^^^^H 

Mîst  uiï  cl  ers  de  ^-rant  legiené; 

Pur  sa  foie  renumée                        ^^H 

^^^^^1 

Mut  ésteit  de  legieres  myrs, 

JugtcTent  kc  digne  n*estelt            ^^^H 

^^^^^^B 

4  Cures  dcl  scclc  a  m  a  plusyrs  ; 

ao  D^esire  en  dmuere  par  d reî l  ;        ^^^H 

^^^^^H 

Dclît  ama  uïtre  mesure  ; 

Defors  le  dust  hum  enterrer,             ^^k 

^^^^^1 

En  i^o  mist  tute  sa  cure. 

\%o  VQleient  bien  pruver*              ^^^| 

^^^^^^H 

Neqoedent  il  ot  en  mcmoîrc 

Crestienn^  li  défendirent;              ^^^| 

^^^^^1 

S  La  merc  Dcu,  le  reî  de  gloire^ 

34  LI  prestrc  defors  l'enfuîreni  ;               ^H 

^^^^^^B 

Si  cume  nus  de  Tautre  cutitamcs, 

Sam  messe  ci  sani  lute  Jreiiurc,        ^| 

^^^^B 

Ke  des  muincs  maint  numi»*tnc5, 

Mistrent  le  cors  en  scputtarc             ^| 

^^^^^^ 

fci&t  soleit  tut  ensemcnt 

Cum  cheitif  de  sî  foie  vie,                    ^| 

^^^H 

Il  Saliier  la  dame  su  vent. 

iH  Kt  tuz  jurs  démena  folie,  (t  5  v»;  ^^H 

^^^H 

Suveïît  li  àm  :  «  Ave  Marie, 

Qpant  ti^nte  jurs  jeu  i  aveit         ^^^| 

^^^^^^ 

Dame,  de  vus  requer  aïe  »  I 

Si  vil  ment  et  en  tel  cadrcit»         ^^^| 

^^^^^K 

Avio!  que  cest  clerc  fu  octs 

Nosire  dame  sainte  Marie             ^^^| 

1 

16  Crudemcnt  de  ses  en  émis. 

p  Vint  a  un  clerc  de  bone  vîe;       ^^H 

1.  Suf^fss  fu.  —  2,  n^jâ  Tel? 

j 

68 


ADGARS   MARY-LEGENDS 

Dist  )i,  cum  fust  par  malulant  : 

«  Vus  avez  fait  mut  malement 

De  mun  chancelier,  qui  est  ocb, 
36  Qui  par  tort  est  la  defors  mis. 

Defors  cimitere  meîstes 

Mun  chancelier,  si  mesfeîtes.  » 

Li  clers  prist  a  esmerveilier; 
40  Dist  :  «  Ki  est  vostre  chancelier  ?  » 

E  la  dame  sainte  li  dist  : 

«  Cil  ki  la  fors  si  villement  <  gist, 

Icil  est  mi  chiers  chanceliers; 
44  Si  me  servi  mut  volentiers; 

Qpant  devant  mun  auter  ala 

Mut  bonement  me  salua. 

Demain  par  matin  le  pemez, 
48  El  cimitere  le  metez  ; 

Enterrez  le  a  muh  gran  hunur, 

Cume  celui    ver   ki'    ai  grant 
[amur.  » 

Gl  vint  avant,  al  puple  dist 
52  Cument  la  mère  Jhesu  Crist 

Li  aveit  dit  et  cumandé; 

De  tut  en  tut  l'a  recunté. 

Li  puples  mut  s'esmerveilot 
56  Des  merveiles  ke  cil  cuntot, 


405 

E  cel  mort  de  terre  levèrent  ; 
Dedenz  sa  huche  dune  tru[v]erent 
Une  flur  mut  bêle  et  mut  chiere  ; 

60  La  lange  truverent  entere, 
Cume  preste  de  Deu  loer« 
Dunt  la  dame  soit  saluer. 
Tut  cil,  ki  dunkes  iluc  furent, 

64  Apertement  s*en  aparceurent  » 
Ke  la  huche  alkun  bien  fet  out, 
K*a  la  sainte  dame  mut  plot, 
U  fust  salu,  u  fust  prière; 
E   par  ço  fu  sa  lange   entière, 
(f.  5  vo  h) 
Pristrent  sus  sun  cors,  sil   por- 
tèrent, 
El  cimitere  l'enterrèrent. 
Mutes  grâces  a  Deu  rendirent 

72  E  a  la  dame,  ki  ço  virent. 
Creire  devum  veraiement 
Ke  pur  lui  nel  fîst  sulement 
Nostre  dame  sainte  Marie, 

76  Mes  pur  nus  treire  de  folie, 
E  ke  nus  amun  Deu  et  li, 
Ke  des  pecchiez  aium  merci. 


4.  Five  Gaudes.  For  the  Latin  text  see  Pez,  cap.  4. 


Uns  autres  clers,  prudum  et  hier, 
Mist  en  un  liu,  nel  sai  numer. 
Icist  servi  Deu  bonement 

4  E  sa  chère  mère  ensement. 
Od  ço  ke  sun  servise  fîst 
Ceste  antienne  su[v]ent  dist  : 
Gaude,  Dei  genitrik  chiere, 

8  Tute  Fantiune  en  sa  prière. 
Qst  cumencha  mult  a  languir 
Encuntreço  k*il  dut  mûrir; 
E  cumença  mult  a  trembler, 
12  De  pour  de  mort  a  suer. 


Dune  vint  a  lui  sainte  Marie 
E  dist  lui  :  «  Je  sui  vostre  amie. 
A  que  avez  pour  si  grant, 

16  Ki  Gaude  me  deîstes  tant, 
Ki  untes  feiz  me  nunciastes 
Goie,  quant  Tantiune  chantastes? 
N'aies  pour,  ne  vus  dutez  ; 

20  Sachez,  ke  mal  ne  sentirez. 
La  goie,  ke  a  mei  nunciastes, 
Quant  tantes  feiz  me  saluastes. 
Des  ore  en  serez  parçuniers 

24  Desgoies  et  des  granz  luiers 


I.  Read  vilment.  —  2.  Read  Cum  c.  cui.  —  3.  Ms.  aparccurerent. 


^^^^^V       406                                                           ^^^1 

^^^^^^H                      Ke  d«  mé  avtir  e^perasies. 

Gœi  '  et  îcesce  od  Jesu  Crist.        ^^M 

^^^^^^^H                      duant  Garnit  de  bon  9 tir  chan- 

Pener  nus  de  vu  m  volenticrs          ^^^H 

^^^^^^^H                                                                        u 

|6  A  pyrchacler  icels  luiers  ;             ^^^H 

^^^^^^H                     H  quant             si  renteridt , 

Ser\'ir  la  dame  en  tute  guîse,         ^^^B 

^^^^^^H                28  Del  mal  qulâot  estre  gujiri. 

Ki  eissî  reni  as  su  us  le>  lur  scr-        ^H 

^^^^^^^H                       Ne  prist  guarde  â&  h  tristesce. 

[vise.        ^H 

^^^^^^H                       Reseer  volett  par  leescç  ;  (f.  6  r«) 

Vis  m*est  ke  quiqunkes  la  sert       ^^^B 

^^^^^^H                      Maïs  Talnie  s'eti  parti  atieîn; 

40  De  bon  luer  sera  bien  cert»             ^^^^| 

^^^^^^H                 33  Drcit  en  parais  tut  sun  eirc, 

E  Dcu  la  n«s  duint  {untj  servir,  ^^^H 

^^^^^^^H                       Si  cttme  ta  dame  ainz  11  premîsi 

Que  en  parais  puî&sum  venir  !             ^H 

^^^^^H                5,  The  Charitable  Almsman. 

For  ihe   Larin  text,  see  Pe2,  ^^H 

^^^H 

^^Ê 

^^^^^^H                      Uns    pavres  i    hum ,    ^uffretu^ 

Q^ie  de  sun  serf  eûst  merci,         ^^^H 

^^^^^^H 

2û  Si[i]  ddlverast  de  Tenemi  ^          ^^^H 

^^^^^^H                      Mîst  en  une  vile  entre  gem, 

E  que  parais  li  dunast,                  ^^^H 

^^^^^^^H                        Ki  chacun  jur  ah  rcqucrre 

En  goi  Cl  en  repos*  le  menas! .           ^H 

^^^^^^H                   4  Sun  pam  d'us  en  us  par  la  terre; 

Dune  vint  saime  Marie  a  lui;              ^^Ê 

^^^^^H                       Ki  â\o  ke  îl  û  aquist 

34  Dtst  H,  «  A  meî  ert  tuo  rvfuip             ^H 

^^^^^H                         H  ke  par  le  travâtt  kcfist^ 

Ore  t'en  vien  a  m  ci  s^ns  délai,            ^H 

^^^^^^^K                        Si  purchaça  a  mangier«  bien. 

En  parais  bien  te  mettrai.  »                ^H 

^^^^^^B                  8  E  chx  aim  sur  tutc  rien 

P  l  ush  urs  gen  /  cel  e  vo  i  ^  0  i  rent ,             ^H 

^^^^^^H                      La  mère  Dcu, 

1%  Qui  en   la  mcisun  escut  firent^        ^H 

^^^^^^H                     De  tut  sun  quor  la  réclamât. 

{L  ét^b)       ■ 

^^^^^^H                       De  ^î  bon  quor  la  dame  ama. 

E  la  vérité  fu  tost^  pruvée,                 ^^k 

^^^^^^H                  13  due  d1ccl  pain,  ke  il  purchaça, 

Kar  Taïme  est  dcl  cors  sevrée.            ^H 

^^^^^^^H                       Duna  as  autres  buisuinus^ 

Si  tûst  cume  la  dame  Toi  dit,              ^H 

^^^^^^^H                      As  mcndianï^,  as  suffreitus  ; 

|i  Murut  cei  povre  sur  sun  lit»                ^^| 

^^^^^^H                     l'ut  pur           sainte  Marie 

£  Ta)  me  en  parais  s'en  v«tt                 ^H 

^^^^^^H                 t6  Fist  de  ses  almoncs  partie. 

Od  Nostrc  Dame  en  gok  et  tait.        ^H 

^^^^^^H                      Cist  h  u  me,  q  y  an  t  mûri  r  de  veit , 

Deu  duinst  itel  dclînemt'nî                 ^^| 

^^^^^^1                      Cria  a  la  dame  a  apleit. 

^é  A  tute  cresciene  gent  1                  ^^^H 

^^^^^H                6.  Ebbo  the  Thief.  For  the  Latin  teit^  see  Pez,  cap.  é,         ^^H 

^^^^^^H                       Ci  poe^  merveiies  oîr 

E  sa  duce  mère  ensement.            ^^^H 

^^^^^^H                       De  ces  ki  Deu  volent  servir 

4  Amer  [les]  deîveni  »  lute  gent  ;      ^^^B 

^^^^^^H                  1.  Mrâd  Gaie.  —  2.  Suftprést  le.  —  ] 

[,  Riaé  povre^  —  4.  M$.  mangner.  —        ^H 

^^^^^^H               $.  Mf.  del  tenemj.  «^  6«  Pès,  iuhsHtuitâ  Jùr  r^pos,  wonld  ru^ûtt  ihi  profit       ^H 

^^^^^^H                mtaiuf4  4y  the   Htu,  ~   7,  Tûst,  wMch  mdkfî  thiî  Une  toù  hm^^  thùuid  hm^^^^ 

^^^^^^H                tramftrtd  to  ik  ntxt  Um,  ii/jfn  est.  —  % 

,  Mu  dcnicnt;                                    ^^^H 

ADGAR  s   MARY 
Ne  put  <  li  biens  estre  perdu 
Ki  seit  fait  en  nun  de  Jesu. 
Chascun  bien  est  gueredunez, 
8  Et  li  mal  ensement  mustrez. 
Si  cume  je  crei,  n'est  nul  pechur 
Ki  face  bien  pur  Deu  amur, 
Dunt  Deu  ne  rende  gueredun, 

12  Par  fei  et  par  cunfessiun. 
Cil  ki  sa  bone  mère  sert 
De  bon  luier  sera  bien  cert  ; 
Ja  seit  iço  qu'il  seit  pechur, 

i6  Ki  envers  la  dame  ait  amur, 
Deu  Tamera  mult  pur  sa  mère. 
Oez  que  vus  dirai  de  un  1ère, 
Si  cume  je  trufs  en  cest  sermun, 

20  Ebbo,  me  senble,  aveit  a  nun, 
Ki  mult  embla  et  mult  mal  fîst. 
Autri  aveir  embla  et  prist, 
Dunt  paisscit  sei  et  ses  vassaus. 

24  Mut  ert  malfesant,  mut  fîst  mais, 
Mes  nequedent,  od  la  folie. 
Forment  ama  sainte  Marie, 
E  honura  a  sun  poveir 

28  Cume  sa  dame  en  bon  espeir  ; 
Tuz  tens,  quant  [il]  ala  embler, 
Prist  ainz  la  dame  a  saluer, 
E  fîst  a  li  sa  hureisun 

32  Od    bon    quor,   od     devociun. 
(f.  6  vo) 
Vint  a  un  jur,  si  cume  soleit, 
Embla  aveirs  et  pris  esteit, 
E  cil  ki  od  Taveir  le  pristrent 

36  Od  le  mal  fet  avant  le  mistrent, 
E  fu  dune  tost  gugé  a  pendre. 
Li  dolent  ne  se  pout  défendre  ; 
Menèrent  le  et  sil  pendirent, 

40  Pendant  pur  mort  le  déguerpirent. 


LEGENDS  407 

Si  tost  cum  il  ert  suspendu, 

Vint  a  lui  la  mère  Jesu  ; 

Sil  sucurut  par  sa  merci 
44  Que  deus  jurs  sanz  mal  i  pendi  ; 

Vis  li  ett  que  ele  le  sustint 

De  ses  deus  mans,  pus  ke  ele  i 
[vint. 

Quant  icil,  qui  iluc  le  pendirent, 
48  Revindrent  la  et  vif  le  virent 

E  sanz  mal,  joius  et  haité. 

Mut  se  tindrent  a  enginné  ; 

Quiderent  que  pendu  ne  fust 
52  A  pleine  hart,  si  cume  il  dust. 

Estiker  »  vulent  le  chaitif. 

Pur  ço  que  si  lunges  ert  vif; 

Dreit  a  sun  guittrun  le  fer  mis- 

[irent, 

56  De  Testiker  mult  s'entremistrent. 

Mes  Nostre  Dame  i  mist  sa  main  ; 

Le  fer  refist  venir  en  vein  ; 

E  li  leres  en  haut  lur  crie, 
60  E  dit  lur  de  sainte  Marie, 

Cume  ele  i  est,  cum  le  defent. 

Gl  s'en  esmerveillierent  forment. 

De  la  dame  orent  grant  pour 
64  E  sil  despendent  pur  s'amur. 

Pristrent  la  dame  mult  J  a  loer 

E  sil  laisent  tut  quite  aler. 

Qst  s'en  tuma,  muine  devint, 
68  E  saintement  puis  se  cuntint. 

Deu  et  sa  mère  ben  servi, 

Des  icel  jur,  unt  cum  vesqui. 

Deu  nus  duinst  faire  sun  servise, 

72  Que    diables    par    sa    cuintise 

(f.  6vob) 

N'ait  en  nus  part,  grant  ne  petit, 

Mais  ke  de  Deu  seûn  eslit  ! 


i.Put  m<ans  pot  or  puet.  —  2.  Registered  hy  Godefroy  under  cstachier,  tliough 
it  is  a  différent  verh.  —  3.  Read  P.  mult  la  d. 


^^^H                     4^8                                            J.-A.    flERDHRT 

^^^1                   7.  The  Monk  of  St  Peter's  at  Cologne,  For  the  Latin  text 

^^^H               see  Pez,  cip.  7. 

^^^^H                          En  b  grant  cité  de  Xuluine 

Cumcnt  put  cist  dune  entrer  hî» 

^^^^^1                          Ad    am    musiicrs    u     mistrent 

^6  Qui  od  tecchc  i  vient  sanx  merri 

^^^^^B 

E  san^î  justîse  et  sanz  bone  ovne? 

^^^^H                          01  muMîer  sï  est  de  saine  Pent. 

Sis  mesfet  ascz    le   dcscuvre.  *- 

^^^^^1                      4  Un  jxiomt  i  ot  fadls  lecherre  ; 

(f*  7  î*) 

^^^^^P ,                        Mult  amat  sectiter  ddlt, 

Cume  saint  Pierre  iço  entendi 

^^^^^M                         B  si  desph!  muh  sun  habit. 

40  A  lui  sein z  recria  merci. 

^^^^H                           Plus  aitia  femme  od  betc  chère 

d'il  deus^nt  pur  sun  serf  precr 

^^^^H^                       8  K'en  sun  mustkr  ferc  prière. 

Que  malfé  nei  peust  travailîcr; 

^^^^^D                           l'anç  purchaça  par  ses  deliz 

E  il  si  firent  bonemeni  ; 

^^^^H                         K'i!  otp  puis  qull  fu  moîne,  un 

44  Requistrent  Deu  pur  lé  dolent* 

^^^1 

E  Deu  lur  redist  de  David  : 

^^^^^H                           Mut  ama  k%  deduz  de!  mund, 

«  Oomim^  qnii  haHtaHt}  r 

^^^^^H                     1 2  Iceus  k'encuntre  riwdc  sunt. 

Si  cume  a  saint  Pcrre  aveit  dit  ; 

^^^^^1                           A%int  un  jur  k'il  prtst  pubun 

4S  La  saunie  lur  mustre  et  Tescrit* 

^^^^^1                           Od  frères  de  celé  miabuii. 

Qpant  cil  ne  porent  espleîtier. 

^^^^^H                          .  P  ur  m^Z  guerplr  la  prîst  cl  jur  : 

Dune  ala  saint  Pcrrc  prier 

^^^^H                    ]6  Mais  iichaî  en  mat  greinur. 

Nostfetl;ime  sainte  Marie, 

^^^^^1                          Si  ke  ne  pout  a  ver  cumrort. 

52  Dei  virgincs  b  cumpaînie  ; 

^^^^H                          Qpe  ne  murust  de  maie  mort 

Kar  il  soit  bien,  cum  veirs  estcit, 

^^^^H                           Siin£  cumfessiun  a  dulur 

Ke  li  piuïjesu  les  orreit. 

^^^^^H                     30  H  unz  le  cors  Nostre  Sctnur 

Dune  se  leva  '  sainte  Marie 

^^^^^1                          U  diable  Talme  seisirent 

56  Od  sa  vailante  cumpaînie  ;         ^^Ê 

^^^^H                          [E\  envers  enfern  h  ravirent. 

A  nostre  Seinurs'enala;           ^^M 

^^^^H                         S^int  Pierre  en  hout  piti  [mut] 

H  îl  encuntre  elei  leva  ;            ^H 

^^^H 

^^^^^P                    34  E  vint  a  Jesum  k  pu  ban  t. 

éo  E  a  sun  glorius  cuvent  :            ^^| 

Criant  pur  sun  muine  merci. 

«  0  cliîere  mert%  humain  sucuo, 

Ï-:  Jcsu  bel  ti  respuiidi  : 

0  vus*  racs  trcschicres  surtirs» 

«  Dune  ne  sei  tu  kc  David  dit 

Que  requérez,  que  voîdx  d?  » 

28  El  Muter,  par  munesperit. 

^4  E  la  dame  requtst  merd 

R  thfmttf^  qtds  babitdbîi 

Pur  le  frcre  kî  i»si  ert  mort» 

tt  En  U  niaisun  «1,  ce  dit  Davîd, 

K(  e]  diables  tiiidrcnl  si  fort. 

«  Ukî  reposera  el  muni 

Li  Sau verres  dunkes  II  dît  : 

J2  «  U  tu,  Sire,  ei  ti  angle  sum? 

68    Ja  seit  iço  '  ke  U  laint  escrit 

«  Cil  ki  Mrtz  malctecch^  vient, 

Dient  kc  nus  ne  put  entrer         ^ 

9  Etait  justisc  et  ço  maintient.  » 

Pur  c&goier,  pur  reposer             ^H 

i.  Ms.  lava.  —  2.  Hmd  ço.                                                                       J 

En  mun  tabernacle  u  je  maien, 
72  Ne  en  mun  saint  munt  suverain, 
Fors  cil  ki  vient  sanz  tecche  et 
[mal, 
Een  justise  seit  leial, 
Kequedent,  pur  ço  que  a  nus 
[pleist, 
76  Cumand  ke  li  diable  leist  (f .  7  r»  ^) . 
Cclc  aime  el  cors  repairer, 
Ke  '  puis  se  puîst  adrecier 
H  faire  pénitence  digne, 
80  Ke  a  nus  venir  seit  bénigne, 
E  ait  od  nus  joie  suveraine  ; 
Par  nus  seit  délivré  de  peine.  » 
Qjjant  sainte  Marie  la  bêle 
84  Dist  a  saint  Perre  la  novele 
Ke  sis  hum  ert  si  délivrez, 
Vers  les  culverz  s'en  est  tumez. 
De  une  grant  clef,  ke  en  sa  main 
fout, 
88  Les  culverz  en  veie  chaçot. 
Li  malfé  durement  fuirent 
E  del  tut  Talmc  guerpirent. 
Saint  Pierre  Talme  cumanda 
92  A  deus  beaus  enfanz,  si  rova, 
K[e]  il  au  cors  le  remenassent, 
Si  ke  de  rien  ne  se  urgassent. 
Li  enfaunt  le  resusciterent, 
96  A  un  frère  le  eu  mandèrent 

Qui  moine  esteit  de  cel  mustier 
Ke  je  numai  el  chef  premer. 
E  li  frères  le  remenat  ; 
X  00  E  humblement  li  depreat, 

Ke  chascun  jur  pur  lui  chantast, 
Purço  que  si  bel  le  Aienast, 
«  Miserere  wei,  Deus.  » 
X04  Dist  li  :  «  Servise  vus  frai  plus; 
Vosire  sépulcre  aturnerai, 
E  de  balais  le  neierai. 
Vostre  sepuchre  vieu  avez 
M.  08  Ainz  que  fusez  resuscitez.  » 


adgar's  mary-legends  409 

Li  frères  de  mort  releva  ; 
De  tut  par  ordre  recunta, 
Cume  li  avint,  en»  quant  ke  vit, 
112  Pitusement  Ta  trestut  dit  ; 
E  cume  il  guari  par  Taîe 
Nostre  dame  sainte  Marie  (f.  7  v») 
Cume  des  diables  fud  ravi, 
1 16  Cume  saint  Pierre  cria  merci 
As  sainz  et  a  sainte  Marie, 
Par  qui  il  ot  icele  aïe.  ' 
bi  aucuns  ccst  miracle  ne  creit 
120  KMl  fust  si  des  diables  toleit, 
Dune  penst  en  sun  quor  et  re- 
[penst, 
E  sei  meimes  en  bien  assenst 
De  la  bunté,  de  la  vertu, 
124  Queovererput  la  mère  Jhesu 
Sur  tuz  seinz  et  [sur]  tûtes  seintes 
Ki  a  Sun  cher  fiz  funt  lur  pleintes, 
Ki  Sires  est  de  ciel,  de  terre. 
128  Ki  de  bon  quor  vult  qo  enquerrc 
Tute  ostera  la  mescraance 
E  débutera  la  dutance. 
E  se  il  de  la  clef  cuntredit, 
1 52  Que  cil  es  mains  saint  Pierre  vit, 
Dunt  le  diable  espoentad 
Qpant  Talme  si  bel  delivrad, 
Idunc  repenst  en  sun  curage, 
136  Que  ço  que  n'ad  cors  ne  visage 
Estre  ne  put  mustré  el  munt 
A  ceus  ki  cors  ne  visage  »  ne  unt 
Fors  parcorsdeaperte  semblance  ; 
140  Pur  ço  ne  vei  ge  ci  dutance. 
Deu  put  certes,  et  jur  et  nuit, 
Fere  quant  ke  il  vult  sanz  cun- 
[duit.' 
Sa  grant  vertu  loeie  seit, 
144  E  sis  nun  glorius  et  beneit  ! 

Lui  puissum  nus  trestuz  servir. 
Que  diable  n*i  ait  4  ke  envaïr  ! 
Amen,  dites  trestuz  de  aïrl 


Read  k'ele.  —  2.  Recul  et.  —  3.  Read  vis?  —  4.  Ms.  ni  iait. 


4îa                                                I.-A.    HERBERT                                                            ^^^| 

8-  The  Pîlgrim  of  St  James*  For  the  Latin  tcxi  sce  Pcz»        ^| 

cap.  8. 

^H 

'                                        Tcisîf  11  e  d  cvu  m  n  e  celo^,  (f .  7  ¥**  *) 

Tet  pendanz  m  estut  coper,             ^^^H 

Kc  ûmi  Htigc<  soleit  cunier. 

1                                       Ki  â<  Ouim  ate  esîcît. 

Or  le  faî  lost  de1i\Tement  ;                ^^^^H 

4  Dont  *  sun  moïnc  conter  soictî 

40  Far  cest  fet  avéras  lauvem^l  »,         ^^^| 

En  l'onur  sainte  Marie, 

Ql  qoidout  ke  ce  fyst  sain  Jatne^     ^^^H 

Qjjî  al  mûîne  5st  bd  «ïe» 

Equc  fere  k  pust  sanz  blâme;          ^^^| 

Ccl  fnere  esteit  '  par  nun  Gérard 

Tresi  suti  cutd,  ne  l'en  fu  goeres,          ^H 

\àih 

44  E  {toi]  trencha  ses  gcnîtart^  ;           ^^^H 

8  Si  cunie  nus  tnivom  en  l*cscnt; 

^  Fuis  se  feri  [êns]  el  guitrum,            ^^^H 

Taoî  corne  cil  lais  hum  estdt. 

Ke  a  mort  se  rend  de  randun.          ^^^H 

Mut  cuvdtad  en  bon  endreit 

Cum  il  de  jeu  mains  et  pie^,            ^^^H 

De  alcr  a  saint  Jame  le  bcf , 

4$  Sunt  sis  cumpainun  aveÛet,             ^^^H 

Il  E  par  pèlerinage  iloc '  urcr* 

Oîren  1 1c  chai  û  (  gorgekr,                  ^^^H 

Furcha^a  ço  dum  out  mîcsttcr 

Pristrent  éutic  a  esmeneiler.            ^^^H 

A  éçipendnf  nieim  bel  dener. 

Chascun  cndrdt  sci  s'esmer\'eile,           ^H 

Menues  le  jur  ke  il  aler  dout. 

>i  E  aiumein  une  chandele  ;                ^^^H 

t6  A  sa  femme  vînt,  si  cam  Ji  pboi. 

Virent  donc  le  ddent  gésir,             ^^^H 

Fîst  Sun  délit  et  sun  talent  : 

Le  sa  ne  de  ^un  guîtrun  boilir.            ^^^^| 

Maïs  ne  sai  pas  veraiement 

Laiseut  mûrt  iluc  le  dolent  «              ^^^H 

^^^^^^^                   S*cle  fu  sa  drdte  muilier 

0  Si  s'en  fuient  dchvrcment  ;                 ^^^^| 

^^^^^^^H             3D  U  âttre  pur  set  déliter. 

Les  hommes  dei  païs  duiercnf«         ^^^^ 

^^^^^^H                  Ala  puis,  ad  meint  cunpainun, 

H  pur  la  poùf  s'en  tuméfient, 

^^^^^^H                   Envers  saint  Jamc  le  baron. 

Qpe  Tcn  a  mai  nés  dcmcniii. 

^^^^^^^H                   CuTO  il  fud  en  l>ire  entré  bien, 

60  E  de  cclc  mon  nm  rctasi,                               ; 

^^^^^^H             24  Vînt  a  ïm  li  colvert  chien, 

Kc  fjit  le  cu5cnt  par  fclunie^ 

^^^^^^H                  Ll  diable,  humain  cnctoi. 

Pur  son  avdr*  u  par  envie. 

^^^^^^H                  Une  nuit  qoam  d\  se  dormî, 

Si  tost  cume  le  chaitif  fu  m<ïr*. 

^^^^^^H                  Ki  se  demustre  a  la  gent 

64  Vint  diable  par  sun  effon» 

^^^^^^H             28  Hfi  clané  de  ^nglc 

Sdsi  [4]  Talmc  dcl  dolent, 

^^^^^^^B                   A  cestot  ^int  en  tel  sembbnce 

E  si  s*en  esjohi  forment, 

^^^^^^^H                   Cume  iaîni  Jime  fuit ,  sanz  d  u  taiice> 

Kc  se  %t  mie  pd  hdlé 

^^^^^^H                   E  dî!ct  11  tut  apertemcnt 

68  Del  dolent  qu*oi  si  enginn^. 

^^^^^^H              ^2  •  Furie  fei,  k*as  fet  foleincnt, 

Cum  diable  l'aime  cnfnenciciit, 

^^^^^^V                   Ne  p6c£  salvâdun  avdr. 

En  coac  d'un  mustîer  pisicrciit^ 

^^^^^^H                  Se  lûsi  ne  fcies  mun 

Ki  de  saint  Fierre  csiabli  fud. 

^^^^^^H                   San«   mat   le   pùcz  faire  et   sam 

71  Ço  avim»  par  b  Deu  venu,  <t  S 

^^^^H                                              [blamc 

r>>) 

^^^^^H             |6  Çosu  ic  lis  sire  siint  Jame  : 

Qoe  saïQt  Jame  le  eocunt ra^ 

^^^^V               I.  MfnJ  D'un,  —  3.  Bêadm,  — 

ADGARS   MARY-LEGENDS  4II 

E  sant  Perre  od  lui  ala.  104  K'al  cors  dust  repairer  aricre. 

Dune  dist  saint  Jamc  fièrement  K'cl  siècle  se  peust  espurgier, 

76  Al  mestre  diable  del  covent  :  Que  malfé  nel  pust  chalangier. 

«  Pur  quel  as  pris,  felun  mastin,  Par  la  dame  sainte  Marie 

L'aime  de  mun  pèlerin?  »  108  Out  cel  chaitif  icele  aïe. 

E  li  diable  ad  tost  retreit  Ke  Palme  vente  el  cors  ariere; 

80  En  dît,  en  voleir,  et  en  feit,  (f.  8  vo) 

E  al  derein  cument  se  ocist.  Par  la  dame,  par  la  prière 

Mais  sain  Jame  cncuntre  ço  dist  Ke  saint  Game  priad  pur  lui, 

Ke  li  culvierz  ne  joliireient  112  Pur  ço  que  a  lui  prist  einz  refui. 

84  Le  chaitif  que  enginné  aveient,  E  quant  cist  hum  fust  repaire, 

E  dit  lur  aperte  pruvance  :  Truva  sei  tut  sein  et  heité  ; 

ff  Sachez,  ke  en  la  meie  scmblancc  Mes  el  guitrum  de  la  nafreûre 

Le  deceûstes  par  semblant  :  116  Truva  un  poi  de  sursaneure, 

88  Tut  cume  a  mei  obeîsant  En  tcstemoine  de  la  plaie  ; 

Fist  simplement,  et  si  se  ocist  ;  En  ço  est  pruvance  veraie. 

Nent  pur  vus,  mes  pur  mei  le  fîst:  Mais  ses  bamiltez,  k*il  ainz  prist, 

E  se  alcun  de  vus  ço  defent,  120  Duinst  s*engendreùre  deffist, 

92  (Si]  vienge  tost  au  jugement  Ne  li  suni  restoré  a  dreit, 

Nostre  dame  sainte  Marie  :  Fors  un  petit  pertuis  estreit. 

De  la  venir  ne  faudrum  mie.  »  Par  unt  il  sa  date  rendi, 

Cil  s'en  alerent,  mes  dolent,  124  Si  cume  nature  cunsenti. 

96  A  la  dame  pur  jugement.  Cist  fu  fet  muine  en  Tabeie 

Quant  la  chose  ert  tute  mustrée  Qu  el  chef  avant  numai  Clunnie, 

De  ça,  de  la,  en  la  assenblée  E  vesqui  puis  mult  lungement. 

Devant  la  dame  e  sun  cuvent,  128  E  servi  Deu  mult  honement, 

100  Li  fel  l'encuserent  forment.  Qui  nus  duinst  sun  ser\'ise  faire, 

La  dame,  pleine  de  pité,  Que  malfé  ne  nus  puise  atraire. 

Ad  dune  l'aime  dereichné  E  que  part  n'ait  en  nos  uveraines. 

Par  tel  fait  et  en  tel  manière  1 32  E  délivrés  seiun  de  paincs  ! 


9.  The  Priest  who  knew  only  onc  Mass.  For  the  Latin  text 
see  Pezy  cap.  9. 

Un  prestres  ert  messe  chantant;  En  l'onur  Deu,  ki  nus  rent  vie, 

Parroisse  out  église  hantar.t.  E  en  l'onur  sainte  Marie  ; 

Mult  se  cuntint  honestemcnt,  Ço  fud  Sahu\  sancta parens(î,  8  %•<>  h) 

4  E  vesqui  gloriusement  ;  1 2  Icele  chanta  il  tuz  tens  ; 

Mes  gueres  ne  soui  de  letreure,  Autre  ne  sout,  autre  n'aprist; 

Kar  en  ço  n'out  mise  sa  cure.  De  bon  quor  *ccle  suie  dist. 

Une  messe  sout  sulemcnt  ;  Li  clerc,  ki  la  messe  oïrent, 

8  Celc  chanta  il  bonement  16  Suvent  le  pruveirc  eschamirent. 


^^^^r  412            i.-A,  1 

HERBERT                                    ^^^^^^^B 

^^^^^^H                   E  â  l'cveskc  &*éti 

56  Eiiveilla  sei,  saîlî  del  lît^                    ^^^H 

^^^^^^H                   De  tL^I  fait  forment  '  T^ncu^rent. 

Puis  le  prov  eîre  fïst  mander,            ^^^H 

^^^^^^H                  U  cveske  en  oui  grant  ire, 

Sun  cnruz  li  volt  parduner.              ^^^^| 

^^^^^^H            20  De  ^0  k'il  altre  messe  ne  soit  dire, 

Li  prestres  devint  dehaitet.               ^^^H 

^^^^^^B                  E  fîst  [e  lost  a 

60  Li  eveskes  chiet  a  ses  ptet,               ^^^H 

^^^^^^H                 La  vérité  en  veut 

E  si  [li]  demande  pardun                  ^^^H 

^^^^^^H                 Demanda  lui,  se  vnm  esEeit 

De)  dit  de  la  defensiun^                     ^^^^| 

^^^^^^H             24  De  la  messe  ke  îssî  discit. 

Que  dit  lî  out  par  est  u  tic  ;                ^^^H 

^^^^^^H                   Li  preâcre             li  dÎ5t, 

64  Pitusement  merci  li  crïe.                   ^^^H 

^^^^^^H                  Kc  autre  mes&e  unkes  n'aprist, 

De  la  dame  tut  li  recunte«                        ^H 

^^^^^^H                   Ke  autre  chanter  ne  saveit 

Cnni  ek  >  11  prcmist  mort  et  huntc.          ^| 

^^^^^^H             3  S  Fors  celé  suie  ke  diseit. 

E  li  prcstre  pardun  li  âst                        ^^Ê 

^^^^^^^H                  U  eveskes  en  out  irur, 

68  Del  ^mki  ke  a  tort  li  dist.                ^^^| 

^^^^^^H                  Si  J  apela  fet  trattur 

Puis  li  eu  manda  bonement               ^^^H 

^^^^^^H                   E  snsduître  de  Crestiens, 

Chanter  h  messe  a  sun  talent          ^^^^| 

^^^^^^^H             31  Fans  pruvcîr^,  povrcs  de  sens; 

K'iï  soit  de  b  damechamier.             ^^^H 

^^^^^^H                  Tut  li  defendi  sun  mestier. 

72  Dist  li  :  «  Ore  vus  vol  cumandier          ^H 

^^^^^^H                   E  cil  se  mist      repeirer. 

Kc  autre  messe  ne  chantez                ^^^^| 

^^^^^^^H                    Revint  a  sa  niaisun  dolent. 

Fors  celé  suli^  ke  save^ .  ■                 ^^^H 

^^^^^^^r               16  Plainst  sei  a  Dcn  pituscmcnt, 

E  soit  durement  mal  ^ù                  ^^^H 

^^^^^^K                   H  cumencha  mult  a  plurer 

76  As  clers  ki  t  orent  encusé.                ^^^H 

^^^^^^H                   De  ^0  ke  ne  pout  mes  chanter. 

SI  i  ania  puis  par  bon  talent,             ^^^^^ 

^^^^^^^H                   La  nuit  puis  k'il  tî  defendi, 

E  honura  le  durement                      ^^^H 

^^^^^^^H              40  La  u  II  eveskes  dormi, 

Pur  amur  la  dame  chère  i                 ^^^| 

^^^^^^H                  Vint  k  dame  i^m  tnensiun^c, 

80  L  ama  pyis  [en]  meinte  manercf,             ^H 

^^^^^^H                   H  pria  mutt  od  lui  par  snnge. 

Bien  le  paisset,  bel  le  vcsti,               ^^^H 

^^^^^^^H                    Si  li  dtst  alkes  fièrement 

Si  lun^ement  cum  il  vcsqui.             ^^^H 

^^^^^^H             44  ff  Tu  as  err^  mult  folement. 

Tui  si  set  nostne  cherc  dame            ^^^H 

^^^^^^H                   Cument  osas  tu  currucer    (L  9  r^) 

84  Défendre  de  hunte  ei  de  hlasnie     ^^^B 

^^^^^^^H                    Mtm  proveîre,  mnn  chanceler, 

ro  ir)    ^^M 

^^^^^^^H                    E  le  servise  Deu  défendre. 

Cd(sj  ki  la  servent  bonemeni,          ^^^M 

^^^^^^^H             48  £  le  mien,  u  il  sent  entendre  ? 

V  ki  rien  funi  de  sun  talent,             ^^^H 

^^^^^^H                  Ccncs,  se  tu  ptus  tost  ne  fais 

Cume  ele  fis!  sun  chapelain^             ^^^H 

^^^^^^H                   K'il  face  ^un  ^r%  ise  en  pais, 

88  Ki  la  servi  de  bone  main,                  ^^^^| 

^^^^^^^B                    Cum  [il]  unke^  miex  le  soit  faire. 

Ov£  nus  duinst  Deu,  li  veir  sau*  ^^^^| 

^^^^^pV              12  Tu  en  avras  hunte  et  cuntraire, 

[vere,   ^^H 

^^^^m                          E  muTTàs  el  trcntisme  jur 

Fur  amur  de  sa  chère  ment              ^^^H 

^^^^1                           A  ctmitiveté  '  et  a  dulur.  » 

hele  e&sanple  a  cesti  prendre,           ^^^H 

^^^^B^                      E  ti  eveskes,  ki  ço  vit, 

91  Ku  nos  aimes  H  pussum  rendn^l               ^H 

^^^^^H                1.  Mt.  Cormérc.  »  a,  Rmd  chaîtivesce  or  duitivter.  —  ;.  Supprm  ék,        ^^H 

ADGARS   MARY-LEGENDS 


4Ï3 


10.  Two  Brothers  at  Rome.  For  the  Latin  text  see  Pez, 
cap.  10. 


En  Rume,  la  riche  cité, 

Mistrent  dui  frère  a  grant  feirté  : 

Li  uns  esteit  cuintc  et  vailanz 
4  E  nobles  mult  et  enpemanz  ; 

Icist  esteit  Pirres  numé, 

Archediacre  en  la  cité, 

Del  mustier  del  barun  saint  Perre. 
8  Avers  esteit  de  grant  manière  ; 

Li  autres  ert  Estieunes  clamé, 

Juges  de  meimes  la  cité. 

Suvent  prist  duns  pur  jugemcnz, 
12  Par  unt  il  destruist  plusurs  genz  ; 

Fais  jugemenz  fist  pur  luiers, 

Les  dreiz  torz,  les  torz  drciturers. 

Mult  par  out  la  lange  vendable, 
i6  Kar  le  dreit  fist  tenir  a  fable. 

De  riglise  de  saint  Lorenz 

Toli  treis  maisuns,  li  dolenz  ; 

De  un'eglise  de  saint  Anneis 
20  Toli  il  un  curteis  maneis. 

Tut  iço  fist  il  a  grant  ton. 

A  vint  ke  sis  frère  fu  mort, 

E  fu  tost  en  peines  mené 
24  Pur  sa  dulerusc  averté. 

En  peines  fu  de  purgatoire. 

Cum  cil  ki  Deu  out  en  mémoire, 

Ses  malfez  deûst  espenir 
28  E  le  règne  Dcu  dcser\'ir. 

Li  juges,  ke  est  Estieunes  dit, 

Murut  après,  sans  lung  respit, 

E  fu  tost  cumc  chaitif  jugé  (f.  9 

fo  c) 

32  Pur  les  granz  mais  k*ot  cnginnc. 

Qpant  saint  Lorens  lu  vit  mener 

Par  desdein  le  prist  a  esguarder 

E  mult  cruelement  Tenviiï 


36  Pur  les  maisuns,  k*enz  li  toli, 
Treis  feiz  le  feri  cruelement, 
Estreinst  sun  braz  durement, 
Mult  le  turmenta,  et  si  Testreinst 

40  Ke  cil  de  la  dulur  s*en  plenst. 
Sainte  Anneis  od  sa  cumpainie 
L'a  despit  pur  sa  felunie, 
K'einz  li  out  feit,  tant  cum  vesqui, 

44  Del  curtil  k*a  tort  li  toli 
Idunc  [fist]  li  omnipotent 
De  cel  chaitif  tel  jugement  : 
«  Pur  ço  ke  cest  chaitif  toli 

48  L*aveir  a  la  gent  sanz  merci, 
E  prist  aveir  et  duns  suvent 
Pur  juger  felunessement, 
A  nient  tuma  la  vérité  ; 

52  Pur  ço  est  dreit  k'il  seit  damné, 
Od  Juda  seit,  le  traïtur. 
Si  ke  jamais  ne  veie  jur.  » 
Oir  poez  sentence  dure 

56  A  tuz  ki   as  plaiz   mettent  grant 

[cure  ; 
Ci  puent  li  jugcur  aprendre 
Ki  tant  aiment  as  plaiz  entendre  ; 
Ci  puent  oir  lur  luier, 

60  K'il  avrunt  pur  les  plaiz  traiter, 
Pur  haut  parier  et  encuper, 
Par  faire  tort  et  dreit  celer. 
Ohi  !  quel  luier  il  avrunt, 

64  Quant  del  siècle  s'en  partirunt  ! 
Pur  lur  grant  sens  sufferunt  peine, 
K'il  nel  mistrent  en  bone  uvraine, 

etc.  as  in  Eg  ,  ii-  1,  l.  1  (=  1.  66  hcre)  et 
sec,  Sce  Ncuhaus,  Adgar's  Marienl^,  p.  4. 


14.  Jew  of  Bourges  (=Eg.,  n°  5).  Only  the  first  29  Unes 
remain  in  Eg.  :  they  hâve  been  printed  by  Neuhaus,  p.  19, 
and  by  Wolter,   Der    liuienknabe  (Halle,   1879,  n«  2   of  H. 


414                                                   J.-A.    1                                                                                   _^ 

HERBERT                                                      ^^H 

Suchier^s  Bibliotlieoi  Normannica),  p*  78,  The  Latin  version    ^^H 

on  whkh  this  is  based  is  that  of  Pez,  cap.  51  (Wolter,  p.  44);         ^M 

not  the  longer  version  of  Cleop*  C,  x»,  which  was  prioietl  by         ^M 

Wolter,  p  47,  and  by  Neuhaus,  Die  lai.  Vorlagen  ^u  dm  all/r.        ^M 

Adgafschen  Marmdeg.  (Heilbronn,  n.  d.  [18S6]),  p*  10,              ^^^Ê 

Eîi  Biiurre,  une  cité,        (f.  1 1  vo) 

C  un  lent  il  vint  al  mustier,                ^^^H 

A  vint  un  fait  muit  rcQurné, 

j6  E  cuni  pui«i  vint  a  racumengicr,          ^H 

Que  uns  niôînes  cumer  solcit, 

Cume  od  tes  enfan?.  od  receu           ^^^^^ 

4  Qui  Je  c:iuse  mornes  cstciL 

Le  glorîus  cors  de  Jesu.                    ^^^H 

Cil  motnes  ert  Peires  nutner  ; 

K  quant  sis  pères  Tentendi,                ^^^H 

Dt  bom  vie  fud  '  locï. 

4u  Par  curui:  T  enfant  envaî  ;                 ^^^H 

Bien  djsi  ke  il  en  la  cité  fud. 

Ne  sout  ke  faire  ne  que  dlrv,           ^^^H 

8  E  kc  iJ  '  i  vit  ceste  vcrtuil. 

Tant  ot  el  quor  curu^.  et  Ire  ;             ^^^H 

Al  juT  de  Pa-sclies  vt;irement 

Reguarda  entur  sei  adt;s,                    ^^^H 

Avini  niuli  gloriusemeni 

44  E  vit  un  fur  ardant  bien  près  ;           ^^^H 

Kc  uifani  a  crtstïçn  î  ilerçni 

Aneirt:  i  çurut  od  Tcnfant,                  ^^^^| 

Il  AI  mustier»  et  od  eb  mènerait 

Sil  geta  en  cel  ré  ard^i.                   ^^^H 

Un  enfïuit,  fiz  a  un  j[ujeti. 

Si  tost  cume  ert  eni'.  el  fur  mis.         ^^^H 

Kl  fokment  rcclaiment  Deu* 

48  Vint  la  dame  de  parais,                       ^^^^| 

t)d  dîi  îîoli  aprciidrL-  kttrure. 

Sainte  Marie,  et  aparut,                      ^^^^| 

16  Latin,  cbreu  ;  par  enveiseurc 

De  tu;^  mab  Tenfant  sucurut,            ^^^H 

Cil  enfcâ  vint  tm  d  mustier 

Sil  guari  del  bx  et  del  ardur,             ^^^H 

Od  les  enfant t  pur  envciser* 

^2  Que  pulnt  ni  senti  de  chaïur*            ^^^H 

Avint  puis  ke  tu  te  h  gent 

Itclc  sembla  al  enfant                         ^^^^| 

20  Vindrent  a  racymungemem, 

Cume  celé  ke  il  ont  vcùe  avani.         ^^^H 

E  reçurent  le  cors  Dcu  ; 

L)  mère  al  enfant  s*escriad.                     ^H 

Si  fist  II  cnfes  al  jueu- 

$6  Had  ^es  main^,  raifani  clama,                ^H 

Sur  Tauter  tstdl  un  ymagv 

Cume  custume  eii  de  nicrcs  pieu          ^H 

24  De  sainte  Marie  en  parage  ; 

Un  veil  li  fu  sur  le  chef  mi^. 

Seient  crestieneat  u  [[ujeues,                ^^^H 

Al  hi  al  Jtujcu  en  avis 

Quant  veient  mesa vente  rien             ^^^H 

Que  «te  cum  vive  moilier 

60  A  cels  ki  eles  volent  biett,                   ^^^H 

28  Aida^   at    prestre   a   cuoiengier  ; 

£  surketut  a  lur  enfant,                      ^^^H 

(L  u  v^b) 

Dutic  guaimentent  et  fiint  cri  grant.          ^H 

A  chah  un  dtma  <  de  la  gcrîi  * 

Si  fist  la  mère  a  ceste  enfant  ;           ^^^H 

De  cel  saint  acumungement. 

64  Guaîmenta  et  plura  tant                      ^^^^| 

Rêvent  li  enfes  a  maisun. 

Ke  eu  muU  poi  d'ure  out  ascmbléc     ^^^H 

p  Sis  pea-s  le  met  a  riîsun, 

Tute  la  gent  de  la  cuntnêe  (f  ♦  1 1  v«  û)     ^^^H 

U  U  csteit  tant  demurê, 

Cresticns,  Gîeus,  ensement  ;              ^^^| 

^p 

£  il  enfes  ad  dune  cimté 

68  Muk  tost  i  ascnbla  grani  gent            ^^^H 

l\  %;  nmlt-  —  2.  Eg.  k*iL—  j.  Eg.  enfant  ÇTvstien»  —  4-  %-  aidâst.  —            ^| 

^^^^^^^k_v 

J.  %.  dunast*  —  6.  £f .  krmks  off  bere. 

1 

ADGARS    MARY-LEGENDS  415 

Al  fur  ardant  et  acur[ur]ent  Li  crcstïen  ki  ço  oïrcnt 

E  Tenfisuit  vif  dune  aparçurcnt,  88  A  la  dame  grâces  rendirent. 

E  sanz  mal,  tut  sein  et  heité,  La  gent  ver  le  gïu  se  pristrent  ; 

72  Si  ke  de  feu  n'esteit  tuchié.  De  li  malfere  s'entremistrent, 

Del  fur  le  pristrent,  sil  menèrent,         Ço  fu  au  père  al  enfant  : 

£  ducement  li  demandèrent  92  Geterent  le  el  fur  ardant. 
Cument  il  fust  guari  itant  Si  tost  cum  il  fu  mis  enz, 

76  El  fur  entre  le  feu  ardant.  Tant  tost  ert  ars  li  dolenz. 

E  il  lur  dist  :  «  Duce  cuvine,  Quant  ço  ert  veu  en  Tasenblée 

Icele  honurable  reïgne,  96  Tuit  ensemble  en  la  cuntrée 
Qui  ert  sur  l'autel  el  mustier,  Crestïen,  j[u]eu,  ensement 

80  Qpi  aida  al  prestrc  a  cumengier,         Servirent  Deu  omnipotent 
Ki  nus  duna  le  cors  Jesu,  E  sa  mère  la  dame  sainte, 

Ele  m'aida  ore  od  grant  vertu  ;  100  Ki  fist  et  fait  merveilles  meinte. 
Si  me  aida  celé  boneurée  Ore  nus  seit  la  duce  reïne 

84  Ke  odur  ne  senti  de  fumée,  De  périls,  de  pecchez  mescine. 

Feu  ne  chalur  neis  ni  senti.  Ki  est  et  mère  et  meschine! 

Ne  del  chief  [nul]  peil  ne  perdi.  » 

15.  Milk  :  23  plants  in  flower  (=  Eg.,   n^  6).  The  first 
eight  lines  are  : 

Ja  avint  en  une  cuntrée,  (f.  12  r»)         De  tut  sun  quor  i  entendi. 

Ke  Europe  est  apeléc,  Mult  les  servi,  matin  et  seir,. 

Ke  uns  ders  i  fu  mult  renumé,  De  bon  quor  et  de  bon  vuleir  (=: 

De  grant  religiun  loé.  Eg.  1.  i). 

Deu  et  sa  mère  mult  servi  ; 


APPENDIX 

THE   ABBESS   DELIVERED    BY   THE   VIRGIN 

In  Egerton  612,  Adgar's  Mary-legends  end  with  an  épilogue, 
a  dedication  to  Gregory,  and  a  prayer  to  thc  Virgin.  This  last 
is  immediately  foUowed  by  a  copy  of  the  Romance  of  Pope 
Gregory  (a  well-known  poem,  and  assuredly  not  by  Adgar); 
then  cornes  the  miracle  of  the  Abbess  delivered  by  the  Virgin, 
like  the  rest  in  octosyllabics  —  the  whole  ms.  being  conti- 
nuous  and  in  thc  same  hand.  In  the  épilogue  Adgar  states 
explicitly  that  he  has  come  to  thc  end  of  his  cxcmplar,  and 


416  J.-A.    HERBERT 

ihat  hc  does  not  iiitend  to  go  buyond  it*  So  that  there  is  a 
strong  presumption  against  his  authorshipof  the  Ahbess-srory, 
But  this  presumptioii  does  nut  amount  to  conclusLvc  pu->of  ; 
for  there  seems  to  be  room  for  doubt  (see  abovç,  p,  399) 
wh^ther  the  taies  in  Eg-  are  in  the  urdcr  in  which  Adgar 
himself  arranged  them,  and  in  the  re-arrangement  (suppusing 
that  there  has  beeo  any)  une  of  the  talcs  may  conccivably  bave 
become  altogether  detached  from  the  rest,  and  been  silently 
added  by  the  copyist  when  he  discovered  his  omission*  On  thîs 
supposition  the  opening  Une  («  De  plusurs  nunains  cunté  ai  ») 
woutd  suggest  that  the  proper  place  for  the  taie  was  immedia- 
tely  after  n**  40,  «  The  Nun  who  saw  the  world  », 

The  story  of  the  Virgin *s  intervention  on  bchalf  of  the 
erring  abbess  is  one  of  the  most  popular  of  ail  the  Mary- 
legends,  and  practically  ail  the  great  Latin  collections  încludc 
ît.  But  in  its  présent  form  it  bas  certain  features  not  found  in 
the  ordinary  versions  —  the  most  noteworthy  of  thèse  bcing 
the  betrayal  of  the  abbess  by  the  nun  in  whom  she  has  con5dcd. 
The  sanie  features  appear  in  Royal  20  B.  xiv,  a  14'''  cent, 
collection  in  Anglo-French  verse,  analogous  in  many  respects 
to  Adgar's  collection  \  and  translated  from  a  compilation  in 
Latin  which  must  bave  been  ideniical  (except  for  two  or  three 
stories)  with  the  Oxford  ms.  Balliol  240.  The  Toulouse 
ms,  4S2,  which  is  very  closely  atlîed  with  Qx(.  (see  Mussaîîa 
n,  17-3  0*  ^^^^  which  includes  the  original  Litin  of  ail  the 
Mary-legends  that  were  undoiibtedly  versified  by  Adgar,  con- 
tains  the  same  text  as  OxL  for  the  Abbess-story.  And  this  lext, 
which  is  printed  below  from  Royal  6  B.  xiv  %  is  clearly  the 
original  of  the  Eg.  version.  It  seems  thereforc  probable  enough, 
a  priori^  that  it  was  in  the  book  of  0  Mestre  Albri  »  and  was 
translated  by  Adgar,  But  it  is  only  fair  to  state  ihai  an  indm- 
trious  philologist^  has  decided  against  Adgar*s  authurship  ot 
this  poem,  after  a  carefu!  comparison  of  ils  language  with  that 
of  ihe  other  Mary -legends  in  1^. 


t*  S^  Mussafia,  IV.  jj-îS,  î4-So,  84-i  ;  WarJ,  II,  718-734, 
2*  For  a  dc^ription  ofthis  nis.,  see  Ward,  11^  657-643. 
î.  Rolfs,  *  Uk  Adgar legend en  a,  m  Rom.  fiwuh.,  l,  179336;    but  ^*c 
Romania,  XII,  132. 


ADGAR^S   MARY-LEGENDS  ^ÎJ 

For  the  ordinary  versîonj  seePez,  cap.  $6;  Vinc,  de  Beauvais, 
SpiC.  HisL,  VU,  86;  Hcmlt,  Prompt.  Exempl.  (éd.  1728), 
n**  659;  T.  Wright,  Laîin  Stories  (Percy  Soc^  1843),  n''  38; 
etc» 

De  *  abhûinsû  instinciu  diaboU  mpr^mia^  et  in  dm  partus  per  samiam 
nmlnm  miser mrdif  likrata. 

S^Tictimonialis  quedam  fuh  abbatbsa  m  quodam  monasterio,  que  cunciis 
slbi  subjcais  sororibus  ttAi  odiosa,  quia  sine  discretione  in  sacro  ordine 
extitit  fervida  ;  quod  ncquaquam  stbi  prospère  cessit.  Kara  instinctu  i|î,Tbolî 
etpropria  fragilitite  decepu  concepiî-  Unde  mox  mestissima  elTecta,  meditari 
cepîlcuîrevclaret  sdcreu  sua.  Excogiiato  iiaque  ingenb,  quatidam  ex  soro- 
ribus  prcpositam  constiiuit  omiil  monasterio,  paulalimque  eam  sibi  famjlia- 
rem  faciens,  demum  totius  sccreu  5m  conscîam  ascjvit.  O  nusquam  tuta 
tides  î  Ips*,  que  debuisstt  secretum  celare,  revelavit  ;  facmmque  est  per  eam 
notum  ârdiidiacono,  pcr  archidiaconum  episcopo.  Sur^çit  exinde  maxîma 
commotio.  Omnibus  fit  sermo  in  commune,  iibbatissam  îliani  deponi  *  vcl 
ctîam  ardere  debere.  Quid  amplîus?  Venit  dies  partus,  et  ecce  in  capitulum, 
însîdîts  ducius,  cum  omnibus  dericis  adest  epis<:opus,  Produdtur  cLimorc 
sororum  tam  abhoniinabile  crimen  in  médium*  Vîderes  quosdam  aures 
ôbturare,  alios  ne  înter  Christian  os  abbatbsa  veniat  judrcare,  ilîos  deridere, 
hos  *  probrare,  omnes  insimul  eam  contemptui  habere.  Quid  agerct  intcr 
talia  abbâtissa  ?  Non  est  opus  verbis  edicere  quant  us  dolor,  iimor  ei  t  rem  or 
iimni  parîter  illius  in  corde.  Spe  itaque  anima  ta,  spc,  înquam,  que  soïa 
hominem  nec  in  morte  derelinquit,  confugit  viriliterad  mitissimamet  miseri- 
cordissimiim  dominam  nostram  sanctani  Mariani.  Ad  quam  enim,  nisi  ad 
Uîam?  Ad,  illam,  dico,  que  omnibus  ad  se  confugientibus  in  necessitate 
prebet  auxilium»  que  est  omnium  peccatorutn  refugium,  oranîumque  Chns^ 
tianorum  solatium  ?  Ad  illam  confugit  abbatissa  in  tania  necessitate^  ante 
aïure  ilHus  orans  et  plorans,  multoque  cum  gcmitu^  singuliu  et  lacrimis 
vota  exaggerans.  Nec  dcfuit  mater  mîsericordie*  Nam,cum  pre  nimia  tnstida 
cordis  akus  sopor  abbatisse  irrepsisset,  adest  domina  nostra  sancia  Maria, 
pbrum  pïissima,  angelorum  obsequio  comitata  ;  primo  ream  increpans,  post 
cûnfcssionem  vero  et  voium  illius  piis  visceribus  eandetu  bénigne  consolans. 
Cumque  abbatissii  in  somno,  ut  sibi  visum  est  et  veruni  fuit,  infantem 
parcret,  ac  tania  quasi  obstetrice  astante,  jussit  mittssima  domina  angelids 
spiriïibus  ut  puerum  genituni  ad  quandam  animam  sibi  dilectam  deportarent, 
t:tquatînus  illum  ad  serviciuni  suum  diligentisstmç  enuCriret  ex  sua  parte 
saïutîindo  juberetur;  quod  et  factum  est,  Igitur  m  ter  ista  opéra  miscricordie 
tit  in  capitule  masimus  tumullus  miserie.  Mittuntur  ab  episcopo  clericî,  ut 


I.  Ms,  Royal  6  B.  XIV,  f.  87.—  2.  Mî.  depontre.  —  3,  Ms.  hoc. 
mmXXXÏi 


27 


4l8  J,-A,    IIËHB£IIT 

cuni  dedecorc*  abbatîssâm  ad  judicium  âdduoint*  Cum  vûid  cssict  Adhibîti, 

direxii  epîscopus  legdîos  tit  tilerym  cjtis  dilîgcmîssînïc  considtnircnt  ;  qui 
nallum  hujusce  rd  sîgnuni  omnitm  invenietiies,  inirantits  r*;numuvi'ruot* 
Destiiiamur  alîi  ei  silît  divcrsi  ordinis  ce  scxm,  amm  ex  [ac]cus*intibu5,  qui 
idem  mirati  rcporunt.  Ad  ultimum  jp<rgn  ipse  inçrtîdulus  episcopus,  cl 
vîdcûs  eam  dacreni  et  sanaui  ei  omnino  ab  omni  pondère  ïibcratn,  fellt 
Ciommotus  jussii  ignem  copiosum  acccndi,  et  in  illum  accusaîones  et  accusa* 
irices  abbatiss^;  précipita  ru  Hec  ut  illj  audïvit,  ad  pudcs  episcopi  se  prosier- 
nens  omneni  rei  serîcm  ordiiialim  c'narravit.  Admiratur  cpiscopus  supra  qujm 
dici  pptest,  henignissimamtiui^  Dei  genicnceni  cuni  otmtiibas  alih  cxctïsa  voce 
colEaudaïiSj  cxtimplo  cum  cterids  ad  personam  pergit,  puerumque  sicui 
prcdictum  esc  a  s^incta  Maria  coninittidaTuni  mveuîf .  Qui  ^eptcni  anoi»  intbi 
tiutritus«  postea  in  caria  cpiscopt  studiosissinie  cxiîtit  cdcxrius.  Dcfyticta 
auicm  ep!SCOj>o,  m  catlicdruni  pontificalem  ho  non  lî  ce  est  sullimatus,  obi 
sanciissimani  vitam  ad  fiiiein  u^ue  perduxit,  Per  umnîa  et  ifi  omnibus  bcûc- 
dicius  Dcus.  Aiuc». 


Dr /\i/¥.Wi«<vml("V(Eg,  6il,  f.  961^)  l\tr  k  dame  deUvtrêi , 


De  plusun*  tiuitaini  cunté  sa  \ 
D*utic  abc[ejs5t;  vus  dirai , 
Cument  la  danic  de  pitié 

4  La  delivcra  puis  sun  pcchi<^i  (ft^é 

r*  h) 
La  sainte  dame  boiienierkt 

Ses  vertus  niu^ïre  a  tute  gcnt  ; 
A  \ià\i^  a  ba^*  ki  unt  mesdçr, 
8  Rst  sa  piiic  retuï  j>renïicr* 
Cco  senti  Eres  bitr  une  dame 
Ki  en  alKssc  di:  grani  fat  ne. 
Hn  ordre  ert  de  tel  fervur 

12  Ke  de  ses  nunaîns  oui  haùr, 
Pur  cfio  que  sanx  discreHun 
Les  encrepa  e  par  tençim. 
E  ceo  n'ist  pas  de  bon  ctirage, 

16  Ainj£[c3t)  fait  d'oi^guil  e  d'uliragc» 
Kar  ki  sujî  sei  vclt  guvemer 
Pîusurs  e  bien  endoctriner, 
Li  covendra  clianger  &ovent 

20  Manière  de  dtasticment  : 

Les  ynx  deii  [om]  par  bel  atralre, 
A  alcuns  grant  (icstrcscc  faîrcj 
Ke  lux  suUmc  lur  qualité* 


24  A  b  parlin  scient  salveî» 

Ceste  abbes^e  e^teii  trop  Jkrc, 
M  îurvea  en  icL  triAniere 
Ke  par  sa  propre  fraillctè 

28  Perdi  de  son  cors  chaslee. 
En  ses  delîjt  si  se  cuntitit  {f,  96 1 
Ke  pur  veir  enceinte  devint* 
Mais  en  effrei  de  Taventure 

p  Ert  sis  penser^ï  de  grant  cure  ; 
Ne  soit  quel  cunscil  avrcit, 
Del  les  cunï  se  dcî néant, 
Mult  crient  dcl  mund  la  hnncvsun; 

î6  Plus  crient  nature  craisun, 
Ki  la  dcstreineni  a  ^u*^^*^^ 
Cea  qu*en  sei  ^ent  fructifier. 
De  ceo  ftst  ele  Sijgeinent, 

40  Ke  [ki]  dcsturbc  ;i  escient 
Naturele  engendr[è]uric. 
Vers  Deu  niespreni  ulirc  meaure. 
G  tant  péclnt  ot  dcî  dcîiturbcr, 

44  Grcîgnur.  l*engcndrure  tuer 
E  a  Dcu  tolir  sa  faiture^ 
Pur  ki  sotFn  passiun  dure  ; 
Maint  est  en  pechlé  engendré, 


ADGARS   MARY- 

48  Ki  puis  demeine  grant  scinté,  88 

Dunt  en  escrit  plusurs  trovom, 

E  en  noz  tens  alcuns  veûm. 

Geste  abefejsse  s'amesure 
52  De  trop  doleir  pur  sa  porture.  92 

Une  des  nunains  prist  a  sei, 

E  li  mustra  tut  en  secrci  (f.  g6v°b) 

Puis  li  bailla  la  seignurie 
56  De.sei  e  de  sa  abbeïe,  96 

K*ele  ait  pleine  poesté 

A  parfaire  sa  volenté. 

Qpide  par  tant  sei  délivrer, 
60  Qpant  tens  vendra  d'enfanter.  100 

Mais  ki  seit  debonerté, 

Mustrer  a  altre  en  poesté, 

Sovent  faldra  de  cumpaignie 
64  Qpant  plus  avreit  mestir  d'aïc.        104 

A  ceste  daroe  avint  issi  ; 

Kar  celé,  en  ki  suie  merci 

Sei  tute  cumandé  aveit, 
68  La  volt  mettre  en  grevus  plait. 

D*eus  tant  dit  mot  prové  adès, 

Ki  dîst  Nusqtuitn  tuiafides. 

Eelment  *  ert  ore  nuls  trové 
72  Ke  plus  n*aimt  sei  que  Icalté  ; 

Ja  n'ait  tant  pramis  ne  bel  dit 

Ke  pur  un  petit  de  purfit 

Ne  turt  Sun  queor  a  ceo  haïr 
76  Ke  ainz  désira  a  guarantir. 

Ceste  nunain  li  fist  issi, 
Ke  sa  dame  tost  descoveri 

De  ceo  dunt  ele  en  bone  fei  (f.  97 

ro) 
So  Mustré  li  aveit  en  secrei.  1 20 

La  nunain  sa  dame  enpeira 

Vers  uns,  vers  altres,  e  quida 

Ke,  si  sa  dame  fust  hunie, 
^4  A  li  remeindreit  la  baillie.  124 

A  l'evesque  dit  la  novcle 

De  rabe[e]sse,  e  la  querele  ; 

E  il  volt  saveir,  sanz  sujor, 


108 


112 


116 


LEGHNDS  419 

S'il  out  eu  verai  cuntor, 
Ceste  abe[e]sse  est  anguissuse 
De  son  péril,  et  poeruse. 
Par  certeins  signes  voit  très  bien 
Qu'a  l'evesque  n'est  celé  rien. 
De  l'aventure,  endreit  de  sei, 
Est  sis  queors  en  grant  efFrei. 
N'ad  ore  ami,  ne  neis  amie , 
De  ki  espeire  aveir  aïe. 
Pur  nient  de  cumfort  pensereit, 
Kar  riens  el  mund  ne  li  valdreit. 
A  la  parfin  prent  a  penser 
De  celé,  ki  est  bone  sanz  pcr, 
Ki  est  refui  a  pécheurs, 
E  de  tuz  mais  verai  sueurs. 
A  celé  sovent  merci   crie, 
Ke  el  siècle  no  seit  hunie.  (f.  97 
r^  b) 
Od  lermes,  od  gémissement. 
Requiert  la  dame  bonement. 
En  li  suie  est  sa  Bance  ; 
En  altre  rien  n'at  espérance. 
Son  jor  aparceit  trop  haster, 
Ke  par  dreit  enfant  deit  aver. 
E  ses  nunains  a  grant  espleit 
Très  bienguaitent  cel  ternie  dreii, 
E  dune  volent  faire  venir 
Le  dergié,  tut  pur  li  hunir. 
Qpei  vus  ireie  jo  plus  cuntant  ? 
Maimes  li  evesque  vint  bâtant 
Od  tut  le  mielz  de  l'evesquié, 
Ke  rabe[e]sse  seit  jugié. 
Dreit  lendemain,  sanz  targerplus, 
Frunt  jugement  de  H  pilus. 
Ki  l'abeisse  dune  veïst 
Iceo  plaindre  dunt  ainz  joîst, 
Cunter  pureit  de  grant  dolur 
K'ele  démena  sanz  sujor. 
Ainz  out  de  plaindre  grant  matire. 
Ore  voldreit  mult  mielz  eslire 
Ke  [Dex?]  li  dunast  bel  mûrir, 


I.  Rfiid  relment? 


420  J*-A 

11 S  E  par  sa  mort  sua  docl  ^ntr, 
£  ncpur^uant   pas  ne   se   ubiie 

De  la  dame  s.unte  Marie; 
Devant  sun  alter  vait  piurcr 

I  ja  E  de  SCS  mais  merci  crier, 
Tani  depriê  U  sue  aîc, 
Tant  se  repcnt  de  sa  folk, 
Kc  h  diime  pi  i  use  ment 

136  Alegîcr  volt  sùti  grief  tonnent. 
L'abeess€  est  anguîssuse 
De  requcre  la  glorîiise* 
Tant  gient  e  plurc  a  Icisicr» 

140  Ke  sa'  11  covint  [ajdortnir. 
En  dormant  lî  est  a  vis 
Ke  h  dame  de  parais, 
Od  sa  très  bcle  cumpaîgnîe, 

144  Lui  vint  mustrer  la  sue  aïe. 
Primes  la  prist  mut  a  bîasnier, 
Ke  foi  délit  volcit  liatiKT 
La  u  essample  de  nette 

14g  A  tu^  deveit  a  ver  mustré  ; 

E  ncparquant»  pur  cco  qu*en  lui 
Aore  aveit  mis  sun  rcfui, 
A  ccste  Icii  de  huneisan 

i$2  La  voltguaHr  par  td  raisun 
Ke  jamais  p1u$  de  tel  foIic 
Ne  eust   teclïe    ne    cunipaignie. 
(f.  97  >^"  '0- 
L'abe[ejsse,  tut  en  dormant, 

156  G  rit:  bien  [ijcest  co  venant, 
E  praiiKH  que  od  la  sue  aie 
Démener  voldra  ncciL*  vie. 
Atant  comcnce  a  travail  lier  ; 

1 60  De  son  enfant,  dunr  out  mc^iier, 
Ke  ain^  le  jor  délivré  fust, 
Kc  li  cvesque  ne  la  *  seûst 
E  la  d^me,  del  ciel  reînc, 

164  Ri  merc  Dcu  est  c  mcschine, 
iisi  pur  vit  sa  dcliverancc 


HERBERT 

Ke  guaircs  n*out  grîevc  pesance  ; 
E  puis,  quant  li  enfant  fud  né^ 

16S  Si  Tâd  h  dame  coniandc 

A  dous  de  son  très  bel  covent, 
Qu^iî  le  portent  privecment 
A  une  dame  del  pals, 

172  Ki  en  seinté  vesqui  tut  dis, 
E  li  tomandent  de  s.i  pan 
Ke  l'enfant  nurisc  e  gan 
Dcsque  ïl  ail  sen  c  scient 

176  De  H  servir  dévotement . 

Selunc  ceo,  quVIe  01  conuindé. 
Si  est  Temfant  tant  tost  porté* 
La  dame  aiant  s  en  dqMim,  (t. 

180  E  Tabcssc  s*en  espcri 

De  son  sunge  si  dt'ït table, 
Ke  ja  senti  bien  veir  provablc. 
Par  cco  ke  est  Icgiere  c  seine, 

1^4  De  mais  alegice  de  peine. 
Si  ne  seït  nul  si  mesc néant 
De  cest  mîrack  M  e  gnint, 
Ke  cek,  ki  ad  sii^  Deu  poeir 

lëë  De  faire  trestui  sun  voteîr. 

Ne  pcust  si  grant  veriii  mustrer^ 
En  ceo  que  ci  me  oci  cuiiter* 
Ore  est  haitic  cest*abessc, 

192  Ë  ses  niinainsaprès  la  messe 
L'cves<|uc  od  SCS  clcrs  funt  venir 
En  lur  cliapitte,  pur  oîr 
Cum[eJ  Tabesse  s^est  portée» 

196  E  cum  les  ad  deshonurèc»; 
Muît  la  déjugent,  e  bien  plus, 
Ke  de  mesfaîre  eûst  en  us» 
E  tant  que  plusurs  en  ruvii\:nî 

200  De  cco  k*  îloec  cuuter  otrenu 
Atkuns  dicnt  ke  digneté 
Perdre  deveît  tut  son  eé; 
E  alkuns«  k'  en  rdligiun 


I    RaU  si.  —  2,  Rfosi  k.  —  i-  The  rhymc  is  in  contradtciion  witti  ihc 
grammar. 


( 


ADGARS   MARY-LEGENDS 


204  Demuref  ne  pot  par  reisun.  (f.  98 

ro^) 
Li  evesque  très  bien  oï 
Cornent  chascune  s*esjo! 
Del  deshonur,  ke  si  avint 

208  A  rabe[e]sse  kis  maintint  ; 
Comanda  as  clers  qu'il  alassent 
E  de  son  estât  espiassent, 
Si  sun  forÊiit  si  apparust 

212  K*en  sun  ventre  emfiant  eûst. 
Gels,  si  cuni  lur  est  comandé, 
L*unt  asez  veu  e  espié  ; 
Ne  veient  en  li  nul  semblant 

216  Ke  seit  grevée  d'erofant; 
Ainz  repalrent  e  unt  mustré 
Q)i*en  la  dame  n'unt  rien  trové 
Ke  seit  provance  de  folie, 

220  Ne  que  peust  tumer  a  vilanie. 
Puis  vunt  altres  a  espleit, 
E  meimes  ceo  dient  tut  dreit. 
E  li  evesque  dune  leva, 

224  E  rabe[e]sse  araisuna  ; 

Ne  soit  par  riens  aparceveir 
Ke  par  dreit  dust  emfant  aveir 


421 

A  tort  estre  deshonurées 

E  de  lur  pleinte  trop  blasmées, 

As  piez  Tevesque  chiet  errant, 

244  Merci  li  crie  en  plurant, 
E  cunte  tutes*aventure, 
Cument  la  dame,  virge  pure, 
Li  ad  esté  defensiun 

248  Encuntre  aperte  huneisun, 
E  cornent  ele  sun  enfant 
A  nurrir  bailla  meintenant. 
Li  evesque  ariere  enquist 

252  De  cel  emfant,  se  vcirdeîst; 
E  fud  iloec  Temfant  porté, 
E  quant  que  ele  dist  a  veir  prové. 
(f.98vo^) 
Dune  veîssez  communément 

256  Uns  e  altres  pitusement 
Plurer  de  joie  e  de  tendror, 
E  mercier  lur  Creator 
E  la  dame  sainte  Marie 

260  Ki  as  soens  fait  itel  a!e. 
E  li  evesque  ad  comandé 
A  rabbe[e]sse  de  bon  gré 
Ke  se  peine  en  sa  maisun 


En  son  ventre,  ne  neis  semblant   264  Garder  selunc  religiun  ; 


228  Ke  foie  fust  ne  unt  ne  quant. 
A  ceo  blasmentmult  les  nunains 
(f.98vo). 
Ke  par  signes  issi  certeins 
Lur  dame  pristrent  a  enculper 

232  E  faillirent  en  ceo  prover. 
Errant  unt  fait  un  jugement 
Ke  tel  peine  e  tel  turment 
Sufirir  covendra  as  nunains 

236  Cum  freit  lur  dame,  e  nient  mains. 
Se  sur  li  eussent  veir  prové 
Ceo  qu'a  Tevesque  eurent  mustré. 
Cum  Tabeesse  ceo  veeit, 

240  Ke  ses  nuneins  coveneit 


Kar  sur  celé  ki  Tad  guarie, 
De  li  ne  velt  aveir  mestrie. 
Mais  Tenfant  [en]  prist  a  garder 

268  E  sulunc  Deu  endoctriner. 

Gl  par  tens  muli  pruz  devin[t], 
E  si  seintement  se  cuntint 
Ke,  quant  Tevesque  dévia, 

272  Le  poeple  en  sun  liu  guverna; 
E  ama  Deu  e  sa  justise, 
E  mult  valut  a  sainte  iglise. 
Issi  set  la  sainte  reïne 

276  Mustrer  as  suens  sa  merci  fine. 
Suvent  quant  unt  grcinur  mester 
Les  fait  tut  quites  d'eneumbrer. 


J.  A.  Hfrbert. 


I.A   MESNIE   HELLEQUÎN 


ET  LE  COMTE  ERNHQUTN  DE  BOULOGNE 


Dans  la  dernière  livraison  de  la  Jïfwwiïffiâ^  M*  Kitiredge  a 

montré  que  M.  G.  Raynaud  s'était  mépris'  en  croyant  retrou- 
ver dans  un  passage  de  Walttr  Scott  une  courte  analyse  d'un 
poëine  perdu  sur  Hernequinj  comte  de  Boulogne,  Dans  son 
compte  rendu  du  mémoire  de  M.  Raynaud,  M,  G.  Paris  '  avait 
fait  de  prudentes  réserves  sur  l'identification  d'Hellequin,  chef 
de  la  fantastique  Memit  avec  un  comte  de  Boulogne,  Herne- 
quiu»  tué  à  Saucourt  en  880,  en  combattant  les  Normands.  Le 
regrette  maître  faisait  observer,  en  outre,  que  rexistence  de  ce 
I>ersonnage  au  ix*"  siècle  était  contestable,  car  aucun  document 
contemporain  n'en  faisait  mention.  Néanmoins,  il  concluait  en 
ces  termes  :  *'  Malgré  tout  il  reste  comme  assuré  des  recherches 
de  M.  Raynaud^  Texistence  d*une  chanson  de  geste  sur  le 
comte  Hmlliquin  et  comme  vraisemblable  le  fait  que  cette  chan- 
son expliquait,  comme  le  rapporte  Walter  Scott,  le  nom  de 
Mesnic  Hdkquin,  î>  Cette  dernière  phrase  ne  peut  plus  natu- 
rellement être  maintenue  après  la  découverte  de  la  source  de 
W.  Scott  faite  par  M»  Kittredge,  Faudrait-il  aller  plus  loin  eï 
dénier  toute  réalité  au  comte  Hernequin  ?  Je  ne  le  crois  pas.  Ce 
personnage  est  certainement  historique,  mais  pour  des  raisons 


1.  Avril  190^  p^  5ûî-}0é, 

2.  Lï  nmnk  HeUtquiîK  —  IK  Upùhm  perdu  au  comte  Hernequin ^âam  fAndn 


LA   «   MESNIE   HELLEaUlN   »  423 

toyt  autres  que  celles  qu'a  alléguées  M,  Raynaud,  et»  puUque 
l'article  de  M.  Kittredge  redoune  de  ractualité  à  la  question  de 
la  Mtsnie  Hdlequin^  je  demanderai  à  la  Romama  d'accueillir 
tin  mémoire  sur  les  comtes  légendaires  de  Boulogne,  mémoire 
rédigé  il  y  a  cinq  ou  six  ans  déjà  et  détache  d*un  assez 
volumineux  travail  manuscrit  sur  les  anciennes  dynasties  féo- 
dales de  la  France.  J*espère  qu'il  contribuera  à  débrouiSler  le 
problème  compliqué  des  rapports  du  comte  de  Boulogne  et 
du  chef  de  la  Mesnk. 

Lorsqu'on  ouvre  VArt  de  vérifier  les  dates  et  les  histoires 
locales  du  Boulonnais  et  du  Nord  de  la  France,  on  rencontre 
une  suite  de  comtes  qui  portent  les  noms  de  Guillaume  \ 
Hernequin,  Régnier^  Ernicule,  Gui  à  la  Barbe  blanche,  Bau- 
douin* Une  particularité  singulière  c'est  qu'il  est  impossible  de 
trouver  la  moindre  allusion  à  ces  personnages  dans  les  docu- 
ments contemporains  des  ix*  et  x*"  siècles.  Les  textes  qui  les 
signalent  sont  seulement  au  nombre  de  deux  :  i"  la  Chronique 
de  Gîdnes  etd'Ardres^  écrite  peu  après  1303  par  le  curé  d'Ardres, 
Lambert*;  2"  une  Gétiéalogie  des  comtes  de  Boulogne  composée 
entre  1279  et  1314^  Nous  ne  traiterons  ici  que  des  comtes 
Ernicule  et  Hernequin, 

I.  Ernietile.  —  Il  n'est  connu^  que  par  Lambert  d'Ardres. 
Celui-ci     rapporte     incidemment    qu'Ardolphe,  seigneur    de 


1,  J'âî  traité  du  premier,  Gtiilbume  dit  de  Ponticu,  en  1890,  dans  un 
petit  Arikk,  k  premier  de  ceux  auxquels  h  Romama  (XIX»  390-293)  a 
bien  voulu  accorder  P hospitalité. 

2.  Éditée  par  le  M'*  de  Godefroy -Me nil glaise.  PariSj  1855,  în-8. 

5.  Elle  est  reproduite  dans  les  Chroniques  anglo-mrmamks  de  Francisque 
Michel^  III  (1840),  p.  XIII  sq>;  Paulin  Paris,  lf$  manuscrits  ftançôis  di  la 
BihJhtyqHf  du  rûi\  111  (1840),  p.  201-208.  Les  notes  du  M^»  de  Fortia  (ihid,, 
p.  209-211)  sont  de  nulle  valeur.  Le  dernier  comte  cité  est  Robert  «  qui 
encore  est  ».  Il  s'agit  de  Robert  d'Auvergne,  comte  de  Boulogne  de  1279  â 
1514.  Celte  généalogie  se  retrouve  sous  forme  latine  dans  le  ms,  184  de  la 
bibljothèque  de  la  ville  d*Arras.  C'est  d*après  ce  ms.  qu'ont  été  publiés 
quelques  fragments  par  André  Duchesne»  Hhioire  de  k  maisùJi  de  Gaines, 
Frmtves.p.  î  (Paris^  1631,  în-foL),  reproduits  dans  les  Hiiioriem  de  France, 
XI t  146;  et  plu 5  complètement  par  Mone  dans  Anxei^et  fnr  Kunde  der 
ieuiuiMii  Forint,  i8jSt  *""0Î*  14^-547-  ^  ]^  ^*^  ^'^îs  lequel  du  texte 
btin  ou  du  texte  français  est  l'original  et  la  chose  n'a  pas  grande  importance. 


424  ^'  "^ 

Guînes,  dont  il  fait  le  fils  d'un  certain  Sîfrid  le  Danois,  épousa 
Ma  haut,  fille  du  célèbre  comte  de  Boulogne  Ernicule  :  «  Faino- 
sissimi  Boloniae  comîtîs  Ernîculi  filîam  Mathildem  daxit  uxo- 
rem^  »,  Dans  le  système  généalogique  de  Lambert,  Ardolphe 
est  cousin  d'ArnouI  II,  comte  de  Flandre  (de  96s  à  988)  qui 
lui  donne  Tinvestiture  de  la  seigneurie  de  Guines.  Ernicule, 
beau-père  d'ArdoIphe,  aurait  donc  vécu  dans  la  première  moi- 
tié et  jusque  vers  le  milieu  du  x'  siècle.  Lambert  ajoute  que 
cet  Ernicule  est  enseveli  en  Tabbaye  de  Samer-au-Bois,  oîi  il  est 
appelé  Ernnldus^  en  compagnie  de  deux  de  ses  fils,  Ernulfims 
et  Ensîachius^.  Il  s'élève  avec  violence  contre  ceux  qui  pré- 
tendent qu^Ernicule  a  possédé  non  seulement  Boulogne  mais 
Saint-Pol  et  Guînes  et  qu'il  a  partagé  ces  territoires  entre  ses 
trois  fils.  Le  curé  d'Ardres  a  interrogé  vainement  témoins  et 
chroniques  \  il  n*a  rien  appris  de  pareil  ti  il  oppose  un  autre 
système  à  celui  des  (<  Boulonnais  ». 

De  ceci  il  faut  seulement  retenir  que  Lambert  n'a  pas  pro- 
duit à  la  légère  son  Ernicule  et  qu'on  ne  doit  pas  le  repousser 
de  parti  pris. 

II.  Herntqnin,  —  L'esprit  de  ta  Gétiéxilogir  de  la  fin  dn 
xni^  siècle  est  bien  difFérent  de  celui  de  Lambert.  Celui-ci  a 
tenté  honnêtement,  ou  à  peu  prés,  de  faire  oeuvre  d'historien* 
L'auteur  de  la  Gétiéalogk,  qui  commence  au  roi  Arthur  et  nous 
énumère  une  foule  de  soi-disant  comtes  de  Boulogne  mérovin- 
giens et  carolingiens,  suit  les  traces  de  Gaufrci  de  Monmouth, 
Il  prend  çà  et  là  des  noms  historiques  ^  et  brode  autour  d'eux 
des  récits  dont  son  imagination  de  faussaire  lui  fournit  la 
matière.  Disons  de  suite,  parce  que  la  chose  ne  vaut  guère  la 
peine    d'être   discutée   longuement,   que    Gui   à  k  Barbe  % 


1.  P,  39  et  41* 

a.  P.  4ï. 

l^  Ainsi  HelgAad^  comte  de  Pontîcu,  Florent  dont  i]  lait  un  comte  de  b 
même  région.  Il  y  eut  des  Florem^  mais  aux  xi»?  et  xir*  siècles  et  ils  étaient 
comtes  de  West  frise. 

4.  P.  Paris,  III,  306.  Gui  est  inconnu  de  Lamt>ert  d'Ardres.  Les  àktMxH 
sur  ^es  enfants  sont  chronologiquement  inadnusi^ibtes.  Gui  I  la  Barbe  d  dû 
être  inventé  pour  expliquer  la  possfôsion  par  l'abbaye  de  Samer  des  terres 
4*Estrchem,  Fossemes,  Li  Haie-en-Campagnc,  Ce  monastère  avait  en  effet 
pcfdu  toutes  ses  archiva  lors  des  invasions  normandes.  Les  titres  les  plus 


LA    «    MESNm   HELLEQÏJIN    »  425 

Régnier'  et,  sans  doute»  Baudouin*,  n'ont  pas  plus  de  consis- 
tauce  que  les  Legiers,  Eymes,  Ronulphes^  etc.,  ^  de  l'époque 
mérovIngieuDe. 

En  ce  qui  touche  Hernequin,on  nous  raconte  sa  lutte  déses- 
pérée et  inutile  contre  les  païeps  conduits  par  Gormond  et 
Isembard.  Uantenr  a  puisé  k  connaissance  de  ces  derniers  dans 
une  épopée  bien  connue^.  Mais  le  personnage  d'Hernequîn 
n'y  figure  point*  L'a-t-îl  pris  à  quelque  autre  récit  épique  ou 
est-ce  décidément  le  fruit  d'une  invention  personnelle? 

Avant  de  répondre  à  cette  question  il  est  nécessaire  de  bien 
nous  rendre  compte  de  ce  que  représente  ce  nom  de  Htrnequin. 
La  finale -AfVî  indique  de  suite  que  nous  sommes  en  présence  d'un 
diminutif,  lequel  est  propre  aux  dialectes  bas*allemands  et  aux 
régions  romanes  adjacentes.  Il  ne  commença  à  se  répandre, 
semble-t-il,  qu'au  x*^  siècle  s,  mais  sa  fortune  fut  rapide  et  très 
grande,  même  dans  les  pays  romans  dn  Nord  où  il  fut  employé 
non  seulement  pour  les  noms  de  provenance  germanique,  mais 
encore  pour  les  mots  d  origine  latine^'.  Dans  la  région  romano- 
germanique  du  Boulenois  et  du  Ternois  un  nom  comme  Her- 


anciens  actuellement  consen'és  ne  remontem  qu'au  début  du  XI l^  siècle, 
Voy.  Haigneré,  Dktîmnmrt  du  Fas-dt^Calais^  arronâisiement  de  Bottîognft 
t.  nr,  p,  377- 

K  Régnier  doit  son  cKistcnce  à  une  k^gcnde  éiyniologiquï.  Nous  o*cn 
parlerons  pas  ici  pour  ne  pas  abuser  de  la  patience  des  lecteurs  de  celte 
revue.  Disons  seulement  qu'il  est  nommé  occasioimellement  dans  un  ChHst- 
mas  mrol  Éditîant  (p.  53-61)  racorni:  par  tin  vieillard  au  comte  £usCachc  de 
Guines  pour  Texliorter  à  être<i  bénin  ^  envers  les  siens  et  non  «  tortigoex  » 
(lire  torii^'ttfx^),  comme  Renier,  envers  l'abbaye  de  Simier. 

2,  La  Grnèiih^ie  est  encore  seule  à  nous  parler  de  ce  Baudouin  et  de  ses 
enfants.  Il  provient  sans  doute  d'une  confusion  avec  Baudouin  ÎV  de  Flandre 
{988- 10 î s).  VAti  de  vlfifitr  Us  ilaks  fait  gravement  mourir  eu  103^  ce  pcr- 
sonn.ige  dont  on  ne  suit  rien  et  dont  Texisteuce  est  fort  douteuse. 

j.  Voy.  P.  Paris,  l&c,  dî.^  lîl,  201-202* 

4.  Voy.  Romamâ.XXVU,  1898,  1-54. 

S»  Voy.  le  mémoire  fondamental  de  Stark  dans  les  Sii^un^ihetkhU  de 
rAcadémie  de  Vienne,  t.  LJI  (1866),  540. 

6*  Aiiisi  d.ins  TArtois  on  trouve  non  seulement  Hantuqtnn  «  Petit-Jetin  *> 
(Hancyn)  dont  le  radical  et  le  suffixe  sont  tous  deux  germaniques»  mais 
jtmîmquin  avec  radical  roman.  Cette  formation  est  extrêmement  répandue 
dans  cette  région,  et  quand  le  début  du  mot  subit,  par  surcroît,  une  aphè- 


426  P.    LOT 

fieqtiin  ne  peut  Jonc  ctre  qu'un  terme  familier,  un  (^  Kose- 
name  »- 

Reste  à  retrouver  la  forme  normale  de  ce  nom.  Je  ne  croîs 
pas  douteux  qu*elle  ne  soit  Arnou!^ 

Les  deux  gniphies  Arnulfu^jci  Ernuîfus  sont  usitées  simulta- 
nément \  Retranchons,  par  un  procédé  très  répandu,  la  finale 
d^ErnuI/us^  nous  avons  Erne  ou  Er/io.  Cf,  Roik  de  Rtuiolf^ 
Agilo  de  Egihlf,  Guigo  de  Wigddus^  Ado  de  Adtdfus^  Agù  de 
AgHulfm,  etc.  *  Par  un  procédé  non  moins  usité,  ce  nom 
abrégé  peut  maintenant  prendre  une  finale  à  sens  hypocoris- 
tique.  C'est  ainsi  que,  sur  territoire  allemand,  Lftdck,  Uitke  pro- 
vient de  Liudolf.  Reinhe  de  Reinold^  Gerkr^  Gkrcke  de  Gewfd  ou 
Geru!f\  Les  diminutifs  en  -km  {-chitt)  étant  propres  au  bas- 
allemand  et  aux  régions  romanes  influencées  par  ce  dialecte, 
dans  le  Boulenois  Erne  donne  régulièrement  Erm*-kin* 

La  seule  difficulté  c'est  17;  initiale.  Mais  c*est  un  fait  fré- 
quent qu'une  h  adventice  se  place  en  tête  sous  rinfluence 
des  nombreux  noms  propres  germaniques  commençant  par  une 
aspirée^. 

Maintenant  il  saute  aux  yeux  que  Hernequin  >  Erneiin  tCcst 
autre  qu  Armai,  comte  de  Boulogne,  neveu  ei  ennemi  d'Arnoul 
le  Grand,  marquis  de  Flandre  de  918  à  965  K 


rèsc,  it  en  résuhe  des  formes  où  Von  a  pt-inc  lom  d*abord  à  a^conniittre  le 
nom  nonnai.  Ainsi  Frekin  est  rhypocoristîqtie  û'Ermcnfroi  >  irmîtifrcdum» 
K  Je  dteraî  entre  autres  exemples  celui  de  la  complamte  du  x*  siècle 
racontant  l^assassinat  de  Guilïaumt  û\â  Normandie  par  Artioul  I^  comte  de 
Flandre.  Celui-ci  est  dit  A  mu  if  us  dans  Vun  des  mss*  (x*  sîtïclu)^  Ernuifta 
dans  le  second  (x*^-xte siècle).  Vov.  Jules  Lair,  Htudf.,.îitr  Cmîlautne  h^tt^ut^ 
Èp€^^  p.  62-64,  î^hilippc  MousVet  rappelle  «  li  c^xazm  Bmous  »  (cd.  Hciffen* 
^rg»  i.  8j),  etc.  Œ  plus  bas  p-  4^^»  note  4  et  p  429. 

2.  Surk,  kc.  fit.,  275-175.  291* 

3.  [hid,,  îOî,  îij,  îiS.  Î16, 

4.  On  a  des  exemples  de  Hartiuf/  pour  Jrnulf.  Le  nom  de  Tarchichape- 
tain  de  Charles  le  Chauve,  Ebroinus^  est  écrit  dans  les  diplômes  de  ce  roi 
tantôt  Ebroinus  (J.  Tardif,  Mmtitmenn  khiorii^ufs.  -*  Cartons da  roh^  n«  iç  j, 
162),  tantôt  Hfhmnuî  (Hhfùrûns  ât  Frmct,  VII^  480»  |S'.  4^4)'  fïn  ^îl 
que,  dans  lin  nom  répandu,  ïh  initiale  est  restée  par  erreur  t  Hentian 
>  Aimrtcm, 

%,  Sur  ce  personnage»  voy.  Léon  Vandcrkindere»  La  jbnttû^km  âet  princi- 
fsuUs  ifrritùriakî  M^fs,  l*êd,,  Bruxelles»  190Î*  I>  î4-$8. 


LA    fî    MKSKIE   HELLËQUIV    o  4^7 

Cest  évidemment  cet  Arnoul  ou  Ernoul  dont  Lambert 
d'Ardres  latinise  le  nom  populaire  en  Ernkulus.  Lm-mèmt 
nous  avertit,  au  surplus  que,  à  Tabbaye  de  Samer,  le  nom  de 
ce  personnage  est  écrit  Ernnldfis^  forme  refaite  avec  une  erreur 
de  finale  sur  le  français  Ernoul,  Nous  tenons  donc  pour  établi 
que  Herntquin^  Ernkuim  et  le  comte  de  Boulogne  Arnouï  sont 
tjne  seule  et  même  personne. 

Un  mot  sur  la  situation  du  Boulenois  :  A  la  mort  de  Bau- 
douin le  Chauve,  marquis  de  Flandre  (879-918),  le  Boulenois, 
le  Ternois  et  l'abbaye  de  Saint-Bertin  étaient  passés  à  son 
second  fils  Atlou  (AdalulftnX  célèbre  dans  les  légendes  du 
temps ^  AUou  mourut  le  ï%  novembre  93 î  et  fut  enseveli 
à  Saint-Bertin  ^  Ses  comtés  et  Tabbaye  passèrent  à  son  fri^e 
aîné,  le  marquis  de  Flandre^  Arnoul  I,  dit  «  le  Vieux  »  ou 
tt  le  Grand  î>.  Toutefois  il  est  évident  que  celui-ci  concéda,  en 
fief  évidemment^  le  Boulenois  d  un  des  fils  de  son  frère  Allou, 
nommé  ArnouL  AUou  avait  laissé  un  autre  fils  dont  le  nom 
est  demeuré  inconnu.  Le  marquis  de  Flandre  l'accusa  de  trahi- 
son et  le  fit  périr.  Mais  Arnoul  de  Boulogne,  frère  de  la  vic- 
time, pressa  si  fort  son  oncle  que  le  vieil  assassin  dut  faire 
appel  î  l'intervention  du  roi.  Lothaire  fit  la  paix  entre  les  deux 
Arnoul,  et  le  vieillard  qui  venait  de  perdre  son  fiîs  unique^ 
Baudouin  lll,  témoigna  sa  reconnaissance  au  souverain  en  lui 
léguant  ses  États  (962)  ^  Quant  à  Arnoul  de  Boulogne,  nous  le 


t.  Voy,  Lâir,  Gmlkum^  Lôttguf-Épei,  p.  54,  en  noie, 

1.  Fakuin,  GfMu  ahbatum  Siihknsium,  cap.  105  ;  Vita  sanctî  Bitttdfi  (4a n s 
Mmu  Gtrm.  Script.,  XV,  6^8). 

5.  Je  modifie  assex  sensiblement  l'exposa  de  ces  faîïs  que  \*û  àotmt  dans 
Lisdifttitrs  Carolingiens  (p,  4)),  où  je  subissais  rinfluence  de  l  erreur  en  ra- 
ctni^  qui  fait  mourir  Allcïu  sans  postérité.  Fokuin  ne  dit  ncn  de  pareil,  non 
plus  que  la  Ftandria  generosa  originale  (éd.  par  Betlin^ann  dans  les  Afufi. 
Gtrm.hisL^  IX,  517).  Cette  assertion  se  trouve  pour  la  première  fois  cIicïï 
Lirabert  d*Ardres  (éd.  Godefroy-Ménilglaise,  p*  19),  C'est  dans  sa  chronique 
et  dans  la  Fîandria  gtntrosa  înicrpolée  (éd.  par  De  Smedt,  Cor  pu  i  flironicû* 
rum  FUinâriac,  II»  ^i)  que  Jean  dlpres  a  été  la  puiser  i  la  fin  du  \iv^  siéck, 
et  c'est  de  sa  compilation,  longtemps  très  apprécïéç,  que  cette  erreur  s'^t 
répandue  dans  les  histoires  ïocaics.  —  La  paix  devait  être  réublic  dés  la  Cm 
de  961,  car  le  30  novetnbre  de  cette  année^w  Arnuîfus  nepos  »  souscrit  un 


4iS  F.    LOT 

retrouvons  le  yi  janvier  969  souscrivant',  sans  doute  comme 
ViTssal,  une  charte  de  son  cousin,  le  marquis  Arnoul  II  et,  le 
l^''  avril  988,  un  acte  du  fils  de  ce  dernier,  le  jeune  Biiu- 
douîn  IV'.  On  perd  sa  trace  depuis  lors.  On  n'a  même  pas  de 
textes  anciens  prouvant  d'une  manière  indubitable  que  la 
dynastie  qui  donna  des  souverains  à  l'Orient  et  à  TAngleterre 
descende  de  lut.  Il  semble  avoir  été  enterré  à  Tabbaye  de 
Samer  *  qu*il  avait  enrichie^. 

La  forme  vulgaire  et  difficilement  reconnaissable  du  nom 
du  comte  Arnoul,  dans  la  Getmhgu  et  Lambert  d'Ardre  s,  k 
grossière  erreur  commise  par  le  premier  texte  qui  distingue 
de  Hemekîn   le  comte   «  Èrnous  i»  de  Boulogne  s  soi-disant 


acte  d'Amoul  1  et  de  Riudouîti.  Voy.  Folcuin^  GfUa  abkjtttm  Sithknsittm 
{Mon,  Gtrm.f  Script.^  XJIf,  fiji).  —  Sebn  une  génèalagie  du  xi^  siècle, 
acceptée  par  M.  Léon  Vanderkindere  {0^.  W^,  3*  6ti.,  1.  8û,  271-291),  k 
comte  Baudouin  plus  connu  sous  la  forme  BM^oQq  «  Bauccs  s  de  Vtpopée% 
auquel  Arnoul  l  confia  la  tutelle  de  son  petit-fils  Ainoul  111,  éuil  fils  natu* 
rcl  d*AUou  de  Boulogne,  Nous  persistons  à  croire  avec  les  Anmilu  BUndU 
nunm  que  Bauces  était  fils  du  connc  Raoul  (frère  d*Arnoyl  I)*  Il  est  ctiricux 
de  voir  b  Généalogie  nous  parler  des  démêlés  d*Hernckin  avec  son  oncle  le 
comte  de  Flandre  (appelé  à  tort  Baudouin).  !1  semble  qulï  y  ait  un  souvenir 
de  U  lutte  historique  d'Ernoul  de  Boulogne  contre  le  comte  A  mou  ï  et  peut- 
être  Baudouin  III,  fils  de  ce  dernier. 

1,5,  AruuJfi  BQmnitmh  c^métn,  Voy.  Van  Lokeren,  Cimrks  de  Sûtni- 
Pierre  de  Gand,  I,  n*'  4s* 

î.  Pas-de-CaUis,  arr.  Boulogne,  chef-lieu  de  canton. 

4.  Les  archives  anciennes  de  ce  monastère  ont  malheureusement  disparu 
(cf  plus  haut,  p.  434,  note  4).  Mais  dans  une  charte  d'Etienne  de  Bloisde 
tt4$,  celui-ci  rappelle  les  bienfaits  accordi^s  à  rabbaye  par  ses  prédéces- 
seur, les  deu»  Eusuche  *  et  Em{ulfiJ,  comîîum  Bobnîensîum  quorum 
scripta  amentica  vidimus  ».  Cette  charte  est  connue  par  un  vîdimus  tinc  des 
registres  du  Parlenîent  de  décembre  1299,  Voy.  Baluxe^  Histoirt  di  h 
m*ii^im   d  Auvergne ^  II,   138* 

5.  Chronique  de  Guittes^  p,  J9  et  4t*  H  est  intéressant  de  noter  que  le  tra- 
ducteur de  la  fin  du  xv^  sîéck  a  rendu  en  français  (ihid.,  p,  |8  et  40)  BmieU' 
/uf  par  Ermkin  (sans  h  initiale).  Il  est  singulier  qu'il  soit  tombé  juste,  car 
il  n'avait  d*ajtrc  source  écrite  que  le  teste  laiin  de  Lambert  d*Ardrcs,  et 
c'était,  d'atlkurs,  un  homme  (leu  sagace.  Le  souvenir  d'Iirnckin  auraît-ii 
persisté  dans  b  régiott  ? 


LA    «    MESNIE   HELLEanX    »  4^*) 

père  de  Fromont  de  Lens*,  prouvent  que  ces  rèciis  , 
reposent  tous  deux  sur  une  tradition  orale.  Cette  tradition 
est,  de  pan  et  d'autre^  foncièrement  la  même.  Lambert  sait 
qu'Emicale  a  été  enseveli  à  Tabbaye  de  Samer  dans  le 
même  sépulcre  que  ses  tils.  La  Gcfi/aJ^^U^  nous  raconte  la  lin 
d'Hemequin  d'une  manière  plus  dramatique.  Blessé  par  les 
païens,  Û  meun  en  prières  dans  Tabbaye  devant  Tautel  do 
saint  Pierre.  Son  écuyer  et  sa  femme  tombent  morts  au  même 
insunt  :  «  Quant  ce  vit  Berte,  se  feme,  si  se  laissa  caoir  sor 
lui  et  morut  ilœc  avoec  lui.  >-  Baudouin,  son  tils  aine,  ne  lui 
survit  que  trois  jours  ^.  Nous  sommes  évidemment  en  présence 
d'une  même  légende  locale.  Lambert  la  tenait  des  moines  de 
Samer.  Quant  à  l'auteur  de  la  GéntalifU  il  était  lui- mémo 
moine  de  cette  abbaye,  comme  Ta  très  bien  vu  Paulin  Paris  ^ 
On  a  dit  plus  haut  que  Lambert  combat  passionnément  les 
Boulonnais  qui  prétendent  que  le  comte  a  possédé»  outre  Bou- 
logne, les  seigneuries  de  Saint-Pol  et  de  Guines  et  qu'il  a  par- 
tagé ces  territoires  entre  ses  trois  fils.  Or  la  Généalogie  attribue 
également  à  un  comte  de  Boulogne  la  possession  de  ces  trois 
comtés.  Il  est  vrai  qu'elle  le  nomme  «  Gui  à  la  Barbe  ».  Mais, 
étant  donné  qu'elle  fait  mourir  Baudouin  en  même  temps  que 
son  père  Hernequin,  la  substitution  à  ce  dernier  d*un  comte 
imaginaire  était  forcée.  Lambert  et  la  Généalogie  ont  donc 
encore  en  commun  certaines  assertions  sur  Tcxtension  du  pou-  i 
voir  du  comte  Arnoul  ♦.  ' 

1 .  Par  cet  artiBce  les  comtes  de  Boulogne  se  trouvent  rattachés  à  lu  geste 
de  Garin  U  Lorrain,  Le  résidu  réel  c*est  que  les  comtes  de  Boulogne  ont 
réellement  possédé  Lens.  C'ttc  localité  semble  avoir  été  le  chcf-licu  du 
comté  d'Escrebieu  (pagus  Scarbeius)  et  celui-ci  appartenait  aux  comtes  de 
Boulogne  dès  le  x^  siècle. 

2.  Paulin  Paris,  1^5  manuscrits  françois^  III,  204-205. 

3.  7W</.,  208. 

4.  N'en  déplaise  à  Lambert  d^Ardres,  ce  sont  les  «  Bolonienscs  »  qui  ont 
raison.  Guines,  situé  dans  le  pagus  Bonottiensis,  a  a*levé  primitivement  des 
comtes  de  Boulogne.  Quant  à  Saini-Pol,  c'est  le  chef-lieu  de  Ternois  (pagus 
Teruanensis),  Ce  pagus  avait  pour  maître,  à  la  fin  du  x«  siècle,  un  comte 
Arnoul,  vassal  de  Baudouin  IV,  marquis  de  I-landre,  au  témoignage  des 
Miracula  S.  Bertae  (Mon.  Germ.^  Script.,  XV,  566).  Nous  n'hésitons  pas  à 
l'identifier  avec  le  comte  de  Boulogne,  d'accord  avec  M.  Léon  Vanderkin- 
àtxt,  op.  cit.,  I,  331. 


450  F.    LOT 

Nous  avons  montré  que,  en  ce  qui  touche  Arnoul  de  Bou- 
logne, Lambert  et  la  Généalogie  de  la  fin  du  xiii^  siècle  avaient 
une  source  commune  et  que  cette  source  était  une  tradition 
orale.  Faut-il  croire  que  ccUe-cî  se  présentait  sous  une  forme 
épique?  La  déduction  n*est  certainement  pas  obligatoire.  Néan- 
moins la  couleur  du  récit  de  la  Gètéahgk,  rèpithète  de  «  très 
célèbre  m  accolée  par  Lambert  au  nom  de  son  Ernicule^  enfin 
un  passage  du  petit  poème  burlesque,  le  SUge  de  Neuville^  la 
rendent  fort  vraisemblable  : 

Assès  Tavés  oît  van  Gerben,  van  Gerïn 

Van  Wiîlautne  d*Orenge  <;ui  vait  !c  chief  hacUn, 

ViQ  conte  de  Boutoigne,  vàn  corne  Hoillequin, 

El  vjn  Fromoai  de  Lens,  van  son  fib  Fromondïn  •♦ 

Ce  poème  du  xin=  siècle^  en  jargon  mî-picard,  mi-flamand, 
est  une  parodie  des  chansons  de  geste  dont  un  certain  nombre 
sont  énumérées.  11  semble  qu'il  en  ait  existé  une  concernant 
le  comte  de  Boulogne  nommé  Hoillequîn,dans  lequel  M.  Gaston 
Raynaud  '  a  vu  notre  Hernequin,  II  est  vrai  que  M.  G.  Paris 
s*est  demandé^  si  la  phrase  «  van  conte  Hoillequin  »,  au  lieu 
d'ècre  en  apposition  ne  distinguait  pas,  au  contraire,  le  comte 
Hoillequin  du  comte  de  Boulogne  et  il  a  proposé  de  rapporter 
ce  dernier  au  roman  des  Enfances  Gode/roi  où,  dans  une  rédac- 
tion remaniée,  le  comte  Eustace  de  Boulogne  joue  un  rôle  capi- 
tal. On  peut  se  demander  aussi  —  et  nous  y  reviendrons  plus 
loin  —  si  Ton  peut  croire  synonymes  les  formes  Htrmquin  et 
Hoilkiiuin.  Cluoi  qu'il  en  soit,  la  persistance  de  souvenirs  atta- 
chés au  comte  Arnoul  est  établie. 

Seulement  ces  souvenirs  n'ont  conservé  rien,  ou  à  peu  près, 
d'exact  au  sujet  du  rôle  véritable  joué  par  ce  personnage.  Les 
moines  de  Samer  montraient  son  tombeau  et  celui  de  ses  fils. 
On  sait  que  rien  n*est  plus  propre  que  la  vue  de  ce  genrede 
monuments  a  exciter  Tin ven lion  populaire*  En  Boulenois  il 
était  impossible  de  n'être  pas  influencé  par  l'épopée  poncivoise 


t.  BîH.  NaL.  ms.  fr.  12615»  f^U  ît|  rtcto»  Cf.  Rayn^ud.  kc,  ciL^  59. 
Édité  par  Schelerj  Tnmvir^  hl^ts  (Louvain,  1879),  U,  170, 

1.  [jx,  eiL,  59-60* 

^,  Rmmnm^XXîi,  1891,  ifç.  Et  aussi  M.  Guy^  Bs^ai  sur..,  Adan  ai  U 
Hnk  »  p.  406, 


LA    «    MESNIE    HELLEQUIN    »  43 1 

de  Gormand  et  Istmbard  racontant  les  ravages  des  Sarrasins  dans 
une  contrée  tonte  voisine  '.  Si  l'on  ajoute  à  cela  le  désir  de 
donner  une  étymologie  à  certaines  localités  ^>  on  aura  à  peu 
près  les  éléments  nécessaires  et  suffisants  pour  une  composi- 
tion à  laquelle  le  comte  Amoul  S  familièrement  nommé  Eme- 
quin,  prêtera  son  nom  et  rien  de  plus.^ 

Cette  préoccupation  étymologique  dont  nous  parlons  est 
visible  dans  le  passage  de  la  Généalogie  concernant  le  village  de 
Mirendœl  ^  :  Hemequin  blessé  et  poursuivi  par  les  païens  arrive 
sur  le  bord  de  la  Canche  suivi  d'un  seul  écuyer  :  «  Et  si  avint 
que  li  quens  Hernequins  regarda  a  merveilles  derrière  lui  et 
vit  le  grant  compaignie  des  Sarrazins  qui  les  kaçoient.  De 
coi  cis  lieus  ou  il  passa  a  Kance  est  encore  apelés  Mirendœl  5.  » 

On  pourrait  à  cette  occasion  se  demander  si  une  légende 
étymologique  analogue  n'a  pas  prolongé  le  souvenir  d'Herne- 
quin  jusqu'au  xvii*  siècle.  Le  P.  Jacques  Malbrancq  rapporte 
en  eflfet  que  la  petite  ville  de  Wimille  se  serait  ainsi  appelée 
parce  que  a  huit  mille  »  (8.000)  Français  du  comte  Hemequin 
y  furent  tués  par  les  Danois  en  881  {sic)  :  «  monumenta 
Bononiensium  cesa  e  nostris  millia  octo  enumerant  et  cum 
pa^uin  Albimeri  flumini  assidentem  aiunt  exinde  Wimilk 
hodiemam  nomenclaturam  sortitum  fuisse,  scilicet  e  theuto- 
nica  istius  aetatis  sic  gallice  sonantem  ^.  »  Malbrancq  ne  sait 
d'Hernequin  que  ce  que  lui  en  apprend  la  Généalogie  du 
xiu*  siècle.  Or  celle-ci  ne  parle  pas  de  Wimille.  On  pourrait 
donc  croire  que  ces  «  monumenta  Bononiensium  »  sont  une 
version  perdue  de  cette  généalogie  ^  ou  d'un  autre  texte.  Nous 


1.  ŒRomania,  XXVII,  1898.  1-54. 

2.  Dans  mon  édition  de  la  Cljrattiquc  de  Saint-Riquier  d'Hariulf,  j*ai 
signalé  (p.  xlii)  des  inventions  analogues  destinées  à  expliquer  les  noms  des 
villages  de  Mesoutre  et  Dourier  en  Pontieu. 

3.  On  sait  que,  aux  x*^  et  xi*  siècles,  ce  personnage  n'était  presque  jamais 
appelé  dans  Tusage  par  son  vrai  nom.  Celui-ci  était  remplacé  par  un  sobri- 
quet ou  un  hypocoristique. 

4.  Localité  disparue. 

5.  Loc.  cit. y  III,  204-205. 

6.  DeMoriniSylly  351. 

7.  D'autant  que  Malbrancq  en  parle  tantôt  au  singulier  (I,  647),  tantôt  au 
pluriel  :  «  ex  genealogiis  »  (1,  686,  912;  II,  313-314,  350,  594,  etc.). 


432  1%    LOT 

avons  affaire  en  réalité  à  une  invention  de  Malbrancq.  La  généa- 
logie prétend  que  Hernequiu  tînt  tcte  aux  païens  avec  30*000 
hommes.  Ceux-ci  lui  en  tuèrent  10.000  et  il  s'enfuit  avec 
20.000,  Le  jeu  de  mots  est  donc  impossible  dans  la  Généalogie. 
Au  reste,  Malbrancq  ne  nous  a  pas  complètement  trompé.  En 
marge  de  la  p*  350  du  t.  II>  il  a  bien  mis  «  ex  genealogiis  Bono- 
nîensium  »,  mais  il  ajoute  honnêtement  :  «  hic  probabiles 
adduntur  circonstantîae  e  naîura  kKonim.  »  WimiUe  est  évidem- 
ment au  nombre  de  ces  conjectures  suggérées  par  «  la  nature 
des  lieux  m* 

Les  historiens  locaux  ont  pieusement  reproduit  les  explica- 
tions de  Malbrancq.  Cet  excellent  Père  jésuite  »  il  faut  bien  le 
dire,  a  écrit  une  des  oeuvres  historiques  les  plus  exécrables  que 
Ton  puisse  rêver  et  d'autant  plus  détestable  quej  pendant  deux 
siècles j  il  a  été  parole  d'évangile  pour  les  érudit^  boulonnais  ^ 
qui  se  bornaient  à  le  copier,  Malbrancq  était  moins  un  impos- 
teur qu'un  esprit  extraordînairement  faux  et  incritiqui.  Ses 
ScMia  in  Hbrum  VII  ^  qui  nous  intéressent  particulièrement, 
nous  le  montrent  soucieux  de  la  valeur  des  sources  qu*il  utili- 
sait. Ainsi  il  combat  les  assertions  de  Lambert  d'Ardres  sur 
Sifrid  le  Danois,  Ernic  tle,  Guillaume  de  Pontieu.  Seulement 
il  n'a  pas  assez  de  vigueur  d'esprit  pour  éliminer  certains  textes. 
Il  les  combine  tous  en  tentant  de  résoudre  les  incohérences  et 
les  contradictions  au  moyen  d'hypothèses  ou  d'interprétations 
d'une  in^^énieuse  ineptie*  Et  comme  ses  scholies  ont  été  accep- 
tées de  confiance^  il  en  est  résulté  que  l'histoire  ancienne  du 
Boulonnais  est  demeurée  dans  le  gâchis  le  plus  complet. 

Il  n  y  a  donc  rien  à  tirer  de  son  récit  sur  Wimille,  La  seule 
chose  dont  on  puisse  être  redevable  i  Malbrancq^  c'est  une 
erreur  sur  le  sens  de  Herneqtiin,  Il  a  eu  la  malencontreuse  idée 
de  changer  ce  nom  en  Hinnequin,  Il  l'interprète  judicieusement 
p.ir  Petit- Jean  !  «  Hennekinus  qui  antiquo  theutonismo  sonat 
Joannem  Parvum  %   «  Ses  connaissances  philologiques  n'ont 


1.  Voy.  entr^  autr^  Hcaor  de  Ro»ny,  Hhtùirt  duBùulôHHms,  1,  170. 

2.  Voy.  t.  0,  çil,  917,  etc.  ;  cf,  %^A^ 

î*  Dé  Morims  et  Mmmrum  rtbm  (Tomact^  f6^9-;4,  |  vol  10-4»),  t*  U 
(î647XP^  3 '4^ 


LA    «    MESMIE   HELLECOlK    »  43J 

donc  servi  qu'à  égarer  les  érudits  *  et  à  les  lancer  sur  une  fausse 
piste  ^ 

Nous  revenons  maintenant  à  la  question  des  rapports  de 
Htrnequin  et  à'Hdkqnin^  Après  ce  que  nous  avons  .dit  plus  haut 
du  vrai  Hermquin,  nous  ne  pensons  pas  que  k  thtse  de  M.  Ray- 
naud  qui  voit  l'origine  de  la  légende  de  la  «  Mesnie  fantas- 
tique M  dans  une  bataille  du  ix'^  siècle,  ait  la  moindre  chance 
d'être  maintenue  ^ 

A  priori  elle  n'était  admissible  pour  aucun  folk-loriste.  Le 
thème  de  la  chasse  fantastique  est  trop  répandu  pour  qu  on 
puisse  croire  qu*il  soit  parti  d'une  petite  région  de  la  France,  et 
sa  signification  mythique  ne  peut  découler  du  souvenir  d'une 
bataille  historique  du  ix*  siècle  "*•  Un  témoignage  antique, 
celui  de  Virgile,  montre  que  la  Germanie  le  possédait  dès  avant 
Tère  ciirécienne».  Enfin  il  est  reconnu  aujourd'hui  que  le  con- 
ducteur de  la  chasse  sauvage  n'est  autre  à  Torigine  que  le 
grand  Dieu  germanique  Wodan  ^.  Sur  ce  point  la  question  peut 
être  considérée  comme  réglée. 

N'est-il  pas  évident,  au  contraire,  que  c'est  sous  l'empire  delà 
légende  très  répandue  ^  de  «  la  Mesnie  Hellequin  «  que  l'auteur 
-^  * 

1 .  Dont  M,  Haynaudj  îoc.  cit.^  59, 

2,  Cest  encore  Mal  bran  cq  qui  a  eu  Tidêe  funeste  d'Haïti  fier  Hennekin  > 
Herncquin  avec  le  comte  de  Boulogne  très  historique,  Erkeiiger,  lequel  vécut 
sous  îe  règne  de  Charles  le  Simple,  Vo\\  sur  ce  personnage,  Vanderkindcrc^ 
It  SI-5Î'  ^^^^  ^^  permet  de  rapprocher  son  nom  de  Hernequtn. 

I .  Oti  pïtitôt  M.  Raynaud  cherche  à  démontrer  rinrtuence  i*un  événement 
de  cette  époque  sur  le  thème  de  U  mi$nie  où  il  retionnafl  (bien  à  tort)  le 
combut  de  î' hiver  et  de  Télé, 

4.  C'est  ce  qu'a  bien  vu  M,  Guy  :  «  Était-ce  dans  les  chroniques  qu*il  fal- 
lait rechercher  Torigine  d*une  créature  chimérique,  d*uiî  génie  de  k  tempête 
et  des  airs?  Nous  ne  le  pensons  pas.  Autant  s*applîquer  â  découvrir  les 
ancaresde  Riquet  â  la  Houppe  et  de  Cendrillon  !  »  {Esmi  sut  Adan  de  le  Hatk, 

5*  G/Qrgiqnes,  I,  474-475  :  «  Armorum  sonitum  toto  Germania  caelo  — 
Audtit.  jf 

6 .  W  ol  fgan  g  Goî  t  her^  Ha  tîdbuch  der  gtrman  hchn  Mylhologk  (Leî  pzîg,  1 89  s  1 
in-8»),  285-295. 

7.  Selon  Gautier  Map  {Di  nugis  cufkliumt  éd.  Wright,  p*  14  ei  180),  ces 
■  phalanges  noctivagao  »  se  sont  montrées  en  Petite  Bretagne  et  dans  la 
inarche  de  Galles  et  de  Hereford,  Le  moine  de  Peierborough  qui  a  écrit  la  dcr- 


434  ^'  ^^ 

du  Siège  de  Neuville  a  légèrement  modifié  le  nom  du  «  cofnte  » 

et,  de  Htrncquin  a  fliii  Hùillequin  ? 

Néanmoins,  il  n*est  pas  sans  exemple  que  le  nom  d'un  per- 
sonnage historique  se  soit  substitué  à  celui  d'un  être  tnythiquc. 
En  Allemagne  mtme,  dans  la  Westphalic  et  la  Saî^e,  Hackelbcrg, 
ft  der  vvilde  Jâger  w,  est  peut*ècre  un  personnage  historique  du 
xvi*  siècle  dont  la  renommée  a  supplanté  celle  de  Wode  ou 
Wodan  '-  Dès  le  moyen  âge,  nous  connaissons  plusieurs  tenta- 
tives d'explication  de  la  chasse  maudite*  La  troupe  hurlante,  ce 
sont  les  âmes  des  défunts.  Plus  d*un  y  a  reconnu  des  parents  ou 
des  amis  ^  Le  chef  a  été  certainement  considéré  comme  un  per- 
sonnage méchant  transformé  en  démon  pour  expier  ses  crimes. 
Mais  on  conviendra  qu'il  eût  été  étrange  de  faire  subir  cette 
transformation  au  vaillant  comte  Hemequin  qui  est  supposé 
périr  dans  sa  lutte  contre  les  païens. 

11  est  certain  que  cet  absurde  rapprochement  entre  un  comte 
Hellequin  et  la  chasse  sauvage  a  été  fiiît,  précisément  dans  cette 
Histoire  de  Richard  sans  Peur^  imprimée  en  1601,  où  M.  Kitt- 
redge  a  reconnu  la  source  du  passage  de  Walter  Scott  invoqué  par 

tiïèrc  continuation  de  la  Chnmtqi4f  an^l&^uixontu'^Tacome  qu&,  en  1127,  te 
moines  de  Tabbayc  tl  le^  piysaiis  n'ont  cessé  depuis  \ç  début  du  carême  jus^ 
qu'i  PÂques  d'cmendre  le  tumulte  de  chasseurs  gigantesques  montés  â  chevil, 
les  abois  des  chiens  et  le  son  du  cor  dans  U  forêt  qui  s^étend  de  Pcicrborougb 
à  Sumford  du^adviendrA-t-U  de  ce  prodige?  il  ne  sait.  Puisse  Dieu  yvdllcrl 
(éd.  Tborpc,  1,  178  et  II,  224;  éd.  Plummer  et  Earle,  I,  î$8).  —  11  y  aurait 
selon  Hampson  (1.  jij)  allusion  à  la  chasse  sauvage  dans  une  homélie  édi- 
fiante que  corn  posa  p  à  la  dn  du  xc  siècle,  pour  VJsh-  Wednesiny^  MMnc  k 
Grammairien.  Cf*  Mdrkaï  Lkm  ùf  saints,  éd.  Skeat,  I,  164  (/^(jW/  linglish 
΀€t  Society^  fasc.  81).  La  chose  me  praît  fort  douteuse,  —  La  croyance 
à  la  chasse  fantastique  a  persisté  longtemps  en  ^os^^.  Des  gens  Tont  aperçue 
le  a 5  juin  1744  et  le  2t  juillet  178$  et  en  ont  porté  témoigtiage.  Voy. 
H,  T.  Hampson,  Midii  xvi  ialetidarium  or  datts^  chûrien  md  ciutùim  4>f  tJm 
MuUkages,  London,  I  (1S41),  jio-îm^  —  En  France  cette  croyance  a  été 
universellement  répandue,  mais  c*cst  seulement  dans  le  Nord-Est  et  la  Nor- 
mandie que  la  memie  a  un  chef  du  nom  de  Helkquin^ 

t*  Raynaud,  toc.ùL^  $3,  $y.  Œ  sur  la  «  Sage  von  Hackelbcrg  der  wilde 
jÂgier  »  les  articles  signalés  par  Golther  {tf.dt*^  185,  note  ))p  et  que  je  n*at 
pu  lire, 

2»  Voy*  les  cïicmples  reproduits  par  MM.  Raynaud  et  Guy,  Ajoute*  podr 
rAlIcmagne  celui  du  comte  Kmicho  (oiort  en  in;)  cîté  par  Jacob  Grîmm, 


LA    H    MESNIE    HELLEQUIK    »  4}  5 

M,  Raynaud.  On  y  rapporte  qu'un  vaillant  chevalier,  Hellequînj 
dépensa  tout  son  bien  et  même  vendit  un  beau  château  «  en  la 
duchié  de  Normandie  n  pour  fournir  aux  frais  d'une  guerre  que 
soutenait  Charles  Martel  contre  les  Sarrasins.  Malheureuse- 
ment la  guerre  finie,  comme  ce  gentilhomme  restait  sans  rcs- 
sourceSj  il  commença  lui  et  «  son  lignage  m  à  fouler  le  peuple 
et  à  commettre  mille  excès.  A  sa  mort  il  eût  été  damné  si  Dieu 
ne  lui  avait  pardonné  pour  avoir  «  exaucé  la  foy  ».  Mais  lui 
et  son  hgnage  furent  condamnés  i  fnîre  pénitence  en  se  livrant 
chaque  nuit  à  une  de  ces  courses  ou  danses  fantastiques  comme 
en  rencontra  le  duc  Richard  '. 

M.  Kittredge  a  fait  obser\^er  que  le  roman  versifié  du  xiv* 
siècle,  source  de  VHhknre  de  Richard  sans  Peur  de  1601,  ne 
possède  point  ce  passage,  qui  est  par  conséquent  une  fabrication 
du  xvi^  siècle.  Celle-ci  ne  présente  aucune  difficulté.  Il  est  tout 
naturel,  on  vient  de  le  dire,  de  voir  dans  la  chasse  infernale  un 
ch,itiment.  Dès  le  début  du  xin^  siècle^  Hélinand  qui  transfor- 
mait Hellequin  en  Karlequin  prétendait  que  ce  dernier  était 
un  roi  Charles-Quint  {sic),  tué  sur  le  champ  de  bataille  et 
ayant  subi  la  punition  de  ses  péchés  ^  Ce  qui  est  intéressant 
dans  le  récit  de  1601  c'est  la  mention  de  la  lutte  d'Hellequin 
contre  les  Sarrasins.  Muni  de  ce  renseignement,  lauteur  a  bâti 
le  reste  de  sa  fable  au  moyen  d'une  suite  de  raisonnements  plus 
ou  moins  conscients.  Si  Helkquin  a  lutté  contre  les  païens,  il 
ne  peut  être  damné  pour  1  éternité.  Aussi  a-t-il  soin  de  nous 


l.  Rmnania,  XXXIl,  ^05. 

a,  Hdinand  copie  par  Vincent  de  Beauvais,  5j5f<:.  Imt.^  1,  29,0.  118.  Cette 
transfonnaiion  en  Charles-Quint  est  pas^  M  là  dans  b  Chromqufde  Nor- 
fwowiif  et  d'autres  textes  des  xiv«,  xv«  siècle  (voy.  les  dtaiions  de  Baynaud, 
p,  ÇS  ei  Guy,  p.  394,  40,  note  t).  Uorigine  est  une  tentaUvc  de  combinaison^ 
«luci  Kelinand^  de  la  n  Mesnie  [lerlequin  »  ave^;  les  légendes  ecclésiastique 
dci  «  vî&ions  0  montrant  un  roi  Charles  (Charles  Martel,  Charlcmagne 
Charles  îe  Chauve,  Charles  le  Gros,  selon  l'occurrence)  subissani  en  Tautre 
monde  la  pénitence  de  ses  fiutes.  C'est  h  une  ÎDierpréution  ce  savante  », 
par  suite  >$ans  intérêt  pour  nous.  Elle  est  d'ailleurs  absurde.  iMémc  en  comp* 
lant  Charles  Maneî,  il  n*y  avait  eu  que  quatre  princes  tic  ce  nom  avant 
l'époque  d'HcliiiaiiLÎ  (commencement  du  kui^  siècle).  IJ  est  singulier  qu'on 
k  retrouve  en  AUemiigne,  en  Hesse.  Voy*  Jacob  Grimm,  Lkutsck  MyMogit, 
I*  éd.  U,  S90. 


43^  I'.  Lot 

dire  qu*il  n'a  été  condamné  que  ^  pour  un  temps  déterminé  *  »k 
Il  ne  peut  avoir  péri  sur  le  champ  de  bataille  car  il  eût  été  droit 
au  cieL  En  conséquence  ses  méfaits  sont  postérieurs  à  ses 
exploits.  Ils  s'expliquent  très  bien  si  Ton  suppose  que  HcUequin, 
comme  tant  de  gentilshommes,  a  dû  engager  ses  terres  pour 
subvenir  aux  frais  de  la  guerre.  Sa  victoire  même  a  été  une  cause 
de  ruioe<  Et  si  son  beau  château  est  en  Nonnandie,  c*est  sans 
doute  parce  que  Richard  sans  Peur  qu'il  rencontre  est  duc  de 
cette  région. 

Mais  d  où  le  remanieur  de  1601  tîrait-il  cette  connaissance 
des  luttes  de  Hellequin  contre  les  Sarrasins,  qui  Tinduisait  à  ce 
raisonnement  assez  compliqiié  ?  Cest  ici  que  M.  Raynaud  pour- 
rait peut-être  reprendre  [avantage.  Puisqu'il  n'y  a  rien  de  pareil 
dans  le  récit  versifié  du  xiv^  siècle,  le  remanieur  de  1601  n'au- 
rait-il pas  emprunté  la  connaissance  du  comte  de  Boulogne 
Hernequin,  confondu  par  lui  avec  Hellequin,  à  quelque  manus- 
crit ou  incunable,  contenant  un  récit  épique  versifié  ou  mis  en 
prose  ?  Peut-être  a-t-il  eu  tout  simplement  connaissance  de  la 
généalogie  manuscrit.:  des  comtes  de  Boulogne.  Quoi  qu'il  en 
soit,  il  reste  !à  un  point  à  éclaircir, 

De  toutes  manières,  la  conftision  du  comte  de  Boulogne  très 
historique,  Hernekin  ou  Arnoul  avec  le  «  chasseur  maudit  » 
Hellequîn,  ne  saurait  remonter  bien  haut,  si  tant  est  qu'elle  se. 
soit  produite  ^,  Lambert  ni  la  Généalogie  n*en  ont  connaissance, 
L*émendatioa  de  Herlequin  en  Karlequint  due  h  Hélinand  » 
semble  bien  indiquer  que,  au  xui'  siècle,  elle  nVxistait  pas 
encore*  Qu'elle  soit  du  xïv%  du  xv*  ou  du  xvî*  siècle,  elle  a 
donc  eu  lieu  à  une  époque  très  postérieure  à  celle  où  nous  ren- 


1.  Ced  est  déjà  dans  Heliiiand  ou  Vincent  de  Beftuvaîs  :  m  fuit  cniiHJ 
K^rolus  Ciiintus  qui  pcccitorum  suorura  longam  cgii  pœniteniiam  ei  ouper^ 
latîdem  per  inierccssionem  beati  Dionysii  liberatus  est  a  (cité  par  Liebrecht, 
p,  198)^  Gautier  Map  remarque  que  «  les  phalanges  nociivagae  quas  Herie- 
ihingî  diccbant  *  ont  cessé  de  se  montrer  en  Grande-Bretagne  b  deuiicmc 
anntc  du  règne  de  Henri  U  »  {Dt  nugis  cunaHum^  éd.  Wright,  180;  Raj^ 
naud,  53). 

2.  M.  Raynaud  a  oublié  le  plus  bel  exemple  en  faveur  de  %a  théorie,  ' 
Shakesp<âre  oous  parle  de  Htmt  le  chasseur  qui  hanic  la  foréi  de  Windsor 
(Mirfjf  «y*tvj|  aae  I\^.  Il  Diui  convenir  que  ccî  eîicmpic  esi  iroublant. 

î*  Vôy,  page  pféeédenic.  note  2. 


LA    cr   MESÎJIE  BELLî^OPlN   »  437 

controns  les  premiers  témoignages  concernant  la  a  Mesnie  Helle- 
quin  »,  le^uels  se  placent  au  xn=  siècle. 

Reste  à  savoir  rétymologie  de  Helltkin  ou  Herlrkin* 
Tout  d'abord  il  est  certain  que  la  forme  Herlekin  est  la  plus 
TuncitnneKHelkkiu  nest  qu'un  dérivé*.  Cette consiatalîon  doit 
faire  hésiter  devant  certains  rapprochements  séduisants  ^  tels 
que  celui  de  Diez  :  le  nom  d* homme  néerlandais  Helkkin  \ 
même  celui  de  Braune  qui  lui  substitue  un  emprunt  direct 
Hclkkint  s  ;  enfin  une  conjecture  qui  rapprocherait  d*un  vieux 
germanique  *  Ixnno  qui  signifierait  «  mort  m  une  inscription 
roniaine  portant  MERCVRI  CHANNINI*.  On  a  vu  que  le 
chasseur  sauvage  est  certainement  Wodan,  Comme,  d'autre  part, 
il  est  parfaitement  établi  que  Wodan  est  le  Dieu  germanique 
que  les  Latins  nommaient  Mercure^»  on  se  laisserait  amener  i 

1.  C*«t  ropinion  de  M.  Gaston  Paris  (ioc.  cii.}  adoptée  par  M*  Guy  (ôp, 
dl*,407)>  Le  plu5  ancien  témoigrïage  se  trouve  dans  l'histoire  d'Orderic  Vjial 
qui,  vers  1140,  racomc  comme  un  fait  historique  arrivi^  pend^m  une  nuit 
de  janvier  1092,  la  rencontre  de  Gauchelin^  prêtre  de  Saint-Aubin,  avec  la 
M  tiiuiKa  Hertechini  i»  (éd.  Le  Prévost»  IIJ,  nO-  ^  1^  ^^  ^^  ^^^  siièck, 
PkiTé  de  Blôis  traite  les  clercs  mondains  et  ambitieux  de  «  milites  Herlewînî  » 
(Mignc,  PatroL  kr,  t.  CCVII»  coL  44),  A  la  même  époque,  Gauùcr  Map 
parle  des  «  phalanges  noctivagae  qtias  Herletltingi  dicebaniB  (De  tntgh 
atriaimm^  éâ,  Wrîght,  tSo).  Les  formes  «  Herlequinf  H  arlequin  »  se 
letrouvent  encore  jusqu'au  xvï*^  sl^ch  (Paulin  Paris,  LfS  tnamucrits  Jrati(i)h 
4k  h  BiUiotMqtu  du  roi,  I,  ^lî)  et  M*  Raynaud  a  bien  saisi  les  liens  qui 
rattachent  Herlequin  à  Ârkquin.  Néanmoins;  depuis  le  Xlii*^  siècle,  la  forme 
HdUqmntsi  la  plus  tisitèe.  Voy.  les  textes  réunis  par  Raynaud  {kx,  ctL^  JJ- 
57)  et  Godefroy,  Dktùmtmirf^  au  mot  Helkquin. 

2.  La  vibrante  s* est  assimilée  à  la  liquide  suivante.  Cf.  Hftlouin  devenu 
Hcihitin^  en  Normandie  particulièrement.  Au  xïxe  siècle,  dans  cette  même 
région,  Heliequin  semble  être  devenu  Hennequin  ou  Hanoequin,  peut- être 
sous  Tinfluence  du  nQm  picLird  «  Hanne^uin  ». 

j.  Je  ne  mets  pas  du  nombre  ceuK  de  Piiulin  Paris  qui  songe  à  Aliscans 
{ùp\  cit..  If  331),  Génin  (yaHations  du  lan^t^r  françûis,  p.  455)  cl  encore 
moins  de  Scheler,  qui  se  demande  si  Herlequin  ne  serait  pas  une  déformation 
de  tt  Guîteclin  »  (Trouvèrts  belges  ^  II,  55  a)  et  deA.  Wesselofsky  qui  y  voit 
le  TOI  Hèrode.  Voy.  Âlickino  4Î  Aitdodtsa  dans  Gkrnaîe  slorm  Ma  kUtra- 
ium  itiiiiam,  XI,  ïS88,  354), 

4,  EtymQh)^is€fies  IViwtfrhuch  dis  romamich^n  Spaclien^  J*^   éd.  fîSB/),  614. 

5,  Voy.  Zdhdnrift  fàr  ronianisch  Philologie ^  XX,  09-^70, 

6,  Voy.  Siebs  dans  ZtitscMfifûrdeutsclx  Fhihîcgif,  XXIV,  146. 
7»  Goliher»  ûp,  r//.,  295* 


438  F.    LOT     , 

croire  qoe  le  datif  CHANNFNI  >  *hênm  est  une  épithète  de 

Wodan,  épithète  qui  serait  demeurée  en  France  pour  désigner 
le  dieu  déchu  au  rang  de  démon,  Hentieqfiin  ' .  Cette  fantaisie 
qui  se  présente  ù  notre  esprit  doit  être  écartée. 

Pour  M.  Guy  \  a  Génîna  été  heureusement  inspiré  lorsqull 
a  identifié  le  conducteur  de  la  maisnie  nvec  VErl^ânig  de  la 
mythologie  germanique  *.  Ce  système  repose  d'abord  sur  un 
rapport  étymologique  qui  nous  parait  irréprochable  et  il  a 
ensuite  pour  lui  —  cela  vaut  mieux  encore  —  une  i^raîsem- 
bîancc  parfaite.  Qu'est-ce,  en  effet,  que  le  roi  des  aulnes, 
sinon  un  prince  de  féerie,  ainsi  que  son  titre  même  Tindique  ? 
N'est-ce  pas  au  milieu  des  ténèbres  qu'il  se  pbU  lui  âusst  i 
errer  ?  N*atme-t-il  pas  à  tourmenter,  ;\  traquer  les  voyageurs  ? 
NVt-îl  pas  des  filles  qui  mènent  les  chœurs  nocturnes?  Le 
peuple  n'a-t-il  point  incarné  en  lui  les  formes  qui  se  meuvent 
dans  Tombre,  les  soupirs  du  vent,  bref  toutes  les  vaines  images 
qui  remplissent  la  nature  après  le  coucher  du  soleil  et  que  per- 
sonniiie  Hellequin?  Que  Ton  se  rappelle  la  ballade  de  Gœthe, 
Elle  est  un  merveilleux  commentaire  des  idées  que  nous  expri- 
mons ici  faiblement,  » 

Je  ne  saisis  pas,  au  contraire,  de  rapprochement  probant 
entre  les  légendes  d^enlèvcments  d'enfants  et  la  <*  mcsnic 
furieuse  m  conduite  au  milieu  d'un  vacarme  effroyable  par  le 
prince  des  dieux  ou  des  démons.  Quant  au  rapport  étymolo- 
gique, il  n'est  rien  moins  qu*«  irréprochable  »*  L* expression 
tt  roi  des  aunes  0  est  un  non-sens.  Il  n*y  a  pas  plus  de  roi  des  aunes 
que  de  duc  des  saules,  ou  de  comte  des  roseaux.  Nous  sommes 
en  présence  d'une  tentative  étymologique  déformant  un  nom 

I,  }Âa,\s  HtniifipiiH  est  ici  ua  dérivai  moderne  Je  HdUquin  ->  Hirkquin, 
Voy*  plus  haut,  p*  4j  j,  ooEe  2  ei  457,  note  2* 

I*  Génîn  qn\  plâcc  aun  Miscamps  oy  «  Arliscamps  »  Tonginc  de  h  mes- 
îiîc  tunmh^  dit  au  contraire  :  «  Cependant  la  mtsnif  Hdkquin  ne  rctiferm  ^ 
«  point  ses  apparitions  dans  Tenceinic  bomce  de  l'EIycamps;  clic  se  rcf^riilfi 
«  par  toute  la  France  et  même  dans  FEurcipc  eiitîêrc.  Partout  oh  W  rrtrwiiV, 
«  c'étaient  des  Helïequins.  l-c  grand  veneur  de  FontâineMcau^  comme  k 
«  FneyKbûu  âlleniand,  ne  som  autre  chose  que  la  chasse  d'Hcllcquin.  Le 
«  roî  des  auînes^  BrUnkomig^  est  une  seconde  iransformatîon  à'Htrkkin.  » 
Voy.  Bn  varmiiùm  au  kns^a^t  fmttfiiU  depuit  k  XI h  ukU  (Paris,  J845i 
îrt-8''),  p.  462,  Otî  le  voit,  pour  Gcnin,  Erlkûnig  est  un  dérivé  et  tlott  un 
prototype. 


LA    ^    MESNIE    HELLEQUIN    "  439 

mai  ou  pas  du  tout  conipris.  Si  Ton  rappelle  que  là  poésie  de 
Gcethe,  composée  en  1781,  n'a  pas  de  source  populaire  %  mais 
qu'elle  est  imitée  très  librement  de  celle  de  Hcrder,  Erlkônig 
Tocbkr^  lequel  lui-même  *  traduisait  une  ballade  danoise  '\  il 
est  évident  que  c*est  en  Scandinavie  que  nous  devons  chercher 
Torigine  de  Tincompréhensible  Erlkônig.  Il  n'est  pas  difficile  de 
s'apercevoir  qu*il  n*est  autre  qu'une  transformation  peu  heu^ 
reusc  du  danois  Elkrkonge,  qui  est  lui-même  pour  un  plus  ancien 
Elverk&nge  ft  roi  des  elfes  *  »*  On  saii  que  les  e!fes  de  la  mytho- 
logie germanique  se  plaisent  à  ces  jeux  d^enlévements  d'enfants» 
chevaliers  etc.  ^  Erlkônig  est  donc  à  écarter.  ElUrkonge  même 
ou  Elverhnge  ne  peut  être  accepté.  Les  actions  attribuées  aux 
elfes  et  la  clKisse  furieuse  n  ont  pas,  en  effet,  de  rapport  direct* 
Les  thèmes  sont  différents!  La  forme,  pas  plus  que  le  fonds,  n'est 
admissible.  Elverkonge  ne  peut  phonétiquement  donner  Herk- 
quin  ou    Htlkquin.   En   dernière  analyse^  nous  ne   trouvons 


T,  Du  moins  les  tentatives  faites  jusqu'à  ce  jour  pour,  \m  en  trouver  une 
ont  échotié*  Voy,  le  Giuth  Jarhbttch^  U  XIX  (1898),  p,  }Oj  et  t.  XX!  (1900), 
p*  26 j.  M.  A.  Schônbach,  dans  les  Btilage  âtr  aUgtmeinen  Zeîhchrijt  du 
1 1  janvier  1 898,  a  rapproché  le  thème  de  k  ballade  de  Goethe  d'un  passage 
du  Dialogitt  de  Grégoire  le  Grand  (h  IV,  cap.  18)  racontant  que  des 
«  Mauri  homines  «  en  présence  du  père  éperdu,  enlèvent  V^mt  d'un  petit 
enfant  mourant  qui  avait  l'habitude  de  jurer  (Migne,  Patroh  ht.,  t.  LXXVII, 
CûL  ^49).  Mais  la  ressemblance  entre  cette  niaise  anecdote  et  VEfïkùni^  est 
bien  lointaine  et  ringénieux  savant  reconnaît  qu'il  est  plus  que  douteux  que 
Gxïhe  en  ait  jamais  eu  connaissance*  Le  rapport  etitFC  son  poème  et  celui 
de  Herder  est  très  éloigné,  Ce  dernier  eût  dû  être  intltalê  «  Herr  Oluf  »,  Le 
poème  de  Lee  on  te  de  Lisle,  Lis  Elfi^^  en  donne  une  idée.  Le  plus  probable 
c'est  que  Gcethe  n'a  emprunté  à  Herder  que  le  dénouement  fatal  et  le  nom 
du  démon.  Le  thème  a  été  très  modifié  par  la  fantaisie  personnelle  du  poète, 
aidée  peut-être  du  souvenir  de  quelque  légende  populaire  sur  les  enlèvements 
d'enfants  par  les  puissances  des  ténèbres. 

3.  Voîkslieder  dans  Herder,  Sàmmilkhc  Wtrkt,  éd.  ReJich,  t.  XXV 
(Berlin j  1885),  p.  445-444. 

3.  Kiàmpe  Vhtr^  Copenhague,  1739.  Traduction  littérale  par  Wilhclm 
Onmm,  Akdànîsch  HtUenlkdtr^  Baliadtn  und  Mûrchen,  Heidelbçrg,  i8n, 
p,  146. 

4.  Herder.  S^ffirm//*V/jf  Wîrke,  éd.  Rediich,  t.  XXV,  p.  682;  C,  A.  Buch^ 
hcîm  dans  MïI«  and  Qtunes^  4*  série,  vol.  ÎX  (1872),  p.  241,  308,  Herder  se 
sera  laissé  influencer  par  le  mot  allemand  trh  «f  aune  i», 

S*  Golther,  iî/f.  aï*,  1^4, 


44»  1'-   LOT 

en  germanique  aucun  nom  hrk  dont  la  signification  présente  la 
moindre  analogie  avec  les  exploits  de  la  mesnie  furieuse.  Celle- 
ci  est  dans  tous  les  pays  une  manifestation  des  esprits  infernaux 
se  livrant  à  une  course  sauvage  et  bruyante,  w  Dame  Habonde  », 
la  contre-partie  féminine  de  Herlequin,  résulte  de  la  fusion  de 
la  Vénus  germanique j  Hohia,  et  de  V Hécate  antique  \ 

Le  mot  qui  s'impose  irrésistiblement  à  notre  esprit  c'est  helk 
«  enfer»*  HeUequin  c'est  la  w  gent  d'en  fer  ».  On  va  objecter 
tout  de  suite  que,  si  ce  nom  convient  à  merveille  à  la  <^  mesnie  », 
il  peut  difficilement  s'entendre  d'une  seule  personne,  le  conduc- 
teur de  cette  mesnie.  Il  foudrait  admettre  que  celui-ci  tire  son 
nom  de  la  troupe  qu'il  dirige  et  non  Tinverse*  Autrement  dlt^ 
Htîkquin  serait  simplement  le  plus  important  des  heUequins, 

Cette  interprétation  est  conciliable  avec  quelques-uns  de  «os 
textes.  Guillaume  d'Auvergne  parle  des  cavaliers  nocturnes  «  qui 
vulgari  gallicano  biUeqmn  et  vulgari  hispanico  txerdtus  anttquus 
vocintur  *  »;  le  roman  de  Fauvel  rapporte  un  refrain  chanté^  au 
milieu  d*un  tapage  infernal  par  les  hclkquines  K  Le  Songe  duré  de 
la  Pucfllt*  porte:  «t  Dangier,  Envie,  Malebouche  —  Sont  tout 
partout  feuk  helequins  ^  w;  enfin  deux  vers  de  la  Chrmique 
rimèt  de  Oodefrûy  de  Bouillon  sont  péremptoires  : 

Et  H  rois  4cs  TaHurs,  o  lui  sy  ttalcquin 

Q.ui  plus  aiment  batatlk  que  li  gbs  ne  fait  vin  ** 

Li  seconde  objection  c'est  que  Htllequîn  est  une  forme  qui  se 
rencontre  moins  anciennement  que  herlequin  et  que  nous-mème 
l'avons  reconnu  plus  haut.  Sans  doute*  iMais  ne  peut-on  invo- 
quer, pour  le  changement  de  *  helk  en  bcrk^  Tinfluence  analogique 
du  mot  français  berit  ou  barU^  qui  signifie  «  bruit  »  tumulte 


1.  J.  Grimm,  Diuts£èe  Myihohik^  |«  éd.«  1,  26\  ;  U«  877, 902  ;  Du  Cioge- 
Fivre,  G^farium,  aux  mots  ahêu^iat  Drnna^  Hecata.  Sur  les  rappûns  de 
m  ibme  RaboiJe  *  et  de  Hétodiide»  vôy,  Wessdobky.  h\\  ai.,  XI,  tSSft» 

2.  ce  J.  Grirani.  (f.  dt.,  0,895. 

î*  Voy,  Paulin  Paris,  Mammurih  jrmms,  h  jH  i  Guy,  Essaie  t|9  en 
ao%t  et  401,  note  t  ;  G,  P;ms,  HiU,  UiL  ie  k  Fr.,  XXXil,  147. 
4«  MàQtitgkNi,  Rmieil  df  foésm  frmcviméa  XF«  rt  XF^  nèekt,  10^  114* 

5.  Et  non  &ii^frui comme  imprime  Raynjud,  p.  %$. 

6.  Ed.  Reifoibeigp  A^mimemis  pour  urtir  à  tkù^m  et  h  fnHma  ai 
A'umir,  11,  t4S,  v«rs  6^47.  Cl.  Godê&oyi  ÛKJtewirr»  s,  v. 


tA    «    MESNIE    HELLEQUIN    »  44T 

tapage  ',  ce  qui  convient  on  ne  peut  mieux  à  ta  mesnie  furieuse  ^  ? 
Ce  Imhkint  est  ensuite  devenu,  ou  redevenu,  heïkquin  sous  l'in- 
fluence phonétique  signalée  plus  haut». 

Quoi  qu'il  en  soit  de  cette  explication,  il  résulte  de  Fétude 

Kqui  précède  que  le  comte  de  Boulogne,  très  historique j  Arnoul, 

connu  sous  la  dénomination  hypocoristiquede  ErnequinoM  Her- 

ftequin^  n'a  rien  1  faire  avec  la  a  mesnie  Herlequin  «  ou  «  mesnie 

Hellequin  ». 

Ferdinand  Lot, 


I-  D'où  le  verbe  ï>etïér,  helltr^t  aussi  hilîir  «  faire  du  tapage  ».  Sonner  une 
cloche  V  à  herle  ji  c'est  sonner  le  tocsin.  Vo\%  Godefroy,  Dkimtmire^  IV» 
466;  Do  Gange- Fa vre^  Gîossarium,  IV,  466.  Peut-<3tre  y  a-t-il  un  rapport 
eocre  ce  moi  et  le  nom  d'un  oiseau  (bruyant?)  qu'on  appelle  le  !mr}fcn 
Kivernab.  Voy.  h  Dtalmmuife  Haczfeïd,  Darmcsicicr,  Thoiûas.  Le  fran* 
çais  moderne  Mit  ne  serait- (l  pas  le  repn^scnunt  de  h4kr  >  herkr  plutôt 
^ue  fanglaîs  ta  hail  ? 

2.  Dans  tous  les  exemples  concernant  le  cf  wûthendes  Heer  »  en  Alle- 
magncj  la«i  mesnie  Helle<|tiin  ^  en  France»  la  caractéristique  de  Tapparition, 
c'esite  tumulte  d'une  troupe  nombreuse,  à  cheval  le  plus  souvent.  Son  chef. 
Hellequîn  ou  Wode»  a  une  voix  reicntissante  qui  glace  d'effroi  le  voya- 
geur égaré, 

l>  On  pourrait  adopter  aussi  l'hypothèse  inverse  :  herît^  nom  commun, 
dont  Torigine  est  Inconnue  serait  dérivé  de  Herh^  nom  du  chef  de  la  mes- 
nie- Maïs  cette  hypothèse  paraît  sémantiqucment  peu  admissible  et,  d'aîl* 
leurs,  on  trouve  toujours //^/%«j m,  Herltqum,  jamais  Htrle,  Helît  tout  court. 
Gautier  Map  raconte,  il  est  vrai,  T histoire  de  Herh^  roi  des  Bretons.  Celui- 
ci,  après  avoir  assisté  dans  une  caverne  auît  noces  du  roi  des  nains,  en  sort 
à  chevaJ  avec  sa  suite.  Il  apprend  avec  stupeur  que  deux  siècles  se  sont  écou- 
les depuis  sa  visite  aux  nains  et  que  Tilc  est  passée  au  pouvoir  des  Saxons. 
Le  roi  des  pigmC\'S  lui  avait  confié  un  petit  chien  avec  défense  de  descendre 
de  cheval  avant  que  le  brachet  ne  sautât  à  terre  de  lui-même.  Ceux  qui 
oublient  celte  défense  tombent  en  poussière.  H  tria  effrayé  n*ose  deKendre 
de  cheval  et,  comme  le  chien  ne  saute  pasi  terre,  H  tria  et  sa  suite  se  con- 
damnent à  une  chevauchée  perpétuelle.  L'an  premier  du  régne  de  Henri  II, 
on  a  vu  cette  mesnie  s*engloutir  prés  de  la  Wye,  dans  le  comté  de  Hcreford 
(éd.  Wright,  p,  14-17).  Gautier  Map  a  librement  combiné  deux  thèmes  dis- 
liûcis  :  t»  la  visite  aux  enfers  avec  transformation  en  nains  des  fées  ou 
esprits  celtiques  ;  2*  la  chevauchée.  La  comparaison  de  ce  passage  avec  le 
Herleihingus  à^  la  p.  tSo,  motitre  que  Htrlu  a  été  tiré  de  Herktlnngtts^  conri- 
pris  peut-être  «  Herît,  le  prince  {ihrgn  ï)  ».  Herh  est  donc  une  création  de  la 
fantaisie  de  Gautier  Map  et  non  une  forme  populaire,  un  mot  galiois,  comme 
semble  le  croire  M.  Arthur  G.  L.  Browa  dans  son  intéressant  hiMm  (19OÎ), 
p.  I  joet  119. 


MÉLANGES 


an  EST  VENUS  QUf  ÀUNERA  ' 

J*ai  relevé  jadis (iffîwî.,  X\l,  lor)  remploi  de  cette  locution,  à 
Tusage  des  hérauts  d'armes  annonçant  le  succès,  dans  un  tournoi, 
d  un  chevalier  qu'ils  vantaient  d'avaniie,  comme  se  trouvant,  en 
dehors  des  passages  bien  connus  de  la  Cir^rrd/f,  dans  une  chan- 
son Je  l'année  1381;  M*  Grôber  Ta  également  relevé  dans  le 
roman  de  Ham  (cf.  Journal  da  Savants^  1902,  p*  ^95)^  V^^ 
ajoute  un  autre  exemple  qui  m'est  tombé  récemment  sous  les 
yeux,  et  qui  montre  que  cette  formule  était  encore  en  usage 
au  xv^  siècle.  Dans  la  Moralité  de  Charité,  le  Fou,  voyant 
paraître  la  Mort  qui  va  régler  le  compte  des  bons  et  des 
mauvais,  s* écrie  ù  deux  reprises  :  Il  est  xrnu  qui  aunera  f 
(Ane.  Th.  fr.^  t.  lit,  p.  41}).  H  faut  probablement  corriger 
//  en  Or,  conformément  à  tous  les  autres  exemples.  Le 
sens  est  :  œ  Voilà  celui  qui  l'emportera  sur  tous,  qui  mettra 
fin  aux  débats.  »  Cela  concorde  bien  avec  le  sens  qu'a  cette 
formule  dans  les  autres  cas  où  elle  se  présente, 

G,  R 

SUR  UN  VERS 
DU  PELBRÎXAGE  DE  CHAHLEMAGNE 

Lorsque  le  baron  Olivier  aperçoit  la  fille  du  roi  Hugqn»  il 
s'écrie  entre  ses  dents  : 

Ploûn  ;il  rd  de  gloire,  de  lalnte  majesiet* 

Qpc  là  tcnisse  en  France  0  a  Dun  b  citci  \  (v.  40; -^> 

Le  second  de  ces  vers  est  fait  pour  surprendre-  Qu'est-ce 
que  cette  cité  Je  Dun  ?  Où  la  placer,  sinon  en  France  ?  Et 


t.  iCf.  Ad.  Tobkr,  Zeiiuhr.J.  tvm.  Plr»7,.  Xî»  4}O.J 


SUR  UM  VERS  DU    PELERINAGE  DE  CHAKLËMJGNB  443 

alors,  que  signifie  cette  alternative  :  en  France  ou  à  Dan? 
Francisque  Michel  a  proposé  d*identifier  Dun  avec  la  petite 
ville  de  Châteaudun  (Eure-et-Loir),  dont  le  nom  primitif  est 
certainement  Dun.  Mais  a-t-on  jamais  vu  la  qualification  de 
cité^  qui  ne  convient  qu*à  une  ville  êpiscopalej  appliquée  à  une 
SI  mince  localité?  A  cette  objection,  M.  G.  Paris  a  répondu 
en  citant  '  h  Dictionnaire  iopographiqut  ifEnr€*ehLoir  où  on 
lit,  à  Tarticle  ChâUaudun  :  «  Civiîas  Dum\  îo8$  (ch.  de  la 
ville  de  Châteaudun)  ».  Il  n'y  a  qu'à  s*incliner  devant  un  fait, 
mcme  quand  il  confond  ce  que  nous  croyons  avoir  d^îdées;  mais 
encore  faut-il  que  le  fait  soit  solidement  établi.  J'ai  voulu  avoir 
le  cœur  net  de  cette  dvikis  Duni\  j  ai  écrit  i  M.  René  Merlet, 
archiviste  d'Eure-et-Loir,  le  proprt-  tils  de  Tauteur  du  Dictim- 
nuire  topagrapinqiu.  Voici  sa  réponse  :  «  Je  ne  connais  aucun 
document  ancien  oli  ChAtcaudun  soit  qualifié  civitas.  Li  réfé- 
rence que  vous  me  signalez  est  certainement  le  résultat  d'une 
erreur...  D'ailleurs  le  titre  le  plus  ancien  que  possède  la  ville  de 
Châteaudun  est  la  charte  de  commune^  laquelle  ne  date  que  de  , 
Il 97,  ec  Texpression  m^itas  Duniu^  s'y  rcncoutre  pas,  » 

Cela  est  catégorique  :  Châteaudun  est  hors  de  cause.  Le  vers 
du  Pèlerinage  doit  être  corrigé. 

M.  Fœrster,  choqué  à  bon  droit  de  la  présence  de  la  con- 
jonction (>«,  a  proposé  de  lire,  au  second  hémistiche  *a  Latin  la 
dm.  Il  me  semble  que  Ton  peut  serrer  de  plus  près  la  leçon 
du  manuscrit,  lequel  porte  :  n  adnn  la  citeL  lî  suffit  de  supposer 
Finterversion  dedeu^  lettres  et  Toub!!  d*un  signe  abréviatif  au- 
dessus  de  la  lettre  u  pour  retrouver,  par  conjecture,  la  leçon 
originale  :  a  ûdun  la  dteî.  Je  propose  de  lire  ainsi  le  vers  406  : 

Qpe  la  tenîsse  en  France,  a  Vtrdun  la  cîtet. 

Le  fait  que  Verdun  fiit*  en  843,  attribué  à  TEmpirc  et  séparé 
do  royaume  de  France  ne  me  paraît  pas  être  une  objection 
insurmontable  à  la  lecture  que  je  propose.  Bien  que  le  Pekri- 
nage  n'ait  pas  de  substratum  historique,  il  n'est  pas  impossible 
que  Tauteur  se  soît  représenté  la  France  du  temps  de  Charle- 
magne  comme  elle  était  réellement.  D*autre  part,  ce  n'est  pas 
la  première  fois  que  le  nom  d'Olivier  se  rencontrerait  associe 


ï*  Uomama,  IX,  49,  note. 


444  MèLAÎJGES 

i  celui  de  Verduti.  Dans  un  passage  de  Flmnmca,  où  rauieur  a 
pris  plaisir  k  énumérer  les  poèmes  que  cliantaicnt  les  jongleurs, 
on  lit  : 

L*us  àÏE  del  vaiïet  de  Nantoi^ 
L'autre  d'Oliveit  de  IWdu  \ 

On  a  affirmé  que  cet  Olkfeir  de  Ferdu  devaîî  être  un  person- 
nage différent  du  célèbre  compagnon  de  Roland*;  je  crains 
qu'un  n'ait  été  un  peu  vite  en  besogne.  M.  Paul  Meyer  nous 
dira  prochainement  ce  qu'il  en  pense  dans  le  tome  second  de 
sa  nouvelle  édition  de  Flatfmua. 

A,  Thomas, 


DEHÈ,  DEHAfT 

Je  ne  sais  si  on  a  remarqué  que  la  belle  explication  de  ces 
mots  qui  a  été  donnée  dans  la  Rmminm^  XVIII,  469-472,  a  un 
appui  dans  le  latin  du  moyen  âge.  Il  existe  sans  Joute  d'autres 
exemples  que  les  deux  que  j'ai  trouvés  jusqu'ici  de  Dei  odium 
(ou  cdîtim  I>0  employé  dans  les  imprécations.  Le  premier  de 
mes  exemples  est  dans  Du  Cange,  sous  odïum  :  «  Si  quis  autem 
socîo  opprobrium>  aut  convitia^  aut  odium  Dei  injecerit,  etc,  1» 
Le  passage  est  tiré  deRymer,  Fœdera,l,  p*  65,  et  it  est  évident 
que  ces  deux  mots  latins  sont  la  traduction  d'un  ou  de  deux 
mots  français  dont  ils  prouvent  rexistence  à  la  fin  du  xn"^  siècle. 
L'autre  exemple  est  encore  plus  intéressant  parce  quil  nous 
donne  la  phrase  complète  qui  paraît  être  la  traduction  de  dclsé 
ait  ou  delmit.  Il  se  trouve  dans  une  phrase  imprimée  par  Her- 
vîeux  (£.£j  Fahtilistes  latùu^  2*^  éd,j  t.  11^  p.  3  ri,  fable  36).  Je 
cite  les  quelques  mots  qui  nous  concernent  :  n  Aries  erat  in 
ovili  cum  ovibus,  et,  aperto  (h)ostiOj  intravit  Lupus.  Quo 
viso,  ait  Aries  :  Deî  odium  habeat,  (h)ostium  qui  debuît  fir 
mare>  etc.  » 

kij  comme  firtnare  correspond  à  Jermer^  de  même  Dd  odit^ 
fxtkat  à  del}é  ait  ou  dehatt^  n  est-il  pas  au  moins  très  proba 
que  c'est  lu  traduction   latine  traditionnelle,   qui  remonte 


1.  2*  éd.  P,  Meyer,  v.  700-701, 

2.  Romattk^  VII,  453,  note. 


BELTRER  445 

temps  OÙ  tout  le  monde  comprenait  le  sens  originaire  de  dehé  ? 
Dans  deux  fables  (n°*  6  et  33)  de  la  même  collection,  il  y  a  des 
mots  français  qui  terminent  la  fable  et  qui  sont  nécessaires  pour 
le  sens.  Le  ms.  est  du  xni*  siècle  selon  Hervieux  (I,  468). 

E.-S.  Sheldon. 

BELTRER 

On  trouve  ce  mot  dans  Saint  Brendan  : 

As  aviruns  dune  se  metcnt, 
La  grâce  Dieu  mult  regretcnt, 
Qper  ne  scvent  quel  part  aler 
Ne  quels  cordes  deient  aler, 
Qpel  part  beltrer  %  quel  part  tendre, 
Ne  u  devrunt  lur  curs  prendre. 

(V.  229-234) 

Ce  verbe  fc//r«' attira  mon  attention,  et  j'eus  aussitôt  recours 
au  Dictionnaire  de  Godefroy,  où  il  est  dit  «  que  probablement  il  est 
pour  velcrer,  au  lieu  de  welcrer,  walcrcTy  errer  en  mer.  »  Cette 
explication  ne  me  paraît  pas  du  tout  probable,  et  je  crois  que 
beltrer  ne  peut  avoir  ici  d'autre  signification  que  celle  de  «  tenir, 
diriger  le  gouvernail  »,  la  beatilre  ou  la  peautre,  comme  on 
disait  anciennement.  Le  changement  du  b  tn  p  et  réciproque- 
ment, n'a  rien  d'extraordinaire,  et  j'ai  donné  dans  cette  RevuCy 
t.  XVII,  102,  un  exemple  de  beautre,  qui  ne  doit  pas  être  isolé. 
Donc  btautre,  primitivement  beltrcy  est  un  dérivé  verbal  de 
beltrer,  mot  dont  je  laisse  à  d'autres  plus  savants  à  trouver  et 
déterminer  l'origine. 

A.  Delboulle. 


I.  [Cest  la  lecture  de  Fr.  Michel  ;  M.  Suchier  (/?o/;/.  Stud,,  I,  569)  lit 
btttrer.Lt  remaniement  en  versoctosyllabiquesdu  ms.de  l'Arsenal  iporie  bouter 
(Zeiiscbr.  f.  rom,  Phil.,  II,  441,  v.  178,  comme  Ta  déjà  indiqué  Godefroy 
(sous  BELTRER).  Qpant  au  ms.  B.  N.  nouv.  acq.  4503  (ancien  Libri  112),  il 
porte  betlier  ou  beitier.  Il  reste  à  vérifier  la  leçon  du  ms.  d'York.  —  P.  M.] 


446 


MÉLANGES 


LOURE,  LOERkE 

Le  moi  kuîrt^  traduit  directement  du  biîn  lutra^  est  vieux 
dans  notre  langue,  puisqu'il  apparaît  dès  1125  environ  ; 

Uns  Juins  fud,  qui  m'aportom 
Suvent  peîsun»  duo  il  me  pout. 

(5a  int  Brandan ,  v ,   1565-) 

Quant  aux  formes  populaires  kure^  loure^  ÎQttert^  conservées 
dans  quelques  patois j  Littrc  n*en  a  assurément  connu  aucun 
exemple  ancien,  sans  quoi  îl  n  aurait  pas  manque  de  le  citer  à 
rhistorique  de  buîre.  En  voici  un  que  j'ai  rencontré  par  hasard 
dans  le  Dkîhnfiaire  de  GodefroVj  sous  le  mot  Éomstruél  : 
«  Nulle  piaus  de  hure  ne  de  housseruel  ne  de  gourpil  ne  doit 
point  de  tonJieu  n,  sans  date-  J'en  avais,  dans  mes  notes^  un 
autre  extrait  du  «  Livre  du  Chevalier  de  La  Tour  Landry  ï>(p.  3  j, 
BibL  elz.):  «  Sî  a%int  que  la  dame  dist  à  sa  claviere  que  tl 
seroit  bon  de  manger  la  grosse  anguille,  et  en  fait  ilz  la  menge- 
rent  et  distrent  que  ik  dîroient  a  leur  seignour  que  le  loerre 
Tavait  mangée,  "  Je  n'ai  pas  été  médiocrement  surpris  de  ren- 
contrer,  dans  le  CompUnunt^  ce  passage  c\it  sous  Tarticle  Loir, 
Les  continuateurs  de  Godefroy  ont  eu  ici  une  forte  distraction^ 
car  ce  n'est  pas  Thabitude  du  loir  de  fréquenter  les  rivières  et 
de  vivre  de  poisson*  Voici  encore  une  autre  forme  du  mot 
loutre  qui  n"a  pas  été  remarquée,  que  je  sache,  par  les  lexico- 
graphes :  *  On  fait  cuire  un  hérisson  en  ces  mesmes  huyiles  et 
en  vin  clairet,  jusques  à  estre  pourry,  et  l'huille  le  plus  gras 
convient  aux  podagriques;  on  peut  aussi  autant  en  faire  d'un 
renard>  d'une  Imtîti  et  d*un  blereau  »,  (Tagault,  Chirurgie^ 
p,  714,  édit.  de  1645). 

A*  Delboulle. 


ORIGINE  DU  MOT  SABRENAS  OU  SABRBKAVD 

Sabrenas  ou  sabrenaud  n'est  pas  un  vieux  mot,  car  il  n'a  pas 
d'historique  dans  Littré,  et  le  Dkîimnmrt  gméral  uqu  cite 
qu'un  exemple  qui  date  de  la  première  moitié  du  xvn*  siècle. 
A  cette  époque  on  le  rencontre  sunout  dans  la  Mmt  mymmnéi 
de  David  lerrand  où  domine  la  langue  ou  jarigon  «  purinique». 


4^8  MÉLANGES 

M.  Meyer-Lûbke  a  cherché  à  la  résoudre,  et  voici  comme*, 
L7  simple  était  vélaire  {pinguis)  en  latin  et  17  double  était 
palatale  (fXiVi^);  nous  constatons  que  calorem  donne  ffifl/*"ur 
et  non  *chekuri  si  Va  latin  ne  devient  pas  ^ ,  cela  tient  à  la 
nature  vélaire  de  17  suivante  qui  est  plus  forte  que  l'influence 
paîatalisante  du  r  initiaL  En  revanche,  n'est-il  pas  naturel  que 
Va  placé  devant  une  /  double,  c'est-à-dire  palatale^  devienne  e^ 
puisque  TinBuence  de  cette  /  s  ajoute  à  celle  de  la  f^latale 
initiale  ? 

Je  ne  veux  pas  discuter  sur  la  nature  de  17  en  latin  et  sur  la 
valeur  du  témoignage  des  grammairiens  anciens  en  ce  qui 
concerne  cette  consonne  :  cela  ne  servirait  de  rien  ici*  Sup- 
posons que  M»  Mcyer-Lûbke  ait  raison  et  eff'orçons-nous  de 
nous  représenter  révolution  de  Va  devant  l  double  telle  qu'il 
la  conçoit*  Pour  lui,  évidemment, il  y  aeuune  période  où  dans 
le  nord  de  la  Gaule,  on  prononçait  ^galina^  ayant  réduit 
//  à  /,  mais  conservant  à  cette  /  un  son  palatal  qui  la  distin- 
guait de  17  de  calorem  qui  avait  un  son  vélaire  :  de  là^  en 
français,  d'une  ipûTtgeline^  de  Tautre  chaUur,  Mais  quand  gal- 
lina  se  réduisît  à  *galina,  la  même  réduction  de  //  à  /  ne  se 
produisit-elle  pas  partout  et  gallusne  devint-il  pas  *galus? 
Comment  peut-il  se  faire  alors  que  de  gallus  le  français  ait 
tiré  jal^  tandis  que  de  gallina  il  a  tiré  gelimt  De  pan  et 
d*autre  nous  avons  affaire  à  une  /  palatale  ;  peut-on  concevoir 
que  k  même  son  de  17 'favorise  le  passage  de  i*^  protontque  à 
e  et  entrave  l'évolution  de  Va  tonique  ?  Il  est  manifeste  que  si 
gallus  donne /a/,  tandis  que  palus  donne  pcl,  cela  tient  à  ce 
que  Va  est  suivi  d*une   /  double  dans  le  premier  cas,  d'une 


K  Je  pra|>hra5e  Tidée  de  M.  Meycr-Lûbkc  pour  b  faire  plus  facilement 
comprendre  aux  Jecieurs  français  et  a  quelques  autres.  Voici  ses  propre» 
paroles  :  m  Fur  das  i  tn  gtUne  ist  vielleicht  folgende  Deutung  tu  geben^ 
Latdntsch  l  war,  wcnn  ihn  nîcht  i,  e  foigte,  velar^  //  pabul,  oJcr  wentg»* 
lens  jenes  dunkel  ipinguh),  dtcscr  hcU  {t-xilu),  Nun  ist  gaii;t  klar,  ^s;^  dk 
Fàrbtttig  des  /  sich  im  g;iUischen  L^tetn  lang  genug  geïulten  hattc,  um  deo 
Wandcl  von  vortouigen  4  zu  r  zu  Innderu*  Soll  a  un  nîcht  umgckchn  U  hell 
gcblieben  sein»  so  dass  das  zwischt^n  xwei  Palatale»  oder  llalbpalatjlen 
dngekJemmtc  a  ïu  e  wurdc?  Die  Sadie  bcdûrftc  tiatùrlich  cittcr  dngçlKD- 
dercn  umersuchung.  ■ 


FRANC.    CELINE  449 

seule  /  dans  le  second.  Cette  simple  observation  nie  paraît 
ruiner  le  trop  ingénieux  système  de  M.  Meycr-Lùbke. 

Une  autre  hypothèse,  beaucoup  plus  naturelle,  consiste  à 
supposer  que  gallina  était  devenu  *galina  en  latin  vulgaire: 
c'est  celle  qu'admettent  MM.  Bourciez'  et  Nyrop  ^  Il  me 
parait  certain  que  la  forme  française  geliue  remonte  effective- 
ment à  une  prononciation  *  gai  in  a  qui  a  dû  être  en  usage 
dans  le  nord  de  la  Gaule,  sinon  ailleurs.  Le  roumain  gaina  et 
\q  prowençil galina,  jalina  ne  peuvent  pas  nous  renseigner;  en 
revanche  l'italien  gallina,  .l'espagnol  gallina ,  le  portugais  gai- 
linha  et  le  gascon  garia  témoignent  incontestablement  en 
faveur  de  gallina.  Mais  ce  n'est  pas  la  première  fois  qu'on 
constate  des  divergences  dans  le  latin  vulgaire,  et  il  n'y  a  pas 
de  quoi  nous  faire  reculer  devant  une  hypothèse  à  laquelle 
nous  sommes  acculés  par  l'étude  méthodique  de  la  phonétique 
française.  Je  voudrais  aller  plus  loin  qu'on  ne  l'a  fait  jusqu'ici  et 
montrer  que  l'existence  en  latin  d'une  forme  *galina  est  tout 
ce  qu'il  y  a  de  plus  vraisemblable,  non  pas  seulement  parce 
<]U€  le  français  la  postule,  mais  parce  qu'elle  est  en  harmonie 
3vec  certaines  habitudes  de  la  langue  latine  elle-même. 

On  a  remarqué  depuis  longtemps  que  certains  mots  latins 

^ont  la  première  syllabe  était  suivie   d'une  consonne   double 

formaient  naissance  à  des  dérives  dans  lesquels  la  consonne  se 

^^mplifiait  devant   une    syllabe  longue.    Exemples   :   canna, 

cana.lis;  far,  farris,   farina;  mamma,  mamilla;  obba, 

ol>î  1  la;  offa,  ofella,  etc.  Je  me  borne  à  renvoyer  à  ce  qui  a 

^^^   clit  tout  récemment  de  cette  particularité  phonétique  par 

f^-    X^endryes  dans  sa  thèse  sur  l'intensité  initiale  en  latin',  et 

^     i"^inarquer  que  l'existence   de  *galina  à  côté  de  gallus 

P^Ut   se  justifier  par  l'existence  même  de  ce   que  les  latinistes 

*Pp^ lient  brièvement  la  loi  de   mamilla.   Enfin,  passant  du 

^^ï^Tiaine  de  la  théorie  à  celui  des  faits,  j'attirerai  Tattcntion 


*  -     Pràis  hist.  de  phonétique  française,  2*  édition,  JJ  89,  121,  186, 
^-     Gramm.  hist.  de  la  langue  fr.,  j  348.  M.  lîchrens,  dans  la  4^:  édition  de 
^^'^^an,  tout  en  renvoyant  à  la  note  de  M.  Meyer-Lùbke,  maintient  pru- 
"^*ïïnîent  que  gallina  >  gcline  est  encore  inexpliqué. 
^3*    Rech.  sur  Vhistoire  et  les  effets  de  V intensité  initiale  en  latin  (Paris,  Klinck- 
*^*=<^W,  1900,  pp.  57-58  et  345). 

R0mMm,  XXXJI  29 


450  MÉLANGES 

sur  ces  deux  gloses  du  fameux  recueil  de  Cassel  :  cal  lus  (= 
gallus)  :  hano ;  galina:  hanin^.' 

A.  Thomas. 

AVOIR  SON  OLIVIER  COURANT 

G.  Paris  a  connu  cinq  exemples  de  cette  locution.  Trois  lui 
ont  été  fournis  par  la  chronique  de  Geoffroi  de  Paris,  un  par 
Coquillart,  un  enfin  par  Gautier  de  Coinci.  Il  se  trouve  que, 
pour  ce  dernier  exemple,  un  ms.  .porte  son  alevin  (au  lieu 
de  son  olivier)  a  si  corant.  Et  de  plus  dans  un  autre  passage  de 
Gautier  de  Coinci  on  lit  :  Bien  iert  coran:^  ses  ailevins.  D'où  l'ex- 
plication proposée  par  G.  Paris  :  «  C'est  une  figure  prise  à  la 
pisciculture  :  quand  l'alevin  est  courant,  vivant  et  frétillant, 
il  se  porte  bien,  et  celui  qui  le  possède  est  en  bonne  santé. 
La  locution  ne  se  comprit  plus,  et  on  remplaça  le  mot  alevin, 
inconnu  en  dehors  de  certains  milieux,  par  celui  d'olivier  : 
il  ne  donnait  aucun  sens,  mais  il  était  connu,  c'est  tout  ce 
qu'il  fallait  *  .» 

Cette  explication  était  évidemment  conjecturale.  Elle  pouvait 
se  soutenir,  tout  en  laissant  place  au  doute  ',  tant  qu'on  n'en 
avait  qu'un  très  petit  nombre  d'exemples,  mais  il  est  clair 
qu'elle  devait  perdre  toute  vraisemblance  le  jour  où  l'on 
aurait  trouvé  de  nouveaux  exemples  de  la  locution  «  avoir 
son  olivier  (et  non  son  alevin)  courant  ».  Or  c'est  justement 
ce  qui  est  arrivé.  Je  rencontrai  cette  énigmatique  locution  en 
des  textes  que  G.  Paris  ne  connaissait  pas  :  l'un  de  ces  textes 
est  imprimé  dans  la  Romania,  XXX,  315,  et  à  cette  occasion 
j'annonçai,  en  note,  l'intention  de  publier  des  exemples  qui 
contrediraient  l'explication  donnée  par  G.  Paris  :  seulement, 
comme  mon  opinion  était  purement  négative,  et  comme  en 
fait  je  n'avais  aucune  explication  valable  à  donner  de  la  locution, 
je  me  contentai  de  remettre  mes  textes  à  G.  Paris,  l'enga- 
geant à  reprendre  la  question.  J'ai  retrouvé  mes  notes,  et  bien 

1.  Nos  87   et  88,  col.  41   de    VAÎtfr.    Uebungsbuch   de   MM.   Fœrster  et 
Koschwitz,  2«-"  éd. 

2.  Remania,  XVIII,  132. 

3.  Elle  a  paru  en  effet  douteuse  à  M.  Tobler,  Zeitschr.   /.  rovt.  Phil.j 
XIII,  330-1. 


AVOIR  SON  OLIVIER  COURANT  45  I 

d'autres,  hélas  !  dont  il  n'a  pas  pu  faire  usage,  dans  ses  papiers. 
Je  crois  utile  de  les  publier. 

D'abord  il  n'est  pas  certain  que  le  sens  soit  bien  celui  que 
donne  Godefroy  et  que  Paris  a  accepté  :  «  avoir  la  chance,  le 
vent  en  poupe,  la  vogue,  la  bonne  passe.  »  La  locution  est 
relevée  par  Cotgrave,  dont  les  explications  valent  mieux,  en 
général,  que  celles  de  Godefroy  :  «  Il  a  tous  ses  oliviers  courans, 
Ar  hathbis  full  swindge  or  liberly;  he  dot  h  what  ht  list  »  ;  —  «  faire 
ce  qu'on  veut,  n'avoir  à  redouter  aucune  opposition  »,  tel  est  le 
vrai  sens.  Dans  l'exemple  de  la  Romania,  XXX,  315,  on  lit  : 

Olivier  aront  la  courant, 
Jamais  ne  soufFer[r]ont  contraire. 

Là  le  sens  est  bien  évidemment  celui  qu'indique  Cotgrave.  Il 
en  est  de  même  encore  de  velut  (ou  quasi)  Olivero  currenU  dans 
les  deux  exemples  suivants,  qui,  étant  de  Giraud  le  Cambrien, 
appartiennent  aux  premières  années  du  xiii*  siècle  ou  même 
aux  dernières  du  xii*.  Le  premier  est  tiré  de  la  Gemma  ecclesias- 
'^,  n,  xxvii  (Giraldi  Catnbrensis  opéra,  éd.  du  Maître  des 
Ro/es,  n,  293) 

*^f^ny  exemplum  de  episcopo  qui,  per  decanos  et  ofBciales  ubi  ccclcsie  dcdi- 

Jf^  *^«n  fuerant,  diem  eisdem  dcdicandis  satis  brevem  statuit,  ut  clerici  pro 

«tic:>-nead  nutum  episcopi  finem  faciant,  vel,  si  forte  dcdicentur,  pro  exhi- 

'or^^  finiant.  Unde  fit  ut,  quasi  Olivero  curretiie,  et  hospitium  episcopus  in 

^l^^^i  ^iproxîma  vel  ecdesiis  accipiat,  et  tamen  ab  illo  pio  hospitio  très  marcas 

9^--»  âtuor  extorqueat. 

^^^=i^ici  le  second  exemple  (De  invectionibuSy  IV,  viii;  Giraldi 
?f^^^  ^  m,  88),  où  la  locution  velut  Olivero  currente  intervient  à 
i  oco^zi^^Jon  d'une  lettre  de  Jean,  évêque  d'Albano,  aux  évêques 
^  *^^^^^  et  de  Worcester  : 


Prcifcs 


nde  et  sic  scribebant  tam  propter  personam  archidiaconi,  quam  dilectam 


"^^^^-^ntet  acceptam,  ut  promoveri  posset,  quam  propter  fructum  etiam 

^'^^^^  ^-lum  et  emolumentum  quod  curiam  Romanam  ex  ejus  promotione  et 

^^^^"^  ^uriensis  ccclesie  per  ipsum  vexationc  pro  ccrto  noverant  consecuturam  ; 

ptoim.m:^e  tanquam  ambidextri,  et  velut  Olivero  currente^  pecuniam  in  tanta 

qaatkx.^tate  oblatam  una  manu  avide  sumebant,  et  alteram  nihilominus  exten- 

dete    "naanum  ad  lucra  futura  satagebant. 

^^■^  sens  est  bien  celui  qu'indique  Cotgrave  :  quant  à  Tori- 
gine   de  la  locution,  elle  reste  à  trouver.  P.  M. 


452 


MÉLANGES 


CHJNjSk;  ENFANT  CHANGÉ  EN  NOURRICE 


<t  Changon  ad).,  ternie  injurieux»,  dît  M.  Godefroy,  qui  à 
l'appui  de  cette  interprétation  un  peu  vague,  cite  une  pièce 
tirée  des  registres  du  Trésor  des  Chartes  (1426)  où  il  est  question 
de  deux  particuliers  qui  se  prennent  de  querelle,  Tun  deux,  un 
certain  Guillaume  Tirant,  appelant  l'autre  clmngan^  et  rinjurié 
répondant  «  quHI  n'estoit  point  changon,  et  qu'il  greveroit  ut 
courrouceroît  ledit  Tirant  avant  qu'il  feust  gaires  de  temps  n*. 

Cet  exemple  avait  déjà  été  cîté  par  Carpenrier,  dans  son 
supplément  A  Du  Cange,  au  mot  changarb%  d'où  il  a  passé 
dans  le  Dictionnaire  de  Sainte-Palaye,  introduit  par  le  nouvel 
éditeur. 

Carpentier  avait  proposé  une  interprétation  plus  précise  que 
celle  dont  M.  Godefroy  a  cru  devoir  se  contenter  :  w  sed  et 
conviciumj  for  tasse  spurium,  sonat  haec  eadem  vox,..  »  C'est  en 
effet  à  peu  prés  le  sens  :  changon^  ou  plutôt  changtmiy  chanjùn^ 
est  un  enfant  substitué.  Cela  résulte  d'un  texte  cité  par  Hens- 
cliel  dans  son  édition  de  Du  Cange,  au  mot  cambio.  Ce  texte 
est  emprunté  à  un  recueil  alphabétique  de  superstitions  rédigé 
en  1415,  piir  un  certain  Nicolaus  Magnus  de  Gawe  %  et  publié 
d'après  un  ms.  de  Bâle  par  J,  Grimm,  dans  la  première  édi- 
tion (183  s)  de  sa  Deutsche  Mythologie,  Anhang^  pp.  xLiv-xLVi  '. 

Le  passage  qui  nous  intéresse  est  ainsi  conçu  : 

Sed  forte  adhuc  diceres  vidciur  utique  quod  dcmoncs  proprie  gcnercnl, 
quia  compenum  est,  et  apud  vulgares  ocMumuniter  didiiir,  quod  filii  dcmo- 
nuttî  mcuborum  muîimbtîs,  eorum  film  subtraciis,  ab  ipsis  dctnonibus  stip- 
poii^cur,  et  ab  eb|  uiiquam  proprij  fi  tu,  outnantur,  propter  quod  ecîoni 
Ciimhfinifs  dieu  mur,  eciam  rambiti  vd  mutuati»  et  mulicrlbus  paricntibusia 
propriis  ^iîs  subtracîis,  supposili;  bos  dicuoî  maçikntos,  scnipçf  cjabnics» 
laais  eosque  (eo  usque?}  blbulos,  ut(Ua?)  quod  nulb  uberutc  laais  nnum 
lactane  SBfBdunt  (^uEdiiit  r). 

Voici  un  nouvel  exemple  de  ce  mot,  probablement  le  plus 
ancien  de  tous,  que  je  tire  d*un  sermon  de  Jacques  de  Vitri 


t|  Sous  ihangia  â^m  Tédition  Henschel. 

a.  Jauer,  en  Silésie. 

},  Dtns  h  quamémeédJtloii(par  H.  H,  Mcyer,  I875-8),  111,  414, 


CHARME  EN   VERS   FRANÇAIS  453 

«  ad  hospitalarios  et  custodes  infirmorum  ».  Je  cite  d'après 
le  ms.  534  de  Cambrai  (fol.  112  à)  dont  j'ai  déjà  fait  usage 
jadis'.  Le  même  texte  se  trouve  dans  le  ms.  B.  N.  lat.  17509 
fol.  77  d  : 

...  Qjiidem  enim  similes  sunt  puero  quemGallici  vocant  chamjon  yéi  cJmu- 
fofif  qui  multas  nutrices  lactando  exhaurit,  et  tamem  non  proficit  nec  ad  cre- 
meotum  pervenit,  sed  ventrem  durum  habet  et  infiatum.  Corpus  autem 
hujus  non  perducitur  ad  incrementum. 

D'une  formation  analogue,  mais  avec  un  suffixe  tout  autre, 
est  l'anglais  changeling,  dont  on  a  des  exemples  depuis  la  fin 
du  XVI*  siècle*. 

P.  M. 

CHARME  EN  VERS  FRANÇAIS 

En  parcourant  les  divers  traités  de  médecine  que  renferme 
le  ms.  B.  N.  lat.  7056,  souvent  cité  dans  mes  dernières 
publications  de  la  Romania,  j'y  ai  rencontré  un  charme  en 
vers  français  qu'il  est  bon  d'imprimer,  d'autant  plus  qu'il  n'est 
pas  long.  Ce  charme  a  pris  place  au  fol.  100  (anc.  281),  à  la 
fin  du  Traciaius  de  egrittidimbus  mulierum  signalé  précédem- 
ment, très  peu  de  lignes  après  le  charme Eugeiiius y  Stephanus,,, 
publié  ci-dessus,  p.  293.  Voici  le  texte. 

En  Betleem  la  cité. 

Un  veirs  enfant  i  fut  nez 

De  vcire  femme  veire  enfant 

Veires  veines  de  cest  home  tenez  vostre  î  sang. 

Et  si  fuerit  vir,  de  ipso  sanguine  scribe  in  fronte  ejus  Veronix  ;  si  femina 
Veronia, 

On  voit,  par  les  dernières  lignes,  que  ce  charme  devait  être 
destiné  à  arrêter  les  hémorragies.  P.  M. 


I.  )?(Miiani(i»  XXI,  81. 

2.  Voir  Murray,  Nnv  engL  Dictionary  :«...  Cliangeling.  A  child  secretly 
substituted  for  another  in  infancy,  cspecially  a  child  (usually  stupid  or  ugly) 
supposed  to  hâve  been  left  by  fairies  in  exchange  for  one  stolen.  »  Il  y  a 
beaucoup  d'histoires  populaires  concernant  les  djangt-lini^^s  dans  la  Fuiry 
Mythoiogy  de  Th.  Keightley. 

3.  Ms.  nostrey  en  toutes  lettres. 


COMPTES  RENDUS 


Mulomadleina  Chlrotiis,  pubU  par  E,  Oder,  Tj^îps^jg,  1901.  In-S*"»^ 
xxxvii*467  p. 

Ce  traité  de  médecme  vètérmâire  de  la  fia  du  iv«  siècle,  auquel  a  puis 
Vègèce  et  dont  Timponance  â  éié  signalée  par  MM.  W>  Meycr  et  Wôlflîîo^ 
(cf,  Lammaizsch,  Arch,  f.  ht.  Lfx.  t,  XJl,  pp.  40^,  %%l%  vient  enrichir  sur 
quel<iues  points  nos  connaissances  é%x  latin  vulgaire.  On  y  trouve  ancsièçs 
plusieurs  formes  populaires,  rares  ou  incnnnues  jusqu'ici  et  existant  en  roniiin  ; 
j*cn  ai  relevé  quelques-unes  dans  mon  Hi$L  de  la  L  rmm.  ;  de  m^nie, 
M.  Kôrting,  dans  Li  nouvelle  édidon  de  son  Lai.-r&m,  Wôrkrh^n^  îS7t 
Î90S.  L'éditioQ  quVn  donne  M.  Oder,  d*après  le  ms.  unique  de  Munich, 
nous  permet  maintenant  de  connaître  tout  ce  qu*il  contient  dlntérciMnt 
pour  rhistoire  des  langues  romanes.  Au  point  de  vue  phonétique  et  morpho- 
logique, le  texte  n'a  certes  qu'une  vaïeur  rebtivc  i  cause  des  remaniements 
qu*îl  a  subis  et  de  h  date  récente  du  manuscrit  (xv  siècle);  On  nV  relève 
d'ailleurs  que  peu  de  parttcubrités  phonétiques  et  Tnorphologlques  nouvelles  : 
bcrbactum»  verbactum^=vervaeium  202,  11;  207»  15;  cambazir 
gamba  î,  îo;  12,8,  etc.  (voit V index);  crancus:=canccr  102,  22;  scar* 
pellum=scalpelluîn  202,  15,  etc.  (voir  l'index  ;  comp.  ît.  scarpellare^  csp. 
tscarpeîaf}\  singlos^rsingulos  2^5,  19;  sûldaverint=isâlidavc- 
rinï  209,  31  ;  armora  pL  de  armus  (roum,  t^nnun)  9»  i\\  77, 16;  1S7, 
î;  bobum,  bobis=bovem,  bob  us  290,  25;  284,  i  (cf,  roum.  t^&u)i 
cadebit  (IIU  conjj  loô,  9;  claro  adv*  25,  8  (cf.  routn.  ^hùki}i 
îpsahora  71,  16;  93,  2j  (cf,  esp.  «cw-a);i  y  ajouter  peut-^re  ad  pres- 
sura II»  17.  àskn%  lequel  M.  Wôifflio  veut  voir  le  prototype  du  fr,  ûpTh\  des 
formes  telles  que  battere,  berbena,  c  an  cru  s,  criblare,  femutn=: 
Bmum,  ferra  go:=ifar  rage,  grassus^  grassitudo»  graticu  latim, 
cri  cul  a,  salvàticus,  acrus^  cocete^  defor  as,  d  esubtus,  desupra, 
foHa,  in  contra,  lacté,  ossum,  peduculus,  peduculosus»  sca- 
bia,  va  su  m  (voir  Vtnâix  et  la  préface»  pp.  xxiv^  xxvi;  nous  sontcomiuc^ 
d*autres  textes  (le  Corp,  §hss.  lai.,  etc.);  il  n*y  a  non  plus  lîcn  de  nouvesni 
dans  remploi  comme  subsiant ils  de  admissarius  3||,  9;  244,  j;  gatlU 
nacîune,  gallinacïa  249,  i|;  28e,  9;  hibcrnus  200,  14;  285,  14.  H 


R.   WEEKS,  Aimer  le  Chéti)  455 

y  a,  par  contre,  plus  de  choses  à  relever  pour  le  lexique  ;  si  nous  faisons 
abstraction  des  formes  mittere,  veteranus  employées,  comme  dans 
quelques  autres  textes^  au  sens  de  «  mettre  »,  «  vieux  »,  nous  avons  à  signaler  : 
ambulatura  78,  4  (roum.  umhîâturd);  caldare  116,  6;  246,  31  (cf. 
roum.  (inyâl^tre  qui  peut  d'ailleurs  être  un  dérivé  roumain  de  cald;  cal  car  e 
employé  souvent  avec  la  signification  de  «r  marcher  »  (surtout  dans  les  expres- 
sions :  in  capite  unguîae  càtcare  202, 14,  iu  illo  pede.,,  calcare  11,  ii^roum. 
a  cdka  invirfulurtghilor,  in  piciorul,..);  excarnare  184,  26  (fr.  écharner)\ 
pergyrare  64,  3o(comp.  praegyrare  77,  29;  129,  10)  attesté  aussi  dans 
la  Peregrin.  Silviae;  comp.  roum.  (îm)prejurare ;  primo  vere  289,  20,  21 
«  au  printemps  •  (c'est  un  pendant  àprimavera  donné  par  une  inscription 
et  dans  le  Corp,gloss.\  cf. mon  Hist.  de  la  l.  roum, y  p.  162);  responderc 
per  au  sens  de  «  passer  par  »  :  sanguis  per  ossum  respondeat  22,  4  ;  191,  9,  cf. 
210,  22--=:roum.  sîngele  rdspumfe  prinos  (le  fr.  emploie  aussi  repondre  de  cette 
manière);  spissusadv.  163,  21  «  souvent  »  comme  Tit.  spesso;  subala 
122,  3  (attesté  aussi  dans  le  Corp.  gloss.  lai.),  l'étymologie  du  roum.  (sub) 
suarà  «  aisselle»;  suspiramentum  37,  25  (cf.  a.-fr.  souspirement) ;  à 
remarquer,  en  outre,  les  expressions  :  sanguis  amhulaverit  202,  s  ;  amhuhhit 
in  lotus  102,  21;  in  unam  partem  ambulant  102,  2  (comp.  roum.  tmiumbld 
stngele;  a  umbla  intr^o  lature;  a  umbla  intr'o  parte) \  in  directo  venae  33,  17 
(in  dreptulvinei  en  roum.);  in  lougo^  in  longum  70,  19;  31,  30;  longasuspi- 
rabit  iio,  9  (roum.  în  lung;  a  suspina  lung)\  per  cribrum  traicies  226,  20 
(roum.  a  trece  princiur) ;  ad  vivum  209,  2--fr.  au  vif.  Le  texte  est  intéressant 
aussi  pour  la  synuxe;  nous  nous  contentons  de  rappeler  remploi  de  ad,  de, 
au  datif  et  au  génitif  (voir  Vittdex),  la  transcripttion  du  passif  par  des  formes 
réfléchies  :  se  sanare  13,  29^  sanari  (cf.  aussi  les  remarques,  d'ailleurs 
très  sommaires,  de  l'éditeur,  p.  309). 

O.  Densusianct. 


Raymond  Weeks.  Aimer  le  Chét If  (Extrait  à%is  Publications  of  th  modem 
language  Association  of  America,  t.  XVII,  pp.  411-434  (oct.  191^2), 

M.  R.  Weeks  tente  de  reconstituer  le  rôle  qu'a  dû  jouer  Aïmer  le  Chétif 
dans  notre  poésie  épique  primitive,  avant  d'être  incorporé  à  la  geste  d'Orange. 
Il  s'efforce  d'établir  que  ce  personnage  combattit  les  Sarrasins  en  Kspagnc 
avant  Charlemagne  ;  qu'étant  tombé  aux  mains  des  ennemis,  il  fut  délivré  par 
le  grand  empereur  ;  que  les  plus  anciens  poèmes  dont  il  était  le  héros  ayant 
disparu,  sa  renommée  diminua,  pas  assez  cependant  pour  qu'on  ne  le  jugeât 
digne  d'entrer  dans  la  famille  d'Aimer!  de  Narbonne  ;  il  y  occupa  d'abord  une 
place  très  en  \'ue  ;  on  lui  adjoignit  Vivien,  dont  on  fit  son  neveu  (état  de  la 
légende  représenté  par  les  Nerbonesî).  Plus  tard,  éclipse  par  Guillaume,  il  devint 
le  moins  brillant  des  satellites  qui  gravitèrent  autour  de  Tastre  nouveau. 

Il  y  a  dans  ce  mémoire  du  talent  et  une  finesse  d'esprit  qui  dégénère  faci- 


45^  COMPTES    RENDUS 

Icmt'ni  en  cette  subtilité  diingcrcuse  que  plusieurs  des  devandérs  de  M.  W. 
dans  cet  ordre  d^études  n*ont  pâs  toujours  su  é^îiLT.  M.  W*  me  paraît*  d'autre 
part,  attacher  trop  dlmponance  â  cenains  dêtaîb  des  NtrhGnmf  qui  n'ont 
petit-iïtre  d'autre  source  que  riniaguiation  d'Andréa.  Et  ce  reprodie  encore, 
n  nVst  p.is  seulii  YéWok  encouru.  Etitîn  i>ts  renseignements  sont  îneomplets; 
c'est  ainsi  que  dans  la  liste  des  poèmes  (p-  4 12)  qui  mcniioniient  Aîmcr,  on 
ne  trouve  ni  fe  Cottrmtttetfi^ttt  Lauis^  v,  826-850  ;  ni  fieraiftas^  p.  6j;  ni 
Hftmt  Capet,  p.  42,  44,  iiii  112,  127,  1^1.  ;|7»  îB%  i|6;  ni  Vivim  âû 
Mowhrtitft^  V.  715;  ni  Aniioche^  t.  H,  p,  269,  Le  Cmifonnimenî  a]  au  te  un  té- 
moïgoiige  à  ceux  quf  Tauteur  a  cités  de  la  résolution  prise  par  Aîmer  de  ne  ' 
jamais  entrer  «  en  loge  ne  Teste  chevroné  *.  Il  s'^îgit  sans  doute  d'un  n  co ve- 
nant 19  fait  par  le  jeune  chevalier  à  Tépoque  de  son  adoubement»  andogue  à 
celui  de  Vivien.  Fiirabras  rappelle,  avec  Aimtri  de  Nurbonm  (v,  4698)1  la 
mort  de  *  raufage»,  tué  par  Aimer,  et  nous  apprend  que  cet  exploll  fut  pré- 
pare pi^r  la  femme  même  du  Sarrasin,  éprise  d'amour  pour  le  captif,  firtmi 
Captif  commt  Ahmrî df  Narhonne(\\  4697),  appelle  cette  femnie  Soramonde  ; 
nous  fait  siivoir  qu'Aimer  régna  avec  clic  â  Vetiise  ;  et  ajoute,  d'accord  avec 
Aubri  de  Trois-Fontaincs»  qu'il  eut  d'elle  un  fils  nommé  Drogon  (Aubri  dit 
Rogon)',  qui  lui  succédai  Venise,  t^ns  Vivien  dr  Mombrant  Aîmcr  est 
aussi  dit  vt  de  Venise*  1»  Huott  Capei  et  Vivien  de  Motfihrunt  doivent  donc  être 
ajmités  aux  poèmes  (cités  p.  425-426)  qui  placent  en  Italie  le  théâtre  des 
hauts  taits  d'Aimer, 

M.  W.  est  convaincu  que  dans  la  légende  primitive  c'est  en  Espagne  que 
le  héros  s*iïlustre  eti  luttant  contre  les  infidèle^^  mais  les  arguments  qu'il  in^ 
voque  à  Tappui  de  cette  thèse  ne  sont  rien  moins  que  probants.  Ils  se  réduisent 
â  une  série  d'hypothèses,  dont  'aucune  ne  repose  sur  le  moindre  appui. 
L*un  des  poèmes  qui  ont  concouru  à  former  la  chanson  d\4îiscans  aurait 
raconté  les  aventures  de  Garin  en  Vénétie  ;  on  aurait  plus  tard  supprimé  le 
nom  de  Garin,  en  négligeam  de  retrancher  également  celui  de  Venise  (édit. 
Guessard*  p.  216).  qui  se  serait  ainsi  trouvé  accolé  par  erreur  â  celui 
d'Aimer.  D^AHicam  Terreur  se  serait  propagée  dans  d'autres  compostittom* 
Je  ne  crois  pas  qu'il  soit  utile  d'insister  sur  cc*s  învraisemManccs'.  Les  choses  ^ 
se  présenienr  en  réalité  bien  plus  simplement.  En  réunissant  les  indications 
données  par  le  moine  de  Trois-Fontaines  ^  et  par  les  auteurs  de  Fierahûs 
(p,  6î)t  à*Aîmn-t  à€  Nûrhmié(v.  4589-4602)  cl  de  Huôti  C-J/*)*!  (passages  cités 
plus  haut),  on  a  le  sujet  d*un  poème  perdu  dont  Aimer  était  ïc  héros  i 
Armer  est  allé  au  secours  du  pape  et  des  Honxains,  attaqués  p^r  les  Sarrasins 
(comme  Guillaume  dans  le  Cimrùnmmftii  L&uîi)  ;  il  est  blessé,  fait  prisonnier 


u  Fertï,  Mmh  Gtrm.,  Scriptom,  XXHI,  p.  716,  1.  40, 

2.  Plus  ingénieux  encore,  mais  non  plus  convaincant,  est  le  paragraphe  ou 
M.  Wceks  ^'efforce  d'établir  que  dans  le  CiKtmmi  et  dans  AltMum  le  nom 
d'Amieri  a  été  substitué  â  celui  d'Aimer. 

l,  Pertjf,  Mmi,  Gcrm,,  5cripi&r€S,  XXI II»  P^  7Pt  !•  iO  et  &uiv» 


TiERSOT,  Chansons  populaires  457 

et  conduit  en  captivité  à  Venise  ;  aidé  par  Soramonde,  femme  de  Taufage,  il 
sort  de  prison,  tue  le  Sarrasin,  se  rend  maître  de  la  ville,  épouse  sa  libératrice 
et  a  d'elle  un  fils  appelé  Drogon.  Il  est  raisonnable  de  croire  que  ce  roman 
représentait  un  état  ancien  de  la  légende  ;  que  plus  tard  seulement  on  a  fait 
guerroyer  Aïmer  en  Espagne,  scène  habituelle  des  exploits  de  la  geste  nar- 
bonnaise  ;  et  qu*aIors  des  jongleurs  ignorants  placèrent  au  delà  des  Pyrénées 
«  Saint  Marc  de  Venis  »  (Aliscatis^'édh.  Guessard,  p.  126,  148,  Narbomtais*). 

Où  mourut  Aïmer  ?  Les  Nerbottesi  disent  sous  Orange,  la  Mort  Aimeri 
(y.  1385)  dit  à  Porpaillart.  Et  M.  W.,  qui  donne  généralement  la  préférence 
au  récit  italien,  l'abandonne  cette  fois,  parce  que  Porpaillart  est  en  Espagne.  Il 
n'a  pas  connu  Huon  Capet,  qui  fait  mourir  Aïmer  «  en  la  cité  de  Mequez  » 
(p.  42),  attiré  dans  un  guet-apens  parle  Soudan,  qui  le  fit  écartcler*. 

Malgré  les  critiques  que  je  viens  de  lui  adresser,  le  travail  de  M.  Weeks  est 
intéressant  et  mérite  d'être  lu  avec  attention. 

Ernest  Langlois. 


Chansons  populaires  recueillies  dans  les  Alpes  fran- 
çaises (Savoie  et  Dauphiné),  par  Julien  Tiersot.  Grenoble,  Falquc  et 
Perrin;  Moutiers,  Ducloz.  In-40,  xxix-549  pages. 

Bien  que  les  chansons  populaires,  comme  tout  ce  qui  est  postérieur  au 
moyen  âge»  demeure  en  dehors  du  cadre  actuel  de  la  Rornania,  nous  ne  pou- 
vons nous  dispenser  d'annoncer  sommairement  ce  beau  volume  où  sont  con- 
densés les  résultats  de  recherches  conduites  avec  méthode  pendant  plusieurs 
années.  Le  rapport  au  Ministre  par  lequel  s'ouvre  la  publication  (M.  Tiersot 
avait  une  mission  du  gouvernement),  la  préface  qui  suit,  sont  d'une  lecture 
très  attachante.  M.  Tiersot  s'est  mis  en  campagne  juste  à  temps  pour  pou- 
voir encore  s'entretenir  avec  des  vieillards  dans  la  mémoire  desquels  som- 
meillaient de  vieilles  chansons  qu'on  ne  chante  plus  guère,  et  qui,  pour  la 
plupart,  sont  morts  pendant  que  le  volume  s'imprimait. 

Il  a  pu  aussi  avoir  communication  de  vieux  cahiers,  datant  de  plus  d'un 
demi-siècle.  Mais  comme,  en  sa  qualité  de  musicien,  c'était  à  la  musique 
qu'il  attachait  le  plus  de  prix,  il  était  essentiel  qu'il  pût  faire  chanter  ceux  qui 
savaient  encore  des  chants  populaires,  et  c'est  pourquoi  il  importait  qu'il  pût 
recueillir  la  parole  vivante.  Il  n'a  pas  publié  (c'eût  été  matériellement  impos- 
sible) tous  les  textes  qu'il  a  recueillis  ;  il  a  dû  faire  un  choix,  et  nous  n'avons 


1.  Comparer  les  vers  7951  aux  vers  538,  1047-48,  1176. 

2.  Dans  VivUn  de  Momhraui,  que  M.  W.  n'a  pas  connu  davantage,  mais 
dont  il  n'y  a  pas  à  tenir  compte  ici,  Aïmer  de  Venise  est  tué  dans  un  combat 
sous  les  niurs  de  Mombrant  (v.  715).  L'auteur  d'Aye  d'Avionoti  (p.  44  et  p. 
52)  dit  qu'il  trouva  la  mort  dans  une  bataille  où  Garin  d'Anseùne  et  Her- 
naut  de  Gironde  furent  faits  prisonniers. 


4S8  COMPTES  MENDUS 

pâs  de  mi^n  de  douter  de  [4  valeur  de  ce  choix.  La  plupart  de  ces  chânsoDS 
sorit  fnioçiiîscs,  par  conséquent  importées^  comme  beaucoup  des  chansons 
populaires  de  U  Provence  ou  du  Pîcrnont;  quelques- unes  cependaDt  sont 
patoises  (par  ex.  Ltttroh  smtri^  p.  114)^  mais  celles-Jà  mairie  sont  iinitéesde 
chants  français.  On  sait  que  le  français  a  pénètre  de  borgne  heure  en  Savoie, 
bien  pîus  tôt  certaîncnient  qu*en  Provence  ou  en  Languedoc.  Le  recwcil  de 
M,  T.  est  intéressant;  il  peut  utre  considéré  comme  Tune  des  plus  impor- 
tatites  collections  de  poésies  populaires  qui  aient  été  publiées  jusqu'à  ce  jour. 
YoM  qui  est  entendu.  Toutefois  sur  divers  points  la  critique  trouverait  a 
s*e3tercer.  Et  d*abord  beaucoup  de  ces  chansons  ont  déjà  été  publiées  en 
d\iutres  rédactions,  M.  T,  le  sait  et  il  le  dît,  mais  d'une  façon  Irôp  générak* 
I{  ne  cite  gui^re  que  tes  publications  relatives  à  b  Savoie,  au  DauphtnC*  et  ^u% 
pays  voisins.  Il  aurait  augmenté  le  prix  de  son  recueil  en  donnant  pour 
chaque  pièce  une  bibliographie  systématique  et  aussi  complète  que  possible. 
On  s'étonne  que  M.  T.»  publiant  deux  leçons  assez  médiocres  delà  FtmetU^ 
n*ait  pas  jugé  a  propos  de  faire  mention  du  travail  si  approfondi  que  Don- 
cieux  a  consacré  â  cette  chanson  dans  le  tome  XX  de  la  Romania.  Bibliogra- 
phie ^  part,  des  références  eussent  été  souvent  bien  utiles.  Ainsi  la  pièce 
Intitulée  t<  les  répliques  de  Marion  »>  (p,  |ife),  classée  assez  mal  à  propos 
parmi  les  chansons  de  la  Mal  mariée,  n*cs£  qu*un  fragment  peu  tntelUgible. 
Une  version  proven*;aie  plus  complète,  et  â  tous  égards  metHeure^  a  été  publiée 
p.ir  Lexandre,  dans  le  FHmna^edr  Mimlît  (Paris,  r864,  p.  170),  d'après  une 
communication  de  Fr.  Mistral,  qui  me  l*a  chantée  plus  d'une  fois,  il  y  a  quarante 
'ans\  D'autres  fois  on  regrette  que  M.  T.  n'ait  pas  donné  un  pcti  plus  de 
variantes.  Ainsi  pour  la  chansoti  de  Christophe  {p.  [84),  M*  T.  en  a  recueilli  trois 
versions  :  uneà  Bonne vî île,  deux  dans  le  Quei ras.  Sont-ellesldemiques?  J'au- 
rais d'autant  plus  dibiré  en  connaître  les  différences  que  le  sujet  est,  â  peu 
prés,  celui  du  Saveiur  BaiîUt  que  j'ai  publié  dans  le  t,  III  de  b  Romania. 

En  général  M.  T.  ne  donne  pas  asse^  de  varia nieSj  et  n'explique  pas 
assez 'comme  11  constitue  ses  leicies.  Dîra-t-on  qu'il  a  craint  de  grossir  soii 
volume?  Mais  il  y  avait  des  économies  de  place  à  faire  d'un  autre  c6té.  Tout 
le  premier  chapitre  {CiMnsons  Mituriquei}  pouvait  être  supprimé,  ou  du 
moins  très  résumé,  sans  grand  dommage.  Il  ne  contient  guère  que  des  pièces 
déj  imprimées  el  dont  plusieurs  n'ont  nullement  le  caraaére  populaire* 
D'ailleurs  elles  ne  sont  pas  toutes  publiées  de  façon  â  satisfaire  pleinement 
la  critique.  Ainsi  (p.  11)  M.  T,  reproduit,  d'après  le  livret  connu  sous  le 
nom  de  La  Flmr  des  chanM0m\  une  u  chanson  en  savoysien  »»  mais  U 
aurait  dû  dire  qu^it  ne  la  donnait  pas  entière.  Les  chansons  sur  TEscalade  de 


t.  Une  réfaction  un  peu  di^érente  esi  dtée  par  A.  Daudet  dans  Numa 
R&umistaff,  éd.  Charpentier,  p.  1 7S. 

2,  m  IjtFkurdachûHsotts,  Lesgrans  c  ban  sons  nouvelles  qui  sont  en  noml*re 
cent  ct4ï%  où  est  comprise  U  chanson  du  Kov,  la  chanson  de  F'âvie«  b  chan- 
son que  le  roy  ^st  en  Êspaigne^  la  chanson  Je  Homme^  la  chan^n  des  Bru* 


TiERSOT,  Chansons  populaires  459 

Genève  (pp.  34  et  s.),  dont  la  seconde  est  du  temps  de  la  Révolution  fran- 
çaise, sont  vraiment  hors  de  leur  place.  Et  on  pourrait  en  dire  autant  de  bon 
nombre  des  pièces  groupées  dans  ce  chapitre.  Nous  aurions  préféré  que  M.  T. 
nous  communiquât  d*une  £^on  plus  complète  les  résuluts  de  ses  recherches. 
Malgré  d'évidents  défauts,  ce  recueil  est  intéressant,  et  fournit  à  Thistoire 
de  la  chanson  populaire  française  des  éléments  nouveaux  et  importants. 

P.  M. 


nettes  et  Teremutu  et  plusieurs  aultrcs  nouvelles  chansons,  lesquelles  trou- 
vères par  la  table  ensuyvant.  »  —  M.  T.  indique,  comme  date  de  ce  recueil 
(dont  il  existe  une  réimpression  moderne),  la  seconde  moitié  du  xvi«  siècle, 
mais  Bninet  le  çhtce  vers  1 5  30. 


PÉRIODIQUES 


ZEXTSCHRtFT  FUR  ROMANISCKE  FHÏLOl-OCIl,  XXVI,  5*  —  P,  52Ï ,  J.  PirSOfl, 

Das  Oisitkr  Ghisar.  Cvt  article  fort  savant  et  fort  iiuèressaiit  a  pour  objet  de 
montrer  que  ïa  partie  latttie  des  Gloses  de  Cassel  est  étroiiemttit  dépendante 
d'autres  glossaire,  et  que  la  plupan  des  formes  que  Ton  y  considère  comme 
romanes  appartiennent  plutôt  au  latin  vulgaire  prêroman  (mais  Tauteur  recon- 
naît lui*nienic  que  la  limite  est  artitkielle)  ou  à  la  tradition  graphique  du  bas- 
iatin  ;  il  m\  résulte  qu'on  11e  peut  guère  l'assigner  à  une  rÇ*gion  déterminée  de 
la  Roimnui  :  tout  au  plus  dans  quelques  formes  peut -on  reconnaître  des  traits 
ou  réto-rotnans  ou  g^lo-romans.  Je  ne  puis  entrer  ici  dans  le  détail ,  et  signa- 
ler les  tïoiubreux  rapprochements  avec  d'autres  glossaires  et  les  explications 
souvent  très  plausibles  de  telle  ou  telle  forme  :  je  citerai  seulement  ce  qui  eM 
dit  de  dugf  (où  lauteur  voit  avec  raison  rimpèfatïf),  umhtra,  mtéum,  ipinah^ 
€%imi  et  Citmalla  {pour  mmi  et  aiuufitit}^  talauun,  estlos^  meiiran^  hilf,pn^ 
ùsrmi  ou  C4risx  ',  shirwi,  Inïfrmtoi,  aihtas  oculus,  tmimîiKiiril  (qui  serait  pour 
*  miwdttcattîis,  perdu ^  ponderaus^  fuisthis).  Je  croîs  que  M.  P.  va  un  peu  trop 
loin  dans  la  voie,  d*ailleurs  excellente,  où  il  est  entré,  et  que  l'élément  pro* 
premeni  roman  des  Gloses  n*cst  pas  aussi  restreint  qu'il  le  dît.  —  P.  5  5 1  * 
Elise  RidncTt  2^tir  îznhvu'kfuHg  u}n  /i*'.  apud  >►  npnn**  anL  Ltude  très  intéres* 
santc  Cl  très  consciencieuse,  que  je  n'M  pas  le  loisir  d'examiner  en  détail,  mais 
dont  les  résultats  paraissent  plausibles.  —  P.  Jp,  M,  Friedwagner,  Dk  fVr- 
wmtiltscfhifis-iŒd  iVerlvtrMHnh^f  àtr  Menn^h-Handschrifîett  (an).  Dans  cette 
étude  très  longue  et  très  minutieuse,  M,  Friedwagner  soumet  â  un  nouveau 
contrt^ie  le  rapport  des  manuscrits  de  Meruugis,  et  notamment  Topinion  que 
j'ai  émise,  ainsi  que  M.  Ebeling  et  d'autres  sur  la  valeur  critique  du  manuscrit 
de  Turin,  a  Je  voudrais  presque,  dit-il  en  concluant,  laisser  à  d'autres  le  soin 
de  répondre  aux  questions  posées,  car  je  suis  partie  au  procès.  Mais  mon  avis, 
si  je  îc  donne,  est  que  mon  ancienne  classification  est  la  bonne,  et  que  celle 
qu*on  a  proposée  à  Tencontre  non  seulement  n*est  pas  démontrable,  ntais  est 
très  invraisemblable,  et  que  quand  même  toutes  les  raisons  que  j'ai  donnée?;, 
isolèn>ent  et  dans  leur  ensemble,  ne  vaudraient  rien,  il  n'y  aurait  qu'une  con- 


1 .  C'ci^t  le  mol  où  récemment  M.  Baist  3  cm  recontsaitre  un  mot  sîavo 
(voy*  Rom.^  XXXI,  450).  Je  nrétonne  à  ce  propos  que  M.  Pirson  n'ait  pas 
dté  cet  article  de  M.  BaiJrt,  dont  les  obser\'atîOns  coïncident  souvent  avec  les 
siennes,  publiées  dan4i  le  même  recueil  plusieurs  mois  plus  tard. 


pfcRIODiaUES  461 

dusion  sûre  à  tirer,  c'est  qu'il  n'y  a  moyen  d'établir  aucune  classification.  »  Il 
m'est  impossible  de  discuter  dans  le  détail  les  innombrables  passages  exami- 
nés par  M.  Fr.  ;  je  me  bornerai  à  dire  que  ceux  de  ses  arguments  que  j'ai 
regardés  de  près  ne  m'ont  point  paru  convaincants;  ce  qu'on  peut  dire  en  tout 
cas,  c'est  que  si  M.  Fr.  donne  une  nouvelle  édition  de  Meraugis^  elle  différera 
de  la  première  plus  qu'il  ne  semble  l'admettre  ici.  Il  faut  souhaiter  qu'il  donne 
cette  édition,  où  le  texte  profitera  certainement  beaucoup  de  ses  attentives  et 
pénétrantes  recherches. 

Vermischtes.  Zur  Wortgeschichte,  P.  584,  Schuchardt,  Nochmals  engad. 
îifidorna  «  limace  »  (cf.  Rom.  XXXI,  453)  :  se  rattache  au  german  lendern, 
slendern,  dont  l'auteur  signale  en  roman  des  dérivations  extrêmement  nom- 
breuses et  très  variées  de  forme  et  de  sens  (elles  ne  sont  pas  toutes  assurées). 
P.  585,  Schuchardt,  înoyiX.scMfe  «  touffe  de  cheveux  »,  se  rattache  au  haut-alle- 
mand 5rÀr//îr,  «  cosse  de  fruits». — P.  58  5,  Schuchardt,  ital.  schienaU,  «  morue». 
Ce  mot,  qui  se  trouve  et  dans  le  nord  de  l'Italie  et  dans  un  passage  de  Laurent 
de  Médicis(où  il  n'a  pas  été  compris),  se  rattache  à  schiena.  —  P.  586,  Schu- 
chardt, rom.  gdrgdrd-ifd  ;  gàrgàun.  Le  premier  mot,  qui  a  des  sens  assez  diffjp- 
rents,  représente  un  croisement  de  c  u  r  c  u  1  i  o  et  du  bulgare  skakalecà  ;  le  second, 
qui  signifie  «  frelon  »,  a  des  sens  figurés  curieux,  un  mélange  de  crabro  et  de 
scarabaeus.  Il  est  impossible  d'analyser  ces  anicles  riches  en  rapprochements 
intéressants  et  nouveaux. —  P.  588,  Schuchardt,  cuchlia  (voy.  Z,  XXVI, 
318):  Tu  se  retrouve  dans  l'anglo-saxon  clucge  ;  anc.  fr.  jugottce,  m.  h.-all.  idchant 
(Z.  XXVI,  398)  :  cf.  diverses  formes  orientales  et  slaves.  —  P.  588,  Schultz- 
Gora  :  prov.  en.  L'auteur  en  cherche  l'explication  dans  l'emploi  de  ne  (abrégé 
du  voc.  do  m  ne)  après  de  :  lo  cas  tell  de  ne  BertriWy  puis  den  Bertran^  de  ne  deve- 
nant den  comme  de  lo  est  devenu  del^  et  il  remarque  que  l'exemple  de  beau- 
coup le  plus  ancien  de  en,  dans  le  vers  la  molher  den  Guari  e  den  Bernart  d'une 
pièce  connue  de' Guillaume  IX,  présente  en  effet,  f/rw  et  peut  s'interpréter  de 
n  aussi  bien  que  d^en.  Je  doute  cependant  que  «r  de  domne,  mot  d'origine 
savante  et  peu  ancien,  et  qui  n'est  pas  enclitique  comme  /o,  ait  pu  être 
traité  de  même  ;  j'ai  dit  ailleurs  (Mélanges  Coutnré)  que  j'expliquais  en  par 
l'aphérèse  de  domen  >  domine.  —  P.  590,  Schultz-Gora, ^5rdr/m<m.  L'auteur 
montre  que,  contrairement  à  ce  que  j'avais  dit  (/?ow/.,  XXX,  i$})escariniani  est 
parfois  substantif  (il  eu  cite  deux  exemples,  mais  il  est  évident  que  c'est  l'em- 
ploi adjectival  qui  est  le  plus  ancien  comme  le  plus  général)  ;  il  cite  aussi  dans 
le  Gir.  de  Rouss.  d'Oxford  la  forme  escharamant  ',  avec  a,  qui  favorise  l'étymo- 
logie  grecque  jxapaaotTxov,  déjà  proposée  par  Fr.  Michel  et  reprise  indépen- 
damment par  l'auteur.  —  P.  591,  Zimmermann,  Zur  Etyntologie  des  fr^, 
Nominalsuffixes  -iGT.  L'auteur  pense  que  -iarius  a  pu  être  pris  pour  un  sufiîxe 
et  substitué  à  -arius,  et  n'admet  pas  que  -iarius  ait  dû  devenir  -iV  et  non 
.  'ter, 

I.  Dans  le  ms.  d'Oxford,    v.  2453;   ^^   "^5.   de   Paris   (éd.   Hofmann, 
y.  1834)  porte  escariman,  —  [P.  M.J 


moins  de 


462  pfeRlODiaUES 

81s»»  s.  McfVcr-Lùbkc,  £#»f/xî^M(^'   m   J^u  ^tiuiium  étst 

dm  Sf  chtft  (J.  Moht  :  Û2si^  CCI  ariklc^  ^m  n^  pi» 

20  fhigi^.  iiutoir  ^ Jitacbc  sunoat  à  mofttPtT  que  M«  MeyiT-LôMçc  1  îm  àt 
grmds  progrès  Jepuis  son  ^bleau  de  ladn  vulgiîn^  dam  le  Grmmiriu^  et  ^uc 
c»  progrès  coDsisumt  essentidlenscin  dan^  ced  :  quU  s*esi  «ppTfKftié  des 
théories  de  M,  MohI,  —  sans  le  nommer  totitefiois^  ce  dont  i:e]ut'd  ne  lui 
sait  d'alllctirs  aucun  mauvais  gré  ;  à  cAtê  de  cette  ihèsc  un  peu  hardie^  00 
trouvert  ^  ei  li  quelques  observations  bïcrcssanicsj,  —  P.  62 1 ,  Ha^ickhorst, 
Uéer  dk  Gic^raphif  bti  JfiJréd  dé'  Magnait i{B€Ckct  :  cf.  Htm.,  XXXI,  6||). 

—  F,  62  a»  Fitz-Maurice  Kelly»  Hittoria  dt  U  lt$n4iura  tip^moi^,  tnd.  y  âao* 
lâda  por  Adotfo  Eonilla  y  San  Manin,  con  tin  cstudio  preliminaf  pot  Mucë- 
llno  Blenècïdejc  y  Pekyo  (Becker  :  ouvr^^  agréable  ee  solide  en  mtênie  tea^)* 

—  P.  62),  Mills  Gayîcy  aod  Newton  Scott^  An  lHlr0timii0n  tû  îbt  mtlkois 
and  maUriais  of  Hurary  crîUdim  (Vosslcr).  —  P,  624»  HugU,  Dk  rûmamis- 
dbn  Sirofétn  in  d^r  Dkkung  dtuticher  RmaanUhriXosûsx),  ^  Levi,  î  môtm-^ 
tmnU  piû  itntichi  dêl  duUttù  dt  Chkggm  (Savf^l^opez  :  les  textes  publiés  par 
routeur  sont  réiifés  eo  vénitien  et  non  en  dîdkcte  de  Chioggu).  —  P.  627. 
Bcllorini»  Note  suik  ir^idi^hm  iktiiiim  dfik  Eroidî  d'Oi'sdm  (Savj-Lopi:^).  ^~ 
P*  625,  Segarizri,  Lu  m  Qiiima  9,  k  ora^ioni  t  It  fpisï^itdi  Ska>  PûUnUvt  Qi^vf^ 
Lope^e).  —  P-  ^29,  Gorra,  fra  drammi  t  foemi  (Sa%*j-Lopex),  —  P.  650 , 
Vldoisich,  Studf  ml  diaUm  iriistim  (Gamier  :  remarques  intéressantes  sur  ce 
très  louable  travail).  —  P.  éi},  Rolin,  Bfrùhi  iétr  du  RfsuUaU  seîntr  RetitH 
in  -ren  (Subals  :  fait  désirer  la  suite).  —  Zauner,  Romamuhe  Spr^ 
ih.  (Subak),  -^  R  60,  Li  Moym-Agt,  Xlll  (Ed.  Schneejçtns).  — 
P.  6î7,  Schtîchardt,  Zut  Homamta  XXXJ,  ijj  Anm.  i  :  l'auteur  rappelle  ^u*il 
avait,  dé*  son  VoktUfmm  des  Vu^ârLUeim^  mentionne  la  déclinaison  en  -t  -imis^ 
ce  qui  avait  écbippé  à  M.  Philipon,  et  explique  pourquoi  on  la  Appelé  âtmi 

Nëue  Bûcher.  Annonces  sommaires  de:  Dotùn  et  hingouci^ Ghn^ire du 
fhirkr  de  PUcbdid  ;  Friedersdorff,  Auî  Fruu:^  Peiti%fkû%poeîiu})en  Brie/en  ;  Bovct» 
Amorti  ilprcèUma  an  dan.*  (remarques  qui  ressemblent  de  près  i  celles  qui  ont 
été  Cutes  ici^  XXXI»  606)  ;  Koch,  CiiUtU)^tie  ùf  thé  IXtrtte  Qyiieçtion  preuvitd  hj 
H^tUard  Fiîkt,  I  ;  Pochhammer,  Ddttte^s  Géitîich$  lùnwdie. 

G.  P. 


XXVI,  6.  —  P.  641,  Ph.  Aug.  Becker,  Aui^iûgrapki$chtî  wn  Jehsm  Mmuei. 
Commentaire  Historique  sur  la  compUinte  de  la  mort  de  Marie  de  Bourgogne 
{En  temp^qut  perî  Aurota  m  ^ram  pteurt)^  qui  est,  en  effet.  Tune  dcï  prirKi- 
pales  sources  à  consulter  sur  b  biographie  du  poète,  —  P.  6j2,  D.  Beltrens, 
Wortitsehichiiidm  \  complément  et  correaions  à  Kôtling,  LAt.-r&m,  iVûrL^ 
2' éd.  —  R  670,  H.  Und,  Laiifttngiiihe  Studio,  Essai  de  délimitatîoQ 
dialectale  diaprés  les  différences  morphologiques.  —  P,  692,  L*  Sûtcerliiit 
Zut  Kmntnii  der  httdi^fH  pikardiuh-jmniiuhcn  MunâarUm  ;  ni,  Worikkeê  j 
IV,  WmtV€rhindung€n\  Cgnclusiom. 


PÊWODIQUES  463 

MÉLANGES.  P.  716,  Kcao  Mevtr.  EùuEri.^yù  ;'s  «  Trlsu^.  iu  /.-.Vi:  .  i^" 
J(i5  ultiszbt  HsiLi.  n  s'isT-^  i<i  rzisseij  4^  zy^  dans  U  chambre   même' 
d*Iseut  et  qui  apporte  à  Li  ncnc  le>  éclats  de  bois,  messages  de  Tiisian.  Pocr 
M.  M.  nous  avons  rien  là  uc  :r2::  celisq^ie.  niais  nullement  u::  resîe  d'une 
dvilisatioa  bariare.  Le  ruisseau  iravcrsan:   la  rrjison  se  retroui  erair  assc^: 
tard  chez  les  Celtes  ixtsciaires  e:  ericcre  iu:::urd*hul  dans  le  pi^-s  de  Galles. 
Ueiemple  donné  par  M.  M.  n'es:  pas  arso^unsen:  co?:va:ncan:  :  il  y  a  loin. 
me  semble-t-il,  du  rmsseao  passant  ±2zs  une  laiierie.  ^  laquelle  û  donne  b 
fraîcheur  nécessaûre,  au  raisseau  -xissan:  dans  u::e  pièce  de  la  n^aison  d'habâ- 
Ution.    —   P.    718,   E.  KeCer,  Szmtz   \hrij   ::rzs:  (Barsegapè,  v.  075». 
L'obscur  adjeaif  cirial  correspond  aux   ibmics  du  ncrd  de  Tlulie  zfrùr^L:, 
serioUy  «  Chandeleur  >,  avec  i  protcniquc  d'après  la  tonique  de  ^:Zj.  cera.  et 
changement  de  suffixe  pour  ia  rime.  —    P.   7:$.  Schuitz-Gora.  «   CerJ^l 
étAmârt  >  und  «  pailt  ii  BiUrm  -.  A'-.irt  es:  lilc  dWndrcs  don:  !a  soie  est 
encore  aujourd'hui  la  principale  production  :  Biz.r^u  serait  Viterbo.  la  Kai- 
serchramk  place  en  effet  Blttrnt  en  Italie:  Texprcssion  pailt  ii  Bûirtu  aurait 
laisse  croire  que  la  ville  était  sarrazine,  de  la  scn  transport  en  Espagne  chez 
les  conteurs  épiques.  M.  S.-G.  rapproche  hecreu sèment  du  nom  de  BiUnu 
les  autres  noms  de  villes  sarrazioesen  ~frné  :  OdUme,  Aujaîenu^  etc.  —  P.  720, 
Schnltz-Gora.  anc.  fir.  ganuu^  =  le  son  le  plus  bas  de  la  gamme,  noté  par  F. 
et  appelé  of  ;  le  ^  final  provient  de  remploi  au  nomiiutif.  //  premiers  u^.  et 
s'est  conservé  même  dans  en  gamaài  ou  ^amtù^.  —  P.  722,  D.  Behrens.  fr. 
â»i^nfr<colorare,  le  coudremcnt  du  cuir  consistant  â  lui  donner,  par  un 
bain  d'eau  chaude  mêlée  de  tan,   une  couleur  fauve  :  anc.  fr.  dai^ru  n'est 
autre  que  le  d<f «M  des  Glosses  dt  Rikhenau  (Foerster  u.  Kosch^itz,  Alîj'r.  CM., 
851,  area  ;  dania) <Zgcrm.  Unni:  fr.  remouLkU,  M.  B.  préférerait  à  Tidenti- 
fication  proposée  par  A.  Thomas  de  rémouladi,  sauce,  et  rimouladé,  emplâtre 
pour  chevaux  à  base  de  son  <  it.  remolata  de  nmola,  son,  l'explication  sui- 
vante :  rémoulade j  sauce  piquante  <  ramohidi <C  ramolat,  raifort.  <ar  mo- 
racium  (cf.  it.  ramoLtccio)  ;  il  note  d  ailleurs  l'emploi  du  raifort  en  hippia- 
trique,  ce  qui  ramènerait  à  confondre  1rs  deui  formes  françaises  :  mais  il  faut 
malheureusement  reconnaître  que  le  raifort  n'entre  pas  dans  la  plus  ancienne 
recette  de  la  rémoulade  ;  anc.  fr.  sopûrr^  tondre  le  drap,  et  mots  ^"allons  ou 
flamands  apparentés  <  ail.   lopf.  —  P.    727,  W.   Meyer-Lùbke,  fr.   noue  : 
M.  M.-L.  distingue  entre  noue,  lieu  bas  et  inondé,  prov.  mod.  nau^o,  dont  il 
rattache  le  prototype  bas-latin  n  au  d  a  au  breton  njj^,  lit  de  ri\*ière,  sans 
<i'ailleurs  se  prononcer  sur  le  rapport  de  filiation  entre  ces  deux  dernières 
fonnes,  et  noue,  tuile  creuse,  prov.  nuuco,  auge,  tronc  d'arbre  creusé,  etc. 
Ces  dernières  formes  s'expliqueraient  bien  par  un  'n  a  u  c  a  <  n  a  v  i  s,  cf.  a  u  ca 
<avis;  maisid  se  pose  la  question,  soulevée  par  .M.  Neumann,  du  traite- 
ment de  -auca  :  M.  M.-L.  critique  et  écarte  les  divers  exemples  d'alter- 
nance de    -<w>,  -oue  réunis  par  M.  Neumann,  â   Texcertion   de  oie,   oue, 
<auca.  Or  :  i«  -oue  est   la  forme   la  plus  anciennement    attestée,  oie 
D'apparaissant  qu'au  xiv*:  siècle:  20  l'hypothèse  de  .M.  N.  implique  Texis- 


464 


PtRlODIQUES 


tmcc  d'un  masculin  'au eu  >  *(m  quî  aurait  influencé  ok^  mai^  h  forme 
féminine  esi  b  forme  ancienne,  la  plus  répandue,  îe  nom  de  Foîcest  fiêminîo. 
âm^  la  plupart  des  langiies  de  rEuropc  ei  les  formes  masculines  sont  dérivées 
du  féminin  ;  tout  ccîa  rend  improbable  le  passage  oi€  >  ota  ;  3"  supposons 
AU  contraire  que  om  est  la  forme  régulière,  le  passage  à  (yie  est  facile,  sous 
rinfluence,  non  de  miel,  miis  de  oimî  ;  ce  dernier  représente  'aucione 
<  a  u  c  a,  qui  eût  dû  donner  Vjm^m,  mais  que  oisfl  a  pu  facilement  influencer, 
raccc:nt  étant  à  la  même  place  dans  les  deuK  mois.  Aîtisi  qu£  est  la  forme 
française  pure  provenant  de  au  ca  et  de  méroe  noJte  de  *nauca  est  régulier* 
^  P»  733,  E.  Hcr^og,  tr,  avtu^le  :  M*  H,  ne  croît  pas- que  aimgU  puîsseétre 
eipUqué  comme  venant  de  Ja  langue  du  droit  (hypothèse  de  G.  Paris  : 
<nrïi^''^f<ab  oc  ul  us  d'après  kf^n^x^zni),  il  y  voit  Un  terme  de  méd^inc  et 
Tcxplique  par  a  1  b  u|" m]oc u  I  »,  glaucome»  d'où  radjectif  vulgaire  *al  boculu  s 
et,  par  dissimilation  *aboeutus;  —  prov.,  anc«  (r.Jd^/ei&n^  h.JfHo  :  le  type 
latin  fello  serait  un  dérivé  de  feUare;  —  fr.  /où^,  ît,  gâia,  rét.  ^ulia  t 
pour  échapper  aux  diflicultés  phonétiques  que  rencontre  Téiymôlogie  de 
Dier  'gauta  <  g  a  bâta,  M,  H.  propose  cavit  a  [s]  >  'cautu  >  *gauta; 

—  roum.  iUrp,  stérile,  et  formes  albanaises^  siciliennes,  frbulancs  apparen- 
té€s  <  •cxsiirpîs. 

Comptes  rêki>us.  P.  7î7iG.  Dobschall,  tFort/ttgung  im  Pahù  van  Bmr- 
mis  (E.  Herïog).  —  P.  741,  E*  Konnemnacher,  Praklisches  Lthrifuch  d^r 
ûitfran^èihchn  Sptache  fj.  Subak).  —  P.  742,  G.  Mari,  Riûsmttlo  e  Di^iûmirirtt^ 
di  Ritmica  itaïitma  (K*  Vossler).  —  P.  745,  Bertha  von  dcr  Lagc,  Studim  ^itr 
C^tmitiulfgftuU  (A,  L.  Stiefel).  —  P.  747,  E.  Lefévre,  Caîalogm Jèiibrim  ft 
du  Midi  de  h  Feamt  (A.  Schube  :  critique  du  plan  et  du  détail  de  rcnécution), 

—  P.  750*  Heimidf^  htigim  romams^  XLIV,  1901  (Schuhji-Goria).  —  P.  75 1* 
Sntdj di Jihlo^ia  romcifi-a,  fa*^c.  25-21  (F-  Savj-Lope/.),  —  P,  755,  Ghrnaie 
jfcr/V-a  dilh  liiUraUim  Ualiam,  XXXIX,  a-j,  et  XL,  r-i  (B,  Wiesc).  — 

M.  R. 


Studi  GLOTTOiOGia  iTAUANi  direttl  da  G.  de  Gregorio,  îll,  190? .  — 
P,  I,  T.  Zanardelli,  ï  n&mi  ItKûHin  -aticus  ntîV  Emlim  e  ntth  Bomaj^na, 
Le  sufîîte  -ati  c  us  peu  représenté  dans  le  lexique  commun  est  bien  plus  fré- 
quent dans  les  noms  de  lieu  d*limilie  et  de  Romagne.  M,  Z.  donne  une  Ibtc 
abondante  d'exeropîes  largement  commentés,  Nototis  que  dans  ces  noms 
rinflucnce  littéraire  a  introduit  une  forme  particulière  du  suffixe,  -éik  au  lieu 
de  •«%♦  -èd^^  au  moins  au  masculin,  car  -ûdga  s'est  conservé  au  féminin.  -» 
P.  49,  D*  Oïivjeri»  Studj  ^uHa  toponomastica  veneta.  Important  travail,  fait 
d^iprès  Je  plan  excellent  de  M.  Pi  cri,  et  muni  d'index,  ^  P,  225,  G,  de 
Gregorîa  et  Chr*  F.  Seybold^  Ghssarh  ddk  mci  nciîmm  di  ori^mt  ûraha. 
G^e  liste^  que  l'étude  des  noms  de  lieux  pourra  beaucoup  allonger,  n'inté- 
rcssc  pas  seulement  les  parlcrs  siciliens,  mais  aussi  Tcnsemble  des  parlers 
romans  ;  cf*  p.  ex.  les  articles  avaria  :  h.œvHina^  ff,  avijtk,  csp,  aperia  <  ar* 


piRioDiàuEè  465 

avaria;  hagascia^  à  rattacher  peut-être  avec  toutes  les  autres  formes  romanes  à 
l'ar.  haghtja  \gabella  et  formes  apparentées  <  ar.  qahihy  le  sicilien  connaît  aussi 
et  tout  d'abord  la  forme  cabella,  ce  qui  écarte  la  difficulté  provenant  de 
rinitiale  sonore  en  roman  ;  gafia,  esp.  gafa,  pr.  gafy  fr.  gaffe  <  ar.  knffa  ; 
giannettUy  esp.  ginete,  fr.  genêt  (cheval)<  ar.  Zeiiéta;  varda,  it.  esp.  barda,. 
fr.  harde<i9x.  harda'a.  —  P.  253,  G.  de  Gregorio,  Nuovi  contrihuti  alla  etimo- 
logia  t  Ussicografia  romança  coti  {spéciale  riguardo  ai  dialetli  siciliani.  Encore 
un  complément  à  Kôrting,  utile  surtout  pour  le  sicilien;  des  indications 
relatives  aux  autres  parlers  romans  tout  n'est  pas  également  important.  — 
P.  290-297,  Index  des  mots  romans  contenus  dans  les  deux  derniers  articles  : 
tout  index  est  le  bienvenu  ;  mais  il  est  bien  incommode  d'y  trouver  employés 
alternativement  deux  systèmes  de  renvois,  à  des  numéros  de  paragraphes  pour 
un  article,  à  des  numéros  de  pages  pour  l'autre.  Peut-être  aurait-on  pu 
joindre  un  index  à  l'article  de  M.  Zanardelli,  et  le  plus  simple  eût  alors  été 
de  donner  à  tout  ce  volume  des  Stmii  un  seul  index  des  mots  à  la  fois  métho- 
dique, c.-à-d.  classé  par  langues  et  dialectes,  et  alphabétique,  et  complété 
par  un  relevé  des  mots  arabes  cités.  —  P.  299-312,  G.  de  Gregorio,  Sur  la 
iimpliciU  de  deux  articulations  prépalatales  et  sur  la  nécessité  d^admettre  une 
classe  de  phonèmes  ainsi  nommés.  11  s'agit  de  c,  ^,  considérés  comme  sons 
simples  et  non  composés  de  dentale   f  fricative. 

M.  R. 


Studi  di  Filologia  romanza,  pubblicati  da  E.  Monao  e  C.  de  Lollis, 
vol.  IX  (fasc.  24,  25,  26),  1901-1903.  —  P.  1,  L.  Biadene,  Carmina  de 
mensihuSy  di  Bonvesin  de  la  Riva.  Il  a  été  donné  un  compte  rendu  détaillé  de 
cette  importante  publication  dans  la  Romania,  XXX,  597.  —  P.  131,  G.-A. 
Ccsareo,  La  sirventesca  d'un  giidlare  toscano.  II  s'agit  de  la  cantilena  giullaresc.i 
attribuée  au  xii^  siècle,  et  qui  est  en  tout  cas  du  commencement  du  xiu^, 
dont  plusieurs  érudits  se  sont  déjà  occupés.  G.  Paris  a  dit  quelques  mots  du 
mémoire  de  M.  Cesareo  à  propos  d'un  travail  récent  de  M.  Torraca  sur  le 
même  sujet  (/?ow.  XXXI,  171).  —  P.  146,  P.  Marchot,  Dans  quel  sens,  en 
Pranu  et  en  Italie,  le  bouclier  est-il  le  tueur  de  boucs  ?  Polémique  contre 
M.  Th.  Reinach  (Mém.  de  la  Soc,  de  linguist.  de  Paris,  IX,  126),  qui  rejetait 
l'origine  généralement  admise  de  «  boucher  ».  -  P.  153,  C.  de  Lollis, 
Pfoposte  di  corre::(iofii  ed  osserva^ioni  ai  testi  proz'en^ali  del  manoscrilto  Campori, 
Nous  avons  déjà  mentionné,  d'après  un  exemplaire  tiré  à  part  (XXXI,  160, 
note),  ces  corrections  et  observations,  faites  un  peu  vite,  mais  dont  beaucoup 
sont  justes.  —  P.  171,  Comptes  rendus  :  La  Ceksiina,  éd.  Foulché-Delbosc 
(M.  Schiff);  K.  Mac-Kenzie,  Dante^s  referenus  to  .Esop  (C.  de  Lollis).  — 
?•  176,  Notices  variées.  —  P.  181,  P.  Toldo,  Études  sur  le  théâtre  comique 
fronçais  du  moyen  dge  et  sur  le  rôle  de  la  nouvelle  dans  les  farces  et  dans  les 
confies.  Suite  de  rapprochements  groupés  sous  un  certain  nombre  de 
rubriques,  quelquefois  un  peu  vagues  (Lutte  de  ruses  \    Contre  le   mariage, 

•M,  XXXII  OQ 


46  e  PÈRIODiàUES 

L'ûulûrïii  dtà  mart\  ecc)  qyl  fie  prouvent  p^  du  lotit  que  ks  forées  soîenl 
dans  iin  rapport  intime  avec  Jes  notîvelîes  qu  ks  fabîwux*  Œ  ce  que  G.  P^ns 
dit  à  ce  sujci  ci-iicssus,  p.  176.  —  P.  370,  G.-B.  Bonelli,  /  notm  degît  uccdli 
fut  dialtU't  îùmbardi.  —  P.  469,  Comptes  rendus  :  A.  letmm.  Il  Trimp 
d'amure t  di  Fr.  da  Burberim  (Fr.  Egidî  ;  observations  sur  la  date  de  la  com- 
position des  Documenlu  en  opposition  à  1  opinion  émise  par  M.  Ant,  Tbômas; 
cf.  ifoMf.^XXXI,  479)v  Bertoni,  Nuovi  riniedi  Sordelh  (C»  de  LoUb).  Appel, 
Wkdintm  ^u  Janjre  Rttdf!  (C.  di;  L.  j  et  Rom.^  XXXI,  472).  Savj-Lopex»  La 
rwî>Éltûpr0V\  dâi pap^^^afio  {C.  de  L.  ;  cf.  Rom.,  XXXi,  169).  Zingar^lli»  Lo 
fûmans  dé  San  Trv/mu  (C.  de  L.)-  T.  Crescini,  Rambaldo  di  Vaquelras  r  Baldopim 
imperator€  (C.  de  L.)*  —  P.  485,  Notices  variées.  —  P.  48^,  Savj-Lopei,  // 
canionkri  prown^aUJ.  C*^st  le  ms*  F.  4.  776  de  la  Bibl.  nat*  dç  Florence,  décou- 
vert trt  décrit  en  t872  par  M.  Stengd;  voir  Mom.,  l,  t4j>'T.  J*3Î  fait  repro- 
duire, il  y  à  vingt  ans»  une  page  (fol.  8  r^)  de  ce  ms*  pour  T  École  des  chartes 
(no  ij4  des  Héliogravyres).  J'ai  pu  vérifier  sur  ce  fac-àtmilé,  qui  est  excdlen! 
(h  photographie  a  éti'  faite  par  Brogi),  la  copie  de  M.  S.-L,  Je  nV  ai  trouvé 
qu'une  faute,  qui  n*cst  sans  doute  qu'une  erreur  typographique,  la  kctur^e 
ne  laissatit  place  à  aucun  doute  :  d^itmlm  (i  la  prunuèrc  ligne  du  fetîillet)  au  lieu 
de  dr(ereiat.  ttudiam  les  rapports  de  ce  recueil  avec  les  autres  chansonniers, 
M.  S.-L.  arrive  à  des  conclusiotis  qui  différent  assci  notabk-ment  de  celles 
qye  M*  Grôhcr  avait  adoptées  daiis  son  mémoire  sur  ks  chansonniers  des 
irouhdûoKïT^ {RotmniSCfM  Sitidùn,  t.  H),  Il  pense  avec  raison  que  le  ms.  de 
Florence  a  été  écrit  oltmipe.  Je  le  crois,  d  après  les  caractères  de  la  langut% 
écrit  dane  une  région  voisine  du  Rhône.  —  F*  J95,  A*  Ferretto»  Nottikiniortw 
a  CaUca  Pimiamy  inrvaîort  gaimese  f  alla  sua  Jamigîîa.  On  savait  bien  que 
Câlega  Pansa,  troubadour  dont  une  pièce,  conser\-ée  par  le  ms.  Campoii, 
a  été  publiée  par  M.  Bertoni  {et  Rom.,  XXXI,  16a),  était  génois;  on  Favait 
rattaché  avec  certitude  à  la  familk  Panzano,  bien  connue  dans  Thistoire  de 
Gènes  au  xiîî*  siècle.  M.  Ferrctto  complète  notre  infomiatioo  en  imprimani 
une  trentaine  de  docunients,  tirés  des  archives  des  notaires,  où  figure  ce 
troubadour.  Le  système  de  publication  adopté  par  M.  F.  n'est  pas  à  louer, 
D  n^  3  p^  de  ponctuation  et  les  capitales  sont  placées  comme  dans  les  oti- 
^naux,  c'est-à-dire  de  la  façon  la  plus  irrégulière.  Cette  alT^ulioii  de 
minutieuse  cxactiiudei  dans  des  copies  oii  on  résout  les  abréviations  et  où  oti 
distingue  le  i'  de  l'w,  est  bien  puérile*  —  P.  617,  G.  Crocioni,  a  La  itUmV' 
nu  ta  hdkotosa  »,  Com  média  indiakiio  diCin^QU  {Mautaia\  s  606^  Texte  de 
cette  pièce  Inédite^  accompagné  de  recherches  historiques,  d'un  dépouillement 
linguistique  et  d'un  glossaire.  —  P.  676,  Fr.  L*  Mannucd»  Del  likro  de  k 
miurakumam  condiciom.  Il  s*agit  d'un  remaniement  inédit»  en  prose  génoise, 
de  U  traduction  déjà  assejE  libre  i|ue  Bt^no  Giamboni  ht  en  toscan  du  traité 
célèbre  dlnnocent  ÏIL  —  P,  69?,  SoU  leakali  ed  onamaioli?^ khe  di  Gioi'annt 
FUthia^  idtk  àa  Giuieppc  Rechk.  Ces  notes  sont  un  spécimen  d'un  travail 
Imporufit  laissé  par  FUlusire  linguiste^  et  dont  on  nous  annonce  la  publkadoa 
prochaine.  —  1*,  707,  F.  d'Ovidio,  Fa  il  diaktta  di  Campohass&,  L'on  des 


PÈRIODIQjÔES  467 

plus  anciens  travaus  linguistiques  de  M.  d'Ovidio  est  une  fonetica  del  dia- 
letto  di  Campohasso  publiée  dans  le  t.  IV  de  YArchivio  glottologico  (1877). 
Récemment  le  même  sujet  a  été  repris  dans  Tun  des  mémoires  dont  se  com- 
pose la  misullanea  composée  en  Tbonneur  de  M.  Ascoli  (Rom.,  XXX,  573). 
M.  d'Ovidio  se  défend  avec  succès  contre  certaines  critiques  qui  lui  avaient  été 
faites,  et  en  même  temps  présente  d'intéressantes  considérations  sur  les  chan- 
gements qui,  depuis  25  ans,  se  sont  produits  dans  les  conditions  linguistiques 
du  pays.  —  P.  714,  G.  Popovici,  Xuove  postilU  aï  di^ionario  délie  colonie 
rumene  d'Istria;  cf.  d-dessus,  p.  325  un  autre  travail  sur  le  même  sujet  de 
M.  Popovici.  —  P.  720,  Comptes  rendus.  I.  Nieri,  yocab.  lucchese  (J.  Pieri). 
V.  Cian,  Vivaîdo  Belca^er  e  Tenciclopedismo  italiano  délie  origini  (C.  de  L.). 
P.  Andraud,  La  vie  et  V ouvre  de  Rainum  de  Miraval  (C.  de  L.  ;  cf.  ci-dessus, 
p.  131).  L.  AzzoHna,  La  Compiuta  doniella  di  Firen^e  (C.  de  L.).  A.  Par- 
dacd,  Sulla  cronologia  e  sul  valore  délie  rime  di  Bonagiunta  Orhicciani  da 
Lucca  (C.  de  L.).  — *P.  734,  Notices  diverses.  La  dernière  de  ces  noti:^ie  est 
ainsi  conçue  :  «  Con  questo  Êucicolo  cessa  la  pubblicazione  degli  Siudj  di 
fMogia  romança  ».  C'est  bref. 

P.  M. 

L'année  UNGUisriauE  publiée  sous  les  auspices  de  la  Société  de  philologie 
(Organe  de  T œuvre  de  saint  Jérôme)  \  tome  I,  1 901 -1902  ;  Paris,  Klincksieck, 
1902;  vi-303  p.  pet.  80.  —  Nous  annonçons  avec  plaisir  l'apparition  d'un 
recueil  qui  se  propose  de  dresser  l'invenuire  annuel  des  progrès  réalisés 
dans  chaque  partie  du  domaine  linguistique  ;  mais  il  est  fâcheux  que  le 
nouveau  périodique  débute  par  un  retard  de  trois  années  et  nous  offre,  en 
1902,  un  tableau  des  publications  de  1898-99'.  Le  plan  du  recueil  est  très 
peu  rigoureux  et  les  inutilités  n'y  choquent  pas  moins  dans  certains  articles 
que  les  lacunes'  ;  les  indications  bibliographiques  ne  sont  ni  uniformes,  ni 
complètes;  enfin  la  correction  t^'pographique  laisse  quelquefois  à  désirer'. 

Les  romanistes  ne  trouveront  à  peu  près  rien  dans  ce  volume  qui  ne  leur 

aût  déjà  été  signalé  dans  les  revues  spéciales.  Je  doute,  d'autre  part,  que  le 

chapitre  consacré  aux  tangues  romanes  soit  aux  linguistes  d'une  bien  grande 

.   utilité  :  tout  cela  est  trop  long  pour  une  bibliographie  et  trop  vague  pour 

un  inventaire  critique;  des  lacunes  et  quelques  erreurs «. 

M.  R. 


!•  le  ne  comprends  pas  la  mention  I90i-i902du  titre. 

2.  En  quoi,  par  exemple.  le  Partirai  de  \V.  Hertz  ou  VEru  traduit  par 
M.  Qédat  intéressem-ib  ta  linguistique? 

)•  Cela  est  particulièrement  gênant  dans  les  noms  propres. 

4-,  Pour  nous  en  tenir  à  la  linguistique  roumaine  prise  comme  exemple,  on 
^vait  peine  à  retrouver  sous  le  titre  de  Bibliographie  de  T ancien  roumain  la  Bihlio- 
r^M  romineascâ  veche  de  Bianu  et  Hodo^;  on  ne  comprend  pas  pourqur>- 
<Ptttre  des  Studii  de  fikiogie  romind  d'O.  iX-nsusianu  sont  citées  et  la  cini 


468  PÉlJODK^eS 

BULLETIN'   DE  LA  SOCIÉTÉ  DES  .KSOESS  TEXTES   FKAXÇAJS,  I902.  —  P.  64, 

A.  Piaget,  Sou  :ur  le  tottu  X  de:  œuvres  œmpiîUs  £Emstacbe  DesàoMÊpi.  Soos 
le  ixLTt  de  V  Fîcc»  anribuablts  â  Desciumps  »,  M.  G.  Ra>-Qaiki  a  pubîîé,  ca 
tète  du  t.  X  de  son  édition  d'E.  Dcschamps,  aise  série  de  &i  pièces,  dont 
U  plupart  sont  tirées  du  ms.  B.  N.  oouv.  acq.  (x.  6221.  Presque  toutes  soot 
des  ballades.  Dans  cette  note  M.  Fuget  identifie  ace  Tingtaine  de  ces  poésies, 
dont  quelques-unes  sont,  non  pas  de  Descbamps,  mais  de  Guiilaufoc  de 
Machaut  ou  d'Alain  Chanicr.  —  P.  6S-96,  P.  Moer,  SctUé  dum  mu.deîa 
Bibliùthiqui  (fliite  a  Modem  {U^endii  dti  sainls  en  frauçais).  Ce  légendier,  qui 
n'avait  pas  été  étudié  jusqu'ici,  a  été  écrit  en  Italie.  11  est  apparenté  de  très 
près  avec  le  ms.  1008  de  Tours,  décrit  dans  le  BuiUtin  de  2897  (cL  RpmamîA, 
XXVII,  5:5;,  qui  est  aussi  d'origine  italienne.  Il  contient  â  peu  pris  les 
n)émes  vies,  don:  beaucoup  sont  traduites  de  Jacques  de  Varazze,  et  dans  le 
même  ordre.  —  P.  100- 1 19,  J.  Camus,  La  uconde  iraductUm  de  la  Chirurgie 
de  Mottdntlle  Notice  du  ms.  l.  iv.  17  de  la  Bibliothèque  nationale  de  Turin 
(xvc  siècle^,  qui  contient  une  seconde  copie  de  la  version  de  Mooderille 
déjà  étudiée  par  .M.  le  D^  Bos  d'après  un  ms.  d'Upsal  (Bulleiim  de  1900). 
Outre  cette  version,  le  ms.  de  Turin  contient  un  grand  nombre  d'opuscules 
français  Ctraduits  du  latin;  concernant  b  médecine  et  la  botanique  médicale. 

JoL'RSAL  DES  SAVANTS,  1905,  u»  6  fjuinj.  —  Ce  numéro  cooticot, 
pp.  337-345,  un  intéressant  article  de  M.  Ant.  Thomas  sur  le  poème  pro- 
vençal de  sainte  Foi,  publié  récemment  dans  la  Romania  (XXXI,  177;,  par 
M.  Lcite  de  VasconccUos.  M.  lliomas,  qui  a  pu  faire  usage  d'un  Cac-similé 
photographique  excjuté  par  M.  £.  Châtelain,  propose  nombre  de  corrections, 
toutes  fort  ingénieuses,  plusieurs  ceruines  II  a  fait  remarquer  (p.  341, 
note;  que,  par  un  accident  survenu  â  l'imprimene,  le  v.  481  {Et  en  $ttn 
corps  creiss  ten  vi^or\i])  avait  disparu,  mais  disons  que  cet  accident  s'est 
produit  seulement  dans  le  tirage  a  part;  ce  vers  ne  manque  pas  dans 
l'impression  de  b  Romania. 


quiémc  étude  fDrugescu,  Disimiiafiune),  importante  pour  le  linguiste,  laissée  de 
c6té;  M.  Densusianu  a  pi.blié  une  vie  de  saint,  et  non  de  sainte,  Basile:  on 
ne  s'explique  pas  pourqu(/i  le  cinquième  Jahresbericht  de  M.  Weigand  n'est 
pas  analysé,  etc.  —  Je  dois  avouer  mon  ignorance  des  intéressants  travaui 
de  philologie  romane  que  '  l'Université  slave  de  Bessarabie  »  aurait  commencé 
a  élaborer  f  p.  27). 


CHRONIQUE 


Nous  avoas  annoncé  par  un  feuillet  encarté  dans  notre  numéro  double 
d'avril-juiilet  1901,  la  publication  d*une  table  des  trente  premiers  volumes  de 
la  Romania,  dans  laquelle  par  conséquent  serait  fondue  la  table  des  dix 
premières  années  due  à  M.  Gilliéron.  Nous  estimions  alors  que  cette  nou- 
velle tabk  formerait  un  volume  d  environ  600  pages  et  nous  en  avions  fixé 
le  prix  en  conséquence  (10  fr.  pour  les  souscripteurs,  et  1 5  fr.  une  fois  la 
souscription  close).  L'entreprise  que  nous  annoncions  est  entrée  dans  la 
période  d'exécution,  mais  elle  n'aura  pas  toute  l'étendue  que  nous  suppo- 
sions. Notre  collaborateur  M.  le  D^  Bos,  qui  a  bien  voulu  se  charger  de  ce 
pénible  mais  très  utile  travail,  a  maintenant  à  peu  près  terminé  la  rédaction  : 
Timpression  est  même  commencée.  Après  mûre  délibération,  après  examen  de 
di\'er5  spécimens,  et  en  vue  d'aboutir  plus  vite  et  d'é\'iter  une  complication 
qui  aurait  nui  à  la  facilité  des  recherches,  il  a  été  décidé  que  la  table  ne  con- 
tiendrait pas  tous  les  détails  que  d'abord  on  avait  pensé  y  faire  entrer,  de 
sone  qu'elle  n'occupera  guère  plus  de  )oo  pages  (le  prix  annoncé  sera  modifié 
en  conséquence).  Elle  sera  faite  sur  un  plan  très  différent  de  celui  qui  avait 
été  adopté  pour  la  table  précédente,  et  croyons-nous,  plus  commode  pour 
les  recherches. 

—  M.  Alexandre  Kirpitchnikok,  professeur  à  l'Université  de  Moscou, 
précédemment  à  Kharkoff  et  d  Moscou,  est  décédé  le  25  mai  dernier  à  l'âge 
de  58  ans.  Nous  l'avions  vu  à  Paris,  en  1874,  alors  qu'il  étudiait  les  langues 
romanes  comme  élève  de  G.  Paris  au  Collège  de  France  et  à  l'École  des 
Hautes-Études.  11  avait  une  grande  connaissance  des  littératures  du  moyen 
ige  et  de  la  Renaissance,  et  s'était  surtout  occupé  de  l'histoire  des  légendes 
pieuses  du  moyen  âge,  notamment  des  récits  relatifs  à  l'Assomption  de  la 
Vierge  (voir  Rottumia^  XIX,  492)  et  à  saint  Georges.  Il  avait  entrepris  un 
grand  travail  sur  la  légende  de  la  Vierge  dans  l'an  et  dans  la  poésie  dont  il 
a  exposé  le  plan  â  la  Société  des  antiquaires  de  France  (1892,  27  janvier). 
Malheureusement,  la  plu  pan  de  ses  travaux,  étant  écrits  en  russe,  sont 
demeurés  lettre  close  pour  beaucoup  de  ceux  qui  auraient  eu  intérêt  â  les 
connaître.  Il  a  cependant  écrit,  en  français  ou  en  allemand,  quelques  anicles 
dans  la  Revue  crilûjue  (sur  un  recueil  de  chansons  historiques  russes,  1875, 1, 
p.  î}i),  et  dans  XArchiv  f.  slavische  Philologie, 


470  CHRDNiaUE 

--Le  îS  mai  dernier  est  décOdi^  le  Nron  Bollah  de  SAiNi-PiFRRE,sunii" 
tendiint  des  Archives  d*Éut  à  Turin,  connu  pur  un  giatid  nonibrt?  de  publk^- 
lions  hkloriqueSj  entre  leîiquelk'S  uous  sign.derons,  comme  se  rupfH>naî)t  le 
plus  particulièrement  aux  études  que  poursuit  la  Romantay  la  Cfmntc^n  di  Phi* 
iippe  iU  Sa™*'  {1879)  ^^^^  "O'JS  avons  rendu  compte  ici  même  (IX,  47a):  les 
Ces  tel  ^^  Crofifqtm  de  îa  ttmson  de  Savoy f^  par  Jean  Scrvion  {1879.  2  vol. 
în-8«>)  ;  un  curieux  inventaire  de  livres  et  objets  précieux,  rédigé  i  Moiice- 
lie  ri  en  1 479,  ei  fort  îniéressant  pour  Thistoire  des  collections  appartenant  â%i% 
princes  de  Savoie  (Rùtntmiûy  XI II,  473)  ;  des  Nmdk  e  Inytsie  franan  imâiîeo 
nirmimi  {iM^^  d'après  un  manuscrit  qui  lui  appartenait  {/?(Vn<jn /a,  XIX,  ^40). 
Le  biiron  de  Saint-Pierre  était  d'une  obligeance  â  toute  épreuve,  C*tst  à  lui 
que  îa  Romaniû  a  dû  la  communication  d'un  précieux  rôle  de  chansons  à 
danser,  daté  de  1 517,  que  nous  avons  publié  il  y  a  dix  ans  (XXin,  1 56). 

—  Le  n  juin  est  mort  à  Wûrzburg,  à  Tâge  de  quarante-neuf  ans,  Jakob 
StûrïTNger,  professeur  de  philologie  romane  et  anglaise  à  T  Université  de  celle 
ville;  la  terrible  maladie  qui  avait  terrassé  son  prédécesseur  Eduard  Mail  s'èuîl 
aussi  abattue  sur  lui,  et  depuisquelque  temps  rUnïversilé  avait  dû  lui  donntT 
un  successeur,  tout  en  lui  consentant  son  titre  et  son  traitement.  Né  a  Wylcn, 
dans  le  canton  dt  Zurich,  il  avait  suivi,  à  Berlin,  les  cours  de  M.  Toblcr^  puis» 
à  Paris^  ceux  de  Gaston  Pari.s  :  fia  thè^e  {Vthtr  die  Cùnjugatimt  in  Rxiaroffm-  j 
w/icAffi,  Winterthur,  1879)  est  dédiée  à  ce  dernier.  Ktant  privât  docent  j  FUni- 
versité  de  Bono,  en  1884,  il  avait  accepté  d'aller  aux  États-Unis  pour  y  profci^ser 
dans  un  collège  de  jeunes  filles,  mais  il  ne  put  s*y  acçlinuier^  malgré  un 
séjour  asseî  prolongé.  Revenu  en  Europe»  il  enseigna  comme  privai  docemà 
r Université  de  Munich,  puis  comme  professeur  à  Tùbingen(j 892)01,  quelques 
mois  après,  à  Wurjeburg.  Il  a  publié  dans  VAiifraniosùçhe  Bihtiûthtk  (t.  VI 11) 
sous  le  titre  d'Orthographié  gfiUitû^  le  plus  ancien  traité  de  U  prononciaitoti  fran- 
çaise que  nous  possédions.  Mais  son  nom  restera  spécialement  attaché!  l'oeuvre 
de  GuULiume  de  Deguillevillc,  éditée  par  lui  pour  le  Roxburghe  Club  (voyci 
Rifmaffiay  XXI,  331  ;  XXIV,  485  ;  XXVL  344).  Le  tome  Hl,  que  la  Rùmanm  i 
a  omis  de  signaler  à  ses  lecteurs,  a  paru  en  1897  :  il  contient  le  PArrinagê 
JfxsmrîsL  StûrjEÎnger  se  proposait  de  publier  dans  b  même  collection  tiD 
quatrième  volume  dans  lequel  t!  aurait  placé  un  glossaire  précédé  d'uiiê  étude 
complète  sur  la  vie,  Toîuvrç  et  les  manuscrits  de  Deguillevilîe.  U  devait  en 
outre  donner  k  texte  de  la  seconde  rédaction  du  Prkrinagf  de  Vie^  en  appen- 
dice â  la  traduction  anglaise  de  Lydgate,  dans  la  collection  de  VEarly  En^gtith* 
kxî  Sùcitty.  Son  œuvre  reste  inachevée;  mais  il  a  asse^  fait  pour  laisscf 
une  trace  durable  dans  le  domaine  de  la  philologie  romane.  Ceux  qui  Tout 
connu  personnellement  resteront  longtemps  affligés  de  sa  disparition,  car  à 
des  connaissances  étendues  et  variées  StûrjÉingcr  joignait  La  modestie  et  Timé- 
nité.  —  A.  Th. 

—  M.  Ch.  LojzKAu  DE  Grandm.uson^  correspondant  de  TAcadéniie  des 
inscriptions  et  belles-lettres,  ancien  archivbte  dMndre-et- Loire,  est  décédé  à  . 
7'ours  le  ï6  juin-  Nous  ai^noncions  dans  net  ne  précédent  f^iscjculc  (p.  149)9 


CHRONIQUE  471 

son  dernier  travail.  Ses  études  avaient  trait  principalement  à  Thistoire  de 
Fart  et  des  artistes  et  à  celle  de  la  Touraine.  Il  avait  été  le  collaborateur  de 
Guessard  pour  l'édition  de  Huon  de  Bordeaux  (1860). 

—  L'Académie  des  inscriptions  a  accordé  le  prix  La  Grange  à  M.  Guesnon 
pour  ses  travaux  sur  l'ancienne  poésie  artésienne.  Nous  avons  signalé  en 
leur  temps  ces  travaux,  qui  ont  fait  faire  de  grands  progrès  à  notre  connais- 
sance des  trouvères  d'Arras  (Rom.,  XXIX,  145,  468). 

—  M.  le  comte  Nigra  a  bien  voulu  nous  adresser  les  notes  qui  suivent  au 
^ujet  des  «  mots  obscurs  et  rares  »,  signalés  par  M.  Delboulle  dans  notre 
précédent  volume  (XXXI,  350  et  suiv.)  : 

K  Arpeage  répond  au  savoyard  et  dauphinois  alpage,  et  à  Titalien  dialectal 
et  administratif  alp^gio,  «  pacage  dans  les  Alpes  »  ;  dans  le  Queyras,  alpc^e 
signifie  aussi  «  saison  de  Talpage  ».  Cf.  le  valdôtain  d^or  de  Vârpa,  v  jour  de 
l'arrivée  du  bétail  à  Talpe  ». 

«  Balotage  signifie  sans  doute  «  palier,  plate-forme  »,  et  correspond  àTitalien 
ballatojo,  Ex.  :  «  La  campana  che  è  posta  sul  hallatojo  del  palagio  dei  Priori  (a 
Firenre).  »  C'est  la  traduction  littérale  de  halotage  du  Palais. 

«  Barragun,  de  l'arabe,  «  sorte  d'étoffe  de  laine  »,  houracatty  anc.  prov. 
harracany  ital.  baracatfe, 

M  Beatdse  est  l'équivalent  phonétique  de  l'ital.  balia,  qui  a  aussi  le  sens  de 
«  voilette,  pendant  d'étoffe,  banderole  ». 

«  BrindoUy  cf.  vén.  sbrindolo,  «  morceau  de  drap,  pendant  »,  Brescia, 
sbritK^a, 

«  Cawi^wi^r  doit  signifier  «tanguer,  s'arquer»,  et  provenir  d'un  *  cattiboisse, 
répondant  au  piém.  cambossa,  gambossa,  valdôtain  Uambôsse,  «  jante  ».  Radi- 
cal camb-  «  courber  ».  Cf.  le  roman  gatnba,  camba  et  prov.  piém.  cambis,  cam- 
hisa,  gambisa  «  collier  à  sonnaille  »  courbé  en  arc  étroit  (voir  Arch.  gl.  XV, 
280,  sous  canibis). 

«  Couderon  est  l'équivalent  de  l'ital.  codrione  «  croupion  »  augmentatif  de 
^caudarium. 

«  Cotut,  dimin.  masc.  de  l'afr.  coiie  «  queue  »,  signifie  la  •  queue  de  la 
quenouillée  »,  c'est-à-dire  le  fiocon  que  les  doigts  de  la  fileuse  tirent  de  la 
quenouillée.  » 

Aux  remarques  de  M.  le  comte  Nigra,  j'ajouterai  deux  observations  : 

Co/^rai^  doit  être  le  même  mot  que  catran,  quitran  qui,  dans  le  Midi,  signifie 
«goudron».  Cf.  l'it.  catratf te  (qui  a  son  article  dans  le  dict.  étym.  de  Diez), 
l'esp.  alquitran,  et  Du  Cange  sous  catarannus. 

Challemin,  on  voit  par  l'exemple  cité  qu'il  s'agit  d'une  substance  «  pour 
convertir  en  ymaiges  »,  sans  doute  en  «  yniaiges  »  de  métal.  Cela  étant,  si 
nous  avons  recours  à  Du  Cange,  qu'on  ne  consulte  jamais  assez,  nous  y 
lirons  :  «  calamina,  cadmia,  lapis  xrarius,  seu  species  terne  fôssilis  quai  cum 
cupro  commiscetur  ut  flavum  fiât,  guU.  calamine  ».  Si  maintenant  nous  con- 
sultons Cotgrave  nous  y  trouverons  calamine  ainsi  expliqué  :  w  a  certain  yellow 
minerai  substance  which  fire  consumes,  but  nielts  not  ;  mixed  with  copper 
it  changes  it  into  a  fine  brass  that  looks  like  gold...   ».   Unlîn  calamitte,  qui 


472  CHROKiaUE 

n^est  pas  un  mot  iclkmtmt  rare,  est  enregistré  avec  plu^tîcurs  exemples  dans 
le  compIcimMit  de  GodcfroVt  et  imerprcîé  par  «  nom  vulgaire  du  liliotte 
hvdratè  de  itinç  a. 

Au  sujet  de  ihatuil,  relevé  p;ir  M,  Delboulle  dans  un  texte  messin  du 
commencement  du  XV r*  stécle^  M.  Bos  m'écrit  que  ce  mol  doîl  signifier 
«  gouttière  d'un  toit  w,  et  il  le  rapproche  de  chnei^  chemit^  chenrau. 

—  Je  joins  id  quelques  corrections  ou  cîtplîcaiîons  qui  m  ont  été  remises 
par  M.  Am*  Thomas  pour  les  recettes  provençaïes  du  ms.  de  Cambridge 
publito  diins  le  précédent  fascicule  de  la  Rùmmm  :  —  P.  275»  K  11  »  prtn 
(kl  htm  hianc.  Il  u'y  a  pas  Lieu  de  corriger  bon  en  pion.  II  faut  comprendre  : 
«  prends  de  h  bonne  cérusc  ».  Ct  U  ligne  suivante  :  hpoîvfm  dil  hhm,  — 
P.  275,  dernière  lîgr^e  du  texte;  p.  295,  l,  11  cl  12,  Le  mot  Jcnida  dart  être 
{v^fimiia  :  c'est  le  correspondant  exact  du  fran^^ais^f/ïf*?.  Bien  que  cette  forme 
provençale  ne  soit  pas  attestée  littétjlemem,  elle  est  trop  régulière  pour  qu'ii 
y  ait  le  moindre  doute  à  son  sujet  ;  d.  d'ailleurs  Raynouard,  III»  ^ot  ^  au  Van 
trouve  fi^tidûi  fienda^  fmta.  Le  Idngucdocieti  âctucl  dît /*^H(/o  (Mistral)*  — 
P.  278,  L  20,  tiitiafm;  lire  aulatta  La  confusion  de  m  et  de  h  qui  se  présente 
ailleurs,  notamment  p*  287,  1.  6»  où  te  copiste  a  écrit  éUforhium  ^m  fufar- 
bmtn,  rend  plus  que  vr«iisemblable  celle  de  n  et  de  //.  ^  P.  2S1,  I,  20  et  2<)$^ 
h  4.  Le  mot  tFfiiiti  doit  être  identifié  a  eir^stï,  qui  manqtie  dans  Raynoyard^ 
mais  qui  n'a  pas  échappé  à  M.  Entil  Levy  :  i)  désigne  soit  le  persil,  soit  le 
céleri.  Cf.  Mistral^  nressèu,  et  Chabineau,  Gramm.  Um.^  p.  laS  et  ^4.  A  la 
page  28  î*  l  28, /Vi.ïr'iV  doit  m^inifestemeni  cire  corrigé  en  rrrHutL  —  V*  282, 
I,  î  :  siiugrec.  Le  moi  doit  être  maintenu  sous  celte  formt-,  qui  e^ï  bien  réelle* 
quoique  cmbarras^ame.  A  rartîcteyrwi^^fi^  Mistnil  enregistre  concurremment 
hni^H^  un^rè,  ^inf^rè^  et  signale  le  catalan  itmgrtch  et  Tancicn  provençal 
sinagric.  Lîttré  lui-même  donne  settêgrc,  sf^ffr^^  sifte^ain  conmie  «  noms 
vulgaires  du  fenugrec  ».  —  P.  285,  L  $,  mtira  fi;  lire  mttras  t.  —  P.  286, 
I,  5,  la  sttmttnna  veri.  Il  n'y  a  pas  Heu  de  corriger  icnmwmj  en  sfrmuniana. 
Il  faut  y  voir  une  variante  de  iertmnha,  mot  qu'on  lit  dans  les  Auxth  cmsûdùrs 
(Rayiiouard,  V,  20S),  et  q*iî  vît  encore  aujourd'hui  en  Périgord  sous  \t 
forme  urnmù  O'a  armim  (Mistral)  t  c'est  ce  que  nous  appclon*  le  cerfeuil.  — 
P,  296,  1.  7,  ïir  rtf/Wr]  u garde  f  pfis  itns  e^tupit.  Qu'on  corrige  ncapa^  soit  ctt 
ficama^  soit  en  ficaià,  ou  qu'on  le  garde»  le  sî;ns  est  nécessairement  n  pmtson 
5âns  écaille  ■»  ;  il  n*y  a  pa^  contradiction  entre  ce  passage  et  celui  où  il  est 
recommandé  de  manger  piems  ah  t^cmmt  (ligne  6)  ;  au  ctintraire.  —  P.  296, 
L  17,  nmngêde  pluiiÇ)  #  df  diamargarîtQtt.  Il  faut  lire  plms  au  lîeude^adf. 
Il  s'agit  du  fameux  élcctuaire  dît  pUtis  archtuon,  qui  figure  non  seulenient 
dans  le  Frrcei'al  de  Chrétien  de  Troyes  et  dans  la  Bihk  de  Guîoi  de  Provins, 
contmc  le  rapporte  Godcfroy  a  rarticle/'/cHn*,  mais  aus^i  dans  la  Cfntrrftie* 
vers  t4S7t  oïi  il  *  niis  en  défaut  la  sagacité  du  demicr  éditeur.  M-  Foerster. 
CL  Uorveaux,  VAntidoiairt  Nmlë$^  p,  86.  —  P-  297,548,  L  i,  mata  tien 
^uf  irn  en  aisfma  (?).  Peut-être  &ut-il  corriger  m  mùtinm.  Mistral  cannait 
nmitnçû  au  sens  de  *■  vulve  *.  — ^P*  298,  $  S'*  '*  I  »  daqîmna.  Il  peut  être 


CHRONIQUE  473 

Utile  de  faire  remarquer  que  ce  mot  qui  manque  à  Raynouard  et  à  Levy,  est 
uae  altération  du  latin  médical  alkanna,  nom  de  la  plante  que  les  botanistes 
actuels  appellent  ordinairement  «  lawsonia  »,  et,  par  conséquent,  une 
variante  du  français  arcanne. 

M.  Eug.  Rolland  a  bien  voulu  aussi  me  communiquer  quelques  notes 
qui  font,  en  partie,  double  emploi  avec  celles  qui  précédent.  Il  me  fait  obser- 
ver que  le  ^aujoi  du  $  $1  (p.  298)  est  bien  une  sorte  de  glaïeul,  c'est  Tins 
que  Ton  cultive  encore  sur  les  toits  de  chaume.  Enfin,  M.  M.  Raimbault 
m'écrit  de  Marseille  que  arsini,  forme  à  peu  prés  semblable  à  arcens  de 
notre  texte  (p.  286,  note  j)  se  dit  en  Provence  (manque  dans  Mistral)- 
M.  Raimbault  m'apprend  en  même  temps  que  la  tortue  terrestre  (p.  288, 
note  2)  se  trouve  encore  dans  l'Esierel. 

—  On  a  vu  plus  haut  (p.  360)  que  M.  Suchier  incline  â  identifier  «  Mon- 
glane  »  avec  l'antique  Glanuni,  dont  remplacement,  entre  Saint-Remi  et  les 
Alpines  '  (arr.  d'Arles),  est  marqué  par  deux  monuments  célèbres,  l'arc  de 
triomphe  et  le  monument  des  Julii,  J'avoue  que  cette  identification  ne  me 
paraît  reposer  sur  rien  de  solide.  Monglane  ou  Monglenue  (car  les  deux  formes 
existent)  ne  peut  aucunement  venir  de  Glanum  :  il  y  a  impossibilité  pho- 
nétique. De  plus  Monglane  devait  être  situé  sur  une  hauteur;  or  l'antique 
Glanum  est  en  plaine  :  la  plaine  monte  en  pente  douce  de  Saint-Remi  aux 
Alpines,  mais  il  n'y  a  pas  là  de  mont,  et  le  château  fort  dont  M.  Suchier 
(p.  361)  suppose  l'existence,  est  purement  imaginaire.  Ayant,  dans  ma  jeu- 
nesse, parcouru  en  tous  sens  les  environs  de  Saint-Remi,  je  sais  à  quoi  m'en 
tenir  sur  la  configuration  du  pays.  Enfin  le  nom  de  Glanum,  ville  rui- 
née au  V* siècle,  n'apparaît  dans  aucun  document  du  moyen  Âge.  M.  Suchier 
renvoie  (p.  361,  note  i)  à  une  charte  de  1 198  mentionnée  dans  la  Statistique 
des  Bouches-dU'Rhâne  du  comte  de  Villeneuve,  où  les  habitants  de  Saint-Remi, 
sollicitant  un  privilège,  auraient  rappelé  les  anciennes  immunités  de  Glanum  ; 
mais  il  est  visible  que  l'excellent  préfet  des  Bouches-du- Rhône  a  été  mystifié 
par  un  de  ses  correspondants.  La  charte  de  1 198  existe  bien  aux  archives  de 
Saint-Remi  (c'est  une  copie  du  xvii«  siècle),  mais  il  n'y  est  fait  aucune  men- 
tion de  Glanum  (renseignement  dû  à  M.  F.  Raynaud,  archiviste  des  Bouches- 
du-Rhônc). 

M.  Suchier  suppose  encore  que  le  surnom  de  Girart  de  Frai  te  (ou  Frète) 
est  tiré  de  Fretum  ou  Fréta  y  ancien  nom  de  Saint-Remi.  L'identification  de 
Freliim  ou  Fréta  avec  Saint-Remi  est  bien  probable  :  je  serais  mal  venu  à  la 
contester,  l'ayant  proposée  jadis  (Roniania,  I,  59).  Mais  il  est  moins  certain 
que  le  surnom  «  de  Fraite  »  en  soit  tiré.  M.  S.  dit  que  le  /  de  Fretum  ou  Fréta 
peut  bien  avoir  été  conservé  comme  le/  de  capi  tu!  u m,  qu'il  suppose  a  avoir 
été  introduit  en  français  vers  le  viiic  siècle  »  (p.  362).  Que  capitulum  ait 
été  adopté  par  le  roman  de  IVance  au  viii«  siècle  ou  à  une  autre  date,  il 
importe  peu  :  c'est  en  tout  cas  un  moi  introduit  par  voie  savante,  et  il  n'est  pas 
ordinaire  que  les  noms  de  lieux  aient  reçu  leurs  formes  romanes  dans  ces 
conditions.  Et  de  plus  j'ai  fait  valoir,  dans  le  passage  de  mon  introduction  à 


474  CHRONIQUE 

Girart  ik  Hmuîlhn  quedîscuie  M.  S.,  un  aTgumcni  d'une  cen-iim  force  :  c*^X 
que  Frailf^  Frète,  Fretîe  est  fréquent  dans  \^  toponymie  de  la  France  (on  a 
aussi  Fracbii  dans  le  Midi),  et  que  toujours  Tongine  e«  Fracia  *. 

—  Aux  mots  mtkûtrrais  (alkcrt^és)^  dimtscre  (mercredi),  enjun  (à  jeun), /i»»^ 
fiifè  (juillet),  Godefroy  cite  vaguement  un  •  calendrier  du  xiii=  siècle  *,  san 
înditjucr  m  ce  calendrier  est  mat^uscrit  oh  imprimé  ni  où  on  peut  le  trouver»  ' 
Nous  trouvons  ces  informations  nécessaires  dans  une  notice  que  M*  Ludco 
Auvray,  de  ta  Bibliothèque  nationale,  a  pabltéc  dans  le  BiUlographt  moderne^ 
n"  4(190^),  sur  les  chartes  anciennes  et  manuscrits  ayant  fait  partie  de  la  col- 
lection de  Mgr  Dcsnoye^s^  en  son  vivant  conservateur  du  Musée  d^Orléans, 
Godcfroy  a  trouvé  le  caleniirier  auquelil  a  emprunté  quelques  citations  sur  un 
feuillet  de  parchemin  appartenant  à  Mgr  Desnoyers.  M*  Auvray  fait  encore 
remarquer  qu*au  mot  gteskereck  (juin)  M.  Godefroy  cite  ïe  même  calendrier ;J 
seulement  cette  fois  il  renvoie»  par  suite  de  quelque  confusion  dans  ses  note»,  ; 
au  ms.  B.  N.  fr.  24428,  où  il  n'y  a  rien  de  tel  ÎA.  Auvray  ne  s*est  pas  borné  à 
ces  reai^cations  :  il  donne  le  texte  de  ce  calendrier,  qui  est  en  réalité  un 
recueil  de  préceptes  hygiéniques  dont  on  pos^de  plusieurs  rédactions  en  làUn 
et  en  français,  et  sur  lequel  on  peut  voir  le  BuUeiifi  dt  la  Soi\  des  anc.  iextes^ 
1883,  p,  92-^*  Mats  les  noms  de  /<rw/m-/ï,  gùskerrch,  propres  au  nord  de  h 
France,  ne  se  trouvent  que  dans  la  rCd action  publiée  par  M,  Auvray.  Les-i 
chartes,  manuscrits  ou  fragments  de  manuscrits  ayant  appartenu  à  Mgr  Dès- 
noyers  sont  dévolus  au  Musée  historique  d'Orléans. 

—  Le  tome  XXXVIl  des  ArcMvis  bhtmlqim  du  dép.  de  la  Gironde  (Paris  et 
Bordeauii,  1901,  in-40,  xv  ei  595  pages),  publié  par  les  soins  de  M.  Hr.  Ahba- 
die  %  doit  être  mentionné  ici,  parce  qu'il  contient  un  nombre  comidér^blc  de 
textes  béarnais.  Ces  textes  sont  :  i^  le  Livre  noir  de  Dax,  divisé  en  dcuX 
parties»  le  coutumier  et  le  canulaire  ;  i"  les  «  établissements  »  de  Dix,  Le 
Livr^  noir  a  été  écrit  dans  la  seconde  moitié  du  xv*  siècle  ;  la  copie  de*  Éta* 
blissements  est  plus  ancienne  :  malheureusenient  elîe  a  été  faite  par  un  scribcl 
qui  n'était  pas  du  pays  et  qui  a  commis  beaucoup  de  butes,  La  pubiicatioitl 
se  terntine  par  un  glossaire  et  par  une  table  des  noms.  L^ruvre  est  soignée' 
et  louable  dans  lensemble.  Sur  quelques  points  on  peut  n*étre  pas  dWcûrd 
avec  l'éditeur.  On  nous  dit,  p.  n%  que  «  îe  Livre  noir  est,  dans  sa  ^ccmdc 
moitié^  une  simple  réédition  du  Livre  rovige  ».  Alors,  pounquoi  ne  pas  avoir, 
potir  ta  partie  commune,  înîprinié  le  texte  du  Livre  rougv,  qui  est  plus  an- 
cien }  M.  Abbadie  imprime  le  texte  du  Livre  noir,  y  joignant  les  variantes  du 
Livre  rouge;  mais  il  est  peu  commode  d'aller  chercher  ïe  meilleur  texte  dans 
les  notes,  Q.uelqu4^  rectifications  pourraient  être  proposées  au  g|os&iIrc:  acs-j 


1 .  Voy,  par  ex.  les  formes  ancien t^es  de  Fritte  (Saônc-et -Loire),  dan*  k 
Dict.  i<>pogr.  de  lûrr,  de  L&uhans,  par  M.  J.  Guilleinin  (Chalan>sur-Saânct , 
1S66). 

3.  Mr  Abbadie  a  publié  à  part,  dans  le  format  des  Arch.  hùt*  di  h  Giromtê^ 
une  introduction  qui  peut  se  joindre  au  tome  XXXVUde  ce  rccuciL 


CHROXIQI'E  47  S 

Ivf,  i  cheval»  estiiudniissibk:  :  il  faillit  nictta-  cette  locution  sous  «.iKi/.  Anm:*u 
service  du  bout  de  Tan.  doit  probablement  se  lire  auncu.  car  dans  le  dîct, 
béarnais  de  Lespy  et  Rax-niond,  baunou  est  relex-é  en  ce  sens.  De  mO^me 
doit  être  lu  baumor.  ^explication  du  calendrier  romain,  donn^  s<.>us 
a,  paraît  bien  superflue.  Scdlor,  traduit  avec  doute  par  «  chaleur  »,  n*est 
pas  un  mot  béarnais  :  c'est  la  transcription  du  latin  s^tulyrt  dons  une  charte 
de  Philippe  le  Bel. 

—  Le  dernier  fascicule  de  la  Rn-u^  Je  rOrùnt  UHn  (t.  IX,  t'asc.  i  et  2),  pan» 
en  mai,  renferme  un  article  important  (pp.  164-20$)  de  G.  Paris,  sur  Philippe 
deKovare  enxnsagé  surtout  au  point  de  vue  historique  {^Us  Mr'moiffsJf  Philip/^ 
de  Novaré).  Cette  étude  est  destinée  à  prendre  place  dans  l'introduction  du 
t.  II  des  Historiens  arminiens  des  croisades  (lequel  ne  comprend  que  des  écrits 
6rançais),  resté  en  suspens  depuis  la  mort  de  MM.  Schefer  et  de  Mas  I-atrie, 
chargés  par  F  Académie  des  inscriptions  de  diriger  cette  publication.  Cx 
tome,  préparé  dans  de  mauvaises  conditions,  et  imprimé  depuis  plusieurs 
années  quant  au  texte,  renferme,  outre  les  Gestes  des  Cbil^rois  dont  une 
partie  est  de  Philippe  de  Novare,  les  chroniques  de  Dardel  et  d'Hayton. 
Il  paraîtra  bientôt  par  les  soins  de  M.  Kohlcr,  chargé  de  faire  sous  nu  sur\xnl- 
lance,  puisque  G.  Paris  n*est  plus,  l'introduction,  Terrata  et  la  table. 

—  Le  dernier  cahier  des  Rendiconti  de  Tlnstitut  lombard  (i*  série, 
t.  XXXVI) contient  (pp.  607-9)  «ne  note  de  M.  G.  Salvioni  intitulée  Vestigia 
italiane  del  tipo  flessionale  sin^ohre  formica,  plur,  formi^io;,  qui  est  en 
quelque  sorte  le  complément  de  Tarticle  publié  par  le  même  dans  la  Rofnania, 
XXIX,  546. 

—  Vient  de  paraître,  à  la  librairie  Hachette,  sous  le  titre  h^eudes  du  moyen 
e^e,  un  recueil  de  quelques  travaux  de  G.  Paris  :  Roncevaux,  L'  paradis  de  la 
reine  Sibylle,  La  légende  du  Tannlmusery  publiés  dans  la  Revue  de  Paris,  puis  le 
Juif  errant,  tiré  de  V  Encyclopédie  des  sciences  religieuses  et  complété  par  un  art. 
du  Journal  des  savants  {iS^i),  enfin  Le  lai  de  VOiselet,  imprimé,  mais  non 
mis  dans  le  commerce,  en  1884  (cf.  Rom.  XVII,  482). 

—  Livres  annoncés  sommairement  : 

Les  éléments  latins  de  la  langue  roumaine.  Le  consonantisme^  par  J.  A.  Gandrka- 
Hecht.  Paris,  Bouillon,  1902.  In-8,  xxvii-iio  p.  (thèse  pour  le  doc- 
torat de  l'Université  de  Paris).  —  Ge  volume  est  une  partie,  ou  plutiNt  la 
«  première  section  »  d'une  partie  d'un  ouvrage  d'ensemble  sur  les  éléments 
latins  de  la  langue  roumaine,  qui  comportera  cinq  volumes  Plx>nétique,  Mor- 
pbolc^ie,  Formntion  des  mots  et  sémantique^  Syntaxe  historique,  L'xique),  et 
qui  est  le  fruit  de  «  dix  ans  d'études  ».  Il  en  donne  la  meilleure  idée  et 
l'ait  vivement  désirer  de  voir  bientôt  paraître  un  ouvrage  qui  rendra  de 
grands  services  à  la  science.  La  philologie  romane,  et  particulièrement 
roumaine,  compte  maintenant  en  Roumanie  des  travailleurs  excellents,  qui 
auront  bientôt  largement  rattrapé  l'arriéré  qui  subsiste  encore  dans  cette 


47^  CHRONtaUH 

partie  de  notre  science.  Apres  une  courte,  mais  très  bonne^  introduction  sur 
k  consonimisnie  du  latin  vulgaire,   —  où  il  renvoie,   nuis   non  san?»  k 
compléter  sur  certains,  points,  —  à  Texposé  général  de   M.  Dcnsusianu, 
Tauteur  étudie  le  sort  de  chaque  consonne  et  groupe  de  consonnes  ktines 
en  romain.  îl  le  fait  âvec  une  méthode  parfaite  et  une  cntique  rigourcnse, 
S*âppuyant  toujours,  mais  seuJemeni  dans  la  mesura  où  c^est  nécessaire, 
sur    la   comparaison    des    autres   langues  rottianes.   Chemin   faisant,  il 
fcciîrie  plus  d'une  étymologie  courante  (on  a  vu  ici  même,  XXX  U  29e,  un 
spécimen  de  ces  études  presque  toujours  décisives).  Je  n'ai  pas  trouvé, 
en  lisant  la  thèse  de  M.  Candréa^Hccht  0^  troisième  thèse  de  «  doctotut 
d'université  »  soutenue  à  Paris^  avec  celles  de  M"«  Cip riant  et  de  M,  Lcîte 
de  Vasconcellos,  concernant  k  philologie  romane  )i  d'oï^ervations  sérieuses 
à  lui  faire*  Je  crois  qu'il  attache  plus  d'importance  qu^il  ne  faut  à  îa  posi- 
tion des  consonnes  avant  ou  après  lacccnt,   et  que  cette  distinction  lui  a 
fait  introduire  dans  son  exposé  des  distinctions  inutiies.  C'est  par  suite 
d'une  habitude  invétérée  qu'il   prend  pour  date  initiale  de  son  étude  la 
conquête   de  la  Dacie  ;   il  parle  presque  toujours,  avec   plus  de  raiîiûn, 
du  w  latin  balkanique  «,  —  M.  C, -H.,  en  souvenir  de  la  pari  qu^îl  a  priait 
j  mes  conférences,  m'a  fait  l'honneur»  auquel  je  suis  très  sensible,  de  me 
dédier  sa  thèse.  —  G.  P. 
Studù  li  mtil^  fiîûli^ke^  de  Sent  il  Pvscariu.  Bucarest,   1901-   In -H,    n   p, 
(extraits  des  Cûm'ôrbiri  Utrrart^  l  XXV,  n«8  et  9).  — Mt  S.  Puscarîu  est 
un  des  membres  les  plus  distingues  du  groupe  de  jeunes  avants  roumains 
qui  depuis  quelques  années  ont  fait  entrer  la  plulologie  roumasïne  ààns  des 
voies  nouvelles  et  fécondes.  Le  présent  mènnoire  se  divise  en  trois  parties- 
La  pa'mière  contient  un  certain  nombre  d'ètymologics  roumaines  (du  latîn), 
toutes,  me  semble-i-il,  excellentes  (je ne  verrais  quelques  doutes  que  pour 
wf  »  refait  sur  ittgd<i  nîgell  um,  et  pouri^/  <  exprimere  influencé  par 
excrément  uni)  ;    l'auteur  est  beaucoup  trop  modeste  en  disant  que  la' 
plupart  ne  sont  ni  originales  ni  neuves.  --La  seconde  partie  montre»  con- 
trairement à  ce  quedit  M.  Meyer-Lûbkc, quelessufces  -aticus  et  -ata  ne 
sont  pas  inconnus  au  roumain.  Dans  la  troisième  partie,  la  plus  îtnponante 
pour  ta  philologie  romane  en  général,  Tjuteur  établit^  à  mon  avis,  contre 
Topinion  généralement  admise,  que  fi  finale  n'a  pas  persisté»  en  italien  et  cti  1 
roumain,  sous  forme  d'i  dans  îes  monosyllabes,  mais  y  est  tombée  aussi] 
bien  que  dans  les  polysyllabes.  Apres  avoir  montré  qu'il  y  a  des  monci-l 
syllabes  en  -s»  comme  tras,  qui  ne  présentent  û'i  ni  dans  Tune  ni  dans 
l'autre  des  deux  langues»  il  e^tpliquc  par  ranalogie  lï  fn^al  des  mots  allé- 
gués, qu'il  divise  en  trois  groupes  .  les  pronoms  noi,  tioi,  ûii  Vi  a  èrt 
ajouté  a  HO,  vo.  comme  m;ïrque  du  pluriel  (de  même  il.  iti  pour  if);  IcfJ 
adverbes»  rrn/,  mai^  v.  it./>*wt. /^n,  oii  ïi  est  l'i  adverbijl  (i\   ce  pfopos  îll 
émet  l'opinion  très  plausible  que  magis  en  lat.  vulg,  était  devenu  mau  et 
non  maj^f  max)  ;  IeS2«  p,  sg.,  </ai,  it.  (j^i,  hsiat^  lior,  où  Vi  a  été  ajouté  à 
dd^  i,  û^  iUi,  comme  tTtÂnjue  ût  b  i«  personne  et  pour  la  distinguer  de  la 


CHRONiaÙE  4?7 

3».  Celte  démoli stmtioD  fait  grand  honticur  a  la  pénétraiion  de  Fauteur. 
— Il  nous  annonce  la  suite  de  ces  Éiudu  ;  espérons  qu*elle  ne  se  fera  pas 
attaidre,  —  G,  P. 

I  fwriiti  di  satrcl0  Francisco,  seconde  la  lezlone  dcl  codtct:  iîoretîtino 
scritio  da  Amaretto  Mandïi,  pubblîcaû  di  Luigi  Manîîoni  di  Mordano. 
Edkione  II,  con  xxx.  fotoiiple.  Rama,  Locscher,  1902.  In-i2,xx-294  p, 
—  M.  Manfon!»  qui  s'occupe  depuis  lougues  années  des  Fiorfitf\  nous 
donne  ici  pour  la  seconde  fois  la  reproduction  du  texte  italien  contenu 
dans  un  manuscrit  de  Florence  de  la  Bu  dti  xivc  siècle  ;  cette  réimpression 
revue  soigneusement  sur  le  manuscrit^  est  accompagnée  de  30 intéressantes 
hèliotypies,  au  lieu  de  19  que  contenait  la  première  édition.  Elle  ne  com- 
prend que  la  première  partie  de  rouvragç,  la  seule  qui  se  rapporte  direc- 
tement àsaim  François;  la  seconde  partie  fera  Tobjet  d'une  autre  pubîica- 
lion*  En  attendant  l'édition  critique  que  M.  M.,  espérons-le,  nous  donnera 
quelque  jour,  ce  petit  livre  ne  saurait  être  trop  recommandé  à  ceux  qui 
veulent  lire  dans  un  bori  texte  roEuvre  charmante  où  revit  le  pùvertlh 
d*Assise  tel  qu'il  était  dans  la  tradition  de  ses  premiers  disciples*  —  G,  P, 

//  Ubro  dellc  irc  scriiture  e  i  vûîgari  àtîh  False  scuse  eddk  Van i ta,  di  Sonvi- 
fin  da  la  RiiHt^  a  cura  di  Leandro  Biadfne.  Pisa,  Spoerri,  1902*  In-8, 
3DtxV[ii-ti4  p.  —  M,  Biadene  avait  terminé  rimpression  de  ce  livre 
.quand  commença»  puis  acheva  de  paraître  Tédition  des  mêmes  poèmes  de 
Bonvesin  donnée  par  M.  V.  de  Bartholom^is  (\*oy.  Rom.  XXX,  623);  en 
comparant  sur  les  manuscrits  son  édition  avec  celle  de  son  involontaire 
concurrent,  M.  B*  s'est  assuré  que  son  texte  était  plus  fidèle.  11  a  d'ailleurs 
pu  dans  son  introduction  tirer  profit  de  quelques  suggestions  de  l'autre 
éditeur,  tout  en  lui  adressant  certaines  critiques.  Son  travail  nous  paraît 
mériter  en  tout  les  plus  grands  éloges  :  le  glossaire  notamment  est  fait  avec 
beaucoup  de  soin  et  rendra  service  aux  romanistes  (une  remarque  sans 
importa  nce  :  les  nmsi  de  Dieu  ou  de  Jésus-Christ  sont,  dans  Tusage 
fréquent  du  moyen  Age,  non  les  ecclésiastiques,  mais  les  pauvres,  et  cela 
r^soridu  contexte  du  second  passage  cité).  M.  B.  nous  fait  espérer  qu'il 
donnera  enfin  prochainement  Tèdition  quil  avait  promise  il  y  a  bien  long- 
temps des  oeuvres  complètes  de  Texcellent  Bonvesin,  —  G.  P. 

Dif  Bfiiandhmg  der  Latevmthm  Proparoxytofw  ht  dm  MuudiUttndtr  Vo^tsrntmd 
im  IVdihnischett,  von  Adolf  Horning.  Strasbourg,  Heiiî,  1902.  rn-4<>, 
^ï  p,  {Beilagé  lum  Pta^r^lmm  dér  Lycéums,  n°  578).  —  M.  Homing  a  déjà 
beaucoup  fait  pour  écbircir  un  chapitre  fort  intéressant  de  Thistoire  phoné- 
tique du  gallo-roman  I  celui  qui  concerne  le  sort  des  proparoxytons  latins, 
par  ses  recherches  sur  ce  qu'ils  deviennent  dans  les  parlers  du  nord-est,  où 
ils  sont  traités  d'une  façon  si  particulière.  Il  reprend  ici  ces  recherches 
d*une  façon  plus  complète  et  plus  systématique,  et  présente  sur  les  causes 
et  les  exph cations  p<issîbles  des  phénomènes  qu'il  signale  des  observations 
d'une  grande  valeur.  Pour  examiner  et  discuter  ses  vues,  il  Ëiudrait  une 
étude  non  moins  longue  et  non  moins  approfondie  que  la  sienne,  fit  il 


478  cHroî4iqoe 

faudrait  m^rae  en  éUrgîr  La  base  (bien  qu*i!  ne  néglige  pas,  sur  plus  d*iin 
pmiti,  h  comparaison  avec  le  français,  le  provençal  et  Tiulien  du  nord). 
Nous  nous  bomcroQs  ici  à  rccomrniinder  son  mémoire  à  tous  les  roma- 
nistes, et  spécialement  â  ceux  qui  s'occupent  de  llitstoire  du  lanti  en 
Gaule.  —  G,  P. 

Die  dmktt  Hfât  ah  iîiUakher  Kumimiltd  in  d^n,  Romamn  des  Cf^esiim  de 
Troyts,,.  von  Alfons  Kilka.  Bresîau»  190Z.  in-8'^,  ^4  p. (dissert,  de  Breslau). 
—  Nous  ti*avons  ici  que  le  commencement  d'un  travail  qui  promet  d^ètre 
très  intérressant,  et  dont  nous  parlerons  quand  Taut^ur  î^aura  publié  en 
entier.  —  G.  P, 

Dank  à  Lammm}  par  Ernest  Mlîket.  Lausanne^  1901.  ln-80,  i6p*  (E^it'"^' 
de  la  Rivm  hhlùrlque  paudoist).  —Dans  cette  spirituelle  note,  M*  Murei 
montre  Tinanité  d'une  conjecture  lancée  par  le  P.  Berthier  et  appuyée  par 
M*  Pochh animer,  diaprés  laquelle  Dante  serait  vetiu  de  Paris  (où  il  n'a 
sans  doute  jamais  été)»  en  ijio,  trouvt^r  à  Lausanne  Henri  VU,  qui  y  a 
séjourné  non  «  plusieurs  mois  w,  mais  un  ou  deux  jours-  lî  est  sin)çulier 
que,  tandis  que  la  critique  réussit  à  détruire  tant  de  légendes  sur  Dante, 
rérudition  s'amuse  à  en  créer  d'autres.  Il  est  heureux  qu*on  leur  coupe, 
comme  Ta  fait  M.  Muret,  les  ailes  au  sortir  du  nid,  — ^  G.  P. 

Jaufrt  RiiiUh  Question  vecchie  e  nuove.  Nota  del  prof.  Paolo  Savj-Lopeï» 
Homa,  190Î.  In-â«,  16  p.  (Extrait  des  RendmnH  dtUa  R.  Accademia  dii 
LtHCii,  vol.  Kl),  —  Dans  cette  note*  M-  Sav^-Lope^,  qui  parait  peu  con- 
vaincu par  l'ingénieuse  hypothèse  de  M»  Monacî  faisant  d'Aliénor  de  Poi- 
tiers Tobjet  de  Tamor  de  terra  loubdana  de  Jaufré  Rudeî  (voy.  Eùm.  XXIII, 
489)»  s'attache  surtout  àcombattreceïk%plus  ingénieuse  encore,  de  M,  Appel 
(voy.  Rùm.^  XXXI.  47-*),  qui  veut  ddk  donna  di  irrm  icnianu  fart  unn 
donna  dt  cieh.  11  trouve  le  plus  fort,  et  aussi  îc  plus  méritoire,  de  ses  argu- 
ments  dans  la  chanson  nouvellemcut  découvene  et  publiée  diaprés  le  ms. 
Campori,où  il  s'agît  certainement  de  Vamor  hnhdana.  Le  texte  de  cette 
chanson  est  très  altéré,  et  la  restitution  qu'essaie  M.  S,-L,,  certainement 
plausible  en  beaucoup  de  points,  n'est  ni  complète  ni  partout  assurée  (I  2, 
lire  p,-ê.  h  ven^  pour  hmter  \  mais  les  vers  14- 1  St  if^V  ^mjai  ia  fmg  en  t^nm/an. 
Tan  AfVj  ni^'m  mos  brati  rtndauiû^  ne  soiït  pas  douteux,  et  M.  Appel  lui- 
même  supposera  difficilement  quHls  s'appliquent  à  la  Vierge  Marie,  ^ 
M.  S.-L.  conjectare  avec  vraisemblance  que  le  v.  16-17,  Lai  nirm  tî  tku 
repaire  Luire ^  Em  fHrU  qùm  de  pm$ar  Mûr  aient  pu  contribuer  a  la  forma- 
tion de  la  légende  (ou  plutôt  de  la  liaion)  du  voyage  maritime  où  JauCré 
aurait  trouvé  la  mort  en  allant  chercher  sa  dame  inconnue  ;  il  me  parait 
qu'avec  Tei^pr^sion  d^atttûr  [de  trrra]  hnfMiàna  et  les  quelques  passages  où 
il  dit  qu**î  n'a  jamais  vu  celle  qu*il  aime,  ils  en  constituent  tout  le  fonde- 
ment. —  G.  P. 

M.  M.  Kawczyshski,  Huon  de  Botûti\i%^poemat  ttûrûfrancuski^  stns^cimf, 
rû*bùir  i  oltjisinenM.  Cracovîe»  190a*  In-S*»  (pp,  iî^-149  du  BitUftm  Jt 
VAtudèmk  des  Sdaues  de  Cracùvù^  oct.  190a).   -*  Résumé  d'un  ouvrage 


ôHROMiatjfe  479 

rît  en  polonais.  L'ayteur,  qui  a  déjà  fait  dériver  de  VAntor  tt  P^yclte 
d'Apalée,  non  seulement  PaHmopeu  dt  BhtSy  mak  le  Chevaîifr  au  Cy^ne, 
vent  mainienant  nous  persuader  que  Huon  de  Bordtaux  aussi  n'est  qu'une 
adapmioti  du  conte  du  rhéteur  africain.  Il  est  chk^  d'après  M,  K.,  que 
Huon  n*est  autre  que  Psychi  en  travesti,  que  Clurïemagne  joue  envers 
lui  le  rôle  de  Vénus  envers  dle^  el  qu^Auberon,  le  petit  roi  bt;au  comme  le 
sûjeil,  est  Amour  :  Huon  enfreint  ses  ordres  comme  Psyché  ceux  d'Amour, 
et  Auberon  le  proscrit  tout  en  le  protégeant  de  loin  et  en  T exaltant  finale- 
ment, comme  Amour  avec  Psyché  (il  lui  transmet  son  royaume  de  féerie, 
comme  Amour,  introduit  Psyché  dans  l'Olympe)-  Pour  faire  des  contes 
d* Apulée  une  chanson  de  g^si^i,  notre  trouveur  a  rattaché  son  récit  à 
répïsode,  qu*il  connaissait  par  les  chroniques,  du  meurtre  d'un  Charles» 
fiîs  d'un  empereur  Charles  ^  par  Au  bon  in.  Les  rappons  d'Aubcron  avec 
l'Alberich  du  î^ibiînngfn,  TElbench  d'Orhiil,  l'Alberich  de  Hugues  de 
Toul,  sont  de  pures  chimères  (ou  Ortnit  et  J.  de  Guise  ont  puisi'  dans 
Huon).  Il  ne  se  peut  rien  de  plus  ingénieux  et  de  mieux  déduit.  Quant  à 
b  vraisemblance  qu'il  peut  y  avoir  à  ce  qu*un  poète  comme  celui  de  Hum 
ait  lu  le  roman  d'Apulée,  Fauteur  ne  prend  pas  la  peine  de  TéubUr.  IL 
regarde  ïa  thèse  comme  évidente  et  il  conclut  ainsi  :  u  On  se  demande 
pourquoi  tant  de  savants...**  se  sont  à  ce  point  trompés  sur  le  vrai  sens 
du  poème  en  question.  C'est  qu'ils  suivent  une  méthode  erronée*.*  Elle 
consiste  à  ne  tenir  aucun  compte  de  la  chronologie,  à  placer  dans  le  passé, 
à  des  siècles  de  distance,  des  faits  et  oeuvres  notoirement  postérieurs*  Sans 
souci  du  principe  du  milieu,  on  attribue  des  idées  et  des  perfections  à 
des  temps  ou  4  des  couches  sociales  qui  n'en  éuient  pas  susceptibles*  A  les 
croira,  ce  ne  serait  pas  un  progrès  continu,  mais  une  décadence  constante 
qui  ferait  la  règle  de  i*histoirede  rhumanitè.  »  Je  regrette  àtn^  pouvoir 
lire  daos  le  polonais  les  preuves  dont  Tauteiir  appuie  ^ns  doute  cette  accu- 
^lioQ.  EUe  me  touche  (car  c'est  de  moi  quii  s'agit^  ainsi  que  de  M* 
Voretïsch,  qui,  d'après  M*  K*,  n'a  fait  que  développer  mes  idées),  mais  elle 
me  surprend  encore  plus*  J'ai  toujours  essayé  de  tenir  compte  et  de  la 
chronologie  et  des  milieux,  et  je  cherche  en  vain  en  quoi  mon  étude  sur 
Hmn  dt  Bordeaux  prouve  que  Je  regarde  une  décadence  continue  comme 
la  loi  de  l'humanité.  —  G*  P. 
RoBEiT  OF  Brunne's  m  Hintdlyng  Synne  »,  A.  D*  ijoi,  wîth  those  parts  of 
ihe  Anglo-French  treatiseon  which  il  was  founded,  William  of  Waoïng- 
ToK*s  Matiin^l  dti  ptchif^,  re-edited  from  mss*  in  the  British  Muséum  and 
Bodieian  li brades,  by  Fr.  J*  Furnivall.  Part  L  London,  Kegati  PauU 
French,  Trûbner  and  Co,  190 j.  In- 8»,  224  p.  {Early  english  Tfxt Sodfty)* 
—  Nous  sommes  heureux  d'avoir  à  annoncer  cette  publication  qui  ne  sera 
pas  moins  bien  accueillie  sur  le  continent  qu'en  Angleterre.  Le  Mamul  de 
(ou  its)  péchés  de  Wilïiam  de  Wuddington  est,  parmi  les  poèmes  français  qui 
ont  été  composés  en  Angleterre  au  xiii«  siècle»  Tun  de  c^m%  qui  ont  eu  le 
plus  de  succès,  puisqu'on  en  possède  uiie  vingtaine  de  manuscrits  (voir  Scwj,, 


4^0  CHROSiQpË 

\TI1,  îîj;  XV,  îï3;XXIX,  47).  Du  reste  quoiqiie  iyam  peu  devikor] 
litténirc.  il  n'est  pis  Jcpourvu  dlniérèL  Cest  en  1S61  que  M.  Fami^l 
rsvjil  publié  pour  b  pranièrc  fois,  d'après  deux  manusarits,  eo  reg^vd  de 
U  vcTiîoii  iQglaisc  de  Robert  de  Brunne.  Cette  édition,  tirée  à  petit  1 
pour  le  Rolbyrghe  Club  et  tion  mî^-  dans  le  commerce ,  étm  lutuicUeniefitl 
ion  rare,  principalement  sur  le  continent,  et   b  préieuîe  réïmpfessioo  oe 
peut  qti'êîre  li  bienvenoe.  Ce  n'est  du  r^te  pis  une  réimpressior*  pure  et 
simple  ;  les  telles  OUI  été  améLiorés  en  mAînt  endroit.  H  en  i:^éstilie,  par 
rapport  à  h  première  édition,  un  changement  dans  U  numérotaiion  des  vers» 
Ajoutons  que  M.  Furoivall  â  indiqué  sommairement  tes  sources  des  contes. 
d'jffè»  lart*  de  G,  P^ris  dans  VHtii.  hiî.  de  k  fr ^  XXVITI,  iqî  et  suiv. 
Pour  qu'il  fût  possible  de  placer  en  regard  Fangliis  cl  le  français,  un  format 
im  peu  plus  iirge  que  celui  des  auirci  volumes  de  VEarîf  fngîish  Trxi  S&ctdf  | 
i  èlé  Adopté.  Les  dépenses  supplémentaires  causées  par  cette  disposhion  ont] 
été  piyte  à  laide  de  somtnes  provenant  d'une  souscription  faite  en  1S99J 
par  les  amis  et  admirateurs  de  M.  FumivaU,  i  l'occasion  du  75»  anniver- 
saire de  sa  natssauce  (voir  Hom.,  XXX,  6|a). 
CûrtuMre  du  chtê^tn  et  S^ini-Lâud  d'Angui  (actes  du  %i*  et  du  Xll*  siècle), 
suivi  de  la  Vie  de  imni  SUvestre  et  Tîm^ntim  de  h  sainte  Croix^    poen^e 
francs  du  xti*  siècle,  publié  par  Adrien  Flanches ault*  Angers^  1905. 
In-S",  ixiv-ioi  pages  {Doc.  hiifm^îqua  $nr  t Anjou,  p,  p.  la  Soctéié  d*^gri« 
cuiiure,  sciences  et  arts  d'Angers),  —  la  seconde  partie  de  cette  publicaïkm^ 
(pp.   i$j  et  ss.)>  peut  seule  être  ici  annoncée.  Hlk  contient  le  ici  le  bté- 
p^  du  poème  sur  lequel  i*ai  inséré  une  notice  dans  la  Rùtnania,  XX\1IÎ, 
180.  Je  ne  puis  guère  que  signaler  cette  édition  dont  M.  Flanchcnault  me 
laisse  la  principale  responsabilité.  C'est  lui  qui  a  fait  la  copie,  mais  11  m*â 
prié  d*cn  revoir  les  épreuves,  et,  pour  m*atdér  dans  celte  tâche,  tl  m'a  i 
une  excellenic  photographie  du  texte.  La  préface  aussi  reproduit  la  piti 
grande  partie  de  nu  notice,  augmentée  de  quelques  rectifications  que" 
Teianien  aitentif  du  texte  c^mpkt  ni*a   suggérées*  Ainsi  je  m'étais  trop 
avancé  en  disant  {l  L  p,  2Sa)  que  le  vriii  litre  sérail  U^^etidt  ou  Fj>  ii 
saini  SUfeiirr ,  Eneiîti,  le  commencement  du  poème  est  bien  pris  de  la  vie 
latine  de  saint  Silvestre,  mab  le  rcsie^  k  partir  di^  v.  ^9)  (le  poème  coti- 
itetil  1480  vers)  est  tiré  de  VhnvNiiù  S.  Cruch  {A A*  SS,^  4  mai,  cl  édi- 
tion Holder*  cher  Teubncr  18^9). 


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Cbcrfjt  de  proverbes  et  dictons  p«itois  de  Damas 

£l  I  ^-50 

Le  Roman  de  Flamenca,    ^^^^^^ 

L  ^  emprunt  du  lançais,    P*^^  P^iis, 

-  -  ^^ — ^ — — — — H — :    mcmltrc      *k 

tlustitm    Ia-4^   —  ^^h  _    _      .  _ .      .  2(f 

Le  roman  du  Comte  de  Toulouse,  P-T  *«=  «"^»*^'  ^  " 

^ — —     Pm,,..*,.,^.  50 

La  Ht'  ^  normande  avant  ranoexion  (912-12041.  ;   -•^**'[^ 

ié,-  '-'    lit*    h    Soartv    i'-     1-.*;,  ,i,..      -.♦    K^-^^^r  \'r^    [^ 

itr  par  li:  mètHL  50 

Rimc^  Mv^Léif^M^^iionnes.  'ïciî-  —  •-    -    -^^-  Vq 

^— ^ —     vtpl.  !»*«.  —  l'hit 3  Ir. 

É^tud^  sur  là  ^-ïtjiîtt^fr^rt*,   r«^ànr-».\r«      r*ir  A.  Mapîgn^S'.  Tuïnt^  1 

—  Pût ,. ....j w.....  •  .  ./  aoîf* 

Mtoo--*  '«^  f^  S'---**  é^  linguistique  de  Paris.  "^        "^^ 

—  Table  analytique  •*^;  L^puE  E«HAUti,  Uu 
Essai  comparatif  sur  In                         -oire  des  rythmes, 

tncovic*  Cr  ^  Prh .  f. •  *  -  » f; 

Annuaire  de  i  hcoïc  pratique  des  Hautiss  Études  ^^;^ 

■  ^^ — . — -^  uC* 

II.- 

^t-^  ...    - 

- —  par    Friéii     v 

r^^  ....    &f. 

H4..1I    »«0y*f  ntfttik.  iwp«ivfip«4 


N*    188 


Octobre 


1903 


ROMANIA 

RF.CUEIL    IKIMLSTKIUL 

COSSACBN   »  L'ÈTCDR 


Tome  XXXII 


\  .  '1 


DES    I-ANGUES    ET    DltS    I.mt^RATUKIiS    KOMANHS    ^"^  -a 

FOND*  fjt   li-r^   l'AR  ^s^  Pi 

•       Paul  \n-YI-R  irr  Gaston  PARIS 

fl'BtlR  PAU 

PAUL     MEYER 

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SOMMAIRE  DV  PRÉSRNT  NUMÉRO 

G-  Pak«.  Le  cycle  âc   1.4  «  Gageuri 

P.  Tcfipp,  P*îl  /iï^/rti»  tii  Çj9ti*it2rtvt  du  Hamd, 

and  Kilii  r/i^oiy 


1^: 


s^s 


MEÏJVNGH5 


h\  Loi,  Conjectures  sur  Gîmri  M'  Rmiuliatt,   I,   Boson  d*E$CJfpioo, 

llf  Otiilotî.  m,  Les  Dtticrtok 
y    Lot.  Orson  de  BcâuvaJs, . 
P,  MicyiTR.  Wjucbler  dt  Den^nn. 
G    RaVKaUD.  L^  dît  au  htfJt   {Jjrvui 
R.  Lanclois.  lr.uiih»  mh  à  Vindcx  au  Xiiv  sicdt 
E    Lakguîis.  Inicgrutii>  aUff,.  ... 
G,  T.  Clark.  Les  explosives  sourdes  eittrr  ^oydicf  en  itjtki< 


%1^ 
VU 


COMPTEE  RlilKDUS 

i^/ (  fwi/aiM  u>    .  f     M.).  .^  J97 

L,  JoRiJAN.  Gi  (G.  HucM  619 

Chrutûquc  riuitx  Ucï  noy  i^tc^  «Ji:  Fbiidre  en  ï  yjq^i  >i^a,  p.p.  H«  Piu^KMfc 


PliJUODlQ.UliS 

CHRONiaUE 

TABLB  Df:S  MATIÉRL^ 


Ht 


\x%  pmchaim  numérQ^  confient rom 
R.  J,  CUERVO.  M*ïrt*i  y  iimhd;  fHù*^Uêf  h\  maj^int 

P.  I,    ^ ..  -,  - 

Ci.    HlKT.  Lj    ,  \%. 

F,  1 

A,   i- 

P.  I  '  ic  lii  t<»'i»*»»f 

M. 

II.  "-'  \^^  clun^ns  de  Guinéutiic  4' Orange (111^)1  — 


LE   CYCLE   DE   LA   GAGEURE 


Le  thème  fondamental  de  toutes  les  variantes  du  conte  que 
nous  allons  étudier  est  celui-ci  :  un  homme  se  porte  garant  de 
la  vertu  d'une  femme  à  Tencontre  d'un  autre  homme  qui  se  fait 
fort  de  la  séduire  ;  par  suite  d'apparences  trompeuses,  la  femme 
semble  avoir  en  effet  cédé  au  séducteur,  mais  enfin  son  inno- 
cence est  reconnue.  Ce  thème,  plusieurs  fois  traité  au  moyen 
âge  sous  des  formes  diverses,  l'a  été  aussi  par  Boccace,  par 
Shakspeare  et  par  Weber\  On  le  désigne  souvent  par  le  nom 
de  Cymbelifie;  mais  le  drame  de  Shakspeare  en  offre  l'une  des 
formes  les  moins  primitives  et  les  moins  pures.  Nous  lui  don- 


1.  [Dans  les  dernières  années  de  sa  vie,  G.  Paris  consacrait  Tune  de  ses 
leçons  hebdomadaires  du  Collège  de  France  à  l'étude  des  romans  d'aven- 
ture. Il  se  proposait  de  rédiger  sur  ce  sujet,  pour  V Histoire  littn\iiri\  une 
suite  d'articles,  comme  il  avait  f;iit  précédemment  (dans  le  tome  XXX)  pour 
les  romans  de  la  Table  ronde.  Il  sera  impossible  de  donner  suite  à  ce  pro- 
jet :  la  rédaction  des  diverses  parties  du  travail  est  trop  peu  avancée,  et  d'ail- 
leurs, au  point  où  en  est  V Histoire  littéraire^  il  n'est  guère  admissible  qu'on 
revienne  constamment  sur  des  périodes  déjà  étudiées  en  des  volumes  depuis 
longtemps  publiés.  Mais  entre  les  leçons  de  G.  Paris  certaines  présentent 
une  rédaction  assez  arrêtée  pour  qu'il  soit  légitime  de  les  mettre  au  jour. 
C'est  notamment  le  cas  pour  celles  qui  ont  pour  objet  les  poèmes  groupés 
sous  le  titre  de  Cycle  de  la  (ui^^eure.  D'ailleurs,  Paris  lui-même,  peu  avant  sa 
mort,  en  avait  inséré  un  court  extrait  dans  la  Mi^cellanea  récemment  publiée 
en  l'honneur  de  M.  le  professeur  Graf,  de  Turin.  M.  J.  Bédier  a  bien  voulu 
se  charger  de  transcrire  ces  leçons  d'après  les  cahiers  de  son  ancien  maître,  de 
compléter  quelques  analyses,  de  régulariser  l'annotation,  substituant,  là  où  il 
y  avait  lieu,  la  rédaction  de  la  Af/.viv//</w<M  à  celle  des  cahiers |.  —  P.  M. 

2.  C'est  l'opéra  dl:tiryatithe  (1824). 

Ibmania,  XXMI  ]  i 


482  G.    PAEIS 

ocrons  h  désignation  de  la  Gageun^  qui  convient  à  peu  près  â 
toutes  les  formes  (bien  qoe  dans  quelques-unes,  et  des  plus 
indetines,  il  n'y  ait  pas  de  gageure  à  proprement  parler),  et 
nous  en  classerons  les  variantes  diverses  en  groupes  dont  nous 
essaierons  de  retrou^^er  Tordre  naturel  et  les  rapports.  Ce  cycle 
a  déjà  été  souvent  étudié  :  par  Francisque  Michd\  Von  dcr 
Hagcti%  Reinhold  Kôhler»,  RocIîs\  Ohle»,  Todd*,  Childs 
mab,  d'une  pan  on  Fa  souvent  indûment  mêlé  avec  celui  de 
Barimm  ;  d^autre  pan  il  semble  bien  qu'on  en  ait  mal  compris 
l'évolution,  plaçant  en  dernière  ligne  et  regardant  comme 
cotuposite  le  groupe  qui  est  au  contraire  le  plus  primitif  et  le 
point  de  départ  des  autres.  Réservant  pour  la  fin  de  notre 
étude  la  discussion  de  ce  s\^tcme,  nous  allons  passer  en  rtvut 
les  nombreuses  versions  françaises  et  étrangères  du  conte^  en 
les  rangeant  dans  Tordre  que  notis  croyons  le  plus  logique  et 
le  plus  historique  en  mèiiie  temps. 


A  :  BONNE  FOI  DU  GALANT;  SUBSTITUTION  ET  MUTILATION. 

La  forme  primitive  de  notre  thème  nous  parait  être  celle  ou 
b  femme  feint  de  céder  aux  poursuites  du  galant,  mais  substitue 
en  son  lieu  et  place  une  femme  de  condition  inférieure,  que  le 
galant  mutik  ;  la  femme  qu'il  croit  avoir  séduite  prouve  son 
innocence  en  montrant  qu'elle  n'est  pas  mutilée. 

Dans  une  seule  des  versïoi^  de  ce  groupe,  qui  nous  semble  h 
metlletire,  U  s'agit  de  la  satUT  et  non  de  la  femme  du  héro^^ct 


ip  là  i^mmdÊk  VkkiU  (Farts,  iSh) 

3.  Gi mmm  hikmHwktr^  t.  ÎII^  pf.  civ-cvi. 

).  IMUFoimrHaU  fir  girm^aisfàt  wU  fpmâmisckt  ^MkkfU,  u  IV  (i8£7X 
p.  270;  cL  JËfetJMrr  Sikri/kÊÈ  ^mr  M£Mmmf»n^mg  von  fi.  Kèhkfr  lig|.  %xm 
}€kja»m  Bqlte,  t.  f  (iS^)»  p.  m* 

4.  A.  Rodb»  Udif  dm  Viikktm^MpmÊm  mmd  Ht  ir#adkrwv  Ja^  EttHmO- 
S<y«(ibf.deHalk,  lUi), 

f,  IL  Obk,  Shaka/mr^t  CfmhSim  mU  uim  rom^di(km  fmU^tr  (fier- 
Int,  i8>9o> 

6.  Dtss  kf  FMic^H^t  0/  iftr  wtoiêrm  kqpnfv  rnsSÊdêtim  wf  Ammia^ 
t.II»p.  107. 

7,  Fr.  J.  OaU.  TV  mfSshmmà  teotthk  fofmiMr  Uhds,  u  V,  ^.  at. 


LE  CYCLE   DE   LA    «    GAGEURE   »  483 

elle  épouse  le  roi  à  la  cour  duquel  a  eu  lieu  le  défi.  Dans  les 
autres,  qui  ont  gardé  les  deux  traits  caractéristiques,  la  femme 
étant  Tépouse  du  héros,  le  dénouement  est  simplement  la 
réconciliation  des  époux  et  la  confusion  du  galant.  Dans  toutes, 
le  galant  est  de  bonne  foi  et  a  été  trompé  par  la  femme,  qui, 
ignorant  le  défi,  a  voulu,  sans  sacrifier  son  honneur,  gagner  les 
dons  qu'il  lui  offre. 

1.  Poimegrec  '.  —  A  la  cour  du  roi,  Mavrijanos  vante  sa  sœur, 
que  nul,  à  ce  qu'il  assure,  ne  peut  séduire.  Le  roi  prétend  y  arri- 
ver :  il  gage  son  royaume  contre  la  tcte  de  Mavrijanos,  qu'il  met 
en  prison  pour  la  durée  de  l'épreuve.  Il  envoie  à  la  jeune  fille  de 
riches  présents,  requérant  d'elle  en  échange  une  seule  de  ses 
nuits.  Elle  demande  à  ses  servantes  que  Tune  d'elles  s'aban- 
donne à  sa  place  ;  seule,  la  plus  jeune  consent  \  A  l'aube,  le  roi 
lui  coupe  le  doigt  qui  porte  l'anneau  (et  des  cheveux).  Il 
revient  à  sa  cour,  montre  ses  trophées.  Mavrijanos  a  perdu,  il 
va  être  conduit  au  gibet,  quand  sa  sœur,  avertie,  arrive, 
demande  pour  quel  crime  il  va  ûtrc  pendu,  et,  sur  la  réponse 
du  roi,  montre  sa  main  (et  sa  chevelure)  intactes.  Elle  reven- 
dique le  roi  comme  son  esclave;  le  roi  l'épouse  '. 

Cette  forme  est  la  seule  où  le  roi  soutienne  lui-même  la 
gageure  et  l'épreuve  :  est-ce  la  forme  primitive  ?  Il  convient  en 
tout  cas  d'y  noter  ces  traits  archaïques,  l'esclavage,  la  barbarie 
de  la  mutilation. 

Dans  les  cinq  versions  suivantes,  l'héroïne  est  l'épouse  et  non 
la  sœur  du  4>arieur,  ce  qui  change  toutes  les  conditions  du 
récit. 

2.  Hants  Taliesin^,  —  Ce  conte  gallois  du  xiii«  siècle  offre 
avec  le  poème  grec   les  plus  frappantes  ressemblances.  A  la 


I.  Voyez  les  formes  différentes  (onze  versions,  recueillies  depuis  1805), 
dans  Chîld,  ouv.  cité. 

2.*  Dans  d'autres  versions,  sans  doute  les  plus  anciennes,  elle  ordonne  à 
sa  servante,  comme  une  chose  toute  simple,  de  se  donner. 

3.  Ce  dénouement  paraît  le  plus  ancien  (cf.  B').  Dans  d*autres  versions, 
conformément  aux  conditions  du  pari,  le  frère  devient  roi,  ou  le  peuple  le 
dépose  et  met  sa  sœur  à  sa  place. 

4.  Màbinogion  (Lady  Guest),  III,  321  ss.  ;  cf.  p.  356  ss. 


4^4  G.    PARIS 

cour  du  roi  Maelgwn,  les  bardes  vantent  sa  femme  et  ses 
bardes;  mais  Elphin  dit  que  sa  tenime  et  son  barde  Taliesin 
sont  les  iTieilleors  qtit  soient*  Maeîgwn  le  fait  mettre  en  prison 
et  envoie  son  fils  Rhun  chez  Elphin  pour  éprouver  cette  femme 
et  ce  barde*  Taliesin  '  conseille  à  la  femme  d'Elphin  d^habiller 
comme  elle  une  servante,  qui  reçoit  Rhun  à  la  table  et  dans  la 
chambre  de  sa  maîtresse  :  U  Fendon  (nous  retrouverons  ce  trait)» 
et  lui  coupe  le  doigt  qui  porte  Tanneau  d'Elphin,  Le  roi  fait 
venir  Elphin  de  sa  prison  et  lui  montre  le  trophée  ;  il  reconnaît 
bien  l'anneau,  mais  non  le  doigt,  pour  trois  raisons  :  Fannçau 
est  trop  large  pour  le  pouce  de  sa  femme,  trop  étroit  pour  son 
poignet;  —  Fongle  n'est  pas  coupé  chaque  samedi;  —  le  bout 
du  doigt  a  pétri  delà  pâte.  Taliesin  apparaît  (longue  rédtadon 
de  poème),  et  montre  la  femme  d*Etphin  dont  le  doigt  est 
intact. 

3.  Ballade  écossaise,  Tht  twa  knigbis  \  —  Cette  ballade,  qui 
serait  mieux  intitulée  />  Ommiicr  et  Vkuyer^  est  peu  répandue 
et  de  forme  récente^  mab  d  origine  ancienne.  Ici,  le  rôle  du  roi 
a  disparu.  Un  chevalier  a  quitté  son  château  pour  une  absence 
de  neuf  mois*  Son  écuyer  veut  en  profiter  pour  séduire  s^j 
femme.  Comme  elle  repousse  les  présents  qu*il  lui  offre, 
s'adresse  à  la  nourrice  (trait  que  nous  retrouverons  dans  B),  qui 
endort  la  dame  et  introduit  récuyer  dans  sa  chambre.  La  dame, 
réveillée  à  temps,  le  remet  à  la  nuit,  et  profite  de  ce  répit 
pour  décider,  moyennant  cent  livres,  sa  nièce  à  la  rempb* 
cer.  L'ccuyer  coupe  le  doigt  de  la  nièce  et  s'en  va  ;  la  dame 
enveloppe  le  sien.  A  son  retour,  le  mari  apprend  Faventure  par 
récuyer,  qui  lui  montre  le  doigt  coupé,  tl  convoque  à  un 
repas  les  parents  de  sa  femme,  Finsulte  et  lui  dit  adieu;  mais 
elle  délie  à  la  lumière  le  doigt  qu'elle  avait  lié  dans  robscurité, 
et  raconte  la  vérité.  La  nièce  a  le  droit  de  tuer  ou  d'épouser 
récuyer  :  elle  choisit  de  Tépouser. 

4.  Mmuscrit  de  Tours  (f.  téj  v*»)  »,  — Très  altéré  au  début, 
ce  conte  rappelle  de  près  la  ballade  par  son  dénouement.  — 


1.  Soo  rôle  mppelie  cdui  de  l*aèdt  libié  par  Agantemnon  aoprès  de  Oy- 

tetn  oestre. 
J.  C^iM,  Tbe^nglùh  tmà  Uûitish  popular  hûUadt,  I*  V,  n^  lé«, 
|.  Maouscrit  46S  (dw  XV*  siècle)  ;  recueil  d*txemph  de  la  «ecomlr  mcàtài 

du  xin<  stà:k. 


LE   CYCLE   DE   LA    tt    GAGEURE   n  485 

Un  bailli,  laissé  auprès  d'une  comtesse,  la  persécute.  Elle  feint 
de  lui  céder,  mais  substitue  à  sa  place  une  donticcllti^  à  laquelle 
il  coupe  le  doigt,  La  dame  éloigne  la  servante,  et  garde  sa 
main  enveloppée.  Le  comte  revenu^  le  bailli  accuse  la  dame 
d  avoir  eu  le  doigt  coupé  par  un  de  ses  ribauds  ^  Le  comre 
réunit  en  un  grand  repas  les  parents  de  sa  femme  ex,  leur 
contaot  Thistoire,  comme  arrivée  en  un  autre  pays^  leur 
demande  quel  châtiment  mérite  une  femme  capable  d*une  telle 
conduite  :  la  mort,  répondent-ib.  Alors  il  déclare  que  Théroïne 
de  son  récit  est  sa  femme.  Mais  elle  montre  son  doigt,  et  dit 
cette  parole  (passée  en  proverbe)  :  Qui  sain  lie  son  doit^  sain  k 
desîit.  Le  bailli  est  pendu. 

S-  Ruprecht  de  Wùrzburg,  hs  deux  marchands  de  Verdun  ^ 
(poème  du  xijï*  siècle,  traduit  du  français). — -Ici,  comme  dans  la 
ballade  écossaise  (3),  la  cour  du  roi  a  disparu;  mais  surtout 
le  milieu  social  a  changé.  Après  une  préhistoire  que  nous  négli- 
gerons, un  marchand  de  Verdun,  Benraii,  se  rencontre  chez 
son  hôte,  à  Provins,  avec  d'autres  marchands  qui  s'accordent  à 
médire  de  leurs  femmes.  Seul,  Bertran  loue  la  sienne^  et  Thôte, 
Hogier,  gage  ses  biens  contre  ceux  de  Bertran  qu'il  la  séduira 
avant  six  mois  écoulés.  En  conséquence,  Bertran  annonce  à  sa 
femme,  Ermenjart,  qu'il  part  pour  Venise,  et  Hogier  s'efforce 
de  gagner  son  pari  :  repoussé  en  diverses  tentatives,  il  lui  offre 
mille  marcs,  qu*e!le  refuse  encore,  mais  que  tous  les  parents  de 
Bertran  et  même  les  siens  la  pressent  d*accepter.  Enfin  (et  c'est 
la  Vierge  Marie  qui  lui  suggère  cette  idée),  elle  propose  à  sa  ser- 

r  vante  Ameline  de  sliabiUer  une  nuit  comme  elle  et  de  prendre 
place  moyennant  cent  marcs.  Hogîer  demande  à  la  fausse 
Ermenjart  de  lui  donner,  en  souvenir  de  cette  nuit,  un  joyau; 
et*  comme  elle  n'en  a  point,  il  lui  coupe  un  doigt.  Il  le  rapporte 
à  Bertran,  qui  se  désole,  et  conserve  pourtant  quelques  doutes. 
Mais  tout  doit  s*éclaircir  à  un  banquet  à  Verdun  :  là^  Hogier 

-ayant  montré  le  doigt  coupé,  Ermenjart  dit  d'abord  qu'elle  a 
Édé  aux  conseils  de  toute  sa  famille,  puis  montre  sa  main 
intacte;  Ameline  montre  la  sienne,  mutilée  i  Hogier  Tépouscj 
avec  ses  cent  marcs  de  dot. 


î*  On  ne  comprend  pas  bien  quelle  relation  eaiiste  entre  Va  dame  et  k 
baiîlî. 
3.  Von  der  Hagen,  Gesammtabenteiitr^  n*>  LXVIIL 


486  G.    PARIS 

6,  Jakob  Ayrer,  Contedia  wn  lu^eyen  Jârsîlickn  Ràîhcn  *  (pièce 
composée  vers  léoo,  à  Nuremberg).  —  A  la  cour  d'un  prince^ 
deux  galants  gagent  avec  un  mari  qu*ils  séduiront,  pendant  un 
voyage  qu*il  va  entreprendre,  sa  femme  FrigiaS  et  qu'ils 
obtiendront  d'elle  son  anneau  de  mariage  et  son  collier*  Fei- 
gnant de  céder,  Frigia  envoie  à  sa  place  deux  de  ses  servantes, 
qui  ne  se  laissent  que  courtiser  par  les  galants,  et  qui  »leur 
donnent  Tune  le  collier^  Tautre  la  bague  de  leur  maîtresse» 
A  la  fin,  Frigia,  que  tes  séducteurs  n'ont  jamais  \Tje,  appa- 
raît, et,  comme  ils  déclarent  ne  pas  la  connaître,  son  innocence 
est  prouvée  K  On  ignore  la  source  de  Jakob  Ayrer^. 


B  :  M.\UVA1SE  FOT  DU  GALANT  ;  INDICES. 


I 


Tous  les  récits  quî  existent  en  dehors  de  A,  ont  (sauf  omis- 
sîon  fortuite)  ces  traits  en  commun  :  le  galant  est  de  mauvaise 

foi,  il  sait  bien  n'avoir  pas  possédé  la  femme  (ou  même  ne 
Favoir  jamais  vue),  et  il  cherche  â  faire  croire  qu*il  a  gagné  le 
pari  en  décrivant  un  signe  qu'elle  a  sur  le  corps»  et  (ou)  en 
montrant  des  joyaux  à  elle  qu'il  s'est  procurés, 

B  *  :  l'héroïne  est  sœur  du  pakîeur  ;  le  calant  ne  l'a 
PAS  vue;  accusation  de  viol  (et  de  vol). 

Le  groupe  B  '  se  caractérise  par  le  fait  qu'il  s'agit  toujours 
d*une  sœur,  dont  le  frère  fait  Téloge,  ce  qui  décide  le  roi  à 


i.  Opus  thofittrkum,  Nuremberg,  1618.  Ayrers  Dramen,  hgg*  voo  Adelbert 
von  Kciîcr  (BiHkitkk  drs  littetarischm  Vtmns  m  Stuttgart^  t.  LXXVl,  1865)^ 

a*  Les  personnages  de  la  pièce  portent  généralement  des  noms  roitulns. 

3.  Par  ces  traits,  cette  version  se  rapproche  de  B^  On  peut  admettre 
pourtant  qu'elle  se  rattache  tout  à  fiiit  à  A,  que  les  changements  sont  voulus 
et  que  les  ressemblances  avec  B'  sont  fortuites  :  noter  que  Frigia  ti 'accuse 
pas  les  prétendus  séducteurs  comme  dans  B%  mais  dit  toyt  de  suite  qui  dk 
est. 

4*  Au  groupe  A  se  rattache,  sans  qu'on  voie  bien  comment,  la  pièce 
d'Alexandre  Dumas,  Modtmomlk  ât  BeUt-Isle^  jouée  ^uk  Francis  k 
12  avril  1859.  Le  duc  de  Richelieu  parie  qu'il  sera  dans  \z  chambfC  de 
M***  de  Bclîe-Isle,  venue  à  Versailles  (1726)  pour  solliciter  la  grâce  de  son 
père.  M^»*  de  Prie^  maltresse  de  Richelieu^  découvre  son  pkn  et  prend  li 
place  de  M^'  de  Belle-Isle,  Le  fiancé  de  celle-ci  la  croit  coupable  et  veut  x 
battre  â  mort  avec  Richelieu  ;  tout  Bnit  par  s'éclaircir. 


LE   CYCLE   DE    LA    «    (ÎAGKURK    »  487 

vouloir  l'épouser  :  il  répouse  en  effet,  au  dénouement,  du  moins 
dans  la  plupart  des  versions.  Pour  prouver  qu'elle  n*a  pas  cédé 
au  séduaeur,  la  jeune  fille  l'accuse  en  public  de  l'avoir  violen- 
tée (et  volée),  ce  dont  il  se  défend  en  assurant,  ce  qui  est  vrai, 
ne  lavoir  jamais  vue.  Ce  groupe  se  divise  en  deux  sous-groujKs, 
suivant  que  l'accusation  de  vol  est  générale,  ou  qu'elle  porte 
sur  un  objet  très  précieux  et  formant  paire.  Le  premier  sous- 
groupe  est  le  plus  ancien  et  proprement  français  ;  le  second  est 
particulièrement  italien,  et  survit  dans  différents  contes  popu- 
laires. Dans  le  premier  sous-groupe,  la  gageure  manque. 

B  '  a  :  Pas  de  gageure, 

1.  Manuscrit  de  Tours  468,  f"  33  v".  — (iuillaume  de  Nevers 
va  servir  l'empereur  à  Rome  et  se  distingue.  11  vante  tellement 
sa  sœur  (le  manuscrit  omet  ce  motif)  que  l'empereur  veut  la 
prendre  pour  femme.  Le  maréchal,  qui  avait  espéré  lui  faire 
épouser  sa  propre  sœur  ',  va  à  Nevers,  se  foit  donner  par  la 
nourrice  l'anneau  de  la  jeune  fille,  et  apprend  qu'elle  a  sur  sa 
cuisse  une  rose.  Pourvu  de  ces  indices,  il  raconte  qu'il  a  passé 
trois  nuits  avec  elle,  et  Guillaume,  désolé,  s'éloigne  pour  tou- 
jours. Mais  sa  sœur  apprend  l'imposture,  vient  ;\  Kome,  accuse 
le  maréchal  de  l'avoir  violée  :  celui-ci  jure  de  ne  l'avoir  jamais 
vue.  Un  combat  judiciaire  est  préparé  :  connue  il  va  être  livré, 
elle  dit  qui  elle  est  ;  le  maréchal  est  puni,  on  retrouve  Guil- 
laume, et  l'empereur  épouse  la  jeune  iille. 

2.  Guillaume  de  Dole  ^ , — Ce  très  joli  roman  a  été,  d'après  les 
savantes  recherches  de  M.  Servois,  composé  entre  1 199  et  1201. 
L'auteur,  quand  il  l'écrivit  (cf.  les  derniers  vers),  était  devenu 
moine.  Il  avait  ainsi  perdu  son  «  sornon  »  :  il  aurait  bien  dû 
au  moins  nous  dire  son  nom.  On  peut  croire  que  c'était /«'/mm, 
et  que  le  surnom  était  Renart.  Il  y  a  en  effet  de  sérieuses  rai- 
sons de  croire  que  l'auteur  de  Guillaume  de  Dole  est  aussi  celui 
de  YEsœufle^  et  il  n'est  guère  douteux  que  celui-ci  ne  soit  l'au- 
teur du  laide  VOtnbrey  qui  dit  s'appeler  Jehan  Renart.  S'il  en  est 

• 
I.  Œ  un  motif  analogue  dans  lyoon  de  la  Hoc1h\ 

a.  Publié  par  G.  Servois  (Socii'U'  litu  anciens  textes  français).  Cf.  Ad.  Mus- 
sàRi,  Zur  Kritik  und  Interprétation  ronianisiher  Texte,  III  (Vienne,  1897). 


488  ^^*^' 

ainsi,  Jehan  Renart  aurait  écrit  FËroufle  vers  ii8y^  le  lai  dt 
rOmbre  un  peu  plus  tard  (il  y  cite  VEmmJk%  serait  ensuite 
entré  en  religion^  puis  aurait  composé  Guillaume  Jt  Dole  en 
I200.  n  est  vrai  que  le  ton  de  son  poème  ne  semble  guère 
contenir  à  un  moine  :  mais  nous  ne  pouvons  douter  qu'il  le 
fût,  et  d'ailleurs  Guiot  de  Provins  rétait  aussi,  ci  pareillement 
Raoul  de  Houdan  quand  il  écri\'it  Meraugis  K 

La  fable  du  roman  est  très  altérée  et  repose  probablement  sur 
une  tradition  orale  et  imparfaite  de  Guillaume  de  Nnrrs  ou  d*un 
récit  pareil.  Il  s'agit  aussi  d  un  empereur^  mats  il  réside  h 
Maycnce  *  (comme  Frédéric  I),  et  non  à  Rome,  et  il  s'appelle 
Corras,  par  souvenir  des  trois  Conrad  des  X*,  xî*  et  xii'  siècles* 
Ce  n*est  plus  ici  le  héros  qui,  à  la  cour  où  U  est  venu  de  lui- 
même,  vante  sa  sœur  et  inspire  à  Temperetir  de  Taîmer;  c'est 
W\  jongleur,  nommé  Jouglet,  qui  lui  vante  le  frère  et  la  sœur, 
et  de  telle  façon  que  l'empereur  fait  aussitôt  venir  le  frère,  et 
s'éprend  passionnément  de  la  sœur'.  Guillaume  de  Dole*, 
arrivé  chez  Corras,  s'y  distingue  de  toutes  façons,  mais  ne  dit 
rien  de  sa  six*ur  ;  c'est  l'empereur,  toujours  préoccupé  d'elle,  qui 
spontanément  lui  déclare  qu'il  veut  l'épouser.  Un  sénéchal 
curieux  (comme  Keu)  surprend  ce  discours  et  se  dit  qu'il 
empêchera  le  mariage-  Il  pan  pour  Dole,  espérant  voir  (et 
séduire  ?)  Liénor,  et  se  présente  à  ta  mère  comme  le  compa* 
gnon  d'armes  de  Guillaume,  et  comme  venu  de  sa  part.  Il 
demande  à  voir  Liénor,  mais  la  mère  lui  répond  que  personne 
ne  la  voit  en  l'absence  de  son  frère;  pourtant»  gagnée  par  ses 
assurances  et  par  le  don  d'un  riche  anneau,  elle  lui  décrit  la 
beauté  de  sa  fille  et  la  merveille  de  la  rose  qu'elle  a  sur  la 
cuisse  ^   Le  sénéchal  revient  à  la  cour,  où  Tempereur  lui  fait 


j .  C'est  i  tort  que  M.  Friedwagner,  en  soa  61ition  d«  Mirangù  (p.  |_xvt)» 
le  cornes  le. 

a.  Et  aussi  à  Coîogfte,  à  Maestrkbt. 

j,  L*clogc  est  pcsurtant  bien  binaï,  et  même  iriiiirect  (v.  é\€  ssÔ« 

4,  Le  nom  GmUanms  c$t  fcîcé  de  l'ancien  poème;  on  ne  voit  pas  la  nà* 
son  du  furnom  ;  rtrimrquer  que  Dole  est  en  terre  d^Enipire. 

y.  Ce  rèle  donné  (seulement  id)  à  la  m^re,  qui  cnsmtc  se  déiok,  c«  des 
ptus  malhcyreiix ;  dam  les  versions  1,  ^,  4i  5  de  ce  sousi-groupe,  c'csi  U 
nourrice,  vrai  ment  a4:hc:téc  (ou  une  servante^  une  cousin  t:),  qyi  trahit  sdcm- 
ment. 


LE  CYCLE   DE   LA    «    GAGEURE    »  489 

part  de  son  projet  d'épouser  Liénor  :  il  déclare  alors  Tavoir 
possédée  et  donne  comme  preuve  la  rose.  L'empereur  veut  que 
Guillaume  ne  sache  rien,  mais  peu  après  il  lui  révèle  lui-même 
ce  qu'il  a  appris.  Guillaume  est  convaincu  du  déshonneur  de 
Liénor,  car  sa  mère  et  lui  savaient  seuls  la  particularité  de  la 
rose.  Tandis  qu'il  se  désole,  un  sien  neveu  '  part  pour  Dole 
afin  de  châtier  Liénor;  il  arrive  comme  un  furieux  et  veut  la 
tuer,  mais  on  l'arrête,  et  la  mère  avoue  et  déplore  son  indis- 
crétion ".  Mais  Liénor  jure  de  se  justifier.  Elle  part  avec  deux 
chevaliers  et  le  neveu,  et  arrive  à  la  cour.  Elle  fait  remettre  en 
secret  au  sénéchal,  comme  venant  de  la  châtelaine  de  Dijon,  un 
anneau,  une  agrafe,  une  aumônière  et  une  ceinture,  tous  pré- 
sents qu'il  est  prié  de  porter  sous  ses  vêtements;  puis  elle 
accuse  le  sénéchal  de  l'avoir  surprise  et  violentée,  et  de  lui 
avoir  volé  sa  ceinture  et  son  aumônière  où  sont  une  bague 
et  une  agrafe,  qu'elle  décrit.  Le  sénéchal  proteste  qu'il  ne 
Ta  jamais  vue;  elle  demande  qu'on  le  fouille,  et  on  trouve 
sur  lui  tous  les  objets  réclamés.  Il  est  condamné  i\  mourir, 
mais  les  barons  ses  amis  obtiennent  une  épreuve  judiciaire  S 
dont  il  sort  vainqueur.  Alors  Liénor  dit  qu'il  a  en  effet  raison 
de  nier  l'avoir  jamais  vue,  et  raconte  comment  il  a  entendu 
parler  de  la  rose.  L'empereur  embrasse  Liénor  et  la  proclame 
sa  femme;  on  va  avertir  Guillaume,  qui  arrive  ;  le  sénéchal  en 
est  quitte  pour  un  pèlerinage  outre-mer,  et  Tempcreur  épouse 
Liénor. 

Cette  fable,  surtout  ainsi  altérée  et  réduite,  se  prêtait  mal  à 
fournir  l'intrigue  de  tout  un  roman;  l'auteur  est  arrivé  à  en 
tirer  les  six  mille  vers  de  rigueur  en  y  intercalant  un  long  et 
inutile  épisode  (le  tournoi),  et  en  délayant  son  récit  par  des 
entretiens  qui  forment  souvent  hors-d'œuvre.   Il  ne  pouvait 


1.  De  qui  peut-il  être  le  fils?  C'est  sans  doute  un  cousin  Ccf.  p.  x,  n.  i). 

2.  Rien  n'est  plus  maladroit  :  il  suffisait  qu'elle  vint  ;\  la  cour  raconter 
comment  elle  a\'ait  trop  parlû  et  qu*elle  établit  que  le  sénéchal  n'avait  pas 
vu  sa  fille;  partout  ailleurs,  il  va  de  soi  que  la  coupable  ne  dit  rien  et  n*est 
découverte  que  plus  tard. 

3.  On  ne  peut  pas  faire  de  bataille,  parce  qu'il  y  a  des  preuves  palpables; 
c*est  par  faveur  qu'on  obtient  le  julicium  aqtiat'  friiri.i(ic  (voy.  Du  Qinge), 
où  on  devait  toujours  réussir. 


490 


G*   PARIS 


guère  avoir  recours  aux  subtilités  psychologiques  que  Chrétien 
de  Troyes  avait  mises  à  la  mode  ;  il  ne  trouvait  pas  dans  son 
sujet  les  combats  de  sentiments  qui  en  sont  le  thème  habituel  : 
Tcmpereur,  en  etfet,  aîme  Liénor  sans  la  connaître;  Guillaume 
est  un  personnage  passif  et  vide;  les  sentiments  du  sénéchal  et 
de  Liénor  sont  extrêmement  simples.  L'auteur  s'en  est  tiré 
par  des  conversations  quelquefois  banales,  d'autres  fois  assez 
spirituelles  ou  dramatiques.  Surtout,  il  est  soni  d'embarras  en 
faisant  servir  son  récit  de  cadre  à  une  peinture  élégante  de  la 
vie  de  son  temps  :  parties  de  chasse  et  de  danse^  chansons  de 
carole,  d*histoire,  de  geste,  chansons  courtoises  françaises  et 
provençales j  fête  de  mai,  fêtes  nuptiales.  Sa  versification  est 
hachée,  son  style  bizarre,  heurté,  souvent  ridicule  par  le  mélange 
de  la  recherche  et  de  la  trivialité,  parfois  gracieux  et  original. 

}.  Nouvelle  de  Sens  (Va t.  Reg*  1716)  ',  —  Cette  nouvelle 
nous  est  fournie  par  un  manuscrit  de  la  fin  du  xv^  siècle,  conte- 
nant des  nouvelles  en  prose,  mais  ou  Ton  retrouve  des  traces 
de  vers.  Dans  toutes  ces  nouvelles,  les  noms  sont  changés  en 
noms  du  pays  senonais-  Le  récit  est  sec  et  gauche  ;  les  sujets 
seuls  sont  intéressants,  et  aussi  le  fait  qu'on  a  au  xv*  siècle 
écrit  des  nouvelles  en  vers,  mises  ensuite  en  prose. 

Longtemps  le  roi  Claudin  avait  différé  de  se  marier  «  par 
doubte  d*avoir  femme  mal  condicionnee,  complexionnee  ou 
morigénée»;  enfin,  à  son  chambellan  Enguerrand  de  Coucy, 
qui  le  presse,  il  répond  qu'il  se  mariera  s'il  trouve  une  jeune 
fille  sage  et  belle,  fùt-elle  pauvre.  Comme  Enguerrand  a  quitté 
la  salle  après  ce  propos  du  roi,  un  «  bel  et  bon  serviteur  »  de 
Claudin,  Jacques  de  Voisines,  fils  d*un  chevalier  de  Sens,  lui 
vante  sa  sœur,  Ysmarie,  et  lui  conseille  de  Tépouser.  Enguer- 
rand est  chargé  par  le  roi  de  s'enquérir  de  la  jeune  fille  ;  mais- 
persuadé  que  Jacques  de  Voisines  veut  le  supplanter  dans  sa 
charge,  il  se  promet  de  le  perdre.  Il  gagne  une  cousine  et  amie 
d'Ysmarie,  demoiselle  Robine,  qui,  moyennant  cinq  cents 
pièces  d*or,  lui  fera  voir  Ysmarie,  nue.  Le  lendemain,  au  matin, 
Robine  Tintroduit  dans  la  garde-robe  de  la  jeune  fille  et  le 
cache  sous  des  bardes  ;  puis,   venue  dans   la  chambre  où  dort 


I.  Vo}\  E.  Ljingloîs,  4aEis  tes  Noii£esei  fximtts  tks  mofiuimtSt  t«  KXXIH* 
t*  série,  p.  228. 


LE  CYCLE   DE   LA    <t    GAGEURE   i>  49 1 

Ysmarie,  elle  la  réveille  en  lui  disant  :  <f  Ixvez-vous  et  faites- 
moi  voir  sur  quelle  jambe  est  votre  signe,  car  j'ai  gagé  âce  pro- 
pos un  chapon,  que  nous  mangerons  à  midi  avec  Mademoi- 
selle Agathe  Chanteprime,  notre  cousine,  t  Ysmarie  se  lève  et 
Robinela  conduit  dans  la  garde-robe  où.  tandis  qu'elle  feint  de 
rexaminer,  Enguerrand  voit  son  corps  à  loisir.  De  retour  auprès 
du  roi,  il  lui  dit  que,  moyennant  mille  pièces  d'or,  il  a  dormi 
avec  ta  demoiselle  de  Voisines;  quant  à  la  beauté^  telle  et  telle 
lui  sont  bien  supérieures.  Comme  preuves  de  son  succès,  U 
décrit  son  corps  et  le  signe  qu'elle  a  sur  la  jambe.  Le  roi  rap- 
porte Taventure  à  Jacques  de  Voisines  et  le  chasse  de  son 
royaume.  Jacques  va  trouver  sa  sœur,  l'accable  Je  son  mépris  et 
parij  sous  le  nom  de  Liénart,  on  ne  sait  pour  quels  pays* 
Ysmarie,  d*abord  abattue,  reprend  courage  :  accompagnée  de 
deux  de  ses  parents,  elle  se  présente  à  la  cour  du  roi  Qaudin, 
et  accuse  Enguerrand  de  Tavotr  prise  par  force,  Enguerrand  ne 
peut  prouver  le  contraire  qu'en  avouant  tout.  Le  roi  veut  le 
punir,  mais  Ysmarie  obtient  sa  grâce.  Le  roi  épouse  la  jeune 
fille,  tandis  qu'Enguerrand  part  à  la  recherche  de  Jacques  :  après 
bien  des  périls  courus,  il  le  retrouve  enfin  dansTîle  de  Rhodes; 
il  le  ramène  à  la  cour,  où  Claudin  le  comble  d* honneurs. 

4.  EufemiUj  par  Lopede  Rueda  '. —  Nous  ne  parlons  ici  que 
de  ce  qui*  dans  cette  pièce  singulière,  se  rapporte  à  notre  sujet. 
Leonardo  quitte  sa  sœur  Eufemia,  malgré  elle,  pour  s'avancer 
dans  le  monde.  Il  entre  au  ser\4ce  d*un  prince  appelé  Valiano. 
On  voit  par  une  scène  qu'il  a  dû  vanter  sa  sœur  à  Valiano,  qui 
songe  à  Tépouser,  Puis,  un  counisan,  Pablo^  qu*on  ne  fait 
qu  entrevoir,  raconte  à  Valiano  qu'il  a  dormi  quatre  nuits  avec 
Eufemia,  qui,  l'ayant  vu  passer  dans  la  rue.  Ta  fait  appeler  par 
SSL  servante  Crîstina  :  elle  lui  a  donné  un  cheveu  (ou  des  che- 
veux) qui  croit  sur  un  signe  qu'elle  porte  à  l'épaule  gauche.  Il 


I.  La  Comèlk  espagnole  d^  Lopt  dt  Rueda^  tr.id.  de  A.  Germon d  de  La- 
vigne  (Paris,  Michaud,  188;).  --  Lopede  Rueda»  acteur  et  auteur,  vers  1550, 
a  surtout  écrit  des  paios  fort  vjvatîts  et  curieux.  I!  a  traité  sa  piècç  de  même  : 
le  gracmo,  la  vieille»  le  bohème,  le  f^rifaron  poltron  (Vaîlejo,  laquais),  la 
bohémienne  y  occupent  beaucoup  plus  de  place  que  le?  personnages  prind* 
patin.  L'aciion  elle-même  est  surtout  en  discours  et  r^îcits  ou  en  épisodes 
inutiles.  On  regarde  Lopede  Rueda  comme  imitant  ta  comédie  italicmie  :  ici 
au  moins,  je  ne  vois  pas  bien  enqitoi. 


49^  G,   PARIS 

faut  donc  sous-entendre  h  jalousie,  le  voviige  et  la  ruse  de 
Pabio,  que  Cristiua  raconte  plus  tard.  Valiano  déclare  que 
Leonardora  odieusement  trompé  et  qu'il  le  fera  mettre  à  mon 
(sans  explication  ni  confrontation)*  Eufenria  est  avertie  par  le 
valet  de  son  frère  (k  gradosû  Mekhior)^  qui  lui  remet  une  lettre 
insultante  de  Leonardo.  Cristîna  avoue  qu'elle  a  donné  le  che- 
veu (ou  les  cheveux)  à  un  étranger-  Le  jour  du  supplice  de 
Leonardo,  Eufemia  accuse  Pablo  '  de  lui  avoir  volé  un  riche 
bijou,  une  nuit  qu'elle  Tavait  reçu  dans  son  lit.  Il  dit  et  répète 
qu*il  ne  Ta  jamais  vue,  Elle  veut  qu'il  prête  serment,  ce  qu'il 
fait.  Elle  lui  reproche  sa  calomnie  ;  mais  il  maintient  qu*il  a 
dormi  avec  la  sœur  de  Leonardo;  alors  elle  se  nomme  et 
Cristina  raconte  toute  l'aventure*  Valiano  fait  décapiter  Pablo 
et  délivrer  Leonardo»  et  il  épouse  Eufemia. 

B  '  b  :  Gageure^  accumtiùn  du  vol  d'un  objet  formant  paire . 

Le  groupe  B  '  b  diffère  du  précédent,  comme  il  a  été  dit,  en 
ce  qu'il  a  conservé  la  gageure  de  A,  et  en  ce  que  la  sœur,  présen- 
tant au  roi  un  objet  dépareillé  (gant,  pantoufle,  botte),  prétend 
que  le  traître  lui  a  volé  Tobjet  formant  paire  avec  celui-là.  Cette 
in%'ention  inutile  n*a  du  être  faite  qu'une  fois,  et  suffit  pour 
rattacher  à  une  même  provenance  tous  les  récits  qui  forment  ce 
groupe.  Ils  sont  d'ailleurs  tous  italiens,  et  le  groupe  se  compose 
d*unc  nouvelle  en  prose  du  xv*  siècle,  d'une  oous^elle  en  vers 
du  xvur,  et  de  contes  recueillis  de  nos  jours  (dont  un  en  Alle- 
magne, mais  provenant  d'Italie). 

I .  Feliciano  Antiquario, /wj/û  Victoria  K  —  Felictano  Antiqua- 
rio  nous  apprend  qu'il  a  composé  sa  nouvelle  en  1474»  à  la 
campagne.  Il  Ta  dédiée  à  Francesca,  femme  de  Gregorio  Lava- 
gnola.  Elle  est  écrite  dans  le  style  de  la  Renaissance,  avec 
beaucoup  d'allusions  et  de  mythologie,  d*ailleurs  en  beau  style 
et  non  sans  talent.  Le  titre  en  est  à  la  fois  réel  (t'héroïne  s*ap- 


1,  On  ne  voit  nulle  part  comment  cUe  sait  que  le  traître  est  Fâblo. 

2.  CaîûtcfQ  dti  ncvMrri  UttUam  in  ffrosa  taa^iUi  e  pûsseJuH  à&  Giùv.  I 
Papanîi  (2  voL»  Liv^oumc,  ïSji),  t.  Il,  Appendice,  p.  vu.  Sur  k  niaouscnt^ 
(sans  doate  autographe)  et  Tau  leur,  voy.  ibid.^  p.  v* 


LE   CYCLE  DE   LA    «    GAGEURE   »  493 

pelant  Victoria)  et  allusif.  —  Sous  le  règne  d'Aduardo  II  à 
Paris,  le  comte  Ubaldo,  qui  a  de  sa  femme  un  fils  et  une  fille, 
envoie  son  fils,  Drusillo,  à  Paris,  où  il  a  un  grand  succès  et 
devient  Tami  intime  de  Rodolpho,  fils  du  roi.  Ubaldo  se  dit 
que  Rodolpho  pourrait  bien  épouser  sa  fille  Victoria,  et  lui  fait 
donner  une  éducation  excellente  par  un  maître  âgé  de  quatre- 
vingt-six  ans,  dans  un  château  en  pleine  campagne,  où  nul  ne  la 
voit,  sauf  le  vieux  maître  et  ses  don:^elïe.  Le  roi  meurt  et 
Rodolpho  lui  succède.  Son  sénéchal  Galvano  est  jaloux  de  Dru- 
sillo et  médit  de  lui  à  la  cour.  Après  un  tournoi,  â  un  grand 
repas,  chacun  se  vante;  seul,  Drusillo  se  tait  ;  interpellé,  il  dit  : 
«  Dico  potermi  gloriare  di  havere  in  qtiesto  monda  per  sorella  la  più 
virtuosa  giovene  e  la  più  bella  che  habi  in  si  tuio  il  reamc  di  Fran- 
cia^  t  più  casla  che  Diana  fiel  cielo,  e  ne  Parte  di  Minerva  perita 
quanto  Aragne,  e  ne  le  littere  doctissima,  »  Galvano  réplique  que 
Drusillo  n'est  pas  retourné  dans  son  pays  depuis  cinq  ans,  et 
qu'il  sait,  lui  Galvano,  que  cette  jeune  fille  peut  bien  être  bella 
e  virtuosa^  mais  non  casta  e  onesta  :  il  se  fait  fort  de  le  prou- 
ver. Le  roi  le  fait  taire,  mais  dans  le  jour  Galvano  dit  à  plu- 
sieurs qu'il  l'a  carnalmente  conosciuta,  Drusillo  se  retire  et  tombe 
même  malade  (il  n'y  a  pas  de  gageure  proprement  dite).  — 
Galvano  va  s'établir  chez  un  hôte,  près  du  château  de  Victoria, 
et  se  fait  passer  pour  un  marchand.  Il  rencontre  une  vieille, 
nommée  Giletta,  qui  cueille  des  roses  pour  Vaqua  odorifera  de 
Victoria.  Il  se  fait  raconter  inolte  secrète  cose,  et  lui  fait  promettre 
qu'elle  lui  donnera  de  cette  eau.  Le  lendemain,  il  prétend  que 
son  faucon,  qu'il  avait  la  veille  et  qu'il  a  laissé  à  l'hôtellerie,  a 
volé  dans  la  tour  du  château  ;  il  demande  à  la  vieille  de  lui 
donner  ses  habits,  grâce  auxquels  il  pourra  s'introduire  dans  la 
tour  et  reprendre  l'oiseau.  Il  entre,  jette  du  mur  ses  habits  à  la 
vieille,  qui  le  rejoint.  Elle,  le  cache  au  fond  d'une  credentia 
antique  dans  une  grande  salle,  et  s'ouvre  à  une  des  don:(elley 
Aquillina,  qui  dormait  souvent  .wcc  Victoria.  Au  matin,  les 
deux  femmes  tirent  Galvano  de  sa  cachette;  il  dit  qu'il  désespère 
de  retrouver  son  faucon,  mais  parle  de  Victoria,  et  se  fait  décrire 
minutieusement  par  Aquillina  '    la   chambre,  les  images  des 


I.  Dapoi  cJjt  fton  potia  atuiarscne  a  là  (p.  xviij).  Alors,  à  quoi  bon  toute 
cette  machination,  et  la  crédence  ? 


494 


G.    FAHIS 


saints,  la  stature  et  les  traits  de  Victoria,  ainsi  que  ses  vête- 
ments; Aquillina  lui  dit  essere  sùpm  la  popa  sinistra  di  madonna 
Victoria  due  picoli  segni  de  ntgro  colûn\  corne  gramlH  de  migiio^ 
cumum  pila  rossoper  ciascnno.  Revenu  à  Parisj  Galvano  traite 
devant  Drusillo  sa  sœur  de  nuretrice;  furieux,  Dmsiilo  tire  son 
poignard;  le  roi  les  sépare,  mais  Galvano  dit  qu'il  veut  être 
décapité  s'il  ne  prouve  pas  son  dire  ;  Drusillo  en  dît  autant  : 
on  leur  donne  dix  jours  de  délai.  —  Devant  les  juges,  Gaivano 
affirme  qu'il  a  été  introduit  dans  le  château  par  Giletta  et 
Aquillina,  décrit  Fappartement,  les  habits  et  le  corps  de  Vic- 
toria; Drusillo  se  déclare  vaincu,  et  te  roi,  bien  qua  regret, 
déclare  qu'il  mourra  \  —  Heureusement  des  marchands  aver- 
tissent Victoria;  elle  vient  à  Paris  le  jour  du  supplice,  munie 
d'utiû  MUssitm  gtmnto  [d'oral  ^  ^^  ^^^^>  lawrato  di  sua  manOj 
côperîû  di  molît  gioie^  sùpra  il  quale  tra  histariata  la  libcraiime  di 
Susanna  faUamente  Oicmata  di  aduUerio,  la  valuta  dil  quale  cin- 
qiuanîo  scudi  d'are  era  txfinmla.  Elle  arrête  le  roi  %  et  lui  dit 
que  le  sénéchal  Galvano  a  obtenu  ses  faveurs,  ne  lui  a  rien 
donné,  et  lui  a  volé  le  gant  pareil  à  celui-là.  Galvano  appelé 
dit  che  mai  più  ta  vide^  ne  sa  chi  essa  sia,  et,  comme  elle  insiste, 
il  le  jure  avec  serment.  Enfin,  elle  dit  ;  t'  /o  son.*,  chiamata 
per  mnte  Vicîùria^.,  sorella  dil  sfûrtunaîo  Drusillo,  il  qtmk  per  tue 
inique  opère  mandi  a  la  morte.  Galvano  soutient  que  cette  femme 
n'est  pas  Victoria, qu'il  a  possédée.  Elle  demande  quinze  jours 
pour  faire  la  preuve,  et  Drusillo,  après  avoir  embrassé  Victo- 
ria, est  remis  en  prison.  Des  témoins  démontrent  l'identité  de 
Victoria,  et  Galvano,  mis  à  la  torture,  avoue.  On  lui  coupe  la 
langue,  les  mains  et  la  tête  ;  à  Aquillina  et  à  Giletta,  le  nez 
et  les  oreilles;  Drusillo  est  délivré  à  la  joie  générale;  Victoria, 
après  quelques  jours  passés  in  compagna  délia  regina  *,  rentre 
chez  elle  dans  una  dtwata  mrrela, 

1.  Baucchi,  Li  Piamlla  -**  —  Le  frère,  Lisauro,  qui  ne  la  cour 


1*  U  est  surprenant  que   Drusillo  n'en  pro^tc  pa.*t  pour  lUer  chez  sa 


Eti  lui  rappcUnt  k  fameux  trait  de  Trajan. 

m  éuit  dôrtc  manè?  On  ne  nous  Fa  pas  dit,  et,  d*aprés  le  passage 
f»cîit»  il  scniWc  bien  çjall  *  dû  époiiscr  Vieioria. 
i  (ni^  à  Phc  174Î*  t  iSoi).  Rmidta  di  ntmUf  M  P.  AUm- 


LE   CYCLE   DE  LA    ft    GAGEURE    *  495 

pour  aller  à  un  tournoi»  où  il  vainc  un  duc,  Francatrippe,  qui, 
par  dcpit  de  sa  défaite,  devient  son  ennemi.  Comme,  en  buvant, 
on  médit  des  femmes,  Lisauro  vante  sa  sœur;  le  duc  se  fait 
fort  de  la  séduire  ;  chacun  gage  sa  t€te,  le  roi  garantissant  le 
pari.  Le  duc  arrive  au  château,  ne  réusssit  pas  à  voir  Fiordeligi, 
mais  fait  causer  la  nourrice  :  sans  la  corrompre,  comme  ailleurs, 
mais  en  feignant  de  douter  de  la  beauté  de  la  jeune  fille,  il 
apprend  que  Fiordeligi  a  un  neo  turissimo  entre  les  seins,  un 
autre  sur  le  ventre'*  —  Il  revient^  Lisauro  est  confondu  et 
condamné  â  mort*  Fiordeligi  est  avertie  par  la  fée  Morgaiie  % 
qui  lut  donne  une  pantoufle  d*or  ornée  de  pierreries.  Elle  va 
à  la  cour  et  accuse  le  duc,  ayant  eu  ses  faveurs,  de  lui  avoir 
volé  Tautre  pantoufle.  Le  duc  jure  qu*il  ne  Ta  jamais  vue;  elle 
se  nomme.  Le  roi  lait  décapiter  le  duc  et  rend  ses  honneurs  à 
Lisauro  (pas  de  mariage), 

3,  Contes  populaires,  a)  L,  Gonzenbachj  St\i}ianische  Mâr- 
chen^  1870,  t.  I,  n^  7,  J>j  deux  enfants  du  prince  de  Monulmne. 
—  Le  jeune  prince,  qui  a  été  élevé  avec  sa  sœur  dans  une  touri 
arrive  dans  une  ville,  est  aimé  du  roi,  jalousé  d'un  ministre- 
G>mme  il  vante  sa  sœur,  le  ministre  gage  de  la  séduire  :  le 
perdant  sera  pendu.  Le  ministre  ne  peut  même  savoir  où  elle 
est  ;  mais  une  ancienne  nourrice  de  la  jeune  fille  parvient  à 
pénétrer  auprès  d'elle,  rhabille,  et  voit  sur  son  épaule  un  signe 
avec  trois  che%-euK  d*or  tressés  avec  un  fil  ^  Elle  lui  prend 
son  anneau.  Le  frère  s'avoue  vaincu,  et  demande  seulement 
huit  jours  de  répit.  Il  envoie  un  serviteur  tuer  sa  sœur^  :  celle- 
ci  comprend  ce  qui  est  arrivé.  Elle  prend  tous  ses  joyaux,  part 
avec  le  serviteur  (cf  Gmllaume  de  Doit)  \  et  se  fait  faire  une 
sandale  magnifique.  Le  jour  du  supplice,  elte  arrête  la  voilure 
du  roi,  et  accuse  le  ministre.  Celui-ci  est  pendu,  et  le  roi 
épouse  la  jeune  fille» 


K  En  outre,  il  dérobe  une  lettre  de  Fiordeligi,  dont  il  contrefetit  récriture 

I  un  billet  obscène. 

a*  Morgjne  protège,  on  ne  sait  pourquoi,  le  frère  et  la  sœur,  ei  a  déjà 
dônnè  des  il  mie*  au  frère, 

5.  tl  esi  clair  qu'elle  devait  les  couper, 

4.  Il  Jevait  rapporter  un  flacon  de  son  sang  \  Il  donne  au  prince  du  sang  de 
poules. 

%  ■  Elle  est  conseillée  par  le  chapelain  q«i  a  élevé  les  deux  enfants. 


49^  û.  PAftts 

i)  G-  Pitré,  Fmbt,  mvdktfmccmm  popsHan  smitMi^  ^àkxuMtT 
i87>,  I*  D,  n*  txxv«  La  Siimh.  —  Gioseppe,  fils  de  iiiir- 
chaod,  est  secréttire  do  roi  de  Ponugal,  et  se  ait  remirquer 
par  sa  belle  écriture  (cf.  EË^tmia)  ;  le  roi  d'Espigtse  le  donwde 
à  SX  a>ar.  Il  prend  congé  de  sa  sœur  et  emporte  son  portrait. 
Le  àracckre  du  roi  dTspagoe,  (alonx  de  Gmseppet  pêsie  asi  roi 
dece  portiaiE  que  hiîse  le  jeone  homme.  Le  roi  voit  le  portrait, 
ladmire»  et  Giiiseppe  loi  dit  que  cGst  limage  de  sa  sœur»  dont 
3  loue  ta  beauté  et  la  chastieté  ;  mais  le  hra£dere  affinne  qall  a 
criitena  s&  faveurs.  Dètnetiti,  et  gageure  :  le  perdant  sera  déca- 
pité* Le  brûiciere  vîeoi  à  Palerme  (x^),  et  appresd  qœ  nul 
n'entre  chez  la  sœur  de  Gîoseppe.  H  rencontre  uoe  vidUe  qui 
lui  promet  de  Taider.  Elle  se  fait  reocvoîr  par  une  noît  d'otage, 
découvre  la  jeune  fille  pendant  son  sommeil,  et  voit  qu'elle  a 
smprû  la  spmiiA  étitta  tri  pila  cornu  si  fuiiiri  tri  j^a  ^ora;  die 
les  coupe  avec  ses  ciseam.  Le  rot  donne  à  Gtuseppe  sis  mob 
pour  fitstiârr  sa  sœur,  et  le  met  en  pcison*  Giuseppe  enroîe  qm 
lettre  À  la  jeune  fille  :  elk  vend  tout  son  avoir,  et  &si  bine  une 
botte  en  or  incrustée  de  piorerics.  Elle  accuse  le  hrmàin  de 
ravoir  goimtA  et  de  lut  avoir  volé  1  autre  botte.  H  proti^te  qui] 
ne  11  connaît  pas.  H  est  pendu^  et  le  roi  ^ocse  k  jeune  fille. 

c)  A.  de  Gubemads,  L£  Nmjdiim  ii  Smia  SÈ^mm  ÇTurin, 
1869),  n*  X.  //  gumUa^mo^  —  D  s'agit  de  deux  orphelins,  fils  et 
fiOe  de  rot.  La  sœur  tùptfjt  soo  frère  à  voir  te  monde.  Il  vai  la 
vAkét  Porto^» devient  sansèmamt  du  roi.  Le  iracâin  (écuy«^) 
rjoaase  d^tdoJâtric,  a  cause  d'un  portrait  qu'3  hat^.  Il  dit  qoe 
i£*esr  le  portrait  de  sa  sœur»  que  pefsoone  n'a  jamaîs  vue*  Le 
hrmçkn  affirme  qull  a  mangé  ti  œmchi  a^cc  elle.  Le  fr^iredentiiidc 
b  pirave^  et  ei^age  a  tto  ;  le  délai  est  de  qattce  îoiiii.  Le 
èracden  va  à  k  tour  ou  vit  k  |cune  fiOe,  ne  peut  y  pàiécrer; 
One  vieille  lui  apprend  qu'elle  a  un  mo  i  dnàite,  des  boudes 
d*or  et  un  fennaîl  de  grenat  :  il  l^t  kire  des  bijoux  pareils,  et  les 
rapport  comme  preuves.  Le  frère,  condamne,  obtient  quatre 
foQfs  de  répit.  D  va  trouver  sa  sceur,  l'accable  de  reproches, 
revient  à  k  cour.  Bk  se  kit  ktre  un  gant  d'or,  suit  soo  firère, 
r*r  !tr  )ourdu  supplice,  arrétaitt  k  mt»  accuse  k  hraoÛTr  de  lui 
:  vole  le  gant  pareil  (après  avoir  obtenu  ses  kvesis  ?).  D  k 
om  ^;  abfs^  eUe  montre  qu^elk  a  été  calomniée;  k  naitie  est 


I 


{ 


1.  Mtfele 


tieên  4B^dédacBer««ciri 


LE  CYCLE    DE  LA    «    GAGEURE    »  497 

penJu,  et  le  rai  addpte  les  deux  orphelins  (pas  de  mariage). 

d)  V.  Imbriani,  La  NiWêlîaja  fiomttina  (Ltvourne,  1877), 
n*  XXXII,  Im  fwvella  dd  signor  Gimjannidi  ComtantitiopoU.  —  (Pré- 
histoire assez  absurde  et  très  longue.)  Giuseppe  envieux  de 
Giovanni  se  vante  sponLinémentj  au  café,  de  passer  dix  minutes 
avec  la  femme  que  Giovanni  vient  d'épouser'.  Il  engage  sa 
tète  :  le  mari  accepte,  et  on  en  dresse  acte  devant  la  police. 
Giûvatini,  suivant  les  condiiiuns  de  k  gageure,  quitte  la  ville, 
Giuseppe  erre  en  vain  devant  la  maison  toujours  close  de  la 
jeune  femme.  Une  vieille  lui  offre  son  aide:  elle  se  fait  admettre, 
en  se  disant  soeur  du  mari  ;  elle  dessine  la  chambre,  y  prend  un 
Joyau  prédeux,  et  coupe  une  touffe  de  cheveux  sur  la  nuque 
de  la  femme  de  Giovanni  (pas  de  signe).  Giuseppe  porte  le 
dessin,  le  joyau  et  les  cheveux  à  la  police,  Giovanni ^  d  son 
retour,  est  arrêté,  et  va  mourir.  Sa  femme  l'apprend,  fait  faire 
une  pantoufle  magnifique,  et  accuse  devant  les  juges  Giuseppe 
de  lui  avoir  volé  l'autre  (nt  viol,  ni  faveurs),  Giuseppe  dit  qu'il 
ne  Ta  jamais  vue.  Elle  se  fait  connaître;  son  mart  est  délivré,  et 
Giuseppe  décapité,  ainsi  que  la  vieille. 

e)  J.  B.  Andrews,  Cûnks  menîonaîs  (Romania^  t*  XI,  p.  415)- 
—  (Préhistoire.)  Un  mari  part  pour  un  voyage^  Tun  de  ses  amis 
parie  contre  lui  une  somme  d'argent  qu*il  séduira  sa  femme.  Il 
apprend  d'une  femme  de  chambre  qu'elle  a  une  fraise  sur 
Tépaule.  Le  mari,  de  retour,  paie  le  prix  du  pari,  et  accuse  sa 
femme  en  justice,  A  son  tour,  elle  cite  devant  le  juge  son  pré- 
tendu séducteur,  en  lui  reprochant  de  lui  avoir  volé  une  pan- 
toufle. Il  jure  ne  Tavoir  jamais  vue.  Elle  raconte  tout^  et  il  est 
condamné  à  la  prison* 

y) G,  Pitre,  ouv.  dtéj t.  Il,  n^LXXiiL £n/aWrt?irf3.  — (Préhistoire: 
un  père  est  cause  que  sa  fille  est  exposée  ■  un  roi  la  recueille  et 
réponse,)  A  l'étranger  ce  roi  gage  contre  un  cavalieri  que  sa 
femme  Ervabianca  lui  restera  fidèle.  Le  cavaïkri  va  à  Palerme, 
se  promène  en  vain  devant  la  maison;  une  vieille  à  qui  il  se 
confie  se  fait  passer  pour  une  parente  de  la  reine,  obtient  d*être 
logée  chez  elle,  voit  son  corps  et  un  MHssinm  neu  sur  Tépaule 


1.  Seuls  dans  celte  série  (cf.  69»  le  corne  d'Imbrianî  ut  b  suivant  mettent 
en  seine  deux  époux. 

nem^niM,  XXXil 


P 


498  G«  wàâa 

coupe  avec  des  àsi^az  ti  piliddm  qot  j  soot,  m  Imi 
Ma  gakoi»  qui  \m  porte  au  raL  Cdai-d  vient  à  Pakmx^' 
enmène  m  fenuxie  ea  vcniare  sur  k  Mumi  PUUrimmm  et  la  laisse 
li^  pojgnarffe.  Ud    mèdcds   la  leaieille   et  la  sc%iic;  eo 
Tabseoce  du  médecin,  um  esdive  Ali,  qui  a  été  ndbaté  par 
Ervainafica,  tue  une  ftlletie  coucbée  avec  elle;  à  scm  rèreil, 
ErvaUagica  s'enitiit.    Le   méderin^  revenu^  k   poursuit  avec, 
rescbre  ;  îk  arrireot  dans  xm  palak  d^eft,  oà  sont  aussi  l^^ 
père  et  le  mari   repentants^  qui  cberchent  Ervabianca.    Une 
lampe  magique  raconte  devant  tn%  toute  I*htsiotre  de  la  fçttne 
femme,  qui  e^  endormie  dans  le  même  palais.  RéconcilUdon 
générale  ;  Tescbve  est  écartelé. 

if)  G.   Fînamore^    Tradi^om   pofoUri  ahu^est  (Landano, 
i88a),  I,  n'  x%xm  (très  alceté). 

A)  K.  Si  m  rock,  Dmtscbt  Mirchm  (Stuttgan,  18^4),  n"  jï-  — 
La  sœur  engage  le  frère  à  aller  à  la  cour  ;  Il  un  ministre,  qui 
envie  sa  &v eur,  lui  dît  quïl  va  dans  son  pays  ei  se  Eût  fort  de 
séduire  sa  sœur.  Ib  g^igent  leurs  biens  et  leur  vie.  Le  ministre 
arrive  à  la  ville  où  demeure  la  jeune  fille^  mats  ne  parvient  ni 
à  entrer  chez  elle,  ni  a  corrompre  ses  servitcuis.  U  voit  chez  un 
orfèvre  une  bague  d'elle  en  réparation,  et  s'en  &if  faire  unei 
pareille  (cf.  le  conte  de  Gubcroatis,  c);  pub  il  apprend  d*ane 
sage-femme  que  b  jeune  fille  a  une  violette  entre  les  setns  \ 
Muni  de  ce»  preuves,  il  convainc  les  juges  du  pari.  Le  frère 
demande  un  répit^  va  chez  lut^  et  bisse  à  sa  sœur,  sans  b  voir^ 
une  lettre  où  il  Taccuse  de  sa  mort.  Elle  fait  taire  avec  tous  j 
loyaux  un  gant  magnifique,  arrive,  et,  dans  le  conège  du 
supplice,  que  mène  le  ministre,  coupe  b  voiture  du  roi-  Imer- 
pellce^  elle  accuse  le  ministre  de  lui  avoir  volé  un  gant  (pas  de 
viol,  ni  défaveurs)*  Il  dit  ne  Tavoir  jamais  vue  ;  elle  se  nomme  ; 
il  est  brûlé  en  place  du  frùrt%  auquel  on  rend  ses  hoaneurs 
(pas  de  mariage). 


I .  tt  cftipirne  un  moyen  bien  pea,  vrabembUblc  .  il  prétenil  dicfcher  un 
rcfn^dc  pour  an  signe  que  sj  allé  a  au  raenton  i  h  vie  U  le  Itu  parle  éc  ces 
lOTM  4e  ligules»  et  àécm  A  cette  occasion  celui  de  ïa  jeune  fille. 


LE    CYCLE    DE    LA    «    GAGEURE    » 


499 


B*  :  l'hèroïke  est  la  fe^îme  du  parieur; 

ELLE  s'habille  EN   HOMME;   ACCUSATION  DE  V[OL- 

Noos  abordons  des  groupes  successifs  qui  ont  pour  trait 
carictérisiîque  que  la  femme  s  habille  en  homme;  dans  h 
plupart  des  versions,  elle  découvre  la  vérité  par  un  autre 
moyen  que  dans  B*  ;  mais  il  existe  une  version  intermédiaire, 
B%  où  elle  l'accuse  encore  de  lui  avoir  fait  violence* 

Martuscrii  de  Tours  468,  î°  165  v".  —  Une  dame  était 
renommée  pour  sa  grande  valeur*  Et  comme,  devant  le  roi,  les 
chevaliers  médisaient  des  femmes  (cf,  Batacchi,  R'hi),  on  en 
vient  à  parler  d'elle.  Un  des  assistants  dit  :  <c  Je  gagerai  ma  terre 
que  d'ici  à  quinze  jours  je  ferai  d'elle  ce  que  je  voudrai,  et  je 
prouverai  mon  succès  par  de  bons  témoignages,  îï  Le  mari  le 
démentit,  et  gagea  aussi  sa  terre.  L*autre,  allant  au  château ^  ne 
put  entrer,  mais  il  séduisit  par  fraude  une  demoiselle  de  la 
dame,  qui  vola  et  lui  remit  un  anneau  que  le  mari  avait 
donné  à  sa  femme;  en  outre,  elle  lui  révéla  que  la  dame  avait 
un  seing  à  la  cuisse.  Et  revenant,  il  dît,  en  donnant  ces  indices, 
qu'il  avait  gagné.  Le  mari  l'entendant,  confus  et  trop  crédule, 
se  retira,  et  ayant  conduit  sa  femme  à  son  tnanoir,  la  jeta  à 
Peau.  Elle  se  sauva,  transforma  sa  robe  en  vêtement  d*homme, 
arriva  à  une  abbaye  de  moines,  s'y  fit  coovers,  et^se  conduisant 
de  façon  édifiante,  fut  donnée  au  roi  par  Tabbé  comme  aumô- 
nier  (au  sens  étymologique),  office  qu'elle  remplit  volontiers  et 
très  bien*  Un  jour,  distribuant  Taumône,  elle  vit  entre  les 
pauvres  son  mari,  qui  s'était  enfui  ;  elle  le  prît  à  part,  lui  dit 
de  bonnes  paroles  et  lui  demanda  son  histoire.  Celui-ci  la  lui 
raconta,  et  lui  confia  que,  ce  qui  lui  faisait  le  plus  de  peine,  c'était 
de  s'être  conduit  si  cruellement  envers  sa  compagne.  Alors  elle 
lui  raconta  aussi  ce  qui  lui  était  arrivé.  Puis,  ayant  obtenu  du 
roi  b  permission  de  retourner  dans  son  pays,  et  ayant  trouvé 
[pour  son  mari?]  un  cheval  et  des  armes,  elle  revint  [à  la  cour 
du  premier  roi]  en  convenable  habit  de  femme  et  appela  ce 
chevalier  de  trahison,  l'accusant  de  lui  avoir  fait  violence.  Il  nia 
par  serment  l'avoir  jamais  vue.  Alors,  s*adressant  au  roi  : 
<A  Faites-moi  donc  justice,  »  dit-elle,  (t  puisqu'il  m'a  calomniée  et 
que  par  son  mensonge  mon  mari  a  perdu  sa  terre  et  j*ai  été 


500  G,   PARIS 

réduire  à  TexiL  »  Le  traître  fut  condamné  à  être  pendu,  h  terr^ 
du  mari  lui  fut  rendue  [avec  œlle  du  traître],  et  elle  retourna 
avec  lui  dans  leur  maison. 

B^   :  L* HÉROÏNE  EST  LA  FEMAIE  DU  PARIEUR; 
ELLE  s'habille  EN  HOMME;   AVEU  SPONTANÉ  DU  TRAÎTRE. 

Dans  tous  les  récits  qui  suivent,  il  ne  s*agic  plus  d'accusatîan 
fausse  portée  contre  le  traître  :  c'est  lui-même  qui  par  bravade 
avoue  son  crime,  en  s*en  vantant»  devant  la  femme  déguisée  en 
homme;  dans  tous,  le  mari  a  donné  ordre  de  tuer  sa  femme,  ce 
qui  n  a  pas  été  exécuté;  dans  tous,  il  semble  bien  que  le  traître 
arrive  à  voir  et  à  voler  la  femme  en  se  faisant  porter  chez  elle 
dans  un  cotfre  *  ;  dans  tous,  elle  s'est  habillée  en  homme,  elle 
arrive  à  une  haute  condition  sociale,  et  s'en  sert  pour  faire 
éclater  la  vérité. 

Ce  groupe  se  divise  en  deux  sous-groupes,  dont  le  second^ 
plus  moderue,  est  caractérisé  par  le  fait  que  la  femme  prend  le 
mari  à  son  service  et  le  ramène  dans  sa  maison,  devenue  celle 
du  traîtrej  où  celui-ci  raconte  l'histoire,  tandis  que  dans  le 
premier  sous-groupe  la  scène  a  lieu  à  la  cour  d'un  souverain 
étranger.  Ce  premier  sous-groupe  est  intéressant  en  ce  qu'il 
contient  les  deux  œuvres  les  plus  célèbres  du  cycle,  la  nouvelle 
de  Boccace  et  la  tragédie  de  Shakspeare. 

B  5  a  ;  Avm  spontané  du  traître  à  la  cour  d'un  roi  étranger. 

Cette  forme  se  trouve  d'abord  dans  deux  nouvelles  ita- 
liennes, Tune  anonyme,  Tautre  de  Boccace  {Décanter.,  Il,  9)- 
La  nouvelle  anonyme,  imprimée  d'abord  par  Lami  diaprés  un 
manuscrit  du  xiv'^  siècle  %  est  donnée  par  lui  comme  roriginal 


K  Toutefois  ce  trait  manque  daos  deux  versions  (conte  hongrois,  conte 
norvégien)  du  groiipe  B^b,  et  on  peut  croire  que,  daos  B^ba  (Wolff),  il  provient 
de  Bîâ.  On  le  reirouve  encore  dans  B^bj  et  B^bé  (conte  roumain,  conte 
des  Zigmner  de  b  Boukhovine),  où  peut-être  aussi  il  est  interpolé* 

2.  Dans  les  Novtllt  hUirarif  puhbUcaU  in  firenie,  t.  XVIl  (1756).  Elle  a  iié 
réimprimée  dans  V  Appendice  ait  iîlmîmiioue  siôrica  dd  Boccûccm  uriHû  d/t  M\ 
Manni  (Milan,  ta 20),  et  dans  Dut  nnvelk  anti£k€  mnUrwri  aï  DecmttirûHi  dit 
Boccacch  (Gènes,  18  59,  25  exemplaires). 


LE  CYCLE  DE  LA    «   GAGEURE    »  5OI 

que  Boccace  aurait  iravestito;  c'est  aussi  l'opinion  de  Zambrini  \ 
tandis  que  M.  Landau  est  porté  à  croire  que  c'est  l'anonyme 
quia  imité  Boccace.  Plus  réa'mmcnt,  M.  Ohle,  Tauteur  du 
travail  de  beaucoup  le  plus  approfondi  qu'on  ait  consacré  à 
notre  cycle  (mais  à  une  partie  seulement')»  ^  cherché  à 
démontrerque  Boccace  avait  travaillé  uniquement  sur  la  nouvelle 
anonyme.  Mais  son  raisonnement  a  une  base  fort  contestable,  à 
savoir  que  le  récit  italien  aurait  pour  source  les  romans  fran- 
çais (Comte  de  Poitiers,  Violette),  qui  appartiennent  en  réalité  à 
un  autre  groupe  du  cycle;  en  outre,  il  ne  signale  entre  les 
deux  nouvelles  qu'une  seule  .  différence  (qui  indiquerait  la 
priorité  de  l'anonyme),  et  il  en  néglige  d'autres,  au  moins 
aussi  importantes;  enfin  il  omet  le  livret  allemand  >.  Ce  livret, 
imprimé  pour  la  première  fois,  avant  1489,  \  Nuremberg,  doit 
être  comparé  aux  deux  nouvelles,  auxquelles  il  ressemble  de 
fort  près^.  Il  &ut  comparer  ces  trois  versions,  A  (nouvelle 
anonyme)»  B  (Boccaa*),  I)  (livret  allemand),  en  les  supposant 
indépendantes  et  en  cherchant  s'il  y  a  entre  telle  et  telle  un 
rapport  de  dépendance.  Pour  le  faire,  nous  diviserons  le  récit 
en  épisodes  successifs. 

L  Le  Pari.  —  Il  s'agit  de  marchands  italiens  venus  à  Paris  dans 
ABD\  ils  font  la  gageure  après  une  fête  {A),  après  un  joyeux 
repas  (BD).  —  Les  parieurs  sont  :  un  i^imnine  di  (Jenova  et 
therico  d'Alessandria  (A),  —  Hernabô  I-omcllin  da  (îenova  et 
Ambrogiuolo  da  Piacen/a  (H),  Ambrosius  von  (}enay  et 
Johann  von  Florcntz  (/J).  -  Dans  Hl),  ils  commencent  par 
dire  que  leurs  femmes  se  donnent  du  bon  temps  \  la  maison  et 
qu'ils  auraient  tort  de  n'en  pas  faire  autant.  -  Li  gageure  est 
de  10.000  florins  d'or  (/f),  de  i  .(K)o  exposés  par  le  galant  contre 


1.  Opère  volgari  a  stampa,  4"  éd.  flifilo^nc,  1H84),  col.  702. 

2.  Shakespeare  s  Cymbrline  utid  seine  nwuimuhn  Vorhtùffr  riîcrlin,  1890). 
).  Il  est  vrai  que  rautetir  ne  prétciul  étuJirr  ({iic*  les  antécédents  romam  de 

Cymbeline;  mais  —  outre  que  cette  rrMrii  lion  m  vii  est  fAcheuse  —  le  livret 
flllenund  peut  6tre  considéré  connue  italien  et  forme  vu  tous  cas  un  grou(>e 
avec  Boccace  et  l'anonyme . 

4.  Je  dois  la  communication  de  ce  livre  rare  rr)rné  de  nombreuses  et  très 
amusantes  figures)  A  Tobligeance  de  la  Hililiothèque  royale  de  Berlin.  Il  a  été 
traduit  en  néerlandais,  en  danois  Tet  de  là  en  suédois)  et  en  anglais. 


502  G.   PARÎS 

5 ,000  exposés  par  le  mari  (SD),  Le  délai  est  de  trois  mois  (AÏÏ)^ 
de  quatre  semaines  (D);  le  gabnc  s'engage  dans  AB  à  apporter 
des  signes  convaincants, 

IL  Le  stratagème.  —  Dans  ABD^  le  galant  se  fait  porter  dans 
un  coffre  chez  b  femme^  voit  le  signe  qu'elle  a  sur  le  corps,  et 
prend  des  joyaux  dans  sa  chambre,  —  Dansai,  le  galant  recourt 
tout  de  suite  à  la  vieille;  dans  B,  il  entend  dire  tant  de  bien 
de  la  dame  qu'il  se  convainc  de  la  folie  de  son  entreprise  et 
qu'il  cherche  une  ruse  pour  se  donner  l'air  d'avoir  réussi;  dans 
I),  il  la  salue  sur  le  chemin  qui  la  mène  a  Téglise  \  et  elle  lui 
répond  mit  ^uihm  mit  soïchr  guîcr  gcpcrd  qu*il  se  sent  perdu; 
A  est  évidemment  tronqué;  B  et  D  sont  bien  abrégés  et] 
peuvent  être  indépendants.  —  Il  s'adresse  ad  una  femmitm  che 
facn^a  senngio  aile  donne  et  demeurait  dans  ta  rue,  lui  promet 
cinq  cents  florins;  celle-ci,  l'assurant  qu*il  n'a  pas  de  chances  de 
séduire  la  dame,  lui  promet  de  songer  ;i  une  ruse  (J);  il 
s'accointe  d'une  pauvre  femme  che  molîo  nella  casa  usava  e  a  cm 
i^leva  gran  bem^  non  la  poîindo  ad  alîro  indurre^  con  denari  la  Cûr- 
ruppi  ÇB);  il  fait  d'abord  faire  la  caisse,  puis,  se  disant  qu'une 
vieille  réussit  où  le  diable  échoue,  remarque  au  marché  une 
vieille  fripière,  la  gagne  en  lui  faisant  faire  un  très  bon  marché, 
puis  Tin  vite  à  souper,  lui  parle  de  la  dame  et  lui  propose  de 
Tatder  moyennant  300  florins  (/7).  Ici  encore  les  différences 
peuvent  être  de  l'invention  de  chacun  des  conteurs;  la  version 
â\4  paraît  la  meilleure.  —  La  complice  demande  à  la  dame  de 
lui  garder  la  caisse  trois  jours  pendant  qu'elle  va  à  un  pardon» 
à  trente  mille  de  Gcnes,  où  elle  priera  pour  son  mari;  la  dame 
consent  volontiers  :  au  bout  de  trois  jours,  la  vieille  revient  en 
effet  du  pardon  et  reprend  sa  caisse  (A);  dans  5,  elle  feit 
simplement  porter  la  caisse  dans  la  chambre  de  la  dame,  e 
quivij  conte  sein  alcuna  parie andar  volessi^  la  bwnafetnmina  la 
raccomandè  pet  ulcun  dï^  —  et  de  même,  vegnente  il  ter^o  dl^  ... 
la  huma  femmina  tornè  per  la  cassa  sua  ;  dans  £),  la  vieille  dît 
qu'elle  veut  aller  à  Saint- Jacques,  et  la  dame  lui  donne  un 
florin  qu'elle  offrira  au  saint  pour  son  mari  ;  après  trois  jours, 
elle  vient  dire  qu'elle  est  malade  et  renonce  au  pèlerinage.  H 
semble  bien  que  AD  vont  ensemble  contre  B.  —  Dans  BD,  le 


r.  Cf.  cî*de«sous,  B*bIIlï, 


LE  CYCLE    DE   LA    «    GAGEURE   »  SO3 

lant  reste  trois  nuits  dans  la  chambre,  sans  que  cela  serve  à 
îcn.  Dans  A^  il  la  découvre,  la  voit  nue,  evidc  che  soiîo  la  poppa 
ritta  aveva  un  mo^  après  quoi  il  éteint  la  lumière  (la  dame  se 
trouve  découverte  et  s*étonne,  mais  sans  rien  soupçonner);  pen- 
dant le  jour,  elle  sort,  fermant  la  porte;  alors,  il  prend,  dans 
un  for:iifre^  une  guarnacba^  un  anneau,  une  ceinture  et  une 
bourse,  puis  referme  \tjQr:;ieri;  le  jour  suivant  la  vieille  revient 
(de  trente  milles?  c'est  bien  vire).  Dans  B,  il  sort  k  première 
nuit,  allume  une  luniÊêre,  voit  la  chambre,  les  peintures,  etc, 
(cf,  les  versions  des  autres  groupes),  la  découvre,  et  voit  qu'elle 
avait  um  {segnale]  soîfo  la  stnisîra  poppa ^  ciù  era  un  neo^  dinîùrm 
âlqualeeranoalqnanîipehi^i  biondi conte aro  *  ;  puis,  se  promenant 
par  la  chambre  à  loisir,  il  prend  une  bourse,  une  gttarnacha^  un 
anneau  et  une  ceinture  :  e  in  qimîa  mankra  fea  dm  mtti.  Dans 
D,  il  se  lève  la  première  nuit,  voit  ouvert  le  coffre  où  la  dame 
serre  ses  bijoux,  prend  une  bourse  de  perles,  une  ceinture  d*or 
et  un  anneau  :  la  lime  Téclairant  et  comme  il  faisait  chaud,  la 
dame  avait  mis  hors  du  Ht  son  bras,  où  elle  avait  dn  schwart^e 
DoUn  luerîiel  der  si  si^r  scht^mî;  on  ne  parle  pas  des  deux  autres 
nuits  :  la  vieille  reprend  le  coffre  le  troisième  jour,  B  et  D 
semblent  primitifs,  à  cause  de  rinutilité  môme  de  ces  incidents  ; 
A  a  pu  arranger.  —  Dans  B  et  £>,  la  dame  ne  couche  pas  seule, 
mais  avec  un  petite  fille  (B),  ou  avec  la  servante  (D)  ^. 

in.  La  victoire  du  traître.  —  ^  :  Le  galant  essaie  d'abord  de 
persuader  au  mari  de  ne  pas  ébruiter  Taffaire,  mais  veut  que 
tous  les  témoin  s  du  pari  soient  convoqués.  Alors,  il  dit  comment 
ta  chambre  est  peinte;  il  montre  les  objets,  mais  le  mari  dit 
qu'il  peut  les  avoir  achetés,  et  avoir  trouvé  Tanneau  que  la 
dame  aura  perdu;  mais  il  parle  du  nm  :  le  mari  s'avoue  vaincu 
et  paie.  —  B  ;  même  récit;  Bernabo  dit  qu'Ambrogiuolo  peut 
avoir  appris  les  êtres  de  la  maison  par  les  serviteurs  et  s*étre 
procuré  les  joyaux;  mais  il  se  rend  lorsque  le  galant  décrit  le 
neû  et  les  sii  peîw^^i  d'oro.  —  /)  :  le  galant  prend  le  mari  à  part 
(cf-  ^)et  lui  montre  les  joyaux;  il  demande  d^autres  signes,  il 
parle  de  la  Daten  wertiel;  Johann  se  pâme;  Ambrosius  lui  dit  : 


ï.  Cf.  B'a4,  B^bi,  B'bja,*. 

2.  Dans  B  1&  galant  se  demande  s'il  ne  profitera  pas  dç  Toccasion  ;  maïs  il 
n'ose  pas. 


s 04  G.    PARIS 

«£  Sois  mon  homme!  «  Il  paie  et  se  promet  de  tuer  sz  femme 
li  semble  bien  qu'il  y  ait  un  lien  direct  eiitre  A  et  D, 

rV<  La  vmgtancedu  mari. — A  :  Le  mari  revient  à  Gènes»  voit 
sa  femme  sans  lui  parler  de  rien,  et  lui  dit  d'aller  à  [eur  maison 
de  campagne  préparer  un  repas  pour  des  hôtes  qiiHI  attend;  il 
la  rejoint  sur  la  route,  et,  dans  un  endroit  isolé,  lui  reproche  sa 
trahison  ;  elle  se  défend,  mais  quand  il  lui  parle  du  nro  qu'a 
décrit  te  séducteur,  elle  ne  peut  que  dire  qu'elle  s\y  comprend 
rien.  Le  mari  lui  dit  de  suivre  un  serviteur,  auquel  il  a  secrè- 
tement ordonné  de  la  conduire  i  la  mer  et  de  t'y  jeter  après  lui 
avoir  ouvert  les  veines;  mais  quand  le  serviteur  révèle  à  la  dame 
Tordre  qu'il  a  reçu,  elle  proteste  de  son  innocence  et  obtient 
de  lui  qu'il  Tabandonne  sur  un  rivage  désert,  d*oii  elle  s'éloi- 
gnera pour  toujours,  et  qu'il  prenne  ses  vêtements,  lui  donnant 
les  siens  en  échange;  il  rapporte  au  mari  les  vêtements  de  la 
dame,  comme  preuve  qu'il  a  exécuté  les  ordres  reçus  \  — 
B  :  Bernabo  revient  dans  son  pays,  mais  s^arrête  dans  une 
maison  de  campagne  qu'il  a  près  de  Gênes,  et  envoie  un  servi- 
teur chercher  sa  femme,  lui  ordonnant  dd  la  tuer  en  chemin, 
Quand  le  serviteur  annonce  à  la  dame  Tordre  qu'il  a  reçu  (il 
ne  sait  pas  pourquoi,  mais  son  maître  loi  a  dit  qu'il  serait 
pendu  s'il  n'obéissait  pas),  elle  implore  sa  pitié,  et  obtient  de 
lui  qu'il  lui  donne  son  farsetlo  et  son  cappucm^  et  qu*il  prenne 
ses  vêtements  à  elle  en  témoignage  du  meurtre  ;  elle  promet  de 
disparaître.  —  D  ;  comme  S;  le  mari  dit  au  serviteur  de  lui 
rapporter  les  cheveux  et  la  langue  de  sa  femme,  le  menaçant 
de  le  tuer,  s'il  n'obéit  pas.  La  femme  le  suit  avec  un  agneau 
qu'elle  a  élevé;  elle  lui  dit  :  a  Tuons  l'agneau;  tu  tremperas 
ma  robe  dans  son  sang,  tu  prendras  sa  langue  et  ma  tresse  »», 
et  elle  promet  de  4isparaître,  Il  y  consent,  et  porte  les 
signes  au  mari,  qui  reste  fort  triste.  —  Nous  avons  là  deux 
versions  bien  distinctes  :  A  d'un  côté,  BD  de  l'autre  ;  on  peut 
toujours  croire  que  D  vient  de  B,  avec  changement  et  addi- 
tions \ 


t.  M,  Ohle  remarque (p*  4S-49)  qu*on  a  là  une  explication  towte  nmuretle 
du  travestissement  de  lu  femme.  Nous  reviendrons  sur  ce  poim  :  notons 
seulement  qu^on  scdcmindece  que  ïe  serviteur  devient  sans  habits. 

2*  L*agneau  (chevreau,  lièvre,  ctc)  est  un  lieu  commun  d'Iustoires  ana- 
logues. 


LE    CYCLE    DE    LA 


GAGEURE 


V.  Les  m^entures  dt  la  femme.  —  vf  :  Un  vaisseau  de  cwsaîi 
arrive  vers  le  rivage  ;  le  ùipitaine  interroge  la  femme  habillée 
en  homme  et  la  recueille  ;  elle  gagpne  son  amitié  par  ses  talents 
de  secrétaire  et  de  serviteur.  Le  vent  pousse  le  navire  in  Sarra- 
cinia  a  uno  porto  d'unû  terra,  dme  ahifava  il  grande  Cûne  ;  on  les 
prend,  mais,  comme  c'est  un  jour  de  grande  fête,  on  ne  les  tue 
pas;  le  Can  invite  même  le  capitaine  à  souper,  et  il  est  si 
charmé  de  la  bonne  grâce  du  jeune  page  qui  sert^  qu*il  le 
garde,  au  grand  chagrin  du  GVpitaine,  qui  Ta  donné  pour  son 
fils.  Le  Can  le  fait  peu  après  maliscako  dune  grande  ville'. 
—  B  :  La  femme  se  procure  d'une  vieille,  dans  une  vilktta  vicina^ 
ce  dont  elle  a  besoin  (?),  raccourcit  \tfarsctio{ï),  se  fait  des  braies 
avec  sa  chemise,  se  tond  tes  cheveux,  et,  devenue  pareille  à  un 
marinâro,  va  vers  la  mer  où  elle  est  recueillie  par  un  gentilhomme 
catalan,  «  Segner  En  Cararch  »,  capitaine  d'un  vaisseau  (non 
corsaire);  celui-ci  prend  en  affection  le  marinaro^  qui  se  fait 
appeler  Sicuran  da  Finale. 

Segner  En  Cararch  va  A  Alessandrîa  porter  des  faucons  :  le 
sultan  lui  donne  à  manger,  et  voyant  la  bonne  grke  du  page 
qui  te  sert,  le  lui  demande.  Le  page  gagne  la  faveur  du  sultan,  si 
bien  qu'au  bout  d'un  certain  temps  il  Tenvoie  à  Acre'  sur- 
veiller la  grande  foire  qui  s'y  tient  et  où  viennent  des  marchands 
de  tous  pays.  —  D  :  La  femme  se  fait  faire  (?)  des  vêtements 
d*hommej  va  à  la  mer,  et  se  fait  recueillir  par  un  scbifman,  auquel 
elle  dit  s'appeler  Friederich  et  chercher  un  maître;  le  schifman 
prend  Friederich  à  son  service  :  il  porte  des  faucons  au  roi  Stdfan- 
nus  à  Allekeier  (Le  Caire);  les  faucons  ne  voulant  pas  manger, 
le  roi  se  plaint  au  schifman^  qui  dit  qu'ils  regrettent  sans  doute 
Friederich, qui  les  nourrissait;  le  roi  demande  alors  Friederich, 
promettant  de  le  bien  traiter  (en  eff^et,  les  feucons  reprennent 
leur  entrain)  ^  Friederich  plaît  au  roi>  qui  lui  donne  une  charge; 


m 


r-  Qjidle  ville  ?  Celle  où  a  lîcu  b  fôte  est  la  résidence  m&me  du  Can  (voy. 
plus  loin),  qui  sans  doute  éuit  ouverte  aux  chrétiens  pour  cette  fois.  11  y  a  là 
de  la  confusîo». 

2.  Acre  appartenait  aux  Satrasi m  depuis  1297- 

5.  Ce  trait  est  préparé  dans  fî  par  h  mention  des  Jalcmii  peîkgrim  que  le 
capitamc  porte  au  Soudan,  détail  qui  n*a  aucune  raison  d*ôtre,  s'il  ne  conduit 
pas  au  rècii  conservé  dans  D  seulement. 


joé  G-    PAKIS 

plus  tard  il  le  fait  prince  et  lui  remet  mcme  tout  le  gouveme^l 
ment*  —  Ici  encorej  D  peut  à  la  rigueur  venir  de  5  avec  des* 
modifications, 

VI,  La  femme  et  le  îratirt.  —  A  :  A  une  grande  foire  vient  ^ 
Cherico  d'Alessandria;  il  met  pour  enseigne  à  sa  boutique  la 
guarnacba^  b  ceinture  et  la  bourse  volées.  Le  maréchal  les 
remarque  et  Tinterroge  sur  leur  provenance,  Cherico  dit  que 
c'est  une  belle  hbtoire  :  le  maréchal  Tinvite  à  venir  b  lui  dire 
à  son  pabis,  où  il  lui  raconte  tout.  La  dame  voit  alors  de  quelle 
perfidie  elle  a  été  victime,  et  se  promet  de  se  venger.  Elle 
demande  à  Cherico  de  répéter  devant  le  Can  cette  belle  navella^ 
ce  qu'il  feit  volontiers  :  Aîora  ciascun  disse  che  Fera  délie  Mie 
navelle  del  tmndo.  Le  maréchal  demande  à  Cherico  de  venir 
souvent  au  pabis^ qu'il  fournira  de  marchandises^  et  le  fait  sur- 
veiller pour  qu'il  ne  s'en  aille  p^s.  —  B  :  Sicurano,  regardant 
b  foire,  remarque,  dans  le  fandaco  des  Vénitiens,  sa  bourse  et 
sa  ceinture  j  Ambrogiuolo  dit  qu'il  ne  vend  pas  ces  objets,  mais 
qu'il  les  lui  donnera  volontiers,  s'ils  lui  pbîsent;  puis  il  raconte 
non  b  vérité,  mais  le  mensonge  même  qu'il  avait  raconté  au 
mari,  et  comme  quoi  ce  sot  de  Bernabo  a  tué  sa  femme,  Sicu- 
rano  alors  comprend  tout.  Il  goûte  beaucoup  b  ncvella^  et 
emmène  Ambrogiuolo  à  A  lessandria,  où  il  lui  établit  nnfondaco 
profitable,  afin  qu'il  ne  quitte  pas  le  pays.  —  D  :  Le  traître 
Johann  vient  à  Àllekeier  et  met  des  joyaux  en  vente,  parmi  les- 
quels ceux  de  Friederich  :  celui-ci  les  voit,  rinterroge  :  Johann 
raconte  tout,  regrettant  seulement  qu'Ambrosius  ait  tué  sa 
femme  innocente.  Friederich  lui  dit  qu*il  pourra  venir  à  son 
gré  à  b  cour  et  lui  demande  de  lut  garder  ses  joyaux.  —  Ici^  on 
le  voit,  D  est  d'accord  avec  A  contre  B  et  ne  peut  venir  de  B, 

Vn.  Explication  finale,  — ^  :  Le  maliscalto  obtient  du  Can  b 
permission  d'aller  pour  deux  mois  à  Gênes  ;  il  y  apprend  que 
les  affaires  de  son  mari  sont  en  mauvais  point;  il  se  lie  avec  lui, 
et  t'assure  qu*il  fera  sa  fortune  auprès  du  grand  Can.  Il  rem- 
mène et,  un  jour,  dans  b  chambre  du  Can*  foit  raconter  à 
Cherico  b  noi'ella  ;  pub^  ayant  signalé  une  telle  perfidie,  appelle 
son  mari  ;  alors  il  dette  maliscalw  si  .<pogliû  ignudaîo^  e  mos^rô  com' 
ella  era  feminûj  et  dit  :  «  Voilà  mon  mari^  qui  me  crut  mone*  » 
Cherico  demande  en  vain  grâce  :  a  pochidt  sil  mismo  su  un 
carroe  quartarolo,  t  jtmllo  mûrir  a  grande  xntuperia;  les  époux 
retournent  à  Gènes,  où  ils  vivent  heureijx.  —   S  :  Sîcurano 


LE  CYCLE    DE   LA    «    GAGEURE    »  JO? 

trouve  moyen  (?)  de  faire  venir  Bernabô  à  Alessândrî^,  où  un 
ami  de  Sicurano  riiéberge.  Puis^  il  mande  les  deux  hommes 
devant  le  sultan  (auquel  Ambrogiuolo  avait  déjà  raconté  sa 
mwella)i  et  dit  au  sultan  d'exiger  de  lui  la  vérité;  Ambrogiuolo, 
,  terrorisé,  avoue.  Alors»  s'agenouillant,  elle  ouvre  sa  robe  et 
I montre  son  sein  ;  Ambrogiuolo  est  attaché  à  une  potence  et 
enduit  de  miel  ;  les  époux,  comblés  de  présents,  retournent  à 
Gênes.  —  D  :  Friederjch  envoie  à  Genay  un  messager  porteur 
de  lettres  du  roi  invitant  son  mari  à  venir  à  sa  cour;  celui-ci, 
étonné^  vient  à  Allekeier,  Friederich  demande  au  roi  d'inviter 
i  un  repas  deux  aventuriers  du  pays,  Ambrosius  et  le  scbifman 
(?);  le  repas  fini,  il  fait  venir  Johann  avec  ses  joyaux  et  le  prie 
de  raconter  au  sulun  son  histoire.  Il  le  fait,  Ambrosius  croit 
que  le  roi  l'a  fait  venir  pour  le  tuer  en  châtiment  du  meurtre 
de  sa  femme  ;  mais  Friederich  lui  dit  d'avoir  bon  espoir.  Il  sort 
avecle  roi,  et  lui  demande  quelle  punition  mérite  Johann  :  la 
roue  et  la  potence^  répond-il.  Friederjch  fait  rentrer  le  roi  en  lui 
promettant  qu'il  va  voir  une  merveille;  dépouillant  ses  vête- 
mentSj  dûn  gîng  ah  si  Gott  ^esclmffen  bel  fur  den  hlnig  und  die 
gcst  in  den  sal,  und  nichtes  dan  die  scham  mit  dnem  seidmtmh 
kdcckî  kî.  Tous  admirent  sa  beauté;  elle  dit  qui  elle  est;  le 
traître  est  roué  et  pendu;  les  époux  retournent  à  Genay,  où 
leurs  descendants  vivent  encore,  —  Ici  encore,  D  est  d  accord 
avec  A  contre  B,  non  seulement  pour  le  récit  volontaire  du 
traître,  mais  pour  Tapparition  de  la  femme  sans  vêtements. 

Si  nous  résumons  les  résultats  de  cette  comparaison,  nous 
poyoos  toujours  que  D  est  d*accordavecB  contre  A^  mais  quHl 
B*accorde  avec  A  contre  B  en  deux  points  importants  :  i°)  le 
alant  raconte  à  la  femme  devenue  un  puissant  personnage  la 
vérité  et  non  le  mensonge;  i'^pourse  faire  reconnaître,  la  femme 
apparaît  toute  nue  devant  le  roi,  le  galant  et  le  mari.  Il  s'en 
suit  que -4  BD  sont  trois  dérivés  d*un  même  original  perdu  ^ 
—  Mais  B  ti  D  ont  probablement  une  source  intermédiaire 
commune,  et  cette  source  et  A  représentent  deux  dérivés  paraU 
léles  de  cet  original.  Aucune  des  trois  versions  ne  provient  d'une 
des  autres.   Nous  pouvons  essayer  de  restituer  Toriginal  avec 


] .  [C'est  à  cette  conclusion  que  s*en  dent  G,  Paris  à^n^  ses  notes  de 
cours;  mais  dans  la  MisuUama  di  studj  çritkitdUa  in  ^tiort  di  Ariurg  Gmj 


S08  G.    PARIS 

les  traits  communs  soit  aux  deux  rédactions  A  et  BD>  soit  à  AB 
ou  â  AD;qn2Lnd  A  et  5 Z) diffèrent,  Toriginal  peut  avoir  été  con- 
forme soit  à  A^  soit  à  BD;  parfois  une  seule  des  versions  paraît 
avoir  conservé  la  forme  de  ToriginaL 

Entre    deux   marchands  italiens    se  trouvant   à   Paris ^  un 

(p.  Mo),  il  pré*:îsç  davaouge  :  iîoq  content  de  dire  que  *  A  BD  ^nt  trois 
dérivés  d'un  même  ongïnal  perdu  n,  îl  admet  ce  rapport  : 


A 

^  A 

3  D 
et  c'est  en  suivant  ks  règles  que  lui  impose  ce  classement  qu*ïl  tente  une 
restitution  de  l'originaL  Malheureusement  l'analyse  comparée  des  trots  textes 
que  nous  venons  de  reproduire  d*après  les  cahiers  de  cours  acheminait  le  lec- 
teur vers  la  première  combinaison  ;  c'est  la  première  combinaison  seule  qti*cMe 
voulait  justifier,  et  dans  son  article  delà  MisuUanea^  G.  Fans  n'a  pas  dit 
cipressément  potirt^uoi  il  y  a  renoncé  (la  noce  j  de  la  page  1 14  est  à  d'autres 
dm,  et  ne  sert  pas  à  fonder  k  classement  nouveau).  Pour  retrouver  les 
motifs  qui  ont  déterminé  G.  Paris  à  le  proposer,  tl  faut  esamioer  sa  restitu- 
tion de  Toriginal,  et  rechercher  s*îl  n*y  a  pas  certains  traits  communs  k  B  D 
coiïtre  ^-1,  qu'il  ait  re jetés  de  celte  r^titution  comme  non  primitifs.  Nous  n'en 
voyons  que  deux^  puisque  G.  Paris  regarde  comme  «  possible  »,  mais  non 
comme  certain  (voy.  ci-après,  p.  510,  n.  î)»  *î"c  ^ -^  altèrent  la  versbn  origi- 
nale lorsqu'ils  s'accordent  à  raconter  que  le  traître  expose  parmi  ses  marchan- 
dises les  objets  dérobés.  Voici  ces  deuit  traits  i  d'aborJ,  dans  sa  restitution  de 
la  source  première.  G,  Paris  admet  que  Théroîne  couche  seule  dans  h 
chambre  où  s'introduit  te  galant  ;  selon  BD,  elle  y  couche  avec  une  petite  fille 
(ou  une  set  vante),  et  si  G,  Paris  a  rejeté  cette  donnée,  c*est  sans  doute  qu'il 
y  a  vu  une  invention  inutile,  propre  à  la  source  commune  de  ^0.  £n  second 
lieu,  il  n*a  pas  introduit  dans  sa  restitution  de  roriginal  ce  trait,  commun  à 
BD,  que  le  galant  passe  trois  nuits  dans  la  chambre  de  la  femme  :  il  semble 
donc  bien  qu*il  ait  renoncé  à  son  opinion  première,  qui  était,  comme  on  a  vu 
(p*  PSX  <3«^  ^  Irait  devait  être  primitif  «  à  cause  de  son  inutilité  même  ■,  — 
Est-ce  bien  sur  ces  observations  que  G.  Paris  fondait  son  nouveau  classement? 
Comme  iJ  serait  plusque  téméraire  de  l'affirmer,  nous  avons  pris  le  parti  de  ne 
rien  changer  à.  ses  notes  de  cours,  jusquVu  point  où  elles  rejoignent  Tarticle 
de  la  MiK^lîantu  ;  mais,  comme  cet  anîcïe  leur  est  postérieur  et  que  nous 
sommes  tenu  de  le  suivre,  il  nous  a  semblé  néoessaire  d'avertir  par  cette 
note,  que,  si  G.  Paris  avait  publié  son  étude,  il  aurait  assurément  modifié 
Tanalyse  dâ  trois  versions  que  l'on  vient  de  lire*  —  J,  B.], 


LE  CYCLE   DE   LA    «    GAGEURE    >  509 

Génois  et  un  Florentin  (D)S  s'en^jge  un  dcbat  ^ur  Li  venu 
des  femmes  et  en  pomculier  de  Li  femme  du  Génois  :  le  Floren- 
dn  gage  nne  certaine  somme  de  dori::s  d'or  qu'il  la  séduira 
dans  un  délai  donné  (J  BD\  qu'il  rapportera  les  preuves  cer- 
taines de  son  succès  {JB). 

Arrivé  à  Gènes,  il  se  coavainc  bïento:  de  la  folie  de  son 
entreprise (£D)  et  il  recourra  une  ruse  pour  se  donner  l'air 
d  avoir  réusâ  :  il  gigne  une  vieille,  bien  avec  la  dame,  qui 
demande  à  celle^  de  garder  n-ois  jours  dans  sa  chambre 
(ABD),  pendant  qu'elle  tait  un  pèlerinage  ÇJD),  un  grand 
coffine  où  sont  censés  être  des  orrets  précieux  :  dans  le  coffre  est 
enfermé  le  galant.  Li  nuîr,  pendant  que  la  djme  dort,  il  son  du 
coffire,  b  découvre,  et  voit  quelle  a  sous  ie  sein  gauche  ÇAB) 
un  na  (^AB  D)  avec  al^iuanti  p^^tà'xi  bimdi  cerne  liyro  (B)  '  ;  il 
s'em)arc  en  outre  dequelques  joyaux.  Au  bout  de  trois  jours,  la 
vieille  £ût  reprendre  son  coâre  (a  B  D). 

Le  gdant  revient  à  Paris  et  montre  les  joyaux  au  mari  : 
celui-d  ne  trouve  pas  La  preuve  surRsante,  mais  il  se  rend 
devant  b  descripcion  du  na  ÇABD).  H  paie  la  gageure,  et  part 
pour  Gênes,  résolu  i  punir  sa  femme  (ABD), 

Arrivé  dans  son  pays,  il  s'arrête  dans  une  maison  de  cam- 
pagne qu'il  a  prés  de  Li  ville  et  envoie  un  serviteur  chercher  sa 
fenune,  lui  ordonnar.:  de  la  roer  en  rcàte  {BD).  Quand  le 
sernteur  annonce!  la  dame  Tordre  qu'il  a  reçu,  elle  implore  sa 
pîtîé,  et  obtient  de  lui  q-'il  Ijî  donne  ses  vêtements  masculins 
(AEl)y  qn'il  rappone  a  yozi  ma::re  5es  vêtements  i  elle  en 
tfemoignaBt  da  meurtre  e:  qu'il  la  laisse  aller  80l:s  la  promesse 


1.  On  coonprcnd  qzc  La  i^ui  :cr.tirj,n  r.ortnt:- i  A  ci  B  lient  ict^è  a- 
tndtre  nx  mue  patrc 

2.  fioooce  a  ccmincrent  :c:  ic^-jcr^i  «ul  jn  trait  a.-vr-lifr  ie  "trl*:- 
nal  :  ces  poOs  ^ui  gr.v.cr^t  le  iLrte  '^  :':-v*r.:  iirA  pl-iieurj  t-sUcxis  tcct 
à  Cûtindêprndaicea ''OjreLi  £ .Kr.i.zixrr, .  zr^r.-.ci  it  G^-r-zenr^:-.  ie  Pitrt, 
dlmbriam,  ^o^ns  ie  T.~a-.r.*:.i.  :  >'.:  :  iî  L.-e  it  P-sîji!  s  resctitetx 
donc  a  h  fisrme  prenier»  ie  '.ù.  -ri;  :-.  3,  \^  .t\  rie  'jyrpc:*,  1  t'.t  :n:rod;i:î. 
Dansie  oxxte  iePhre.  iirs  7".- -".ria  ;t  ?  -tii.    i  -.-zLz.lzi  i-  triitre  r^c^ 

t  les  poils  et  Les  1^  rrt:e:;  :i  tri::.  :.:  -îççeLe  j  =:-::lit:cr.  ie  li  tst- 
-rf,  iohfce  rririit::  iir_i  3:    :j--   :*   C-rx'   i*   ?::;•>;.  r:  le  c.::n:e 

dlnibninx,  S   esc    rti-i:   1    ici   '.'-.f-^ix   :r::-i.rii    :-t   :.:ure  !a  :.;ci- 

pike. 


s  10  O.    PARIS 

qu'elle  s'éloignera  du   pavs(5Z>)\  Le  serviteur  y  consent 
(ABD). 

La  femme  habillée  en  homme  est  recueillie  sur  le  rivage  par] 
un  vaisseau  dont  le  capitaine  le  prend  pour  page  (âBD).  Ce 
capitaine  porte  des  faucons  au  soudan  d'Alexandrie  ÇB  D)  ;  le 
Soudan  voit  le  page,  admire  sa  bonne  grâce  (ABD)  et  la  façon 
dont  il  soigne  les  faucons  (D),  et  le  demande  au  capitaine 
(ABD).  Il  le  prend  de  plus  en  plus  en  gré  et  lui  donne  une 
charge  élevée  (^SjD). 

Un  jour  que  la  femme,  devenue  haut  fonctionnaire  du  soudan, 
visite  une  foire  à  Alexandrie  {A  D)  %  elle  voit  chez  un  mar- 
chand étranger,  qui  n*est  autre  que  le  traître,  les  objets  pré- 
cieux qui  lui  ont  été  dérobés  (A  BD)K  Interrogé,  le  Florentin 
raconte  complaisamment  la  ruse  par  laquelle  il  en  est  devenu 
possesseur  {AU)\  la  femme  comprenant  ainsi  ce  qui  lui  est 
arrivé,  dissimule^  et  réussit  à  retenir  le  marchand  à  Alexandrie 
en  lui  procurant  accès  et  débit  à  la  cour  {A  BD\  Puis  elle 
trouve  le  moyen  de  faire  venir  son  mari  à  Alexandrie,  et  un 
jour^  ayant  invité  chez  le  soudan  les  deux  hommes  (ni  le  mari 
ni  le  traître  ne  se  reconnaissent  plus  qu'ils  ne  la  reconnaissent), 
elle  fait  raconter  Thistoire  par  te  Florentin  (ABD);  le  mari 
apprend  ainsi  son  erreur.  Puis  elle  se  met  nue  (AD)  et  se  fait 
reconnaître.  Le  traître  est  puni  de  mort,  et  les  épouXj  comblés 


î  *  M*  Ohle  (p*  3  î)  soutient  par  di^  raisonnements  très  spacieux  «^iie  c*est 
le  récit  de  A  (yoyttt  ci-a.vant)  qui  esr  Torigmal  :  en  ce  cas,  ce  serait  Fautciir 
de  U  source  de  BD  t\m  aurait  fait  k  changement  ;  mais  je  crois  plutôt  que 
c'est  Â^Mî^tsl  éloigne  de  ta  source  commune  :  Tauteura  voulu  mettre  les 
époux  çn  présence  pour  avoir  une  scène  émouvante;  seulement  rinterventîon 
du  serviteur  devient  alors  asse£  gauche  ;  datis  BD  on  comprend  que  te  mari, 
n'ayant  pas  le  courage  de  revoir  sa  femme,  contie  à  tin  serviteur  rejEécuiion 
de  sa  vengeance, 

1*  Boccace  seul  met  la  foire  (non  menUonnée  dans  0)  à  Acre,  où  la 
femme  se  rend  et  d*où  elle  ramène  ensuite  le  marchand  iialicti  à  Ate^ndric  : 
ce  détour  est  inutile. 

j.  Dans  B  et  />,  comme  on  a  vu,  le  marchand  expose  ces  objets  parmi 
d'autres  marchandises  (dans  B^  fort  bizarrement,  il  dit  qu'il  ne  les  vend  pas, 
mab  qu'il  est  prêt  à  les  donner).  Dans  A,  il  en  fait  l'enseigne  de  sa  boutique^ 
ce  qui,  comme  Ta  fait  ob$er\'er  M.  Ohle,  rend  plus  vraisemblable  que  U 
femme  les  remarque.  Il  est  possible  que  ce  soit  U  la  version  primitive. 


LE  CYCLE   DE  LA    «  GAGEURE   »  5II 

de  présents  par  le  Soudan,  retournent  à  Gênes,  où  ils  vivent 
tituTQux(ABD). 

n  est  probable  que  l'original  des  deux  versions  A  et  BD  a  été 
rédigé  en  italien,  vers  la  fin  du  xiii*  siècle  *.  Boccace  Ta  suivi 
assez  fidèlement,  et  en  a  même  seul  conservé  au  moins  un 
détail;  mais  il  a  cm  devoir  y  faire  certaines  modifications  :  la 
plus  importante  est  que  chez  lui  le  traître  ne  raconte  pas  spon- 
tanément et  pour  s'en  vanter  son  odieux  stragème,  mais  qu'il 
commence  par  répéter  le  mensonge  par  lequel  il  avait  trompé 
le  mari,  et  n'avoue  la  vérité,  devant  le  Soudan,  que  terrorisé 
par  les  menaces  que  lui  adresse  le  prétendu  ministre  du  Soudan. 
L'auteur  de  Dicamiron  a  évidemment  trouvé  invraisemblable  la 
Ëinfaronnade  du  traître  et  on  comprend  très  bien  qu'il  en  ait 
ainsi  jugé  :  toutefois  non  seulement  l'accord  de  ADy  mais  la 
comparaison  d'autres  versions  de  notre  histoire,  montre  qu'elle 
devait  être  dans  l'original  '. 

Avant  de  passer  à  un  autre  groupe  de  versions,  nous  dirons 
un  mot  du  drame  de  Shakspeare,  qui,  dans  l'opinion  générale, 
se  rattache  intimement  à  la  nouvelle  de  Boccace. 

Cymheline  est  une  des  dernières  productions  de  Shakspeare  : 
c'est  aussi  à  coup  sûr,  une  des  plus  étranges  et  des  plus  «  mons- 
trueuses ».  Le  poète  y  a  mêlé  trois  ou  quatre  actions  qui  s'en- 
chevêtrent dans  l'intrigue  la  plus  compliquée  et  la  plus  invrai- 
semblable qu'on  puisse  voir  :  parmi  ces  bizarreries  pourtant  on 
admire  une  poésie  souvent  surprenante,  des  réflexions  pro- 
fondes, un  caractère  d'homme  bien  tracé  (Jachimo)  et  un  beau 
caractère  de  femme  (Imogen). 

Tenons-nous  en  à  ce  qui,  dans  cette  intrigue,  se  rapporte  à 
notre  sujet.  Le  roi  de  Bretagne,  Cymbclinc  \  a  une  fille,  Imo- 
gen, que  persécute  sa  seconde  femme  :  celle-ci  avait  voulu 
faire  épouser  Imogen  à  son  fils  d*un  premier  lit,  Cloten,  per- 
sonnage perdu  de  crimes;  mais  Imogen  s*est  mariée  secrètement 
avec  Posthumus.  La  marâtre,   l'ayant   appris,  obtient  du    roi 


1.  En  tout  cas  pas  avant  1252,  époque  où  furent  frappes  les  premiers  flo- 
rins, puisque  dans  les  trois  versions  la  gageure  porte  sur  une  somme  (variable) 
de  florins  d*or. 

2.  Voy.  ci-après  les  versions  du  groupe  Bîb. 

3.  Venu,  mais  avec  de  graves  altérations,  de  Gaufrci  de  Monmouth. 


512  G.    PARIS 

qa'il  odle  Posthuraus,  et  elle  médite  de  faire  périr  Itnogeti. 
Réfugié  à  Rome,  Posthamus  y  vante  sa  femme  m-ilessys  des 
luliennes,  comme  il  Tavait  louée  à  Orléans  au-dessus  des  Fran-^ 
çatses  '.  Un  Romain^  jachimo^  parie  qu*U  la  séduira  :  il  gagr^ 
une  somme  énorme  contre  un  diamant  donne  à  Posthumus  par 
Imogen.  Legabnt  arrive  en  Angleterre,  dans  la  «  ville  de  Lud  i>, 
porteur  d'une  lettre  de  Posthumus  pour  Imogen,  qui  lui  per- 
met d'avoir  accès  auprès  d'elle;  il  essaye  de  la  séduire  eo  Jui 
disant  que  son  mari  a  trompe  à  Rome;  rebuté,  il  lui  demandeJ 
la  permission  de  déposer  chez  elle  une  caisse,  ce  qu'elle  acceptez- 
en  ajoutant  même  qu'elle  la   gardera  dans  sa  chambre.  Il  se 
cache  dans  cette  cai^e,  en  son  au  moment  favorable,  regarde  la 
chambre  en  détail,  prend  un  bracelet  donné  par  Posthumus  à 
Imogen,  et  voit 

on  hcr  left  tnrast 
A  mole  doque-spctted»  like  ifae  crûnsoo  drops 
V  thc  boitom  of  2  cowslîp. 

E  rapporte  toutes  ces  preuves  à  Po'îthumus,  qui  doute  des  pre- 
miers indices,  mais  se  rend  au  dernier.  Le  mari  envoie  son 
serviteur  Pîsanio  en  Bretagne  avec  une  lenre  qui  dit  i  Imogen 
de  se  trouver  à  tel  port  où  lui-même  arrivera;  Pisanio  a  mis- 
sion de  U  tuer.  Mais  lebonPisanio  ne  croit  passa  maîtresse  cou- 
pable :  il  lui  a  même  apporté  un  vêtement  d*homme,  qu'il  l'en- 
gage à  revêtir;  il  kii  donne  en  outre  une  boite  qui  contient, 
croit-tl,  un  cordial;  cette  boîte  lui  a  été  donnée  par  la  reine,  qui  a 
cru  y  enfermer  un  poison  destiné  à  (aire  mourir  Imogen  :  en 
fait  ce  breuvage  (par  une  ruse  du  médecin  qut  Fa  préparé  sur 
Tordre  delà  reine)  n'est  qu'un  narcotique.  Déguisée  en  homme, 
Imogen  s*enfuit  donc  et  se  réfugie  dans  une  caverne,  où  vivent 
deux  de  ses  frères,  Guiderius  et  Arviragus,  persécutés  comme 
elle.  Épuisée,  elle  boit  le  prétendu  cordial,  et  tombe  dans  un 
sommeil  semblable  à  la  mort.  Tandis  qu'elle  dort,  Todieux 
CloteOj  qui  la  poursuivait,  revêtu  d'habits  appartenant  à 
Posthumus,  arrive  à  la  caverne  :  Tun  des  frères  dlmogeo,  Gui- 
derius^  le  tue^  jette  sa  tète  dans  la  mer,  et  laisse  à  l'entrée 


M*  Ohle  voit  ki  b  preuve  que  Shâkspcare  i  combiné  Jeux  vçnififi&.  Pas- 
et  le  Démméfùm  \  maïs  voy«  ci-apfès. 


LE   CYCLE   DE   LA    «    GAGEURE    »  JIJ 

de  k  caverne  le  tronc  sanglant*  Comme  Guîderi.tts  et  les 
autres  personnages  réfugiés  dans  la  caverne  se  sont  éloignés  pour 
quelque  temps,  Imogen  trouve  le  corps  sans  tète  revêtu  des 
habits  d^son  mari,  croit  reconnaître  Postliunius,  et  se  pflme 
s«r  le  cadavre  :  elle  est  relevée  par  Lucius,  généra!  romainj 
en  guerre  contre, le  roi  Cymbeline  ;  Lucius  remmène  A  son  camp, 
où  elle  devient  son  page,  sous  le  nom  de  Fidèle,  Dans  un  der* 
nier  acte,  qui  esc  extravagant,  Cymbeline  ayant  vaincu  les 
Romains,  on  amène  devant  lui  comme  prisonniers  les  diffé- 
trents  personnages  du  drame  :  entre  autres  Imogen,  toujours 
rdéguisée  en  homme,  Postliumus,  qui  est  revenu  de  Rome  et  qui 
a  combattu  dans  les  rangs  des  Bretons  sous  de  pauvres  vête- 
ments, et  le  galant,  Jachimo;  Imogen  reconnaît  le  traître, 
obtient  de  Cymbeline  qu'il  Tinterroge  sévèrement*  Jachimo» 
qui  a  des  remords,  avoue  son  imposture  et  obtient  sa  grke. 
Ce  récit  présente  des  traits  inconnus  à  Boccace  :  i°  le  galant 
arrive  auprès  de  la  femme,  recommandé  par  le  mari, et  lui  parle; 
2**  il  lui  dit  que  son  mari  la  trompe  ;  3°  ie  galant  n'a  pas  d^ 
complice  ;  4''  le  signe  ressemble  à  une  fleur;  s°  '^  serviteur  sait 
pourquoi  il  a  reçu  Tordre  de  tuer  sa  maîtresse  ;  6^  c'est  lui  qui 
conseille  à  celle-ci  de  s'habiller  en  homme  ;  7"*  !c  dénouement 
est  mêlé  à  des  aventures  de  guerre* 

Or,  tous  ces  traits  (sauf  le  2"^  et  le  4*)  se  trouvent  dans  ThiS' 
lojre  de  la  Fislmife^  nouvelle  de  Kinde  Kitt  ',  Ici  le  galant  est 
envoyé  par  le  mari^  annoncer  à  sa  femme  qu'il  reste  à 
Londres.  Elle  loge  dans  une  maison,  près  de  sa  chambre,  mais 
rebote  quand  il  veut  la  séduire.  Il  se  glisse  sous  son  lit  (il 
^n'a  pas  de  complice),  et  lui  vole  un  petit  crucifix  qu'elle  a  sur 
la  poitrine  (pas  de  signe).  Le  serviteur,  chargé  par  le  mari  de 
la  tuer,  et  à  qui  elle  demande,  comme  In)ogen,  d'exécuter 
Tordre  reçu,  la  croit  coupable,  mais  a  pitié  d'elle,  et  lui  conseille 


1'.' Cette  isouvelk  a  été  analysée  par  Leonhardt,  d.ms  À%'îîa,Vll,  iyi6. 
On  a  dit  à  tort  ^uH  y  avjit  une  édition  di:  1605  {Cymbeîim  est  de  1609). 
'•î.  On;tte  voh  pas  daircmem  dans  ce  récit  (d*après  l'analyse  qu*en  a 
Jcvnné  Leonhardt)  <|uelic  ust  la  situation  stxiak  des  parieurs:  au  débutai! 
semble  qtiece  sont  des  marchands;  plus  loin»  on  les  voit  prendre  part  à  des 
guerres. 


(14  G.   P»& 

de  f^habiUer  en  homme.  Près  «fYorfc  cUe  fcnaMmc  le  rot] 
de  Fitifice  Édocunda  qui  Êusaic  b  guerre  à  Henri  \1,  ec  «toi  Ici 
fmâ  comïïûe  page  wm  le  nom  d'Eilinufid.  A  b  bataUIe  de] 
Baiiiet%   cfaerchaiit  soo  auri  parmi  ks  mairts  i^ab,  die] 
tromre  te  imm^  blessé,  loo  cindfix  sar  sa  poîtriac*  EUe  devine 
tout,  kii  appeler  par  Edouard  iou  niari^  qui  c^  parmi  les  pri- 
somiîen;  le  traiere  esc  oUt^  d*avoii£r;  elle  se  bit  comiaiEie  ;  | 
le  roi  amdâmuc  k  prétendu  séductear  I  b  prâoQ  et  à  pajer 
trois  fois  b  somme  gagée  ;  tl  voudrait  pmik  k  mari;  mak  la 
femme,  chargée  de  te  juger,  lui  pardonne. 

U  y  a  évidemment  un  lien  étroit  (quoi  qu'en  dise  Leonhardt), 
entre  cette  mauvaise  versicm  et  Cymktim,  M.  Ohk  peiBe| 
qu'elle  remonte  à  une  version  anglaise  perdue^  qu3  appelle  i 
Pmthumm  et  qui  conienaii  le  trait  2"  (le  filant  rapporte  mec 
songèrenient  à  b  femme  que  son  mari  lui  est  infidèle  *).  De  ce 
récit  anglais,  Poithumus,  qui  mettait  en  scène  des  pcrscmnagcs 
de  haut  rang»  aurait  procédé  un  drame  perdu,  que  M,  Oble  inti* 
tuk  Cymhelim'Pmibumus,  où  le  conte  de  b  gageure  auniit  été 
comtrinéavec  une  autre  histoire.  Ce  drame,  CymMim'Pùnlmmms^ 
sérail  b  source  immcdiaie  de  Shakspeare,  qui  y  aurait  ajouté)! 
des  tt^ts  pris  à  Boccace  :  le  coffre  et  le  dgne.  Postbumm^  en 
effet,  et  c'est  la  thèse  fondamentale  de  M,  Ohle,  ne  connaissait 
pas  le  motif  du  signe  ;  ]egal.ant  (comme  dans  le  Cùmude  Pmiurs\ 
y  montrait  des  objets  volés,  comme  seules  preuves  de  llnfidélité 
de  b  femme.  Cette  vue  paraît  contestable,  et  Ion  peut  fon 
bien  croire  que  le  signe  a  été  omis  dans  b  version  Fisbwiji^ 
comme  il  Ta  été  en  d'autrc%  versions  déjà  analysées  ou  que  nous 
analyserom  ^  Il  eu  est  de  même  du  motif  du  coffre  :  b  fa^on 


I .  On  Dc  voit  pji>,  4âi)s  rjinaiyie  de  Leonbardt,  comment  il  lui  procure 
é»  hiilnts  d'homme. 

1.  En  1471,  Édou&fd  IV  d'York,  aidé  ptr  des  troupes  boyrgukgnoiiOcSr 
y  v«inquit  et  taa  Warwkk. 

|t  Ce  trait  »  retrouve  dans  le  Mirûck  dont  h  «  source  épique  »,  d*iprès 
M,  Oltle,  est  iussi  b  %omc€  de  Fûstbumus,  ce  qui  paiattfbuMbk. 

4.  Four  le  Cùmlidê  î^mHir$,  nous  jurons  i  eï^mincr  ^î  ce  trait  y  figurait  ; 
it  itiît  cirtâjoemeitt»  quoi  qu'en  dl»c  M.  Ohk,  dans  Vorigiml  épique  du 
Mlrmk.  Q^nt  i  Tintervcntion  de  b  Vierge,  que  M.  Obîc  (p.  70)  retrouve 
dans  une  intervention  «ntloguc  de  Jupiter  au  déooûmtfiit  de  CymMim^  elle 
parjtt  ;ij*:»ut<^e  àm%\  U  MhsuU,  qui  csl  seul  â  U  présenter. 


LE   CYCLE  DE    LA    «    GAGEURE    n  5  I  5 

dont  le  galant j  d*après  la  version  Fishwifc^  s'introduit  dans  la 
chambre,  est  si  gauche  qu'on  peut  la  croire  altérée.  Dés  lors, 
on  est  autorisé  à  se  demander  si  Shakespeare  a  réellement  uti- 
lisé Boccace.  M.  Oh  le  allègue  pour  le  prouver  que  le  motif  du 
coffre  ne  conviçnt  que  lorsque  les  personnages  sont  des  bour- 
geoisj  et  que,  par  suite,  il  est  très  mal  amené  dans  CymMim; 
en  outre,  que  Shakspeare  place  la  scène  à  Rome  et  introduit 
des  noms  italiens*  Ces  preuves  sont-elles  sufEsantes?  Nous 
retrouverons  le  motif  du  coffre  dans  un  conte  gaélique  où 
rhéroïne  est  une  reine.  Le  seul  argument  solide  de  M.  Ohle 
est  tiré  du  fait  que  le  mari^  dans  Cymbeline,  vante  sa  femme 
d'abord  ù  Orléans»  puis  à  Rome  :  Orléans  viendrait  de  Pùsthti- 
mus^  Rome  de  Boccace  (qui,  d  ailleurs,  place  la  scène  non  à 
Rome^  mais  à  Paris).  Cet  argument  ne  paraît  pas  suffisant» 
et  en  somme  je  suis  poné  à  croire  que  Cymbeline  —  qu'il  y  ait  eu 
ou  non  un  diame  intermédiaire,  — repose  sur  un  récit  antérieur 
perdu,  que  j'appellerai  avec  M.  Ohle  Posihumus  :  ce  récit  res- 
semblait à  roriglnal  du  Miracle,  le  galant  y  employait  le  strata- 
gème do  coffre,  donnait  comme  preuves  de  sa  victoire  un  objet 
volé  et  la  description  du  signe;  la  scène  du  pari  était  placée  à 
Rome  et  le  dénouement  était  à  peu  près  celui  de  la  version 
Fislm^ife. 

B'b  i  Aveu  spontané  du  traître  dans  tandenne  maison  du  mari. 

Cette  forme  de  notre  récit,  qui  ressemble  par  plus  d'un  trait 
à  la  précédente  (le  motif  du  coffre  se  rencontre  dans  trois  ver- 
sions), n'apparait  qu'au  xvi*=  siècle  dans  un  poème  en  magyar; 
elle  se  retrouve,  plus  ou  moins  altérée,  dans  des  contes  alle- 
mand, norvégien  (finlandais)  et  gaélique.  Elle  est  inconnue  au 
monde  roman. 

I.  La  belk  histaire  du  vaillani  Francisco  et  de  son  épotise,  par 
Gaspar  Riskay ',  fut  écrite  par  lui  en  1552,  en  170  strophes 
(sur  le  modèle  et  la  mélodie  de  la  «  belle  histoire  y^  de  Griselidis 


i«  Elle  a  èiè  Imprimée  en  i  S74}  puis  en  1579  et  en  160 1.  et  de  nos  jours, 
entre  autres  par  M.  Aaron  Szilâdy,  de  l* Académie  hongroise.  Je  dois  la 
traduction   de  cette  histoire  à  M.  Ph.-A.  Becker,  professeur  de  philologie 

romane  à  l'Univt:rsiié  de  Budapest. 


5l6  G,    PARIS 

mise  en  vers  par  Pâul  Istviinfi)*  Certains  noms,  surtout  Franciscù 
(hongr.  Ffrmcx)tt  aussi  Cassandre,  semblent  indiquer  une  source 
italienne,  mais  on  ne  connaît  pas  en  italien  de  récit  pareil;  en 
tout  cas,  rhîstoire  est  localisée  en  Hongrie  et  placée  sous  le  roi 
Békj  personnage  imaginaire,  car  aucun  des  quatre  Bêla  histo- 
riques (xi^-xîii*  siècles)  n'a  été  sans  enfants;  le  château  de  Fran- 
ciscoj  Zebernik  (Srbernik),  est  dans  la  Bosnie  actuelle.  L'histoire 
n'est  pas  la  source  des  autres  contes  de  ce  groupe^  car  il  y 
manque  des  traits  essentiels  '.  En  voici  un  résumé. 

Le  vaillant  Francisco  est  heureux  avec  sa  femme  au  château 
de  Zebernik,  quand  il  reçoit  une  lettre  du  roi  Bêla  rinvitani  à 
Bude  pour  de  grandes  fêtes.  U  prend  congé  de  sa  femme,  qui  lui 
recommande  de  ne  pas  se  laisser  aller  aux  vanteries  usuelles  à 
la  cour.  —  Bien  accueilli  par  le  roi,  il  renverse  dans  un  tour- 
noi le  vaillant  Cassandre,  resté  vainqueur  de  tous  les  autres,  et 
qu'on  croyait  invincible.  Cassandre  en  conçoit  une  violente 
jalousie  \  Le  soir,  au  repas,  Francisco  vante  sa  maison,  sa  vail- 
lance et  sa  femme,  belle  et  vertueuse.  Cassandre  accorde  qu'il 
est  vaillant;  quant  à  sa  maison,  elle  lui  vient,  dit-tl,  non  de  ses 
aïeux,  mais  du  roi;  pour  ce  qui  est  de  sa  femme, elle  peut  être 
très  belle,  «  mais  sa  vertu,  je  la  nie,  et  quand  il  le  faudra,  j'en 
dirai  plus  ».  Francisco  riposte  qu'il  le  tuera  s'il  ne  prouve  son 
propos.  Cassandre  s'engage  à  le  prouver  en  quelques  jours, 
pourvu  que  Francisco  n'avertisse  pas  sa  femme.  Celui<i  s'y 
engage  et  demande  comme  preuves  l'anneau  d'or  de  sa  femme 
et  le  poignard  d*or  qu'il  lui  a  confiée  —  Arrivé  à  Zebernik, 
Cassandre  erre  trois  jours  autour  du  château  *,  mais  la  dame 
ne  son  pas.  Il  fait  dire  ù  la  duègne  qu'un  parent  la  demande; 
il  lui  apprend  la  gageure  et  lui  promet,  si  elle  veut  l'aider, 
de  l'épouser  et  de  la  faire  dame  du  château.  La  nuit  m£me^ 


I .  Le  coffre^  et  même  le  signe.  Eo  outrc^  le  marit  au  lieu  d^  vouloir  tuer  sa 
femme»  s*éloigne  (cf.  B'). 

3,  Ce  mit  et  te  motif  de  U  convocation  du  roi  se  retrouvent  dans  la  Pia- 
mîk  de  Batacchî. 

^,  Franmco  offre  sa  vie  et  tous  ses  biens  en  gage  quVI  ne  l*avertiti|ias;  d 
n'est  pas  parle  de  gageure  sur  le  fond  même  :  mais  ce  ne  peut  être  i^u^uûc 
ombsion* 

4,  Cf*  le  ms,  de  Tours (B*),  Eufimiu,  Tîmoncda. 


LE  CYCLE   DE   LA    ff    GAGEURE   »  fï'J 

h  duègne  enlève  les  clefs  sous  le  chevet  de  la  dame  et  apporte 
à  Cassandre  Tanneau  et  le  poignard,  Francisco  est  convainai 
et  prêt  à  mourir;  mais  le  roi  ordonne  à  Cassandre  de  faire 
grâce  de  la  vie  de  son  adversaire.  Cassandre  y  consent,  à 
condition  que  Francisco  s* exile.  —  Il  passe  le  Danube  et  envoie 
à  Zebernik  son  page,  chargé  de  reproches  pour  sa  femme.  Celle- 
ci  quitte  son  château  avant  que  Cassandre  en  prenne  possession, 
non  sans  avoir  mîs  de  grandes  richesses  en  dépôt  chez  un  ermite 
%^oisîn  ;  puis,  elle  et  le  page,  habillés  en  moines*,  cherchent 
Francisco  sans  le  trouver.  Au  bout  d*un  an,  e!!e  revient  chez 
Termite  et  conçoit  un  autre  plan.  Elle  s'habille  en  chevalier  et 
avec  un  grand  train  se  rend  à  la  cour  du  roi,  où  elle  se  présente 
sous  le  nom  de  Roland,  venu  de  llnde  (sic).  Le  roi  et  la  reine 
sont  charmés  de  sa  bonne  grâce  etj  comme  ils  n*ont  pas  d*en- 
fants^  ils  l'adoptent,  —  Un  roi  voisin  ayant  annonce  un  tournoi, 
Roland  s'y  rend  avec  une  nombreuse  suite  :  il  espérait  que 
Francisco  y  viendrait  :  en  effet,  Francisco  était  là,  mais  en 
misérable  situation*  Roland  le  voit  de  ses  fenêtres  porter  une 
botte  de  foin,  et  l'en  tend  dire  de  deux  jouteurs  :  «  Ils  ne  s'y 
prennent  pas  bien,  »  II  fait  venir  le  malheureux,  Tinterroge, 
obtient  de  lui  le  récit  de  son  histoire*  Roland  l'équipe  et  lenvoie 
à  la  joute  où  il  renverse  le  chevalier  qui  a  été  jusque-là  le  vain- 
queur de  tous  les  autres,  Roland  l'ayant  pris  à  son  service, 
Francisco,  sur  Tordre  de  son  maître,  se  laisse  désarçonner  par 
bij  en  sorte  que  Roland  passe  pour  le  plus  fort  des  jouteurs. 
Il  retourne  à  Bude,  emmenant  Francisco  *.  —  Cependant» 
Cassandre,  devenu  «  palatin  n^  invite  Roland  â  la  chasse  à 
Zebernik;  il  s'y  rend  et  est  bien  reçu;  il  a  emmené  Francisco, 
qui  a  grand  peur  d*êrre  reconnu,  —  A  un  repas,  Roland 
demande  à  Cassandre  comment  il  possède  ce  château,  et  Cas- 
sandre raconte  tout  et  comment  la  duègne  (devenue  sa  femme) 
lui  a  remis  l'anneau  et  le  poignard,  «  Vit*on  jamais  une 
pareille  trahison  ?  »  dit  Roland,  et  il  ordonne  à  «  Thomme  à  la 
botte  de  foin  *>  de  trancher  la  tète  devant  lui  à  Cassandre  et  à 


I.  QJe  m»,  de  Tours  (B')- 

a.  Ici  un  épisode  inutile  :  le  roi  êirangcr  donne  sa  fille  à  Roland,  qui 
aicceptc  de  se  fiancer  avec  elle,  mais  dit  qn'il  doit  en  parlera  son  père»  €t  qu'il 
reviendra  la  chercher. 


sa  femme,  ce  qui  est  exécuté.  Puis  elle  pa.sse  dans  une  chambre, 
se  dépouille,  ne  met  qu'un  large  vêtement  et  fait  venir  son 
mari;  elle  tombe  à  ses  genoux  et  se  fait  reconnaître*  Elle 
revient,  vêtue  en  femme,  raconte  tout  aux  seigneurs  présents, 
et  les  charge  d'informer  le  roi*  Celui-d,  charmé  de  sa  finesse  et 
de  sa  fidélité^  la  nomme  son  héritière* 

Ce  qui  caractérise  cette  version,  d*ailleurs  fort  altérée,  c'est 
que  la  femme,  devenue  puissante,  trouve  son  mari  tombé  dans 
la  misère,  le  prend  à  son  service  et  le  ramène  dans  leur 
ancienne  demeure,  maintenant  celle  du  traître,  où  celui-ci,  de 
son  plein  gré,  raconte  sa  ruse  et  se  livre  ainsi  ;  sur  quoi,  la 
femme  le  fait  punir,  se  fait  reconnaître  de  son  mari  et  se  récon- 
cilie avec  luL  Nous  retrouverons  ces  traits  dans  d'autres  récits, 
où  reparaissent  d'ordinaire  les  motifs  du  coffre  (avec  complicité 
d*une  femme),  du  signe,  de  Tordre  de  mon  donné  par  le  mari 
(ou  de  sa  tentative  de  mort  sur  sa  femme). 

2.  Conte  allemand.  Der  Pfiffigsîe^,  Il  s'agît  de  marchands 
établis  à  Londres.  L*un  d'eux  gage  sa  fortune  contre  celle  du 
mari  %  qui  part  pour  huit  jours  après  avoir  mis  sa  femme  au 
fait  de  la  gageure  :  trait  absurde  et  propre  à  cette  version  en 
tout  altérée  et  délayée*  Le  galant  obtient  d'une  ancienne  ser- 
vante de  la  femme  qu'elle  l'enferme  dans  un  coffre,  que  T hé- 
roïne consent  à  garder  en  dépôt  dans  sa  chambre  pour  une  nuit 
(!a  servante,  qui  est  sur  le  point  de  quitter  la  place,  dit  que 
ce  coffre  contient  ses  économies).  Par  un  trou  de  la  caisse,  il 
voit  que  la  femme  a  un  signe  au  haut  du  bras  (cf.  D)  et  le  périt 
doigt  du  pied  de  travers,  La  nuit,  il  sort  de  sa  cachette  et  prend 
un  anneau  ;  le  lendemain  on  le  remporte  hors  de  la  maison.  — 
Le  mari,  revenu,  est  convaincu  par  ces  preuves*  Il  accable  sa 
femme  de  reproches  (pas  de  tentative  de  meurtre),  quitte  le 
pays  et  se  fait  soldat  en  Danemark.  La  femme  s'habille  en 
homme  et  se  met  à  sa  recherche.  Elle  devient  médecin  de  Tar- 
mée  danoise,  interroge  tous  les  hommes  sous  prétexte  de  s  en- 
quérir de  leur  santé,  et,  ayant  retrouvé  son  mari,  le  prend  à  son 
service.  Au  bout  de  quelque  temps,  elle  IVmmène  à  Londres 
et  loue  un  appartement  dans  leur  ancienne  maison,  devenue 


1.  Wolff,  Hiiusttmrcheu,  p.  55  j. 

2.  Le  mari  a  épousé  unt  fille  pauvre^  et  h  vante  devant  ses  confrères,  qui 
ont  épou^  pour  leur  dot  des  femmes  dont  Ils  n^ont  pas  à  se  Louer^ 


LE   CYCLE    DE    LA    «    GAGEURE    »  $1$ 

celle  du  traître*  Elle  invite  celui-ci  à  un  dîner,  où  chacun  doit 
raconter  la  meilleure  ruse  quHl  ait  exécutée  de  sa  vie.  Le  traître 
raconte  son  beau  tour;  le  médecin  assure  en  avoir  un  bien 
plus  fort,  va  dans  sa  chambre,  sMiabille  en  femme,  et  se  fait 
reconnaître  du  mari  et  du  traître,  qui  est  confondu  et  qui  rend 
les  biens  usurpés  (pas  d'autre  punition). 

3.  Conte  norvégien  '.  —  Un  riche  marin  a  épousé  une  fille 
pauvre  (cf.  le  conte  précédent).  I!  part  pour  un  voyage  ;  un 
ami  lui  dit  qu'il  est  bien  imprudent,  et  parie  sa  maison  contre 
celle  du  marin  qu'il  séduira  la  femme  :  le  marin  reconnaîtra 
qu'il  a  perdu  si  le  séducteur  lui  rapporte  la  chaîne  d'or  de  sa 
femme  (pas  de  signe).  Il  essaye  en  vain  de  la  lui  acheter  ;  il  gagne 
une  vieille  servante  qui  la  lui  dérobe.  Le  marin,  de  retour,  ta 
croit  coupable;  de  son  vaisseau,  il  ordonne  à  deux  de  ses  ser- 
viteurs d'aller  à  terre,  de  tuer  sa  femme  et  de  tut  rapporter  une 
bouteille  de  son  sang  fumant.  Ils  n*ont  pas  le  cœur  d^aller  trou- 
ver la  femme,  et  rapportent  la  bouteille  pleine  du  sang  d'un 
agneau  (cL  D).  Le  marin  repart,  fait  naufrage  et  est  réduit, 
dans  une  ville  lointaine,  à  garder  les  poules.  La  femme,  qui 
n  a  été  prévenue  de  rien,  est  expulsée  par  le  traître  (cf.  Fran- 
dsœ)[  elle  s'habille  en  homme,  se  place  chez  un  monnaycur  et 
devient  maître-monnayeur  dans  la  ville,  située  sur  la  Méditerra- 
née, où  vivait  son  mari.  Elle  entend  parler  de  cet  homme,  triste  et 
taciturne,  qui  a  eu  de  grands  revers  :  elle  le  fait  venir  et  le  prend 
pour  domestique*  Puis  elle  revient  dans  son  pays  et  se  loge  chez 
le  gagnant,  au  grand  effroi  du  mari  (cf.  Francisca^  Wolff).  Elle 
invite  le  marchand  à  raconter  ses  bons  tours;  il  raconte  son  stra- 
tagème qu'elle  lui  demande  de  mettre  par  écrit  ;  puis,  elle  se 
fait  reconnaître  par  son  mari,  lui  pardonne,  et  envoie  Técrit  à 
la  justice  qui  met  le  marchand  en  prison  (le  narrateur  ignore 
s  il  fut  autrement  puni);  les  époux  reprennent  leurs  biens  et 
vivent  heureux. 

4*  Conte  gaélique  ^  —  Un  prince  (bientôt  roi)  épouse  une 


t*  Beau  vois,  Cmtm  populmus  de  la  Nûrt'è^e,  dt  la  Finlande  et  dt  la  Boitr- 
^ùgm,  Paris,  1862,  p*  8  (tiré  de  J,  Aasen,  Praver  aj  Lauditnmîei  i  Ncrge} 
(Qiristiama,  185  j),  p.  74-81. 

2.  J*  F*  Campbell,  Popular  Takso/ihe  Wfit  Highhmh  (Êdîn> bourg.  1860), 
t.  Il,  p,  1,  n*'  XV UL  Tl^e  Chest.  Oi  con ce  réunit  singulîàremcnt  notre  histoire 
avec  le  thème  de  Shybck.  Je  ne  m'occuperai  que  de  la  partie  qui  concerne 
le  conte  de  ïa  Gûgattt. 


$tÙ  G.   PARIS 

jeune  fille  ;  un  oipttaîne  de  navire,  à  qui  il  %eut  acheter  de  h 
soie  pour  sa  femme,  parie  qu'il  la  séduti^  la  nuit  même.  Le  roi 
gage  son  royaume,  le  capitaine  sa  cargaison.  Il  va  trouver  la  bm- 
mfe  (sans  tentative  auprès  de  b  retne)  :  une  servante,  gagnée 
par  la  hmwife^  obtient  de  la  reine,  sous  préteste  d  aller  voir 
sa  sceur  malade,  une  permission  :  celle  de  déposer  sa  caisse 
dans  la  chambre  de  la  reine.  Le  capitaine  est  caché  dans  la 
caisse;  la  nuit,  il  son»  prend  une  chaîne  et  un  anneau.  Le 
roi  demande  qu'on  le  mène  outre  mer,  ce  qui  est  fait;  le  capî- 
laine  s'installe  dans  le  palais,  I^  reine,  qui  n'y  comprend  rien* 
s'en  va,  s*habille  en  homme,  passe  la  mer  (cf.  D)^  et  arrive 
dans  une  maison  où  elle  s*engage  comme  garçon  d'écurie.  Elle 
retrouve  son  mari  assauvagi,  le  prend  pour  aide  et,  après 
quelque  tenjps,  demande  un  congé  et  l'emmène.  Elle  arrive 
chez  son  père,  qui  veut  faire  pendre  son  gendre;  mais  il  prouve 
que,  rayant  achetée,  il  avait  le  droit  de  la  traiter  ainsi  \  Puis, 
ils  vont  dans  leur  ancienne  maison,  elle  demande  au  capitaine 
comment  il  t'a  en  sa  possession  :  à  un  étranger,  il  peut  bien  le 
dire  :  îl  raconte  tout,  et  le  mari,  qu'elle  a  caché,  écrit  son 
récit.  Ils  vont  à  la  cour  de  justice,  où  elle  montre  récrit.  Le 
capitaine  est  pendu  ;  les  époux  vivent  heureux, 

S,  Conte  roumainde  Transylvanie'-  —  Un  riche  marchand  a 
épousé  une  fille  pauvre.  Se  trouvant  à  l'étranger,  il  vante  sa 
femme  ;  un  autre  marchand  parie  de  la  séduire  en  une  nuit  :  le 
signe  qu'elle  porte  est  indiqué  d'avance.  Il  se  présente  à  elle 
comme  ami  du  mari,  et  est  bien  accueilli;  mais,  le  soir  venu, 
elle  le  congédie.  Il  trouve  une  sorcière  (trait  inutile),  qui  lui 
suggère  l'idée  du  cofTre,  et  s'y  fait  enfermer  elle*même.  La  sor- 
cière voit  l'étoile  d'or  que  la  femme  a  sur  le  seinj  découvre 
rendroit  où  elle  met  son  anneau,  qu'elle  dérobe.  Le  mari  est 
con%aincu  [ar  cet  anneau  (on  ne  parle  plus  du  signe).  Il  aban- 
donne sa  femme  dans  un  bateau,  qui  aborde  à  une  rive  déserte. 
Couchée  sous  un  arbre,  elle  entend  un  oiseau  dire  que  la  rosée 
prise  à  cet  endroit  guérirait  lempereur  aveugle  ^  Elle  se  déguise 


I,  En  clkt,dk  a  cté  achetée  (cL  CampbclU  p.  14)  pour  ccni  livres.  — 
Cette  inEervt^atiati  du  fiim  rattache  noire  conte  a  B*a. 

1.  Autknd^  i^b^  col.  to^), 

5.  Ce  trait  appartient  à  d'autres  contes  (£/  }usu  H  t  Itt/usU^  tOistau  Mm 
dans  Basile,  cic»).  Nous  le  retrouverons  plus  loin  (B^aj). 


LE   CYCLE   DE   lA   ft   GAGEURE    »  ^tl 

en  homme,  guérit  Tempcreur,  et  demande  en  récompense  la  ville 
où  son  mari  vit,  très  pauvre,  car  ses  biens  étaient  Feu  jeu  du 
pari.  Elle  Tin  vite  à  dîner,  lui  montre  son  sein  pour  se  faire 
reconnaître,  et  lui  pardonne.  Le  traître  et  h  sorcière  (on  ne  sait 
comment  ils  sont  convaincus  du  crime)  sont  mis  à  mort, 

5,  Conte  tsigane  (roumain)  \  ~  Les  parieurs  sont  deux 
marchands  (ils  gagent  leurs  biens?);  le  signe  et  la  bague  qui 
doivent  servir  de  preuves  sont  indi^ijuès  d^avance.  Le  galant 
n^arrive  pas  à  être  admis  auprès  de  la  femme.  Une  vieille  le 
fiait  pour  une  nuit  cacher  dans  le  coffre;  il  voit  le  signe  suk 
imma,  et  prend  Tanneau*  Le  mari  jette  sa  femme  dans  le 
Danube  :  recueillie  par  un  pêcheur^  elle  gagne  de  l'argent  par 
son  travail,  s*habille  (seulement  alors)  en  homme,  apprend  dans 
un  songe  le  moyen  de  guérir  Tempereur  et  le  guérit;  11  lui 
donne  son  royaume  en  récompense.  Elle  voit  son  mari,  qui 
portait  Teau  aux  juifs,  et  lui  fait  dire  son  histoire*  Elle  fait 
rechercher  le  traître  :  interrogé,  il  reconnaît  ne  Savoir  jamais 
vue  de  sa  vie',  «  Tu  prétends,  lui  dit-elle,  avoir  couché 
avec  la  femme  de  cet  homme  î  —  Je  Tai  fait.  —  Quelle  preuve 
en  as-tu  donnée  ?  —  Qu'elle  avait  un  signe  sous  le  sein,  — 
Reconnaîtrais*tu  ce  signe?  —  Oui.  *>  Elle  le  montre,  et  le 
traître,  qui  reconnaît  le  signe,  mais  non  celle  qui  le  porte, 
est  confondu*  Elle  le  fait  couper  en  morceaux,  fait  donner 
vingt-cinq  coups  de  bâton  à  son  mari  pour  le  punir  de  sa  cré- 
dulité, mais  lui  cède  l'empire  ^ 

B^  :  l'héroïne  est  la  femme  du  parieur;  la  femme 

juge;  aveu  forcé  du  traître 

Ce  groupe  de  récits,  étroitement  apparenté  au  précédent  (cf. 
B^b4),  n*apparak,  lui  aussi,  noté  par  Técriture,  qu'au  xvi''  siècle. 
I!  comprend  une  version  espagnole,  un  conte  prétendu  arabe, 
un  conte  italien  très  altéré. 


1.  F.  Miklosich,  Mârdmt  der  Zigeuner  dit  Bul-cti'inat  n"  xiv  {D^tkschriftm 
dit  k.  Akitdemu  der  Wiîîenîchajtm^é^  Vienne^  t.  XX [II,  1874,  p.  321). 

2,  entrait  manque dîins  le  tente ^  en  sorte  que  le  récit  est  inîïitelîigible, 
J.  On  peut  rattacher  à  ce  groupe  le  conte  ^S  àe.  Comparetti»  Fttîtrica 

(Basilicate),  singulièrement  altéré,  r«;mpii  d*all  usions  étrangères,  et  qui  se 
rappone  au  moins  aussi  bien  à  B*  a. 


p2 


C-   PAIIS 


B^z,  InUrvmlim  du  père. 

t.  TimoEiediS  —  Dans  k  ville  de  Candja  (Gandia?)  habite 
Casiodaro,  né  à  Ferrare,  qui  épouse  la  fille  de  Hercxliana, 
marchand  comme  lui.  Il  va  à  Ferrare  et  vante  sa  femme.  Un 
autre  marchand  de  Candia,  Falacio,  gage  cent  ducats  qu'il  la 
séduira.  Il  vient  à  Candia^  se  promène  longtemps,  et  en  vain, 
devant  la  maison  (cf,  B*bi).  Il  recourt  à  une  vieille  reçue  dans 
la  maison^  Crispina,  qui  parle  inutilement  pour  lui  ;  enfin,  il 
cherche  i  se  procurer  des  indices  par  Crispina.  Celle-ci,  en 
ifpulgando  Fînea,  voit  entre  ses  épaules  un  lumr^  dont  elle 
coupe  rÛT/^i  câMlôS  '  ;  elle  les  donne  à  Falacio,  en  lui  décrivant 
les  enîradas  y  salidas  de  la  chambre.  Falacto  revient  à  Ferrare. 

Castodoro,  con%'aîncu,  paie  et  lui  demande  le  secret.  Il  revient 
à  Candia,  pour  y  tuer  sa  femme  ;  mais,  par  un  reste  d*amour, 
il  n'en  a  p^  le  courage,  H  ne  lui  parle  de  rien  et  dit  seulement 
â  son  beau-père  qu'il  l'emmène  à  Ferrare,  pour  la  montrera 
sa  famille.  En  pleine  mer,  il  la  descend  endormie  sur  une  ilc 
désene,  Fy  abandonne,  puis  il  revient  à  Candia  ou  il  annonce 
à  son  beau-père  que  Finca  est  morte  de  maladie.  Finea,  se  réveil- 
lant seule^  implore  la  Vierge  et  ^tnt  Pierre,  se  fait  de  sonman* 
teau  (elle  a'du  fil,  une  aiguille,  des  ciseaux)  des  vêtements  mas- 
culins, et  décide  de  s'appeler  Pedro*  Au  bout  de  trois  jours  pen- 
dant lesquels  elle  s*est  nourrie  d'herbages,  un  vaisseau  marchand 
la  recueille  et  l'emmène  à  Chypre*  Eu  y  arrivant»  une  tempête 
oblige  les  marchands  qui  voyagent  avec  elle  à  jeter  à  la  mer 
beaucoup  de  marchandises  ;  par  suite  de  quoi,  un  grand  différend 
s*éléve  entre  eux  pour  savoir  ce  que  doit  perdre  chacun  d'eux. 
Ils  vont  devant  le  roi,  où  Pedro  offre  de  faire  le  compte,  et  le 
Élit  si  bien  que  le  roi,  charmé  de  lui,  le  prend  pour  secrétaire. 
—  Le  roi  de  Candia,  revenant  de  Jérusalem,  passe  à  Chypre. 
Pedro  le  prie,  comme  son  souverain,  de  le  demander  au  roi  de 
Chypre,  et  de  l'emmener  avec  lui  j  le  roi  de  Chypre  le  laisse 
aller,  bien  qu*à  regret,  et  Pedro  arrive  à  Candia,  où  le  roi  le 


t,  Kat-eUstas  anUrhns  a  Cervantes,  j*  c(licioti(Madnd,  Rivadencv^ra,  1858), 
P.  siÇi  Tîmonedii,  B!  Patranwh.  —  llmoneda*  libraire  à  Valence,  auteur  et 
éditeur  de  rotiianct»,  éditeur  de  Lo [te  de  Hueda.  Le  Pdîranufh  est  de  1 576. 

2.  Cî   B'J4,  B'bt,  Bb}a,  h'h}h,  B^bji»  Bococe. 


: 


ÎM  arCLE   DE  LA    «    GAGEURE    »  523 

nomme  régente  de  sa  cabaïkria.  Un  jour  se  présentent  à  son 
jugement  son  père  et  son  mari,  le  premier  réclamant  au  second 
sa  subsistance,  qu'il  lui  avait  promise  ',  et  sa  fille,  car  il  doute 
de  sa  mort,  Pedro  ordonne  que  Casiodoro  paie  et  que*  dans  un 
délai  de  quatre  mois,  il  prouve  par  bons  témoins  que  sa  femme 
est  morte.  Au  terme  fixé,  Casiodoro,  ne  pouvant  produire 
aucun  témoin,  est  mis  en  prison,  et,  comme  il  ne  raconte  rien 
de  précis,  Pedro  ordonne  qu^on  le  mette  à  h  torture,  sur  quoi 
il  raconte  tout*  Pedro  le  fait  remettre  en  prison  ^,  et  cite 
Falacio,  qui^  torturé  à  son  tour,  avoue  la  vérité*  Pedro  fait 
seniemiar  Crispina  et  bannir  Falacîo,  qui  rend  en  entre  les  cent 
docats  du  pari,  avec  Tintérét.  —  Puisj  Pedro  convie  à  un  fes- 
tin le  roi,  Herodiano  et  Casiodoro,  se  retire  un  instant,  revient 
habillé  en  femme,  et  raconte  tout,  priant  le  roi  de  donner  un 
istado  à  son  mari  ;  le  rot  y  consent,  à  condition  que  Finea  assis- 
tera à  tons  les  jugements. 

2.  Moslenmel  Rasimi^.  —  Ce  conte,  quelle qu*en  soit  1  origine^ 
ressemble  de  fort  prés  à  celui  de  Tïmoneda,  mais  il  n'est  pas 
probable  quMl  en  provienne.  C'est  le  mari  qui  raconte  Thistoire, 
voyageant  pour  distraire  sa  douleur  après  la  mort  de  sa  femme. 
—  Moslema^  de  Mocca  (Moka)  vient  ù  la  cour  du  roi  de  Zibit 
(Zebid),  et  gagne  sa  faveur,  si  bien  que  le  roi  lui  fait  épouser  la 
fille  de  Témir  Surmassak,  Rasimi,  Appelé  à  Mocca  par  une 
maladie  de  sa  mère,  il  se  divertit  avec  de  jeunes  marcliands. 
Comme  il  vante  sa  femme,  l'un  d'eux,  nommé  Kachek,  qui  est 
de  Zibit,  gage  cent  roupies  qu'il  la  séduira  en  deux  mois,  et 
part  pour  Zibit,  Quand  il  revient,  il  décrit  à  Moslema  sa 
chambre  et  ses  meubles,  ainsi  que  les  deux  signes  de  sa  femme, 
«  trois  grains  de  café  sur  la  cuisse,  une  petite  souris  bien 
veloutée  sur  le  dos  »  (cf.  Batacchi).  Moslema  paie  et  revient  à 


1.  Herodiano  lui  âvaît  donné  sa  Htle  con  cmntas  riqui^m  y  pQmimts  tfnia, 
COH  ial pacfo y  condkhtt  qttëh  hahia  df  iuUtniar  iodos  hs  dias  de  su  vida, 

2.  Jl  est  Mns  doute  d^ïïivré  plus  tard^  mais  ce  n'est  pas  dît. 

3.  Dans  £/5  JvanUtns  (TAbdalta^  fih  tPHmiif...  iraduiUs  sur  h  manuscrit 
arubi  îrmtvé  à  Batavia  par  M.  dt  Sandissan^  y  édition,  Paris,  1745,  2  vol* 
111*11  (t.  lî,  p.  122)  [par  Jean-Paul  Btgnon  (1622-174}].  Ce  livre  parut  en 
1712-14;  il  ti^est  pas  exact  de  dire  qu'il  fut  publié  «  sotis  k  nom  de  Sandb- 
son  »,  Tous  les  orientalistes  regardent  comme  fictif  cet  ouvrage  prétendu- 
ment arabe. 


$14  — —  ^    pj^j^j^ 

Zibit,  voulant  tuer  sa  femme,  mais  il  veut  le  faire  sûrement 
(dans  Timooeda,  tl  Taîme  encore  trop  pour  la  tuer  de  ses 
mains).  II  dit  que  sa  mère  à  Mocca  veut  %'oir  Rasimi,  obtient 
avec  peine  le  œnsenteraent  du  père,  et  l  emmène  sur  un  bateau 
dont  le  patron  lui  obéit.  Au  Heu  d'aller  à  Mocca,  il  mène  sa 
femme  à  une  île  désene,  où  il  rabandonne  endormie,  —  Le 
vaisseau  le  conduit  de  là  â  Surate,  où  U  passe  deu3i  ans  comme 
soldat  Ccf*  B*bî,  B^ba),  après  quoi  il  revient  à  Zibit,  où  il  raconte 
ison  beau-père  qu'une  tempête  a  brisé  le  vaisseau,  que  tous  ont 
été  noyés  sauf  deux  matelots  et  lui-même;  que,  jetés  sur  une 
plage  d'Afrique,  les  trois  survivants  ont  été  vendus  à  des  cor- 
saires, et  qu'enfin,  ces  corsaires  ayant  été  pris  à  Surate,  il  a 
recouvré  la  libené.  L'émir,  feignant  de  le  croire,  l'envoie  au 
bain,  et  l'y  fait  arrêter.  Devant  le  cadt  il  raccuse  d'avoir  &it 
périr  sa  fille,  et  le  prouve  par  les  déclarations  d'un  marinier  et 
d'un  témoin  qui  avait  entendu  son  pacte  avec  le  patron  du 
navire.  Moslema  est  condamné  à  être  brûlé,  mais,  sur  le  conseil 
d*un  archer,  il  en  appelle  au  roi.  Amené  au  divan,  et  sommé  de 
dire  ia  vérité,  il  la  raconte,  o  Tu  es  plus  coupable  que  tu  ne  le 
crois  *s  dit  le  roi;  «  qu'on  amène  les  autres  coupables  i>.  On 
amène  Kachek  avec  une  vieille,  et  le  roi  ordonne  au  traître  de 
renouveler  son  aveu.  Il  raconte  alors  qu'il  n'a  rien  pu  obtenir 
de  Rasimi  \  et  que  la  vieille,  qui  était  bien  re^ue  dans  la  mai- 
son,  n'a  pas  mieux  réussi  ;  qu'alors  il  se  fit  décrire  «la chambre 
et  la  personne  de  Rasimi  »,  moyennant  quoi  il  put  décevoir  le 
mari.  Moslima  est  indigné,  mais  dit  qu'il  mérite  b  mort  pour 
avoir  tué  sa  femme.  «  Ton  juge  va  venir  ^  »,  dit  le  roi,  et 
Rasimi  paraît  en  somptueuse  parure.  Elle  dit  qu'elle  ne  peut 
blâmer  son  mari,  qui  n'a  agi  que  par  honneur,  et  qui  n'a  pas 
voulu  verser  le  sang  de  sa  femme;  elle  prie  d  genoux  son  père 
et  le  roi  de  pardonner  à  Moslima,  ce  qu'ils  font,  Kachek  est 
chargé  de  fustiger  la  vieille,  tous  deux  sontbannb,et  leurs  biens 
confisqués*  —  Rasimi  raconte  alors  son  histoire.  A  son  réveil 
dans  nie  déserte,  elle  s'est  lamentée,  mais  a  deviné  qu'elle  avait 
été  calomniée.  Avec  des  ciseaux,  du  fil  et  des  aiguilles,  elle  a 


n  Dans  Timonrdâ,  il  ri*a  pu  être  admis  chct  là  femitie,  au  lieu  qu'ici  il  lui 
a  fait  des  déckrations  d'amour* 
3.  Œ  la  FUhm^. 


LE  CYCLE   DE   LA    ^    GAGBURH   3»  525 

accourci  ses  habits  et  caché  ses  cheveux,  se  déguisant  en  homme. 
Elle  à  vécu  de  coquillages,  d*herbes  et  de  mieL  L'île  étant  cou- 
verte d*a!uèsj  des  marchands  d*Hadramath  \  venus  pour  en 
(récolter^  l'ont  recueillie,  A  Hadramath,  sous  le  nom  de  Soliman, 
'^ette  a  rendu  de  grands  services  au  sultan  par  sa  connaissance 
du  calcul,  et  elle  est  devenue  son  grand  douanier.  Le  roi  de 
Zibit  étant  venu  visiter  celui  d'Hadramathj  Soliman  lui  a 
demandé  de  Temmener,  et  celui-ci  y  a  consenti  (elle  a  tout 
raconté  au  roi  de  Zibic).  Revenu  à  Zibît,  le  roi  a  interrogé 
Surmassak  sur  le  sort  de  sa  fille,  qu*il  lui  a  rapporté  d'après  les 
témoins.  Rasîmi  n'a  voulu  se  faire  reconnaître  que  quand  son 
innocence  serait  établie  ;  on  a  arrêté  Kachek,  qui  a  avoué  sa 
fourberie.  C'est  à  ce  moment  qu'est  revenu  Moslema,  et  c'est 
Rasimî  qui  lui  avait  fait  dire  par  l'archer  d'en  appeler  au  roî. 

La  ressemblance  de  ce  conte  avec  celui  de  Timoneda  est 
tellement  frappante  qu*il  faut,  soit  quMls  aient  une  même  source 
suivie  de  très  près,  soît  que  l'un  vienne  de  Tautre.  Or,  si  on 
remarque  que,  partout  oii  ils  diffèrent,  c'est  Timoneda  qui  se 
rapproche  des  autres  versions,  tandis  que  Bignon  est  isolé,  on 
conclura  que  Bignon  n'a  fait  qu*arranger  le  récit  de  Timoneda, 
dont  il  a  seulement  transposé  les  éléments  pour  obtenir  un  effet 
plus  dramatique.  Ce  résultat  vient  confirmer  l'opinion  de  ceux 
qui  pensent  que  le  livre  de  Bignon  n'est  pas  traduit  de  l'arabe, 
mais  compilé  par  lui  à  l'aide  de  diverses  sources. 

Timoneda,  comme  Va  montré  Liebrecht  %  a  surtout  imité  des 
nouvelles  italiennes;  toutefois,  il  n'est  pas  exact  de  dire  que 
celle-ci  soit  tirée  de  Boccace  ;  nous  avons  vu  qu'elle  se  rattache 
de  bien  plus  près  au  groupe  dont  fait  partie  Francisco  (B^b); 
mais  il  est  très  possible  qu'elle  ait  une  source  italienne  perdue. 
Du  moins  trouvons-nous  une  ressemblance  frappante  entre  sa 
seconde  partie  et  la  seconde  partie  d'un  conte  du  Mont  ferrât, 
d'ailleurs  singulièrement  altéré, 

^  ^  3:  La  nwglie  calunniaia  K  —  Le  début  est  très  bizarre  :  plus  de 
gageure;  il  s'agit  de  deux  frères,  dont  l'aîné  a  épousé  la  fille  trè^ 
belle  d'un  bouvier.  Le  frère,  jaloux,  se  dit  qu  elle  doit  avoir 


K  Ou  Hadramaut^  Hiidramaout,  région  mèndîoniiicdr  TArabLe* 

1.  Dunlop-Lkbrotht,  p*  500. 

3,  Coniparctti  Cl  d'Ancona,  Km^elk  popohri  Uaîiam^  n^  UL,^, 


526  G.    PARIS 

une  tare;  i!  Tentloft  ptf  un  oarcotiquej  la  découvre,  ec  voit 
sa  jambe  une  marque  t^tisée  par  une  brûlure;  un  jour  que  le 
mari  vante  la  beauté  de  sa  femmes  ^  rèvèlc  ce  défaut-  Le  mari> 
croyant  qu'elle  lui  a  été  infidcle,  la  Hvfc  à  im  capitaine  de 
navire,  qui  doit  la  jeter  à  Teau  et  lui  rappartcr  ses  vêtements. 
Par  pitié,  il  remplace  les  vêtements  de  la  femme  par  ceitxd^un 
marin,  la  laisse  sur  une  île  déserte,  et  rapporte  ses  vètemeats  au 
mari.  Elle  entend  sur  un  arbre  des  sorcières  dire  qu^une  infu- 
slon  de  fleurs  cueillies  à  cet  endroit  guérirait  le  fils  du  roi 
qu'elles  ont  ensorcelé.  Recueillie  sur  un  navire,  elle  guérit  le 
prince  et  demande  pour  récompense  d*ôtre  juge  dans  la  ville  où 
demeure  son  mari.  Or  celui-ci  est  cité  par  son  beau-père  pour 
dire  ce  qu'est  devenue  sa  femme  :  le  mari  savait  déjà  (com- 
ment Tavait-il  appris?)  qu'elle  était  innocente ^  et  il  était 
plein  de  remords.  Elle  se  Êiit  reconnaître^  pardonne  aux  deux 
frères,  et  ils  vivent  heureux* 


I 
I 


B*b  :  Im  femme  ra^ndique  eîle-mime  son  droit  à  la  cmir  du  roi 
timmn  de  la  gageure. 

B^bl  ;  Pas  de  Iravesûs^ment  nî  de  ûgne  ;  combat  singulier  de  la  femme 
et  du  traître* 

1,  Eknâ\  —  Ce  petit  poème  du  xiv*  siècle  nous  est  arrivé 
en  assez  mauvais  état  dans  les  deux  manuscrits  qui  nous  l'ont 
conservé;  mais  Tauteur  lui-même  (malgré  ce  qu'il  dit  au  début) 
est  incohérent  et  maladroit^.  Son  récit  se  place  dans  le  cadre 
de  l'ancienne  épopée  française,  Elena,  l'héroïne,  est  la  fille  d*Ar- 
naldo  di  Gironda,  Ton  des  fils  d'Aimeri.  Tous  les  noms  sont 
français  ou  provençaux,  Roger  ou  Oger  (==  Vrger)  de  Monîpel- 
Ikr^  Garnkr  {^d^Ollramare^^  Gironda;  le  roi  est  Charlemagnc 
d'après  Tun  des  manuscrits,  Aluisi  d'après  l'autre.  Tous  ces 
indices  font  croire  à  une  source  française  ou  plutôt  peut-être 
provençale*  Amaldo  di  Gironda  envoie  sa  fille  Elena  *  à  Char- 


ï,  Cant4irt  di  mudûttna  Elàm  impératrice.  Livorno»  1880  (pour  les  oooe^ 
Soria-Viulî,  p.  p,  O*  Targioai  Tozzqxû  âux  frais  de  Od,  Viiali), 

1.  C^étatt  un  simple  mniml^ra  de  place. 

\.  Et  le  est  appelée  mécaniquement  impératrice  k  cause  de  samte  Hélène, 
toujouri»  ainsi  ^^ualjfiéc^ 


LE   CYCLE  DE  LA    ft   GAGEURE    *>  527 

lemagoe  (ou  à  Louis),  qui  h  marie  à  Rugieri  da  MotupoUir^  poks- 
taâidi  Parigî  :  elle  en  a  deux  fils.  Dans  une  scène  curieuse  de 
vanii  Rugieri  loue  la  beauté  de  sa  femme  ';  Gueniieri  d'Ohra- 
mare  prétend  qu*ii  a  déjà  fiait  d*Elena  tout  son  talent*- 
Rugieri  le  provoque,  mais  Guerniert  répond  qu*il  peut  prouver 
son  dire  sans  bataille  ;  il  apportera  d'ici  un  mois  les  joyaux  et 
le  i^ekito  d'Elena  ;  il  donne  en  caution  ses  trois  enfants.  U 
partj  déjà  découragé,  arri%'e  à  Gironda,  et  se  met  à  se  promener 
autour  du  château.  Au  bout  de  trois  jours,  unh  cameriera  se 
met  à  la  fenêtre  et  Tinterroge;  il  raconte  la  gageure  et  lui 
promet  de  rèpouser  *,  sî  elle  Taide-  Elle  lui  décrit  alors  le 
palais  d'Elena,  sa  chambre  et  (bien  vaguement)  sa  beauté,  et 
lui  donne  un  de  ses  trois  voiles,  un  anneau  et  un  smggiak{cdn' 
ture).  Arrivé  à  la  cour,  Guernieri  montre  les  joyaux  (il  ne 
redit  pas  la  description);  le  mari  tombe  isirangosciato  (et  le 
livret  allemand),  et  s'avoue  vaincu.  Le  roi  dit  à  Rugieri 
qu'il  doit  mourir  (bien  que  cela  n'ait  pas  été  clairement 
stipulé)*  Rugieri  demande  le  temps  d'aller  à  Gironda.  Il  entre 
dans  le  château,  tue  tout  ce  qu'il  rencontre,  tue  ses  deux  fils 
et  veut  couper  la  tète  à  Elena,  mais  il  «  se  repent  »,  et  la  lance 
par  une  fenêtre  dans  un  fleuve  rapide  ;  après  quoi  il  retourne 
à  Paris,  Dieu  sauve  Elena,  qui  rentre  dans  son  palais  devant 
ses  gens.  Elle  avertit  son  père,  retiré  dans  une  ville  près  de  la 
mer,  le  priant  de  venir  en  force  à  Paris  pour  châtier  son  mari^ 
qui  a  tué  ses  deux  fils^*  Elle-même  part  avec  une  grande 
troupe*  Rugieri  est  venu  se  livrer  au  supplice  :  on  va  le  pendr; 
quand  Elcna  arrive,  et  dit  que  son  mari  est  innocent  ainsi 
qu'elle^mème^.  Elle  demande  à  être  confrontée  avec  le  traître. 
Il  arrive  et  dit  qu*il  Ta  possédée  et  qu^elle  lui  a  donné  les 
joyaux-  Mais  Elena  affirme  qu'il  ment,  qu*il  les  lui  a  volés. 
Guernieri  persiste  :  alors  elle  le  provoque,  et  refuse  un  chani- 


K  II  ne  vante  que  sa  beauté,  sans  doute  par  sîmpîe  omission  du  poète, 
2.  Cf,  Antiquario,  la  SitiMla^  le  Guanto  d'oro,  Framkco  (?),  la  byline. 
î.  Cf.  Frvtmi$C0y  la  byline. 

4,  «  Pour  châtier  son  roari  m  n*cst  pas  dans  le  texte  :  lacune  ^vîdentt, 
commune  aux  deux  manuscrits. 

5.  On  ne  dit  pas  comment  elle  est  inforniêe  :  à  la  str.  xly,  elle  fait  dire  k 
son  père  qu'elle  ne  ^it  pas  pourquoi  Rugieri  a  tué  ses  6ÎS. 


528  G-    PARIS 

pioti*  Dans  le  combit  (où  on  ne  voit  pas  qu  elle  s* habille  enl 
homme),  elle  lui  coopc  le  bras,  sur  quoi  il  a%aue  qu'il  lient 
tous  les  joyaux  de  b  camerûra  ;  Ll  ^i  décapité  ec  la  mmeriera 
est  brûlée»*  Rugieri»  mis  en  liberté,  mais  plein  de  remords 
et  de  crainte^  s'enfiiit,  Aroaldo  di  Gironda  arrive  sur  les  entre- 
faites, sa  iîlle  lui  raconte  tout;  il  veut  tuer  Ru^eri,  mais 
Elena  lui  dît  qu'il  se  repent»  et  demande  sa  grâce.  On  le 
retrouve  et  on  célèbre  de  nouveau  son  mariage  avec  Elena; 
les  époux  retournent  à  Giionda* 

B*bO  :  Tràvestissci»eût;  pas  de  signe;  pas  de  combat  singulier. 

Celte  forme  comprend  trois  versions,  dont  aucune  n*est  1 
ancienne  ni  peut-être  primitive;  elle  ressemble  beaucoup  à  la  ' 
précédente, 

n  La  bylintXpTi  plutôt  pobyvûlchkhina)Tuss^  *.  — Elle  débute 
par  une  préhistoire  qui  n'a  rien  a  faire  avec  notre  conte*  — 
Thedka  (ou  Alècha,  etc-)  prétend  être  depuis  trois  ans  Tamant 
de  la  femme;  le  mari  s*avouera  convaincu,  si  Thedka  loi 
apporte  son  collier  d'or,  C*esî  Vbdimir  qui  fixe  b  peine  que 
devra  subir  le  perdant.  —  Le  galant  se  promène  en  vain  devant 
la  maison  ;  il  fait  venir  la  chambrière  *  et  lui  promet  de 
Tépouser,  si  elle  Taide  (cf.  Francisco^  Elma  ).  Elle  lui  apporte 
le  collier  d*or;  le  mari,  convaincu,  est  relégué  au  dernier  rang  (il 
soigne  les  poules  comme  dans  le  conte  norvégien,  B'b3).  Il  vend 
sa  femme,  sans  la  prévenir,  à  un  capitaine  de  navire,  qui  l'emmène 
en  Portugal  (histoire  de  la  force  surhumaine  de  la  femme,  qui 
devient  capitaine).  Elle  fait  le  commerce  en  Portugal  etdevieor 
roi.  Elle  vient  à  Kiev,  se  fait  reconnaître  (au  bain)  par  son  mari, 
et  se  présente  avec  lui  à  Vladimir,  On  recherche  Tedka,  qui 
avoue^  son  crime,  et  qui  est  déoipité  (il  n'est  plus  question  de  la 


1.  On  Im  fait  donc  venir,  mus  ce  n'est  pas  dît.  Ht  Je  plus  surpicnaot,  c'est 
qu*AiTialdo  dî  Giroûda,  arrivant  é\idemmcnc  ea  même  temps,  voit  de  loin  le 
feu  qui  la  brûk,  et  croit  «^ue  c'est  ù  fille  qui  a  iié  cQuâAmnéx,  au  bûcher» 
Peut-être  G  uemicri  avait-il  a  men^  la  f4w«/er*a  ivcclui, 

2.  Voy.  Hambaud»  La  kunU  ^i^ut,  p.  117;,  Wesselofsky,  JouJHormtkiyA 
hyliny,    18S4,  El,  p*    01  ;  Jmrmi  du   Minhihw   de  timirmlim  fukîiqm'^ 

t:a:xui(j&80.  p-  i6é». 

l.  Le  rôk  de  k  vletUe  est  absurde  et  inutile. 


LE   CYCLE    DE    LA    **    GAGEURE    »  5^9 

cliambrière,  qu'il  a  sans  douce  épousce  comme  dans  Francisco); 
les  époux  retournent  en  Portugal. 

Les  réflexions  de  M,  Rambaud  sur  a:  conte  sont  toutes  à  côté 
et  ne  portent  en  général  que  sur  des  traits  (ceux  de  h  préhis- 
toire, par  exemple)  qui  ne  lui  appartenaient  pas ^  M.  Wessebfsky 
est  naturellement  plus  critique,  mais  il  n'a  pas  suffisamment 
discerné  dans  ce  récit  (dont  il  cite  de  nombreuses  variantes  dans 
les  contes)  les  traits  que  la  tradition  orale  russe  a  ajoutés  aux 
éléments  primitifs.  II  reconnaît  bien  que  la  mention  du  Por- 
tugal indique  une  origine  étrangère,  mais  il  pense  qu*un  conte 
occidental  s  est  mêlé  à  une  version  russe  originale.  Ce  n'est  pas 
•  probable,  et  il  ne  faut  voir  dans  les  traits  propres  aux  versions 
'russes  rien  autre  chose  que  de  ces  additions  que  les  conteurs 
populaires  mêlent  aux  récits  de  provenance  étrangère. 

2.  Conte  juif-allemand  *.  —  (Préhistoire*)  I^e  fils  du  vice- 
roi  de  Portugal,  marié  h  une  jeune  fille  belle  et  pauvre,  arrive 
dans  une  ville  étrangère,  où  il  entend  un  étudiant  se  vanter 
qu'il  séduirait  sa  femme,  s'il  le  voulait;  on  gage  une  forte 
somme.  L'étudiant  arrive,  se  promène  en  vain  devant  la  mai- 
son, 11  gagne  une  anciermc  nourrice,  qui  obtient  de  passer  une 
nuit  chez  la  i'emme,  endort  cclIe-ci,  voit  son  signe  (noir,  sur 
le  côté),  et  prend  des  joyaux.  Le  prince,  convaincu,  emmène 
sa  femme  sur  mer  et  Tabandonne  dans  une  barque.  Elle 
s*habille  en  homme,  devient  ministre  du  suzerain  du  prince', 
puis  est  faite  par  lui  vice^roi  de  Portugal  Elle  interroge  le 
prince,  qui  raconte  tout,  puis  Tétudiant,  qui,  menacé  de  la  tor- 
ture (?),  avoue  sa  perfidie.  Il  est  brûlé  avec  la  vieille.  La  femme 
cède  le  trône  à  son  mari. 

Ce  conte,  comme  Ta  remarqué  M,  Wesselofsky,  se  rapproche 
beaucoup  du  récit  russe  :  il  fiut  remarquer  qu'il  a  le  motif  du 
sigoe^  que  te  récit  russe  ne  connaît  pas. 

j.  Lu  redi  Spa^na  c  lu  Milordn  inglisi  K  —  (Préhistoire.)  Le 


1,  Voy.  M.  Grûnbaum,  Jadmhikuische  ChmtomaihU  (Leipzig,  iSSi), 
p.  421,  Corne  du  xvcii«  sièdc,  et,  d'après  Grûnbaumi  traduit  de  l'aile- 
mand. 

2,  Soû  talent  d'écrivain  h  fait  demander  par  le  suzerain  au  vice-roi  chez 
quj  die  était  employée, 

j,  G.  Pitre j  Friï/«,  noveili  i  f^ccùnti  p^ari  skUianif  n«  LXXiv,  —  Le  titre 
est  mal  donné  :  l'iiéroîne  est  d'Espajçne^  raaîs  non  le  roL 

xxxii  14 


jJO  G*    PARIS 

niilord  voit  U  reine  ù  sa  fenêtre;  il  s'adresse  à  une  vieille,  qui 
lui  conseille  d'envoyer  à  k  reine  trois  présents  ;  elle-même 
se  charge  de  les  porter,  mais  au  lieu  de  les  donner  à  la  reine, 
elle  les  lui  vend.  Le  milord  donne  un  bal,  la  reine  y  vient, 
mais  ne  daigne  pas  lui  parler.  lien  est  indigné,  et,  dans  un  café 
où  le  roi  se  trouve  déguisé,  il  raconte  comment  elle  a  accepté 
des  présents  de  lui*  Le  roi  livre  sa  femme  à  un  capitaine  de 
navire,  qui  a  ordre  de  la  tuer  et  de  lui  rapporter  sa  langue*  Il 
coupe  (et  sale)  celle  d'un  chien,  et  abandonne  la  reine  sur  une 
île  déserte.  Recueillie  par  un  navire,  elle  se  fait  conduire  au 
Brésil,  dont  Tempe reur  est  frère  du  roi*  Habillée  en  homme, 
elle  se  fait  clerc  de  notaire  et  devient  célèbre  par  son  talent  de 
scribe  (cf.  le  conte  juif-allemand).  Le  roi  la  fait  %'enir,  la  prend 
pour  son  secrétaire,  puis  pour  écuyer.  Le  roi  a  des  remords 
et  tombe  malade;  le  peuple  est  mécontent,  La  reine-mère  pré- 
vient son  autre  fils,  Tempercur  du  Brésil,  qui  envoie  son 
braccien  en  Portugal  comme  vice-roi.  Le  vîce-roi  calme  le 
peuple,  puis  il  interroge  la  reine-mère,  qui  raconte  Thistoirc, 
On  fait  venir  le  milord  qui  dit  ce  qu'il  sait,  puis  la  vieille,  qui 
avoue  son  imposture.  Elle  est  brûlée,  le  milord  envoyé  à  la 
cîdliHina;  les  époux  se  réconcilient. 


B*Ï>1II  :  Trivçstissement,  signe. 


I,  Lt  miracle  d'Oim^  roi  d'Espagne  *.  —  Cette  œuvre,  ou  les 
personnages  sont  comme  des  vraies  marionnettes^  est  d'une 
extrême  faiblesse  et  d'une  insigne  gaucherie.  Li  source  en  est 
probablement  un  roman  d'aventure  où  la  Vierge  ne  jouait 
aucun  rôle;  elle  est  introduite  dans  le  miracle  d'une  façon 
maladroite,  et  qui  détruit  même  le  récit  primitif. 

A  travers  les  fâcheuses  altérations  du  dramaturge,  nous 
pouvons  à  peu  près  reconstituer  ce   poème   primitif    perdu. 

I.  Miracks  de  Noire -Damt,  p.  p.  G.  Paris  ei  LU.  Rûben»  i.  \\\  n°  xxvm. 
Ces  miracles  se  ressemblent  tous  beaucoup  (Schmell,  AiHgahn  und  jbfjand- 
Imgen,  XXXIU,  aJmet  vingt-sept  auteurs,  ce  qui  est  douteuît);  îb  ont  éih 
composés,  vers  J580,  sans  doute  à  Paris,  pour  une  canfrérie  de  k  Vierge, 
Ils  imroduïserjt  Noire-Dame  dans  mie  fouie  d'histaires  qui,  parfois,  sedéaouent 
sans  miracle.  C*est  le  cas  pour  celui  qui  nous  intéresse. 


LE   CYCLE  DE   LA    «    GAGEURE    a  Jjî 

L'empereur  Lotoire*  a  deux  serviteurs,  Oton  (son  neveu),  ec 
Bérenger,  qui  briguent  lii  main  de  Denisej  fille  du  roi  d*Es- 
pagne;  c'est  Otun  que  Denise  préfère;  il  l'épouse;  le  roi 
d'Espagne  leur  cède  son  royaume,  et  se  retire  à  Grenade  chez 
son  frère.  Oton  quitte  sa  femme  pour  venir  à  Rome  et  lui 
laisse,  en  .gage  d'amour>  un  os  d'un  doigt  de  son  pied*.  A 
Rome,  Bérenger,  qui  est  de  la  race  des  traîtres,  gage  sa  terre 
contre  le  royaume  d'Oton  qu'il  séduira  Denise;  sa  gageure  sera 
gagnée  s'il  peut  décrire  un  seing  que  Denise  a  sur  le  corps  et 
rapporter  Tos.  Venu  à  Burs,  il  la  rencontre  allant  à  l'église 
(cf,  le  livret  populaire  allemand,  B^aj)  et  lui  fait,  en  calom- 
niant son  mari  (cf*  Post humus)  des  propositions  qu'elle 
repousse.  Il  gagne  la  chambrière  et  obtient  d'elle  Tos  et  la 
description  du  seing,  Oton  s^avoue  vaincu  et  vient  a  Burs  pour 
tuer  sa  femme  qui>  prévenue  \  s'enfuit,  sliabille  en  homme^  et 
se  met  au  service  de  son  père,  le  roi  Alfons,  qui  ne  la  reconnaît 
pas.  —  Oton,  désespéré  d'avoir  vainement  cherché  Denise,  s  en 
va  en  paknic.  Le  roi  Alfons,  apprenant  ce  qui  s'est  passé, 
déclare  la  guerre  à  l'empereur  et  arrive  devant  Rome;  Denise, 
qui  a  pris  le  nom  de  Denis,  se  fait  envoyer  comme  messager 
auprès  de  Tempereur  ;  elle  accuse  Bérenger;  chemin  faisant,  elle 
a  rencontré  Oton,  qui  est  revenu  misérable  et  l'a  fait  arrêter 
(cf.  Posîfmmus).  Elle  fait  le  combat  contre  Bérenger  *,  qui  avoue 
son  crime  K  Denise  pardonne  à  son  mari. 


I.  Etait-ce  un  empertur  de  Rome,  comme  en  d'autres  poèmes  d'aven- 
liîrc?  —  Sur  ce  nom  de  Lotaire,  cf.  Ohle,  p.  44,  n.  i  ;  sts  rapprochements 
sont  peu  probables.  —  La  forme  Lùtairt  tndique-t~dïe  une  source  latine  ? 

ï.  Ce  don  est  bizarre  {tL  Ohlc,  p.  44,  n,  3),  mais  se  rattache  sans  doute 
i  I4  forme  yl  de  notre  conte. 

J.  Peut-être  était-ce  le  serviteur  chargé  de  la  tuer  qui  l'épargnait  ei  lui 
donnait  des  habits. 

4.  Dans  le  Mlrack^  elle  s*offre  à  combattre,  mais  Oton»  que  Dieu  et 
Notre-Dame  ont  ave  ni,  se  révèle  comme  mari  el  revendique  le  droit  Je  Caire 
la  bataille;  elle  le  lui  cède.  Il  y  a  là  certainement  un  arrangement  maladroit^ 
résultant  du  Tait  que  k  dramaturge  a  voulu  introduire  un  miracle  :  tout  le  rôle 
de  la' femme  devient  inutile.  M,  Dhle  comprend  les  choses  autrement,  et  veut 
que  le  miracle  soit  primitif. 

%.  On  va  .\  Burs  pour  exécuter  le  traître  et  sa  complice. 


SJl  G.    FARÎS 

2,  Le  roi  Flaire  et  la  belle  Jelmnm  '.  —  Ce  petit  roman  en  prose 
ne  paraît  pas  fait  d'après  un  texte  en  vers.  Il  comprend  deux  his- 
toires qui  n'ont  aucun  rapport  Tune  avec  Tautre,  bien  qu'elles 
se  rejoignent  à  la  fin,  et  dont  la  première,  celle  du  roi  Floire 
d'Aussai  et  de  son  triple  mariage,  n'a  aucun  intérêt  ',  L'his- 
toire elle-même  est  pleine  de  gaucheries,  de  contradictions  et 
d*inutililés,  bien  qu'elle  plaise  par  la  Éicilité  et  la  grâce  du  style. 
Elle  semble  provenir  d*ane  tradition  orale,  très  arrangée  par 
l'auteur,  où  diverses  versions  s'étaient  mélangées.  Nous  la  ran- 
geons ici  parce  qu'elle  contient,  comme  le  miracle,  un  combat 
singulier,  et  parce  qu'elle  fait  en  quelque  manière  transition 
entre  ce  groupe  et  le  suivant,  où  la  femme  est  purement  passive; 
maiselleprésenteplusieurstraitsqui  ne  se  retrouvent  nulle  part^  et 
qui  sont  inventés  sans  douce  par  Tauteur  lui-même,  ou  empruntés 
par  lui  à  d'autres  contes  K  II  faut  noter  l'importance  qu'y  prend 
le  sentiment  religieux,  bien  qu'il  n'y  ait  ict  aucun  miracle. 

Un  chevalier  «  ki  manoit  en  le  marche  de  Flandres  et  de 
Hainnau  »,  en  reconnaissance  des  services  que  lui  a  rendus  un 
écuyer  très  pauvre,  nommé  Robert,  lui  donne  quatre  cents 
livrées  de  sa  terre,  lui  offre  sa  fille  Jehanne  en  mariage,  et 
Tarme  chevalier.  Mais,  à  peine  adoubé,  Robert  annonce  qu'il  a 
jadis  fait  vœu  de  partir  en  pèlerinage  pour  Saint-Jacques  de 
Oimpostelle  dès  le  lendemain  du  jour  où  il  aurait  cté  fait  che* 
valîer  :  le  lendemain  matin  donc,  il  épousera  Jehanne^  puis  se 


1.  Pubtt^  d'stprts  k  maauscnt  unique:  i«  par  Fr.  Michel  en  1838;  i»  par 
Fr.  Michel  et  Monmerqué,  Aneim  ihédire  françah  (Paris,  1841),  p^  417; 
je*  pat  Moland  et  d*Hérkauït^  NùttvelUs  /ranimer  en  prose  dti  XII h  iùcli 
(Paris,  1S56).  —  Il  est  du  xm=  siècle:  M.  Oh  le  (p.  31)  remarque  qïi*uîi 
croisé  débarque  i  Aigues^Mortes^  ce  qui  lui  paraît  indiquer  le  milieu  du 
xuje  siècle.  —  La  langue  est  pi<:arde- wallonne.  —  Noieice  quedisent  Moland 
etd'Hêncauli,  p.  xxxiii,  d'une  imitation  du  kv*  siècïe  (?). 

2.  Ce  roi*  qui  n'a  pas  d'enfant  de  sa  femme,  la  quitte,  en  épouse  une 
autre  qui  demeure  également  stérile,  puis  épouse  Théroine  de  notre  rédt. 
L  atiieur  semble  avoir  voulu  récompenser  celfe-eî  de  sa  belle  conduite  en  lui 
faisant  épouser  un  roi  :  c'est  un  trait  de  fort  mauvais  gôût»  et  qui  fausse  tout 
l'esprit  de  notre  conte,  où  la  viaie  récompense  de  la  femme  iidèle  cl  calom- 
niée est  Tamour  ei  Testime  de  son  mari. 

;,  Comme  le  rèle  de  ta  femme,  habillée  en  homme,  atiprài  de  son 
man. 


LE  CYCLE   DE   LA    «    GAGEURE    »  S 33 

mettra  en  route-  Le  père  le  blâme,  ec  un  chevalier  de  k  cour, 
nommé  RaouL  se  fait  fort,  s'il  part,  de  séduire  Jehan  ne  avant 
son  retour  ;  Robert  gage  contre  lui  ses  quatre  cents  livrées  de 
terre,  et  tous  deux  vont  «  recorder  lor  convenances  »  au  père, 
qui,  singulièrement,  se  borne  à  prendre  acte  de  la  gageure.  — 
Le  lendemain  matin,  en  effet,  après  avoir  épousé  Jehanne, 
Robert  part  pour  Saint-Jacques  sans  consommer  le  mariage, 
et  laissant  sa  femme  avec  le  galant  (cf*  le  conte  de  Woltï}. 
Raoul  gagne  à  prix  d'argent  une  vieille,  nommée  Hierseut,  «  qui 
lïianoii  avec  la  bielle  dame  ",  et  qui  essaie  de  la  persuader  K 
Comme  ses  tentatives  sont  restées  impuissantes,  elle  introduit 
un  jour  Raoul  dans  la  chambre  de  Jehanne,  tandis  qu'elle  est 
dans  son  bain.  Il  veut  lui  faire  violence,  elle  se  défend,  et  pen- 
dant qu'elle  se  débat,  il  remarque  «  une  noire  take  ke  elle 
a  voit  en  la  diestrc  ainne  »  ;  il  Temporte  vers  le  lit,  mais  choit 
parterre  avec  elle;  elle  se  relève  avant  lui,  «  et  prist  une 
buse  et  en  ferimon  seigneur  Raoul  par  mi  le  visage,  si  qu'ele 
Ij  fait  plaie  grant  et  parfonde,  et  li  sans  en  cîet  a  tiere.  Et  cant 
mesire  Raoul  se  senti  ensi  navré,  si  n*ot  pas  grant  talent  de 
dosnoiîefj  ains  se  le%-a,  et  s*en  ala  tout  le  cop  fors  de  la 
chambre,  »  ■ —  Retour  du  mari  :  il  ne  peut  voir  dès  son  arrivée 
le  galant,  trop  blessé  pour  venir  à  la  cour;  la  nuit  venue,  il 
consomme  son  mariage,  et  cVst  le  lendemain  seulement  que 
le  traître  lui  révèle  quelles  u  enseignes  »  il  a  remarquées  sur  le 
corps  de  sa  femme.  Le  soir,  Robert  les  vérifie,  ne  dit  rien  à 
Jehanne;  le  lendemain  il  s'avoue  vaincu  :  il  est  dépouillé  de 
sa  terre  et  part  aussitôt  en  pauvre  équipage  (cf,  B'),  Mise  au 
fait  par  son  père,  jehanne,  sans  protester  aucunement,  quitte 
le  château  à  rinsu  de  tous,  travestie  en  homme,  et  se  met  en 
quête  de  son  mari.  Elle  le  retrouve,  lui  dit  qu  elle  se  nomme 
Jehan  (cf.  Denis- Denise  dans  le  Minicle%  devient  son  écuyer, 
le  secourt  de  son  argent  et  de  ses  services.  —  Ce  récit  est  tout 
à  tait  invraisemblable  :  Jehanne  pourrait  ici  prouver  son  inno- 
cence par  le  fait  même  que  son  mart  a  dû  la  constater  la  nuit 


ï .  Le  rôle  de  Hiersent  ressemble  à  celui  de  la  vieille  chez  Boccace  et  chez 
queïquf  5  autres  conteurs  ;  mais  ici,  il  ne  paraît  pas  qu'elle  se  pr^Slc  a  la  super- 
cherie par  laquelle  le  galant  trompera  le  mari  ;  elle  croit  simplemenl  le  ser- 
vir diin$  ^on  amour. 


s  34  G.    PARJS 

de  ses  aoces»  par  ta  vieille  (dont  il  n'est  plus  question)^  par  la 
blessure  du  traître.  Dans  les  autres  formes,  elle  a  besoin  d'un 
moyen  extérieur  pour  confondre  le  traître,  parce  qu'elle  ignore 
comment  il  s'est  procuré  les  indices  ;  mais  ici  elle  le  sait,  et 
pourrait  sans  peine  le  démasquer.  Sans  rien  tenter  pour  faire 
apparaître  la  vérité,  Jehan  se  retire  avec  Robert  à  Marseille,  y 
tient  pendant  plusieurs  années  une  hôtellerie,  subvenant  par  là 
à  Tentreiicn  du  mari,  — ^  Cependant,  le  traître,  pris  de  remords 
au  cours  d'une  maladie,  se  confesse  à  son  chapelain  qui  lui 
ordonne  de  faire  le  pèlerinage  d^outre-mer  et  d*avouer  sur  la 
route  son  péché  à  quiconque  lut  demandera  pourquoi  il  se  rend 
aux  lieux  saints.  Hébergé  à  Marseille  dans  rhôtellerie  de  Jehan 
et  reconnu  par  lui,  il  lui  raconte  donc  son  méfait  :  aveu  qui  ne 
sert  à  rien,  car  Jehan  le  laisse  poursuivre  son  pèlerinage  et  en 
revenir  sans  avoir  rien  dit  à  Robert.  Au  bout  de  sept  ans» 
Jehan  et  Robert  rentrent  dans  leur  pays,  et  Robert  se  fait 
reconnaître  de  son  seigneur.  On  s* attendrait  que  Jehan  se  ser- 
vît ici  de  l'aveu  du  traître,  comme  chez  Boccacc,  en  le  lui  fai- 
sant répéter;  mais,  sans  en  rien  (aire,  il  se  contente  d^affirmer 
que  Raoul  tient  à  ton  la  terre  de  Roben,  et  le  provoque  en 
combat  singulier.  Le  mari,  bien  passif  jusque-là,  revendique  k 
droit  de  combattre  :  il  en  est  de  même  dans  le  Mirûclf;  que 
penser  de  cette  coïncidence?  Dans  le  Miracle ^  il  sait  Finnocence 
de  Kl  femme,  mais,  ici,  il  Tignore  ;  on  ne  comprend  pas  com- 
ment, ayant  jadis  avoué  sa  défaite^  tl  affronte  maintenant  cette 
épreuve  :  peut-être,  dans  la  source  de  Fl&irf  d  Jihanne^  Técuyer 
lui  avait-il  raconté  l'aveu  de  Raoul  *,  On  peut  admcnrc  que 
Fldre  et  Jehanne  et  le  Miracle  avaient  une  même  source^  où 
déjà  {ci.  Elmd)  le  mari  se  substituait  à  la  femme  pour  le  com- 
bat singulier,  —  Victoire  du  mari  ;  aveu  du  traître  ;  Jehanne 
ne  se  fait  pas  encore  reconnaître;  elle  se  retire  chez  une  sienne 
cousine,  à  qui  elle  s'est  confiée,  et  pendant  quinze  joun;  se  fait 
baigner  et  <ïaaisierde  tous  poins  »  avant  de  reparaître  enfin j 
vêtue  en  femme,  devant  son  père  et  son  mari.  Par  là  cette  fia 
rappelle  Aocassin  et  Niœteite. 


I.  Ce  pusage  semble  findlqucr  (éd.  Moomerqué  et  MkheU  p.  421;  : 
«  Gratis  fu  b  joie  le  jour  d  rendcni^  pors  du  irtour  de  Robcn  ce  4c  Jefajiii 
dans  kur  pays],  et  tant  <iuc  misire  Kcîbicrs  coota  a  Jehan  rooobon  et  h 
fiimiatlle  et  de  {gu  F£I  êmmt  iâ  tirrre  4  tort*  m 


LE  CYCLE   DE   LA    «   GAGEURE   »  Sîî 

C.  MAUVAISE  FOI  DU  GALANT;  INDICES;  SON  AVEU  SURPRIS; 
ROLE  PASSIF  DE  LA  FEMME. 

Jusqu'à  présent,  dans  toutes  les  formes  qui  ne  présentent  pas 
la  substitution,  et  montrent,  paV  conséquent,  le  galant  de  mau- 
vaise foi,  nous  avons  vu  la  preuve  de  l'infidélité  fournie  par  un 
signe  sur  le  corps  de  la  femme,  et  le  dénoùment  amené 
par  l'héroïne,  soit  qu'elle  porte  une  fausse  accusation  contre  le 
galant  qui  ne  l'a  jamais  vue,  soit  (habillée  en  homme)  qu'elle 
recueille  ou  obtienne  l'aveu  du  traître,  soit  qu'elle  le  pro- 
voque ou  le  fesse  provoquer  à  un  duel  judiciaire.  Dans  la  ver- 
sion qui  nous  reste  à  étudier,  les  choses  se  passent  autrement  : 
il  n'y  a  pas  de  signe  sur  le  corps  de  la  femme,  le  secret  du 
galant  est  surpris  par  le  mari,  et  c'est  lui  qui  retrouve  sa 
femme  et  provoque,  par  un  duel  judiciaire,  le  châtiment  du 
traître. 

Cette  version  comprend  deux  poèmes  français,  le  Comte  de 
Poitiers  et  le  Roman  de  la  Violette.  Les  ressemblances  étroites  qu'ils 
présentent  ont  fait  penser  que  l'un  était  dérivé  de  l'autre;  nous 
étudierons  cette  question  à  propos  du  Roman  de  la  Violette  y  mais 
nous  dirons  tout  de  suite  que  pour  nous  elle  est  résolue,  que  la 
Violette,  postérieure  au  Comte  de  Poitiers,  en  est  certainement 
dérivée,  et  nous  nous  occuperons  pour  l'instant  du  premier  en 
date  de  ces  romans. 

C'est  une  œuvre  singulière  ',  pleine  de  charme  et  de  bizar- 
rerie, barbare  et  rude,  avec  des  passages  pleins  de  grâce  et  de 
sensibilité.  Elle  est  courte,  si  Ton  néglige  la  seconde  partie 
(v.  1229-1718),  l'histoire  du  fils  de  nos  héros,  qui  n'a  aucun 
rapport  avec  la  première.  La  date  en  est  assez  incertaine,  anté- 
rieure en  tout  cas  à  1230,  date  approximative  de  la  Violette^. 
Par  le  style  archaïque  et  raide,  par  la  liberté  de  la  rime,  par  la 
grossièreté  violente  des  mœurs,  le  poème  semble  très  ancien  ^  ; 

1.  Éd.  Fr.  Michel,  Paris,  1831. 

2.  M.  Ohle  conclut  de  certains  traits  que  le  Conite  de  Poitiers  est  antérieur 
à  la  réunion  de  la  Normandie  à  la  France,  ce  qui  est  très  probable.  Le 
choix  des  héros  semble  inspiré  par  le  désir  d'expliquer  l'union  du  Poitou  à  h 
Normandie. 

3.  M.  Ohle  remarque  avec  raison  qu'il  n'y  est  fait  aucune  allusion  aux 
romans  bretons.  On  peut  penser  i  1180  environ. 


53é  G,    PARIS 

mais  certains  traits  linguistiques  ue  permettent  pas  de  le  faire 
remonter  très  haut  :  les  allusions  au  cyck*  troyen,  kNardssuSf 
au  lignage  Aimeri,  le  placent  en  tout  cas  après  1170,  L'im- 
pression d'archaïsme  résulte  plutôt  de  ce  que  Tauteur,  jongleur 
évidemment,  était  étranger  au  milieu  courtois.  La  langue 
du  poème  est  picarde,  et  probablement  de  la  partie  de  la  Picar- 
die qui  a  voisine  la  région  wallonne. 

Au  début  se  trouve  un  très  intéressant  résumé  de  h  légende 
de  Pépins  sous  le  r^^gne  duquel  est  placée  l'action.  A  sa  cour* 
le  comte  Gérard  de  Poitiers  vante  spontanément  sa  femme. 
Rose,  cousine  de  Pépin  (v.  4^4)5  ^^^^  une  sorte  d'effusion  à  la 
fois  poétique  et  grossière.  Le  duc  de  Normandie  se  vante  de  la 
séduire  en  un  mois\  Après  qu'il  s'y  est  vainement  essayé  en 
une  scène  fort  brutale,  une  vieille  nourrice  va  au-devant  de  ses 
offres,  et  enlève  à  la  comtesse  ^  son  anneau,  dix  deses  cheveux,  et 
un  morceau,  grand  comme  unbesant,  âummitd^sacoie.  Le  galant 
revient  àParis  et  montre  ces  enseignes.  Le  comte  Gérard»  funeuXs 
envoie  son  neveu,  Jofroi  ^5  chercher  sa  femme.  Elle  vient  et  ne 
peut  désavouer  les  indices»  mais  nie  le  fait.  Malgré  ses  dénéga- 
tions, le  roi  déclare  que  Gérard  a  perdu  sa  gageure*  Il  parc 
en  emmenant  sa  femme  à  cheval  devant  lui^  Venu  dans  une  1 
forêt,  il  va  tuer  Rose  :  mais  elle  lui  montre  un  lion  qui  \*a  se 
précipiter  sur  lui*  :  il  le  tue  et  laisse  sa  temme  dans  la  tbrêt  sans  ' 
lui  faire  aucun  maL  Harpin,  autre  neveu  du  comte,  l'y  trouve  et 
remmène  malgré  elle  K  Cependant  Gérard  se  décide  à  aller  à 


ï.  Voyez  G*  Paris,  La  îégtndf  de  Pépin ^  dans  les  MékngtsJuUiu  Hatmt* 
a.  On   appreod  plus  tard  (v.  414)  qu'il  l'avait  en  vtin  demandée  en 
mariage. 

\.  l\  manque  sans  doute  des  vers  disant  qu^elle   fait  baigner  Rose  (cf. 

4.  Œ  te  rôk  du  neveu  (anonyme)  dans  GitUlûume  de  Dok. 

5.  Ce  trait  rappelle  Ertc^ 

6.  Ce  tion  dans  une  forêt  de  France  poorralt  faire  croire  à  une  soun:c 
orientale;  mais  cf.  Ivain,  Aucaisin,  eic,  ;  les  contes  venus  d*Oricnt  lavaient 
intrûdau  dans  le  «  matériel  roulant  »  des  romans.  Ce  lion  semble  amené 
dans  notre  poà me  par  Notre  Dame  (cf.  423,  543,  823);  m^îs  on  aurait  lort 
d*en  conclure  (comme  on  a  fait)  que  nous  avons  afiairc  a  un  conic 
dévot. 

7.  Il  est  bien  invralKmblablc  qu'elle  ne  dise  pa%  quî  elle  est,  ce  qui 
cmpécheruit  Harpîn  de  la  poursuivre  de  ses  obsessions. 


LE    CYCLE    DE    LA    «    CAGEUKE    »  557 

Poîiîers  tuer  le  duc  pour  le  punir  de  ]*avoir  déshonoré.  11 
change  d'habits  avec  un  pèlerin  (cf.  Orsmt  de  Bi'âuvais^  etc.)  et 
arrive  à  Poitiers  ;  niaisj  comme  le  duc  lui  fait  donner  h  boire  et 
àmanger>  Gérard  se  dit  qu'il  ne  peut  tuer  son  hôte.  Il  entend 
une  conversation  du  duc  avec  sa  complice  qui  lui  révC^le  [a 
véritét  et,  tout  heureux,  part  à  la  recherche  de  sa  femme.  Il 
arrive  au  château  de  Harpin',  et  lui  reprend  Rose  en  une  scène 
violente  et  poétique.  Il  arrive  avec  sa  femme  et  défie  le  duc\ 
Celui-ci,  vaincu  en  combat  singulier,  estpenduet  traîné;  la  vieille 
est  affreusement  mutilée.  Les  époux  rentrent  heureux  dans 
leur  pays. 

Tel  est  le  sommaire  de  cette  œuvre  bizarre  et  attachante. 
L'absence  du  motif  du  signe,  que  présentent  toutes  les  autres 
versions,  peut  faire  croire  qu*elle  est  dérivée  de  A  indépendam- 
ment, c'est-à-dire  que  deux  conteurs  indépendants  ont  eu 
ridée  de  remplacer  la  substitution  qui  trompe  le  galant  par  une 
supercherie  du  galant  aux  dépens  des  époux,  cette  supercherie 
ayant  d'ailleurs  le  même  résultai  que  la  substitution,  c'est-à-dire 
de  faire  croire  pour  un  temps  à  la  culpabilité  de  la  femme. 
Malgré  les  abréviations  et  les  lacunes  du  Comte  de  Poitiers^  il 
est,  en  effet,  peu  admissible  qu'il  ait  supprimé  le  signe,  qu'il 
avait  Toccasion  si  naturelle  de  mentionner,  lors  de  la  scène  du 
bain,  et  qui  fournissait  une  preuve  bien  meilleure. 

Le  Comte  de  Poititrs  est  visiblement  une  œuvre  archaïque  et 
simple,  bien  que  la  date  n'en  soit  pas  très  ancienne;  la  Viokiît  ^ 
est  une  œuvre  raffinée,  un  roman  mondain ,  un  roman  à  la 
mode,  avec  tout  ce  que  le  mot  comporte  de  qualités  et  de 
défauts.  L'auteur  s'est  nommé;  il   s'appelait  Gerbert  (on  Gir- 


t.  Il  y  a  ici  évidemment  une  lacune  :  il  devait  apprendre  que  Harpin 
Tavah  trouvée. 

a.  11  est  singulier  que  Pèpîn^  qui  avâii  refusé  un  jtnsf  (v.  428),  accepte  ici 
un  duel  :  il  faudrait  que  Gérard  dît  qu'il  a  entendu  Taveu  du  traître ^  ce  qull 
ne  fait  pa^.  Ceire  lacune,  et  peut-être  celle  qui  a  été  indiquée  â  la  note 
précédente  (et  aussi  Tallusioa  des  w.  1009  5$*)  sembieraieni  prouver  que 
notre  poème  n'est  que  î  abrégé,  parfois  maladroit,  d'un  poème  plus  :inden. 
Notez  aussi  à  cet  égard  les  vv.  306,  595. 

l.  Roman  itf  la  Violdtf  ou  df  GMtnî  de  Nei^s...  par  Gihri  de  Motttreuil, 
publié..,  par  Francisque  Michel  (Paris,  Silveatre,  î8j4,  tiré  à  300  «em- 
plaires)* 


53S  G.    PARIS 

bert,  Gisben,  Gîberi)  de  Montreuil  V.  H  a  composé  son  œuvre 
pour  Mirie,  comtesse  de   Ponîhieu  depuis  1221,  BUc  d'Aclb. 
(fille  de  Louis  VII,  fiancée  à  Richard  Cœur  de  Lioo)  et  de  Guil- 
laume ni.  Mariée  en  1208  àSimon  de  Dammartin»  qui  prit  parti 
la  révolte  de  1214  et  fut  exilé»  elle  vit  son  comté  confisqué  avec^ 
celui  de  soD  mari  (le  comté  d*Aumalc).  Die  y  remra  en  122s 
moyennant  oûe  cession   partielle  à  Louis  Vil  ?  ;  mais  ce  n'i 
quVn    I2Î0  que   Simon   de  Dammartin  revint  en    France  *m| 
Comme  Gerben  ne  parle  pas  de  son  mari,  et  qu'il  célèbre  ta 
cour  de  la  danu  de  Pontliteu,  il  est  infiniment  probable  qu'il 
a  écrit  son  roman  entre  t22j  et  1230. 

Deux  autres  poèmes  d^in^ale  impcinance  partent  le  nom  de 
Gerbert,  Le  premier  est  unesaite  de  Ptrceml^  dont  nous  n'avons 
pas  la  fin  et  qui  comprend  12,000  vers.  Fr,  Michel  a}^nt  dit 
que  ccnc  suite  de  Ptrm^l  pou\*ait  être  de  notre  auteur,  Birch* 
Hirschfetd  a  confirmé  b  même  attribution  par  des  raisons,  eo 
partie  au  moins,  fort  bannes;  contestée  par  M*  Olhe,  cette 
opinioa  a  été  reprise  et  appuyée  de  nouvelle  preuves  par  M,  F. 
KraosS  et  plus  réœmment  par  M.  Wîlmotte*,  qui  n'admetJ 
pas  tes  raisons  tïtées  de  b  langue,  fonifie  l'argument  tiré  du 
style  par  Bircb-fîtrscbfeld,  et  y  ajoute  l'identité  frappante  de 
la  versification  (78  00  de  rimes  riches).  Il  montre  en  revaiKhe 
que  b  iMite  de  Tristan^  dont  Kraus  avait  bit  un  poèise  à  pan, 
n'est  qu'un  épisode  du  Pe^cemi.  Le  senxmtois  de  Gr^mi  te  Petit, 
qui  porte  le  nom  de  Gerbert ,  offre  b  même  proportion  de  rim^ 
riches  que  les  longs  poèm^;  il  doit  donc  être  du  même  auteur  7, 


àté  dnkssdos»  p.  t68. 


1.  Ko  122%,  J 

|.  Ccit  £e  qL  1  ii, 

4*  Wmwc  en  ï2}%  eUe  se  mmm  en  ia4}  (à  47  ans)  wnc  Maifcktt  < 
MocnBBOiàicy.  —  Oo  poonaii  donc  aom  le  limHn  éoîl  oUc  tif^  et-' 
134),  Bkik  c'eî  poi  ivoèibie  (voir  cefeoâmtt  l'ilkNiQfi  à  m   œtam  àc 
Rond.  T,  $9t$  ;   b  mmtm  mk  de  Maie  époBii  Jcaa  de  Mmm  m 

f.  IMy  Gmhrtét  HbmmJ  ^  mim  W^êmjBÊ^  d'Etiii^en,  1897)* 
^  GêÊ^m  et  MmfmSa  k$  irrii$  f»  Imi  mmtêttnhÊÙ  (Smii.  df  tAt^, 

dr  Biieifm.  1900.  p.  16^189);  cf.  aiiMiiii,  XJUX  481* 
7.  M.  Wiiintte  tBdow,  l«m  fÉte  des  < 

MM  0v  sbfK^  wm  WEn  de  Gifw§t  i  wria  voQp*  JbvMlfa  •*  ^ 


LE   CYCLE   DE   LA   «    GAGEURE   »  539 

et,  comme  il  est  une  phinte  faite  au  nom  des  fnmestreuSy  il 
indique  que  Gerbert  en  était  un,  au  service  de  Marie  de 
PoDthieu.  Comme  il  ne  se  nomme  complètement  que  dans  la 
VkietUy  il  est  probable  que  c'est  son  premier  ouvrage. 

La  Violette  présente  avec  le  Comte  de  Poitiers  une  si  étroite 
ressemblance  qu'il  est  évident  que  Tun  des  deux  romans  dérive 
de  l'autre,  ou  qu'ils  ont  une  source  commune.  Raynouard  (et 
plus  tard  Von  der  Hagen  et  Landau)  ont  cm  que  le  Comte  de 
Poitiers  n'était  qu'un  abrégé,  venu  par  tradition  orale  de  la 
Violette  ;  Wolf  '  a  montré  qu'on  ne  pouvait  hésiter  entre  les 
deux  romans  pour  le  caractère  archaïque,  et  que,  pour  croire  à 
l'antériorité  de  la  Violettey  il  fallait  être  dépour\*u  du  sens  de  la 
poésie  primitive.  Toutefois,  il  était  porté  à  croire  que  tous 
deux  avaient  une  source  commune,  —  provençale  d'après  l'allé- 
gation du  metteur  en  prose.  Ce  n'est  pas  soutenable  :  il  y  a  des 
vers,  des  passages,  presque  identiques  dans  les  deux  poèmes  : 
si  donc  la  Violette  est  postérieure  au  Comte  de  Poitiers^  il  faut  que 
Gerbert  ait  eu  le  Comte  de  Poitiers  sous  les  yeux.  C'est  ce  que 
pense  M.  Ohle,  qui  trouve  les  raisons  de  Wolf  insuffisantes,  et 
qui  en  donne  d'autres,  tirées  de  la  façon  dont  les  événements 
sont  racontés.  Nous  y  reviendrons;  mais  nous  devons  d'abord 
tenir  compte  d'un  élément  que  M.  Ohle  n'a  pas  connu,  et  qui 
est  indispensable,  à  savoir  Guillaume  de  Dole.  Tant  qu'on  n'avait 
pas  ce  poème,  on  se  trouvait  fort  embarrassé,  et  on  était  porté 
à  croire  que  P  ci  V  remontaient  à  une  source  commune  diver- 
sement altérée.  En  effet  P  n'a  pas  le  motif  du  signe,  V  l'a  ;  or, 
le  signe  est  ancien  *  ;  mais  V  est  moins  ancien  que  P  et  a  des 
traits  certainement  altérés  :  donc  ils  ne  viennent  pas  l'un  de 
l'autre.  M.  Ohle  est  embarrassé  pour  dire  où  T  a  pris  le  motif 
du  signe  (quoiqu'il  pense  que  Gerbert  n'a  inventé  que  la  forme 
de  la  fleur)  et  ne  s'exprime  pas  clairement  sur  ce  point  K  Mais 
nous  pouvons  maintenant  le  dire  avec  une  grande  assurance  : 
il  a  pris  le  motif  du  signe  dans  Guillaume  de  Dole. 

L'influence  de  ce  roman  sur  le  sien  est  évidente  de  prime 


1.  Cf.  Ohle,  p.  14-15. 

2.  Qjjoi  qu'en  pense  M.  Ohle,  qui  croit  que,  partout  où  il  se  trouve,  il 
provient  du  Roman  cfe  la  Violette. 

\.  Voy.  Ohle,  p.  23,  p.  54. 


J40  G.    PARIS 

abord  par  le  fart  qu'iJ  a^  lui  aussi,  inséré  des  chansons  dans  son 
récit.  L'auteur  de  Guillaume  de  DoU  se  vante  d'avoir  inventé  ce 
genre  de  romans^  mêlés  de  chansons.  Gerbe rt  en  signale  aussi 
l'attrait  et  le  mérite,  mais  sans  s  en  attribuer  l'invention  :  îJ  est 
donc  clair  qu'il  a  imité  son  prédécesseur  K  II  emploie  exacte- 
ment les  mêmes  procédés  pour  amener  les  chants  ^,  et  i!  inscrc 
comme  son  devancier  des  chansonnettes  à  carole,  des  chansons  à 
toile,  une  laisse  de  chanson  de  geste,  des  sons  poitevins  ou  pro- 
i^ençâux  :  plusieurs  des  cliansons  sont  même  communes  aux 
deux  romans.  Mais  il  a  en  outre  pris  à  Guillaume  de  Dûle  le  signe 
en  forme  de  fleur,  qu'il  a  substitué  aux  indices  insuffisants  du 
Comte  de  Poitiers;  il  a  *f  démarqué  »  son  emprunt  en  mettant 
une  violette  au  Heu  d'une  rose.  Et,  à  rîmitation  de  Guillaume  de 
Ihle^  dont  le  vrai  titre  est  Rotnan  de  la  Rose,  il  a  appelé  le  sien 
Ratmin  de  la  Fioîitte.  Nous  pouvons  donc  dire  en  toute  sûreté 
que  Gerbert  a  composé  son  roman  en  suivant  (sauf  les  modifi- 
cations dont  nous  aurons  à  parler)  le  Cûmkdc  Pùiiîers^  mais  en 
imitant  Guillaume  de  Dole  pour  le  titrie,  pour  le  motif  du  signe, 
et  pour  l'insertion  de  chansons  dans  la  narration.  Il  était  d  ail- 
leurs très  au  fait  de  la  littérature  de  son  temps  :  nous  verrons 
qu'il  a  imité  d'autres  romans  étrangers  à  notre  cycle,  et  il  dte 
plusieurs  romans  bretons  ou  d'aventure. 

Il  s  agissait  pour  lui  d'étendre  le  petit  récit  du  Garnie  di  Prn* 
tiers  jusqu^à  en  faire  un  roman  de  6  à  7000  vers,  ce  qui  était  le 
nombre  requis  pour  ce  genre  de  compositions.  Outre  les  chan- 
sons, les  descriptions^  les  dialogues  et  monologues  auxquels  il  a 
recouru,  il  s*est  avisé  de  remplir  d'aventures  la  période  où  ses 
deux  héros  vivent  séparés  :  aventures  sans  intérêt,  sauf  celle 
d'Euriaut  qui  anime  la  réunion  des  amants,  et  qui  consistent 
surtout  en  combats  et  en  tournois. 

Un  changement  qu'a  fait  Gerben,  et  qui  est  propre  i  son 
poème   entre  toutes   les  versions  de   notre  cycle,   c'est  que 


2 .  Tous  les  autres  poèmes  où  cm  neirouve  et  procédé  sont  postérieitfs. 

2.  DiEis  Icf  deui  româfu,  le  récit  »*ouvre  pir  y  oc  (éit  ou  dmnç»  et  cbcira- 
iicTS  chaoteni  pour  leur  pUisîr  ;  par  h  sitite  les  pci>ûn nages  chAnteot  pour 
eiprimer  leurs  semimeots.  Gerbert  2  irès  Àdrottemcnf  mania  ce  proofdé^  bJen 
qu'il  sott  invnlscmblible  4e  votr  des  gens  au  désespoir  ritprimcr  leur  ptkm 
CQ  chautint  d^  i:ouplet3  amous. 


LE  CYCLE   DE  LA   <t    GAGEUItE    &  S4* 

l'hémine  est,  non  plusla  femme,  mais  Tnmie  '  du  héros.  M.OIile 
(p.  24-25)  voit  dans  ce  changement  la  preuve  que,  dans  le 
siècle  où  Gerben  écrivait,  comme  on  ne  se  mariait  que  pour 
associer  des  ficft^  le  mariage  avait  perdu  toute  valeur  morale  et 
I  on  lie  pouvait  croire  sérieusement  à  la  résistance  d*une  femme 
mariée.  Je  crois  que  la  raison  est  beaucoup  moins  profonde  :  le 
poète,  voulant  insérer  une  foule  de  chansons  d'amour  (surtout 
cotirtôis)  dans  sa  narration,  ne  pouvait  les  faire  adresser  par  un 
mari  à  sa  femme.  Il  suivait  d'ailleurs  la  formule  des  romans 
bretons.  Mais  M,  Ohle  a  raison  de  dire  qu'il  a  détruit' par  là  ef 
le  mérite  d'Euriaut,  et  le  sens  même  du  récit,  qui  tend  à  la 
glorification  de  la  vertu  d*une  femme  (sœur  ou  épouse). 

Le  roman  débute  \  comme  P  {Poiiiers)  et  R  (Rose),  par  réloge 
d'un  roi  (ici  Loeys  >),  qui  tient  sa  cour  à  Pont-de-l' Arche  ^.  A 
une  fête  qu'il  donne,  on  danse  des  caroles  où  chantent  la 
comtesse  de  Besançon,  la  duchesse  de  Bourgogne^  la  soeur  du 
comte  de  Btois,  celle  du  comte  de  Saint-Pol,  la  demoiselle  de 
Couci,  k  châtelaine  de  Niort,  EHenort,  une  dame  de  Normandie 
(par  imitation  de  R).  Le  roi  avise  le  beau  Gérart,  comte  de 
Nevcrs,  connu  pour  son  talent  de  chanteur,  et  T invite  à  chanter  : 
il  chante  un  couplet  de  Gace  Brûlé  (comme  dans  R)  \  et  deux 
refrains  de  chansonnettes,  et  continue  par  Téîoge  de  s' amie,  qui 
IVmic  par-dessus  tout.  Envieux  de  son  succès,  IJsiart,  comte 
de  Forois(cf*  /î),  gage  sa  terre  qu*il  séduira  Tamie  de  Gérart,  s*il 
lui  laisse  huit  jours  sans  la  prévenir*  Le  roi  essaie  d'empêcher 
la  gageure,  et^  n'ayant  pu  y  réussir,  il  la  plége.  — ^  Lisiart, 
accompagné  de  dix  chevaliers,  arrive  à  Nevers^  où  Euriaut  ^ 


L  Que  faut-il  entendre  par  ce  nom  ?  Eurîaui  vît  dans  le  château  de  Nevers» 
tout  le  monde  h  regarde  comme  ramic  de  Guillaume  ;  elle  ne  semble  avoir 
lîi  demeure,  ni  famille  à  elle  Guillaume  se  vante  publiquement  de  l'avoir 
pour  amie.  Est-ce  sa  maîtresse  au  sens  complet  du  naot?  Le  sigm  nelc  prouve 
pas,  Jl  finit  par  Tépôuser. 

2.  Après  un  prologue  moralisant  et  un  éloge  de  la  dame  de  Ponihîeu. 
,   3,  t^  version  en  prose  fait  de  ce  Loeys  Louis  le  Gros^  sans  raison, 

4.  Cette  petite  ville,  jadis  imponante,  ne  fut  du  domaine  royal  qu'à  partir 
de  1204. 

î*  Mais  il  est  à  noter  que  Gerbert  ne  nomme  jamais  les  auteurs  des  chan- 
sons. 

6.  Sur  ce  nom  (ou  Oruittt),  voy.  O.  Sçhuke,  Tobkr-JbhamlL^  p.  l8é*9|  ; 
le  metteur  en  prose  a  lu  Euriaut^  d*oii  Buryanihe, 


s  4^  G,    PAMIS 

habite  le  chjceaa.  Elle  le  reçoit  très  bien  ;  il  la  requiert  d'aînour 
(contraste  avec  P)  :  elle  le  repousse.  La  vieille  (oommetlans  F) 
va  ay-devant  de  Lisiart  ;  elle  loi  offre  des  msagnes  ;  il  lui  promet . 
de  grands  dons,  ~  Scène  du  bain  :  par  un  trou  dam  une  paroi, 
Lisiart  voit  la  violette  sur  la  mamelle  droite  d' Eoriaut  (sa  pré- 
sence est  inutile  et  ajoutée;  le  rôle  de  la  vieille  est  combiné  de 
P  et  de  R).  —  Lisiart  re\ient  à  Melun^  où  est  la  cour,  mais  ne 
donne  pas  d'abord  la  preuve;  il  demande  qu'on  fasse  ^-enir 
Euriaut  *.  Elle  arrive  (?^cne  pareille  j  la  scène  finale  de  iî).  — 
lirinrt  révèle  le  signe;  stupeur  d'Euriaut  ;  Géran  est  convaincu» 
lui  dit  montei!  Cl  remmène  à  cheval,  refusant  toute  compagnie^ 
(cfP,  notamment  p,  2i  ')-  Ils  arri%'ent  dans  une  forêt»  Géran 
met  Euriaut  à  terre  (^=  P)  et  s  apprête  à  lui  couper  la  tète, 
quand  elle  voit  s'approcher  de  lui  un  serpent,  et  l'avertit;  il  rue 
te  serpent  et  pardonne  à  Euriaut  (Gerbert  a  fondu  en  un  les 
deux  combats  de  P;  tout  ce  récit  »  scène  centrale  du  roman  ^  est 
fort  abrégé).  —  Euriaut  se  pâme  :  survient  le  duc  de  Metz, 
qui  $e  compone  comme  Harpin  dans  P  et  veut  tout  de  suite 
Tépouser;  singulière  défense  d'Euriaut,  qui  rappelle  un  peu  une 
scène  d'Afnadas;  le  duc  Temméne  à  Metz.  ^  Gérart  veut  se 
rendre  à  Nevcrs  pour  voir  comment  Lisiart  se  comporte  dans  le 
château,  qui  naguère  encore  lui  appartenait  K  11  se  déguise,  non 
en  pèlerin j  mais  en  jongleur  :  il  surprend  une  conversation  de 
Lisiart  avec  la  vieille,  s:i  complice,  qui  lui  révèle  la  vérité.  Il 
part  joyeux  et  se  met  à  la  recherche  d'Euriaut,  A  partir  d'ici 
(sauf  la  réunion  et  le  duel  judiciaire  du  dénoûment),  il  nV  a 
plus  aucun  rapport  entre  les  deux  poèmes* 

En  quête  d'Euriautj  Gérart  court  de  nombreuses  aventures, 
où  le  poète  exploite  sa  riche  connaissance  de  la  littérature  de  son 


1.  M,  Ohle  volt  ki  la  mcUlcure  preuve  de  la  dépendance  où  F  est  â  Féganl  | 
de  P.  Dans  P,  en  effet,  i!  faut  <|uc  Rose  vienne  pour  que  Ton  compatie  les  ] 
cheveux  et  h  robe;  îcî,  sa  venue  est  inutile:,  ei  surtout  Lisiart  n'a  ayotn 
intérêt  à  U  mander. 

3.  Ici  encore  T altéra tion  est  visible.  On  comprend  que  le  roi  ei  les  <:licva; 
lien  laià$ent  le  comte  de  Poitiers  Uire  justice  de  sa  fenim^^  mais  comment 
^rmenront-ils  i  Gérart  de  tuer  «  s'amic  »  ? 

^.  Ceat  encore  une  altération  évidente  :  dans  P^  c*cst  pour  iner  cduî  qtil 
Va  dèïhanoré  ;  ce  qui  ne  pouvait  subsister  dans  P\  ù(x  Buriaut  ti'^st  p^a  11 
femme  de  Gi*raru 


LE  CYCLE   DE   LA    «    GAGEURE    »  543 

temps  ',  et  qui  lui  permettent  d'allonger  son  roman  :  comme 
elles  n'ont  pas  de  rapport  à  notre  thème,  nous  les  négligerons. 
Cependant,  Euriaut  est  à  Metz  :  le  duc,  qui  ne  peut  l'épouser, 
à  cause  de  ses  barons,  l'a  confiée  à  la  garde  de  sa  sœur,  Ismene 
(nom  emprunté  au  Rotnan  de  Thibes)  :  celle-ci  l'a  prise  en  ami- 
tié, et  toutes  deux  couchent  dans  le  même  lit.  Un  chevalier, 
Meliatir,  qui  a  voulu  violenter  Euriaut,  et  qu'elle  a  repoussé,  veut 
la  tuer  :  il  pénètre  dans  la  chambre  où  elle  dort,  et  croyant  la 
frapper,  tue  Ismene  à  son  côté  ;  Euriaut  est  seulement  blessée  à 
la  main,  en  sorte  qu'au  matin,  il  semble  prouvé  à  tous  que  c'est 
elle  qui  a  assassiné  Ismene,  et  elle  est  condamnée  à  être  brûlée 
vive*.  Gérart  arrive  à  Metz  au  moment  du  supplice.  Il  obtient 
de  soutenir  contre  Meliatir  un  combat  judiciaire  :  son  adver- 
saire, vaincu,  avoue.  Gérart  se  désarme,  Euriaut  le  reconnaît; 
il  se  trouve  être  le  neveu  du  duc  de  Metz.  Il  raconte  toute  son 
histoire.  Un  ménestrel  annonce  un  grand  tournoi  à  Montargis, 
qui  sera  livré  par  le  comte  de  Montfort,  oncle  d'Euriaut,  contre 
Lisîart.  Gérart  y  paraît  inconnu,  couvert  d'armes  blanches  ;  il 
a  le  prix  du  tournoi,  où  il  renverse  Lisiart,  mais  ne  peut  le  faire 
prisonnier.  Le  roi  mande  le  chevalier  inconnu,  qui  raconte 
toute  son  histoire.  Il  a  fait  venir  Euriaut,  et  défie  Lisiart,  qui 
persiste  à  soutenir  son  dire  et  à  nier  l'aveu  surpris  à  Nevers  par 
Gérart.  Vaincu  en  bataille,  il  avoue,  et  est  traîné  à  la  queue 
d'un  cheval  ;  on  fait  venir  la  vieille,  qui  est  brûlée  vive.  Gérart 
épouse  Euriaut  ;  le  roi  lui  rend  ses  contés  (sans  doute  le  Forez 

1.  Ainsi,  l'épisode  de  hpucelle  du  château  de  Vergis  est  par  endroits  une 
imitation  de  celui  de  Blanchefleur  dans  Perccval  ;  —  l'histoire  bizarre  (p.  93) 
de  l'épée  Fineguerre  (cf.  Finechamp  dans  Doon  de  Mayettce,  p.  264)  provient 
certainement  d'un  récit  plus  ancien  ;  —  le  combat  de  Gérart  et  de  Galeran  est 
imité  pour  certains  traits  (p.  99-100)  de  Meraugis;  —  la  scène  où  Aiglente 
et  Florentine  regardent  Gérart  du  haut  des  créneaux  et  s'éprennent  toutes 
deux  de  lui,  est  un  lieu  commun  (cf.,  par  exemple,  Auberi  le  Bourguignon)  ; 
l'épisode  de  la  méprise  d' Aiglente  (p.  160)  est  imité  du  Tristan  de  Thomas  ; 
—  le  hoivre  d'amour  (p.  166)  vient  des  romans  de  Tristan  ;  la  situation  de 
Gérart  entre  Aiglente  et  Euriaut  rappelle  Eliduc,  Ille,  Galeran  ;  etc. 

2.  Comme  l'a  remarqué  Fr.  Michel,  cette  aventure  est  empruntée  à 
Floreiiu  de  RonWy  mais  dans  toutes  les  formes  de  ce  conte  le  traître  tue  un 
enflant  couché  auprès  de  l'héroïne  exprès  pour  faire  croire  que  celle-ci  l'a 
égorgé.  —  Nous  avons  vu  cet  épisode  dans  une  variante  sicilienne  de  notre 
conte  (B'b3i/). 


544  G-  PAEîS 

avec  Nevers)  et  il  retourne  avec  Euriaut  i  Nevere,  où  ils  vivent 

heureux. 

Ce  roman  qui  a  été  rais  en  prose  au  xiv*  siècle,  renouvelé, 
traduit,  rais  au  théâtre,  etc.  %  a  certaines  qualités  de  détail, 
raais  il  est  bien  inférieur  i  ses  deux  sources  principales,  le  Qmfd 
de  Pûiiiers  et  Guilîamm  d€  Dole.  U  appartient  à  une  époque  de 
délayage  et  àc  pomif.  Pour  l'histoire  de  notre  thème,  il  n'a  pas 
dlmportance^  puisqu'il  provient  de  deux  sources  connues. 


RÉSUMÉ 


Nous  avons  étudié  un  grand  nombre  de  formes  du  conte  de 
la  Gageure^  et  nous  en  avons  proposé  une  classification,  fort^ 
incertaine  en  plus  d*un  point.  Tous  les  travaux  qu'on  lui  a  con- 
sacrés pèchent,  corame  nous  avons  dit  au  début,  par  Tune  ou 
Tautre  de  ces  deux  fautes,  ou  par  toutes  les  deux  :  ou  bien  on 
a  séparé  la  forme  B  (mauvaise  foi,  îndices)>  de  la  forme  A 
(bonne  foi,  substitution),  ou  bien  on  a  considéré  le  conte 
comrae  appartenant  au  cycle  de  Barkrine^  dont  il  est  parfaite- 
raeni  distinct.  D'autre  part,  M.  Oh  le,  qui  a  certainement  écrit 
le  meilleur  travail  qui  ait  été  consacré  à  notre  thème*  a  systé- 
raatiquement  (et  tacitement)  laissé  de  côté  tous  les  récits  oàl 
figure  la  substitution.  Il  devait  cependant  résoudre  cette  ques-' 
tion  prélim maire  du  rapport  de  la  forme  B  à  la  forme  A^  d*où 
dépend  tout  ce  que  Ton  peut  penser  de  l'histoire  B.  Il  voit 
dans  cette  histoire  B  un  conte  dévot,  il  la  rattache  à  celle  de 
Suzanne,  il  en  tire  toutes  sortes  de  considérations  sur  le 
mariage,  la  condition  des  femmes*  etc*  ;  il  faut  d'abord  savoir 
si,  oui  ou  non,  elle  ne  serait  pas  simplement  un  arrangement  d*un 
autre  récit  ;  et  au  cas  où  il  serait  prouvé  qu'elle  n*est  rien  que 
cela,  c'est  ce  récit  dont  il  faut  rechercher  Torigineet  la  signifi- 
cation. M*  Ohle  remarque  lui-même  avec  raison  que  ce  qui  a 
fait  rattacher  par  Von  der  Hagen  et  autres  notre  cycle  à  celui 
de  Barberine,  c'est  qu'on  a  vu  dans  la  âeur  du  Roman  de  Ia; 


I,  Voycï  L'èdîtîoD  de  Fr.  Michd. 


LE  CYCLE  DE  LA    <x   GAGEURE    »  54 J 

Vioklte  une  transformation  de  la  fleur  magique  de  Barberine,  et 
ce  rapprochement,  dit-il,  s'évanouit  quand  on  constate  que  le 
Roman  de  la  Violette  est  dérivé  du  Comte  de  Poitiers^  qui  ne  con- 
naît pas  le  motif  de  la  fleur,  et  qui  présente  le  même  récit  ; 
mais  il  devait  examiner  la  question  de  savoir  si  B  tenait  à^.  Il 
est  vrai  qu'il  ne  connaissait  pas  Guillaumede  Dole  ;  mais  les  autres 
versions  de  A  étaient  déjà  presque  toutes  citées  par  Von  der 
Hagen,  et  il  est  singulier  que  M.  Ohle  ne  les  mentionne  pas 
même  d'un  mot. 

Reprenons  donc  cette  question  :  A  ti  B  sont-ils  deux  récits 
indépendants,  ou  l'une  des  deux  formes  (bonne  foi,  mutila- 
tion —  mauvaise  foi,  indices)  provient-elle  de  l'autre  ?  La  thèse 
de  leur  indépendance  est  bien  difficile  à  soutenir.  En  effet  dans 
B',  pour  négliger  ici  les  détails,  nous  trouvons  comme  dans  A 
que  la  femme  soupçonnée  est  la  sœur  du  héros;  —  que  celui-ci 
est  mis  en  prison  ou  s'éloigne  sur  de  fausses  preuves  de  la  faute 
de  sa  sœur  ;  —  que  celle-ci  apparaît  à  la  cour  et  prouve  son 
innocence.  D'autre  part,  le  motif  du  signe,  commun  à  B*  et  à  B*, 
rattache  B'  à  B*  où  ce  n'est  plus  une  sœur,  mais  une  épouse 
qui  s'habille  en  homme  pour  se  faire  rendre  justice,  et  à  B^  où 
c'est  aussi  une  épouse  qui  est  justifiée.  Il  n'est  donc  pas  dou- 
teux que  les  formes  AtiB  sont  unies  par  un  lien  étroit.  Main- 
tenant on  peut  se  demander  laquelle  des  deux  est  la  plus 
ancienne. 

La  date  des  textes  conservés  ne  prouve  pas  grand'  chose.  Le 
Roman  du  Comte  de  Poitiers  est  peut-être  le  plus  ancien  de  tous, 
mais  Guillautne  de  Dole  est  de  1200,  les  trois  versions  de  Tours 
du  XIII'  siècle,  Eletia  sans  doute  du  xii'^,  la  nouvelle  ano- 
nyme italienne  du  xiii*,  de  même  Taliesiriy  Ruprecht  de  Wûrz- 
buig,  etc. 

D'abord,  quel  est  le  thème  le  plus  ancien  ?  est-ce  celui  où 
l'héroïne  est  une  sœur?  est-ce  celui  où  elle  est  une  épouse? 
Dans  la  forme  B,  nous  ne  trouvons  la  sœur  que  dans  le  groupe 
B'  ;  dans  la  forme  A,  nous  la  trouvons  uniquement  dans  le 
chant  grec.  Nous  pouvons  dire  avec  certitude  qu'on  a  dû  sub- 
stituer l'épouse  à  la  sœur,  et  non  l'inverse.  Cela  est  évident 
pour  le  groupe  B*b,  où  l'épouse  ne  figure  que  dans  les  versions 
les  plus  modernes.  La  sœur  a  une  importance  d'autant  plus 
grande  dans  la  famille  qu'on  remonte  plus  haut  vers  les  modes 

«M,    XXXIl  9C 


$4^  G.  rAiis 

inôan  dedvilisituifi  '.  Ceue  inipoftiiiGc  e^  mutom  considé* 
fifcle  daiif  b  poésie  populaife  serbe,  ce  il  esc  airicoK  i{iie  le 
seul  texte  qui  ait  omservé  U  sœur  dans  ^  est  grec^  c'est-è-^lti€ 
voisin  dy  serbe  (slave  r)^  et  myn  à  être  tnâuencé  par  luL 

Mais  h  sœur  se  crouvior  ^dément  dans  1^  deux  Ion» 
A  Cl  B,  on  peut  se  detnander  laquelle  de  cm  deux  formes  est 
b  plus  andenne.  La  réponse  ne  oie  paraît  pas  douteuse.  La  névé- 
latîoa  d'un  signe  faite  par  trahîsoa  est  un  adoodsseroeut  de 
la  substitution  avec  mutilation  ;  die  amène  la  transfornsaïkm  du 
conte  en  uoposant  au  gabnt  la  mauvaise  Soi  ;  mais^  coînnie  tJ 
est  anttpâchique  dans  les  deux  cas,  cela  n*a  pas  grande  impor- 
tance. Il  faut  donc  bien  regarder  A  comme  primitif,  et  dans  A 
le  chant  grec  comme  extrèmemeni  rapprocbè  de  l'original. 

Ce  récit  CMigiftal  est  donc  celui-ci  :  Un  jeune  bcros  vante  sa 
sœur  à  la  cour  d'un  roi-  Le  roi  (ou  on  autre)  se  &ii  fort  de  la 
séduire,  et  le  héros  est  mis  ai  prison  jusqu  au  succès  de 
Tcpreuve;  il  mourra  sa  die  toiime  mal  pour  lui.  La  sœur 
reçoit  la  'déchration  du  séducceur,  feint  de  faccueilUr,  et  tut 
aivoie  dans  la  nuit  une  servante.  Il  lui  coupe  un  doigt  ^» 
assure  avoir  gagné  la  gageure;  le  héros  va  être  mis  Â  mort^ 
qtund  U  sceur  arrive  et  montre  son  doigt  intaa  V. 

De  cette  forme  primitive,  quelle  peut  être  la  date  et  Ton- 
gînc  ?  Nous  ne  la  trouvons  pas  en  Orient-  Mais  de  prime  abord 
il  est  peu  vraisemblable  qu*une  telle  histoire  soit  née  an 
moyen    âge  :   le  caractère   de  la   femme  sacrifiée*   est  celui 


I*  Voy.  4^m  k  Fmrnivaîti  Mimlkaj  (19Ô1)  l'arec  de  Gmnjijere  airl 
k  mUfi  *m, 

1.  Vn  dmgt  àe  pied  }  Vof,  Oim  (ot  eu  pied),  k  doigt  avec  rannau 
(dans  um  des  formes  au  potmc  grec). 

}.  Les  aytrcs  vcrMOOs  A,  qui  subsEituem  réponse  à  la  sâsnr,  sont  iltérici 
(notons  ccpcudant  dim  h  billadc  éan^ise  l'bterveniioii  de  b  niMiTkv, 
quï  introduii  le  ^lUnt  dans  h  chimbrc  de  b  femme;  ce  i^k  va  se  retrouver 
plus  oo  moi  os  dan^  totilcs  les  versions  de  B.  , 

4.  Sur  d'autres  formes  de  la  subsiitutioâ  (Q|ltlllilklLi  Ali$m^  Msini^., 
Viti,  4,  etc.),  Toy.  Affen,  Dos  Mander  tmlfrsckeè^im  Brmi$  (Sd^mtna, 
t^)»  p'  49-  -*  U  faut  noter  i  pan  k  ibènie  des  Trma,  cenaiâcmeot 
orknu],  ou  une  femme,  prise  en  lUgrant  d^iti  trouve  moyen  de  substituer  i 
sa  place  une  amie  qui  est  mutilée  par  le  mari  (U  Itil  coupe  k  net  dans  ks 
venions  oriciîtalcs,  les  trciscrs  dans  la  r^ltl  itlémiés  â'Ckdécm%  m  sone 
qu*U  est  convimcu  de  rinnoccDcc  de  sa  felïimc. 


N 


LE  CYCLE   DE  LA    ^    GAGEURE   »  547 

d'une  esclave  et  les  divers  narrateurs  ont  essayé  d'atié- 
nucf  cette  donnée*  Il  faut  noter  dans  le  poème  grec  (voy-  aussi 
Ruprecht  de  Wûrzburg)  le  rôle  que  joue  Targent  :  au  fond, 
cVst  pour  acquérir  l'argent  que  ta  femme  emploie  sa  ruse.  Or^ 
nous  trouvons  précisément  cette  niûme  ruse,  mais  assez 
méconnaissable,  dans  un  conte  indien  récemment  publié,  et  qui 
me  paraît  démontrer  l'existence  dans  Tlnde  d'un  récit  très  ana- 
logue \  Un  prince,  séparé  de  sa  femme,  vante  sa  vertu  à  la 
cour  d'un  roi  qui  ne  croit  pas  à  k  vertu  des  femmes.  Celui-ci 
dit  au  prince  qu'il  va  envoyer  un  de  ses  ministres  qui  la  séduira. 
Le  ministre  arrive,  déguisé  eu  marchand  de  perles,  et  offre  à  la 
femme  (par  Tcntremise  de  sa  suivante)  une  grosse  somme  pour 
passer  la  nuit  avec  elle  j  elle  habille  de  ses  vêtements  une  de 
ses  servantes,  et  le  ministre,  trompé,  lui  donne  la  somme  con- 
venue; puis  il  revient  chez  son  maître  %  et  le  prince  croit  sa 
femme  coupable;  plus  tard  tout  s'explique  (?).  —  On  peut  sup- 
poser que  dans  ce  conte  figurait  déjà  la  gageure  (ou  le  trait  que 
les  parieurs  risquaient  leur  tète),  que  nous  trouvons  dans  A  et 
iî,  car  on  ne  peut  faire  venir  le  motif  Je  lagagcure  de  Barbet  ine^ 
qui,  au  contraire,  peuiTavoir  reçu  —  et  déji  en  Orient  —  de 
notre  conte. 

La  grande  difficulté  qui  fait  douter  du  caractère  primitif  de  ce 
conte  indien  (une  fois  restitué),  c*est  que,  comme  nous  l'avons 
dit, on  a  dû  remplacer  dans  notre  histoire  la  sœur  par  l'épouse 
et  non  Tin  verse.  Je  suppose  donc  que  le  conte  (avec  la  sœur)  a 
été  inventé  en  Orient  (Babylone?  Perse?)  et  a  passé  de  IX  en 
Europe,  où  la  sœur  s'est  maintenue  quelque  temps,  puis  a  cédé 
à  réponse,  et  dans  Tlnde,  où  on  ne  trouve  que  l'épouse  dans  la 
seule  forme  connue. 

Voilà  donc  le  conte  introduit  en  Europe  sous  sa  forme  A*, 
très  voisine  de  la  forme  primitive*  Il  a  du  en  sortir  une  formel 


i*  Voy.  Indim  Aittiquary,  Bombay,  1894-95,  Fûlk*Lôf£  îti  Southern 
IftiHii,  par  Katesa  Sastri(cu  conte  m*a  été  communiqué  par  M,  E.  Gosquin)» 
—  Seulement  dans  ce  rt^cit  sont  mêlés  des  éléments  divers  et  mùmG  contra- 
dictoires, notre  conte^  celui  de  Bartvriue  (avec  le  talisman^  qui  détruit  rcffee 
du  nôtre)  et  celui  de  Aif^  w^îî  U^aieftds  ïveU,  qui  rend  k  nôtre  absurde  (le  marî 
suspecte  sa  femme  dci  le  début,  et  l*a  quittée  â  cause  de  ces  soupçons). 

2.  Conïme  preuve,  »  he  shows  one  or  Iwo  oraaments  of  the  princess  », 


;4S  G.    PAA3 

ou  OG  2T1XI  encore  ii  sœur,  nuis  noo  pîus  ks  zxkîs  de  ii  sDbsd* 
mdcr:  e:  df  11  madlidoa  ;  il  nt  raciîr  pl3$  qae  les  oîrets 
(aaseaUf  cherciix  et  jièx  de  \>èce:i:^cr,  an  ISea  de  doÊgr)  enle- 
Tés  à  11  Sijczr  a  son  iasu  pir  zzit  -D-TÎa?  (serrisrc,  dtkgne) 
^Aczéc,  Cecre  lonxie  sEsiple  se  trouve  ians  îe  Ccmu  ie  Pxiers, 
nais  irês  iliérée,  i'  en  ce  que  rhêroîne  est  cae  êpocse  ;  2*  en 
oc  c-^  'jt  dèooûsea:  es:  loc^cê  ao-z  par  l'héroiDC  eSe-oiêsDe, 
nuis  pîT  soc  TRiri,  qu:  scrpnrai  Taveu  ds  trihre  niaisesie::!  tct 
en  pcrîk- 

Cere  bmrv  es:  uc:  i  ai:  isolée  et  déliée.  Vjzs  fidêi«  a  !i 
fcK-ife  pre::ûere  de  5,  zuis  ittcc  Taddhâoc  de  sigae,  es  ie 
grocpt  B',  oc  il  s'agi:  eacoce  i'c^e  soecr,  et  oc  eîje  dêDoerre 
soc  izaccr-ve  en  yrrwa*^:  le  mitre  de  vol,  oc  doct  ocici<:  se 
àét^  et:  disant  qall  ae  l'a  -aouis  v^e  (3'a  :  Tocrs,  GacïJaiv 
îdDcù^  rracTei>  deSetrs,  £*/f«£a,  — B  r  :  Antiqcarlo,  Bmcrr: 
et  les  coates  pcpclaires  o.  il  s'izî:  ^zz.  ciret  zzz — i^:  piînt  y 

Les  gr^-jKs  scivans  B=.  B^  B*,  se  nni-iDe^:  i  œlcî-ci  et:  œ 
qu'ils  etzpioôet::  le  rsodf  de  sir:»  et  ec  ce  q  je  c'est  irœ  la  >r;..:)r 
coi  ^Xïrscit  et  oèckzt  sa  -cscfcadoc:  mis  elle  est  toc-ocrs 
cae  êMCSc  :  dooc  ljcs  ces  ccctes  rezacctetrt  à  cre  scrrrzc 
cjrnznzi^  -,  altêraiioc  de  B'-  Dizis  plusi-ecrs  de  oes  ooctes 
jc  aiod:  de  sizae  tii:  dêtict  (£>ïj,  f'-j^.-fi.r,  la  iyliac, 
fL-ÂLT-/};  mis,  ccdzx  il  se  trocT*  dans  des  vetâocs  de  zsèmc 
5ocs-^oc>t,  il  iict  croire  cc'il  irtsirtiec^:  i  li  sccrce  ojcizicac 
et  cae,  ran^et  o-  il  zuaqae,  il  est  tcnere  rar  oe>li- 

Li  pics  ieciecat  sa:^  dc^ute  de  ces  Ttrskms  est  Iliistocre 
d'£>«,  cticcre  tris  t<..^^^  de  B  .  ce  la  it — rjt  (q^e  le  zuri 
a  «ec  i  liac^  -\*ct  tli-nihne  rrreciiqcer  soc  droct  a  la cocr 

£l^:u,  Il  "rjliee  (r-ià  de  siizc-e  ci  de  coterai  siège '.'ier^,  je  cjcse 
•cdêc-allecsiai,  le  cccte  sidliec,  Atl-T^ia  :zili:z. 


■  se  i  -nnar  rjd  li  pijnrf  r  sac  ras  ics  5  i.  TsrH 
Sirr ni*  ^l'elit  le&nr  xs  ;i     r — p*   f£j*  r'-x  ras  *=-^  jc caoK 


LE  CYCLE  DE   LA    U    GAGEURE   »  J49 

B*b-  La  femme  s'enfuît  en  apprenant  que  son  mari  vient 
pour  la  tuer,  s'habille  en  homnie,  se  met  au  sen'tce  d'un 
ennemi  du  roî>  que  sert  aussi  son  mari,  et  revendique  son  droit 
par  un  combat  singulier  (que  livre  son  mari  convaincu  par 
une  vision  (Miraik^  Posî humus.  De  là  aussi,  mais  très  altéré» 
le  roman  de  Floire  et  Jthamtt,  —  Fùlninfe^  venu  de  Posîhumus^  a 
perdu  le  motif  du  signe). 

B»  :  La  femme,  habillée  en  homme,  devient  un  puissant  per- 
sonnage. 

B^a<  Elle  force  le  traître  à  avouer;  intervention  du  père 
(Timoneda,  Bignon,  La  moglk  calunniata), 

B^b.  Elle  reçoit  Taveu  spontané  du  traître  à  la  cour  d*un  roi 
étranger,  y  fait  venir  son  mari  et  dévoile  tout  (nouvelle  italienne 
anonyme,  Bocaice,  livret  populaire  allemand)* 

B'c*  Elle  rencontre  son  mari  dans  une  humble  situation  4 
Tétranger,  le  ramène  comme  son  serviteur  dans  leur  ancienne 
maison,  et  le  traître  avoue  en  se  vantant  :  Francisco  (pas  de 
signe),  conte  de  Wolff,  contes  norvégien,  gaélique,  roumain. 

Dans  ces  derniers  groupes,  il  règne  encore  une  certaine  con- 
fusion :  les  traits  se  croisent  et  se  contredisent  :  pour  arriver  à 
tout  débrouiller,  il  faudrait  un  travail  minutieux  \  Mais  la 
classification  générale  paraît  assurée-  Nous  en  tirerons  ces 
quelques  remarques.  Aucun  de  nos  récits  ne  vient  directement 
d'un  autre  de  ceux  que  nous  avons  conservés,  sauf  le  Roman  de 
la  f^iohîie^  qui  est  tiré  du  Comte  de  Poitiers  et  de  Guillaume  de 
Dff/e,  et  la  nouvelle  prétendument  arabe  de  Bignon.qui  est  prise 
i  Timoneda  :  il  faut  donc  se  représenter  une  masse  de  versions 
intermédiaires  perdues,  — Il  est  difficile  de  dire  en  quelle  par- 
tie de  TEurope  la  forme  A  pour  la  première  fois  apparut;  c'est 
sans  doute  dans  le  monde  byzantin,  —  Les  contes  populaires 
que  nous  avons  ne  viennent  pas  des  œuvres  littéraires  médié- 
vales  :  leurs  sources  les  plus  anciennes  ne  sont  pas  antérieures 
au  XVI*  siècle  \  —  La  propagation  du  conte  a  fait  éclore  de 


I .  [L'indécision  de  G,  ¥nm  pour  les  détails  de  sa  classification  se  manî- 
esceici  à  plusieurs  craks,  tioumment  en  ce  qu'il  fait  passer  du  groupe  B^au 
groupe  Bï  Tîmoncda,  Bigaon  ei  ta  Mogîk  adumiûUa^  et  en  ce  quHl  iniervenil 
Tordre  des  groupes  Bi,  B*.  —  J,  B,]» 

1,  Ils  ont  parfois  des  traits  qui  paraissent  prinsltifs  :  les  cheveux  couptfe 
sur  ie  nm  dans  Eufemiat  etc* 


SSO  G,    PARIS 

tous  côtés  des  œuvres  litiéraires,  mais  elle  a  surtout  été  oraleJ 
—  Llnspimtion  première  de  rhistoîreest,  commedansBaràrrm^, 
Télexe  d*uûe  femme  qui  sait  concilier  rhonDétetë  avec  une  habi- 
leté in  tcressée  ;  c'est  en  somme,  et  même  sous  sa  forme  pre- 
mière, une  glorification  delà  femme,  qui  vient  s'opposer  à  tant 
de  contes  où  elle  est  représentée  comme  per^^erse  ;  mais,  même 
vertueuse  et  fidèle,  elle  ne  laisse  pas  d'être  adroite,  voire 
rusée,  et  se  montre  par  là  très  supérieure  à  son  mari,  violent  et 
crédule  \  Peu  à  peu  le  conte  s'est  épuré  et  est  arrivé,  dans  le 
Cùtntt  di  Poiiiers^  dans  Fhire  et  Jehanne^  chez  Boccace,  à  mettre 
en  scène  la  fidélité  conjugale  et  les  plus  hautes  vertus, 

Gaston  Paeis- 


TABLEAU  EÉSUMANT  LE  CLASSEMENT  DES  VERStONS 
DU  COKTE  DE  LA  GAGEURE 


:  BONNE  FOr   DU  GALAKT;  SUBSrriTL-TIOK  ET  MUTTLATION. 

t     Poème  grec.  —  2.   Hartrs  TùUisin.  —   j.  Ballade  écossaise.  — 
4.  Manuscrit  de  To«rs,  f«  165  v<*.  —  j.  Rupneclu  de  Wilribuf^. 
—  6.  Jakob  Ayrer. 
:  MAtTVAlSE  FOI  DU  GALAKT;  INDICES. 

B*   :   L'HÉtOlKr    EST  SCrUR   du    PARt^tJR;    LE  GALANT  Kl   lV  PAS    VtTl; 
AOCUSATIOH  DE  VIOL  (eT  DE  VOL). 
Bva  :  Pm  de  gû^turt  :  accusât hn  dé  vio!  im  d'un  t*{4  quftttmqîit, 

l,  Mintiscrit  de  Tours,  f"  Vî  ^^  —  2.  GuiîLmmt  dt  Dok.   — 
5.  Nouvelle  de  Sens.  ^  4.  Eufemia. 
B'  b  :  G&^€ur$  ;  aicussUiim  du  vol  d^tin  ohfiïformani  pair  t. 

I-  Fetidana  Aotiqiaario.  —  a.  Batacdii.  — \.  Cames  popubtrcs  3 
a.  Gonxenbach  ;  h.  Fîtrè,  LaStivala\c.  Gubematis  ;  d.  Imbiiinî  j 
i,  Andrews;/-  Pilrê^  Er^'ahianm -^  g    Finamore;  I?,  Sîmfoclrj 
B*  r  t'sÉROÎïvE  EST  LA  FEMME  DV  PARtEt^R  ;  ILLE  S*H ABILLE  EN  HOMME  ; 
ACCrSATïOK  DE  VIOL. 

Manuscrit  de  Toors,  f^  léj  vo. 


I    Djm  b  forme  A,  le  frère  joue  un  moins  pauvre  rôle,  et  Pautear  dn 
Comif  dt  PfÀlitrt  a  réussi  à  relever  le  personnage  du  mari. 


LE   CYCLE  DE  LA    «    GAGEURE   »  5$! 

B  '  :  l'héroïne  est  la  femme  du  parieur  ;  elle  s*habille  en  homme  ; 

AVEU  SPONTANÉ  DU  TRAÎTRE. 

B'  a  :  Aveu  spontané  du  traître  à  la  cour  d^un  roi  étranger, 

I.  Nouvelle  italienne  anonyme.  —  2.  Boccace.  —  3.  Livret  alle- 
mand. —  (Cymheîine  ?). 
B  '  b  :  Aveu  spontané  du  traître  dans  V ancienne  maison  du  mari. 

1.  Francisco.  —  2.  Conte  de  Wolff.  —  3.  G)nte  norvégien.  — 
4.  Conte  gaélique.  —  5  et  6.  Contes  roumains. 
B4  :  l'héroïne  est  la  femme  du  parieur  ;  la  femme  juge  ;  aveu  forcé 

DU  traître. 

B*a  :  Intervention  du  père. 

I.  Timoneda.  —  2.  Moslema  et  Rasimi.  —  3.  Lj  mcfJie  cahmniata. 
B^  b  :   lii  femme  revendique  sofi  droit  à  la  cour  du  roi  témoin  de  la 
gageure. 

B*  bl  :  Pas  de  travestissement  ni  de  signe;  combat  singulier  de 
la  femme  et  du  traître. 
I.  EJena. 
B-^blI  :  Semblable  à  la  forme  précédente;  mais  pas  de  combat 
singulier. 

I.  Byline.  —  2.  Conte  juif  allemand.  —  3.  Pitre,  Lu  miîordu 
inglisi. 
B*  b  m  :  Travestissement,  signe.  / 

I.  Miracle,  —  2.  Floire  et  Jehanne.  i 

:    MAUVAISE   FOI    DU   GALANT;    INDICES;    SON   AVEU    SURPRIS;  • 

RÔLE  PASSIF  DE  LA  FEMME. 

Le  Comte  de  Poitiers  {Le  Roman  de  la  Violette).  j 


PEL  FABLEAV  DI  CONSTANT  DU  HAMEL 


Glî  scrittori  dei  fûblmux  e  délie  farse  mediôevali  furono 
denîgratori  accanitt  délia  virrù  femmtnile,  e  s'avrebbe  totto  a 
ritenere  corne  dîmostrazione  de!  contrario  que!  pochi  esempi 
cheessî  d  offrono  di  moglï  fedeli  e  soctomesse.  Con  la  leggen*J 
dû  dî  Griselda  e  delT  eroina  del  fablcau  «  La  bourse  pleine  dei 
sens  »  SI  passa  da  una  esagerazione  ail'  altra,  e  quelle  donne 
senza  personalitâ,  senza  %'olonrà,  messe  a  fianco  deU*  altrc 
pétulant),  lascive,  rapacî,  m'hanno  pressochè  Taria  di  carica- 
ture. Utia  sposa  che  accetta  lutto  dal  suo  consorie,  offesc  alb 
prapria  dignîtâ,  ingiuriedi  rîvali  e  persino  la  ferita  più  grave  a] 
cuore  di  madré,  la  soppressione  dei  figli,  poteva  cssere  un 
idéale  pcr  que!  tempi,  in  cuî  imperavano  i  forti,  ma  per  noi  è 
un  fantoccîo  senza  nervi  e  senza  sangue. 

Un  altro  gruppo  mutiebre  si  distingue  per  certa  virtù  civet- 
tuola^  intéressa  ta  e  féroce,  che  non  mérita  davvero  troppo  caldi 
elogi,  La  storiella  dei  Segrelain,  di  cui  si  compiacquero  vari 
novellarori,  ci  présenta  il  caso  di  una  moglie  tenta  ta  da  certo 
ecclesiastico  con  doni  e  tusinghc.  Invece  di  vokargli  le  spalle, 
corne  avrebbe  dovuto,  la  nostra  «  borgoîse, 

(lai  moult  est  oit  preuz  et  coitoîse  <  », 

profitta  deiravventura,  e,  d^accordo  col  marito,  fînge  di  accon- 
discendere  aile  sue  voglie.  Il  Segretain  h  sfrunato  in  piena  regola  e 

pcr  di  più  assassinato  a  tradimento,  quando  crede  di  cogliere 
il  prcmio  dei  denaro   sborsaio. 

AitïM  va  fous  SI  mort  quennt  ; 


I.  Montaîgloii  cl  Raynaud,  V,  il  5  (n*»  ij6)» 


PEL  FABLEAV   DI    CONSTANT   DU    HAMEL  553 

e  rautore^  con  cotale  edificante  conclusione,  assolve  la  coppîa 
ladra  e  sporca  di  sangue,  anzi  trova  il  modo  di  ricompensarla 
con  ahro  premio.  Ne  diversa  corre  î'avvcntura  narrât  ad  da 
Huon  Piaucele  nel  fableau  i'Estoimni/m  cui  invece  di  un  prête 
se  n^hanno  tre,  i  qualî  scontano  non  meno  tristamente  le  loro 
sporche  passions  Nel  racconto  di  Consiant  dtiHamd^  la  vendetta 
è  più  giustificarae  piacevolc,  ma  non  per  quesco  appare  meno 
îgnobile.  Labella  Ysabeau,  moglie  di  Constant,  muove  le  vogli 
del  prête  del  viUaggio  che 

Molt  la  re<îuîst  de  druerie^ 

offrendole  (f  fermaus,  çaintures  et  aniauset  deniers  »>  ma  semprc 
in%'ano.  Il  tf  provost  de  la  vile  »,  personaggio  non  meno  impor- 
tance» perché  se  il  prête  puô  mandare  Tanime  ininferno,  quesu 
«  les  prisons  a  en  baillie  n^  rinnova  a  Ysabeau  le  stesse  offerte 
e  per  Tidentico  scopo.  Terzo  a  scendere  în  giostra  è  il  a  fores- 
tier ï),  personaggio  anch*  esso  di  qualche  peso  e  che,  come  il 
suo  nome  Tindica,  ha  la  guardîa  dei  boschi  e  la  forza  necessa- 
ria  al  suo  ufficio.  Ma  'Ysabeau  risponde  ai  due  compati  quel 
che  ha  risposto  al  curato,  ed  allora  i  tre  tirannelli  del  viUaggio 
s'accordano  per  irarre  in  rovina  la  savia  donna  ed  il  troppo 
felice  marito.  Il  prête,  che  è  ranima  del  complotto,  per  «  amai- 
groier  Dant  Constant  «^  dichiara  in  chiesa  che  costui  ha  spo- 
sato  la  comare,  commettendo  cosî,  secondo  i  pregiudizi  del 
tempo,  una  specie  d*încesto.  Il  marito  è  caccîato  ignominiosa- 
mente  dal  tempio  e  condannato  a  pagare  una  grossa  niulta.  Il 
preposto,  alla  sua  volta,  inventa  che  Constant  ha  derubato  il 
signore  di  certo  grano;  il  guardaboschi  scopre  che  il  pover'  uomo 
ha  tagliato  quercie  e  faggi,  ed  entrambi  aggiungono  gravi  muUe 
a  quella  stabilita  dal  sacerdote. 

Constant  non  sa  più  a  chesanto  votarsi  :  la  chiesa,  la  gius- 
tizia  e  la  forza  sono  contro  dî  lui,  rappreseniante  delF  umilî 
classi;  pero  la  donna,  astutissima,  per  sua  nacura,  nel  bene 
come  nei  maie,  niedita  il  modo  di  prendere  la  rivincita.  Il  mari- 
to, pel  momento,  chiuda  gli  occhî  e  lasci  fare.  Prépara to  Tin- 
dispensabile  bagno  ed  allontanato  Constant,  Ysabeau  dà  succes- 
sivamente  un  appuntamento  galante  ai  tre  compari.  Primo  a 
giungere  ê  il  prête,  carico  di  gioietli  e  di  denaro,  di  cuî  la  bella 
ha  subito   cura    di   alleggerirlo,    e   mentre    egli  guazza    nel 


5S4  P-    TOLDO 

bagno,  attendes  do  le  tenere  cnrezze,  ecco  il  preposto  che  batte 
alla  porta.  «  Salvatevi  ii,  grida  Ysabeau  al  sacerdote,  e  qucsti« 
nudoe  tremantej  deve  rifugiarsi  in  una  botte  piena  di  penne, 
che  !o  tr.isformeranno  în  strano  uccello*  Il  preposto,  che  non 
ha  fatto  orecchio  di  mercante  airavvertimento  délia  servctta 
d*Ysabeau 

Ma  dame  a  moult  d ^argent  afere» 

è  pure  carico  dî  doni»  ma  anche  i  regalî  a  nulla  approdano, 
perché  Tarrivo  del  guardaboschî^  che  il  preposto  prende  pel 
marita,  locostringe  asaltare  nudo  nel  kititlf  pestando  le  costote 
di  chi  r  haprecedato.  Il  guardaboschi  corre  la  siessa  avventura 
deî  due  suoi  compagnacci,  e  questa  voira  è  veramente  Constant 
che  si  présenta,  armaio  e  forte  del  suo  diritto.  Per  prima  cosa 
egli  intasca  i  doni  del  corteggiatori  di  sua  moglie,  poî,  per  un 
sîngolare  accorde  con  Ysabeau,  manda  a  chiamare,  Tuna  dopo 
r  altra,  le  consorti  pîù  o  meno  legittime  dî  costoro  e  fa  subire 
a  ciasciina  dî  esse,  per  amore  o  per  forza,  Toffesa  chei  loro 
signori  volevano  fare  ad  Ysabeau,  Che  costei  si  prestî  a  tal 
génère  di  vendetta  maritale,  puo  parère  strano  davvero,  ove 
non  si  pensi  che  con  un  marito  di  tal  génère  anch*  essa  doveva 
avère  qualche  paura  La  comîcità  délia  scena  liberissmia  nasce 
da  due  fattî  e  cîoè  da  œrte  osservazîonî  deile  donne  che  rico- 
noscono  che  la  bella  non  ha  torto  d'essere  affezionata  a  tal  uomo^ 
e  dalla  sîtuazione  dei  tre  testîmonî,  rinchîusi  nella  botte,  di 
cuî  ciascuno  corbelta  Taltro,  aspettandodi  essere  corbellato  alla 
sua  vol  ta. 

Constant,  messe  alla  porta  le  donnes  corre  al  totml,  vi  appiccâ 
fuoco  e  i  tre  gahnîi  nudî  e  pennuti,  scappano  perle  vie  del  vil- 
lagglo,  inseguitî  e  morsi  dai  cant,  che  li  prend  on  o  chi  sa  per 
quai  selvagginaj  battuti  da  Constant ^  ingiuriati  e  svergognatî 
da  tutti,  È  un  inseguimento  în  cui  î  disgrazlati  cadono  e  si 
rialzano  sotto  le  percosse  e  perdono  sangue  dalle  ferite  e  pre- 
gano  e  si  raccomandano,  nel  delirio  dello  spaventoe  del  dolore. 
Infine  la  dolorosa  caccia  cessa,  tosto  che  i  tîrannelli  hanno  gîu- 
rato, 

Seur  la  croîz  et  seur  le  sautîer, 

di  non  far  piu  alcum  maie  alP  energica  coppîa,  e  la  morale  del 
racconto  è  codesta,  che  la  donna  ottîene    «  deniers  a  grant 


PEL  I-ABLEAV  DI   CONSTANT  DU   HAMEL  555 

plenté  »,  perchèy  dice  i'autore,  a  a  sagement  ouvré  ».  Su  questo 
sagement  vi  sarebbero  moice  osservazioni  da  (are,  ma  a  noi 
importa  solo  di  tener  présente  che  ci  troviamo  di  fronte  ad 
on  ricatto  e  ad  una  estorsione,  per  quanto  delle  atténuant!  Ysa- 
beau  e  suo  marito  ce  n'abbiano  parecchie.  Qyella  che  non  pos- 
siamo  condividere  in  alcun  modo  è  la  fiducia  di  Constant  nel 
pcrdono  dei  tirannelli,  i  quali,  riavendo  le  forze,  ritorneranno 
ad  aver  ragionc,  ne  molto  assegnamento  potrà  farsi  su  quella 
che  oggidi  si  chiamcrebbe  Topinione  pubblica.  Forse  ad  una 
conclusione  più  rassicurante  avrebbe  giovato,  corne  vedremo  in 
altri  racconti,  Tîntervento  diretto  del  signore,  seppure  nella 
giastizia  di  questo  lo  scrittore  medioevale  aveva  ragione  di 
fidare* 

Pîû  avvcduto  di  Constant,  ma  non  meno  interessato  di  lui, 
ci  appare  il  proiagonista  di  una  farsa  medioevale,  la  Farce  nou- 
velle a  .VI .  personnages ,  savoir  deiilx  Gentil:^hommes,  le  mounyer, 
la  meunyere  et  les  deiilx  femmes  des  deulx  GentilT^Ijomnus  abi liées  en 
demoiselles^  di  cui  non  trovo  fatta  menzione  dal  Bédier,  seb- 
benesi  tratti  cvîdentemente  dellostcsso  argomento  del  suespos- 
xo  fableau  '.  Poichè  i  mugnai,  in  quella  età,  erano  considerati 
corne  abili  sfruttatori  i  dell'  altrui  dabbenaggine  e  maestri  di 
inganni,  non  c'  è  da  meravigliarsi  se  ad  uno  di  essi  viene  attri- 
buita  Tavvcntura  di  Constant.  Il  mugnaio  ha  la  moglie  bella  ; 
due  gentiluomini  la  cortcggiano  e  le  offrono  doni  e  quattrini  ; 
la  donna  li  rifiuta  cd  cssi  giurano  vendetta.  Un  processo  sta  per 
rovinare  il  mugnaio  ;  egli  non  possiede  nuUa,  e,  siccome  «  on 
ne  plaide  poinct  sans  argent  »,  è  sicuro  di  venire  condannato. 
Che  farc  ?  trarre  profitto  délia  situazione.  La  moglie  finge  di 
accondiscere  aile  voglie  dei  gentiluomini  e  concède  loro  un 
appuntamcnto  separato  c  con  brève  intcrvallo.  Per6  essa  vuole 
una  spccic  di  caparra,  ed  il  mugnaio  si  présenta  in  scena,  ral- 
legrandosi  col  tintinnio  dei  quattrini,  truffati  dalla  consorte  : 

Su  I  su  I  j'ai  de  Tor  a  plein  poing. 
Femmes  sont  fines  a  mer\'eilles. 


I.  Joseph  Bédier,  Les  jahliaux,  2*  éd.  Paris,  1895.  p.4S4  sgg.  Per  maggiori 
particolari  sulla  farsa  mi  sia  lecito  di  rinviare  ai  miei  Éludes  sur  le  Ihèdlre 
comique  du  ftioycndgCy  mSiudj  di  fiblogia  romança ,  fasc.  25, 1902,  pp.  270-274. 


SjS  P-   TOLDÛ 

L'avvetitura  corre  corne  nd  fableuu.  Gii  amantî  dismrbati  e 
impaurjti,  il  primo  dal  secondo  e  il  seconde  dal  marito  si  nas- 
condono  nel  polbio,  dove  troveranno  da  impennarsî  quanto  i 
loro  predece'îsori.  Il  marito  gode  !a  cena  e  poi  manda  a  cercare 
le  dink^iseUes  dei  gentiluomini  e  compie  su  trsse  la  nota  ven- 
detta. La  sorpresa  non  totalniente  sgradita  délie  dame  a  cotale 
violenza  è  messa  nella  farsa  in  maggtor  luce  : 

Les  mounyers  sont  tant  amoureulil 

e  non  aUrimenti  del  fableau^  i  dtie  mariti  rinchîusî  si  svergo- 
gnann  e  si  confortano  reciprocamente»  Pero  il  mugnaiot  troppo 
astPto  per  volere  scandalî  ed  insegiiimenti  selvaggî  attraverso 
il  vilki^gio.  I  due  gentiluomini  trait  i  di  gabbia,  e  Tuno  di  essi 
ha  pure  il  grado  di  prnvsi  corne  uel  fahîeau^  si  dichiarano  pen- 
titi  délia  loro  scappata,  rinonciano  al  denaro  ed  a  qualsiati  rap- 
presaglia  e  tan  no  ritorno  aile  loro  case,  mogi  niogi  e  senza  dir 
nienie  a  chichessia.  E  qui,  corne  nel  favolello^  la  morale  con- 
siste nel  trîonfo  délia  debolezza  intelligente  sulla  forza  brutale 
e  neir  appHcazîone  del  proverbio  <*  i  trompeur^  irortiperye  ». 

Quale  è  Torigine  di  questa  storiella  ?  Il  Bédier  nell'  opéra 
citata  '  drce  cosi  :  «  Ce  fabliau  est  représenté  en  Orient  par  un 
conte  des  Mille  et  une  nuits  (496''  nuit  du  texte  tunisien  du 
xvi^  siècle;  rédition  de  Breslau  Ta  supprimé.  L^analyse  que  je 
donne  est  faite  d'après  la  Fkur  lascive  9rientah\  Oxford,  1882, 
p*  10),  Ce  conte  arabe  peut-il  prétendre  à  remonter  jusqu'à 
l'Inde  ?  Je  Tignore  et  j*en  doute,  »  E  ahroveegli  aggiunge  corne 
sarebbe  erroneo  il  voler  ricercare  la  fonte  d'un  fableau  del 
xni''  sec.  in  racconti  arabi  posteriori  di  duecento  anni,  «  car,  si 
les  contes  des  Mille  et  une  Nuits  remontent  parfois  à  des  recueils 
sanscrits,  il  est  certain  pourtant  que  la  Nuit  Al-Kader  ne  fai- 
sait poioi  partie  du  roman  primitif  de  Sindibab,  que  ce  conte 
n'y  est  qu'un  intrus,  mal  h  propos  introduit,  à  one  époque 
récente,  par  un  remanieur  arabe*  «• 

lo  non  credo  esatto  Tasserire  recisamente^  corne  fa  Tegre- 
gio  criticoj  che  non  vi  sieno  narrazioni  orientali  anteriori  al 


z.  Ivt,  pag.  Î47. 


PEL   FABLBAU  DI   CONSTANT  DU    HAMEL  557 

xii['  st^c,  le  quali  espongano  avventure  sotto  qualche  riguardo 
analoghe  a  quelle  de!  favolello  francese,  e  che  per  questo  il 
racconto  àtW^  Mille  e  una  Noîîe  debba  considerarsi  come  jmer- 
polazione  récente.  Nuîla  di  più  coniQnc  délia  vendetta  délie 
mogli  oneste^  le  quali  burlano,  punisconoe  svaligiano  ilibertini 
che  vogliono  imporsi  ad  esse  colla  violenxa  e  colla  perseGuzione. 
L'Oriente  antico,  ben  prima  deir  au  tore  di  Constant  du  Hamel^ 
s*cra  coDipiaciuto,  corne  vedremo,  di  tali  storiette,  sicchè  il 
gruppo  originario,  il  Navelknkms^  ha  una  patria  d'origine 
remota  pel  luogoe  pel  tempo.  Perù  devesi^  in  pari  tempo,  con- 
venire  che  il  jabkau  e  la  farsa  hanno  trattî  caratteristîci  e  par- 
lîcolarij  sicchè  in  nessun  caso  ci  troveremo  in  présenta  di  una 
redazioae  che  possa  indicarsi  qaaie  fonte.  Si  tratta  di  qualcosa 
di  più  di  semplici  e  casuali  riscontri,  ma  le  anella  délia  cateni 
non  appaîono  continuate  e  progressive* 

Si  osservi  intanto  che  nelF  analisi  del  racconto  orientale,  il 
Bédier  si  è  preoccuparo  piuttôstodi  dimostrarele  dissimiglianze 
che  le  assomiglianze  cnl  fabîmu  dî  Constant  du  Hamel.  Non  i 
men  vero  perô  che  queste  ultime  sono  notevoli.  Cercano  i 
favori  di  una  onesta  donna,  di  niodesto  stato,  il  Kadi,  il  gran 
collet  tore  délie  imposte,  il  capo  délia  corporazione  deî  beccai  ed 
un  ricco  negoziante,  tutti  vecchi  c  viziosi.  La  moglie  si 
accorda  col  marîto,  per  spogUare  i  quatiro  libertini  e  per  bef- 
farsi  di  loro.  E  Tîntrigo  ê  questo.  La  donna  accorda  a  ciascuno 
di  essi  un  appuncamento,  in  casa  propria,  e  gli  appuntamentî 
si  seguono  in  modo  da  costringere,  man  niano,  i  quattro 
signori  a  nascondersi  in  un  gabinetto,  lasciando  alla  bella  i  doni 
e  gli  abiti.  Il  marito  arriva  ukimo,  fa  uscire  i  disgraziati  dal 
nascondiglio  e  li  schernisce  senza  misfricordia.  Le  differenze 
consistono  nel  génère  di  vendetta  ^ —  travestimento  ridicolo  degU 
innamoratij  costretti  a  ballare  come  scemi  —  nella  mancanza 
delîa  rivincica  sulle mogli  epiù  particolarmenie  nel  fatto,che  il 
Bédier  non  osserva,  dei  libertini  i  quali  non  untano  colla  vio- 
lenza,  come  ne!  fabîeau^  di  imporsi  alla  coppia  fedele.  Questa 
violenîîa  k  invece  caratteristica  délie  altre  redazioni  orientali, 
ch'jo   qui  verro  citando. 

Prima  fra  queste  è  la  Siorta  di  Upakoçà  scritta  da  Kshemendra 
Vyâsadâsa,  del  Cachemire,  nell'  undecimo  secolo,  e  di  cui  rife- 
riamo  la  traduzione  francese  quale  si  legge  utl  Journal  Asiatique 
(1885,  voL  6  &  8,  p*  461).  Questa  moglie,  savîa  e  bellissimaj 


5S8 


P.    TOLDO 


alkit  comme  d'otdinairt-  se  plonger  dans  la  Gangil,  semblable  a  la  Yamu- 
ûâ.  Sci  v£tcméni5  légers  et  transparents  imUaient  W  blanc  sourire  de  r^aime 
gonfl^èe,  ses  hanches  les  b^ncs  de  sable,  ses  yeux  le  lotus  frais  édos,  son 
teint  le  bleu  sombre  des  eaux,  quand  ïe  chef  de  tu  police  royale,  jeune  homme 
enivré  de  fortune,  et  aussi  le  chapelain  du  mî  ainsi  que  son  ministre,  aper- 
çurem  ce  bouquet  d*amour.  A  sa  vue  chacun  d'eux  lut  subjugué  par  la  passion.  Le 
ministre  dit  à  Upakoçâ:  h  Accorde- moi  tes  faveurs  avant  tout  autre*  «  Comme 
elle  revenait  du  bain  à  Theure  du  crépuscule,  prise  de  peur,  elle  lui  répondît 
perfidement  :  «Soit  1  rendes  vous  (chez  moi)  àans  trois  jours  a  la  tombée  de 
la  nuit,  q  L^amoureuK  ainsi  berné,  elle  s'en  alla.  Délivrée  du  ministre,  elle 
dit  au  chapelain  :  «  Dans  trois  jours,  à  la  troisième  veille  de  la  nuit,  je  suis 
à  ta  disposition,  »  Sur  ces  paroles  elle  le  i^uitta.  Puis  cîlc  s*adressa  au  chef  de 
la  police  :  v  Dans  trois  Jours,  luidit-elle,  àla  troisième  veille  de  la  nuit,  je  suis 
à  toi.  n  L*accord  ainsi  conclu,  débarrassée  des  poursuivants,  eile  rentra  cher 
elle  encore  tremblante  et  répandant  en  quelque  sorte  avec  ses  regards 
inquiets,  des  lotus  sur  tous  les  points  de  Thorizon.  Elle  alla  demander  à 
Hiranyagupta,  dépositaire  infidèle  de  son  époux,  un  peu  d'argent  sur  le 
dépôt  que  lui  avait  confié  son  mari.  Mais  le  coquin  nia  le  dépôt  et  réclama 
un  rendex-vous  chez  elle  en  retour  d'un  versement  :  a  Dans  trois  jours,  lui 
dit*elle,  au  dernier  quart  de  la  nuit  je  t'appartiens,  puisque  je  suis  libre^  et 
que  tu  me  veux.  »  Puis  elle  coma  à  ses  doniestiqut^s  toute  T histoire.  Le  troi- 
sième jour  vctxUjà  la  tombée  de  la  nuit^  k  ministre  se  présenta  en  tremblarit^ 
presqu*à  regret,  dans  U  maison  où  toutes  les  lumières  étaient  éteintes.  Upa- 
koçâ  lui  dit  :  a  Je  ne  puis  me  livrer  i  toi  sans  que  tu  te  sois  baigné.  »  L'amou* 
reu3£  obéit  et  entra  dans  une  chambre  retirée  et  sombre  pour  y  prendre  un 
bain.  Là  on  Tcnduisit  d'huile  et  de  noir  de  fumée.  Des  servantes  lui  en  frot- 
tèrent les  membres  pendant  un  longtemps.  Mais  voici  qu*à  la  secotide  veille, 
le  chapelain  arrive  bien  vite*  La  caisse  au  bois,  en  forme  de  coffre,  était 
ouverte,  fl  Enire  ht  dedans,  entre,  dépêche-toi»,  crient  les  femmes  au  minisire; 
«c'est le  maître  de  la  maison  qui  arrive.  «  Et  Upakoçi  fit  entrer  ce  haut  per- 
sonnage dans  ta  caisse»  qu'elle  ferma  avec  un  verrou  de  fer.  Bile  dit  ensuite 
au  chapelain  :  «  Tu  ne  me  toucheras  pas,  av^int  de  te  baigner,  m  A  son  tour* 
il  obéit.  Tandis  qu*on  le  frotïait  dlmile  et  de  noir,  le  troisième  surt'int.  En 
vérité  quel  est  le  roué  d'amour»  qui  pourrait  duper  même  une  innocente? 
On  vous  jette  le  chapelain  tout  effaré  dans  k  coffre.  Par  le  même  procédé^ 
le  chef  de  la  police  ne  tarde  pas,  son  tour  vcnu^  à  prendre  une  mine  de 
Piçaca.  Au  dernier  quart  d* heure  de  la  nuit,  Hiranyagupu,  cet  eKcelknt 
marchand,  arrive.  Le  policier,  â  von  tour,  est  enfermé  dans  la  caisse  au  bols. 
Upakoçâ  fait  asseoir  le  marchand  à  son  aise  sur  un  beau  siège  et  lui  dît  en 
face  du  coffre  :  «  Remets-moi  Tarj^ent  que  l'a  confié  mon  mari.  »  Hiranya- 
gupia  lui  répond  :  ^  Livre-toi  d'abord  a  moi,  lennne  a  Taimable  sourire. 
L'argent  que  m'a  remis  ton  époux  est  à  moi,  ô  toî  dont  ks  sourcils  sont 
beaux,  s  Alors UpaJsoça  élève  îa  %'oix  :  **  Eniendea-k,  divinités  domestiques  1 


PEL  FABLEAV  DI   CONSTANT   DU   HAMEL 


5S9 


Démons,  soyez  témoins  !  ma  fontine  esi  chcï  cet  homme*  a  Ensuite  sous  pré- 
texte d*un  bain,  elle  le  fil  également  endutre  de  noir.  QLiand  il  fut  bien 
horrible  à  voir»  eîle  lui  dit:  «  Voki  îa  nuit  pa^s&iic;  va-t'en.  »  Le  marchand 
partit  bien  viie  xm  lever  du  jour,  se  couvrant  le  visage  par  craUne  du  moniie, 
les  vétemenis  tout  déchirés  par  les  chiens  qui  Tescoruueat  ca  aboyam*  Après 
le  dépari  d^Hiranyagupta,  Upakoçâ,  qui  avait  sav^è  son  honneur  avec  tant 
d'intelligence,  s'en  alla  dès  le  tnattm  à  h  salle  d'audience  publique  du  roi 
Nanda.  On  annonça  que  b  ffiSe  d*Upavarsha,  lu  vertueuse  épouse  de  Va  va- 
ru  ci,  étaii  Là.  Le  rot  lui  fit  bon  accueil  :  elle  prît  ensuite  la  parole  :  ce  Mon 
mari»  dk-elk%  a  déposé  sa  fortune  chez  Le  marchand  Hiranyagupta  :  cet 
homme  le  nie  ;  au  roi  de  |uger  mamtenant.  Le  marchand  fut  appeJé,  vint  ei 
mentit.  *  Eh  bien  1  s'écria  Upakoçà,  j'ai  des  témoins  à  la  maison.  Qu'on 
apporte  mes  dieux  domestiques,  enfermés  dans  leur  caisse.  Ils  diront  ce  qui 
en  est.  » 

Ayant  ainsi  parlé,  elle  attendit*  Le  roi  ordonna  à  ses  serviteurs  d*apporter 
le  coffre  désigné.  On  le  déposa  au  milieu  de  La  salle,  et  L'épouse  fidèle  s'écria  : 
^t  Allons  !  divinités  qui  méritez  tact  d*égards,  parlez  I  Dîtes  la  vérité  \  Je  vous 
brûle  à  l'instant  avec  le  coffre,  sî  vous  gardez  le  silence,  quand  je  vous  appelle 
eo  témoignage.  «  Épouvantés,  ils  répondirent  :  t<  Oui,  c*est  vrat^  ton  argent 
est  aux  mains  d'Hlranyagupta;  nous  en  sommes  les  témoins.  »  A  ces  voix, 
à  ce  prodige,  les  assistants  furent  stupéfaits.  On  ouvrit  la  caisse  et  les  pri- 
sonniers parurent^  frottés  de  noir  et  tout  nus.  Le  roi,  informé  de  l'histoire 
entière,  les  punit,  traita  Upakoçâ  comme  une  sœur  et  l'honora  de  riches 
présents. 

Rassumendo,  Upakoçâ  è  una  brava  donna,  fcdele  allô  sposo^ 
molestata  e  spaveatata  da  quattro  innamorati  pott;ntLssimi,  da 
cui  essa  deve  tutto  temere,  il  capo  della  polizia,  un  saœrdoce 
accreditato  alla  cône,  Uministro  del  sovrano  ed  un  debitore,  cke 
nega  impudentemente  la  somma  riccvuta*  Upakoçâ  finge  dî 
arrendersi,  siaper  alloncanare  le  probabili  vetidette,  sia  per  ria- 
vere  i  denari  che  le  sono  dovuti  e  rappuntameato  cb'essa  con- 
cède ai  libertini  é  identico  a  quelle  narrato  nel  favoletto  fran- 
cese.  L'arrîvo  del  S(;condo  distnrba  il  primo,  corne  quello  à\À 
terzoedel  quarto  interromperanno  le  imprese  galanti  del  secondo 
e  del  ler^o.  Si  noti  che  in  uguale  modo  i  libertini  sono  spo- 
gliati  e  messi  nel  bagno,  e  si  osservi  anche  che  rultimOj  ossia 
il  debitore,  deve  scappare  nudo,  tinto  di  nero  ed  inseguito  dai 
cani,  e  un  dipresso  corne  gli  eroi  gabbati  da  Ysabeau,  La  con- 
ctusione  varia  notevolmente,  ma  essa  rappresenta  perè  sempre 
il  trionfo  delF  astuzia  femminile  che  giova  al  buon  diritto;  i 
potenti  piegano  il  capo  e  Tagiaterza  ritorna  a  rendere  Heta  la 


JÉO  p.   TOLÏXJ 

casa  dti  dut  sposi.  Il  martto  non  app^rc  în  sceria,  ne  si  sa  quai 
pine  cgti  abbia  nell*  învcnzione  délia  mogUe^gli  dcî  famtliari, 
rînchiusi  nella  cassa  c  che  lo  spivcnto  fa  parlare^  ricordano  la 
nota  avvcntura  del  Jahkûu  dt*l  prêtre  qui  fui  mis  au  lardier^ 
mcoire  la  tintura  ridicola  dcl  debituie  ci  £i  pensare  al  priîrt 
uint  buflato  in  uguale  modoj  e  per  non  diversa  ragione,  in  un 
altro  racconto  francesc  medioe% aie.  Ncl  Bahar  i  dàmsb,  cioé  nella 
Pritnavera  dfUa  Sapknia^  romanzo  persiano  che  racconta  la 
storia  del  princip<^  Gihândâr  c  délia  pnncip€ssa  Bahravar',  si 
cspone  un'avvenmra  somiglianiissima. 

Una  buona  moglic  è  perseguicata  dal  capo  délia  polizta  e  da 
un  magistrato^  per  non  avère  accondisccso  ai  loro  desidcrî.  Il 
maritû  suo  è  messo  da  costoro  in  prigione,  e  b  povera  donna,  per 
salvârc  lui  e  Tonore  coniugale^  deve  ricorrere  ad  una  asiuzia. 
Ornatasi  con  grazia  cî vettuola,  essa  si  présenta  ai  due  tirannclli 
e  concède  loro  un  appuntamento  norturno,  a  condiziooe  che 
Itbereranno  tl  marito.  Primo  a  presentarsï  è  il  giudice,  carico  di 
provvîgionî  per  una  lama  cena.  La  donna  l'accoglie  affeuuosa- 
mente,  ma  il  tenero  colloquto  c  interrotto  da  un  violcnto  bus- 
sare  alla  porta.  Il  giudicc  smarrito  si  nasconde  in  una  specie  di 
rino,  G>Iu!  che  ha  bussato  è  il  capo  dclla  poli^ia,  che  entra  ed 
è  uguainîcntc  dîsiurbaio  neî  suoi  amori  e  rinizhiuso  in  una  cassa. 
Il  giorno  M.'gut:nte,  la  savia  donna  fa  portare  i  due  colpevoli 
davanti  al  sultano,  ilquale  udita  la  narrazione  del  fatto,  ricom- 
pensa  la  sposa  fcdcle  c  castiga  gli  iniqui  ministri. 

E  questa  leggenda  è  ancora  oggidi  viva  e  diffusa  nel 
rOriente,  in  escmplari  sfuggiti,  essi  pure^  aile  ricerche  del 
Bédier,  Uno  di  essi  è  del!*  Afganistan  e  lo  riassuino  brevemente'- 
Ëraviun  povero  tintorc»  che  aveva  unabella  moglîe,  Fatinia,  ed 
un  proccsso  moko  spinoso.  Faiima  prega  invano  il  giudice,  il 


I.  QMéstô  raccomOi  indicato  crroacameme  Jallo  Scott  col  liioîodi  Bahar 
Dûnusçh  ç  pure  crToacameQte  trascrilto  nell*  opcra  Dunlop-Licbrccht  (Gtt- 
£hkhti  àtr  Prmidkhtm^tn,  p.  ^46  s^q),  fa  composto  dallo  xcdcco  înàyât 
AlUh  ncl  1061  àéV  Egîra  (16^0  d.C).  È  quindi  opcrâ  delb  plù  lardi 
e  Jcwjdcntc  Ictti^râtura  pc-r^tana,  mi  TA.  dicedî  averne  avtito  il  soggetia  da 
uti  hrahmino  dlndia, 

a,  Bannu^  ùt  tmr  Afx'han  Frotttiift  hy  Thorburn,  Londra,  Trûbncr»  1876, 
Ch*  U  rivisia  Miîmm,  anno  1878,  pag,  177, 


PEL  FABLEAU  Dl    CONSTANT   DU   HAMEL  jél 

kazij  il  vizir  ed  îl  re  stesso  di  essere  favorevoli  aile  buone 
ragioni  del  marito,  Tutto  è  inutile,  la  causa  sarù  perduia  ed  il 
tintore  rovinato,  ove  la  moglie  non  consenta  aile  voglie  dei 
quattro  potenti.  Che  fare  ?  Fatima  finge  di  cedere,  e  concède 
il  soliîo  appuntamento  in  diverse  are  délia  stessa  notre.  Primo 
a  presentarsi  è  il  giudice,  disturbato  daun  energico  bussare  alla 
porta»  La  bella,  corne  rtel  racconco  délie  Afi7/^  e  nna  mîte^  lo  tra- 
veste  in  modo  ridicolo  (da  vecchia).  Il  Kazi,  seconde  arrivaco, 
é  costretto  a  coprirsi  œn  una  pelle  di  vacca;  il  vizir  con 
quella  d'un  vitello,  ed  il  sovrano,  cui  sarebbe  stato  irriverente  e 
pericoloso  il  tare  un  simite  tiro,  è  interrotto>  nelle  sue 
galanterie,  dalla  preghiera  matiutina,  sacra  ad  ogni  seguace  di 
Maometto  e  che  vieta  le  gioie  d'aniore.  Tutti  restano  svergo- 
gnati  e  confusi,  e  Fatima  ottiene  in  taie  guisa  che  il  marito 
guadagni  la  causa, 

L'altro  escmplare  è  siriaco  e  raccolto  a  Damasco  dalT  Oes- 
trup\  Certo  marito  che  ha  bellissinia  moglie,  corteggiatainvano 
dal  cadi  e  dal  mufti ^  recasi  al  mercato,  per  la  spesa  quotidiana. 
Il  poveretto  à  ridotto  a  tanta  miseria  da  dover  %^endere  il  tur- 
bante  per  provvedere  al  vitto  del  giorno.  Il  tadi  ed  il  muftis 
che  hanno  giurato  la  sua  rovina,  Tincontrano,  ringiurîano,  lo 
battono  e  gli  tolgono  quella  poca  compera,  che  portava  alla 
moglie*  Il  marito  racconta  alla  donna  quanti  gli  è  accaduto; 
costei  Tesorta  a  stare  di  buon  animo;  pensera  essa  alla  ven- 
detta ed  a  trovare  quattrini.  Orna  ta  délie  sue  migUori  vestî^ 
ta  vezzosissima  sposa  esce  di  casa;  il  caii  ed  il  mufti ^  tosto 
che  la  veggono,  Finseguono  e  le  rinnovano  le  proposte*  La  fur- 
betta  finge  di  acconsencire  e  concède  a  ciascuno  di  essi,  in  giorni 
diversi,  Tappuntamento  desiderato. 

Il  mufti  si  présenta  pel  primo,  e>  corne  nel  racconto  précédente, 
volendosi  nascondere  alTarrivodel  marito,  è  costretto  a  coprirsi 
colla  pelle  di  un  caprone.  Il  marito  entra,  con  aria  sospettosa, 
guarda  e  fruga  qua  e  là  e  scorgendo  l'animale,  gli  fa^  con  un  pre- 
tesco  qualsiasi,queirDpera;(ionejChe  è  ricordata  in  altri  favolelli 
del  génère,  quello  de)  Frestre  crucifié^  per  esempio*  Il  giorno 
seguente,  ecco  il  cadi  che  viene  ad  impigliarsi  nelia  stessa  rete. 


i.  Cornes  de  Damas  recueil  lis  et  tradulis  par  J,  Ûe^trup  (Leyde»  i&97)# 
p.  to;  :  Le  cadi  tî  h  moufîi, 

MmanU,  XXXÎl  }6 


562  ^Mȕ^ 

Questa  voira  al  disgraïîiatè/ nascosto  dalla  moglie  airarnvo 
dello  sposo,  è  imposto  di  fare  il  bimbo  in  culla,  ma  il  mariio 
trova  che  per  essere  di  cosi  tenera  età,  egli  ha  la  barba 
troppolunga  e  gliela  rade,  non  occorre  dire  con  quanta  grazia, 
Poi,  tratto  di  culla,  il  cadi  dcve  spazzar  la  casa  e  peggio,  ed  è 
alla  fine  messo  alla  porta,  sporco,  stracdato,  con  una  gerla 
d'immondtïîiesulle  spallc,  ed  anche  lui,  corne  il  mufti,  spogliato 
di  ogni  avère. 

In  una  terza  versione,  dello  stesso  territorio  \  trattasi  di 
treaniantiy  un  vescovo,  un  prête  ed  un  sagrestano,  ma  qui  Tav- 
ventura  si  compUca  con  qucUa  dei  tre  gobbi  e  con  gli  addai- 
tamenti  a  diversa  religîone, 

Altri  racconti  di  niogli  feddied*amanti  burlaii  offre  TOriente 
antico,  i  quali  possono  essere  riavvicinati  al  fablmu  di  Constant 
du  Hanuly  pur  presentando  notevoli  différence.  Ne!  Tuti- 
Nanieh^^si  esponeuna  storiella  che  ci  fa  pensare  al  Roman  de  la 
ViôktU^  a  quelle  dou  roi  Flore  et  de  la  belle  Jeham  e  del  Conte  de 
Poiikrs^  alla  Cimhlina  dello  Shakespeare,  e  via  dicendo  sino  alla 
QttemuiUe  de  Barkrim  d'Alfred  de  Musset*  Certo  militare, 
lasciando  la  moglie,  riceve  da  questa  un  mazzo  di  fiori,  che,  al 
pari  di  altri  telesmi  di  simil  génère,  conservera  la  propria  fres- 
chezza  finchè  la  fede  coniugale  restera  intatta.  Un  emiro  vuol 
mettere  alla  prova  codesta  virtù  femminile  e  le  invia  due  cor- 
teggiatori,  i  quali  vengono  si ngoîar mente  beffati,  Lo  stesso 
avviene  di  quattro  spasimanti  in  un  racconto  dei  Mille  t  un  gior- 
no K  Una  divinité,  a  due  sposi  che  stanno  per  separarsi,  offre 
dei  loti  rossij  cui  èconcessa  la  virrù  delmazzo  succilato.  Quat* 
tro  mercanti  estorcono  al  marito  il  segreto  e  tentano  la  virtù 
di  leL  La  bella  finge  di  acconsentire  ;  riceve,  Tun  dopo  l'ait ro, 
i  quattro  innamorati,  li  spoglia  d*ogni  avère,  li  addomienta, 
con  certe  bevande  narcotiche,  e  poi  li  segna  in  fronte  con  un 
marchto  rovente.  Cosi  i  quattro  passano  per  suoi  schiavi  e 


t.  Comtes  d€  Damas  traduits  et  recueillis  par  J.  Oestriip,  p.   115. 

2.  l/s  trente-cinq  cmtei  d'un  perroquet  {Jôuti-Namâh),  trad.  di  M«»  Marie 
d'Heures,  4"  raccorno  (Pirigi,  1S36);  cfr.  anche  Dos  Papagaienbuch  nellâ  ver- 
sione dcl  Rosen,  lipsta,  iS^8, 

\.  I/j  miUeet  un  fmri,  ndU  iradumoEie  un  po'sospeitiidi  Fèds  de  kCroim, 
ediz.  dd  Panthéon  lit  tir  aire  ^  p.  291.  t 


PEL   FABLEÀU  D1    constant  DU   HAMEL  563 

debbono  sopportarne  d\  ogni  génère,  prima  di  riâcquistare  la 
perduta  libertà.  Nella  stessa  collezione'  è  ripradotta  l'avven- 
tura  dt^lla  Storia  dti  sette  visirij  ma  con  taluni  cambiamenii, 
Uq;i  dama  ha  l*innamorato  in  carcere.  Per  liberarlo,  offre  i  suoi 
favori  alF  ufficiale  di  poHzia,  al  cadi,  al  visir  ed  al  governatore, 
e,  col  noto  stratagemma,  li  rinchiude  in  un  armadio  preparato 
apposu.  Poi  esce  coiramante,  e  il  marito  ritornando  confonde 
la  propria  vergogna  con  quella  dei  quattro  rivali. 

Ai  risconstri  ed  aile  imitazioni  di  Cmjstant  du  Hamel  che  si 
trovano  in  territono  francese^  e  che  sono  citati  dal  Bédier,  puo 
aggiungersene  un'  altra,  che  leggesi  nei  Contes  populaires  de  la 
Hauîe-Bretagm  pubblicati  da  Pau!  Sébillot*.  Qui  glî  inamo- 
rati  sono  tre  «  les  trois  plus  gros  bonnets  de  la  paroisse,  le 
maire,  le  recteur  et  Tadjoint  »,  ma  la  bella  Mésille  Dorée,  che 
Qon  è  moglie,  ma  fidanzata^  li  burla  ailegramente  e  prowede 
aile  sue  nozze  coi  bro  qoattrini.  Bîsogna  pero  aggiungere  che 
la  fanciullaha  certa  bacchetta  magica,  regalatale  dalla  fata  pro- 
tettricÊ,  con  cui  costringe  i  tre  libertin!  a  fare  quanco  essa 
vuole,  ma,  salvoquestaspeciedi  ^tï^^/^mIVl^:^/ortt*,  non  parmi  dub- 
bio  che  nel  reste,  Tantico  favolello  francese  è  riprodotto  abba- 
stanza  fedelmente.  Ai  tre  è  concesso  to  stesîio  appuntamento 
ed  essi  sono,  în  modo  identico,  disturbati,  spoghati  escherniti. 

Qualcosa  di  si  mile  trovo  pure  nelle  tradbioni  popolari  ita- 
liane,  fra  cui  una  ben  nota  storiella  del  Sercambi  illustrata-* 
dal  Rua,  ma  non  parmi  il  caso  di  insistere  troppo  in  codes ti 
raffrond  modem  i  —  i  quali  provano  pur  sempre  !a  vitalità 
dell'  argomento  —  perché  quello  che  importa  va  di  determînare 
erano  gli  antécédent!  del  fabkati  e  non  gia  quaoto  pu6  narrarsi 
ancor  oggi  a  taie  propositu. 


I .  Us  miUe  d  un  jours ^  nella  tradu^ione  un  po*  sospetia  di  Pétis  de  la  Crok, 
ediz,  dd  Fantl^on  liitéraire^  p.  294* 
a.  Cfr.  per  €s.  H.  Rolland,  Romania^  XI,  p.  n^, 

3.  Pârigi,  ï  880,  vol.  I,  Les  galants  dupés. 

4.  Il  GiornaU  sîQrm  délia  kikr.  itah  (voL  XLII,  p,  265)  indica  La 
wyvtUd  di  due  preii  ei  un  cher  m  innûmùrati  di  una  donna  ^  pp.  éii  Hermann 
Vamhiigen  (Erlartgen,  lunge,  190^),  in  cm  svolgesi  b  stesso  argomento* 
Trattasî  di  un  racconto  In  ottave,  di  cm  le  stampc  appaneiigono  agli 
ivim  del  1 50O1  fatte  per  uso  del  popolo,  con  tlue  silografie*  Il  Gtorn.  osscrva 
ehe  il  poeratîto  si  kgge  pure  iiel  ms*  Ricc^rd*  1873  ed  in  un  codice 
Ginori'Vemun.  Sono  entrambi  mss,  del  sec,  xv;  ma  il  lesto  versilîcato 
délia  novella  ù  forse  ancorà  pi  y  antico. 


564  p.   TOLDO 

Sotto  altra  veste,  con  diversi  incident! ,  il  tema  dei  libertini 
burlati  dalla  moglie  fedele,  visse  dunque  in  Oriente  in  remou 
età  e  neir  Oriente  stesso  venne  poi  propagandosi,  con  singo- 
lare  fortuna.  Nelle  redazioni  europee,  vari  e  notevoli  sono  i 
cambiamenti  che  alterano  la  fisonomia  délia  prima  nanazione, 
ma  non  al  punto  perô  da  renderia  irriconoscibile.  L'aggiunu 
più  notevole  di  Constant  du  Haniel  e  délia  (arsa  firancese  è  quella 
délia  vendetta  sulle  mogli  ;  ma  anche  ule  vendetu  non  è  fatto 
nuovo,  balzato  fuori  dalla  fantasia  délie  scrittore  francese. 
Ricorderô,  sempre  peraltro  in  scritti  posteriori,  un'  altra  farsa 
francese,  quella  di  Naudet  che  si  accorda  con  la  moglie  del  suo 
Signore  per  un  tiro  di  coul  génère,  e  poi  vari  racconti  popola- 
rissimi,  il  16**  dei  Proverbi  di  Cinzio  delli  Fabrizi,  Talio  del 
Poggio,  la  3*  délie  Cent  Nouvelles  NouvelleSy  la  3*  pure  délie 
novelle  di  Margherita  di  Navarra,  la  nov.  2*  délia  parte  4'  délie 
narrazioni  del  Bandello  e  via  dicendo,  il  che  dimostra  la  dif- 
fusione  notevole  di  questo  racconto,  sicchè  Tautore  di  Constant 
du  Hatnily  per  dare  uno  scioglimento,  in  qualche  parte,  diverso 
a  una  ben  nota  storiella,  n'aggiunse  un'altra  attintaessa  pure 
alla  stessa  sorgente  popolare.  Il  fatto  di  sovrapposizioni  di  rac- 
conti diversi  è  comunissimo  in  codesto  génère  di  letteratura. 

Pieiro  ToLDO. 


DANTES  USES  OF  THE  WORD  TRATTATO 
IN  THE  CONVIVIO  AND  VITA  NUOVA 


In  the  course  of  arranging  the  material  for  the  article  on 
trattato  in  my  forthcoming  Vocabulary  of  the  Italian  Works  oj 
DantCy  I  found  that  Dante  uses  this  word  in  the  Vita  Nuova  and 
in  the  Convivio  in  a  sensé  which,  so  far  as  I  hâve  been  able  to 
discover,  is  not  recognised  by  any  Italian  dictionary. 

In  the  Convivio  I  hâve  noted  four  distinct  uses  of  the  word. 
In  the  ordinary  sensé  of  «  discussion  »  it  occurs  often  enough  ; 
aSy  for  instance,  in  such  phrases  as  «  ordine  del  trattato  » 
{Conv.  II,  2.  1.  55  ;  ni,  9,  1.  i)',  «  processo  del  trattato  » 
(Conv.  I,  9.  11.  52-3),  «  entrare  nel  trattato  »  (Coni;.  IV,  16, 
1.  98),  a  entrare  per  lo  trattato  »  {Conv,  IV,  16,  11. 34-5), 
«  procedere  al  trattato  »  {Conv.  IV,  16,  1.  16),  and  the  like. 
It  is  also  the  term  constantly  employed  by  Dante  to  indicate  a 
book  or  division  of  the  Convivio.  It  appears  from  a  passage  in 
the  first  chapter  of  the  first  book  that  Dante  intended  the 
work  to  consist  of  fifteen  books  or  trattati.  He  says  :  «  La 
vivanda  di  questo  Convivio  sarà  di  quattordici  manière  ordi- 
nata,  cioè  quattordici  Canzoni  si  di  amore  corne  di  virtù 
materiate  »  (11.  101-5).  As  the  first  book  is  introductory,  and 
as,  in  the  existing  fragment  of  the  work,  a  whole  book  is 
devoted  to  each  of  the  canzoni  discussed,  it  is  évident  that 
the  complète  work,  if  carried  out  on  the  same  plan,  would 
hâve  consisted  of  fifteen  books.  That  Dante  had  planned  out  the 
whole  work  beforehand  may  be  gathered  from  the  instances  I 
hâve  collected  of  his  use  of  trattato  in  this  sensé  of  book  or  divi- 
sion of  the  Convivio \  for,  besides  the  constantly  recurring  refe- 

I.  The  linc-references  are  tothe  Oxford  Dante. 


$66  r.  TOTKïœ 

tmux^w  qutsm  muato  »  (Cwitr. II, 7,  L  2;  01,  ij,  U.  214- 
I  (  ;  eu:.),  «  ti  presoitc  trattato  »  (unir,  W,  lé,  1. 18),  «  îl  prc- 
i^crfite  irattato  »(Oin',  II,  î,  U.  2-3;  III,  i^  L  i»  «c);  il 
fCgtlêfiie  ïrar^io  »  (QmtK  II,  ré,  I,  94  ;  III,  7,  L  145,  ctc), 
efc.^  etc.,  we  find  points  rescrved  for  disoissioD  «  eel  settinio 
trattato  »  (Cmv.  IV,  26,  II.  66-7),  «  nel  quattordicssamo  trat- 
tato w  (Gwrt?,  I,  12,  U.  87-8),  lï  nci  penukimo  trattato  »  (Cour, 
n,  ip  IL  35-  6;  IV,  27,  L  lOï),  «  neir  lUtîmo  trattato  »  (Giiir. 
I,  8,  L  t)  r  ;  m,  î 5,  1-  144),  and  so  on. 

The  thtrd  ^ense  in  whîch  Dante  uses  the  word  îrauaîù  — 
ilic  scnse  which  appcars  hiîherto  to  havc  becn  overlooked  —  b 
that  of  the  narrative  or  didaak  portion  of  a  canzone^asdtstin- 
guished  from  the  proemk^  orintroduaory  ponion. 

Lâstly  he  applics  the  tenn  on  occasion  to  the  canzone  as  a 
whole,  in  so  far  as  it  treats  of  the  panicular  subjea  he  uishes  to 
discuss*  The  terni  isapplied  by  Dante  in  this  way  even  when 
he  has  previously  used  it  distinaively  of  the  narrative  portion 
of  rhe  canzone;  thos,  inG»n^  III,  10,  !K  8}-4,  after  dtscussîng 
in  ttirn  the  literal  meaniûg  of  the  proemio,  the  iramtû,  and  the 
îùrnata  of  the  second  canzone,  he  says  ;  «  cosi  termina  tutta  la 
litcerale  ^ntenza  di  questo  trattato'  9.  In  the  same  way»  m 
his  discussion  of  the  third  canzone,  after  referring  repcatedly 
to  the  di  visions  of  the  poem  by  theirtechnical  namcs,  he  condu- 
èc%  with  a  référence  to  the  caniione  in  itsentirety  asw  il  présente 
trattato  ^  (l\\  2,  1.  164),  Similarly  in  the  Vita  Ntwva^  after 
dtvtdin^  the  first  canzone  into  three  parts,  the  first  two  of 
vt^iich  he  distingtiishes  as  proemio  and  trattato  {V.  N,  ^  19, 11. 
9λS),  he  gocs  on  in  the  next  chapter  to  speak  of  the  canzone 
itsclf  as  tt  cotale  trattato  i>  (^  20,  11.  7-8). 

To  rcEurn  to  the  thîrd  scnse  of  the  word  —  the  first  canzone 
of  the  Cmvivio  («  Voi  che  intendendo  it  terzo  ciel  oiovete  »), 
which  is  dividcd  by  Dante  into  «  tre  parti  princtpali  »,consisting 
respectively  of  the  first  stan^ta  (  «  il  primo  verso  >♦),  ol  the 
second,  third  and  founh  stanz*is("  ti  tre  versi  che  appresso  dd 
primo  seguono  »),  and  of  the  fifth  stan2a(  «  il  quinto  ed  ultimo 
verso  »»  Conv.  II,  2^   Il    S 8-72),    has   no  proitnk  properiy 


I*  ComE»ait  the  sîmllar  use  €iî  trmtûtm^  m  Epiii,  X,  S  9*  *^r  the  Divim 
Omtmàia  a»  a  whaKv 


«   TRATTATO   »    ÏN  THE  COKVIVIO  AND    VÎTA  NUOVA       567 

spcaking;  consequently  in  his  discussion  of  this  canzone  Dante 
has  no  occasion  to  make  use  of  the  distincûve  terni  IratiaîQ, 
The  second  canzone,  on  the  other  hand  (  «  Amor  che  nella 
mente  mi  ragiona  »),  opens  with  an  introductory  stanza^  and 
ts  divîded  by  Danrc  înto  three  parts,  to  which  he  gives  the 
distinctive  titles  of /^rcs^m/o,  îraUato,  and  tornaîa.  He  says  : 

Questa  caiT^one  principal  mente  ha  ire  parti.  La  prima  è  lutto  il  primo 
vcrso^  net  qudte  proemialmcnte  si  paria.  La  scccmda  sono  tuttî  e  tre  U  verst 
segueniî,  ne'  quati  %\  traita  i^acHo  chc  dire  slntcndc  ...  La  terxa  pane  è  il 
{|umto  cd  dtimo  verso,  ne!  quale  dirizzo  le  parole  alla  canmoe  {Conv,  III»  r 
11*  100-9). 

Afcer  dealing  with  «  la  prima  parte,  che  a  proemîo  fu  ordî- 
nata  »  (III,  l,  \\.  1-3),  Dante*  procccds  to  dîscuss  the  second 
part,  and  it  is  în  the  course  of  this  discussion  that  he  makes 
use,  for  thcfirst  time  in  the  Cmwivm^  of  the  word  traltaio  in  the 
partîcular  scnsc  to  which  I  havc  rcfcrrcd.  Havîng  disposed  of 
the  u  primo  verso  »  or  proemio^  he  say.s  (III,  12,  IL  41-2)  : 
ft  Al  secondo  verso,  il  qu.ile  è  cominciatore  del  trattato,  è  da 
procedcrc  »  —  «  we  must  now  pa^ss  on  to  the  second  stan^a, 
which  is  the  bcginning  of  the  did:ictic  or  trealise  part  of  the 
canjîone  *>.  A  litrlc  furtfier  on,  in  the  next  chapter,  he  uses  the 
Word  agatn  in  the  samc  sensé,  and  wittiin  a  few  lînes  he  uses 
it  to  îndicate  a  book  of  the  Convmo  (llh  i  J,  IK  24-Î8),  a  some- 
what  awkward  juxtaposition  which  has  not  unnaturally  misled 
translatorsof  the  work, 

The  third  anxone  (  «  Le  dolci  rime  d'amor  ch'  îo  solia  ^  ), 
like  the  second j  has  an  introductory  stanza,  and  is  consequently 
in  like  nianncr  divided  into  ihrec  distinctive  parts*  At  the 
begtnning  of  his  exposition  of  it  Dante  says  : 

Fer  meglio  dare  ad  tntendcre  la  «etitenxadclla  proposta  caneone,  convien  si 
qudb  parti re  prima  irx  due  parti  ;  chè  ne  11  a  prima  parte  proemialmente  si 
parbf  nelïa  seconda  liscguitail  trattato  (IV,  2^  H*  2-6). 

Then,  having  discussed  the  first  part,  he  continues  :  «  Veduta 
la  senten^a  del  proemlo,  èda  seguîre  il  trattato  »  (W,  3,  IL  1-2). 
The  terni  traîtato  m  this  sensé  occurs  two  or  three  times  in  the 
preceding  cfiapter,  in  which  Dante  draws  attention  to  the  fact 
that  in  the  procmw^  or  first  stanza  of  the  canzone,  the  subject 


5« 

4]sci»ive  porgpQ  of  die  pocm,  tt  is  deali  wîib  in  tlie  itvene 
oïïécT  : 


order,  wfaile  m  die  irati^,  or 


i^fpn  3  Éilio,  e  poî  R  tiata  E  «eii0ir»  3.,  IL  iii-f). 


In  fbe  bst  d^pter  oT  tfals  book  of  tbe  Gimcw,  wUdi  ts 
recipinikiory ,  ihe  three  dîsïinctîve  names,  pnmm^  imnaki^  md 
tcmaJa^  for  îht  three  divisions  of  the  cuizodê,  are  ^ain 
empbjed  br  Dante,  and  hete^in,  ^in  the  thineenth  chapcer 
of  the  fhird  book,  he  us^  the  word  îrûimo  m  two  dtâerent 
sensés  to  two  soûceeding  paragraphs  : 


^fOfim  Dd  vam  o^Êtào  di 
ÔA  nd  Cifitoio  fMdestû,  e  h  lecpoda  vxi  siesmàoâmo  (sicchè  la  pcma 

A       11'  *^  -i  -      jUi»   1 *        *      il  I   *     * ^  -    t   X- g 1. 

C  MIJU— ^t  CJBUOIO^  '""^■*  tQXft  ti^of  Wf  MJtBttif  BdCVCSCflwÇ  C  flS  WtffBfÊÊSK%  B 
|0,  H  I-t4X 

It  is  the  £}iliii€  to  recognize  this  lecfanical  iis^e  hy  I^nte  ex 
the  term  traitai  whtch  bas  led  to  the  misimerpretatîon  by  sûme 
of  the  amuDentaiors  of  a  disputed  passage  îti  the  Fita  Anooi. 
In  bis  division  ofthe  ûrsi  canzone  (  «  Donne^  cfa  avetc  intdietto 
d'imofei  )in  that  work  Dante  says  : 


la  iSvldcid  pHi 
diê  k  dire  COÊC  S  topo,  c  pofr  ncfowt  fani.  La 

fmdk;  U  secondA  è  lo  tmam  tmtM;  k 
iKM  serngide  ddk  pitcedeiiii  piidc  (  F.  X*.,  S  ^9«  ^^  90^)- 


The  meanii^  of  the  expression  h  mtmto  îreitaw  in  thîs 
pas^ge  has  been  mncfa  discussol.  Somc  commentaiors  (Gisini 
and  Pas&erint,  for  example)  take  inUnic  as  a  substantive  and 
Iraiîiiîû  as  a  pamcipk»  and  intcrpret  the  phrase  to  m^n  «  il  pen* 
siero  ^posto  »,  Inasmtich,  however,  as  Dante,  as  we  hâve  seen, 
repeatedly  in  the  Gmvniû  employs  the  word  tranniû  to  tndtoite 
the  trmtise  or  narrative  portion  of  1  cinzone,  in  contradîstiïic- 
tion  to  the  prmim  and  the  tamaia^  tbcre  can  bc  hanHy  a  doubi 


*f    TRATTATO    »    IH   THE  CQNVÎVÎO  AND    VITA  NUOVJ         569 

that  he  oses  it  hère  in  the  same  sensé,  Tlie  dîfficulty  as  to  the 

meaning  of  ifjtmto  has  led  to  a  «  fadiior  lectîo  n  inîerOy  whîch 
is  adopted  by  Giuliani.  As  the  mss,,  almost  without  exception, 
read  intmio^  this  variant  may  be  dismissed  without  further 
notke.  The  explanation  propo.sed  by  Fraticelli  seems  to  be  the 
right  oiie,  namely  that  inlmîù  îs  to  be  taken  in  the  sensé  of 
inksô  from  inUndere^  so  that  the  phrase  would  signify  «  Targo- 
mento  da  me  inteso  n,  i,  e,  the  matter  I  intend  to  treat  of* 
The  phrase  wou!d,  in  fact,  be  simply  a  concise  form  of  the 
expression  used  by  Dante,  in  the  Convivh^  oî  the  îrattalo  of 
thesecond  canzonCj  which  he  speaks  of  as  ot  la  pane  nellaquale 
si  tratta  quello  che  dire  s'intende  »  {Conv.^  III^  r^  IL  105-4). 

As  the  term  tratîalo^  in  the  sensé  of  which  we  hâve  been 
speakingj  does  not  dénote  a  structural  division  of  the  canzone, 
naturaîly  no  mention  of  the  équivalent  tractûîus  is  to  be  found 
in  the  second  book  of  Dante's,  De  Vuïgari  Eloqmntia,  nor  in  the 
Summa  Artis  Rithimici  (written  eleveii  years  after  Dante's 
death)  of  Antonio  da  Tempo,  both  of  which  deal  wîth  the 
canzone  from  the  point  of  view  of  the  structure  only. 

Theterm,  however,  is  usedby  Dante's  contemporary^Egidio 
Colonna  Romano,  in  his  commentary  on  Guido  Cavalcanti's 
fa  mous  tt  canzone  d'amore  y>  {  ^  Donna  mi  prega  perch^  io 
voglio  dire  »)  in  exactly  the  same  way  as  Dante  uses  it.  Egidio 
begins  his  comment  by  saying  :  u  Questo  dettato  si  divide  in 
due  parti,  cioè  in  proiogo,  ed  in  trattato.  Il  trattato  comincia 
quivi  :  In  queUa  parte,  ec.  »  (that  is,  at  the  second  stanza). 
After  disposîng  of  th^ prohy^o,  he  takes  the  remaining  stanzas  of 
ihe  canzone  seriatim —  «  questa  è  la  prima  stanza  del  trattato  »; 
tt  questa  è  la  seconda  stanza  del  trattato  ^  ■  and  so  on* 

In  theletterto  Can  grande  (Epiît,  X) —  which,  inspite  of  the 
doubcs  cast  upon  itsgenuineness  by  several  distinguished  Italian 
crîtics,  I  still  hold  to  hâve  been  written  by  Dante  —  in  this 
letter  Dante  several  times  uses  the  term  îractaius  of  the  Comme- 
dia  as  a  whole  (§§  9,  12,  r?,  jj);  but  he  does  not  employ  it 
in  the  spécial  sensé  to  iiidicate  the  narrative  portion  of  the 
poem,  as  distinguished  from  the  proem.  Thèse  he  hère  refers  to 
^respectively  as  prologm  and  pars  execuîiva  :  —  «  dividicur  ista 
jïars,  seu  tertia  cantica  quae  Paradisns  dicttur,  principal iter  in 
duas  partes,  scilicet  in  prologum  et  partem  executivam.  Pars 
sccunda  incipit  ibi  :  Surgit  tmriaUbus  pir  diversas  fauces"  ($  17). 


S70 


P,    TOYNBEE 


The  terms  praemio  and  trattato,  howeverj  are  used  of  the  Inferm 
by  Boccacdo  in  his  Cémenta  predsely  as  Dante  usesthem  of  hb 
canzoni  in  the  Convivio,  At  the  beginning  of  his  Lei^iom  seconda ^ 

Boccaccio  says  : 

Divîdesi  il  présente  volume  (L  e,  the  Cammediu)  in  ire  parti  principali,  le 

quali  sono  li  îre  lîbri  tie'  qyali  l'autore  medesitno  l*ha  divjso  :  de'  qiialt  il 
primo,  il  quate  pcr  lèggere  siamo  aï  présente,  si  divide  in  due  parti,  in  proe- 
inîû,  c  iraïuto.  La  seconda  comincîa  nel  prmcipîo  del  seconde  caoto  *. 

The  same  or  similar  expressions  will  be  found  in  sevend  other 
cûtnmentarîes  on  the  Conimiâia.  Benvenuto  da  Imola,  for 
instance,  at  the  beginning  of  his  commentar)'  on  the  Inferm 
says  : 

Primus  liber  dîvidiiur  in  duas  pannes  principales,  sciUcet  in  prooemium  et 

iraaamm.  Prooemium  conrinei  ma  capîiula,  in  quorum  primo  autor  ptopo- 
nit,  in  secundo  invocat,  in  tertio  atiiem  incipit  tractatum(I,  il). 

And  when  he  comes  to  the  third  canto  he  says  : 

EKpeditis  duobus  primis  capitulis  prohemîalibus,  in  quorum  primo  Dant^ 
proposuit,  in  secundo,  invocavtt,  nunc  cûnsequ enter  in  isto  tertio  capîttilo 
indpit  suam  narrationem  sive  tracutum  (I,  105). 

Again,  at  the  beginning  of  his  comment  on  the  second  canto 
of  the  Purgûtorh  he  observées  : 

Postquam  in  supenori  capitulo  prohemiali  poeu  Dames  proposuit,  învo- 
cavii^  et  narram  qualités  intravent  purgatorium...nuac  consequenter  in  isto 
secuodo  capitulo  incipit  suum  tracutum  de  his  qui  neglexerunt  poeoitentiain 
usquead  ïnortem(in,  50), 

The  alternative  term  narratia  used  by  Benvenuto  ïoitrûctatus 
in  his  comment  on  the  third  canto  of  the  Inferm  is  interesting 
as  supplying  the  due  to  the  correct  readîng  of  the  opening 
Unes  of  the  comment  of  the  Anonimo  Fiorentîno  on  the  same 
canto.  As  printed  the  passage  runs:  «  Qucsto  terzo  capitolo  si 
puo  dire  essere  principio  d'un  a  nazione  a  tutti  gli  al  tri  del  pré- 
sente primo  libro  dello  'nfemo  û.  The  editor^  Pietro  Fan^nif 


t .  And  again»  at  the  beginning  of  h^wm  seithna^  be  says  :  «  Lt  gionm  $€ 
m^andmm  —  Comlncia  qui  la  parte  seconda  di  quesu  prima  Candca  cbiamata 
Inficmo,  ndJa  quak  dissi  Tau^ïm  comincîare  il  suo  tratuto,  » 


a    THATTATO    tt    IN   THE  CONVIFIO  ANB   tlTA  NUOVJ       571 

finding  it  difficult  to  make  satisfactoi^^  sensé  of  the  word 
tm^ione  hère,  su^gcsts  tlut  possibiy  the  text  îs  corrupt,  but  he 
bas  no  emendation  to  propose.  There  can  be  Iktle  doubt,  I 
thlnkj  tliat  na::^ione  is  nu-rely  a  copyîst's  blunder  for  nûrraiiom^ 
in  thesense  of  Benvenuto^s  narmîio or  tracîatus.  The  rtalUn  term, 
il  may  be  iioted,  is  used  by  Vellutello  in  exactly  the  same  sensé 
in  the  discussion  at  the  begînning  of  hîs  comment  on  the 
înfcrtio  as  to  how  the  first  cantica  is  to  be  divided.   He  says  : 

È  cosâ  manifesta  che  rauiore,  secondo  lo  stile  dl  molti  altri  poctî»  parte 
i^ucsu  sua  prima  cantica  in  tre  parti,  propositionc,  invocatione  e  narratione, 
Cûme  chiaramcnte  veggiamo  ancora  che  fa  le  âm  ^eguËntî,  £  la  invocations 
ognihuomo  inteiide  esser  dopo  II  principio  del  secondo  canto. 

. ,  Ma  dove  la  proposition e,  e  \â  narrratione  cominci,  sono  state  de  gîi 
espositori  varie  opmioni,  perché  alcunî  hanno  detto  li  primi  duc  canti  csser 
in  kogo  dt  proemio,  e  che  net  principio  del  i^rzo  cominda  la  narratione. 

We  may  conclude  with  two  more  instances  of  the  technical 
ns^  oî  tratîato  or  tractatm  by  commentators  on  the  Commtdia, 
which,  with  the  foregoing,  prove  tliat  tlie  term  wasa  recognised 
one  in  the  fourteenth  and  fifteenth  centuries,  alihough  h  has 
apparently  escaped  the  notice  of  the  lextcographers.  The  Pisan 
commentator,  Francesco  da  Buti,  says  in  his  introduction  to  the 
Inferna  : 

Qjiesta  prima  caodca si divide indue  pani,  perché  prima sî  pone  il  proemio^ 
ove  Tau  tare  propone  la  materia  di  che  dee  tratiare,  facendo  li  uditori  dociïî, 
bentvoli  et  attentif  corne  comanda  Farte  délia  retonca,  e  la  invoca^îone  dellc 
tnuse  ;  nella  seconda  si  pone  il  trattato  et  incoromcia  quivi  :  Per  me  st  va  Sec, 

a.  H> 

Again,  at  the  beginnîtig  of  hîs  comment  on  the  third  canto 
be  says  : 

Iti  questo  teno  canto  lo  nostro  auiore  mcominda  il  trattatû  delsuo  poema 

Sîmilarly^  Stefano  Talice  da  Rtcaldone  says  : 

Prtmus  liber,  scilîcet  infemus,  dividitur  in  duas  partes,  scUicet  prohemium 
eiiractatum.  Prohemiuna  continct  duo  capitula.  In  primo  atitor  noster  pro- 
ponit,  tangendo  materiam  de  qua  est  tractaturus  ;  in  secundo  învocat  ;  jn- 
lertio  iûcipît  tractare  (1,  8). 

Paget  ToynbeEp 


N 


MÉLANGES 


CONJECTURES  SUR  GtRART  DE  ROUSSILLOH. 

1.  Bqsoh  d'Escam'ion. 

Ufi  personnage  de  ce  nom  joue  an  rôle  important  dans  le 
poème  de  Girarldi  Rmmillm.  Cest  un  alHé  du  héros  auquel  il 
prodigue  les  conseils  belliqueux.  Il  est,  d*ailleurs,  *on  cousin* 
On  ne  sait  comment  identifier  Li  localité  de  Carpitm  ou 
Escar/TÎm  d*oLi  il  tire  son  surnom  *-  Je  songe  à  Scarpamief  localité 
disparue  aujourd'hui.  Elle  était  située  dans  le  département  de 
Meunhe-ct- Moselle,  arrondissement  de  Nancy,  commune  de 
Dieulouard,  dans  une  iie  de  la  Moselle,  Détruite  par  les  Hon- 
grois eu  9S4î  t^nsuitc  par  te  comte  Renaud  de  Bar  en  î  ni^  elle 
était  réduite  i  cinquante  habitants  au  xviii'  siècle»  enfin  à 
«  une  «  maison  au  milieu  du  siècle  dernier  ^  Mais  on  sait 
qu'elle  escistait  dés  le  iv*  siècle  pour  le  moins  et  qu'elle  eut 
une  réelle  importance  puisqu'elle  fut,  à  l'époque  carolingienne, 
le  chef-lieu  du/^aj^'m  Scarponmnm  lequel  s'étendait  sur  les  dio- 
cèses de  Metz  et  de  Toul  V;  le  nom  vulgaire,  attesté  par  des 
textes  depuis  le  xni*  siècle»  était  Serpanm  ou  Charpagne*.  Il 
représentait  une  phonétique  toute  locale;  on  attendrait  m  efTtt 
Esfharpme, 

Ce  n'est  pas  exactement  Escarpion  ou  Carpkm^  mais  dans 
le  poème  ou  sait  que  les  finales  des  noms  propres  simi  traitées 
avec  une  certaine  liberté  pour  les  besoins  de  la  rime, 


I*  P,  Mcycr,  Girart  de  UmmUmu  p.  28,  noie  t. 

3*  Vivien  de  Siiitit-Munin,  Dkikmnain  de  gé^mphU  untwrsellf,  au 

*  Scarponric  n. 

J.  Lûtigtioiï.  Atiiis  fmtonçtifdt  îa  Framt^  p,  117, 
4.  Lepagc,  Dkiîônttairr  iopcff.  dt  la  Mtutif^,  p.  127. 


CONJECTURES  SUR   GIRART   DE   RODSSILLON  573 

D'autre  part,  grâce  aux  recherches  de  M,  Poupardin*,  nous 
avons  des  renseignements  sur  plusieurs  personnages  du  nom  de 
Bosooj  et  il  est  remarquable  que  tous  appartiennent  i  TAustrasie 
et  ne  s*écârtent  gucre  de  notre  pays.  Un  Boson»  comte  de 
Metz,  est  mentionné  dès  l'époque  de  Dagobert  P".  Un  autre 
souscrit  nn  diplôme  de  Charles  Martel  pour  Téglise  de  Maes- 
tricht.  Un  troisième,  en  770,  fait  don  X  Tabbaye  de  Gorze  d'une 
villa  dans  la  Wocvrc,  région  naturelle  qui  s'étend  depuis  la  Meuse 
jusque  vers  Trêves.  Au  xi^  siècle,  deux  autres  Boson  Hreni 
surtout  leur  fortune  en  Italie,  mais  il  a  été  prouvé  qu'ils  étaient 
eux  aussi  originaires  du  pays  entre  le  Rhin  et  la  Meuse  %  ainsi 
que  le  plus  célèbre  de  tous,  le  favori  de  Charles  le  Chauve,  qui 
usurpa  la  couronne  royale  le  15  octobre  879  et  se  rendit 
maître  de  la  région  où  avait  dominé  auparavant^  en  véritable 
prédécesseur,  le  duc  Girart  dit  «  de  Roussi  lion  ».  Bivin,  ou 
Buvin,  père  du  dernier  Boson,  fut  en  effet  comtt*  de  Metz  et 
abbé  de  Gorze,  monasière  situé  dans  \q  pagus  ScarlHinnemis,  de 
855,  au  moins,  à  863  K  II  est  probable  que  son  fils  lui  succéda 
dans  son  comté.  En  tous  cas,  il  esr  certain  que  sa  famille  hérita 
de  biens  considérables  en  ces  régions*  Sa  tîlle  Richilde,  veuve 
de  Charles  le  Chauve,  fit  don  à  Gorze,  en  910,  de  domaines  en 
Verdunois  et  Chaumontois^.  En  874,  peu  après  son  mariage, 
celle-ci  avait  fondé  sur  ses  biens  propres,  une  abbaye  à  Juvigny 
près  Stenay  dans  le  pagus  de  Woevrc  K  II  parait  donc  admis- 
sible que  Boson^  duc  puis  roi,  ait  possédé  Scarpoime,  Mais 
il  est  impossible  encore  d'établir  que  c'est  lui,  plutôt  que 
ses  ancêtres  des  vu*  et  vu*  siècles,  qui  est  le  véritable  Bos  dEs- 
car  pion. 

La  note  suivante  rendra  néanmoins  cttte  identification  plus 
vraisemblable. 

II.  Odilon. 

Boson  d'Escarpion  est  donné  comme  fils  d'Odilon,  attribu- 
tion qui  ne  peut  convenir  au  dernier  des  Bosons  que  nous 


\.  Lt  rûvatttw dr  Prcn'ftwi  souî  ta  Carolingiens ^  p»  46  et  suiv. 
a.  pQupardiiii  o/ï.  cit.^  p.  ^û,  77,  296  et  suiv. 
3./W,.  p.  4î-44et307^în. 

j,  GaUia  ChrisHana,  XIII s  6ij  et  Ittstt.f  jir. 


574  MÉLANGES 

venons  de  nommer,  lequel  était  fils  de  Bi%în  ou  plutôt  Buvin, 
Mais  je  croîs  intéressant,  néanmoins,  de  signaler  que  le  duc 
Boson  a  été  en  relations  avec  un  personn:ige  du  nom  d'Odilon. 
Un  cartulaire  de  Tabbaye  de  Cluny  nous  a  conservé,  en  effet, 
un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  concédant  au  «  fidèle  »  Odi- 
Ion,  h  la  requête  de  l'illustre  duc  Boson,  une  villa  royale  dans 
le  pagus  de  Chaloo-sur- Saône  : 

..Jibuîtccbittidmi  uosire  quendam  fidelem  regni  nostri,  nomîne  Odilônem, 
ad  dcprecatîonemillustris^tque  insignis  duds,  viddicet  Bosonis^ct  dilectîssîmî 
ministcrialis  uostri,  de  *^uibusdain  rébus  nostre  proprietatis  honorare.  Siquidem 
res  sunt  site  in  pago  CabiloncnsCt  vîllam  qoam  dicunt  Flaviget,  mansum 
îndominiaitum  cum  casa  supcrposita  ac  cetens  aliîs  édifiais  et  alits  mansis 
ad  ipsum  pertinent! bus  pariter  quinquaginta,  ecciesiajti  vero  in  honore  sancd  * 
Evurtii  cum  molendinisquoque  êï  cunciis  ad  se  rebus  iutraet  extra  juste  Icga- 
liEerque  pertinentibus^,. 

La  copie  du  cartulaire  n'a  pas  reproduit  la  date,  mais  le  titre 
d'empereur  que  prend  Charles,  celui  de  duc  concédé  à  Boson, 
le  délimitent  entre  janvier  876  et  septembre  877. 

Dans  le  poème  on  représenie  Odilon  comme  maître  de 
toute  la  Provence  «  jusqu*à  Toulon  n  ou  <t  jusqu'à  Chalon  n^ 
selon  tes  manuscrits\  I!  y  a  loin,  au  premier  abord,  de  ce 
puissant  seigneur  au  modeste  «  fidèle  >*  dont  le  nom  apparaît 
pour  la  première  fois  dans  les  textes  en  876-877.  Sans  doute. 
Mais,  une  dizaine  d'années  plus  tard* ^  nous  voyons  un  comte 
Odilon  faire  don  à  Tabbaye  de  Saint-Cliaffre-le-Monestier  de 
biens  sis  en  Diois,  et  Tacte  est  daté  de  mars  et  de  la  septième 
année  du  règne  de  Boson*,  Il  est  difficile  de  ne  pas  recon- 
naître le  protégé  recommandé  par  Boson  à  Charles  le  Chauve. 
Il  éimcmnte,  et,  vraisemblablement,  gouvernait  le  pagus  de  Die 
qui  forme  rexirémité  septentrionale  de  la  Provence.  Il  tenait 
donc  une  portion»  sinon  la  totalité  de  cette  contrée. 

Il  me  paraît  assez  tentant  d'admettre  que  le  poème  de  Girart 


ï,  Recudî  des  chartis  de  Cîuny^  publié  par  Au  g.  Bernard  et  Alex.    Bnid, 

t.  I,  p.  2$,  D°  21. 

2.  Tmd,  P.  Meycr,S  99»  P*  4S1  et  134,  p.  yj- 
5.  Surb  date,  voy.  Poupardin,  o/>*  cit,^  112,  note  j. 
4.  Cartulaire  deSaint-Cha^rr,  publié  par  Tabbé  U.  Chevalier  (Paris,  1884), 
p»  51.  L'acte  est  mentionné  dans  un  diplôme  du  roi  Conrad  (iW.,  p,  108), 


CONJECTURES  SUR  GIRART   DE   ROUSSÎLLOK  575 

de  Rotissillan  a  conservé  quelques  souvenirs,  très  vagues,  du 
fameux  usurpateur  Boson  ei  aussi  d'un  ami  et  vassal  de  celui- 
ci,  le  comte  de  Dlois  Odilon.  Comment  et  pourquoi  ce  dernier 
a-i-îl  été  donné  pour  père  à  Boson,  c'est  ce  qu*il  est  impos- 
sible de  déterminer. 


I 


I 


m.   LesTT3esertois. 

On  désigne  sous  ce  nom  énigmatique  un  peuple  allié  ou 
%*assal  de  Girart.^M.  Paul  Meyer  a  émis  la  conjecture  ingé- 
nieuse' qu'il  s'agissait  des  habitants  du  Berry^,  mais,  ajoute^ 
t'ilj  a  il  semble  toutefois  difficile  que  le  Berry  ait  été  tenu  de 
Girari  »,  Cette  objcciion,  que  le  traducteur  s'est  po^ée  à 
lui-même,  n'est  pas  sans  réplique.  Il  ne  semble  pas^  en  effet, 
que  Giran  dit  «  de  Rousîsillon  »  ait  possédé  ou  dominé  le 
Berry,  mais  un  homonyme,  son  contemporain,  a  été  comte 
de  ce  grand  pagus,  et,  comme  le  fameux  duc,  a  lutté  avec  obsti- 
nation  contre  Charles  te  Chauve.  Établi  par  le  roi  avant  855, 
il  se  vit  dépouillé  en  867,  sans  raison  semble-t-il,  au  profit 
d*Erfroi,  ancien  comte  de  Toulouse,  Mais  celui-ci  ne  put  se 
mettre  en  possession  de  son  a  honneur  w.  Au  milieu  de 
décembre  il  fallut  que  le  roi  marchât  en  personne  pour  procé- 
der à  l'installation  d'Effroi.  Mais,  pendant  que  Charles  s'arrê- 
tait à  Auxerre  pour  célébrer  la  fête  de  Noël,  un  événement  tra- 
gique se  produisit  :  Effroi  fut  surpris  en  Berry,  Il  se  réfugia  dans 
une  «  maison  forte  ».  Les  hommes  de  Girart  ne  pouvant  Ten 
déloger  y  mirent  le  teu.  Effroi  tenta  une  sortie  :  il  fut  saisi;  ses 
ennemis  lui  tranchèrent  la  tête  et  rejetèrent  le  corps  dans  le 
brasier.  Charles  exaspéré  passa  la  Loire  à  Pouilîy  (Nièvre)  en 
janvier  868  et  se  livra  dans  le  Berry  i  d'épouvantables  dévasta- 
tions. Néanmoins  il  ne  put  triompher  de  la  résistance  de  Girart 
et  de  ses  comités^  qui  demeurèrent  en  Berry  ^.  Quatre  ans  plus 
tard,  CharkSj  décidé  à  installer  solidement  en  Aquitaine  son 


1.  S  84*  p.  40,  QOEC  I, 

3,  (Ma  conjecture  se  fonde  sur  un  passage  du  roman  en  prose  de  Lancelot 
du  Lac.  Jeb  voudrais  mieux  appuyée.  —  P.  M.J 

5.  Hincmar  eûtend-il  p^r  là  i  des  compagnons  •  de  Girart  ou  des  comtes 
alliés  à  celui-ci,  on  ne  saurait  décider, 

4.  Antioks  Btrtimani^èd,  Waiti,  p.  90-91  ;  Annale  MaltincttmSj  «éë. 


$7 6  MÉLANGES 

fils  ai  né,  réorganisa  l*adrainisxration  de  ce  royaume.  Il  mit 
près  de  Loats,  pour  le  surveiller  et  le  diriger,  son  beau-frère 
Boson  qu'il  fit  charabrier  et  maître  des  huissiers.  Trois  grands 
commandements,  Auvergne,  Toulousain  (avec  le  Carcasses  et  le 
Razès)  et  Gothie,  furent  confiés  à  des  marquis  nommés  Bernard, 
dont  la  fidélité  paraissait  éprouvée  L  Bourges  était  considérée 
alors  comnae  la  capiîalc  de  rAquitaine,  Cest  en  Berry  qu'avait 
résidé  le  frère  et  prédécesseur  de  Louis  II,  Charles  le  Jeune  ^, 
et  c'est  en  cette  même  contrée  que  s'établit  évidemment  le 
nouveau  roi  d'Aquitaine.  On  s  explique  dotic  que  Charles  le 
Chauve  ait  donné  à  Boson,  protecteur  du  jeune  prince,  les 
«  honores  Gerardi  comitis  Bituricensis  nK  Ce  Girart  fut  cer- 
tainement alors  dépossédé,  si  même  la  chose  n'était  déjà  faite. 
Il  n*est  pas  certain  cependant,  suivant  une  juste  remarque^*, 
qu'il  fût  mort,  mais  on  n'entend  plus  parler  de  lui>.  Plus  d'un 
érudit  moderne  Ta  confondu  avec  Girart  de  Roussi  lion*.  Mais 
cette  confusion  peut  remonter  très  haut,  et  le  rôle  des  Désertais 
dans  le  poème  peut  être  un  écho  des  graves  événements  de 
867-868. 

F,  Lot, 


1.  Amtiiiis  Berlimani,  p.  119. 

2.  rt  A\*aricum  caput  rcgni  AquiEanki  «  écrit  Adrevald  ddfis  les  Miramh 
MHCii  BtmdicH  (Historims  â^  FranUt  Vil,  560).  Cf.  la  lettre  de  Cbarks  le 
Chauve  à  Nicolasltr  que  j'ai  âiidy set:  dans  k  Moyen- Age^  190 2,  410-414,  4Ji 
416. 

j,  Annaks  Birtvmni^  i<x.  cit. 

4.  M*  Poupjrdm  {ûp.cii.f  p,  9^^294)  ^ui  a  consacre  une  notice  à  ce  person- 
nage obsen'e  que,  en  ce  cas,  Hincroar  eût  écrit  «  quondara  comitis  »* 

5.  On  voit  le  2î  juillet  870  un  Girart,  qui  semble  comte  de  Charnsesais 
(Ma me),  ^Jchanger  des  biens  avec  le  roi  (Roserot,  Dixièmes  c4irQH9tp(HS  dis 
Archives  de  la  Haute-Marne,  p.  1 1),  On  peut  croire  que  nous  avons  sEiIre  ay 
eomie  de  Bourges  réconcilié  avec  le  roi  et  déplacé  vers  869,  mais  ce  n'est 
qu*une  hypothèse.  Je  crois,  pour  ma  pan,  que  Giran  fut  réduit  au  titre  de 
vicomte  et  que  c'est  lui  que  le  pape  Jeiin  VI 11  eite  à  Troyes  en  878  avec  son 
seigneur  Bernard,  marquis  de  Gothîe,  comte  d'Autunoîs  et  de  Berry,  Voy. 
dans  Migne,  FairôL  îaL,  u  CXXVI,  col.  799-800* 

6.  M.  Longnon(^H^  historique ^Vlîl,  261)  adonné  une  raison  très  forte 
contre  cette  identification.  Cf.  Poupardirt^  ùf.  cit.f  z^yi^é. 


ORSON   DE   BEAUVAIS 


ORSON  DE  BEAUVAIS 


Dans  Hniroduction  mise  en  tête  de  son  édition  d'Orson  de 
Bmuvais  S  M,  G,  Paris  a  cherché»  sans  grand  succès,  à  retrou- 
ver quelque  fondement  historique  à  cette  composition.  Je  n*ai 
pas  mieux  réussi  que  le  maître  regretté,  et  il  est  possible  que 
cette  enquête  ne  puisse  aboutir.  Toutefois  je  ne  croîs  pas  inu- 
tile de  présenter  deux  observations- 

I*  Mjlgré  rintérêt  du  rapprochement  avec  Ursio^  évêque  de 
Beau  vais  de  loSj  à  1089,  je  ne  pense  pas  qu'il  faille  chercher 
le  prototype  d'Orson  dit  «  de  Beauvais  »  dans  quelque  Vrsus, 
Vf  sa  ou  Urno  du  haut  moyen  âge,  mais  bien  dans  un  Hono^ 
succé^'ané  carolingien  d'une  graphie  mérovingienne  idie  que 
Cborso.  L*inventairej  dressé  en  1487,  des  livres  de  Charles  le 
Téméraire,  porte  en  effet  Hmrson  ^,  dont  le  changement  en 
Ourson  ou  Orsm  sous  Tinfluence  à^Ursus  ne  fait  point  de  diffi- 
culté, alors  que  l'inverse  ne  s'expliquerait  point.  Il  a  existé  à 
l'époque  carolingienne  un  grand  personnage  de  ce  nom,  Chorso^ 
qui  fut  établi  à  Toulouse  en  778,  lorsque  Charlemagne  organisa 
TAquitaine  et  y  envoya  des  comtes  Franks  »,  Dix  ans  plus  tard, 
ce  dux  TolûsanuSt  dont  la  mission  était  de  surveiller  les  Gascons, 
se  laissa  prendre  par  leur  chef,  Adalaric,  et  eut  la  faiblesse  de 
lui  prêter  serment  de  fidélité.  En  conséquence  il  fut  déposé  au 
plaid  de  Worms  de  790  et  remplacé  dans  la  marche  de  Tou- 
louse par  le  célèbre  Guillaume  de  Gellone  ^, 

On  ne  sait  rien  de  plus  sur  Chrson.  Il  est  impossible  de 
dire  si  ce  personnage  est  le  prototype  d'Orson.  Le  boulever- 
sement du  théâtre  de  ses  aventures  ne  ferait  pas  obstacle  à 
ridentification,  vu  Textrême  fantaisie  avec  laquelle  les  arrangeurs 
des  XI 1^  et  xm""  siècles  ont  traité  la  matière  que  leur  léguait 
l'époque  carolingienne,  mais  les  intermédiaires  font  complète- 
ment défaut. 


I,  G.  Pans,  1S99,  în-8  {S<fC*iti  dis  ancum  têxtts  français}, 

a.  G.  Paris,  c^.  ciï.,  p.  v. 

j.  Fila  Hiiidouici  par  rAsironome,  dans  Mw.  Grrm,  Scri(*t.t  X.  lî»  p.  608- 
609.  La  graphie  Cf^orso  pour  Mono  est  archaïque. 

4,  Ibid\  Mabille,  Le  royaume  tTAquitûitif,  p.  31-52;  S.  ANl*  Jafnhùcher, 
des  Frankiscixn  Rêkhs,  i«  éd.»  î,  $10^  401,  646  ;  II,  ïi. 


578  MiLANGES 

2**  Nous  sommes  sur  un  cerrain  plus  solide  en  ce  qui  con- 
cerne le  compagnon  d'Orson  qui  le  trahit  si  vilainement, 
Hugues  ou  Ugon^  possesseur  de  Bourges,  Vierzon,  Chalais,  qua- 
lifié une  fois  (v-,  389)  de  «  comte  de  Berri  ».  <t  Parmi  les 
comtes  de  Berri  ouvicorate?  de  Bourges*,,  aucun  ne  s'est 
appelé  Ugoa  »,  observe  M.  G*  Parjs  S  Çest  une  erreur.  Il  est 
yrai  que  VArt  é  vérifier  les  dëks  n'a  point  consacré  à  ce  person- 
nage d'article  spécial,  mais  c  e3t  un  oubli  des  Bénédictins.  Les 
destinées  du,  Berry  onL  été  retracées  rapidement  plus  haut  ^.  On  a 
\u  qu'ayx  fêtes  de  Pàquçs  de  Tannée  872,  Charles  avait  donné 
à  Boson  les  «  honneurs,  »  4^^  rebelle  Girart.  Mais  l'habile  per- 
sonnage  était  devenu  indispensable  à  son  royal  beau-père.  U 
semble  n'avoir  fait  qu'un  bref  séjour  en  Aquitaine  K  A  la  fin 
de  cette  même  année  872  Bernard  fils  de  Blichilde,  marquis 
de  Gûthie,  ayant  tué  !e  petit-fils  de  Guillaume  de  Gellone^ 
Bernard  «  le  Veau  y^  {VikUiis)^  révolté  contre  le  roi  depuis 
trois  ans,  reçut  le  comté  d*Autun  où  ce  dernier  s*était  main- 
tenu *j  et  devint  le  premier  personnage  de  rAqnitaine.  II  me 
paraît  vraisemblable  que,  à  cette  occasion^  il  fut  également  gra- 
tifié du  Berry.  En  to^s  cas  i!  est  certain  qu'il  le  possédait  en  878. 
Lui,  son  vicomte  Girarc,  d'autres  vassaux  encore,  empêchaient 
Tarchevêque  Fcotier  d*avoir  accès  dans  sa  ville  épîscopale,  sous 
prétexte  que  celui-ci  voulait  b  livrer  aux  ennemis  du  roi, 
excuse  d  autant  plus  plaisante  que  Bernard  était  depuis  le 
milieu  de  l'année  précédente  en  état  de  révolte  latente  contre 
Charles  le  Chauve,  pois  contre  son  fils  Louis  IL  En  juin  878, 
le  pape  Jean  VIII,  alors  en  France,  cita  au  concile  qui  devait 
ce  tenir  à  Troyes  en  août  «  son  très  cher  fils  Bernard,  le  plus 
noble  des  marquis  »  \  Ayant  refusé  par  trois  fois  de  se  rendre 
à  la  convocation»  Bernard  fut  excommunié  en  septembre*.  U 
tvait  jeté  le  masque  et  était  en  pleine  rébellion.  Au  printemps 
de  l'année  suivante  le  roi  s'était  décidé  S  marclîer  en  personne 


1.  Loc.dL,  pVLXX* 

2.  Voy..  ci-dessus,  p,  576, 

5 H  Poupirdin»  ùp.  «Y.,  65*^6, 

4*  AnnaUi  BirUniani^  p.  120-121  ;  Mabîllc,  ùp.  cit. 

5.  Mîgnt;,  PaîroL  îaL^  U  CXXVl/col  7H3,  ««cxxxv. 

6.  îbid,j  coU  799  et  8oà,  n»  CLV  et  clVî/ 


ORSON    DE  BEAU  VAIS  575 

contre  lui  pour  en  finir^  lorsqu'il  tomba  malade  de  la  mala- 
die dont  il  mourut.  Le  chambrier  Thierry,  le  plus  grand 
personnage  du  royaume  ',  avec  Boson»  Hugues  TAbbé,  Ber- 
nard d*Auvergne,  conduisit  seul  Texpédition  en  Autunois  ^ 
Celle-ci  réussit  car  on  n'entend  plus  parier  de  Bern.ird  \  et  il 
est  certain  qu'au  lendemain  de  la  mon  du  roi  (ii  avril  879), 
le  quaiuorvirat  se  partagea  ses  dépouilles.  Boson  et  Thierry 
eurent  rAutunois*.  Le  comte  d'Auvergne  prit  le  Berry  ei  le 
marquisat  de  Gothie,  Ce  dernier  personnage  surnommé  a  Plan- 
tevelue  »  a  joué  un  rôle  important  an  ixvsiècle.  Contrairement 
aux  deux  autres  Bernard,  ses  prédécesseurs,  sa  fidélité  ne  se 
démentit  jamais.  Il  périt  dans  Tété  de  885  en  luttant  contre 
rusurpateur  Boson  ^  Son  fils,  le  célèbre  Guillaume  le  Pieux^ 
hérita  des  te  honneurs  »  paternels,  et  par  suite  du  Berry^  dont 
un  acte  le  montre  maître  dès  887  •*-  Il  ne  pouvait  y  avoir  grande 
sympathie  entre  le  puissant  duc  d'Aquitaine  et  marquis  de 
Gothie  et  Eudes  dont  les  Francs  et  les  Neusiriens  firent  un  roi, 
le  29  février  888  7.  Le  nouveau  souverain  enkva  n  Guîllaunie 
le  comté  de  Bourges  et  le  donna  i  un  de  ses  fidèles  nommé 
Hugues.  Celui-ci  ®,  bien  que  secouru  par  son  neveo,  le  comte 
Roger,  et  un  vaillant  vassal,  nommé  Etienne,  ne  fut  pas  plus 
capable  de  se  maintenir  contre  lancien  possesseur  que  le  comte 
Effroi  en  867  ^  Une  guerre  implacable  s'engagea  entre  les 
deux  compétiteurs,  et  Hugues  périt  de  la  raain  de  Guillaume. 
L^s  seuls  renseignements  que  nous  possédions  sur  ces  événe- 
ments sont  dus  à  Abbon  qui  lus  rapporte  à  la  fin  du  livre  II  de 
son  poème  De  hcUis  Parisiacae  urbis.  Apres  avoir  raconté  la 
campagne  d'Eudes  en   Aquitaine  contre   les  comtes  de  cette 


I  *  Peut-être  k  duc  Thierr>'  d' Ascane  de  GimH  de  Rmnsilh»  (?) 
a .  Aunaks  Bert m iii tii^  p .  157^ 

j.  Pou  pardi  Q  (op.  ctL,  122,  note  2)  4  tnontré  quUl  est  fon  douteuâ  i|uc  le 
Êls  de  Biikihildc  se  soit  réfugié  à  Mâcon* 
4»  Amuiîâs  Biriîmanij  p.  148. 
S*  PouparJm  (ûp,  cit.^  Î57)  comestele  fait  coQtre  Mûhtbacher. 

6.  Raynal^  Hiûmrt  du  Btrry,  I,  251. 

7.  Ed.  Favre,  îimUsœmte  de  Parts  d  roi  di  France  {^^^  ï893)t  P»  ^9- 

S.  Il  se  r^ [tac ht?  peut-être  à  Etienne,  tîls  d'Hugues,  coraté  çl'Auvcrgîie  vers 
860,  ruéà  Qermont  par  les  Normands  à  la  fin  de  86 j. 
y.  Voy.  pltis  haut,  p.  575. 


i 


580  MÉLANGES 

région,  révoltés  contre  son  autorité,  au  printemps  et  pendant 
Tété  de  892,  il  poursuit  en  ces  termes  '  : 

Inde  Lîmovicâs  adiens  *  Arvernicaque  arva 
Prevalidas  Wilelmi  acies  secum  J  videt  hostis, 

550    Ni  congressuras  fluvius  medio  prohiberet. 
Perdidit  ergo  suos  illic  Wilelmus  honores, 
Ugoni  régnante  4  datos,  qui  Bituricensis 
Princeps  extiterat  consul.  Qpare  fuit  actum 
Hos  inter  germinos  comités  immane  duellum. 
Mille  super  centuni  defleverat  inclitus  arches 
Qaromontinsis  Wilelmus  Ugone  negatos  ^  ; 
Iste  minus  *,  numéro  secum  majore  ^  remotum  •. 
Hic  Ugo  dum  tandem  capitur  mucrone  Wilelmi, 
Supplicat  ut  pietas  ejus  succurreret  illi. 

560    OUi  tam  sero  per  verba  measse  »  respondit, 
Ocius  «<>  et  dicto  trans  pectora  lancea  "  transit 
Ugonis  Intererant  ciineis  "  Rotgarius  atque 
Valde  viri  Stefanus  fortes,  perplura  Wilelmi 
Leta  suis  »?  dantes,  alter  comes  Ugoniusque 
Ipse  nepos  '«,  alter  miles  Stefanus  nimis  audax. 
Pro  dolor  !  Ugo  necem  flesti,  Wilelme  tropheum  'J. 


1.  Histor,  de  France^  VIII;  éd.  Pertz,  in  usum  scbolarum,  187 1,  p.  44; 
Tarannc,  Le  siège  de  Paris  par  les  Normands  en  88 j  et  886,  poème  d'Abbon  avec 
la  traduction  (Paris,  1834),  p.  220-223,  et  surtout  Paul  de  Winterfeld  dans 
Mon,  Germ,  Poetae  latini  aevi  Carolini,  t.  IV,  1892,  p.  11 3-1 14. 

2.  Rex  dit  la  glose,  qu'elle  soit  ou  non  d'Abbon  lui-même. 

3.  Cum  rege  (glose). 

4.  R^g^  (glose). 

5.  Corr.  necatos. 

6.  Ugo  sciL  deflevit  (glose). 

7.  A  millenario  (glose). 

8.  Se.  Ijoc  dicit  quod  Wilelmus  in  illo  praelio  mille  et  centum  perdidit  et  Ugo 
untum  cum  se  ipso  (glose). 

9.  tarde  locutum  eum  esse  (glose). 

10.  citius  (glose). 

11.  Wilelmi  (glose). 

12.  Ugonis  (glose). 

13.  propriis  (glosé). 

14.  Rotgarius  (glose). 

15.  cepisti  (glose). 


ORSON  DE    BEADVAIS  S8l 

Une  traducrîon  ne  sara  pas  sans  doute  jugée  superflue  ' 

Puis  k  roi  pénètre  en  ennemi  dans  le  limousin  et  k  terre  d'Auvergne 
et  voit  les  puissantes  troupes  de  Guillaume  prêtes  â  k  combattre  si  un  fleuve  ■ 
n'eût  séparé  les  armées»  Guillaume  après  avoir  été  comte  du  Bcrry  »  perdit 
donc  ses  «  honneiirs  »,  donnés  â  Hugues  par  le  roî*  Ce  fut  ta  cause  d'une 
lutte  acharnée  entre  les  deux  comtes,  LUlustre  duc  (aràiôs)  de  Clermont, 
Guillaume  avait  pleuré  mille  et  cent  des  sîén^  Cgorgès  par  Hugues*  Les  pênes 
de  celui-ci  eussent  été  moins  grandes  si  lui-même  n'eût  succombé  ♦.  Hugues 
pressé  par  l'épieu  de  Guiliaume  implore  sa  pitié  ;  «  ta  prière  vient  ïrop  tard  », 
répond  ce  dernier,  et  d'un  geste  plus  prompt  que  la  parole  il  lui  transperce 
ta  poitrine  de  sa  lance.  Dans  îe  camp  de  Hugues  se  trouvaient  deux 
hommes  très  preux,  Eoger  et  Etienne,  4^U[  mirent  à  mort  maint  partisan  de 
Guillaume^  l'un  (Roger)  était  comte  et  neveu  de  Hugues,  l'autre»  Etienne 
était  un  chevalier  très  vaillant.  Oh  douleur  1  Hugues,  tu  pleures  ta  mort, 
Guillaume,  ton  triomphe. 

On  le  voit,  il  est  bien  difficile  de  dire  si,  en  rapportant  la 
guerre  d'Hugues  et  de  Guillaume  à  propos  du  passage  en  Berry 
du  roi  Eudes  en  août-septembre  892,  Abbon  entend  parler  de 
faits  antérieurs  ou  postérieurs  à  cette  date  ^  En  tous  cas,  les 
vers  qui  précèdent  ont  été  rédigés  en  896-897,  antérieuremeni 
à  la  mort  du  roi  (r' janvier  898).  Cest  dans  cette  période 
888-896  que  doit  se  placer  le  gouvernement  du  comte  Hugues 
de  Berry  sans  qu*on  puisse  préciser  davantage-  Les  quelques 
vers  que  lui  consacre  Abbon  suflisent,  d'ailleurs,  à  montrer  en 
lui  un  personnage  hautement  épique,  et  on  ne  s'étonnera  pas 
quOrwn  de  Beauvah  en  ait  conservé  une  image,  bien  que  fort 
altérée.  D'autres  poèmes  en  avaient  certainement  gardé  le  sou- 
venir, M.  Paul  Meyer  a  retrouvé  un  passage  curieux,  consacré 
aux  guerres  de  Charles  Martel,  dans  une  compilation  de  deux 
versions  de  Girarîde  Rmssillm  exécutée  en  1448.  Il  y  est  ques- 
tion d'un  combat  singulier  entre  «  Ourson  de  Beauvoisin  ï>  ^, 
porte-banmère  de  Charles  Martel,  et  Hilaire,  duc  d'Aquitaine,  Le 


1 .  Je  me  suis  aidé  de  Taranne. 

2.  L'Allier? 

j.  Ergo  eiplique  probablement  raititude   hostile  de  Guillaume.  Celui-ci 
avait  donc  été  privé  du  Berry  avant  la  campagne  du  roi  Eudes  en  Aiquîtaine. 

4.  J'interprète  le  vers  s>7,  dont  la  traduction  littérale  est  impossible. 
S*  Je  penche  vers  la  première  supposition. 

5.  Voy»  ce  passage  dans  Orsùn  dt  Beauvais,  Introduction,  LXlv^txVL 


>S2         '^  MiLâKGCS 

pfcmièr  suc£OfTibeTatt s'il  n'était  secoura  p^Hi^um  it  &iTf  qui 
arrêta  les  Gascans  et  AtÊXxrpmts^  On  vient  de  Toir  U  kttc  cotre 
Hogu»  cU  BoTT  et  Guillaume  doc  SAqmtûint  et  comce  d*^«- 
V€rgm(CIarmmmiinsis^  dit  Abbcm).  B  est  vrai  qoe  le  romde  dac 
est  diffèr.  nt  ainsi  qoe  Tissue  de  la  lotte  et  que  GuilkoiBe  pcs- 
sédaic  la  Gothie  et  non  La  GascogM*  Le  fapprocfaemcot  est, 
néanmoins,  à  signaler. 

Un  dernier  mot  sur  les  vîdssttudes  dn  comté.  Le  dac  Gmï* 
taomc  se  récoodlia  avec  le  roi  Eudes  '  et  coctserra  cène  contrée 
sans  contestation  le  reste  de  sa  vie.  Charles  le  Simple^  dont  il 
avait  été  le  pintsan  en  S92  et  895  et  auquel  0  avait  prêté  ser* 
ment  en  898  ^,  n'avait  01  le  désir  ni  tes  moyens  de  la  lui  reriren 
A  sa  mort  (6  juillet  918),  ses  immenses  possessions  passèrent 
â  son  neveu  et  homonyme.  Guilbume  II,  duc  d'Aquitaine,  eut 
peine  à  maintenir  la  poissant  de  sa  maison^  La  Gotbie  lai 
échappa  aussi  toi.  Bourgs  se  révolta  ^^  le  Beoy  très  convoité 
lot  fiit  arraché  avec  son  chef-Ueu  vers  922  par  les  ducs  Robert 
de  France  et  Raoul  de  Bonrgc^ne.  Mais  ce  deroier,  roonié  sur 
le  trône,  le  lui  restrtaa  en  924  *.  La  mésiiitellsgence  recommença 
aussitôt.  En  92e,  Raoul  fit  une  nouvelle  expédîtîon  an  delà  de 
la  Loire  et  mit  en  fuite  le  duc  d* Aquitaine  qui  mourut  en 
Auvergne  le  ré  décembre  de  la  même  année.  Un  an  après,  son 
frère,  le  duc  EfircH,  le  suivit  dans  la  tombe  ^,  Lamaison  de  Ber- 
nard Pbntevelue  s'éteignît  avec  lui,  et  le  Beny  perdît  son  iodî- 
vidaalité,  A  partir  de  cen?  époque  il  n*j  a  plus  de  comtes.  Ce 
grand  pagus  est  aux  mains  de  plnsieufs  vicomtes  et  seigneurs  *. 
Au  cours  du  %^  siècle,  b  moitié  orientale  avec  Bourges  se  relâ- 
chera à  la  «  France  w.  Tau  tue  mof  dé  (Dëols^  Issondan)  relèvera 


I.  Le  2  ^eçtemhtt  910,  â  Bov^e^  il  Cbiuk  Tilibive  de  Oiinjr,  «  fm 
mmns  iiieîCMociisT«|^>  {CMrteideChÊw^^m  ira,  I,  114)* 

|.  Âmm^ti  M^tmÊtmm  ;  «9i9(i«r)w  Goâdatis 
[aQ0ititii}cffli«i(  et  coojitx  i^os  IiigicJbii^  fittcm  if 
BStnnx  a  GoOldn»  ocpoie,  ftaode  intogepti,  m 
Vin»  m  {moer,  dfFrmmi,  VOL  3|q), 

4.  Floâoani»  Ammâks^  i.  ^  924. 

5.  iH/.,  ^  A-9aéet^7;Maliak,if.  câ.,  47, 

6*  Sebfi  un  pissageléfôidam  J'Adàmr  de  QMètaocs,  cesL  le  rot  Eudes 
qak  iurtît  éuMi  desvkoafteseû  Bemr  et  Ummitio,  ea  SSj-Mt. 


dia  i 

HBCfL  Hoc  4 

rcoprtor  gqqci- 


^^ 


WAUCHIEK    DE    DENAIK  ^^} 

4es  çotntçs  de  Poitou,  ducs  d'Aquitaine.  On  nous  pardonnera 
d'avoir  retracé  le%  destinées  du  Bcrry  de  867  à  927.  L'épo-- 
pée  fraaçaiscj  nouminent  Orson  de  Beauvais  où  tes  Berruiers 
sont  sévèrement  iugés,  a  gardé  un  reflet  de  cette  période  tour- 
mentée* 

F,  Lot, 

WAUÇHIER/pE  pENAIN 

Il  y  a  crois  ans  je  puVHaî,  dans  le  t-  XXXVI  des  Noikcs  et 
extraits  des  nmnuscriîs^  un  mémoire  sur  un  prédeux  légeotlier 
français  conservé  à  la  Bibliothèque  impériale  de  Sainc-Pérers- 
bourg,  formé  d'éléments  assez  divers  eotre  lesquels  plusieurs 
ne  se  rencontraient  dans  aucun  des  nombreux  légendiers  que 
j'avais  décrits  antérieurement.  Il  y  avait  notamment  une  vïe 
de  saint  Paul  TenTiitc  (de  saipt  Jérôme)^  et  une  vie  de  saint 
Antoine  (de  saint  Athanase),  qui  offraient  un  intérêt  particulier 
pour  les  motifs  qui  vont  être  indiqués.  D*abord  ces  deux  vies 
étaient  rares  :  ta  vie  de  saint  Paul  m'était  restée  j.us(jue  là 
inconnue;  de  ta  vie  de  saint  Antoine  je  connaissais  bien  deux 
copies.  Tune  dans  un  nis  d'Arras  décrit  ici  mérae%  l'autre 
dans  un  ms,  de  Dublin,  mais  Tune  et  l'autre  incomplètes. 
Ensuite  on  pouvait  constater  qu'elfes  émanaient  du  même  tra- 
ducteur, et  enfin  te  prologue  de  la  première  fournissait  sur  ce 
traducteur  des  renseignements  assez  précis*  A  k  fin  de  ce  pro- 
logue, en  effet,  il  était  dit  que  la  vie  de  saint  Paul  Termite 
avait  été  traduite  par  ordre  du  bon  comte  Pliilippe  de  Namur, 
martyr,  J*exp!iquai  tant  bien  que  mal  ce  qualificatifs  martyr» 
en  rappehnt'  que  Philippe,  marquis  de  Namur,  était  mort  en 
odeur  de  sainteté  (1212),  mais  je  n*étais  pa^,  je  Tavoue,  con- 
vaincu de  la  valeur  de  mon  explication* 

Mon  mémoire  sur  le  légcndier  de  Saint-Pétersbourg  était  i 
peine  publié  que  je  fis  une  découverte  fort  imprévue  qui  réta- 
blissait la  véritable  leçon  du  passage  auquel  je  viens  de  faire 
allusion,  donnait  le  nom  du  traducteur,  et  me  conduisit  à  attri- 
buer à  ce  traducteur  toute  une  série  d'ouvrages  les  uns  con- 
nus, les  autres  jusqu'ici  inconnus  ou  du  moins  non  étudiés.  , 


t^  31.  N9tim.ei  exiraiis,  XKXVI,  6^ï  p,  S  d«  tirage  à  part. 


s  84  MÉLANGES 

Cette  découverte  je  la  fis  tout  simplement  en  parcoumnt, 
en  vue  d'un  article  que  je  préparais  pour  V Histoire  httéraire, 
d'anciennes  notes  dont  je  n'avais  conservé  qu'un  très  vague 
souvenir,  L*une  de  ces  notes  se  rapportait  à  un  nianuscrit  que 
j*avaîs  vu  jadis  à  Carpentras^  et  d'après  lequel  j'avais  publié, 
en  1864»  des  extraits  d'une  ancienne  version  anonyme,  envers, 
de  Barîaam  et  Jûsaphat.  Ce  manuscrit'  est  formé  de  deux  par- 
ties originairement  distinctes,  La  seconde  est  une  copie  incom- 
plète du  poème  de  Barlaam  et  Josaphaî^i  la  première,  d'une  tout 
autre  écriture,  contient  les  versions  en  prose  des  ouvrages  sui- 
vants, tous  en  prose  : 

1 .  Vie  de  saint  Paul  Termite,  de  saint  Jérôme. 

2.  Vie  de  saint  Antoine,  de  saint  Athanase. 

3.  Vie  de  saint  Hilarionj  de  saint  Jérôme. 

4.  Vie  de  saint  Malchus,  de  saint  Jérôme, 

5.  Vie  de  saint  Paul  le  Simple  (Rufin,  Historia  monaihù- 
mm^  ch.  xxxi). 

6.  Saint  Grégoire  le  Grand,  livres  I  et  III  du  Dialogue^ 

7.  Rufin,  Historia  mùnachorum^  moins  quelques  chapitres, 
nommément  le  ch.  xxxi  inséré  plus  haut. 

8.  Rufin,  Vêrba  smiorum  (incomplet  de  la  fin). 

Les  n**  I  et  2  sont  les  vies  que  j'avais  déjà  rencontrées  dans 
le  ms.  de  Saint-Péteisbourg  ;  les  n"  3  à  7  existent  en  dîi'ers 
manuscrits  dont  il  n  est  pas  utile  de  donner  ici  Findicatioii* 
Toutes  ces  versions  sont  du  même  traducteur,  et  ce  rnduc- 
teur,  destiné  i  occuper  désormais  une  place  imponante  dans 
rhîstoire  de  la  littérature  du  nord  de  la  France,  s'appelait 
Wauchier  de  Denain.  D  nous  donne  son  nom  au  cours  de  la 
version  du  Dialvgm  de  Grégoire. 

Le  passage  signalé  plus  haut  du  prologue  de  ta  vie  de  saint 
Paul  est,  dans  le  ms.  de  Carpentras,  plus  clair  et  plus  complet 
que  dans  le  texte  de  Saint-Pétersbourg;  il  doit  être  lu  ainsi  : 

Et  pûT  ces»  ne  conte  l'en  mie  la  éoicxm  ptfolcs  ne  les  gnm  fak  se  ks 


i .  N«  471  du  oûËLvcAu  cuAÏûgtie;  465  du  ctulogne  Lamben.  I^  dcscrtp- 
ÛOR  àotXBéc  dans  c^  deux  cauJûgii»  esi  eitrèmemcDl  dcfecEueusc. 

m.  Le  coEKimen^^^meoi,  oottniraeEtt,  êià  déCnit.  Dans  ma  publkatiaQ  de 
1S64,  fâi  donné  Le  début  du  poèfiie  d'après  on  ms.  de  Toun, 

I  «  Ceui  qui  n'ont  cy»  de  Dieu  ni  de  $&  saints»  dont  d  est  parlé  dans  la 
piifase  pcécédeote^ 


WAUCHIEH   DE   DENAIN  58$ 

âiitts  vïes  que  II  saiot  home  ont  menées  ça  en  af  riere  et  menront  eocor  por 
lor  enraes  sauver^  quar  ce  seroil  perdue  chose,  por  ce  qu'entendre  n'i  vor- 
rûienip  quar  l'en  dit,  et  voirs  est,  que  paroîe  est  perdue  qui  n'est  entendue 
decuer^  Mes  a  cils  qui  rcntendeni  volentiers  vodrai  je  conter,  por  ce  qu'il 
i  praignent  bonnes  essamples  et  retiengnent,  les  vies  des  saînz  pères  que  li 
bons  cuens  Philippes,  marchis'  de  Namur,  qui  fu  hi  Baudoin,  le  bon  conte 
de  Flandres  et  de  H  aï  no,  et  la  bonne  contca&c  Margaritc,  a  faites  translater 
de  latin  en  roumanz,  après  Saint  Jérôme. 

Mais  le  ms,  de  Carpentras  ne  contient  pas  toutes  les  œuvres 
de  Wauchier  de  Denaîn  :  il  s*en  fout  même  de  beaucoup.  De 
recherches  dont  on  trou\^era  le  détail  dans  un  anicle  du  tome 
XXXIII  de  V Histoire  littéraire  il  résulte  qu'on  peut,  avec  toute 
certitude,  attribuer  à  Wauchier  la  traduction  des  vies  de  saint 
Jérôme,  de  saint  Benoît  (livre  II  du  Dialogue  de  saint  Grégoire), 
de  saint  Martin*  de  saint  Brice,  des  Dialogues  de  Sulpice  Sévère 
sur  saint  Martin-  Ces  traductions  se  rencontrent  en  plusieurs 
manuscrits. 

De  plus  il  est  infiniment  probable  qu'il  est  Tauteurde  la  vîe 
de  sainte  Marthe,  en  prose  mêlée  de  vers,  que  j'ai  fait  connaître 
dans  ma  notice  du  ms.  B,  N*  fr.  6447  (^Notices  etcxtraits^  XXXV, 
500-503)*  II  est  vraisemblable  aussi  que  c'est  lut  qui  a  rédigé 
pour  un  châtelain  de  Lille  appelé  Roger,  la  compilation  d'his- 
toire ancienne  que  j'ai  analysée  dans  un  précédent  mémoires 
Enfin,  il  est  à  peu  près  certain  qu'il  faut  le  reconnaître  dans  le 
continuateur  de  Perce%^al  qui  jusqu'ici  a  été  connu  sous  le  nom 
de  Gauchier  de  Dokns,  Gancbier  de  Doudain^  Gauchieràc  Dordans^ 
Gautier  de  Domt^  etc.-*.  Tous  ces  noms  sont  altérés.  Un  ms. 
de  Perccval,  qui,  jusqu'ici  n'a  pas  été  consulté,  porte  Gauchier  de 
Doming  î  et  il  n'est  pas  douteux  que  cette  forme  est  la  bonne. 


I,  Wauchier  avait  lu  Chrétien  de  Troies,  ce  dont  on  a  une  autre  preuve, 
comme  on  le  verra  plus  loin  : 

Cir  parole  fsi  tote  perdue 
S  cle  ïi*e*i  de  cucr  entendue. 

1,   Et  non  pas  martyr  comme  dans  Saint*PétersÎ50urg. 
5,  Ramania^  W\\  %j  et  suiv.  î  cf.   BuU^  de  USoc,  des  anc.  textes,  1895, 
p.  83-96. 

4.  Voir  G.  Paris,  dans  HiV^  îitt.  delà  Fr.,XXX,  28.  Cf.  Potvîn,  Ptrç^ 
val,  note  sur  le  v,  5375;, 

5 ,  DoHamg  est  randenne  îorme  de  Ekrutin , 


586  ^      '  MÈLANGE*i 

je  me  borne  ici  à  ces  rapides  indications.  Les  preuves  à  Tap- 
pui  des  assertions  qui  précèdent  étant  données  dans  l'article  de 
VBîstotre  littéraire  que  j*ai  annoncé  plus  haut*,  il  me  paraît  inu- 
tile de  dire  deux  fois  la  même  chose.  Je  n'avais  même  pas  Fin^ 
tedtîon  de  faire  ici  la  moindre  mention  de  ces  découvertes.  Maî^j 
G.  Parisj  devant  qui  je  lisais,  en  commission,  mon  article,  au' 
commencement  de  Tannée  dernière,  fut  frappé  de  Timportanc^ 
des  faits  que  j*avais  groupés  autour  du  nom  de  Wauchîer  ou 
Gauchier  de  Denain;  il  me  fit  observer  que  le  tome  XXXIII  ne 
paraîtrait  sans  doute  pas  avant  1903  (en  réalîtc  il  ne  pourra 
paraître  qu'en  1904  ou  même  1905)  et  me  pressa  de  publier 
dans  la  Rotnania  un  résumé  de  mes  recherches.  Je  regrette  de 
ne  pas  lui  avoir  donné  cette  satisfaction  plus  lôv, 

P.  Meyer. 

LE   DIT   DU    HARDI  CHEVAL 

Le  Dit  du  cfmfal  a  vendre  que  nous  avons  publié  précédem- 
ment d'après  un  manuscrit  du  musée  Condé  de  Chantilly  S  sç 
retrouve  avec  un  autre  titre  dans  le  ms.  de  la  Bibliothèque 
nationale  fr.  24432  (anc.  N.-D.  198),  foK  316^-  jiyi.  Nous 
reproduisons  cette  seconde  rédaction^  plus  longue  que  la  pre- 
mière, en  mettant  en  italique  les  variantes  très  nombreuses  et 
entre  crochets  les  additions  que  présente  ce  texte. 

Il  n'est  pas  sans  intérêt  de  rapprocher  de  ce  Dit  une  piêcç 
analogue  de  Guillaume  de  Machaut,  Le  Dit  du  chevah  (80  vers) 
qui,  toute  différente  par  la  forme,  est  presque  îdentique  pour  le 
fond- 


1 .  Cei  article  a  pour  titre  «  Versbns  en  vers  et  en  prose  des  Vies  du  Bere^  u, 
il  occtipe  les  pages  254  à  52S  du  tome  XXXUT,  mais  iî  n'est  question  de 
Wauchîer  de  Detiaîn  que  dans  les  pages  258  à  291. 

2 .  Je  dois  ajouter  que  G ,  Paris  se  niûntraît  beaucoup  pluî  affirmatîf  que 
moi  sur  certains  point?.  Ainsi  j*avaîs  d*abord  considéré  comme  simplement 
vraisemblable  ridentîficatîoti  de  Gauchier  de  Denain  avec  le  coniinuateur  de 
Chrétien  de  Troy es,  G^  Paris  la  considènit  comme  absolument  certaine^  et 
j*aî  fini  par  adopter  à  peu  près  son  opinion , 

j.  Rmnania^  XXI V,.  449-51. 

4,  Ptiblié  par  Tarbé,  dans  Us  Œuvres  de  GuiîJautm  ai  Maçhault  (Paris  et 
Rdms,  1S49),  P*  80-82. 


^^^^^^^^^f 

HAHDi    CHEVAL                                587 

■ 

^^^^^^^^F 

If  A  RDI    CHEVAL 

^H 

^^^H         Un  dm^aï  ay  qui  tst  a  vendre 

32  Car  il  a  le  mal  saint  Eloi  ; 

^^1 

^^F             ^ur  avoir  argent, a  dâspi^ndrc; 

Les  barbes  a  et  îc  ïempas. 

^^H 

^H             /^rtroi  n7qui  Tachâtera 

Mitvfisfment  va  trop  tî  pas  ; 

^^H 

^H           4  Quemmtt  ptiU\  ^aignera. 

[Je  croi  qu'il  fu  nez  en  enfer. 

^^^1 

^H                Oi/  ûte  'l'otr,  il  est  fera  m 

^6  En  pié  ne  li  demeure  1er 

^^^1 

^H          ^    Bi  est  mauvesetnent  crrans. 

Et  si  a  derrière  une  courbe 

^^^1 

^H               £/a  Mïj.fdomreimis 

Qui  a  Taler  moût  lî  destourbe. 

^^^1 

^H           i  Et  a  soz  la  gorge  oj.  neus. 

Et  s'a  formes  et  s'a  molete. 

^^^1 

^H                £/  ^ï/  S£^  U  quemîigneui^ 

40  II  est  chetive  bestelete,] 

^^H 

^H               Et  <f^/  potjsis  et  iit  morveus. 

Encotdtx  ^5f  ifn'dttt  derrière, 

^^^H 

^^1                Et  si  dient  hi  ^êni  entr*eus 

Oreilles  pendanï;  maté  chiere; 

^^^1 

^^^          it  Que  il  t'ai f  mojtt  pefH  tffs  i^us^ 

FûrsiUms  est»  s*a  ks  rektis  ; 

^^H 

^H              Ht  Si  sai  bien  que  il  n'oit  gaute, 

44  II  est  mavaîs,  et  si  ert  kns. 

^^H 

^H              Ne  11  ventres  ne  11  tient  gonte  . 

Encore  plus  i  meterons  : 

^^^H 

^^M               Foi  que  je  doî  saîote  Péri  tu. 

Il  est  trop  durs  a  espérons» 

^^H 

^H         j6  n  n*a  mestierde  médecine. 

Et  si  vous  di,  se  Dîeiis  m'avoic, 

^^^H 

^H               Car,  se  vérité  {c5/)  en  recors, 

48  II  chiet  en  rtit  tî  [chiei]  en  voie. 

^^H 

^H               Riens  ne  li  demeun?  ens  d  cors. 

[Foi  que  je  doî  a  mes  Jj.  maîns, 

^^^1 

^H               £;  Si  mort  it  regibe  c/  grate, 

Des  mehains  n*i  a  mie  mains]  ; 

^^^M 

^H          %o  Et  si  fiert  âfrrkr  de  la  pâte» 

Paeu  reuit ,  on  brageus ,  rest[tyux , 

^^^Ê 

^^^                Et  SI  menjyt  tnam*emutnt^ 

52  Onques  mes  ch[i]vaus  ne  fu  lieui^ 

^^^H 

^H              Mrii  il  engist  plus  netement. 

[Despuis  le  tens  de  Perceval, 

^^^B 

^H              Maigres  est  et  roi  des  et  Ions; 

Ke  vefstes  sî  fier  cheval  : 

^M 

^H         34  Baui  fit  et  si  fst  trop  fêtons  ; 

Lons  est,  deschinês,  es  piez  nctss. 

^1 

^^M              II  n^emble  ne  passe  ne  trote« 

j6  Courbatus,  enfosset  et  creus. 

^1 

^H              ïl  ne  vaut  pas  une  vk*  hùk. 

Il  sera  moui  bons  a  vous  tiens 

^1 

^H               [Ht  qyanc  on  Bert  et  il  trebuce. 

;........] 

^M 

^^M        2È  li  chtet  oime  pou  rie  huce, 

Or  Taehaiis,  se  vous  îH>lésl 

^^H 

^H              Et  si  ne  sai  que  ce  puet  estre, 

60  Vendus  est,  se  ne  vous  hastés  î 

^^^1 

^H              lï  mengue  toot  son  chevestre], 

Explkit  du  hardi  cheval 

^^H 

^H              Et  si  C5iî  de  mauveïse  loi, 

^^^H 

■ 

G,  Raynaud, 

M 

^H            '6,  Le  ms.  Concté  a  ki  deux  vers  de  pïus.  —  9,  Vers  omis  dans  le  ms. 

^H         Gîndé,  —  1 3     Meilleur^  leçon  que 

Fecim  du  ms/  Coudé.  —  17.  On  pour- 

J^^^^H 

^H         raît  lire  virtt\  pour  rétablir  îc  vers, 

mais  la  leçon  du  ms.  Condé  est  Car,  se 

' ^^^^1 

^H         vfff//  ïw*r  m-i^rj,    —  22.  Icï  deu» 

vers   de  pîus  dans  le  ms.  Condé*  — 

^^^H 

^H         11.  lï  faudrait  nvnjtte,  à  Tind.  pr,,  comme  au  v.  50,  mais  le  ms.  Condé  a 

^^^H 

^H         la  même  leçon  (m/njust).  —  25-6.  Vers  inter\'ertis  dans  le  ms.  Condé.  — 

^^^H 

^H         39.  Ms.  ferntr.  —  40.  ki  deux  vers 

de  plus  dans  le  ms.  Condé.  —  4a.  Le 

^^^H 

^H         ms.  Condé  pbce  ici  les  vers  47-d. 

"  54-  Corr.  si  fait  jfr  ?,  —  60-  Il  y  a, 

^^^H 

^H        dans  le  ms.  Condé,  un  vers  de  plus 

qui  ne  ri  ta  e  pas. 

J 

j88 


MÉLANGES 


TRAIT&  MIS  A  LTNDEX  AU  Xllb  SIÈCLE 

Le  7  mars  1277^  dimanche  de  Laetâre^  Tèvêque  Je  Paris, 
Érienae  Tempier,  prononçait  une  sentence  d'excommuDication 
qui  mérite  d'être  menilonnée  dans  T histoire  de  la  littérature 
et  dans  celle  des  scit^nces  au  moyen  âge.  Le  texte  en  a  été  plu- 
sieurs fois  imprimé,  en  dernier  lieu  par  MM-  Denifle  et  Châ- 
telain, dans  le  Chariularium  UniversUatis  Parisimsis  (I»  p.  $43 
et  snîv*),  et  pourtant  il  a  échappé',  semb!e*t-il,  à  Tattention 
des  értidits  contemporains  qu*il  devait  plus  particulièrement 
intéresser. 

Cette  sentence  vise  d'abord  un  certain  nombre  de  proposi- 
tions jugées  contraires  à  rorihodoxic,  dont  les  auteurs^  «  non- 
nulli  Parisius  studentes  in  artibus  x»,  ne  sont  pas  nommés,  mais 
qu'on  sait  être  Sigier  de  Brabant,  Boetius  de  Oacia  et  d'autnes. 
Elle  en u mère  ensuite  : 

Ubrum  cmm  De  dmon^  lîve  £^  Deo  Âmoris^  qui  sk  incipit  :  <  Cogit 
me  muhum,  etc*  »,  et  sic  temiinatur  :  «  Cave  igitur,  GaJtcre,  Amoris  cmer- 
cerê  mandatai,  etc.  « 

Item  etiim  Whtnm  gcomantk,  qui  sic  încîpit  :  «  ËititniaveTunt  Indi^  etc*  », 
et  ûc  teixnmjcur  :  «i  RâtîûcinAre  ergû>  super  câm,  et  sic  itivenies,  etc.  > 

Item  Iibros,  rotulo^  scu  quaccmos  ntgromanticos^  àui  continenici  expéri- 
menta sortilegiorum*  învocationes  démon  tira  stvt;  conjurationes  in  pedculum 
ânimarum^  seu  in  qyibus  de  talibus  et  stmilibys,  fidci  orthodoxe  et  bonis  mori- 
bus  *  evidenter  àdver^amibus,  tractactur,  per  eandem  sententiam  nostnài 
condempnamus,  in  omnes  qui  dicios  rot  u  lus,  Jibros,  quaierno*  dogmatij^ive* 
rint  aut  atidierini,  nisi  inira  septem  dies  nobb  vel  canctibrio  parisîensi  pft- 
dicto  revebveriin  eo  modo  quo  su  péri  us  est  expressum  in  hiis  scriptis»  CKCom- 
mumcatîoiiis  sententiam  profcricnces,  ad  allas  penas,  prout  gravitas  culpe  exe* 
gcritj  nichilomînus  processuri. 

Les  deux  ouvrages  désignés  par  leurs  premiers  et  leurs  der- 
niers mots  sont  faciles  à  identifier.  L'un  est  le  livre  d'André  le 
Chapelain,  publié  en  1892  par  M.  Troje!  ;  Tautre  est  un  traité 
de  géomancie  queM,  PaulMeyer  a  récemment  fait  connaître  aux 


t,  îgituw,  dans  une  édition  de  1518,  que  je  possède, 
a.  L'édition  de  1 5  tS  ajoute  ici  i  aut  oùmikus. 


TRAITÉS   MIS   A   l'tNDEX    KV   XIII*  SIÈCLE  589 

lecteurs  de  la  Rotnania  (XXVI,  247-250),  d'après  un  manu- 
scrit de  Florence,  où  Tauteur  est  nommé  Hugo  Satiliensis  '• 

C'est  sans  doute  comme  contraires  à  la  loî  orthodoxe  que 
les  traités  de  géomancie,  de  nécromancie  et  d  autres  sciences  ana- 
logues étaient  interdits;  j'aime  à  croire  que  le  livre  d*André  le 
fut  au  nom  des  bonnes  mœurs.  On  ponrrait  s'étonner  que 
d*autres  traités,  jouissant,  à  la  même  époque,  d'une  aussi 
grande  notoriété,  également  rédigés  dans  une  forme  didactique, 
non  moins  adversanks  bonis  nwribus^  n'aient  pas  été  l'objet  des 
mêmes  sévérités;  cette  différence  de  traitement  s'explique 
sans  doute  par  le  fait  que  l'un  est  écrit  en  latin  et  les  autres 
en  français,  La  langue  vulgaire,  à  Tombre  de  la  mésestime  en 
laquelle  elle  était  tenue  par  les  puissances  universitaires  et  ecclé- 
siastiques, jouissait  d'une  plus  grande  liberté  que  celle  des 
clercs- 
La  condamnation  d'un  livre  pouvait  être  efficace  lorsqu'il 
s'agissait  d'un  ouvrage  commenté  dans  les  écoles,  mais  que  pou- 
vait-elle contre  des  livres  destinés  à  des  lectures  privées?  Il 
aurait  suffi  d*ailleurs,  en  ce  qui  concerne  plus  spécialement 
les  deux  traités  mentionnés  cî*dessus,  d'en  changer  la  première 
et  la  dernière  phrase  pour  se  mettre  i  Tabri  de  toute  pour- 
suite. Lorsqu'aura  paru,  dans  VHistoire  UtUmire  de  la  France, 
l'étude  de  M.  Paul  Meyersur  les  traités  de  géomancie  %  nous 
y  verrons  sans  doute  ^ue  l'œuvre  de  Hugo  Satiliensis  n'avait 
pas  été  mortellement  atteinte  ',  Il  est,  en  tous  cas,  évident  que  le 
livre  d'André  le  Chapelain,  qui  nous  est  mieux  connu,  conti- 
nua, après  1277,  à  être  lu  et  traduit.  Dans  son  introduction 
à  l'édition  de  ce  livre^  M,  Trojel  a  donné  les  témoignages 
qu'il  a  pu  recueillir  de  la  vogue  dont  il  jouissait  à  la  fin  du 
xnï*  siècle.  En  voici  un  nouveau,  daté  de  1290,  de  quelques 
mois  antérieur  à  la  traduction  de  Drouart  la  Vache. 

Guide  Mori,  dans  son  remaniement  du  Ronmn  de  la  Hose^ 


1.  Les  éditeurs  Ju  Cartuliîre  de  TUniverské  de  Piris(I,  p,  S  S  7)  en  signalent 
un  nunuscm  à  la  bibliothèque  d'Erfunh  (Amplon.,  m-4^,  n^  565,  fgL  5  j-Bi). 

2.  Annoncée  dans  la  Romània^  XXVI,  216. 

).  Au  commencement  du  xiv^  siècle,  Jean  de  ïe  Maletotc,  de  Tournai, 
en  donnaii  un  manuscrit  à  Dierinet.  de  LUk*  (La  Grange,  Omix  de  Tma- 
mmts  ttmrttaisùtis.  Testament  de  juin  tJPv  n^  to))* 


5^0  MÈLAKGES 

développant  cette  idée  que  ramoitr  des  femmes  n'est  soumis  à 
aucune  régie  générale,  dit  : 

Kcqucdefit  sont  aucun  pené 
De  Élire  traitté  ordcné 
Commem  on  ddt  requcrre  ûime. 
Ou  soit  datnQLSÎeic^  ou  sok  dame. 
Ou  de  vikine  Eaiion^ 
^  Oo  soit  frans  ou  vikins  li  hom  K 

Ce  <*  traitié  ordené  i>  ne  peut  être  que  le  De  Amore,  André 
le  Chapelain  n'était  pas  le  seul,  il  est  vrai,  avant  1290,  qui  eut 
donné  des  modèles  de  requêtes  amoureuses.  On  en  trouve  dans 
l^ComniaU  Mamours  de  Richard  deFournival*  et  dans  VArt 
^Aftiours  de  Jacques  d*Amiens',  Gui  de  Mon  avait  pu  lire^ 
et  probablemenc  avait  lu,  toutes  ces  compositions;  il  fait  du 
reste  allusion  à  plusieurs  auteurs  :  «  sont  aucun  pené  »■;  mais 
les  trois  derniers  des  vers  cités  ci-dessus  désignent  clairement 
le  livre  d*André,  Les  interlocuteurs  de  Richard  sont  toujours 
les  deux  mêmes  personnages.  Jacques  d'Amiens  donne  à  son 
disciple  trois  modèles  de  prières,  la  première  pour  une  a  dame«,  .1 
la  seconde  pour  une  *^  dame  qui  est  de  vaillandise  j),  autrement  dit 
«  de  haut  afaire  ïi;  la  troisième  pour  une  «  pucelete  m.  Dans  les 
réponses  qu'il  prévoit,  il  fait  parler  d'abord  une«f  dame  a  mari  », 
puis  d'autres  femmes  qu'il  désigne  uniquement  par  les  expressions 
«  l'autre  »,  «  une  autre  »,  «  la  sage  »,  et  qui  ne  se  distinguent 
entre  elles  que  par  leurs  caractères  et  par  la  nature  des  objec- 
tions qu'elles  opposent  au  solliciteur*  C'est  le  même  soupirant 
qui  parle  dans  les  différenies  situations.  Dans  André  le  Chape- 
lain, au  contraire,  les  différents  cas  !K>nt  prévus  suivant  la 
classe  à  laquelle  appartiennent  les  deux  amants  :  pkbeia^  mbiîis 
ou  nobilior;  c*  est -à-dire,  d'une  part,  la  «  vilaine  »,  la  k  damoï- 
selle  »,ou  la  «  dame  »,  d'autre  part  le  «  vilain  jï  ou  le  «t  firanc  a, 

Ernest    Lakglois. 


ï.  Ms.  de  Tournai,  fol,  80. 
.    3i  Composirion  encore  inédifé,  sur  bqudlc  je  publierai  prochainement 
une  notice, 

î,  A  cause  de  ces  diaiaguts,  M,  Trojcl  estime  que  Jacques  d'Amiem  z 
connu  le  De  Âmûre.  La  même  observation  pourrait  Cire  faite  pour  Rîdiard  de 
Foumlval,  et  appuyée  par  cette  drconstance  que,  dans  ^%  Comdh  d'Amours^ 


INTEGKUM   >  ENTRE  591 

:  INTEGRUM  >  ENTRE 

Dans  Tédition  du  Roman  de  la  Rose  publiée  par  Méon  et 
reproduite  par  F.  Michel,  puis  par  P.  Marteau,  les  vers  395-96 
sont  ainsi  établis  : 

Neporquant,  au  mien  erscient, 
Elle  avoit  esté  sage  et  gent. 

Genty  se  rapportant  à  ele^  est  inadmissible  ;  gente  fausserait 
la  rime. 

Quelques  manuscrits  donnent  gente  ou  entey  au  lieu  de  gent, 
rimant  avec  escienteou  escientre..  Aucun. des-  sens  connus  de  ente 
ne  convient  ici,  et  ce  mot,  pas  plus  que  gente,  n'aurait  été 
admis  à  la  rime  par  G.  de  Lorris  avec  escientre  ;  esciente  est  un 
barbarisme. 

La  bonne  leçon,  fournie  par  la  plupart  des  manuscrits,  est  : 

Neporquant,  au  mien  escientre, 
Elle  avoit  esté  sage  et  entre. 

Le  mot  entre,  avec  le  même  sens,  se  retrouve  plus  loin  dans 
le  poème,  où  le  vers  1 242  de  Méon  '  : 

Mais  sages  auques,  sans  outrage, 
dQit  être  ainsi  corrigé  : 

Mais  sage  et  entre,  senz  outrage. 
'%     •      '    '  j'    ' 

■  ■  Cette  fois,,  le  mot  entre  n'étant  pas  protégé  par  la  rime,  nom- 
breux sont  les  copistes  qui,  ne  le  comprenant  pas,  ou  le  trou- 
vant suranné,  ont  modifié  le  texte.  Néanmoins  la  bonne  leçon 
n*est  pas  douteuse. 

L'adjectif  ^«/r^  ne  figure  pas  dans  le  Dictionnaire  de  Godefroy; 
je  n'en  comiais  pas  d'autre  exemple  que  ceux^  du  Roman  de  la 


les  supplices  ÎDâigés  parle  dieu  d'Amours  à  ceux  qui  Tgut  dédaigné  (voy. 
ïfisi.  lùt,\  XXIII,'p.  723)  sont  sensiblement  les  mènies  que  dans  le  traité 
d'Artâré  le  "Chapelain.  ' 

^  I.  Dans'  l'édition  de  Méon,  le- vers  est  faux,  puisque  sages^  aii  féminin  sin- 
gulier, ne  saurait  être  terminé  par  une  s  ;  dans  les  manuscrits  dont  cette 
leçon  provient,  auqtu's  est  pbcé  avant  sage^  ou  la  conjonction  et  précède  san^ 
outrage. 


s  92  MÉLANGES 

Roscy  et  c'est  d'après  ceux-ci  qu'il  en  faut  chercher  le  sens. 
Voici  les  deux  passages  où  il  est  employé  : 

El  '  ne  se  pooit  mais  aidier, 
Ainz  retornoit  ja  en  enfance, 
Car  certes  el  n*avoit  poissance, 
Ce  cuit  je,  ne  force  ne  sen 
Ne  plus  que  uns  enfes  d'un  an. 
Neporquant,  au  mien  escientre, 
Ele  avoit  esté  sage  et  entre^ 
Quant  ele  iert  en  son  droit  aage; 
Mais  je  cuit  qu'el  n*iere  mais  sage, 
Ainz  estoit  tote  rassotée  (v.  390-99). 


Après  se  tenoit  Cortoisie, 

Qpi  moût  estoit  de  touz  prisie, 

Qji'el  n'iert  orgueilleuse  ne  foie. 

C'est  celé  qui  a  la  carole, 

La  seue  merci,  ra'apela 

Ainz  que  nule,  quant  je  vin  la. 

El  ne  fu  ne  nice  n'ombrage, 

Mais  sage  et  enire,  senz  outrage  ; 

De  beaus  respons  et  de  beaus  diz  ; 

One  ne  fu  nus  par  li  laidiz. 

Ne  ne  porta  autrui  rancune  (v.  1229-39). 


Dans  le  premier  tableau,  les  défauts  physiques  et  moraux  sept 
réunis,  et  l'on  ne  voit  pas  clairement  auxquels  s'oppose  le 
qualificatif  entre  ;  on  pourrait  croire  qu'il  est  à  «  force  »  dans 
le  même  rapport  que  sage  est  à  «  sen  ».  Mais  dans  le  portrait 
de  Courtoisie  la  confusion  n'est  plus  possible.  Ici  sage  et  entre 
sont  les  contraires  de  nice  et  d'ombrage,  et  j'en  conclus  que 
c'est  à  «  privée  de  sens  »,  à  «  rassotée  »  qu^ils  s'opposent  dans 
le  portrait  de  Vieillesse. 

Quant  à  l'étymologie  de  entre,  je  n'en  vois  pas  d'autre  pos- 
sible que  integrum,  accentué,  comme  en  latin  classique,  sur  la 
première  syllabe.  En  latin  vulgaire,  l'accent  dans  les  mots  dont 
la  pénultième  brève  était  suivie  d'une  muette  plus  r  s'était 
avancé  sur  la  seconde  syllabe  ;  mais  pour  plusieurs  de  ces  mots, 
on  a  signalé  une  double  accentuation  :  pullîtru>it.  pulédro 


I.  Vieillesse,  personnifiée. 


LES  EXPLOSIVES  SOURDES   ENTRE   VOYELLES   EN    ITALIEN     593 

etpùllïtru>  fr.  poutre\  palpébra  >it.  palpébra^  fr.  paupiirCy 
etpilpébra  >  it.  pâlpetra,  fr.  /w//>re.  Peut-être  pourrait-on 
citer  encore  férétru  >  it.  féretro^  fr.  fiertre  (dont  l'origine 
savante  n'est  pas  assurée),  et  cùlcïtra  >  fr.  coltre^  contre.  Quoi 
qu'il  en  soit,  des  exemples  certains  comme  pùllitru,  palpébra 
autorisent  rhypothèse  d'un  intégru  (ouintéger)  >  entre. 

La  sémantique,  pas  plus  que  la  phonétique,  ne  contredit  à 
cette  explication.  Les  expressions  înteger  animiy  integer  mentis^ 
intégra  mens  se  rencontrent  dans  les  œuvres  d'Horace,  et  Ton 
comprend  sans  peine  qu  integer  ait  pu  être  employé  seul,  avec 
le  même  sens  de  «  sain  d'esprit  »,  et  que  son  représentant  fran- 
çais ^/r^  signifie  «  raisonnable  ». 

Pour  conclure,  entre  est  un  adjectif  qui  doit  être  certaine- 
ment ajouté  au  lexique  de  l'ancien  français;  et  très  probable- 
ment il  apporte  une  restriction  nouvelle  à  la  règle  du  dépla- 
cement de  l'accent  dans  les  proparoxytons  latins  dont  la  pénul- 
tième brève  est  suivie  d'une  muette  plus  r. 

Ernest  Langlois. 

LES  EXPLOSIVES  SOURDES  ENTRE  VOYELLES  EN  ITALIEN 

De  tous  les  cas  où,  en  italien,  on  trouve  deux  résultats  dif- 
férents provenant  d'une  même  source  latine,  il  n'en  est  aucun 
qui  ait  été  plus  controversé  que  celui  des  trois  explosives  inter- 
vocaliques,  c  *,/>,  /  (fuoco,  luogo;  stipa^  riva;  prato,  grado,  etc.). 
n  me  semble  d'ailleurs,  que  la  question  n'a  pas  encore  été 
résolue  d'une  façon  satisfaisante.  Après  M.  Ascoli,qui  voit  dans 
rf  <-^/,  l'influence  d'un  rf  précédent  (grâdo^spàda,  mais  ruôtay, 
etM.Meyer-Lùbke,  qui  considère  la  sonore  comme  le  développe- 
ment normal  avant  la  ionique  (jigtitOy  hudéllo)^  après  la  tonique 
suivie  d*un  a  Çspiga,  riva),  et  au  commencement  de  Tavant-der- 


1.  Je  me  bornerai  ici  à  traiter  du  c  devant  û,  0,  u,  réservant  pour  une 
étude  future,  la  question  du  c  devant  e,  /,  dont  la  valeur  phonétique  s*était 
déjà  transformée  en  latin  vulgaire. 

2.  Arch.  glott.  ital.,  X,  85  et  suiv.  ;  cf.  Schuchardt,  Lilteraturhl.  /.  otrm. 
u,  rom,pbil,j  1887,  col.  19.  —  L'impossibilité  d'accepter  la  théorie  d'Ascoli 
a  été  suffisamment  démontrée  par  Meyer-Lubke,  Ital,  gramm.,  §  20s,  note. 

RammniaXXXIl  .3 


Î94  MÉLANGES 

nière  sylhibe   des  ptoparoxycons  (pégala^  fâi'ero)^,  le  dernier 
qui  ait  abordé  ce  sujet,  M.  Picri,  s'exprime  ainsi  qu'il  suit^  : 

Il  mio  Âssunio  è  ora  di  mastrari!,  a  conferma  d'una  mia  persuasions  non 
nuova  (v.  XI V^  430-1  n.)  e  cou  ttna  rassegna  îniçgrak  o  qu;isi  ddlc  série» 
che  la  dottrina  del  Mey.-Lb.  fillîsce  alla  pfova,  i:  che  in  rcalhà  si  deve 
anc*oggi,  e  più  ch**  maî,  afferiiiare  senjï*altro,  che  U  sorJe  mnipit  ira  vocali 
fimangon  di  rtgoîa  inaîkraU,  in  quahnqttc  cofuii;iifnf  si  frovitto  mpêttû  alV 
mantù.  Dd  resto,  ctrca  le  càuse  che  condtjcano  ad  un  anonn^le  scadimeûEo 
délia  sorda,  io  non  presunio  dVscluder  qudb  âoWa  attîgtio,  intuîia  acuta- 
mente  dairAscoU  ;  ma  incliîio  a  cr^tï  che  Va  da  solo  non  basii,  pel  tes- 
cano,  a  produrre  codesto  efîetto. 

En  effet,  M.  Pieri  a  démontré  que  les  formes  avec  la  sourde  % 
soit  qu'elle  précède,  soit  qu  elle  suive  Taccent  tonique,  sont 
en  beaucoup  plus  grand  nombre  que  les  formes  avec  la 
sonore.  Quant  à  celles-ci,  il  est  à  noter  tout  d'abord,  qu'il 
n'en  a  pas  donné  la  liste  complète,  et  que  parmi  celles  qu'il  a 
données,  il  y  en  a  plusieurs  pour  lesquelles  il  n'offre  aucune 
cxplîcaiion.  Laissant  de  coté,  d'une  part  les  formes  qui  sont, 
selon  M.  Pieri,  d'origine  exotique  ou  d'étymologie  douteuse, 
d'autre  part  les  formes  dans  lesquelles  il  voit  Tinfluence  de  la 
dissimilation  {sîradûyStaiirm^  etc.)-*,  nous  trouvons  les  exemples 
suivants,  qui  ne  sont  expliqués  d'aucune  façon,  et  pour  les- 
quels il  est  difficile  de  ne  pas  croire  à  une  origine  tout  à  fait 
indigène,  tout  à  fait  populaire  :  ~  affogare,  ago^  O^l^w^'^^^, 
agutOf  annegare^  asdugare^  hltcga^  dragom^  fégaio,  fàlaga,  fre~ 
garf,  gruogû,  fmpicgare,  intrigare,  iago^  hutuga,  luogo,  p'gart^ 
pégûla^  pcîtégoh^  piegare,  sàgatiia,  ségah\  segart\  so^ogare^  spic 
g&re^  spiga^  spigolû^strigare,  sugo;  —cave:^ia,  cavicchia^  l^^^ggio^ 

t.  Ihii.  granim.,  S  S  '95»  ^^>^  ^^^^  ^*^-  Contre  la  théorie  de  Meyer-L* 
IHerî  avait  dé\ï  soulevé  de  graves  doutes  {Ank  ghti.  ùaL,  XIV,  4^,  noie; 
cf.  Meyer-Lûbke,  ZdUchr,/.  raw, /i/jtX,  XXVII,  477). 

a.  Arck  ghlL  iîiti,  XV,  569  et  suiv,  Cf,  Mever-Lùbke,  ZfîYi^Ar,  /.  rom, 
Phil,  XXVII,  08. 

j.  Contre  la  valeur  de  quelques-uns  des  exemples  de  Pieri^  Meycr-Lùbkc 
(Znisihr.  f.  rom.  phiL,  XXVll,  568  et  suiv.),  exprime  des  objections  plus  pu 
moins  griives. 

4.  Cf.  cependant,  |ïarmi  les  exemples  de  Pieri,  pipitu,  cocotk,  cowmer^^ 
atcuiiû,  hkiXCù^  bacuao^  €dtasla^  meiato,  tracoiante^  cotmde,  b&ioila,  siatni^^ 
pép&tUy  propaggifir,  pifuir^îh,  pfptrom,  propatdû^  artétuù^  etc,  etc* 


LES   EXPLOSIVES  SOURDES   ÊKTRB   VOYELLES   EN    ITALIEN    59) 

imvêntjpévere^fKwero,prmWfravii:(otu^rk^dre,  rkauerar^^  sctve- 
rare^  stivare;  —  bûdtssa,  badia^  hadiîe^  hidollo,  buddlo,  caduno^ 
grado,  grfdan\  guidare,  medaglia,  mescidare,  padella^  quaderno, 
rédim,  scodella,  scudù,  sodisfan,  spada^  spédale^  sirepidin.  Plus 
douteux,  mais  à  noter  cependant  :  âj^aga,  hefana^  covidarcj  méliga^ 
premst0j  pûUga,  rimproverare^  riva,  savûrej  scuriada^  j/^wm,  soc- 
cida,  shgare^  scverchto. 

Pour  ma  part>  ces  quelques  mots,  sî  peu  nombreux  qu'ils 
soient,  me  laissent  dans  l'impossibilité  absolue  de  conclure  avec 
M»  Pieri,  que  les  formes  avec  la  sourde  représentent  le  seul  déve- 
loppenmit  mrmaL  En  d*autres  termes,  je  suis  porté  à  croire  que 
la  seule  hypothèse  qui  puisse  résoudre  la  difficulté,  est  celle  de 
deux  dialectes  dans  la  ville  de  Florence  elle-même,  —  Tun,  limité 
aux  classes  ignorantes  et  illettrées,  dans  lequel  la  sonore  était 
normale,  !  autre,  propre  au  clergé  et  aux  classes  élevées,  dans 
lequel  la  sourde  se  maintenait  sans  changement. 

Il  faut  remarquer  avant  tout,  qu'une  telle  hypothèse  n'im- 
plique que  des  conditions  inhérentes  à  toute  communauté 
linguistique,  c'est-à-dire,  des  caractères  spéciaux  de  langage, 
propres  aux  couches  différentes  de  la  société,  don:  la  diver- 
gence la  plus  marquée,  en  général,  se  trouve  entre  les  classes 
inférieures  et  les  classes  supérieures  \  On  ne  saurait  en  donner 
un  meilleur  exemple  que  celui  des  conditions  linguistiques  dans 
la  ville  de  Florence  elle-même,  telles  qu*elles  existent  aujour- 
d'hui. Nous  ne  devons  pas  croire  cependant,  que  la  divergence 
actuelle  entre  la  langue  vulgaire  et  la  langue  élevée  à  Florence 
soit  plus  grande  que  celle  qui  existait  au  xiii''  siècle.  Au 
contraire,  n'est-il  pas  naturel  de  supposer,  qu'avec  la  diffusion 
de  plus  en  plus  grande  de  Finstruction  et  des  influences  litté- 
raires, les  différences  dialectales  ont  dû  avoir  une  tendance  à 
s'effacer  plutôt  qu'à  s'accentuer  ? 

Uhypothcsc  que  nous  présentons  est  appuyée  encore  plus 
fortement,  semble-t4l,  par  ]a  signification  des  mots  qui  pré- 
sentent la  sonore.  En  général,  ce  sont  des  formes  qui  ont  dû 
être  d'un  usage  fréquent  surtout  dans  les  classes  inférieures 
(ago^  boîtiga,  spiga,  pâuero^  badile,  buddh^  padella,  scodella,  etc.) 
ou  bien,  qui  sont  d*un  caractère  tellement  universel,  qu*eIlesont 


I,  Cr  D^Ovidio,  S^f^imfrd,  p.  s^t. 


596  MàtAKGES 

dû  èire  employées  consLimment  par  toutes  les  classes  {luaga^ 
sirada,  pagare,  cadum^  etc.). 

Il  ne  faut  pas  oublier  que  la  tangue  italienne  s'est  formée 
dans  des  coud i lions  qui  paraissent  avoir  favorisé^  dans  la 
ville  de  Florence,  une  divergence  dialectale  comme  celte  que 
nous  considérons,  NuD^ï  part  ailleurs,  au  moyen  âge,  l'm- 
fluence  des  traditions  littéraires  du  latin  parlé,  n'était  si  puis* 
santé  que  dans  Tltalie  centrale*  Il  est  certain  que  de  telles 
influences  sur  la  langue  des  classes  élevées  ont  dû  être  au  plus 
haut  degré  conservatrices.  D*âutre  part»  la  langue  des  ignorants 
et  des  illetirés,  entièrement  isolée  de  ces  influences,  a  pus'aban* 
donner  librement  à  ses  tendances  phonétiques,  et  devenir  avec 
le  temps,  suffisamment  éloignée  de  la  langue  élevée  pour  pro- 
duire les  résultats  contradictoires  quL'  nous  avons  constatées*. 

Enfin,  il  est  évident  que  deux  couches  dialectales  telles  que 
noiLs  les  avons  supposées,  ont  dû  exercer  l'une  sur  Tauire  une 
tnflLience  constante,  et  qu'une  définition  exacte  des  limites  de 
chacune  est  impossible.  Vu  aussi  la  complexité  infinie  des  forces 
desquelles  dépend  la  vie  des  mots,  nous  pouvons  comprendre 
comment  ont  survécu  des  formes  qui  montrent,  dans  des 
conditions  apparemment  identiques,  un  traitement  différent^ 
comm^fîtoco  et  luogo^  giîwco  et  grmgo^  etc. 

John  Taggart  Clark» 


I,  O,  Whitney,  Languâ^e  ami  Uï  Study^  l<édlt.,  Londres,  iBfto,  p.  148, 


COMPTES    RENDUS 


La  chançun   de  'Willame.   Petit    in-40  (imprimé  à  Chiswick, 
juin  1903),  non  paginé;  cahiers  signés  ait.  Deux  fac-similés. 

La  chanson  de  geste,  jusqu'ici  absolument  inconnue,  dont  je  vais  entre- 
tenir les  lecteurs  de  la  Romania  est,  si  je  ne  m*abuse,  Tune  des  œuvres  les 
plus  importantes  de  notre  poésie  épique,  non  pas  précisément  pour  sa  valeur 
littéraire  —  elle  est  rédigée  gauchement  et  témoigne  d'un  art  encore  bien 
grossier  —  mais  parce  qu'elle  apporte  â  l'histoire  du  développement  de  notre 
épopée,  spécialement  en  ce  qui  concerne  la  geste  de  Guillaume  au  court  nez, 
un  élément  nouveau  et  on  ne  peut  plus  précieux.  Lorsqu'elle  sera  connue, 
elle  deviendra  un  thème  inépuisable  de  dissertations,  et  sera,  j'en  ai  peur, 
invoquée  à  l'appui  des  thèses  les  plus  variées. 

L'édition  dont  le  titre  est  écrit  en  tète  de  cet  article,  a  un  caractère  provi- 
soire :  elle  n'a  pas  d'autre  objet  que  de  multiplier  en  quelque  sorte  le  manu- 
scrit. C'est  une  copie  pure  et  simple,  comme  l'indique  une  courte  note  finale 
ainsi  conçue  :  «  Note.  The  unknown  «  Chanson  de  geste  »  hère  transcribed 
belongs  to  the  cycle  of  William  of  Orange.  There  has  been  no  attempt  to 
edit  the  lext  or  even  to  correct  not  a  few  very  obvious  minor  errors.  »  La 
transcription,  autant  que  j'en  ai  pu  juger  en  collationnant  l'imprimé  avec  les 
deux  fac-similés,  est  fort  exacte.  Le  manuscrit,  du  reste,  écrit  d'une  main 
anglaise  vers  le  milieu  du  xiii*  siècle,  présente  peu  de  difficultés  de  lecture  ». 

Mais  d'où  vient  ce  manuscrit,  dont  personne  n'avait  jamais  entendu  par- 
ler? Voici  à  cet  égard  ce  que  je  crois  savoir.  Il  figura  en  1901  dans  la  vente 
Edwardes,  avec  le  ms.  des  Miracles  de  la  Vierge  par  Adgar,  décrit  ci-dessus, 
p.  393  et  suiv.  Ce  catalogue  fut  peu  répandu.  Je  ne  crois  pas  qu'il  en  soit 
venu  un  seul  exemplaire  à  Paris.  En  Angleterre,  il  ne  paraît  pas  avoir  attiré 
l'attention  des  amateurs,  non  plus  que  des  bibliothécaires,  de  sorte  que  la 
même  personne  se  rendit  facilement  acquéreur  des  deux  précieux  manuscrits, 
dont  l'histoire  m'est  d'ailleurs  inconnue.  Sachons  gré  à  ce  bibliophile,  qui 
n'a  pas  voulu  être  nommé,  d'abord  d'avoir  autorisé  la  publication  dans  la 


1.  Il  y  a  cependant  çà  et  là  quelques  méprises  :  m  pour  n  (ou  l'inverse), 
c  pour  «,  ui  ou  «I  pour  w,  etc. 


J^S  €]OMPT£S    REMOUS 

Momartia  4'uae  notice  détaillée  du  m%*  d'Adgar,  pais  de  h  libéraliic  avec 

laijucUe  il  a  mis  à  îa  portée  des  êrudits  compétents   le  texte  de  soo  autre 

manuscrii  par  utie  reproduction  tîttéralemetit  exacte.  Je  lut  ^uis  particuHêre- 

ment  reconnaissant  de  m*avûir  adresse  un  exemplaire  de  son  précieux  volyme,  1 

et,    oe  sachant  si  son  nom,    ni  son  adresse»  je  lui  adresse  ici  mes  sînUrcs| 

remçrcîments. 

Le  niaiiyscni  est  incomplet  de  la  fin.  Dans  son  état  présent  il  renferme  ' 
Jî  Vî  v^^*  ^1  €51  bmemabïement  corrompu.  Un  bon  quart  des  vers  sont  trop 
longs  ou  trop  courts,  ce  qui,  pour  un  texte  copié  en  Angleterre  n'est 
extraordinaire.  En  outre,  çà  et  là  il  semble  manqtier  des  vers.  Toutefois,  îl^ 
kudratt  se  garder  de  porter  au  compte  du  copiste  toiit  ce  qui,  dans  ce  poème, 
nous  semble  étrange  et  en  dehors  des  règles.  J'imagine  qiâe,  si  même  nous 
en  avions  une  bonne  copie,  nous  y  trouverionst  en  ce  qui  concerne  le  style 
notamment  et  la  versification,  plusieurs  pnivttlarîiés  asse^  rares  ou  du 
moins  dignes  de  remarque.  B:  d'abord  un  moi  sur  la  versification. 

Le  poème  est  en  vers  décasyllabiques  assonances  Mais,  contrairement  à 
Fusage,  dans  les  iSjo  premiers  vers  environ,  les  laisses  ne  sont  pas  détermi- 
nées par  une  iissonanee  unique.  Elles  ne  sont  pas  monorimcs,  La  division  t^n 
laisses  est,  par  suite,  asse^  arbitraire,  puisque,  au  cours  d'une  phrase,  t'asso- 
fïancc  peut  changer.  Ce  n'est  pas  la,  assurément,  un  signe  d*antiquité.  Les 
poèmes  qui  offrent  cette  particularité  (par  ei.  Li  ver  àel  jum^  p.  p.  Hugo 
de  Feilitjeen  ')  ne  sont  certainement  pas  très  anciens.  Mais  il  serait  impru- 
dent de  se  fonder  sur  cette  disposition  fort  exceplitinnelle  pour  placer  notre 
poème  à  une  époque  avancée  du  xn*^  siècle.  Il  y  a  des  si^^nes  d'antiquité  qui 
me  conduisent  à  en  p!acer  la  rédaction  dans  la  première  moitié  de  ce  sièck. 
D*3illeurs,  à  parc ir  du  v.  1857,  les  laisses,  sauf  de  rares  exceptions,  se  pré- 
sentent  dans  tes  conditions  ordinaires.  Je  ne  saisi  quoi  attribuer  cette  diffé- 
rence. Il  ne  me  paraît  pas  qu*jl  y  ait  lieu  d'attribuer  ces  deux  parties  à  deux 
auteurs,  car  en  réalité  il  ïCy  a  aucune  coupure  dans  le  récit  m  v,  1857  ni  aux 
environs.  Le  manuscrit  étant  très  incorrect,  on  peut  former  plus  d'une  hypo- 
thèse* Le  style  est  simple,  peu  travaillé.  La  simplicité  n'est  pas  un  défaut  ; 
mais  le  récit  est  abrupt  :  on  passe  sans  transition  d'une  idée  à  une  autre,  ài^^ 
sonc  que  parfois  b  suite  des  idées  est  difficile  à  suivre.  Mais  la  m  en 
renurque  peut  être  faite  a  l'occasion  de  cetuins  de  nos  plus  anciens  poèmes. 
A  cet  égard,  la  différence  avec  Alhcam,  dont  la  rédaction  est  plus  littéraire, 
est  frappante.  Il  y  a  de  beaux  passages,  des  vers  bien  frappés,  la  où  l'auteur 
est  porté  par  Tidée  ;  mais  il  y  a  aussi  bien  des  négligences,  et  surtout  un 
bien  faible  souci  de  la  variété.  Si  l'auteur  est  dans  le  cas  d'exprimer  deux 
fois  la  même  idée,  en  des  circonstances  difTérentes,  il  n'hèsire  pas  a  formu- 
ler sa  pensée  en  des  terro»  identiques.  Ces  répétitions  ne  sont  assurément 


t.  Voir  Rûmûniû,  XJII,  487. 


La  Chançun  de  IVillatm  599 

pas  sans  exemple  ',  mais  je  ne  connais  pas  de  poème  où  elles  soient  aussi 
fréquentes.  Comparons  ces  deux  passages  (il  s'agit  de  Girard  envoyé  par 
Vivien  pour  demander  secours  à  Guillaume)  : 

750    Toutes  ses  armes  out  guerpi  li  frans», 

Fors  sal  l'espée  dunt  d'ascer  fu  li  brant, 

Tote  vermeille  dès  le  helt  en  avant, 

L'escalberc  )  pleine  de  foie  z  de  sanc  ; 

Nue  la  porte  ;  si  s'en  vait  suz  poiant 
740     z  [vait]  la  mure  vers  terre  reposant... 

Devers  la  mure  si  s'en  vait  apuiant. 

Plus  loin,  en  parlant  de  Vivien  resté  seul  sur  le  champ  de  bataille  : 

En  sa  main  destre  porte  d'ascer  un  brant. 
Tut  fu  vermeil  dès  le  holz  en  avaut, 
L'escalberc  pleine  de  feie  z  de  sanc  ; 
090    Devers  la  mure  [sij  s'en  vait  apuiant. 

Guillaume  hésite,  ou  feint  d'hésiter  à  porter  secours  à  Vivien  qui  soutient 
une  lutte  désespérée  en  TArchamp  : 

Loinz  sunt  les  marches  u  jo  ai  a  comander, 
1020    Fort  sunt  les  homes  que  devreie  asembler. 

Les  mêmes  vers  reviennent  plus  loin  (w.  1343-4). 

Il  y  a  en  quelques  endroits  une  sorte  de  refrain.  Il  ne  faudrait  pas  s'éton- 
ner de  rencontrer  des  vers  employés  comme  refrain  dans  une  vieille  chanson 
de  geste.  Nous  en  avons  un  exemple  ancien  dans  Gormond^.  Mais  ici  le 
refrain  a  une  forme  singulière,  et,  à  vrai  dire,  il  n'est  pas  bien  sûr  que  ce 
soit  un  refrain  :  il  se  compose  d'un  petit  vers  à  rime  féminine  suivi  d'un  vers 
décasyllabique  assonant  avec  le  petit  vers.  Cette  ritournelle  prend  natu- 
rellement place  à  la  fin  d'une  laisse,  ou  plus  exactement  (puisque,  à  propre- 


1.  Voir  Raotd  de  Cambrai  (Soc.  des  anc.  textes),  p.  LX,  Couronnement  de 
Louis,  p.  CLxxvi,  etc. 

2.  Je  reproduis  le  texte  sans  chercher  à  le  corriger  sinon  occasionnelle- 
ment en  note,  ou  par  l'addition  d'un  mot  entre  [  );  je  distingue  u  etv,  1  et 
/,  et  j'ajoute  la  ponctuation. 

3.  Corr.  escalberge  (ou  escaleberge  ?),  fourreau.  Il  y  a  scaberge  en  ce  sens  dans 
Guill,  le  Marécfjaly  v.  4596  (oublié  dans  le  vocabulaire  de  l'édition). 

4.  Même  dans  un  poème  non  chanté,  comme  VEstoire  de  la  Guerre  sainte, 
il  y  a  une  sorte  de  refrain.  Les  vers 

Qu'il  (ou  Lors)  maldiseient  le  marchis 
Par  qui  il  crent  si  aquis. 

reparaissent  plusieurs  fois  à  la  fin  d'un  paragraphe  (4^27-8,  4240-2,  4250-2 
4263-4,  4277-8),  etc.  Je  dis  «  une  sorte  de  refrain  »  :  bien  entendu,  le 
refrain  proprement  dit,  tel  qu'on  le  trouve  dans  les  rotruenges,  est  chose 
différente. 


600  COMPTES    RENDUS 

ment  parler,  «  laisse  «  s*entend  d'une  tirade  monorime),  à  la  fin  d*un  para- 
graphe. Maïs  cela  n*est  pas  constant.  Le  petit  vers  est  toujours  le  même  (ou  à 
peu  prés)  :  il  désigne  un  jour  de  la  semaine.  Le  second  vers  est  variable  : 

lo  Lunesdi  a  vespre. 

Oima[ijs  comence  la  chançon  de  Willame  <. 

86  Lunsdi  al  vespre. 

Jo  ne  met  mie  a  pris  Wiilame  *. 

148  Lunsdi  al  vespre. 

En  TArchamp  vindrent  de  sur  [la]  mer  a  destre. 

200  Lunsdi  al  vespre. 

Ja  ne  combaterai  sanz  Willame. 

a  16  Lunsdi  al  vespre. 

Ben  rc  deis  faire  tenir  al  pris  Willame. 

Dans  le  cas  suivant,  les  deux  vers  sont  plutôt  dans  le  corps  ou  au  commen- 
cernent  qu'à  la  fin  d'un  paragraphe  : 

Lunsdi  al  vespre, 
Les  Sarazins  de  Saragoce  terre 
330    Cent  mille  furent  de  la  pute  geste, 

Il  n'i  out  celai  de  blanc  halberc  ne  se  veste  5... 

Le  jour  de  la  semaine  n'est  pas  toujours  le  même  : 

1135     Des  homes  Willame  ne  remist  un  vif, 
Joesdi  al  vespre. 
Fors  treis  cscuz  qu'il  out  al  champ  tenir  4. 

'  Ici  le  petit  vers  prend  place  au  milieu  d'un  paragraphe  : 

Rcspunt  Willame  :  N'i  remaindrez. 

Joesdi  al  vespre, 
Descendi  li  quons  Willame, 
1x65     Tendi  sa  main,  sil  prist  par  la  main  destre. 

Plus  loin  nous  trouvons  mercredi  non  pas  au  commencement,  mais  à  la  fin 
du  petit  vers  : 

1778     Iloec  desevrerent  entre  Willame  z  Gui  ; 
Lores  fu  mescredi, 
Qjiant  s'en  tumad  Gui  li  enfcs  s 


1.  JVilîatne  est  une  graphie  due  au  copiste  anglais;   il  faut  toujours  p 
noncer  Wilîeme, 

2.  On  pourrait  proposer /o  ne  met  mie  [tm  farce]  al  pris  Willame, 

3.  Corr.  N'i  out  c.  le  bl.  h,  ne  veste. 

4.  Ici  le  second  vers  reprend  l'assonance  qui  précède  le  petit  vers.   ? 
c'est  exceptionnel  et  peut-être  fautif. 

5.  Corr.  li  en/es  Gui. 


La  Chatiçun  de  Willatnc  60 1 

Dans  l'exemple  suivant  le  petit  vers  ne  rime  pas  : 

1977    Après  ma  mort  ten  tote  ma  hérité. 
Lores  fumescredi; 
Or  out  vcncu  sa  bataille  Willame. 

Plus  loin  revient  Lunsdi  al  vespre.  Si  on  examine  dans  le  contexte  tous  les 
cas  où  apparaît  cette  formule,  on  est  conduit  à  croire  qu'on  a  voulu  par  là 
dater  les  événements,  ou  du  moins  en  indiquer  plus  ou  moins  vaguement 
la  succession  ou  la  durée.  C'est  une  indication  donnée  par  l'auteur  —  ou, 
à  la  rigueur,  ajouté  par  le  jongleur  chargé  de  réciter  la  chanson  —  qui  par 
suite,  reste  en  dehors  du  poème.  On  peut  en  effet  supprimer  ce  petit  vers 
sans.dommage  pour  le  sens. 

A  envisager  les  récits  eux-mêmes,  on  y  reconnaît  tout  autant  d'invraisem- 
blances que  dans  mainte  chanson  de  geste,  et  particulièrement  dans  Alis- 
cans.  L'auteur  n'a  aucun  sentiment  de  la  réalité.  Les  combats  que  Vivien  et 
Guillaume  livrent  aux  Sarrazins  sont  d'une  criante  absurdité.  Les  héros 
chrétiens  ont  une  endurance  miraculeuse.  Les  blessures  les  plus  affreuses  ne 
les  empêchent  pas  de  chevaucher  et  de  se  battre.  La  notion  du  temps  n'existe 
pas  non  plus  pour  notre  auteur.  En  un  délai  ridiculement  court  on  ras- 
semble des  armées  considérables.  Le  lecteur  en  jugera  par  l'analyse  détaillée 
que  je  donnerai  du  poème. 

Je  laisse  de  côté,  par  crainte  d'être  trop  long,  tout  ce  qui  concerne  la 
langue,  me  bornant  à  dire  qu'à  mon  sentiment  ce  poème  ne  peut  guère  être 
antérieur  au  xiic  siècle  et  qu'il  a  dû  être  composé  dans  la  France  centrale  ; 
-an  et  -en  sont  mêlés  dans  les  assonances. 

Arrivons  maintenant  à  la  narration  Comme  le  lecteur  avisé  a  pu  le  recon- 
naître à  la  simple  lecture  des  citations  qui  précèdent,  le  commencement  du 
poème  conte  la  lutte  de  Vivien  contre  les  Sarrasms,  ayant  à  leur  tête  Deramé, 
«t  les  efforts  de  Guillaume  au  nez  recourbé  (a/  curb  nies,  comme  dit  le  texte  ») 
pour  secourir  son  neveu.  C'est  le  sujet  du  Covenant  Vivien  et  d'AIiscans.  Ces 
deux  poèmes,  dont  le  second  est  la  continuation  du  premier,  sont  des  remanie- 
ments de  poèmes  plus  anciens  :  il  n'y  a  aucun  doute  sur  ce  point.  On  peut 
encore  admettre  que  le  second,  étant  rimé,  est  plus  profondément  remanié 
que  le  premier,  lequel  est  en  assonances.  Mais  en  dehors  de  ces  deux  points, 
tout  n'est  jusqu'à  présent  que  conjectures.  Peut-être  l'examen  du  nouveau 
poème  jettera-t-il  quelque  clarté  sur  les  questions  obscures  que  soulève  la 
composition  tant  du  Covenant  que  d'Aliscans  *. 


1.  G.  Paris  pensait  que  le  surnom  de  Guillaume  était  courb  (et  non  court) 

2.  On  verra  plus  loin  que  notre  poème  a  été  connu  aussi  de  l'auteur  des 
Enfances  Vivien, 


602  COMPTES   RENDUS 

Citons  d'abord  le  début  qui  donnera  au  lecteur  une  idée  de  l'état  de  cor- 
ruption dans  lequel  le  poème  nous  est  parvenu  : 

PUist  vus  oïr  de  gnnz  batailles  z  de  forz  esturs, 
De  Deraméd,  uns  reis  Sarazinurs, 
Cum  il  prist  guère  vers  Lowis  nostre  empereiir  ? 
Mais  dan  Willame  la  prist  vers  lui  forçur 
5     Tant  qu'il  [1']  ocist  cl  l'Archamp  par  grant  onur. 
Mais  sovent  se  combati  a  la  gent  paienur  ; 
Si  [i]  perdi  de  ses  homes  les  meillurs 
c  Sun  nevou  dan  Vivien  le  pruz 
Pur  qui  il  out  tut  tens  al  quor  grand  dolur. 
lo  Lunesdi  al  vesprc, 

Oima|i]s  comence  la  chançun  de  Willame. 

Reis  Deraméd  il  est  issu  de  Cordres  ; 

En  halte  mer  en  a  mise  la  flote  ; 

Amunt  Girunde  en  est  venu  par  force 
15     Entréd  que  si  mal  descunorted  : 

Les  marchez  gaste,  les  alues  comence  a  prendre. 

Les  veirs  corseinz  porte  par  force  del  règne, 

I^s  bons  chevalers  enmeine  en  chaenes 

z  en  TArchamp  est  hui  fait  cest  damages. 
20     Un  chevaler  est  estoers  de  ces  paens  homes, 

Cil  le  nuncie  a  Tedbalt  de  Burges, 

lioeques  ert  Tedbalt  a  iceles  hures; 

Li  messagers  le  trovad  vei rement  a  Burges 

z  Esturmi  sis  niés  z  dan  Vivien  le  conte, 
25     Od  els  .vij.  cent  chevalers  de  jofnes  homes, 

N'i  out  cil  qui  n'out  halberc  z  broine; 

Es  vus  le  mes  qui  les  noveles  cunte. 

Tibaut  revenait  de  vêpres,  accompagné  de  son  neveu  Estourmi  et  de 
Vivien,  le  neveu  de  Guillaume.  Il  était  complètement  ivre.  Le  messager  lui 
conte  que  Deramé,  avant  remonté  la  Gironde,  dévaste  sa  terre.  «  Que 
faire?  >»  dit  Tibaut.  —  «  Mander  vos  hommes  »,  dit  Vivien,  «  sans  oublier 
Guillaume  ».  Tibaut  répond  (dans  un  passage  qui  n*est  pas  très  clair)  que  ce 
n'est  pas  son  avis,  car  si  Guillaume  vient,  ne  fût-ce  qu'avec  quatre  ou  cinq 
des  siens,  c'est  lui  qui  aura  tout  le  mérite  de  la  \-ictoire.  Vivien  insiste,  mais 


I  Corr.  PL  v,  0..  seigiiur^  de  f.  e?  —  5  Suppr.  Laicis.  —  5  Corr.  en  FA.  a 
dolur?  —  7  On  peut  supprimer  if-;  en  effet  ce  mot  est  inutile  :  tous  les  hommes 
de  Guillaume  périssent  dans  la  bataille.  —  9  Corr.  Pur  cui  il  out  lu^  Uns  al 
q.  d.  —  15  Dfsconorter,  dont  Godefroy  ne  cite  aucun  exemple,  pourrait  se 
défendre  i  cause  de  dfsccnortar  qui  est  très  usité  cti  provençal  ;  mais  il  va  plus 
loin  En  ix^stre  tere  est  ijue  si  mal  disotiorte  (41)  et  desettorte  {()62).  On  connaît 
en  français  de<e>u}rUr.  Toutefois,  avec  l'un  ou  l'autre  mot,  la  locution  reste 
obscure.  Pour  le  commencement  du  vers  on  pourrait  proposer  En  vostre 
terre.  —  17  Substituer  trait  à  porte.  Ce  vers  revient  plus  loin.  —  18  Suppr. 
bons.  —  22  L'édition  porte  ikwins.  —  22  Corr.  reles.  —  2?  On  peut  rem- 
placer leîretnent  par  veire  ou  dreit.  —  24  Suppr.  sis  niés  et  dan.  —  26  Corr. 
ului. 


La  Chançun  de  Willamc  60} 

Tibaut,  soutenu  par  Estourmi,  persiste  dans  son  opinion.  Il  demande  du 
vin,  il  en  boit  avec  Estourmi,  et  on  va  se  coucher. 

Cependant  les  hommes  de  Tibaut  sont  convoqués.  Le  lendemain  il  y  en  a 
dix  mille.  Mais  Tibaut,  s'étant  éveillé,  se  mit  à  la  fenêtre  et  vit  la  terre  cou- 
verte de  Sarrasins  armés  (on  voit  que  le  poète  a  aussi  peu  de  souci  de  la 
géographie  que  Tauteur  ou  le  remanieur  du  Covenant  ou  à^Aliscans).  Il  com- 
mence à  s*inquiéter.  Vivien  remarque  que  Tibaut  est  devenu  sage  «  quant 
ad  dormi  assez  »,  et  il  conseille  d^attendre  Guillaume.  Mais  Estourmi  fait 
observer  qu*il  est  trop  tard  :  Guillaume  n'arriverait  pas  à  temps.  Tibaut 
monte  à  cheval,  suivi  de  ses  dix  mille  hommes,  pour  aller  combattre  Deramé 
(v.  146). 

Tibaut  invite  Vivien  à  monter  sur  un  tertre  pour  se  rendre  compte  de  la 
force  des  ennemis.  Celui-ci,  comme  il  arrive  généralement  en  pareil  cas  dans 
les  chansons  de  geste,  s'y  refuse  :  il  veut  se  battre.  Tibaut  monte  alors  sur 
le  tertre,  mais  il  en  redescend  épouvanté  du  nombre  des  Sarrasins,  et  dit 
qu'il  ne  combattra  pas  sans  Guillaume.  Vivien  s'entête  à  vouloir  livrer 
bataille  aux  Sarrasins  qui  sont  cent  mille'.  Mais  Tibaut  et  Estourmi  jugent 
que  la  prudence  est  la  meilleure  part  de  la  valeur  :  ils  arrachent  l'enseigne  de 
leur  lance,  par  crainte  d'attirer  l'attention  des  Sarrasins,  et  se  sauvent.  Vivien 
reste,  car  il  a  fait  le  serment  de  ne  jamais  reculer  devant  les  Sarrasins  : 

391     Jo  me  rendrai  al  dolerus  péril, 

N'en  turnerai,  car  a  Deu  l'ai  pramis 
Qjie  ja  *  ne  fuierai  pur  pour  de  mûrir. 

Ce  passage  est  important  :  nous  avons  là  un  témoignage  précis  sur  le  voeu 
de  Vivien,  qui  est  conté  au  début  du  Covenant.  Faut-il  croire  qu'il  a  existé 
un  poème  où  l'auteur  du  Cmmant  a  pris  cette  idée  du  vœu,  et  aussi  le  motif 
qui  amène  Deramé  à  faire  une  expédition  en  France?  Pour  le  vœu,  c'est 
probable,  mais  pour  le  motif,  j'en  doute.  L'expédition  de  Deramé  n'a  nul 
besoin  d'être  motivée,  et  tout  le  début  du  Covenant  me  fait  l'effet  d'avoir  été 
imaginé  ou  profondément  remanié  par  l'auteur  de  ce  poème. 

Les  Français  disent  à  Vivien  qu'ils  veulent  rester  avec  lui.  Vivien  les 
engage  à  se  retirer,  «  car,  dit-il,  vous  n'êtes  pas  mes  hommes  et  je  ne  suis 
pas  votre  seigneur.  Vous  pouvez  donc  me  quitter  sans  vous  parjurer.  » 
Toutefois  un  bon  nombre  d'entre  eux  restent  avec  lui.  11  y  a  ici  quelques 
vers  assez  bien  tournés  : 


1.  Il  y  a  ici  un  vers  qui  m'embarasse  :  il  est  dit  des  Sarrasins  :  Si  pur- 
pristrent  de  fors  la  certaine  terre  (229);  la  même  design  ition  revient  plusieurs 
fois.  Qu'est-ce  que  la  certaine  terre  ?  Nous  devons  être  à  peu  de  distance  de 
Bourges.  Y  a-t-il  quelque  rapport  avec  les  Desertois  de  Girart  de  Roussillon 
(voir  ci-dessus,  p.  y/Ç). 

2,  Suppr.  ja,  comme  au  v.  598,  pour  le  reste  identique  à  celui-ci. 


604  COMPTES    RENDUS 

Si  cum  H  ors  s'esmere  <  fors  del  argent. 
Si  s'en  eslistrent  tote  la  bone  gent  : 
550    Li  couart  s'en  vont  od  Tedbalt  fuiant, 

Od  Vivien  remisuent  tuit  li  chevaler  '  vaillant  ; 
Al  chief  devant  fièrent  comunalment. 
Si  cum  li  ors  del  argent  s'en  tume 
Si  s'en  eslistrent  tut  li  gentil  home. 

Pendant  ce  temps  Tibaut  fuyait  accompagné  de  Girart  [de  Commerci  ?] 
qui  était  monté  sur  un  a  roncin  ».  Ici  une  scène  d'un  comique  macabre  : 
Chemin  faisant  les  fuyards  arrivent  à  un  carrefour  où  il  y  avait  quatre  pen- 
dus. Ces  pendus  éuient  atuchés  à  des  fourches  très  basses.  Tibaut  heurte 
l'un  d'eux  avec  son  visage,  la  housse  de  son  cheval  en  est  toute  souillée.  Il 
s*empresse  de  l'ôter  de  dessous  lui  et  crie  à  Girard  de  la  ramasser.  Celui-ci 
n'en  veut  pas,  mais  il  prie,  sous  un  prétexte  quelconque,  Tibaut  de  s'arrêter, 
et  aussitôt,  l'ayant  rejoint,  il  le  jette  à  terre  d'un  coup  de  poing,  lui  enlève 
ses  armes  et  son  cheval,  et  court  rejoindre  Vivien  ».  A  noter  encore  ce  trait 
qui  fait  allusion  à  une  chanson  de  geste  antérieure  :  la  targe  qu'il  enlève 
ainsi  à  Tibaut  avait  été  prise  par  Vivien  à  un  «  hungre  », 

57)     En  la  bataille,  as  prcz  de[suz]  Girunde, 

Qpant  il  ocist  le  paen  Alderufe  4 

z  decolad  les  fiz  Burel  tuz  duze. 

Al  rei  tolid  celé  grant  targe  duble  ; 

Si  la  donad  a  dan  Willame  sun  uncle, 
580     r  il  la  donad  ad  Tedbalt  le  cuard  cunte. 

Autre  scène  comique  :  Tibaut  monte  sur  le  roncin  de  Girart  et  se  sauve  ;  il 
tombe  au  milieu  d'un  troupeau  de  moutons  ;  l'un  de  ces  moutons  se  prend 
dans  son  étrier,  la  tête  se  sépare  du  corps  et  Tibaut  arrive  au  pont  de 
Bourges  avec  cette  tête  de  mouton  accrochée  à  son  étrier  $.  Girard  cependant 
se  dirige  vers  le  lieu  de  la  bauille.  En  chemin  il  rencontre  Estourmi  qui 
fuyait,  et  l'engage  à  revenir  sur  ses  pas.  Estourmi  refuse  :  Girard  l'abat  d'un 


1.  Edit.  ses  uiere. 

2.  Suppr.  tuit  et  chevaler. 

3.  Cette  scène  est  reprise,  mais  en  des  conditions  qui  la  rendent  assez 
absurde,  dans  les  Enfances  Vivien  (éd.  Wahlund  et  H.  de  Feilitzen,  v.  3595, 
ss.). 

4.  Pour  A  del  rofe,  qui  est  une  forme  ancienne.  Ce  nom  se  trouve  déjà  dans 
Rolant. 

5 .  Il  est  fait  allusion  à  cette  scène  dans  les  Enfances  Vivien,  seulement 
Estourmi  remplace  Tibaut  : 

Puis  en  tist  il  coardie  si  grant 

Hn  la  bauille  W.  lou  vaillant. 

Ce!  jantil  home,  scignor,  dont  je  vos  chant, 

Voiant  .xx.  m.  chevaliers  combatans, 

S'an  loma  il  a  esperon  brochant 

A  son  destrier  .j.  mouton  traînant 

(Ed.  Wahlund  et  Feilitzen,  v.  580$  et  suiv.), 


La  Chançun  de  Willame  605 

coup  de  lance  avec  trois  côtes  brisées  (v.  421).  Puis  il  se  précipite  au  milieu 
des  Sarrasins  en  criant  Montjoie  I  «  l'enseigne  Ferebrace  »  (v.  447). 

Il  y  a  dans  le  Covenant  un  château  fort  construit  par  un  géant  a  comme 
tout  exprès  pour  servir  de  refuge  à  Vivien  »  »,  et  d'où  les  Français  font  une 
sortie  qui  n'est  guère  motivée.  On  a  déjà  relevé  Tabsurdité  de  cette 
conception  *.  Rien  de  pareil  dans  notre  poème.  Dans  le  Coi'enant  on  voit 
aussi  Girard  se  mettre  en  route  pour  demander  du  secours  à  Guillaume  et 
essayer  de  traverser  les  lignes  des  Sarrasins  en  se  faisant  passer  pour  Sarrasin. 
Cette  ruse  ne  lui  réussit  pas  :  il  est  obligé  de  revenir  auprès  de  Vivien,  pour 
repartir  ensuite,  et  cette  seconde  fois  il  arrive  à  se  frayer  de  vive  force  un 
chemin.  A  quoi  bon  cette  double  tentative  ?  à  quoi  bon  cette  ruse  mala- 
droite? Dans  le  nouveau  poème  Girard  se  rend  aussi  auprès  de  Guillaume» 
mais  en  des  conditions  bien  moins  invraisemblables,  et,  comme  on  le  verra, 
la  scène  ne  manque  pas  de  grandeur. 

Vivien  voit  ses  hommes  réduits  à  sept  cents,  puis  à  trois  cents  : 

Vivïen  cire  parmi  le  sum  d*un  tertre 
495     Tels  trei2  cenz  homes  vit  de  sa  )  tere. 
N'i  ad  icil  n*ait  sanglante  sa  resne 
r  d'entre  ses  quisses  n'ait  vermeille  [la]  sele. 
Devant,  as  braz,  sustenent  lur  boele. 
Que  lur  chevals  nés  desrumpent  par  tere. 

De  la  hauteur  où  ils  sont,  ils  font,  en  descendant,  une  charge  contre  les 

Sarrasins  : 

Del  munt  a  furent  sunt  a  val  avalé  ; 

Franceis  descendent  sur  le  herbe  al  pré. 

Virent  des  lur  les  morz  z  les  nafrez. 
520    Qui  dune  veïst  les  danccals  enseignez 

Lier  lur  plaies  z  estreindre  lur  lez, 

Dune  colpat  sa  hanste  qui  al  braz  fu  nafrez, 

Si  la  liad,  qu'il  la  poû[s]t  porter  ; 

Dune  but  del  vin  qui  Tad  el  champ  trové, 
525     Qpi  n'out  de  tel,  si  but  del  duit  troblé. 

Excités  par  Vivien,  ils  recommencent  à  charger.  Bientôt,  ils  sont  réduits 
â  vingt,  et  Vivien,  les  voyant  découragés,  les  engage  à  s'en  aller  ;  lui  res- 
tera fidèle  à  son  serment.  Ils  partent  en  effet,  mais  la  voie  leur  est  fermée 
de  tous  côtés  par  les  Sarrasins.  Ils  reviennent  à  Vivien  et  lui  disent  : 

616    Si  tu  t'en  turnes,  z  nus  nus  en  turneruns, 
z  se  tu  combatz  z  nus  nus  combateruns, 
z  que  que  tu  faces  ensemble  od  tei  le  feruns  4. 


1.  Jeanroy,  Romatiiay  XXVI,  182. 

2.  jeanroy,  Roin.y  XXVI,  188,  n.  2;  R.  Weeks,  Origin  of  tljt  a  Covenant 
Vivien  »,dans  The  Universityof  Missouri  Studies,  II,  123. 

3.  CoTT,  de  la  sue? 

4.  Ces  vers  sont  faciles  à  corriger  :  il  suffit  de  lire,  au  présent,  tumuns, 
comèatuns  (ou  de  retrancher  ei  au  premier  vers)  et  de  supprimer  des  mots 
inutiles  aux  deux  derniers  vers. 


6oé  COMPTES    RENDUS 

C'est  alors  que  Vivien  se  décide  à  envoyer  Girard  à  Guillaume.  Il  lui 
recommande  de  rappeler  à  son  oncle  les  services  qu'il  (Vivien)  lui  a  ren- 
dus :  à  Saragosse,  où  il  lua  »  le  paien  Alderufe  »,  à  «  Limenes  la  cité  » 
(Luiserne  ?),  au  «  champ  Turlenlerei(?)  »,  où  il  perdit  Raher,  son  fidèle. 
Enfin  vient  une  allusion  à  une  bataille  sous  Orange  : 

Se  lui  remenbre  de  la  bataille  grant 

Desuz  Orcnge,  de  Tedbald  Testurman, 

En  [la]  bataille  u  venquirent  [li]  Franc. 

Jo  vinc  al  tertre  od  Bernard  de  Bruban, 
670     Cil  C5t  mis  uncles  z  barun  mult  vaillant  ; 

A  compaignun  oi  le  cunte  Bertram... 

Od  Deu  aie  z  l'enseigne  as  Normanz. 

Celé  bataille  li  fis  jo  vcintre  al  champ  ; 
675     llocc  li  ocis  Tedbalt  lesturman. 

Il  lui  recommande  aussi  de  faire  armer  Guiot  son  petit  frère  (le  Guichardet 
du  Covmant).  Girard  pan  et  se  fait  voie  Tépée  au  poing.  Mais,  quand  il  a 
traversé  la  foule  des  Sarrasins,  «  sun  bon  cheval  li  crevé  suz  sa  celé  ».  Le 
voilà  à  pied  :  il  a  quinze  lieues  à  faire,  personne  à  qui  il  puisse  parler,  pas  de 
cheval  où  il  puisse  monter;  il  a  faim  et  soif.  Alors  il  est  contraint  de  se 
débarrasser  de  ses  armes.  La  scène  est  vraiment  épique  : 

715     «  Ohi  !  grosse  hanste,  cume  peises  al  braz! 

N'en  aidera[i]  a  Vivien  en  TArchamp 

Qui  se  combat  a  dolenis  ahan.  » 

Dune  la  lance  Girard  enmi  le  champ. 

«  Ohi  I  grant  urge,  cume  peises  al  col  ! 
720     «  N'en  aidera[ij  a  Vivien  a  la  mort.  » 

El  champ  la  getad,  si  la  tolid  de  sun  dos. 

«  Ohi  î  bone  healme,  cum  m'estunes  la  teste! 

N'en  aiderai  a  Vivien  en  la  presse 

Ki  se  cumbat  el  Archamp  sur  Terbe.  » 
725     11  le  lançad  z  jetad  cuntre  terre. 

Finalement  il  ne  garde  que  son  épée,  sur  laquelle  il  s*appuic  en  marchant. 

Pendant  ce  temps  Vivien  continue  à  se  battre  à  la  tête  de  ses  vingt  com- 
pagnons, qui  sont  tués  les  uns  après  les  autres,  et  il  reste  seul  contre  l'armée 
sarrasine.  U  finit  par  succomber  sous  le  nombre,  après  avoir  reçu  de  terribles 
blessures.  Les  Sarrasins  remportent  et  le  placent  sous  un  arbre  (v.  926). 

Nous  revenons  maintenant  à  Girard.  Ce  n'est  pas  à  Orange,  comme  dans 
le  Ccvtfunt,  qu'il  va  chercher  Guillaume,  mais  à  Barcelone;  seulement  on  ne 
voit  pas  bien  si  l'auteur  place  Barcelone  au  sud  ou  au  nord  des  P>Ténées  ■. 

Li  ^uons  Willame  ert  a  Barzelone. 
Si  tu  repcirc  d'une  bataille  lungc 
Qu'il  aveit  fait  a  BurJele  sur  Girunde; 
9;  >     Perdu  i  avcit  grant  masse  de  ses  homes. 
Este  vus  Girard  qui  noNcl[e|  li  cunte. 


I.  Plus   loin  nous  trouvons  Guillaume  i  Orange.  V  a-t-il  un  mèbn^ 
de  deux  rédactions  ? 


La  Chançun  de  Willame  6oj 

Il  semble  bien,  d'après  ce  passage,  quj  Baiwelone  ne  soit  pas  trop  loin  de 
Bordeaux.  Sûrement  Ténigmatique  Archavip  est  en  France,  s'il  faut  s*en 
rapporter  à  ces  vers  du  discours  que  Girard  tient  à  Guillaume  : 

960    Reis  Deraméd  est  eissuz  de  Cordres, 
En  halte  mer  en  ad  mise  la  flote, 
z  est  en  France  que  si  mal  desenorte  ' 

On  sait  que  dans  les  chansons  du  cycle  de  Guillaume,  VArchant  (ou  Alis- 
cans)  est  tantôt  placé  en  Espagne  et  tantôt  en  France  '. 

Girard  reproduit  fidèlement  les  paroles  de  Vivien.  Le  passage  indiqué  plus 
haut,  sur  «  Limenes  la  cité  »,  paraît  ici  plus  correct  : 

Sez  tu  que  te  mande  Vivien  le  ber? 
Ke  te  sovenge  de  Limenes  la  cité 
Ne  de  Breher,  le  grant  port  sur  mer  5 
990    Ne  de  Flori  qu'il  prist  par  pocsté. 

Guillaume^  voulant  éprouver  Guibourc  sa  femme,  feint  d'hésiter  à  aller  au 
secours  de  Vivien.  Guibourc  insiste  et  le  prie  de  mener  avec  lui  son  neveu 
Guischard,  qui  vient  d'être  adoubé  chevalier.  Guillaume  s'empresse  de  céder. 
Le  lendemain  il  adoube  Girard,  qui  n'était  qu'écuyer,  et  le  soir  il  part  à  la 
tête  de  trente  mille  hommes.  On  marche  toute  la  nuit,  et  le  lendemain,  au 
lever  du  jour,  on  arrive  à  TArchamp.  Les  Sarrasins  s'embarquaient  ;  ceux  qui 
étaient  à  terre  s'enfuirent,  car  ils  étaient  désarmés  (ce  qui  s'explique  mal). 
Ils  courent  à  leurs  navires,  prennent  leurs  armes  et  attaquent  Guillaume.  La 
bataille,  dit  le  poète,  qui  ici  s'abstient  de  tout  développement,  dura  du  lundi 
au  jeudi  matin,  et  aboutit  à  l'extermination  des  hommes  de  Guillaume  : 

1125     Des  homes  Willame  ne  remist  un  vif, 
Joesdi  al  vespre, 
Fors  trcis  cscuz  qu'il  eut  al  champ  tenir. 

Ces  trois  écus  sont,  outre  Guillaume  lui-môme,  Girard  et  Guischard.  Mais 
Girard  est  tué  :  le  poète  conte  sa  mort  en  une  quarantaine  de  vers.  Vient 
ensuite  le  tour  de  Guischard,  et  ici  il  y  a  un  trait  à  citer.  A  Guillaume,  qui 
lui  fait  entrevoir  les  joies  célestes,  il  répond  que,  s'il  pouvait  remonter  à  che- 
val il  irait  à  Cordres  où  il  est  né*  : 


1.  Pour  ce  vers,  cf.  ci-dessus  p.  602,  note  sur  le  v.  15. 

2.  M.  R.  Weeks  soutient  que  le  Coveuant  place  cette  localité  au  double 
nom  en  Espagne  {Romania,  XXX,  192,  193),  mais  les  passages  auxquels  il 
renvoie  sont  bien  peu  décisifs.  Je  ne  crois  pas  du  tout  à  l'explication,  proposée 
par  M.  Jeanroy  (/?ow/an/(Z  XXVl,  195),  de  VArchant  par  Afo«/<r  Argetito.  Je 
suppose  qu' Aliscatis,  bien  connu,  a  été  substitué  par  les  romanciers  à  l'an- 
cien Arclxint  ou  plutôt  Arcijamp.  11  y  a  toujours  Archaut,  Arclmis  dans  les 
Enfances  Vivien. 

3.  Il  y  avait,  au  v.  651  :  Xe  del  grant  port  al  rivage  de  mer. 

4.  Rappelons-nous  qu'il  est  neveu  de  Guibourc,  qui  était  sarrasine  de 
naissance. 


COMPTES    RENDUS 

1196     1  N'cQ  crtrreic  mcb  ea  voïïrc  Ddmpnedé, 
Car  ço  qiit  )0  tic  vd  ne  puis  lorcr  ; 
Car  SI  \o  eusic  MihQcnet  merciei 
Ja  ne  veïsjic  les  plaici  àt  m^s  costex,    • 

GuUïâume  h  blâme,  et  k  prend  sur  son  cheval  dernère  sa  selle.  Dans  cette 
position  linfortunu  Guischard  reçoit  un  dard  <^ui  Tachève.  «  Guillaume  ne 
fuit  pas»  dit  le  potite*  tu  ai  s  il  s'en  va  o  : 

1324     M'en  fyît  mie  Willame»  ainz  s*en  vt\%. 

n  s'en  va  jusqu'à  ce  qu'it  arrive  auprès  de  Guibourc,  Est-ce  à  Barcelone? 
On  ne  le  dit  pas,  et  la  suite  montre  que  cVsi  à  Orange.  Le  nîtour  est  conté 
sans  détails.  A  son  arrivée,  Guillaume  est  témoin  d'une  scène  asse/  imprévue, 
qui  toutefois  ne  paraît  pas  Tétonner  autrement.  Dame  Guibourc  a  convoqué 
par  messagers  ses  hommes»  et  la  mobilisation  s'est  opérée  avec  tant  de  rapi- 
dité que  déjà  trente  mille  sont  arrivés  dont  quinze  mille  sont  prêts  à  se 
battre  K  Elle  a  réuni  les  principaux  chefs  (ks  k  demeines  »)  et  leur  ofïre  un 
banquet.  Elîe-méme  sen  le  vin  et  leur  fait  dire  et  chanter  fables  et  chançons. 
Tout  à  coup,  regardant  par  une  fenêtre,  elle  aperçoit  Guillaume  portant  sur 
son  cheval  un  homme  mort.  Elle  suppose  que  le  mort  est  Vivien,  Mais  les 
barons  lui  disent  que  c'est  probablement  un  jongleur,  en  même  temps  bon 
combattant,  que  Guillaume  affectionnait*  Ici  un  éîoge,  assurément  hors  de 
propos,  de  ce  jongleur*  Mats  le  passage  est  bien  curieux  et  sera  dorénavant 
souvent  cité  : 

«  En  tote  Frijïce  n**d  ïj  bon  cîîânT(<lûr, 

N(e)  en  bataille  pins  hardt  fercûf  ; 
îjéù    t  de  la  gcïte  11  iâtdire  leï  chans^unsî 

De  Qodoveu  le  primer  empereur 

Qjie  en  duc«  France  crecic  en  Deu  nostre  Sd^nur, 

Z  de  sun  (li  Flovetii  le  poîgtieûr 

KL  (Cui  il  ?)  las$ad  èc  dtîke  Frmcc  Tontir, 
126%     t  de  tuî  le»  feis  qui  furtni  de  valur 

Trcsqi":  a  Pcpîu  h  petit  pDignear', 

t  dc'  Charieniitigne  t  de  Rolsni  suii  nevou. 

De  GIratrd  de  Vîane  z  d'OHver  qni  fu  lant  prouz..,  1 

Guibourc  cependant  va  au-devant  de  son  époux  et  voit  Guischard  mort. 
Elle  réconforte  GuilLiumc  qui  se  lamente  d'avoir  quitté  k  champ  de  bataille 
où  tous  $e^  hommes  ont  péri,  et  dît  des  paroles  héroïques  : 

Mielz  voîl  que  mottgeji  en  t'Archunp  sur  mer 
ijaç     Que  ton  lignage  *€it  par  tei  avilc 

Ne  «prè»  ta  mort  a  tes  heîra  reprovè. 


ï.  Et  les  autres,  de  quoi  senn;nt-ils?  la  m^c  idée  revient  au  moins  deux 
fois,  dans  les  mêmes  termes  :  vv.  109^-1100,  et  12^^-4. 
2.  Cf.  G*  Paris,  Hist.  poii,  di  Cèmruffmgnt ^  p.  jaj. 


La  Chançun  de  Willanu  609 

Mais  Guillaume  lui  répond  en  pleurant  qu'il  est  trop  tard  pour  recom- 
mencer la  bataille.  Avant  qu'il  ait  pu  rassembler  une  nouvelle  armée,  les 
Sarrasins  se  seraient  rembarques  ».  Il  reprend  courage  lorsque  sa  femme  lui 
dit  qu'elle  a  déjà  réuni,  dans  le  palais,  trente  mille  hommes.  Ht,  s'adressant  à 
ceux-ci,  elle  leur  promet  des  terres,  çt  même  des  femmes,  s'ils  veulent  aller 
en  TArchamp.  Guillaume,  cependant,  prend  abondamment  la  nourriture  dont 
il  a  grand  besoin.  Puis  il  dit  à  Guibourc  :  «  Qui  tiendrait  ma  terre,  si  je 
mourais?  »  —  Alors  se  lève  son  neveu  Gui,  fils  du  marquis  Beuve  Cornebut 
et  de  la  fille  du  preu  comte  Aimeri  ;  c'était  le  jeune  frère  de  Vivien,  il  n'avait 
pas  encore  quinze  ans.  C'est  lui  qui,  si  Guillaume  meurt,  tiendra  la  terre  et 
servira  Guibourc.  Guillaume  le  repousse  d'abord,  mais  enfin  il  s'attendrit  et 
lui  dit  : 

1477     «  \  la  foi,  nies,  sagement  as  parlé  : 
Cors  as  d'enfant  z  si  as  raisun  de  ber]; 
Après  ma  mort  te  scit  m  un  feedoné.  ■ 

Le  lendemain  malin  Guillaume  se  met  en  route  avec  ses  trente  mille 
hommes.  Mais  Guiot  se  désole  d'avoir  été  laissé  en  arrière  :  il  veut  à  toute 
force  rejoindre  son  oncle.  Guibourc  refuse  de  le  laisser  partir  :  Guillaume  ne 
le  permettrait  pas.  Elle  finit  par  céder  quand  le  jeune  homme  lui  dit  : 

1555     «  Jo  sai  mentir  :  si  li  voldrai  cunter 

Que  )0  vus  sui  tut  par  force  eschapé.  • 

On  donne  au  jeune  homme  des  armes  proportionnées  à  sa  taille  ;  il  part 
avec  ses  écuyers  et  le  lendemain  arrive  en  l'Archamp  au  moment  où  Guil- 
laume haranguait  ses  hommes  (à  noter  qu'il  fliit  deux  discours  distincts  :  l'un 
aux  «  demeines  »,  l'autre  aux  «  vavasseurs  »).  Guiot  dit  à  son  oncle,  étonné 
de  le  voir,  qu'il  s'est  échappé,  malgré  Guibourc  *. 

Au  moment  où  les  Français  fondent  sur  les  Sarrasins,  ceux-ci,  qui  ne  s'at- 
tendaient guère  à  une  nouvelle  attaque,  étaient  en  train  de  manger.  Ils  s'en- 
fuient vers  leurs  navires,  laissant  leurs  tables  chargées  de  mets,  et  vont  prendre 
leurs  armes  ;  c'est  la  même  scène  que  plus  haut.  Tout  allait  bien  pour  Guil- 
laume et  les  siens,  quand  Deramé,  sortant  d'un  c  aguait  »,  se  précipite  sur 
eux  avec  quinze  rois,  et  inflige  une  défaite  complète  aux  Français.  Jusqu'ici 
nous  avons  rencontré  peu  de  noms  propres.  Mais  en  cet  endroit,  les  quuize 


1 .  Il  y  a  dans  le  discours  de  Guillaume  une  assertion  bien  surprenante  : 
TriU  ceni  an^  ad  z  cinquante  passe^   \    Que  jo  sui  prinus  de  tna  mère  ue^.   | 
VHl  sui  z  jehhy  ne  puis  armes  porter.  Ces  vers  doivent   être  l'addition  d'un 
copiste. 

2.  Dans  le  Covenauty  Guischardet  échappe  réellement  à  la  surveillance  de 
Guibourc,  qui  toutefois  le  fait  suivre  et  ootient  qu'il  revienne  sur  ses  pas,  lui 
promettant  de  lui  donner  des  armes  et  de  le  faire  adouber  chevalier,  ce  qui  a 
lieu  en  effet  (Jonckbloet,  t.  I,  p.  195-6). 

RtwwM,  XXXIL  }9 


élO  COMPTES   REXDUS 

rob  Kmt  nommés,  comme  aussi  quelques-uns  des  guerriers  firaoçais.  Qmune 
ces  noms  peuvent  servir  a  établir  les  rapports  des  dîven  poèmes  relatifs  à 
Guillaume,  je  citeni  le  passage  : 

Li  qooos  Wîllajne  l'cûst  donc  ben  (^l, 
ijo'f     A  grant  bon  or  Teôst  Dauipocdeo  atrait  ', 

Qoaat  Dcramé  li  sait  d*ao  agoai:, 

Od  loi  .XV.  rets  qoe  )o  nomer  vos  sai  : 

Eocas  de  EgîpCc  x  li  reî  Ostramai, 

Butifer  li  proz  r  H  iiorz  Cannais, 
1710    Torlen  de  d*Asturges  '  z  sis  niés  AUais, 

Nobles  de  Inde  z  Andcr  li  persans, 

Aristctgoc,  Caboel  z  Morans, 

Clamador  z  Salvains  z  Varians 

z  M  reis  de  Subie  z  li  guerreres  Tomas  ; 
171  )     Chascon  d'els  out  mil  bornes  de  sa  pan  ; 

Si  manguent  b  gent  cum  dragon  r  leppart. 

En  bataille  ferent  sanz  nol  regart  : 

Li  uns  les  meine  (menjue  ?)  qoant  li  altie  les  abat. 

Hoimês  irront  Fraoceis  a  dolents  ahan  : 
J  720     La  fu  pris  le  nevou  Wilbme  Bcrtram, 

z  Guielin  7  li  vaillant  qoons  Guischard, 

Galter  de  Termes  r  Réiner  le  combatant. 

Estreit  les  ont  liez  Sarazins  c  Persant, 

Vcant  le  conte  les  mènent  as  chalans, 
172)     Que  unqoes  de  rien  ne  lor  poet  estre  garant. 

Tuz  sont  Franceis  pris  z  mon  al  champ. 

Fors  soi  Willame  qui  ferement  se  combat 

c  Goiot  sis  niés  qui  li  vait  adestrant. 

C'est  la  répétition  du  désastre  que  Guillaume  a  éprouvé  précédemment  ;  et, 
ce  qui  augmente  encore  Tinvraiieniblance,  c'est  que  les  Français  qui  sont  au 
nombre  de  trente  mille,  sont  anéantis  par  quinze  mille  Sarrasins  seulement, 
si  le  texte  est  correct  (v.  171 5).  Des  cinq  Français  ici  nommés,  quatre  sont 
connus  d'ailleurs  J  ;  teul  Reirur  est  un  nouveau  nom.  Ce  peut  être  le  comte 
Renier  des  Enfanus  Vivien. 

Guiot  (ici  appelé  Gui)  se  prend  à  pleurer.  Guillaume  lui  demande  pourquoi. 
Guiot  répond  qu'il  meurt  de  faim,  il  n'a  plus  la  force  de  manier  ses  armes  ni 
de  gouverner  son  cheval.  Guillaume  lui  conseille  d'aller  à  l'endroit  où,  limdi 
(on  cuit  au  mercredi,  v.  1779),  ^^s  ont  trouvé  les  Sarrasins  à  uble.  Li,  il 
pourra  se  réconforter.  Pendant  que  Guiot  mange,  Guillaume  se  bat  tout  seul. 
11  allait  succomber  sous  le  nombre  quand  Guiot  vient  à  la  rescousse.  Tous 
deux  accomplissent  d'étonnants  exploits,  et  mettent  les  Sarrasins  en  flûte  «. 
Ce  n'est  pas  sans  cause  que  le  poète  nous  dit  : 

1.  Corr.  trait. 

2.  Lire  '/'.  d'Asturges. 

3.  Jcanroy, /?o/fwin/tf,  XXVI,  184. 

4.  Je  ne  sais  si  ce  n'est  pas  à  cet  épisode  qu'il  convient  de  rapporter  l'allur 
sion  d'Arnaut  Daniel  (Dout^  hrais)  :  Lai  on  estai  midon^^  don  ai  granjam  — 
Cane  non  Foetal  h  nehoti  sain  Guiîlcm.  G.  Paris,  dans  une  note  pubuée  pa- 


La  Chançun  de  Willame  6ii 

1857     Ço  fu  graiit  miracle  que  Nostre  Sire  fist  : 
Pur  un  sul  home  en  fuirent  vint  mil. 

Ils  étaient  deux,  mais  c'est  tout  de  même  un  miracle.  Les  Sarrasins  partis 
et  rembarques,  Guillaume  se  rencontre  avec  Deramé,  et  d'un  coup  d'épée  lui 
coupe  la  cuisse.  Ici  un  curieux  épisode.  Guiot,  voyant  Deramé  remuer,  lui 
coupe  la  tête  : 

De  ccle  chose  se  corozat  mult  Willame  : 

«  A  !  glut  lecchere,  cum  fus  une  tant  osé 
1965     Que  home  maigne  >  osas  adeser? 

En  halte  curt  te  serrad  repruvé.  » 

Ço  respunt  Guiot  :  «  Une  mais  n*oï  tel  ; 

S'il  n'aveit  pez  dunt  il  peiist  aler 

Il  aveit  oilz  dunt  il  poeit  veer  ', 
1970     Si  aveit  coilz  pur  enfanz  engendrer; 

En  Sun  païs  se  fercit  uncore  porter. 

Si  en  istereit  eir  Deramé 

Qu'en  ceste  terre  11  us  querreit  malté. 

Tut  a  estrus  se  deit  hom  délivrer.  » 

«  Tu  parles  sagement  »  reprend  Guillaume  :  Cors  as  d'enfant  z  raison  as 
de  ber. 
C'est  alors  que  Guillaume  trouve  Vivien.  Il  avait  quinze  blessures; 

1995     De  la  menur  fust  morz  uns  amiranz  '. 

Guillaume,  le  croyant  mort,  le  «  regrette  »,  selon  l'expression  du  moyen 
âge.  Il  rappelle  le  vœu  imprudemment  fait  par  son  neveu  : 

«t  N'ad  uncore  guère  que  tu  fus  adubé. 
Que  tu  plevis  z  juras  Dampnedeu 
2020    Que  ne  fuercics  de  bataille  champel. 
Puis  covenant  ne  vousis  mentir  Deu  : 
Pur  ço  ies  orc  mort,  ocis  z  afolé. 

Mais  Vivien  reprend  ses  sens  pour  un  instant,  et  Guillaume  lui  donne  du 
pain  bénit  qu'il  avait  en  son  aumônière.  C'est  à  peu  près  la  scène  d'Aliscans 
(éd.  Guessard,  p.  24-6). 

On  croit  la  bataille  finie  :  voici  qu'elle  recommence  de  plus  belle.  Guil- 
laume place  le  corps  de  Vivien  sur  son  cheval,  pour  le  porter  à  Orange  ♦, 


Canello  (p.  234  de  l'édition  d' A.  Daniel)  rapporte  ces  vers  à  un  passage  des 
Enfances  Vivien,  et  suppose  par  conséquent  que  le  «  neveu  saint  Guillaume  » 
du  troubadour  est  Vivien,  mais,  tout  bien  examiné,  j'incline  plutôt  à  croire 
que  Daniel  a  visé  le  présent  épisode  de  notre  poème. 

1.  Corr.  Que  mehatgnéfxmie. 

2.  Rime  introduite  par  le  copiste  anglais. 

5.  Ce  vers,  qui  reparaît  plus  loin,  est  fréquent  dans  les  chansons  de  Guil- 
laume (Covenant  1409;  AliscanSy  éd.  Guessard,  690,  727,  etc.). 
4.  A  Orange,  non  pas,  comme  on  s'y  attendrait,  à  Barcelone. 


6 12  COMPTES  KEXDCS 

lorsque  quÎQzt  rois  samsîns  '  se  jcnen:  sur  lui.  TobUgem  de  déposer  à  tenc 
k  coq»  de  Vhîen,  et  se  siwîssein  de  Gnkx  qaTh  cmméiiait  pnsoomer. 
Pub  suniem  v  Aldcnife  *.  Guillaume  k  bksse  griévanem,  il  im  prend  soo 
cheval  «  Florescek  «  '.  Id  b  comparaisoa  avec  Afiscans  est  îutéicssjnte. 
Cmaîns  vers  som  scmMaHes  de  pan  et  d'autre  : 

2x28    Jambes  kréef  diet  H  mnckis  ^lUaflie 
z  Aldcmie  trctockc:  sor  Fcrbe. 


214)     Tok  la  qœiK  11  dœvcnd  dd  bo, 
I>e  dnai  Terbc  est  b  pié  duà. 

Comparez  Aîiicams  (Guessard)  : 

1247    Gamba  kvécs  GoîllanK-s  trebodia 
El  Aeroâes  a  terre  irrcna. 

1 5O)     Toate  la  quiMc  li  dcsem  don  bo, 
Eopaist  k  bien,  cmrcn  Ta  abatc. 

Mais  les  différences  soot  considérables  et  conduisent  à  une  coodusion  que 
je  formulerai  en  peu  de  mots  :  k  rédt  d'Aliicans  csa  très  dévdoppé,  on 
pourrait  dire  délayé,  mais,  d'autre  part,  k  récit  que  nous  trouvons  dans  b 
chanson  de  Guillaume  sembk  écourté  :  ks  faits  ne  sont  pas  modvés.  Ainsi 
dans  l'un  et  Tautre  poème,  un  dialogue  s'engage  entre  k  sarraân  et  Guil- 
laume, mais  dans  notre  chanson  on  ne  voit  pas  à  propos  de  quoi  Guillaume 
dit  à  Alderufe  : 

2106  •  Sarrazîn  frcrc.  quant  tu  te  vols  combatrc, 
Ke  roc  dites  orc  de  qod  chose  me  blâmes  : 
Si  t'ai  (ait  tort  prcst  su i  que  dreit  t'en  face, 
Sil  vols  reccivre,  jo  t'en  doins  mun  gage.  • 

Car  enfin  sarrasins  et  chrétiens,  depuis  k  commencement,  ne  font  que  se 
massacrer  sans  aucun  scrupule.  Dans  AliKuns  (y\\  1185  et  suiv.)  cet  échange 
insolite  de  paroles  s'explique  beaucoup  mieux  :  Aerofle  est  accompagné  d'un 
certain  Danebur,  Guillaume  les  voyant  venir  sur  lui  leur  dit  qulls  auront 
peu  de  mérite  à  se  mettre  deux  contre  un,  et,  en  fait,  les  deux  Sarrasins 
combattent  l'un  après  Tautre,  et  c'est  seulement  lorsque  Danebur  est  tué 
qu'.\erofle  entre  en  lice.   Le  dialogue  est  donc  introduit  d'une  façon  plus 


1 .  Voici  leurs  noms  :  Nlathamar,  Daver,  Bassumet,  (Baffumet  ?)  De£uné, 
Soldan  d'-Afrique,  Eadùel,  Aelran,  Aelrcd,  Sacealme,  Alfame,  Desturbéd, 
Golias,  Andaflc,  Wanibléd.  Quelques-uns  de  ces  noms  se  retrouvent,  avec  de 
légères  différences  dans  Aliscam  (Guessard,  p.  31-2;  Jonckbloet,  p.  24})  : 
Matamars,  Gasteblé,  Balfumc,  .\erans,  Aemé  (au  Aenrez). 

2.  Remarquons  (jue  les  deux  adversaires,  avant  de  se  banre,  commencent 
par  discuter  les  mérites  relatifs  de  Dieu  et  de  Mahomet ,  conmie  GuiUaumc  et 
«Corsoh  dans  le  Couronnement, 


La  Chançun  de  Willame  613 

naturelle.  Les  différences  entre  les  deux  récits  sont  d'ailleurs  assez  grandes. 
Dans  la  chanson  de  Guillaume,  le  héros,  ayant  pris  le  cheval  d*Alderufe,  qui 
vaut  mieux  que  le  sien,  tue  ce  dernier  (Balcan)  et  lui  fait  une  sorte  d*oraison 
funèbre  en  ces  termes  : 

216)     «  Ohi  !  Balcan.  a  quel  tort  t'ai  ocis  I 
Si  Deu  m'ait,  une  nel  forfesis 
En  nule  guise,  ne  par  nuit  ne  par  di. 
Mais  pur  ço  l'ai  fait  que  n'i  munte  Sarazin.  » 

Dans  Aliscans  Guillaume  lui  enlève  le  frein,  la  selle,  l'armure  du  poitrail, 
pour  que,  malgré  ses  blessures,  il  puisse  le  suivre.  Encore  une  remarque  : 
dans  AHscans  Aerofle,  blessé  gravement,  demande  à  Guillaume  de  lui  lais- 
ser son  cheval  Folatisse  (qui  ne  peut  plus  guère  lui  être  utile),  et  offre  en 
échange  de  lui  rendre  ses  neveux  prisonniers.  Guillaume  croit  que  c'est  une 
ruse,  et  refuse.  C'est  alors  qu'il  coupe  la  tète  au  Sarrasin.  Dans  notre  poème 
Alderufe  se  contente  d'offrir  à  Guillaume  quatre  fois  le  pesant  d'or  de  son 
cheval. 

Guillaume  se  remet  en  route  sur  le  cheval  enlevé  à  Alderufe,  et  arrive  à 
Orange  poursuivi  par  les  Sarrasins.  Cela  est  dit  en  quatre  vers,  tandis  que 
dans  Aliscans  le  héros  fait  quelques  mauvaises  rencontres  dont  il  n'est  pas 
question  ici.  Arrivé  à  Orange,  il  se  nomme,  mais  le  portier,  le  voyant  revêtu 
d'armes  païennes,  se  méfie  et,  au  lieu  de  lui  ouvrir  la  porte,  va  avertir 
Guibourc.  Or  il  n'a  pas  été  dit  que  Guillaume  se  fût  revêtu  des  armes  d' Al- 
derufe, ce  qui  permet  de  supposer  une  lacune  aux  environs  du  vers  21 57.  Ce 
changement  d'armure  est  au  contraire  dûment  noté  en  son  lieu  dans  Alis- 
cans. La  scène  entre  Guillaume  et  Guibourc  est,  en  somme,  la  même  dans 
les  deux  poèmes,  sauf  qu'elle  est  bien  délayée  et  exagérée  dans  Aliscans. 
Les  différences  sont  à  l'avantage  de  notre  poème.  Guibourc,  après  avoir 
envoyé  son  mari,  qu'elle  ne  reconnaît  pas  encore,  se  battre  contre  des  Sarra- 
sins qui  passaient  en  vue  des  murs  d'Orange,  et  qui,  le  prenant  pour  Alderufe 
dont  il  porte  les  armes,  ne  se  défendent  guère,  Guibourc,  dis-je,  veut  une 
preuve  nouvelle  avant  de  se  décider  à  ouvrir  la  porte  : 

2306     Li  gentil  conte  revint  a  la  cité  : 

«  El  Guiburc  dame,  me  larrex  vus  entrer! 

—  Nenil  >»,  dist  elc,  •  parla  fei  quedei  Deu, 

Se  ne  me  mustrcz  la  bosce  sur  le  nés 
2310    Que  avcit  Willame  le  marchiz  od  le  curb  nés. 

De  la  bataille  reis  Tebald  l'escler»  ; 

z  plusors  homes  se  resemblent  assez 

De  vasselage  c  de  nobtlitez, 

c  je  sui  suie,  od  mei  n'ad  home  nez 
231  s     Fors  cest  porter  que  ci  ester  vecz.  » 

I.  D'après  le  Oxtrroi  de  Wimes  (mon  Reçue  il  y  p.  243)  et  le  Couronnement  de 
Louis,  Guillaume  aurait  eu  la  blessure,  cause  de  sa  difformité,  dans  sa  lutte 
avec  Corsolt;  dans  Aliscans  (p.  123)  celui  qui  a  ainsi  blessé  Guillaume  est 
«  Isoré  de  Monibrant  ».  Cf.  Langlois,  Couronnement,  p.  Ixxxij. 


6  14  COMFTES   RENDUS 

Guillaume tftiléve  son  heaume  et  se  hit  reconmîtrei,  et,  après  cette  épreuve 
décisive,  Guibourt:  le  fait  entrer.  Dati^  Almittts  au  cotitriiire  (éd.  Guessard, 
p*  îi),  c'est  quaod  Guillaume  a  enlevé  son  heaume,  quand  par  conséquent 
il  ne  peut  subsister  aucun  doute  sur  son  identitcS  cjue  Gutbourc  Tenvoie  se 
battre  contre  les  Sarrasins.  L'ordre  des  faits,  tel  qu*il  se  présente  dans  notre 
poème,  me  parait  beaucoup  plus  naturel. 

La  scène  qui  suit  est  fort  belle  :  elle  a  plus  de  grandeur  dans  b  chanson  de 
Guillaume  que  dansv^//ifa*w.  «  Sire,  m  dit  Gutbourc,  v  qu  as-tu  faiï  de  Vivien  ? 
—  n  est  mort.  —  Sire,  qu*as-tu  fait  de  Bertran»  le  tils  de  Bernard  de  Brus- 
bati  ?  -^  Il  s'est  battu  en  quin/c  «  estours  »  ;  au  sei^^ième,  son  cheval  fut  tué, 
et  les  Sarrasins  l'ont  faît  prisontîïer,  —  Sire»  qu'as-tu  fait  de  Guioi?  —  Il  a 
porté  le  gonfîmon*  Au  seistièmc  «  estour  »  les  Sarrasins  l'ont  pris*  —  Sire, 
quWtu  fait  de  Gautier,  de  Guieîin,  du  comte  Reinicr  ?  —  Les  païens  les 
tiennent  enchaînés  dans  leurs  navires.  »  Dans  .^^/itEi^ii.Guibourc  groupe  toutes 
ses  interrogations  en  une  phrase  :  «  Sirc^  où  est  resté  Bertran^  et  Guielin  et 
Guichard..*  »  L'effet  est  moindre. 

Viennent  ensuite,  dans  la  chanson  de  Guillaume^  quelques  vers  qui  sont 
vraiment  beaux,  et  qui  n'ont  point  leur  équivalent  dans  Jlismm,  Guillaume 
et  Guibourc  montent  dans  la  salle.  Ils  n'y  trouvent  personne  pour  les  servir, 
C'est  Guibourc  qui  apporte  Teau  et  la  «  tuaille  w*  Ils  s'assiéent  ù  la  table  la 
plus  basse  1  n'ayant  pas  le  cœur  de  prendre  leur  place  â  la  liauie  table. 

i}9l     T1  vdi  les  bancs,  les  forme»  z  les  ubles, 
La  11  folcÎT  iCcT  suû'^ram  barnage» 
Il  tie  vit  nul  juer  par  ccle  sait 
Ne  déporter  oJ  eschts  tic  oâ  tabks, 
Ptiî»  les  regrete  eu  m  gentil  home  deîl  faire, 

Guillaume  se  désole  ;  il  parle  de  se  rcdrer  a  Saint-Michel  en  péril  de  mer 
ou  dans  quelque  hermitage  au  fond  d'un  bois»  tandis  que  Guibourc  se  fera 
nonne  voilée.  Celle-ci  pféfèrc  attendre  ; 

Ï419     •  Sire  tf  âiii  c\t,  v  (o  ferum  nus  as^i 
Qu^nt  BUS  avrum  tiostrc  siècle  mené.  ■ 

Elle  lui  conseille  d'aller  à  Laon  demanda  secours  à  l'empereur.  —  «  Mais, 
répond  Guillaume,  les  v  Amoravinz  et  Pîncenars  et  Turs  »  m'auront  bien- 
tôt pris  ce  bon  palais,  Qjii  le  défendra?  *^  Guibourc  réplique  (cf.  Aiiscantt 
p'eo): 

244}     ■  Sire  •,  dise  t'ie.  ■  Jhesii  r  ses  vertut 

7  set  cens  dames  i^iie  i«i  çaeitit  t  plus  : 

As  dos  avroni  le*  bbncs  liaîbcrc*  TC^tui 

t  en  luf  cher»  lle^l  vcn  hculmcs  a^uz  ; 

Si  esterniiit  â:«  hàCAillËS  ia  sut; 

Ljincerunt  bu  ce  s,  peres  t  pçh  agui; 

En  petit  de  hure  serrA  ^;ù  trescoru, 
34 10    Si  Deus  le  ^oltt  si  Hrrad  le  lociir  venu,  > 


La  Chançun  de.  Willanu  615 

Le  voyage  jusqu'à  Laon  est  conté  en  une  vingtaine  de  vers  :  nulle  trace 
des  épisodes  qu'on  lit  dans  Aîiscans.  Il  est  dit  simplemeut  que  Guillaume 
avait  pour  écuyer  un  enfant  âgé  de  moins  de  quinze  ans.  La  grosse  lance  et 
Técu  étaient  bien  lourds  pour  cet  enfant.  Aussi  Guillaume  portait-il  lui-même 
ses  armes.  Seulement,  quand  on  rencontrait  un  «  rumi  »,  pèlerin  ou  un  mar- 
chand, quand  on  arrivait  à  une  ville  ou  à  un  château,  il  les  repassait  àTenfant. 
On  arrive  à  Laon.  Ici  le  récit  est  beaucoup  plus  simple,  beaucoup  moins  enjo- 
livé d'épisodes  plus  ou  moins  amusants  que  dans  Aîiscans.  Guillaume  est 
reconnu  des  «  bachelers  légers  »  à  qui  il  avait  coutume  d*apporter  de  l'or 
d'Espagne.  Mais  cette  fo's  il  n'a  rien  à  leur  donner.  Il  leur  conte  le  désastre 
qu'il  a  subi  en  l'Archamp.  Aussitôt  les  bacheliers  le  quittent  et  vont  se  mettre 
à  table  ».  —  «  Où  est  Guillaume?  »  dit  Louis.  —  Sire,  il  est  resté  au  perron. 
Les  vifis  diables  nous  l'ont  amené.  —  Allez  vite  le  chercher  et  ne  le  plaisantez 
pas.  »  Guillaume  monte;  le  roi  l'accolle,  le  fait  asseoir  à  table.  Guillaume, 
ayant  mangé,  conte  son  histoire  et  demande  du  secours.  Louis  répond  qu'en 
ce  moment  il  ne  peut.  Fureur  de  Guillaume,  qui,  jetant  son  gant  aux  pieds 
du  roi,  reprend  son  hommage.  Mais  divers  chevaliers  (Rainaud  de  Poitiers, 
Hemaud  de  Gironde,  Aimeri  (Neifnert)  de  Narbonne,  Garin  d'Anséune,  Beuve 
de  Commerci,  Hemaud  le  Fleuri,  Guibelin,  Baudouin  de  Flandres)  pro- 
mettent leur  concours.  Le  roi  dit  alors  :  «  J'irai  aussi,  avec  trente  mille 
chevaliers.  —  Ne  faites  pas  cela  !  »  dit  la  reine.  «  Dame  Guibourc  est  née  en 
•  paîenie  ».  Elle  sait  maint  art,  elle  se  connaît  en  herbes,  et  ne  tarderait  pas 
à  vous  empoisonner  :  Guillaume  serait  roi  et  Guibourc  reine  *.  » 

Ici  la  scène  de  violence  qu'on  connaît  par  AIiscafts(p.  85).  Elle  est  un  peu 
moins  violente  que  dans  le  remaniement,  et  aussi  il  faut  le  dire,  moins  bien 
écrite.  Il  y  a  cependant  quelques  vers  bien  frappés  : 

Ot  le  Willamc,  a  poi  n'esraga  de  ire  : 

«  Qufe]  as  tu  dit?  Dampn^deu  te  maldiel 
2598     Pute  reïne,  vus  fustes  anuit  ivre... 

Pute  reïne,  pudneisc,  surparlere. 

Tedbald  vus  fut  »,  le  culvert  lecchere 

z  Esturmi  od  la  malveise  cliere. 
2605     Cil  deùssent  garder  rArcham  de  la  gent  paenc  : 

Il  s'en  fiûrent.  Vivien  remist  arcre. 

Plus  de  cent  presters  vu  sont  ben  coillifé]e(?). 

Forment  vus  unt  celé  |en|clume  chargée. 

Une  n'i  volsistes  apcler  chamb|e|rere. 
2610     Pute  reïne,  pudneise.  surparlere, 

Miex  li  vcnist  qu'il  t'oïist  decolée. 

Qpant  tote  France  est  par  vus  avilée. 

1.  Cet  épisode  se  retrouve  dans  AHscans  (p.  73),  mais  très  surchargé  et 
mal  introduit. 

2.  Dans  Aîiscans  aussi  (p.  84)  la  reine  élève  des  objections,  mais  en  termes 
peu  précis.  Il  y  a,  dans  les  Enjauccs  Guillaume  {H ist.  litt.^  XXII,  475-7)  un 
Dcl  échantillon  des  «  arts  »  que  possédait  Orable. 

3.  Je  ne  crois  pas  que////  soit  ici  le  prêt,  du  verbe  estre. 


6l6  COMPTES   RENDUS 

Cluatiï  tu  [te]  sci  as  chauJcs  çhimmées, 

e  tu  mangues  tes  puddus  en  pevrée^* 
i6i  5     z  beîs  tuii  vin  as  coïpes  (i.  copv%)  covcrcléc^, 

Q^aot  es  i:ûlçbè|e}  ben  ca  ^euietée  (/,  acovctée). 

Si  i€  fais  fuïrt!  a  b  }amhe  levttï 

Ces  kccheûrs  fe  donerit  ^nnt  cûlée», 

c  nus  en  traiuni  les  maki  matinées, 
36:^0     Si»  rcct'vom  les  bun  t  ks  colées, 

Euï  en  rArchanipks  ianglaotei  tesit[cls. 

Si  jo  trai  fors  del  feore  ccsie  cspit, 

Jm  vuji  awfti  cek  teste  colpée  I  • 

Et  II  avait  déjà  a  demi  tiré  Tépée  hors  du  fourreau  (le  geste  a  été  exagéré 
dans  VJitscdtis),  quand  Aimeri  de  Narbonne  l^arrcte.  Le  roi  s*cngage  à  four- 
nir vingt  mille  hommes  qui  s'ajouteront  aux  contingents  déjà  promb  par  les 
parents  et  amis  de  Guillaume.  Au  bout  de  huit  jours  h  grande  osi  est  assem* 
blée^  el  on  pan.  Tout  cela  est  conté  vivement  et  sans  les  scènes  de  remplis- 
sage qui  encombrent  l'action  dans  AHstans. 

Au  moment  où  Tost  se  met  en  marche,  survient  un  garçon  de  cuisine,  nus 
pîcds  et  portant  sur  son  épaule  un  «  t'mel  »>  st  pesant  qu'aucun  homme  ne  te 
pourrait  soulever.  C'est  t  Reneward  o  qui  demande  à  Guillaume  la  faveur  de 
l'accompagner  n  à  la  bataille  de  TArchamp  sur  la  mer  o  (36>4).  ti  Si  vous 
m'v  mencïj  dit-il^  je  vous  vaudrai  plu^  que  quinze  de  vos  pairs  ^  >ï  GuU- 
laume,  après  quelque  hésitation,  finit  par  Taccepter,  et  lui  offre  des  armes. 
Reneward  refuse  :  il  préfère  son  tineL  Puis  il  va  demander  congé  au  maître 
queux^  qui  veut  Tera pécher  de  panir.  Reneward  le  tue.  Puis  il  court  au 
pavillon  de  GuUbume  et  là  se  met  à  faire  ta  cuisine ^  mais  on  k  fait  trop 
boire^  et  pendant  son  sommeil  on  lui  cache  son  lîneL  A  son  révei!,  il  est 
furieux  et  tue  deux  hommes.  On  lui  rend  alors  son  arme  On  pan,  et  René* 
ward  suit  l'armée,  quand  il  s  aperçoit  que,  dans  sa  précipitation,  il  a  oublié 
le  tinel.  —  «  Je  vais  l'envoyer  chercher  n,  dît  Guillaume.  Mais  celui  quHl 
charge  de  cette  mission  n*anive  pas  mcmc  â  le  soulever,  et  Reneward  est 
obligé  d 'aller  lui-même  le  chercher.  Ces  scènes  ^  retrouvent,  mais  sînguUè* 
rement  allongées  et  poussées  jusqu'à  la  caricature  dans  Alismns  f,  où  sont 
introduits  d  autres  épisodes  très  peu  vraisemblables,  tels  que  celui  du  sapin 
sous  lequL'l  le  roi  Louis  avjit  coutume  de  dîner,  et  que  Renouart  fait  abattre 
et  ébrancher  pour  s*eii  Éaire  un  v  linel  »  plus  fort  et  plus  lourd  que  rancieii 
{AHicani,  p.  loi). 

On  arrive  â  Orange,  Gutbourc  demande  sa  le  roi  ne  vient  pas.  —  «  Non* 


)n  voit  que  ce  personnage  n*a  pas  été  inventé  par  l'auteur  d\4lisc^ni^ 
:on  Ta  supposé  (HiU.  lili.  âelaFr.,  XXII,  îi^i  )■!)>  «  surtout  Rom.^ 

,   20oV 

1,  Ainsi  l'é^visode  du  tinet  oublié  et  que  seul  Reneward  peut  porter^  se 
èpéte  deux  fois  dans  Jîhcans,  agrémenté  diaque  fois  de  circonstances  plus 


1.  On 

comme  on  Ja  supposé 
XXVI,  20O). 


repe 

ou  moi  ns  comiques  (pp,  î  07  -  n  4  et  141-141)/ 


La  Oxifiçun  de  Willame  617 

dame,  répond  Guillaume  :  il  gît  malade  en  sa  chapele  à  Aix  '.  »  Il 
n'est  pas  question  du  siège  que,  stXon  Aliscans  (p.  120),  les  dames  sauraient 
soutenu.  Rien  non  plus  sur  Tarrivéc  successive  des  alliés  de  Guillaume  qui, 
dans  AliscanSy  occupe  les  pages  125  à  130.  Il  est  intéressant  de  noter  qu'Aî- 
mer  le  Chétif  n'est  mentionné  en  aucun  endroit  du  poème. 

Dame  Guibourc  entre  en  conversation  avec  Reneward.  Alors,  pour  la  pre- 
mière fois  nous  apprenons  que  ce  garçon  de  cuisine  est  de  haute  naissance 
(dans  Aliscam  nous  l'apprenons  plus  tôt)  : 

«  Ami  »,  dist  ele,  c  de  quele  terre  es  tu  né 
z  de  quel  règne  c  de  quel  parenté? 

—  Dame,  »  dist  il,  «  d'Espaigne  le  règne  ; 
Si  sui  [jo]  fiz  al  fort  roi  Deramé, 

2825     r  Oriabcl  est  ma  mère  de  ultre  mer. 

—  Cum  ave»  nun  ?  —  Reneward  ni'apelez.  » 
Guiburcroï.  si!  rcconuit  assez, 

Del  quor  suspire,  des  oilz  comence  a  plorer, 

z  dist  la  dame  :  «  Ccst  nun  m'est  mult  privé. 
28)0     Un  frère  oi  jo  qui  se  le  Bst  '  clamer. 

Pur  la  sue  amur  te  ferai  jo  adubber, 

(Cheval  et  armes  te  ferai  jo  doner.  » 

Dist  Reneward  :  «  Ne  place  unques  Deu 

Que  ja  altre  arme  i  porte  que  mun  tinel  ! 
2835     Ne  sur  cheval  ne  quer  jo  a  munter.  » 

Il  consent  pourtant  à  accepter  une  épée  que  Guibourc  lui  met  au  côté.  Il  ne 
sait  pas  qu'elle  est  sa  sœur, 

Ne  nel  saverad  si  ert  l'ost  devisée 
2850    E  la  bataille  vencue  c  depancc. 

Cette  scène  est  longuement,  mais  assez  habilement,  développée  dans  Alis- 
cans  (pp.  1 54  et  suiv.) 

Je  n'analyserai  pas  en  détail  le  récit  de  la  bataille  où,'  grâce  à  Reneward 
et  à  son  tinel,  les  Sarrasins  sont  mis  en  pièces.  Qu'il  suffise  de  dire  que  tous 
les  épisodes  de  notre  poème  se  retrouvent  (naturellement  très  allongés)  dans 
Aliscans,  Bertran,  que  Reneward  vient  de  délivrer,  dit  ù  son  libérateur  qu'il 
prendrait  volontiers  part  à  la  lutte  s'il  avait  un  cheval.  —  «  Vous  en  aurez 
assez  »,  répond  Reneward.  Mais  il  frappe  avec  tant  de  violence  qu'à  chaque 
coup  il  tue  l'homme  et  le  cheval.  Je  cite  quelques  vers  : 

3092     Dist  Bertram  :  i  Ccst  cop  est  mal  aie  ; 

De  cest  cheval  n'cre  mes  adubé... 

Se  si  vus  vient,  jo  n'cre  hui  adubé; 
3100     Issi  en  pocz  quatre  niil|e|  tuer.  » 

Dist  Reneward  :  «  De  folie  parlez  ; 

Cest  l'ust  |mult]  peisc,  ncl  puis  mie  governcr; 

1.  Ce  qui  étonne,  car  c'est  A  Ijon  que  Guillaume  Va  laissé. 

2.  Corr.  qui  si  sefisl. 


6l8  COMPTES   RENDUS 

Grosse  est  U  brACn  qui  me  tient  al  cosié 

Puis  que  |û  l'ai  [enjcomreiTtuiii  kvi% 
510^     PéIt  ny]  sembhnt  pel  puiï  adominer. 

Ne  peiît  colp  ne  puis  ]o  pm  **outr*  <* 

Çodht  Bcrtrani  ;  ■  Ahre  canseil  tn  preneiîf 

B«l  sire*  bor  fuisses  vus  ncx.   p 

Ço  liist  ïkrt«m  :  *  Ja  ne  verrez  vus  tel, 
îito    Ke  en  botant  ncl  pocK  tuef.  « 

DÎ5Ï  Rcn«ward  :  ■  Vu*  dites  vérité  ; 

[La]  moj[e]  feU  ne  nVen  crc  pcnsi...  • 

Ce  court  passage  est  développé  dans  AHscanSt  en  plus  de  cent  vers.  En 
voici  quelques-uns  (Guessard,  p.  164)  : 

«  Voir  *.  âht  Eertrans,  *  lenii  «lés  feront, 
H'ârans  cheval  nul  jor  en  no  vivait-  ■ 
Dist  Raînouars  t  •  Trop  vous  aies  baitani; 
Je  nVn  puis  mai*,  par  foi,  sire  Bertrant  ^ 
Os  tinès  pûisc,  s'en  sont  li  cop  plus  gMnt... 
Sirç  Bcnran,  ne  te  vas  nierveillant  ; 
Grans  es  li  fus  ;  si  poise  par  devant. 
Qnant  j'ai  mon  cnp  enCtf^ê  en  haucha^t. 
De  grant  vertu  vient  a  val  descendant; 
Jou  ae  le  puis  tenir  ne  tant  ne  quant.  « 
Dist  Bertnin  :  «  Sire,  *î  ferés  en  boutant; 
En  si  iront  vo  cop  âme  n  usant.  * 
Dist  Rainouars  :  *  Or  vois  jou  AprendADi; 
•  Joo  irai  a  rcscole.  * 

Il  va  sans  dire  qu'il  y  a  dans  AHîcans  nombre  d'épisodes  ajoutés.  Noire 
poème,  je  Tai  dit  plus  haut,  est  Incomplet  de  la  fin.  Il  se  termine  par  la  scène 
de  la  reconnaissance  de  Guibourc  et  de  Reneward,  qui  sont  frère  et  sœtir, 
scène  qui,  dans  Aîucans,  n'esï  pas  placée  à  cet  endroit. 

Les  remarques,  que  j'ai  introduites  diins  cette  analyse  sur  les  rapports  de  la 
chanson  de  Guillaume  et  d\4îhcanî  sont  lolti  d'èpuîser  la  matière.  J'aurais 
pu,  noumment,  ejtaminer  les  conjectures,  certainement  prématurées»  qui  ont 
été  produites  en  ces  derniers  temps  sur  la  composition  d'Alhcam  ou  du  C<îw- 
tmnt,  et  motitrer  que  plusieurs  d'entre  elles  doivent  être  maintenant  abandon- 
nées. Mais  je  n'aî  pas  voulu  donner  à  cet  article,  déjà  bien  long,  de  trop  grands 
développements  :  j'ai  visé  surtout  à  faire  connaître  un  poème  qul^  dans  les 
conditions  où  il  a  été  éditée  n'est  pas  accessible  à  tous.  Je  crois  toutefois 
avoir  suffisamment  établi  qu'il  faut  y  voir  la  source  principale  de  la  fin  du 
Cmmmnt  et  du  poème  entier  d'Aliscam.  Qy'ïl  ait  existé  un  autre  poème, 
précédant  ccluî-ci  dans  Tordre  des  réclis  où  était  contée  rhîstoire  de  Vivien^ 
depuis  son  adoubement,  c'est  possible  et  même  probable*  mais  ce  n'est  pas 
ici  le  lieu  d'envisager  les  hypothèses  qui  peuvent  être  formées  à  ce  sujet- 

P.  M. 


I .  Une  variante  relevée  par  Jonckbloet  (II,  277)  porte  i  Mmt  me  Vft  anuîani 
I  Qui  plus  Hi  vont  mi  eop  adûmttmnL  Ce  dernier  mm  est  peut-être  un  souvenir 
de  h  l4!Con  mimmer  de  la  chanson  de  Guillaume  (v.  \  los). 


L.  JORDAN,  Girartstïidien  619 

OirartStudien,  von  Léo  Jordan.  In -80,  18  p.  (extrait  des  Romanische 

Forschungetty  XIV,  pp.  321-338). 

Une  grande  partie  de  ce  mémoire  est  occupée  par  des  rapprochements 
entre  la  chanson  de  Girari  de  Roitssillon  et  certains  récits  arabes.  Il  n'est  pas 
inutile  d'en  apprécier  la  portée,  parce  que,  si  les  vues  de  M.  Jordan  sont 
fondées,  nous  aurons  ici  un  exemple  unique  de  la  pénétration  de  Tépopée 
romane  dans  le  monde  musulman. 

M.  Jordan  signale  en  première  ligne  *Omar  al  Nachmatty  sorte  de  roman  de 
chevalerie  très  étendu,  inséré  dans  une  famille  de  manuscrits  des  Mille  et  une 
NuiiSy  manuscrits  qui,  d'après  M.  Zotenberg  (Notices  sur  quelques  manuscrits  des 
Mille  et  une  Nuits,  dans  Notices  et  extraits  des  manuscrits,  XXVIII,  i,  p.  210) 
sont  tous  récents  et  d'origine  égyptienne  ;  ce  roman  n'a  pas  été  traduit  par 
Galland,  mais  il  se  trouve  dans  la  traduction  de  Burton,  A  plain  and  littéral 
translation  (édition  de  1885),  t.  II,  p.  77  et  suiv.,  et  t.  III  presque  entier; 
M.  J.  s'est  servi  de  celle  de  Henni  ng  dans  la  Bibliothèque  Reclam  y  que  je  ne 
connais  pas. 

Voici  les  détails  q ue M.  J.  relève  dans  ce  roman,  pour  les  comparer  à  Girart, 
Scharrkân  (j'adopte  ici  et  dans  la  suite  les  transcriptions  telles  que  les  donne 
M.  J.),  fils  du  roi,  est  placé  par  son  père  à  la  tête  d'une  armée  qui  doit  marcher 
au  secours  du  roi  chrétien  de  Constantinople.  Pendant  sa  marche,  il  ren- 
contre une  jenne  fille,  sorte  d'amazone,  excellente  lutteuse,  qui  l'emporte 
sur  lui  à  la  lutte  et  les  armes  à  la  main.  Il  se  trouve  qu'elle  est  la  fille  d'un 
autre  roi  chrétien,  celui  de  Rûm  (Rome).  Le  héros  devient  amoureux  de  cette 
héroïne,  l'amène  avec  lui  à  Bagdad,  et  la  présente  à  son  père  :  celui-ci  tombe 
également  amoureux  de  la  jeune  fille.  Le  père,  pendant  l'absence  de  son  fils, 
verse  un  soporifique  à  la  princesse  chrétienne,  et  abuse  d'elle  pendant  son 
sommeil.  S'apercevant  qu'elle  est  enceinte,  elle  s'enfuit  et  est  tuée  pendant 
sa  fuite  par  un  serviteur  qui  l'accompagnait.  Scharrkân,  pendant  ces  événe- 
ments, se  trouvait  à  Damas,  où  son  père  l'avait  envoyé  en  qualité  de  gouver- 
neur. —  Dans  la  suite  du  récit,  il  est  question  de  la  sœur  et  des  frères  de 
Scharrkân,  que  le  roi  avait  eus  d'une  autre  femme  ;  pendant  un  pèlerinage  à 
la  Mecque  qu'ils  entreprennent  tout  jeunes,  en  secret,  le  frère  et  la  sœur  sont 
séparés;  M.  J.  insiste  sur  les  aventures  du  frère,  Dau  el-Makân,  qui  au  cours 
de  ses  pérégrinations  tombe  malade,  dépourvu  de  tout,  â  Jérusalem,  et  est 
recueilli  par  un  homme  du  peuple,  chaufieur  des  bains  publics,  qui  le  soigne 
et  le  guérit. 

Voici  maintenant  les  rapprochements  faits  par  M.  Jordan.  Scharrkân, 
dépouillé  de  son  amante  par  son  père,  correspond  à  Girart,  dépouillé  de  sa 
fiancée  par  Charles  Martel;  Dau,  errant,  puis  soigné  par  le  chauffeur  des 
bains,  est  l'équivalent  du  même  Girart,  exilé  et  recueilli  par  les  charbonniers. 
M.  J.  suppose  que,  primitivement,  les  deux  aventures  se  rapportaient  au 
même  personnage,  et  que,  comme  dans  Girart,  l'épisode  de  l'amant  (ou  la 
fiancée)  enlevée  au  héros,  était  suivi  d'une  guerre  entre  le  père  et  le  fils,  au 
cours  de  laquelle  le  héros  était  exilé,  comme  Girart. 


é20  ^  COMPTES   RENDUS 

M»  J.  reniar<|ae  que  la  date  du  romm  n'ei^duc  pas  k  possibilité  d'utic  imi- 
tation par  l'îiuteur  arabe,  et  il  cite  k  cet  égard  îcs  remarques  du  iraducteiir, 
M.  Henning,  et  d'un  autre  orientaliste  spécbiement  consulté  par  lui, 
M,  F.  Hommel,  qui  déclarent  le  ronian  d' '0*Hfï»"  postérieur  aux  croisades.  Je 
puis  ajouter  que  c*est  à  peu  de  chose  près  la  vis  de  Burton,  qui  suppose  que 
l'action  se  passe  in  th  early  cntsading  dap  (I»  77,  note),  Le  fait  que,  d'aprèi 
M*  Zotenberg,  les  manuscrits  qui  contiennent  \\^  roman  sont  tous  rtcentSi 
montre  également  qu*il  n'appartient  pas  au  fond  ancien  des  Mille  ti  une  Nuttu 

Mais  les  rapprochements  de  M.  ].,  en  dehors  de  cette  question  de  date» 
som-il  justifiés?  Uauieur  attache  de  l'innportance  au  fait*f  que  Girart,  comme 
Seharrkân,  obtient  sa  fiancée  pendant  une  ejtpédîtîon  entreprise  en  vue  de 
secourir  rempcreur  de  Constant mople  t». 

Or.  M,  P,  Meyer  approuvé  que  la  mention  de  Constantinople  est,  dans  w  la 
tradition  épique  relative  à  Girart,  relativement  récente',  et  nous  verrons  que 
M.  J,  a  en  vue,  comme  original  du  récit  arabe,  une  version  très  archaïque  du 
CArart.  Il  y  alà  une  première  difficulté.  En  second  lieu,  le  rapprochemem  entre 
le  récit  arabe  et  le  début  du  Girart  est  bien  forcé.  Dans  le  poème,  Charles 
Martel  et  Girart  épousent  deux  sœurs,  filles  de  l'empereur  de  Consiantînople 
(je  cite  Tanalyse  de  M.  Meyer,  Rom,  VU,  171)  :  »  Taînèe.  Berce  avait  été 
engagée  pour  Charles;  la  seconde.  Elissent,  avait  été  engagée  pour  Girart. 
Mais  le  roi  étant  devenu  subitement  amoureux  d'Elissent,  Girart  consent  à 
la  lui  abandonner  et  à  prendre  Byne  non  sans  difficultés,  non  sans  spécifier. ., 
une  sorte  de  compensation  u.  -^  Quelle  ressemblance  y  a-t-il  entre  cet  arran- 
gement et  la  répugnante  histoire  de  viol  que  raconte  l'auteur  arabe  ?  —  Afin 
de  trouver  d'autres  points  <le  rapprochement,  M,  J.  est  obHgé  de  réunir  deux 
personnages  en  un  seul,  et  de  combiner  Scharrkân  avec  son  frère  Dau  ;  maïs 
même  ainsi  réunies,  les  deux  figures  sont  loin  de  faire  pendant  à  Girart, 
Scharrkân,  comme  le  remarque  M.  J.  lui-même,  ne  guerroyant  pas  contre 
son  père,  qui  lui  a  enlevé  son  amante;  Dau,  le  second  pendant  de  Giran,  ne 
guerroyant  pas  non  plus.  Il  est  vrai  qu'il  y  a  dans  le  roman  arabe  beaucoup 
d'incohérences,  mais  il  n'est  pas  nécessaire,  pour  les  expliquer,  de  recourir 
à  r hypothèse  du  remaniement  arabe  d'un  texte  roman,  chose  dont  il  n*y  â  à 
notre  connaissance,  aucun  autre  exemple ^ 

Ce  qui  complique  encore  l'hypothèse  de  M  J,  c'est  que,  d'après  lui,  le 
roman  arabe  ne  serait  pas  imité  du  Girari  tel  que  nous  le  connaissons,  maïs 
d'un  autre  Girart  plus  ancien,  qui  aurait  eu  beaucoup  de  détails  communs 
avec  i^%Nibtîungtn.  C'est  à  ce  roman  supposé  que  M.  J,  rapporte,  par  exemple. 


I*  M,  Stimming,  dont  M,  J,  adopte  souvent  les  vues,  est  d*accord,  sur  ce 
point,  avec  M*  Meyer,  Vtber  dtn  prcfien^aiischen  G  irai  i  von  Roisiîhn^  j6. 

1»  Ces  incolîérenves  ne  se  rencontrent  pas  seulement  dans  'Omar  ;  on  les 
retrouve  encore  plus  nombreuses  dans  les  romans  arabes  que  M.  J.  citeplus 
loin  dans  son  travail,  d'après  les  analyses  de  M*  Ahlwardt,  Évidemmem  les 
auteurs  de  ces  romans  de  longue  hafeine  ne  se  soucient  guère  d'unité,  ou 
même  de  logique. 


H.  inREKNtij  Chronique  riméi  dis  iroubles  de  Flandre     621 

U  princesse  chrétienne  du  récit  arabe,  cette  sorte  d'amazone,  quHÎ  rapproche 
de  Brnahihie^  h  ivalkùre  de  l'épopée  gcrmaîiiquc.  Il  trouve  d*4Utres  carac- 
tères et  d'au  tes  épisodes  des  Ktk'hittçm  dans  âtu%  romans  arabes,  dont  l'ana- 
lyse a  été  danuéc,  dans  le  catalogue  des  manuscrits  arabes  de  la  Bibliothèque 
royale  de  Bedin*  par  M,  Ahlwardt,  ei  il  les  explique  de  ta  même  façon. 
Nous  sommes  ici  sur  un  terrain  où  seul  un  germaniste  exercé,  qui  serait  en 
même  temps  orientaliste^  pourrait  réellement  suivre  M,  Jordan.  Il  suffit  de 
dtre  ici  que  les  rapprochements  entre  le  Ginirl  di'  Rimssiîhn  (auquel  M.  J. 
joint  le  Gif  art  dt  Vitine^  qui  selon  lui  a  conservé  des  traits  très  antiques),  et 
les  Nibfîungfn^  nous  semblent  aussi  risqués  que  ceux  entre  le  Giritrt  et  le 
roman  d^'Owar.  En  outre,  M*  J.  est  obligé  de  faire  entrer  en  ligne  de  compte 
des  traits  qui  ne  se  trouvent  que  dans  les  versions  samditiinvs  des  Kibeîmtgen, 
traits  dont  il  n*est  pas  sûr  qu*ils  aient  pu  être  conl:ïus  en  Gaule,  si  tant  est 
que  les  Ntheîuftgm  aient  jamais  pénétré  dans  le  monde  roman-  Enfin,  les 
rapprochements  que  fait  M.  J.  entre  la  tradîtiou  germano-scandinave  et  les 
romans  arabes,  roulent  en  grande  partie  sur  des  lieux  communs  qui  se 
trouvent  dans  tes  fictions  des  peuples  les  plus  divers  ;  telles  la  cape  ou  cha- 
peau qui  rend  invisible,  la  jeune  filîe  guerrière  ou  habile  dans  les  exercices 
du  corps,  aimée  de  celui  qui  Ta  vaincue  (comp.  Atalante  et  ramazone  Hip- 
polyta  dans  la  mythologie  grecque).  Tous  ces  thèmes  sont  du  même  domaine 
international  que  le  héros  qui,  après  avoir  tué  un  monstre,  lui  coupe  la 
langue  et  peut  prouver  ainsi  que  c*est  bien  lui  qui  est  le  véritable  vainqueur, 
—  thème  que  M»  J.  signale  dans  un  des  romans  qu'il  analyse,  et  qui  se 
retrouve  dans  la  mythologie  grecque»  dans  un  grand  nombre  de  contes  popu- 
laires et  dans  le  Trisiau  (voir  M.  E,  Muret,  kom.^  XVII,  604),  M,  J. 
soutiendrait -il  que  le  roman  perdu  qu'il  suppose  pour  expliquer  tous  ces 
emprunts,  renfermait»  à  côté  des  détails  pris  dans  les  Nikitingttty  d'autres 
détails  pris  dans  Trîshm}  Sa  méthode  Vy  obligerait. 

Eu  résumé  nous  ne  croyons  pas  qu  aucune  des  vues,  assurément  nou- 
velles, de  M.  Jordan,  ait  h  moindre  chance  d'être  acceptée.  U  n'y  a  pas 
d'autre  base  à  ses  rapprochements  que  quelques  traits  pris  au  hasard,  et 
appuyés  de  conjectures  plus  ou  moins  invraisemblables.  Ce  n*est  pas  ainsi 
qu'on  doit  traiter  les  questions  si  difficiles  que  soulève  Thisioire  comparative 
des  liiiéraiures, 

Gédéon  Hurr™ 


Chronique  rlmée  des  t rouilles  de  Flandre  en  1370-1038^ 

publiée  avec  une  introduction  et  des  notes  par  H*  Pireske,  Gand,  SlfTcr 
et  Vuylsteke,  1901,  lti-80,  xx-62  pages  (publication  extraordinaire,  n«  i, 
de  U  Société  d'histoire  et  d'archéologie  de  Gand). 

LVxamcn  de  cette  plaquette  est  du  rcsson  de  rhistorien  autant  et  plus  que 
du  philologue,  et  des  juges  compétents  ont  dit  ailleurs  ce  qu'elle  comporte 
d Inédit  et  peut-être  de  précieu^t  pour  la  connaissance  scientifique  du  passé 
flamand.  Si  je  me  pcnucts  de  l'annoncer  ici  et  d'entrer  dans  certains  dévelop* 


622  COMPTES   RENDUS 

pcmcnts^  c't:st  que  je  Vài  lue  avec  intcrét  et  pro^là  tout  autres  égards.  L*au- 
teur  inconnu  4c  ces  douic  cents  vers  n'est  ni  un  poète,  ni  un  philosophe  ;  mais 
il  coastiiue  un  agréable  échantillon  de  ces  bourgeois  bilingues  du  xiv«  siècle 
qui  avaient  su  résoudre  k  fameux  problème  de  races  et  d*idiomes  dont  les 
Belges  de  TEst  et  de  TOucst  se  préoccupent  si  ardemment  aujourd'hui  ;  il 
pariait  et  écrivait  h  françj.is  avec  une  facilité  relative^  et  pourtant  il  étâll  né 
natif  de  Flandre,  et  sa  langue  maternelle  était  le  fUmand  :  Je  veuit,  dit-il, 

exposer 

I>es  gtierre»  de  Flandres  U  verîtct 
En  roumins  si  m  pi  cm  eut  timct, 
Sdonc   ma    lingut:,  que  est  flami^îigue, 
Que  ae  viut  Je  «ju^rt  d'une  âbertgue 
Pour  ju&temenE  rimer  en  rûumana, 

S*\\  a  préféré  user  du  français,  c*est  sans  doute  que  ses  sympathies  rorîen- 
taîent  vers  lu  langue  et  la  littérature  du  peuple  avec  lequel  le  comte,  son 
très  vénéré  maître,  vivait  en  meilleure  intelligence  qu'avec  ses  propres  sujets; 
c'est  peut-être  aussi  parce  qu'il  espérait  plus  de  lecteurs  et  des  lecteurs  plus 
choisis  :  «  les  sages  m^eoteadroni  »  dit-U,  i  peu  près  dans  le  ion  de  Conon 
de  Béthune,  avouîint  de  bonne  grâce  qu'il  n'est  pas  né  à  Pontoise,  quoiqu'il 
rime  en  français. 

Mais  si  Conon  n'avait  peut-être  pas  besoin  d'excuses,  notre  chroniqueur 
aurait  été  imprudent  de  ne  pas  débuter  par  une  confession  d'humilité*  Sa 
langue  laisse  étrangement  à  désirer;  elle  est  d'une  irrégularité,  d'une  pauvreté, 
d'une  impureté  qui  nous  amuseni  ;  c'est  du  jargon  où  la  syntaxe  et  même  la 
phonétique  d'un  Tfmii  ont  laissé  des  traces  évidentes.  A  ce  titre,  eîîe  méri- 
terait une  étude,  qu'on  ne  pouvait  demander  à  M.  Pi  renne,  mais  dont  je 
voudra b  au  moins  souligner  l'intérêt  en  quelques  notes, 

Lessonsdu  français  subsistent;  toutefois  certaines  diphtongues  n  ont  pu  passer 
par  Icgosîerde  notre  anonyme  :  il  articulera  a  pour  ai  et  u  pour  ut  {dira-jt  toi  5  ; 
vuîâu  z  nu(0^^i  6^6,  ntdi  i  apparut  800,  bti(r)l  :  atmii  tioS);  a  pour  01  m'a 
échappé  \  et  je  devais  d'autant  plus  m'y  attendre  que  Tinveï^e  est  dans  oya^ 
rfpoit  et  baitij  bien  que  ce  dernier  mot  ait  une  histoire  particulière.  Dans 
La  priif  tk  Neavilk^  ctii^  RV^u^e  satire  bilingue  du  xm^  siècle  \  j'ai  relevé 
*wjr  (croiît),  dot  (doit),  iras  (trois),  fias  (noix),  pro{t)  etc.  —  Les  traits  dialec- 
uux  du  picard  (Flandre  française^  Anois,  Haînaul  occidental)  se  retrouvent 
naturel! emcnt  ici  ;  mais  ils  sont  quelque  peu  altérés.  Ainsi  ïV  >  i ,  et  rV^f  >  î#, 
n'ont  rien  d'anormal  (75^  382, 562,  572,  654,  etc.  àkrime)  ;  mais  ce  qui  est 
étonnant,  c'^tiïeliV  rimant  ensemble':  par  exemple  j«/>^/t^  ipiti/  15  ;  hrtsié: 


1.  of  est  passim  dans  le  texte;  qu*on  le  prononçai  déjà  oi^  c'est  ce  <jue 
semble  attester  la  rime  des  vers  602- 1  contraire  :  crere, 

2.  M,  Scheler  a  publié  cette  parodie  dans  ses  Trauvèns  belges  (nouvelle 
série)  sans  se  prononcer  sur  la  provenance*  Sa  présence  dans  le  ms,  ilôt 5  de 
la  Nationale  est  un  faible  indice  ;  mais  la  mention  de  la  ^  purtc  de  Meulens  • 
(55)  me  porte  â  croire  qu'elle  nous  vient  d'Arras,  dont  Tun  des  faubourgs, 
rendu  célèbre  par  le  Ctm^éàts  Jtran  Bodet  s'appelait  Miaulens* 


•  H.  PIRÈNNE,  Chronique  rimée  des  troubles  de  Flandre,  dt^ 
die  898  ;  d'autre  part  lié  (M.  Pirenne  imprime  lie)  :  brisi/,  comme  il  %'a^^i 
d'une  porte  brisée,  peut  être  brisie  920  ;  —  cMunc  est  ici  ;  comme  chi'x  M<m% 
ket  (chiunkante  11 262)  et  chez  Gilon  le  Muisit(I,  97,  6,  etc.)  ;  ^6  WhtH 
ou  entravé  a  abouti  à  un  son  unique;  il  est  plus  curieux  que  ô  dan«  ri/zr 
soit  traité  de  même  et  donne  ou  (m  germanique),  voyez  eu  (e)  r  :  uiy^mmr 
716,  II 32,  1236  et  comp.  dehors  :  seignors  281.  —  La  post-tonique  finale  c%l 
éteinte,  et  le  rimeur  négligent  ne  recule  pas  devant  des  accouplements  comme 
quite  :  delicte  173  ;  demeurée)  :  seigneur  (prononcez  -our)  626;  mure  (sic, 
murum):rMr^(cura)752;  cf.  encore  980, 1067,  iioi,  1200,  1278.  De  même, 
la  post-tonique  intervocalique  dans />/amw<r«/  346,  souveraine  23$,  etc. 

Cette  dernière  remarque  concerne  déjà  la  flexion  ;  car  elle  se  rattache  i  la 
confusion  des  genres.  J*y  arrive,  après  avoir  signalé  d'étonnantes  transcrip- 
tions de  /  et  «  mouillées  :  batailgt(s)  57,  1197;  pingons  423  (c'est  notre 
penon)y  et  inversement  daignier  =  dangier  683,  cogniet  =  cotigiei  1060  el 
1 103.  Donc  les  genres  sont  confondus,  comme  dans  Lf  prise  de  Neuville,  mais 
sans  trace  d'ironie  ;  les  villes  furent  compris  162,  par  mon  foy  463,  etc.  Les 
cas  sont  également  confondus,  ce  qui  étonne  moins  à  cette  date  ;  i{h)l  est 
cas-sujet  ou  cas-régime  suivant  les  besoins  de  la  cause  ;  notre  anonyme  écrit 
bravement  :  «  Li  comtes  à  Bruges  envoia;  Uns  capitains  qui  a  nom  a...  » 
etc.,  etc.  L'ordre  des  conjugaisons  n'est  pas  plus  respecté;  on  trouve 
garna  $31,  de  garnir,  consenta  688,  etc,  de  consentir',  il  fallait  une  rimè-sccur 
à  envoierent  ;  l'inconnu  écrit  obeissierent  ;  je  n'insiste  pas  sur  arsèrent  qui  est 
chez  Froissart  et  ailleurs;  mais  les  temps  sont  employés  à  contresens;  les 
subjonctifs  en  -assent  ne  déplaisent  point  à  ce  bon  Thiois,  qui  écrit  priassent 
42  ^  pour  prioieni  et  1223  pour  prient;  les  prétérits  pour  les  imparfaits,  et  réci- 
proquement, ne  sont  pas  rares  sous  sa  plume;  cf.  195,  377,  438,  534,  etc. 

Et  la  syntaxe?  Beau  sujet  d'étude  pour  un  romaniste  qui  serait  familia- 
rise avec  le  moyen  néerlandais  !  Je  signalerai  en  passant  l'emploi  de  que  pour 
quel  576  et  1224  (si  toutefois  il  n'y  a  pas  là  la  perte  de  /  devant  une  consonne 
initiale),  de  qui  pour  cil  qui  ou  un  autre  tour,  261,  279,  290,  421,  600,  etc., 
les  étranges  inversions  des  vers  854-6,  1067-8  et  1071-2  ;  la  substitution  de  l'au- 
xiliaire «/rc  à  l'auxiliaire  avoir,  etc.,  etc.  Une  comparaison  avec  l'anglo-nor- 
mand,  tant  à  ce  point  de  vue  qu'à  celui  de  la  phonétique  et  de  la  flexion, 
serait  j'en  ai  la  conviction,  aussi  instructive  que  facile. 

Je  n'ai  que  trop  détaillé  les  observations  faites  au  courant  de  la  plume  ;  il 
faut  revenir  au  texte  lui-même  et  à  son  établissement.  M.  Pirenne  s'est 
borné  à  reproduire  le  manuscrit,  et  il  a  bien  fait  ;  il  s'est  contenté  de  le  ponc- 
tuer et  d'accentuer  les  mots,  en  quoi  il  n'a  pas  toujours  été  heureux,  et  c'est 
bien  compréhensible,  car  la  besogne  arrêterait  plus  d'un  philologue.  Pal  cm 
lui  rendre  service,  et  à  ses  confrères,  en  insérant  ici  quelques  remarques  faites 
au  cours  de  ma  lecture. 

13-14  supplie  :  pitié;  voir  ci -dessus.  —  22  amovie.  Évidemment  à^amovoir^ 
mais  il  faudrait  amuet,  à  moins  qu'on  admette  une  forme  bâtarde  amoive; 
comp.  commoverent  49,  comtnover  189,820;  maceretit  863. — 106  Wsczd^encoste 


iol7-—  «^7' 


624  COMPTES  REvmrs 

m.étmàxm  106,  93$.  :Kié-.  M*P.  sbicn  ii 
poim-  —  f  81  ^-em.  fii*t7,  —  J  Brmits^  c*st  It  [ 
pbilQlci@Dcs*rî^c9!»«v;  voyez  encore  |0i.  —  194  GhhL— ijç  1 
24f  sofipr.  b itfgnk; ^ m  en  le  sujet  die  tvitirrM,  ^^  2}^  A  eamam^ sêm  oi 
psUÊ-étxtfomiêrrmidii  rrpomràxaax  aax  va?  1056;  171,  |9i*Scif»eic. 
Aa  V.  1 1  II  on  Ut  saagUmS  sam.  —  2^4  Ucwf  mênuît  on  ooomeiitiire^  i^m 
a*eft  <)u'cn  padîe  diKiiic  â^xa  b  ûote  de  $12.  Ucxpressioo  x  icaomvT  SSl. 
1121  —  292  defifsdn  ;  cette  répètîtioQ  n'est  p^  pius  choquante  que  cdie  ém 
VCTS  361-2  —  jio  supiir.  k  irirgule,  /f//t>«  ètint  un  sujet  pteid  —  Î4| 
fiaminL  Non,  piainmtm  :  coiop*  A?iirraïiîl4[0  25>j6ij  —  îî4âsest< 
on  l*a  «kus  le  Siège  d€  Xmvilk^  tash  ^vtc  Tartide  agglutiné,  kht  ]  3,  c 
379  manque  dam  U  numérotât  ion.  —  jSo  suppr.  la  %'îrgule,  —  iSB  m^'^x 
(non  V;^.  —  390,  ss.  Le  passage  n  t-st  pas  dair  ;  il  faut  guiDeinettcf  le  vcn 
392  et  y  rapfMHter  le  verbe  ^rytftl^  en  Imm  :  é?  cr.  fûrt.  —  Pmr  uirt/mm, 
iwi  êtwoft.  —  ■  Correoiofi  en  le  pays  •,  Ccst  là  ce  qo*ib  crieut, 
atîjourd^huî  oa  crie  :  Rtvistm  f  ou  Démhsiml  —  404  For  iamûur  ;  le  m*a 
â  gardé  Texpressioa  pUnmu.  ^433  ^fl»  prianL  —  44  3  suppr^b  vîrguk  et  s 
attendez  ■  avant  que  *.  —  431  ei  fmûm  il  faut  i^mit  et  non  pat  kn«i,  —  45] 
Useï  momlfinî^  et  Élites  îa  mcme  correaion  >i>,  582,  628,  959,  1039.  — " 
45 >  i!  fa*Jt  supprimer  le  point  pour  rendre  le  passage  înielligiblc  ;  le  rimeiir 
dît  que,  lorsqu'il  y  avait  un  cas  de  justice  dans  Vost,  on  anjcmh  le  maifaiteur 
et  on  le  jugeait  en  commun.  -  507  Ibc^  tûni.  —  5401  paris^  et  piis  de  ponc-^ 
tuation  après  fkitmîims,  jtikms  étant  le  sujet  de  otit  assis.  —  344  et  1071 , 
%tr  ww«/l  aiînay$  est  tjne  eupfessioo  curieuse  .—  subir  des  outrtge.  —  57^ 
n*e$t  pas  aisé  a  traduire  ;  ^«r,  on  Ta  vu,  est  pour  quel,  et  le  sens  me  semble 
être  ccEui*cî  :  leur  demandant  ce  qui  leur  manque  (ce  dont  Ils  ont  à  se 
plaindre),  pour  aîtaq*jer  ainsi  leur  seigneur,  —  jQï  injunon  m*est  suspe^; 
ne  Ciui-a  pas  lire  injurmhm,  quï  est  dans  Kic,  Orcsmc?  —  s  9^  suppr. 
virgule,  -*  629  le  dcbut  du  vers  pjrait  corrompu  ;  le  copiste  pourrait 
avoir^  par  distraction,  recopié  ïm  premiers  mots  de  6a8,  —  662-3  dek^rt  i 
c^mpi  entre  deux  virgules  ;  un  point  après  ditmurans,  ^719  suppr.  le  point  et^ 
k  rcponer  â  la  fin  du  vers  suivant,  ^  809  pas  de  ponctuation,  -  -  81 3  eu  /,  f 

—  S ^8  par  cry.  —  ^^6  commande rtnt   n'est  pas  rendu    exactement  dansk^ 
résumé,    p.  xvi;   il  y  avait  démarche  vobntairc,  quoique  iniércsséc  (9Sa> 
des  chevaliers  i   je  traduirais  ;    niobiliî^érent    par  ordre^  réquisitionnèrent  ; 
voyci  981  où  ii  s'agit  d'amis  des  mutins^  qu*ils  «  commandèrent  *  aussi.  — 
969  commutiemtnt,  —  1004-3  cupàain  :  plain.  —  1014  pas  de  virgule  à  la  fin. 

—  ti48[àj*  —  1156  jùkiirintest  un  mot  curieuï.  U  correspond  au  français 
central  jùcUer^  tnod.  jtichiér,  signifiant  pencher,  puis  s'attarder,  traîner  en 
longueur,  et  qui  apparaît  pour  Li  première  fois,  à  mon  su,  dans  Martial  d'Au- 
vergne, c'esi-i'dirc  à  la  fin  du  xv^^.  siècle;  il  en  résulte  que  les  doutes  de 
MM.  Mackelei  Kôriing  sur  Té  tymolo}*ie  proposée  par  M.  Bai  si  (/ut  gothique) 
reposent  sur  une  connaissance  insufnsaniç  de  rhistoire  de  ce  moL  -*  Il 84 
qtm;  \i%Qzque,  ^  i2o3  je  ne  conipr^^nds  pas  tn  Jaier*  —  1223-4  virgules  à  Ia^ 
fio*  —  1243  je  soupçonne  le  scribe  d'avoir  écrit  hum  pour  huum  =  Uu 
(là  où)  um. 

Ma  WtLMOTTE. 


PÉRIODIQUES 


Zkitschrift  fur  romanische  philologie,  XXVII,  I.  —  [P.  I,  J.  F.  1). 
Blôte,  Main^  inder  Sage  vont  Schwanritler.  Réponse  à  Tart.  publié  dans  la  Rovui- 
nid{WXy  404)  par  G.  Paris,  sur  «  Mayenceet  Nimègue  dans  le  Chevalier  au 
Cyi^ue  ».  Paris  pensait  avoir  démontré  que  Mayence  était  la  leçon  originale» 
que  des  romanciers  ont,  autant  que  faire  se  pouvait,  remplacée  par  Nimaie. 
M.  Hlôte,  persistant  dans  Topinion  contraire  qu'il  avait  soutenue  antérieure- 
ment, veut  que  Nimau'  soit  partout  la  leçon  originaire.  Il  ne  me  paraît  pas  que 
Paris  eût  été  en  peine  de  maintenir  sa  thèse.  M.  Bl.  se  débarrasse  des  textes 
qui  ie  gênent  par  de  simples  conjectures.  —  P.  25,  B.  Jaberg,  Péjorative 
BetietUungsetitiuickltiug  im  Fran\dsi$chen,  2^  partie,  Bedeutuugsverschiebutii^ . 
Cette  seconde  partie  ne  justifie  pas  entièrement  les  espérances  qu'avait  fait 
concevoir  la  première  (cf.  Rom.^  XXXI,  154).  L'auteur  fait  de  louables  efforts 
pour  répartir  sa  matière  en  des  catégories  bien  définies,  mais  il  n'y  réussit 
pas  toujours,  et  les  mômes  mots  reviennent  dans  plusieurs  de  ces  catégories. 
Il  y  a  peu  pour  l'ancienne  langue  et  ce  peu  est  tout  simplement  puisé  dans 
les  dictionnaires.  La  tendance  péjorative  est  surtout  étudiée  dans  le  français 
le  plus  moderne.  Le  développement  historique  des  nuances  est  rarement  étudié 
i\  fond.  En  somme,  peu  de  nouveau.  —  P.  72,  Abr.  Danon,  Proverh'S  judèo- 
cspti^^noh  lie  Timptie.  323  proverbes  recueillis  par  M.  D.  et  publiés  avec  tra- 
duction française  et  notes  explicatives;  le  classement  ne  rend  pas  les 
rcclicrchcs  Hicilcs  dans  ce  petit  recueil.  Peu  de  ces  proverbes  se  retrouvent  en 
Occident.  A  noter  celui  où  il  est  dit  qu'il  faut  se  méfier  des  personnes  rousses 
(n"  256),  qui  est  bien  dans  la  tradition  du  moyen  âge  :  voir  Du  Cange, 
RU  rus  2;  Godefroy,  ros,  au  Contpl.;  cf.  Daire  k  roux  dans  le  Ronian  Je 
Thèbes.  —  P.  M.] 

MÉLANGES.  — P.  97,  Zur  IVortgeschichte.  H.  Schuchardt,  trouver  (^u  Roma. 
nia,  XXXI,  625-630).  M.  Sch.  discute  les  objections  faites  par  G.  Paris  à 
Tétymologie  turbare  >  trouver.  Dans  une  seconde  note  il  étudie  la  dériva- 
tion 'tropare  <  tropus  en  insistant  sur  l'absence  de  *tropare  de  nos 
textes  latins  et  surtout  sur  l'hiatus  sémantique  entre  tropus  et  trouver.  — 
P.  105,  lat.  ilex  ;  lat.  cisterna  :  remarques  sur  deux  passages  du  travail  de 
W.  Meyer-Lùbke,  Zur  Kenntnis  des  altlogudoresisclxn.  —  P.  no,  fr.  sage  : 
nouvelles  remarques  sur  sapidus  >  sage  et  critique  de  Tétymologie 
•sapius  >  s(^e. 

Romania,  XXXIJ  4O 


éaé  PÈRIODiaUES 

Comptes  RENDUS,  —  P.  uj,  Bdtràge  fur  rontunische  undengUsçiie  Phihtt^k, 
F^stgiibf/ùr  JV^  Foerstei  (Ph.  Aiig.  Becker).  —  P*  122,  G.  Korting,  Likinisch- 
rofmmisches  IForferbuch^  2*^  éd.  (Eug.  Her^og  :  quelques  critiques  sur  les 
^iHymologîes  propres  à  M.  K.,  lesquelks  sont  généralement  sans  v.ilcur;  com- 
ptéments  à  de  nombreux  anicles).  —  F,  127.  ObsiTvaûoii  de  W.  Mcyer, 
Lûbke  stïr  le  compte  rendu  de  son  Enfàhntng,  par  F,  G.  MohI  dans  Zi,- 
XXXI,6ï6.  — P.  ii'j.  Le  Moytn-Age^  XV,  janvier-aviil  (F.  Eiî*  Schucegans). 
—  1\  128.  Ni'iu  Bitcl)er  ;  C,  Siilvioni,  Li  lih'itta  Commfdiit,  VOtkvdo  juthso^ 
îa  Gavmkmme  îtbiTatu  nellt  vtrmm  e  nn  ttaî'eiiimttiÈi  dkkitaîi  a  stampti^ 
sajtfx'^o  hiMiô^tafi{(t.  —  F.  L,  Mott,  71^ /n t^rw^a/  L)^m(G.  Gj, 

XX VU,  2,  —  F.  129,  C.  Nigra,  Nomi  rûnmuii  dtl  cQÏÏar^  dt^U  animait  du 
piticoh  (avec  planche).  Ces  noms  se  répartissent  en  dctJx  séries  :  i^  H*<^  ha- 
ïic  catuiuia,Ciimgohi^  fr.  anc.  et  dial.  cljanokj  clmtoîe  ctc.  M*  N.  rejette  pour 
cette  série  rétyniologie  cannabb  (Salvioni),  ces  colliers  n'étam  jamais  de 
chanvre,  et  retionce  a 'catenabulum  quil  avait  proposé  lui-même  (cf 
Rûttmttia,  XXX,  6 1 2)  ;  H  rattache  ces  formes  romanes  i  un  *  ca  n  n  a  b  u  l  y  m-a, 
dérivé  de  canna  au  sens  de  »  g^^tge,  trachée  artère  «  ;  a^  gris,  chiavn, 
suisse  rom.  karnUy  slov*  l  ri  oui.  kamba^  etc.,  du  thème  kamb  ff  courber  «, 
le  collier  éîani  souvent  faît  d'une  lame  ou  d*une  baguette  de  bois  courbée. 
Suivent  des  remarques  sur  la  forme  des  colliers  ou  des  clocliettcs  et  une  liste 
de  noms  romans  de  cellcs-cî»  —  P.  157.  C.  Nigra»  Tosc.  gu^în,  ant.  prov, 
âgaua  {(t.  agace)  f  pho  ».  M.  N.  nejette,  comme  phonétiquement  impossible, 
rétymoîogie  anc,  ht.  ail.  agaîsira,  et,  comme  inexistant,  le  type  gennarique 
*a gaza  supposé  par  queiques-uns*  Les  formes  romanes  se  répartissent  en 
de  us  S(iries  également  latines  d'origine  :  1°  piém.  gasm^  pr.  mod.  gassa,  lim. 
fasiQ,  etc.  lit,  avec  agglutination  de  la  voyeîîe  de  l'article,  pr.  agmsa-ût  poit. 
ajas^f  etc.  remonient  au  lat.  'gacus  (cf.  le  diminutif  gaccula  et  Fakcr- 
nance  gracus  — g  ra  eu  lus  —  gracculus)  par  rintermédiaire  du  dérivç 
*gAceu5*a;  2^  eî.p.  gayû^  ÏV  ital.  £û/û,  iurselv.  s^^ia^  vcnlt.  émiL  gniû 
(importé  en  Toscane  et  devenu  ^a^ia)  <  lat,gaja(cf_  Papias  gaj3=  pica) 
qui  pourrait  être  identique  au  prénom  Gaïus-Gaîa.  —  F.  142,  A.  Hortiing^ 
Zti  J.  Tliomai,  MHiiH^ys  dyivmobgtê  Jtan^ise.  [Recueil  d'observations  de 
tout  genre  au  sujet  de  quelques-uns  des  mots  étudiés  dans  mon  volume  de 
Mi^hn^fi  ;  les  principales  concernent  haurgeon^  hrmkfj^^  cariiiyiT^  chainlrt^ 
chtftctni,  chttfri'ii,  charfti\  émikhn,  h'ién\  roinîf^  rtissidar^  rn*erti^r  et  t^ii- 
hHt.  Voici  quelqtiés  observations  sur  ces  observations.  M.  H.  n'est  pas  cewi- 
vaiEKU  que  hourgion  vienne  de  *burrionem  et  il  préfère  voir  dans  par* 
gton  une  forme  sortie  de  potillm  plutôt  qu'un  représentant  héréditaire  du 
type  iatÎEi  'porrionem  ;  je  ne  puis  que  m  en  tenir  à  ce  que  j'ai  dit,  L*îdêc 
que  le  ô  de  hrtHkbf^  herndiiit  est  dii  à  a  ne  contamination  de  hm^  br^ttrux 
me  paraît  excellente;  je  note  en  passant  que  la  forme  vernacîte^  que  je  sap- 
posais  avoir  existé  en  ancien  français,  m'a  été  signalée  récemmeni  par 
M.  Jeanroy  daas  Jofroî  de  Waterford  (Hisi.  litt.  XXI,  220)^  Les  efforts 
faits  pour  défendre   Tétymotogie  de  ckiinire  proposée   antérîeunemeîit  par 


PÉRIODiaUES  627 

M.  H.  ne  me  paraissent  .pas  heureux;  je  crois  d'ailleurs,  avec  lui,  que  lé 
poitevin  chambige  (et  non  ^am^if^),  vient  d'un  type  celtique  •cambica  : 
ce  n'est  pas  le  *cambicâ  indiqué  par  M.  Thurneyscn,  lequel  a  un  1  bref, 
mais  'cam  bi  ca,  dont  j'ai  eu  occasion  de  parler  ailleurs  (voyçi'Duïl.  delà  Société 
des  parlers  de  France^  p.  108).  L'explication  de  l'auvergnat  tsavcelai^  bzs- 
limousin /;o^/5«//a,  doter,  par  le  latin  cancellare  me  paraît  tout  à  fait  inad- 
missible. Le  franc,  dialectal  chaboisseau  remonte  bien,  il  me  semble,  comme 
le  dit  M.  H.,  à  un  type  •capusccllum.  M.  H.  a  tout  à  fait  raison  en  ce 
qui  concerne  le  wallon  ivière,  mauvaise  notation  pour  lï'iVr,  qui  signifie  à  la 
fois  if  hiver  »  et  «  neige  »,  et  n'a  rien  i  faire,  au  point  de  vue  de  l'étymolo- 
gic,  avec  le  latin  nivem.  Je  ne  puis  m'associer  à  ses  conclusions  en  ce  qui 
concerne  l'origine  picarde  de  revertier,  et  je  signalerai  à  ce  propos  un  témoi- 
gnage qui  m'avait  échappé.  Voici  ce  qu'on  lit  dans  les  Retnarqnei  qui  pré- 
cèdent la  première  édition  de  Richelet  (1680),  p.  84  :  «  Le  verker  est  une 
sorte  de  jeu  auquel  on  joué  sur  un  trictrac  avec  des  dames  et  des  dc^.  C'est 
en  un  mot  une  manière  de  trictrac  Alemand  où  l'on  joué  depuis  quelques 
années  en  France  dans  les  Académies  et  dans  les  maisons  particulières. 
Joiur  au  verker.  AprenJrele  verker.  Gagner  une  partie^  ou  perdre  une  partie  au 
verker.  Monsieur  Arnell,  Gentilhomme  Suédois...  m'a  assuré  que  le  mot  de 
wrker  venoit  de  l'Allemand  verkherett  qui  signifie  changer,  tourner.  »  Les 
nombreux  exemples  rassemblés  par  M.  H.  de  noms  d'animaux  employés 
pour  désigner  de  petits  tas  de  foin,  de  blé,  etc.,  au  milieu  des  champs,  sont 
très  curieux,  mais  j'avoue  qu'ils  ne  me  décident  pas  à  penser  que  dans  veiU 
lotte  il  y  a  a  veau  »  et  que  dans  «  muîon  »  il  y  a  «  mulet  ».  —  [A.  T.]  — 
P.  153.  C.  Michaélis  de  Vasconcellos,  Randglossen  lum  altporttigiesischen 
Lieder buch  {su'itt).  —  P.  173,].  Ulrich,  liineneue  Version  der  «  Vita  di  Mer- 
lino  ».  M.  U.  donne  de  cette  version,  contenue  dans  le  ms.  Palat.  39  de  la 
bibliothèque  de  Parme  et  faite  sur  le  même  texte  français  que  la  version  de 
l'édition  de  1480,  les  titres  de  chapitres.  —  P.  186,  O.  Nobiling,  Zur 
Interprétation  des  Dionysiscbfu  Liederhuchs.  —  P.  193,  Hlise  Richter,  Zu  proi'. 
«  En  »  =  Herr.  ;  Proi'.-Katal.  «  a-n-el  ».  L'examen  des  Leys  d\4mors  con- 
firme l'hypothèse  de  M.  Schuliz-Gora  (cf.  Homania,  XXXIl,  461).  En 
provient  d'un  plus  ancien  ne  qui  ne  pouvait  se  maintenir  qu'après  finale  con- 
sonantique  et  dont  la  transformation  a  été  amenée  par  l'analogie  de  den, 
quen,  sin,  an.  D'autre  part,  il  semble  que  an  y  dans  an  Bertran,  ne  soit  plus 
compris  comme  résultat  d'une  enclise  a  -|-  (<*)«,  mais  connne  simple  signe 
du  datif.  Ce  pourrait  être  là  l'origine  des  formes  du  prov.  mod.  et  du  cata- 
lan an  el-  aquel,  etc.,  pour  a  el  etc.  :  an  employé  d'abord  là  où  l'on  employait 
en  <  domine  aux  cas  directs,  aurait  été  employé  ensuite  devant  les  noms 
de  personne,  même  lorsque  l'on  n'usait  pas  du  titre  euy  puis  se  serait 
employé  devant  les  pronoms;  an  ne  serait  donc  pas  dû  à  l'introduction  d'un 
n  euphonique,  qui  n'était  pas  utile,  puisque  l'on  avait  ralternance  a  devant 
consonne,  ail{\)  devant  voyelle,  et  qui  en  tout  cas,  aurait  dû  se  produire 
devant  tous  les  mots  à  initiales  vocaliques  et  non  pas  seulement  devant 


628  PÈRIODIQ.UES 

ks  désignations  personnelles  (noms  ou  pronoms),  comme  il  ressort  des 
exemples  réunis  (en  ne  tenant  pas   compte  de  an  =  m<  lat.  in). 

Comptes  rendus.  —  P.  198,  W.  Wundt,  VôîkerpsychologUy  I,  Die  Spracbe 
(p.  Dittrich).  —  P.  216,  L.  Sûtterlin,  Dos  fVesen  der  sprcuhlichen  GebiUe  (O. 
Dittrich).  —  P.  218,  Scritti  vari  di  filologia  a  Ernesto  Manaci  (P.  Savj- 
Lopez).  —  P.  220,  Aniceto  de  Pages,  Gran  diccionario  de  la  Lengua  casUllana 
auiort\ado  con  ejemplos  de  biunos  escritores  antiguos  y  modernes  (P.  de  Mugica  : 
quelques  fascicules  seulement  ont  paru;  l'œuvre  n*est  pas  rigoureusement 
scientifique,  mais  a  le  mérite  de  donner  un  nombre  considérable  d'exemples» 
malheureusement  avec  références  incomplètes  ;  corrections  et  additions  pour 
les  mots  de^  a  Ado).  —  P.  227,  Lazâr  Saineanu,  Influe» là  orieniald  asupra 
limbei  si  culturei  romane  (G.  Weigand).  —  P.  229,  Bonvesin  da  Riva,  Il  îibro 
délie  Tre  Scritture  e  il  Volgare  délia  Vanità  editi  a  cura  di  V^.  de  Bartholo- 
maeis(E.  Keller).  —  P.  232,  Karl  Frey,  Sammlung  ausgtu.'âblUr  Briefe  an 
Micbelagniolo  Buonarroti.  (F.  Ed.  Schneegans).  —  P.  233,  P.  Marchot.  Petite 
phonétique  du  français  prélittêraire  (A.  Homing  :  remarques  intéressantes  sur- 
tout sur  le  traitement  de-icu,  -icare).  —  P.  236,  K.  von  Ettmayer,  Lombar- 
dischhLadinisches  dus  Sûdtirol  (Th.  Gartner  :  travail  solide  et  instructif).  — 
P.  242,  Constantin  Jirecek,  Die  Romanen  in  den  Stâdten  Dalmatiens  wàhrend 
dos  MittelaUers;  erster  Teil  (J.  Jung).  —  P.  249,  Romania,  n«  121-123 
(A\'.  Meyer-Lûbke  et  G.  G.).  —  P.  256,  Archiv  fur  lateiniscbe  Lexico- 
grapbU,  Xni,  I  (E.  Herzog).  ^    Roques. 

Revue  de  philologie  française  et  de  littérature,  p.  p.  L.  Qédat, 
t.  XV  (1901),  n*»  I.  —  P.  1-25,  L.  Vignon,  Les  patois  de  la  région  lyonnaise:  le 
pronom  neutre  sujet.  Un  premier  travail  sur  le  pronom  neutre  employé  comme 
sujet  dans  qudques  parties  de  la  même  région  avait  été  publié  jadb  dans  la 
Romania  (XII,  346).  Le  travail  de  M.  Vignon,  fondé  sur  l'enquête  que  nous 
avons  déjà  signalée  plus  d'une  fois  (voir  XX VIII,  460)  est  beaucoup  plus  com- 
plet. Ce  pronom  neutre  varie  singulièrement  selon  les  pays,  et  ces  variations 
ne  sont  pas  purement  phonétiques.  11  y  a  lieu  assurément  d'admettre  des 
types  étymologiques  divers.  —  P.  35,  Blanchardon,  Les  patois  de  Saint- 
Haon-le-Chdtel  (Loire).  Le  nom^  Vartide^  Fadjectif  et  le  pronom.  —  P.  58, 
Qédat,  Sur  le  traitement  des  voyelles  atones  et  stmitoniques  du  latin.  Critiques 
de  ceruins  paragraphes  du  Traité  de  la  formation  de  la  langue  française  qui 
forme  l'introJuction  au  Dict.  général  de  Darmesteter,  Hatzfeld  et  Thomas. 

—  P.  64,  Qédat,  Changement  atiormal  de  V  initial  en  F.  Il  s'agit  toujours  de 
fois  et  de  fade  Dans  le  premier.  M.  Cl.  suppose  que  le  v  de  vices  a  été 
modifié  par  l'influence  de  Vs  sourde  qui  terminait  ordinairement  le  mot  pré- 
cédent {duos  znces,  très  vices).  Cette  explication  n'a  pas  le  mérite  de  la  nou- 
veauté. Il  y  a  bien  des  années  qu'elle  a  été  proposée  et  discutée.  Quant  au  rde 
vapidum,  «  il  aurait  subi  l'influence  du  piniiiiï  de  la  syllabe  suivante  ■  (?). 

—  P.  6),  Comptes  rendus.  Celui  de  .Mireio,  édition  Koschwiu,  par  M.  Vignon, 
est  très  étudié  et  renferme  de  justes  critiques. 


PÈRlODIdUEb  62Q 

T.  XV,  no  2.  —  P.  8i,aédat,  La  préposition  ttV  article  partitif.  Analyse  et 
explication  de  locutions  ou  la  prép.  de  s*emploie  soit  avec  Tart.,  soit  sans 
art.  :  «  bien  des  gens  »,  et  a  beaucoup  de  gens  »  ;  «  j*ai  acheté  du  vin  »,  et 
«  j*ai  acheté  ^«  bon  vin  »,  etc.  —  P.  132,  Clédat,  Forme  elliptique  de  la  propo- 
sition participe.  Discute,  contre  M.  Ad.  Tobler,  la  valeur  et  Toriginede  la  pré- 
position de  dans  une  phrase  telle  que  celle-ci  :  «  D^  la  manière  dont  nous 
nous  sommes  faits»  il  est  certain  que  notre  félicité  consiste  dans  le  plaisir  » 
(l'abbé  Prévost).  Ces  discussions  comportent  des  distinctions  très  fines, 
appuyées  d'exemples  qui  ont  eux-mêmes  besoin  d'être  commentés  :  il  n'est 
guère  possible  de  les  résumer  en  peu  de  mots.  --  P.  137,  E.  Rhode,  Im 
réjorme  de  Vortljographe  et  de  la  syntaxe  françaises,  à  propos  d'un  mémoire  de 
Af  ï«  Ahlstrôm.  C'est  une  discussion  entre  Suédois,  sur  certaines  des  questions 
que  soulève  l'arrêté  ministériel  du  31  juillet  1900  relatif  à  la  simplification  de 
l'enseignement  de  la  syntaxe  française  —  car  il  ne  s'agissait  pas  du  tout, 
comme  le  donnerait  à  croire  le  titre  de  l'article  de  M.  Rhode,  de  réformer  ni 
l'orthographe  ni  la  syntaxe.  —  Il  est  curieux,  pour  le  dire  en  passant,  de  con- 
stater que  cet  arrêté  ministériel  a  eu  certainement  plus  de  retentissement  à 
l'étranger  qu'en  France,  où,  je  le  crains  bien,  il  est  resté  à  peu  près  lettre 
morte.  Du  reste,  il  n  a  plus  qu'un  intérêt  rétrospectif,  ayant  été  bientôt 
remplacé  par  un  nouvel  arrêté  (26  février  1901),  qui  modifie  les  conclusions 
du  précédent  arrêté  conformément  aux  objections  de  l'Académie  française. 
L'intervention  de  l'Académie  (manifestée  par  un  rapport  assez  bizarre  de 
M.  Hanotaux)  a  jeté  le  trouble  dans  les  propositions  de  la  commission, 
celle-ci  ayant  été  à  peu  près  contrainte  de  s'incliner  devant  les  objections 
académiques.  Il  en  résulte  que  les  décisions  consacrées  par  le  second  arrêté, 
celui  de  1901,  peuvent  paraître  insuffisantes,  et  même,  sur  certains  points, 
illogiques.  Le  môme  sort  est  à  prévoir  pour  les  propositions  d'une  commis- 
sion en  vue  de  la  simplification  (on  n'ose  pas  dire  réforme)  de  l'orthographe 
qui  fonctionne  en  ce  moment  au  Ministère  de  l'instruction  publique.  Ses 
efforts  seront  annulés  par  l'intervention  de  l'Académie  française.  Les  membres 
de  cette  commission,  et  surtout  son  président  ne  se  font  à  cet  égard  aucune 
illusion.  Tant  que  les  imprimeurs  prendront  pour  règle  le  diaionnaire  de 
l'Académie,  toutes  les  tentatives  de  réforme  seront  vaines.  L'édition  de  1878, 
qui  est  la  septième,  fera  loi  tant  qu'elle  n'aura  pas  été  remplacée  par  une 
nouvelle,  et  la  huitième  édition,  qui  ne  paraîtra  sûrement  pas  avant  vingt  ou 
trente  ans,  ne  différera  guère  de  la  précédente  pour  l'orthographe.  Sans  doute, 
on  pourrait  (aire  faire,  par  une  commission  compétente,  un  dictionnaire 
orthographique.  Mais  les  imprimeurs  l'adopte  raient-ils?  Le  grand  obstacle 
à  toute  réforme,  c'est  l'Académie  française.  —  P.  149.  Comptes  rendus. 

T.  XV,  no  3.  —  P.  161-228,  L.  Vignon,  Les  patois  de  la  région  lyonnaise  : 
les  tournures  interrogalives  et  les  profioms  sujets  après  le  verbe.  La  variété  de  ces 
tournures  est  bien  intéressante  à  étudier;  malheureusement  l'étude  histo- 
rique n'en  est  guère  possible,  les  documents  faisant,  en  général,  défaut  pour 
la  période  antérieure  au  xix«  siècle.  —  P.  235,  Clédat,  Les  formes  françaises 


6)0  PÈRIODiat'ES 

i^ficatum.  —  P.  238,  Carrez,    Qiulquei  expressions  du  français  local  du 

Haut-Jura. 

T.  XV,  no  4.  —  P.  2  M,  CiéJat,  Lt  i>lici  de  Va  Ijectif  en  français.  Ce  travail 
s'applique  a  l'état  actuel  de  ia  Un^c.  —  P  177,  Gucrlin  de  Guer,  />«  per- 
turbatgun  linf^uistiqtui.  —  P.  286,  F.  Pelcn,  £fc  £a  prononciation  des  x  en  fran- 
çais. MéJiocre  :  les  faits  sont  nul  rarigés,  sans  égard  a  Thistoirc  des  mots, 
de  plus  il  y  a  plusieurs  erreurs  quant  a  la  prononciation.  —  P.  292,  Yroo, 
Sur  remploi  du  nuyt  «  indéfini  »  en  grammaire  française.  —  P.  308,  Oédai, 
«  Ceît  son  père  tout  craché  ».  Sur  la  réduction  de  \  initial  -|-  y  i  y.  — 
P.  313,  G>mptes  rendus, 

T.  XVI  (1902),  no*  x-2.  —  P.  I,  Vignon,  Les  patois  de  la  région  lyonnaise  : 
les  pronoms  régimes  de  la  /»"«  et  de  la  2*  personne  du  sing.  et  le  pronom  réflécbi, 
—  P.  {$4,  Clédat,  La  négation  dite  expUtive.  Grtte  négation  ezplétive  est  une 
des  plaies  de  la  langue  francise.  M.  G.  n*a  peut-être  pas  indiqu^assez  net- 
tement que  l'emploi  s*en  était  beaucoup  accru  depuis  le  moyen  âge  Après 
avant  que,  l'emploi  de  ne  est  certainement  fautif  dés  l'origine  ;  toutefois  il 
s'explique  historiquement  par  certaines  locutions  anciennes  où  figure  ain^. 
Mais  ce  n'est  pas  le  lieu  de  reprendre  la  question.  —  P.  101-114,  Bostien, 
Omission  de  ne  explétif.  Suite  du  même  sujet.  —  P.  129,  Yvon  et  Qédat, 
Sur  remploi  du  mot  m  indéfini  »  en  grammaire  française.  Les  fronoms  dits  indé- 
finis. —  P.  X47,  Yvon,  Sur  la  place  de  F  adjectif  en  français. 

T.  XVI,  no  3.  —  P.  167,  Clédat,  Essais  de  sémantique.  I,  La  famille  du 
verbe  «  céder  »  ;  II,  les  formules  négatives.  —  P.  236,  Comptes  rendus. 

T.  XVI,  no  4.  —  P.  266,  Vignon,  Les  patois  de  la  région  lyonnaise  :  le  pro- 
nom r/j/im/  de  la  J' pers.  —  P.  302,  Bourciez,/r  et  prov.  BIAIS.  Viendrait  de 
bf  fasius  qui  serait  pour  bif  a  rius  «  double  »  ;  ce  n'est  pas  du  tout  le  sens 
de  biais;  il  faudrait  expliquer  la  transition.  —  P.  303,  P.  Regnaud,  U.  que- 
nouille; rattache  ce  m-M,  non  à  'conocula  pour  colucula,  comme  on  le 
fait  ordinairement  (et  avec  toute  raison),  mais  ii  Tall.  kunkel.  —  P.  311, 
Comptes  rendus.  P.  M. 

Lfc  MOYhN-AGE.  1902,  XIII,  p.  137-173.  .\.  Guesnon,  Nouvelles  recherches 
biographiques  sur  les  trouvères  artésiens.  Nous  avons  signalé  à  plusieurs  reprises 
les  fécondes  recherches  de  M.  Ciuesnon  sur  les  trouvères  anésiens.  La  présente 
étude  continue,  à  proprement  parler,  celle  que  l'auteur  a  publiée  dans  le  Bulle- 
tin historique  et  philologique  du  Comité,  en  1894  {c^.  Rom.  XXIV,  315)  et  où  il 
traitait  de  Pierre  de  Corbie,  d'Adam  de  Givenchy,  de  Simon  d'Authie,  de 
Gilles  et  de  Guillaume  le  Vinier  Cette  fois  il  s'occupe  de  Jean  Bodel,  Wibert, 
(appelé  aussi  Hubert)  Kaukesel,  BauJe  Augrenon,  Guillaume  Veaus,  Andrieu 
Douche  (ou  Doiuhet),  Sauvage  d'Arras,  Jean  Mados,  Nievelot  Amion,  Rikier 
-Xmion,  Gadifer  d'Avions  (et  non  Anions  ni  Anjous),  Jacques  le  Vinier,  Eude 
de  la  (^orroierie,  Hue  le  châtelain  d'Arras,  Vilain  d'Arras,  Moniot  d'Arras, 
Alan  de  C:ans  (et  non  de  Caus),  Audcfroi  le  bâtard,  Jean  Erart,  Andrieu 


PÉRIODIQUES  63  I 

Contredit,  Robert  de  le  Pierre,  Jean  de  Grieviler,  Jean  Bretel,  Adam  de  la 
Halle.  M.  Guesnon,  profondément  versé  dans  la  connaissance  des  sources  de 
rhistoire  d'Arras,  apporte  sur  tous  ces  trouvères  des  renseignements  précis,  ou, 
à  défaut,  des  conjectures  plus  ou  moins  probables  (cf.  ci-dessus,  p.  384  et 
suiv.).  Il  a  fait,  comme  dans  ses  travaux  précédents,  grand  usage  du  «  Registre 
de  la  sainte  Chandelle  d'Arras  »,  dont  il  a  le  premier  reconnu  le  véritable 
caractère,  comme  G.  Paris  Ta  dit  ici-même  (XXIX,  145). 

ACHTER   JaHRESBERICHT     DES    INSTITUTS    FUR    RUM^NISCHE  SPRACHE    ZU 

Leipzig,  hgg.  von  G.  Weigand.  Leipzig,  Barth,  1902,  in-8,  viii-324  p.  — 
Ce  volume  ne  contient  que  trois  études.  Nous  avons  déjà  signalé  Tune  d'elles 
(Romania,  XXX,  472),  Die  rumànischen  Diminulivsuffixe  par  S.  Pu^ariu.  — 
Le  recueil  débute  par  le  rapport  annuel  de  M.  Weigand  pour  1900-1901.  Puis 
vient  une  étude  de  M.  St.  Stinghe  sur  DieSchkejer  oder  Trokaren  in  Kronstadt^ 
étude  ethnographique,  historique  et  linguistique.  Le  dialecte  des  habitants 
du  faubourg  roumain  de  §chel,  partie  de  Kronstadt  (Braçov),  se  distingue  net» 
tement  par  quelques  traits  importants  des  variétés  dialectales  parlées  dans  les 
régions  voisines,  transylvaines  ou  roumaines.  Les  coutumes,  présentent  aussi 
de  remarquables  particularités,  surtout  celles  qui  se  rattachent  aux  fêtes  de 
Pâques.  M.  Stinghe  adopte  et  confirme  l'opinion  de  M.  MileticT,  fondée  sur 
le  témoignage  d*un  chroniqueur  local  du  xviiic  siècle  :  les  aïeux  des  habitants 
de  Scheï  étaient  des  Bulgares  venus  dans  le  pays  en  1392.  Quelques  noms 
de  lieu,  le  nom  même  de  ^cheï  (Slavi)  les  noms  saxons  {Belgere%)t\  hongrois 
(Bolgârs^ék)  viennent  à  l'appui  de  cette  opinion.  Mais  M.  Mileticï  croyait  à  la 
conservation  de  l'élément  slave  jusqu'au  xviiic  siècle,  M.  Stinghe  la  limite  au 
xvi«  siècle.  Des  textes  et  un  glossaire  complètent  cette  étude  qui  contient  un 
tableau  des  particularités  dialectales  de  ^chel.  —  Le  volume  est  terminé  par 
le  compte  rendu  du  voyage  d'exploration  linguistique  fait  par  M.  Weigand 
en  1899  dans  la  Grande  Valachie,  le  tableau  des  résultats  de  l'enquête  et 
soixante-quinze  textes  recueillis. 

M.  RoauEs. 


CHRONiaUE 


M.  Oddotie  Zenatti,  Auteur  de  diverses  études  sur  h  littérature  iia- 
Ueane,  spécialenxem  Sîir  celle  du  Trertîn  et  de  Tlstrie  (voir  Rom.  X,  458  ; 
XVin,  198;  cf.  ibid.^  %i%%  est  mort  à  Rome  le  34  juin  de  cette  année.  Il 
était  né  à  Tnestcen  1866.  L*état  de  sa  santé  Tavait  obligé  de  quitter  Fensd- 
gnement,  et,  en  ces  derniers  tennps,  il  occupait  un  emploi  à  la  bibliothèque 
Casanaiense  de  Rome.  Son  dernier  ouvrage,  publié  peu  de  semaines  apréç 
son  décès,  est  un  gros  volume  intiiuïé  Dante  e  Finnit^  pnm  anlîd^  cm  fwte 
iUmirative  id  appendici  {¥\ot^r\c^^  Sansoni*  dans  Bihimitca  scùlaslka  di  Clmikî 
i^iiani  dirdiu  dû  G.  Carducci).  Le  titre ^  un  peu  vague,  laisse  déjà  eiitrevoir 
que  Touvrage  se  compose  de  matières  asse^  variées  qui  sont  groupées  plutôt 
que  combinées.  Toutefois,  si  la  composition  laisse  à  désirer,  rérudkion  est 
de  bon  aloi*  L'objet  de  la  plus  grande  partie  du  livre  est  de  montrer  que  les 
rensei^ements  fournis  par  Boccace  sur  Dame  méritent  confiance,  et  il  faui 
reconnaître  que  M,  Zcnatti  y  réussit  dans  une  assez  grande  mesure.  En  tête, 
une  intéressante  notice  sur  Tauteur  par  son  frère,  M.  Albino  Zenatti, 

—  M,  W.  BoRSDORF*  de  qui  nous  avons  signalé  jadis  (XJX,  }75)  1^  disser- 
tation sur  le  ti  Château  ti  dans  Chrh  d  Lurîs  et  dans  Euamw,  est  décédé  en 
juin  dernier  à  l'âge  de  trenie-huit  ans>  Depuis  1895  {Rom.^  XXIV»  147)  il 
enseignait  le  français  et  l'ancien  allemand  à  TUniversité  de  Galles,  dont  k 
si^e  est  à  Aberystwyth, 

—  M,  Ulysse  RoBERT,  bien  connu  par  ses  travaux  sur  l'histoire  et  sur  la 
littérature  du  moyea  âge,  est  décédé  subitement  le  s  octobre  dernier  à  î*âg€ 
de  cinquante-huit  ans.  A  sa  sortie  de  TÉcole  des  chartes,  en  1 87^,  il  était 
eotré  au  département  des  manuscrits  de  la  Bibliothè^^ue  nationale  où  il  se 
signala  par  son  activité.  Hn  18S4,  il  fut  nommé  inspecteur  généra!  des  biblio- 
ihèques  et  archives,  et  bientôt  après,  il  fut,  en  cette  qualité,  chargé  de  la  direc* 
tion  et  du  contrôle  des  travaux  relatifs  au  Catalogue  des  manu  écrits  de^ 
tnbliothèques  publiques.  Il  eut  donc  à  revoir  les  épreuves  du  Caialûgue  gé'mml 
des  mamisçrihdfs  déparkments,  dont  le  premier  tome  (Rouen)  parut  en  1886, 
et  qui  compte  aauellement  quarante-trois  volumes.  On  ne  s'étonnera  pas  si, 
dans  une  collection  aussi  étendue  et  dont  les  auteurs  n'avaient  pas  tous  une 
préparation  suffisante,  il  se  trouve  des  parties  assez  défectueuses,  Ulyss*î 
Robert  avait  une  grande  puissance  de  travail,  et  il  a  pu»  saiîs  négliger  ses  devoirs 


CHRONIQUE  633 

professionnels  qui  étaient  très  absorbants,  conduire  à  bonne  (in  des  recherches 
très  variées.  Franc-comtois  de  naissance,  il  a  consacré  des  études  importantes 
à  l'histoire  de  sa  province  :  nous  avons  annoncé  récemment  (ci-dessus,  p.  351) 
son  intéressant  recueil  des  Testaments  de  Vofficialité  de  Besançon,  Nous  signale- 
rons encore,  laissant  de  côté  les  travaux  purement  historiques,  sa  publication 
d*un  curieux  vocabulaire  latin-français,  suivi  d*un  recueil  de  proverbes,  écrit 
par  un  écolier  d'Arbois  (Jura)  qui  a  été  mentionnée  ici  même  (II,  273)  et 
son  Mémoire  sur  les  origines  du  théâtre  à  Besançon  {Mémoires  des  Antiq,  de 
France^  t.  UX).  Dans  un  tout  autre  ordre  d'études,  il  convient  de  rappeler 
sa  publication  de  THeptateuque  de  Lyon  (voir  Rom.,  XXX,  47$),  si  inté- 
ressante pour  rhistoire  des  anciennes  versions  latines  de  la  Bible  et  pour  la 
connaissance  du  latin  des  bas-temps.  Enfin,  on  sait  qu'Ulysse  Robert  s'était 
occupé  de  la  littérature  française  du  moyen  âge  :  il  a  publié,  avec  G.  Paris, 
pour  la  Société  des  anciens  textes  français,  les  Miracles  de  Nostre  Dame  (1876- 
1883),  et  seul,  VArt  de  chevalerie'dc  Jean  de  Meun  suivi  de  la  mise  en  vers 
de  cet  ouvrage  par  Priorat  de  Besançon  (1897). 

—  Les  amis  et  élèves  de  M.  Mussafia  préparent  en  son  honneur  une 
publication  collective,  qui  lui  sera  offerte  à  l'occasion  du  soixante-dixième 
anniversaire  de  sa  naissance. 

—  La  Société  des  anciens  textes  français  vient  de  publier  (pour  compléter 
l'exercice  de  1902)  le  t.  I  du  Romande  Tristan  par  Thomas,  édité  par  M.  J. 
Bédier  et  le  t.  I  du  Recwii  de  sotties  édité  par  M.  E,  Picot.  Le  tome  I  de 
Tristan  contient,  à  la  suite  d'un  court  avant-propos,  tous  les  fragments  ori- 
ginaux qui  nous  sont  parvenus  de  l'œuvre  du  trouvère  Thomas.  C'est  en 
tout  3144  vers,  sur  environ  18000  que  devait  contenir  le  poème.  Les  parties 
en  déficit  sont  remplacées  par  une  analyse  très  soignée  des  œuvres  étran- 
gères (le  Tristan  de  Gottfried  de  Strasbourg,  Sir  Tristrem,  une  Saga  islan- 
daise, etc.)  qui  sont  dérivées  (en  forme  d'imitation  ou  de  résumé)  du  Tristan 
français.  Ce  travail  de  restitution  sera  justifié  dans  l'introduction  qui  occupera 
la  majeure  partie  du  tome  second.  Mais  dès  maintenant  on  en  peut  appré- 
cier tout  le  mérite.  —  Le  Recueil  de  sotties  formera  trois  volumes.  Le  pre- 
mier renferme  neuf  sotties,  dont  chacune  est  précédée  d'une  notice  spéciale. 

—  La  seconde  partie  de  la  Grammaire  historique  de  la  langue  française  de 
M.  Nyrop  vient  de  paraître.  Elle  contient  la  morphologie.  On  y  reccmnaît 
les  qualités  d'érudition,  de  clarté  dans  l'exposé  et  de  critique  qui  ont  fait  le 
succès  de  la  première.  Le  système  de  transcription  phonétique  n'est  plus  le 
même  dans  le  t.  I  ;  M.  Nyrop  s'en  explique  dans  l'avant-propos,  mais  ce 
changement  ne  gênera  pas  les  Français  à  qui  naturellement  ces  transcriptions 
sont  inutiles  et  qui  ne  les  regardent  pas.  Le  second  volume  mérite  tous  les 
éloges  que  la  Rotmnia  a  ùiit  du  premier  (XXVIII,  477)  en  annonçant  un 
compte  rendu  qui  n'a  jamais  été  fait.  C'est  une  des  nombreuses  promesses 
qu'elle  n'a  pas  tenues.  La  grammaire  de  M.  N\Top  n'en  a  pas  nooins  fait 
son  chemin  :  le  premier  volume  est  épuise  et  paraîtra  l'an  prochain  en 
seconde  édition. 


634  CHRONIQUE 

—  LivTcs  annoncés  sommairement  : 

Guiot  von  Provins^  seine  Gônner,  die  «t  Suite  de  la  Bible  »  und  seine  lyrischen 
Dichtungen....  von  Arthur  Bakdler.  Halle,  Kaemmerer,  1902.  In-8,  92  p. 
dissert,  de  Halle).  —  La  partie  la  plus  intéressante  de  cette  dissertation  est 
celle  qui  est  consacrée  à  la  liste  bien  connue  que  dresse  Guiot  de  Pro\ins, 
dans  sa  Bible,  de  ses  nobles  protecteurs  défunts.  M.  Bandler  montre  que  cette 
liste  a  dû  être  écrite  en  1205  (plutôt  peut-être  en  1204),  et  il  accompagne 
chacun  des  86  noms  qui  la  composent  d'un  petit  commentaire  historique, 
sobre  et  précis,  puisé  aux  meilleures  sources  ;  c*est  un  travail  utile,  qu*on 
aura  souvent  occasion  de  consulter.  L'auteur  étudie  ensuite  la  a  Suite  de 
la  Bible  »,  qu'il  pense  être  bien  l'œuvTe  de  Guiot  de  Provins  (seulement 
elle  aurait  formé  d'abord  un  poème  isolé),  puis  les  cinq  chansons  qu'on 
a  de  lui,  et  termine  par  un  court  exposé  de  la  versification  et  de  la  langue 
de  l'auteur.  Tout  le  travail  est  consciencieux  et  satisfaisant.  —  G.  P. 

Le  Pèlerinage  Jl)t5ucrist  de  Guillaume  de  Deguilleville,  edited  byJ-J. 
Stùrzinger.  Printed  for  the  Roxburghe  Club.  London,  Nichols,  iSçy. 
In-40,  vii-372  pages.  —  Nous  avons  annoncé  successivement  les  deux 
premiers  volumes  de  cette  édition  très  méritoire,  malheureusement  tirée  à 
bien  petit  nombre,  des  œuvres  de  Guillaume  de  Deguilleville  (XXIV, 
485,  XXVI,  344).  C'est  par  suite  d'un  oubli,  que  nous  réparons  bien  ur- 
divement,  que  ce  troisième  volume  n'a  pas  été  signalé  à  nos  lecteurs.  Il  a 
été  préparé  avec  le  même  soin  que  les  précédents  et  est  également  orné  de 
belles  reproductions,  en  couleur,  de  miniatures.  Le  sujet  n'est  pas  très 
intéressant  :  l'auteur,  naturellement,  suit  les  évangiles  (il  y  aurait  des 
recherches  à  faire  sur  les  commentaires  latins  qu'il  a  connus),  et  n'avait 
guère  occasion  de  faire  preuve  d'originalité.  Stùrzinger,  dont  la  mort  a  été 
annoncée  ci-dessus,  p.  470,  nous  fait  part  à  la  fin  de  son  avant-propos 
(p.  vj)  de  l'intention  qu'il  avait  de  publier  la  seconde  rédaction  du  Pèleri- 
nage de  vie  humaine  pour  V Early  english  text  Society,  avec  la  version  anglaise 
de  Lydgate  faite  sur  cène  seconde  rédaction.  Il  avait  déjà  annoncé  la  même 
intention  dans  la  préface  de  son  premier  volume  {Pelerittage  de  vie  humaine, 
p.  vj).  Mais  je  suis  informé  par  M.  Fumivall  que  la  copie  de  cette  seconde 
rédaction  fut  brûlée  par  erreur,  après  la  mort  de  G.  N.  Currie  qui  prépa- 
rait l'édition  de  Lydgate  annoncée  dans  l'article  suivant.  —  Stùrzinger  se 
proposait  aussi  d'écrire  une  introduction  générale  {Pèlerinage  de  vie  humaine, 
p.  vj),  qui  ne  paraît  pas  avoir  été  rédigée. 

The  pilgrinagt  of  the  Life  of  Man,  englisht  by  John  Lyix;ate,  A.  D.  1426, 
from  the  french  of  Guillaume  de  Deguilleville,  A.  D.  1335  {sic,  lire  1555), 
edited  from  3  fifteenth  Century  mss.  in  the  British  Muséum...  by 
F.  J.  Fcrnivall;  parti  and  II,  London,  1899,  '9^'-  ^"  ^°»  xii-66s  pages 
(Early  english  text  Society).  —  Les  deux  poèmes  de  G.  de  Deguille\'ille,  le 
Pèlerinage  de  vie    humaine  et  le  Pèlerinage  de  Tdme,  ont  été  traduits  en 


CHRONiaUE  63  5 

anglais,  le  premier  en  vers  par  Lydgate,  le  second  en  prose  par  un  ano- 
nyme. La  version  en  prose  sera  publiée  ultérieurement  par  YEarly  engUsh 
Uxt  Society f  et  Ton  se  propose  de  placer  en  regard  le  remaniement  en  prose 
française  dû  à  Jean  Gallopes.  Présentement,  nous  avons  à  annoncer, 
comme  se  rattachant  par  le  sujet  à  la  littérature  française,  la  version 
anglaise  de  Lydgate.  L*édition  en  avait  été  commencée  par  un  des  colla- 
borateurs de  VEarly  english  text  Society  qui  mourut  sans  avoir  beaucoup 
avancé  son  travail.  M.  Furnivall,  le  fondateur  de  la  Société  et  l'un  de  ses  plus 
actifs  collaborateurs,  la  recommença  sur  de  nouvelles  bases.  Il  nous  en  a 
donné,  à  peu  d'intervalle,  les  deux  premiers  volumes  qui,  nous  Tespérons, 
seront  bientôt  suivis  du  troisième  et  dernier.  Lydgate  a  traduit  non  pas 
la  première  édition  du  poème  de  Dcguilleville,  faite  de  1330  à  i^yi 
(publiée  en  1895  par  Stûrzinger,  \o\vRom.,  XXIV,  485),  mais  la  seconde, 
qui  est  datée  de  I3S5-  M.  Furnivall  a  tait  occasionnellement  usage  de  cette 
seconde  rédaction  française  dont  Stûrzinger  se  proposait  de  publier  une 
édition  qui,  par  suite  d'un  fâcheux  accident,  ne  semble  pas  devoir 
paraître  aussitôt  qu'on  l'espérait.  Nous  devons  du  moins  nous  féliciter 
d'avoir  la  version  anglaise  dans  une  édition  critique  et  d'un  usage  com- 
mode. 

Historical  Reader  of  early  frntch^  containing  passages  illustrative  of  ihe 
growth  of  the  french  language  from  the  earlicst  times  to  the  end  of  ihe 
fîfteenth  Century,  by  Herbert  A.  Stroxg  and  L.  D.  Barnett.  Edinburgh 
and  London,  W.  Blackwood,  1901.  In- 12,  200  pages. —  Nous  ne  pouvons 
que  nous  réjouir  de  voir  parjîire  en  Angleterre  un  livre  élémentaire 
destiné  à  faciliter  l'étude  de  lancien  français,  mais  force  nous  est  de  recon- 
naître que  celui-ci  ne  peut  être  approuve  ni  pour  le  plan  ni  pour  l'exécu- 
tion. Les  30  premières  pages,  intitulées  «  Period  of  early  and  classical 
latin  »,  contiennent  des  extraits  de  Plaute,  Cicéron,  Pline,  etc.,  avec  tra- 
duction anglaise  et  courtes  notices  bioi^raphiques  des  auteurs.  On  se 
demande  en  quoi  ces  extraits  peuvent  servir  à  l'étude  du  vieux  français. 
Ensuite  viennent,  sous  le  titre  de  «  dominance  of  vulgar  latin  »,  quelques 
morceaux  empruntés  pour  la  plupart  à  la  première  partie  de  mon  Recueil 
d'anciens  textes^  augmentés  de  textes  assez  mal  choisis  (par  ex.  le  no  10, 
p.  45,  qui  est  une  lettre  de  Charlemagne  en  latin  fort  peu  vulgaire). 
L'abrégé  de  grammaire  qui  occupe  les  pages  46  à  67  abonde  en  erreurs  de 
tout  genre  qu'il  n'est  pas  utile  de  relever  ici.  Les  textes  en  ancien  français 
commencent  à  la  page  68.  Ils  sont  accompagnés  de  traductions  souvent 
bien  fautives.  On  s'étonne  J'y  voir  la  farce  de  Paihelin  placée  entre  Join- 
ville  et  Villehardouin.  Tous  ces  morceaux  sont  découpés  dans  la  Chresto- 
mathie  de  M.  Sudre  ou  dans  les  Spccimcus  de  M.  Toynbee.  L'annotation 
est  très  faible. 

Études  sur  le  tIMre  français  du  A7r«  siècle.  Le  Jour  du  Jugement,  mystère 
français  sur  le  Grand  schisme^  publié  pour  la  première  fois,  d'après  le  ms.  579 
de  la  Bibliothèque  de  Besançon,  et  les  mystères  Sainte  Geneviève,  par 


fjS  CHRONIQUE 

Emile  Rov*  Piris,  Bouillon,  1902.  In*8,  vni-26â  pages  (Extrait  des 
Ménioîres  de  la  Soc*  d'émtiiaiion  dti  Doubs).  —  La  Romania  (XXXI,  647) 
a  rendu  un  compte  favorable  d'une  publication  de  M.  Roy  sur  Tancicn 
théâtre  français,  appelant  spécialement  1  attention  sur  ^érudition  «  très 
étendue  et  très  minutieuse  »  de  l'auteur.  Le  même  mérite  peut  être  reconnu 
â  la  présente  publication.  M.  R,  a  étudié  avec  amour  le  mystère  de 
Besan(;oii  et  les  autres  oii  le  m^me  sujet  est  traité.  Il  y  a,  dans  son  tra- 
vail, où  les  digressions  sont  peut-être  un  peu  trop  fréquentes^  beaucoup 
de  remarques  sagaces  qui  prouvent  une  connaissance  approfondie  de  notre 
vieille  littérature  dramatique.  Je  crains  toutefois  qa*il  ait  employé  ses 
efforts  à  soutenir  une  thèse  erronée.  I^  ms,  S79  de  Besançon,  autant  qu'on 
en  peut  juger  par  le  fac-simîlé  joint  à  la  publication,  est  du  commence- 
ment du  xve  siècle  (le  catalogue  imprimé,  par  Castan,  l'attribue  à  la 
w  période  moyenne  du  xiv*^  siècle  *,  ce  qui  est  inadmissible).  C*est  une 
copie  qui  nt*  fournit  pas  d indication  sur  la  date  de  roeuvrc.  Mais,  selon 
M.  Roy,  le  mystère  contiendrait  de  nombreuses  et  précises  allusions  auji 
événements  de  la  période  du  Grand  schisme,  et  pourrait  par  suite  être  daté 
exactement  de  Tannée  iîçS,  spécialement  du  5  avril  de  cette  année.  M*  R. 
déploie  assurément  une  érudîtiot>  fort  ingénieuse  pour  prouver  cette  thèse, 
mais  il  n'y  arriva;  pas.  Les  passages  dans  lesquels  il  croit  trouver  des  allu- 
sions positives  sont  de  vagues  lieux  communs.  Je  dirai  plus  :  il  n'y  H  pas, 
dans  tout  le  mystère,  une  seule  allusion  cenainc  au  Grand  schisme. 
Rien  ne  s*oppose  d'ailleurs  à  ce  que  le  mystère  ait  été  composé  à  la  fin  du 
xi%^  siècle,  etj  quoiqu'il  n'ait,  au  point  de  vue  historique,  aucune  valeur 
particulière,  il  convient  de  remercier  M.  R.  de  nous  en  avoir  donné  une 
édition  très  soignée, 

M  an  ara  Valgimigu,  Appunti  iw  k  poeiia  saitrim  laiina  mtdiùn^aîe  in  ftdîk. 
Messina,  tip.  Nicotra,  1902.  In-S,  xm-i44p.  — L'auteur  nous  apprend  dans 
sa  préface  que  le  présent  opuscule  est  une  thèse  présentée  en  1898  à  F  Uni* 
versité  de  Bologne  et  qu'il  Ta  imprimée  telle  quel  le,  n -ignorant  pas  qu'elle 
a  été  rédigée  un  peu  trop  vite,  et  qu'elle  renferme  des  erreurs  w  che  si 
potevano  e  dovevano  evitare  «.  Il  est  difficile  de  se  montrer  sévère  pour  un 
travail  dont  Tauteur  parle  aussi  modestement.  Bornons-nous  à  dire  que 
c'est  surtout  une  compilation  des  travaux  antérieurs  {Straccali,  Novati, 
Ronca,  etc.),  et  que,  a  défaut  de  faits  nouveaux,  entre  beaucoup  de 
considérations  superflues  ou  contestables,  on  y  trouve  çâ  et  la  quelques  ' 
idées  dignes  d'anentïon. 

Le  dratti£  religieux  au  mtïvfw  agi^  par  Mariuv  Semt.  Paris,  Bloud,,  190$.  lo- 
13*,  éj  p.  (publication  de  la  Société  Hblingraphiquc),  —  Résumé  bien 
fait  des  connaissances  acquises  sur  la  formation  de  notre  ancien  drame  reli* 
gieux,  M.  Scpet  qui,  par  des  travaux  de  première  main,  a  contribué  plus 
que  personne  â  éclairctr  les  origines  du  drame  liturgique  et  en  génèiaJ  du 
théâtre  religieux,  était  parfaitement  qualifié  pour  écrire  ce  précis.  Le  sujet 
.  fst  Hcn  présenté  et  rien  d'essentiel  n*est  omis*  La  question  des  origines  est 


CHRONIQ.UE  637 

étudiée  avec  un  soin  particulier.  Les  limites  de  l'ouvrage  ne  permettaient 
pas  à  Tauteur  d'entrer  dans  des  discussions  détaillées,  mais  on  sent  que 
toutes  les  assertions  sont  appuyées  sur  des  recherches  personnelles.  Sur 
quelques  points  de  détail  on  pourrait  différer  d'opinion.  Ainsi  M.  S. 
adopte  l'opinion  d'après  laquelle  le  drame  d'Adam  (ms.  de  Tours)  aurait 
été  composé  et  joué  en  Angleterre  au  xii«  siècle.  Je  ne  vois  pas  de  raison 
positive  pour  attribuer  à  l'Angleterre  ce  petit  mystère  qui  ne  me  parait  pas 
antérieur  au  commencement  du  xiiie  siècle. 

A  Catalogue  of  îetters  and  other  historical  documents  exhihited  in  tJje  lihrary  at 
Welhecky  compiled  by  S.  Arthur  Strong,  wiih  portraits  and  numerous 
facsimiles.  London,  John  Murray,  1903.  In-40,  xvj-316  pages.  —  La  plus 
grande  partie  de  ce  somptueux  volume  est  occupée  par  des  lettres  et  docu- 
ments divers  (xviie-xviiie  siècles)  qui  ne  sont  pas  du  ressort  de  la  Romania, 
Mais  dans  les  premières  pages  est  décrit  un  manuscrit  français,  écrit  en 
Angleterre  au  commencement  du  xiv^  siècle,  et  qui  a,  pour  la  littérature 
française  d'Outre-Manche,  une  importance  considérable.  11  ne  contient  pas 
moins  de  treize  vies  de  saints,  en  vers,  dont  quelques-unes,  par  exemple  la 
vie  de  sainte  Elisabeth  de  Hongrie  (par  Nicole  Bozon?),  la  vie  de  Thomas 
de  Cantorbéry  (de  Garnier  de  Pont-Saint-Maxence),  les  vies  de  sainte 
Catherine  (par  Clémence  de  Barking)  et  de  sainte  Modwene,  étaient  bien 
connues,  mais  plusieurs  ne  se  trouvent,  à  ma  connaissance,  que  dans  le  ms. 
de  Welbeck.  De  ce  nombre  est  une  vie  du  roi  Edouard  le  Confesseur  toute 
différente  des  deux  poèmes  sur  le  même  roi  que  l'on  connaissait  déjà  par  la 
publication  de  Luard  (collection  du  Maître  des  rôles).  Cette  vie  m'intéresse 
d'autant  plus  que  j'en  connaissais  depuis  longtemps  une  mise  en  prose 
conservée  par  un  ms.  du  Musée  britannique.  Ayant  eu  connaissance  l'an 
dernier  du  ms.  de  Welbeck  j'ai  pu  le  mettre  à  contribution  pour  une 
grande  bibliographie  des  vies  des  saints  en  vers  français  qui  occupe  les  pages 
558  à  378  du  tome  XXXIII  (sous  presse)  de  V Histoire  littéraire.  Dans  un 
prochain  mémoire  je  donnerai  des  extraits  de  la  vie  d'Edouard  le  Confes- 
seur et  de  la  rédaction  en  prose. 

A  history  of  french  Versification ^  by  L.  E.  Kastner.  Oxford,  Clarendon  Press, 
1903.  In-i2,  XX-512  pages.  —  Ce  livre,  comme  tout  ce  qui  sort  de  la 
Clarendon  Press^  est  très  bien  imprimé.  Mais  on  ne  peut  pas  dire  que  le  fond 
soit  aussi  parfait  que  la  forme.  M.  K.  connaît  assez  bien  la  versification 
française  moderne  pour  l'étude  de  laquelle  les  livres  abondent  :  il  est 
moins  at  Ijome  lorsqu'il  s'agit  de  notre  ancienne  poésie  et  de  notre  ancienne 
langue.  Ainsi  il  attribue  aux  poètes  de  la  Pléiade  l'omission  de  Ve  dans 
don'ray  (p.  1 3).  Il  ne  sait  donc  pas  que  le  futur  de  doner,  en  ancien  fran- 
çais, est  régulièrement  donrai.  Il  place  au  ix«  siècle  la  Passion  et  le 
Saint-Léger  de  Clermont.  Ce  qu'il  dit  du  couplet  de  deux  vers  n'est  pas 
au  courant.  La  partie  consacrée  aux  diverses  espèces  de  strophes  est  incom- 
plète, quoique  proportionnellement  trop  longue,  et  souvent  erronée.  Beau- 
coup de  fautes  qu'on  pourrait  relever  eussent  été  facilement  évitées  si 


éjS  CHROHiaOE 

Tautetir  ivàit  laii  uwgc  de  la  dibhertaion  d*f  M.  N^tt^bus  (D/<?  Hickt-lym- 
£kn  Stropimiformin  des  AUjmnidmchin)  qu'il  ne  paraît  pas  avoir  connue, 
car  il  Ej€  lii  cite  pas  dans  Ja  Bibliographie  des  pages  xill>J£K,  qui  pourtant 
abonde  en  indications  peu  utiles. 

The  ChaUkine  q/  Vtrgi^  a  ip^  Cenluryfrmch  Romanct^  done  inio  englîsh  by 
Alice  Kemp-Welch,  edited  wiih  an  introduction  by  L.  Brakdin,  wiîh  con- 
temporary  iliustraiions.  London,  D  Nutt^  19OÎ-  In- 12,  xxïiL-9j  pages.  — 
Le  texte,  (oublié  en  appendice,  est  U  reproduction,  moins  les  variantçsj  de 
celui  que  M.  Raynaud  a  imprinié  dans  U  Romania^  XXI,  j6î  et  suiv.  Lsl 
traduction  pourrait  être  meilleure,  r«  Celé  ne  tint  o  tui  plus  plait»  (v.  ïûj), 
est  singuli*;ren3ent  rendu  par  «t  and  no  more  had  she  phasun  in  hîm  ».  Elle 
suffit  cependant  à  dontier  une  idée  de  ce  joli  poème  au  public  anglais. 
L'introduction,  sans  rien  apporter  de  nouveau,  est  satisfaisante.  En  tête  de 
ce  petit  Vûlurtiejqui  est  Ion  (élégamment  imprimé,  est  placée  la  reproduction 
photographique  d'un  ivoire  du  Musée  britannique  où  sont  représentées 
diverses  scènes  du  roman. 

Un*  étlmôîi^ia  fran&se.  Nota  del  sodo  Francesco  d^Ovîûto.  In-B^,  }  P^lï^s 
(HïLCrait  de  l'Académie  de  Naples.)  M.  d'Ovidio  pense  que  le  français  par 
ctrur  équivautà/«ïr  cixrwr,  et  la  preuve  qu'il  en  donne  est  l'expression  espa- 
gnole correspondante  Je  coro,  qui  n'a  rien  affaire,  bien  entendu,  avec  wr, 
tuer  ou  coraim.  iï  y  ^  longtemps  que  j'ai  pensé  à  cette  équivalence  i£(tur- 
cr/Arwr)  que  M.  d'Ovidio  a  le  premier  formulée.  Est -ce  que  dans  l'anglais 
hy  rote,  le  mot  rûie  ne  serait  pas  T instrument  de  musique?  To  kûrn  by  fuie 
répondrait  ainsi  assez  eïactî.;ment  à  apundêt  Je  ciro.  —  A.  M*-F. 

Dmik  mid  tk  animal  Kinodom  by  Richard  Thayf-H  Holbbook.Ncw  York,  The 
Columbia  Univers!  ty  Press,  1902,  In-S»,  xviii  et  ^76  pages,  —  Le  sujet 
avait  été  traité  dans  un  article  très  court  de  K,  Witte  (voy.  Dantf'Fmuhun- 
gitt,  t.  Il,  p.  185-193).  M.  Holbrook  lui  a  consacré  un  volume  qui  se  lit 
agréablement  mais  qui  ne  rv^pond  guère  â  la  question  ussentklle  que  les 
lecteurs  de  h  Com/twdiû  iont  conduits  à  se  poser  :  ou  Dante  a-t-il  puisé 
ses  connaissances  d'histoire  naturelle  ?  11  eût  fallu  étudier  de  beaucotjp 
plus  près  les  bestiaires  et  certaines  encyclapédies  médiévatcs;  mais  otite 
étude  n'est  pas  très  facile  a  faire  aUK  Etats-Unis,  ce  que  Tauteur  reconnaît 
dans  sa  préface,  —  A,  M, -F. 

A,  Pillet,  Ufbtt  âtn  ^égin%t^rUgin  S  tu  tui  dtr  FabUaux^Pûr&dmtig  (Seuphikk^ 
gùcljts  Ctutralblaii,  t.  VU,  1903,  p.  98'îOî.)^  ^*^^ï  ""^  discussion  brève, 
mais  singuliéremimi  lucide  et  pénétrante,  des  travaux  pul*liés  en  ces  dix 
dernières  années.  Sur  h  question  de  Torigine  des  «  fabk^ux  >*j  M.  Pîllct 
déclare  s'en  tenir  à  la  théorie  de  Benfey^  qui  cherche,  comme  on  sait,  leuL 
patrie  dans  Tlnde  :  il  semble  bien  pourtant  que  M.  P.  substitue  volontiers 
à  rindc  de  Benfey  un  Oriem  indéterminé*  D'autre  part,  puisque,  revendi- 
quant cette  théorie,  il  voulait  surtout  recenser  les  travaux  qui  la  con- 
cernent, et  puisque  Benfey  faisait  venir  de  Tlnde,  outre  les  «  fableaux  », 
l«fô  contes  populaires  de  tout  gçnre^  peut-être  M.  P.  n*4tail4l  pas  en  droit 


CHRONIQUE  639 

de  passer  sous  silence  les  fables  et  les  contes  merveilleux,  et  d'écaner  sys- 
tématiquement tout  ce  que  les  folkloristes  ont  écrit  depuis  dix  ans  pour 
ou  contre  le  système  de  Benfey.  Par  exemple»  il  se  trouve  que  M  G.  Huet 
dans  la  revue  De  Gids  (1902),  M.  L.  Sainéan  dans  la  Revue  de  synthèse  his- 
torique (1902)  se  sont  proposé  dans  le  même  temps  que  M.  P.,  précisément 
comme  lui,  de  dresser  le  bilan  des  discussions  récentes  :  concluant  d'ailleurs 
contre  Benfey,  ils  n*ont  eu  garde,  ce  qui  eût  été  contraire  à  Tesprit  de  son  sys- 
tème, de  se  limiter  arbitrairement  aux  seuls»  fableaux».  — Mais  le  mémoire 
de  M.  P.  tend  surtout  à  montrer  qu*en  l'état  actuel  des  questions,  la  tâche 
urgente  est  de  multiplier  des  monographies  de  «  fableaux  »,  où,  a  sans 
intention  préconçue  d'en  démontrer  l'origine  orientale  »,  les  critiques  clas- 
seraient toutes  les  versions  connues  de  chaque  thème  pour  en  déterminer 
la  filiation  logique  et  historique.  Rien  n'est  plus  désirable,  en  effet  :  ce 
qu'on  a  pu  écrire  jadis  sur  la  fragilité  de  telles  enquêtes  éuit,pour  le  moins, 
outré  ;  et  M.  P.  lui-même,  en  son  étude  excellente  du  «  FabUau  des  Trois 
bossus  merustrels  »  (voy.  Rom.,  XXXI,  1 36),  s'est  déjà  chargé  de  prouver  par 
l'exemple  le  prix  de  telles  monographies.  —  J.  Bédier. 


Errata.  —  P.  49,  n.  4,  lire  Bourbon.  —  P.  81,  n.  7,  pisearitUs,  1.  piscariotes.  —  P.  98, 
1.  7  du  bas,  cuer,  1.  curer} —  P.  100.  ▼.  11.  le  I>  Bos  propose  avec  raison  de  remplacer 
curt  par  tort  ;  —  v.  17,  M.  Bos  pense  que  ère  est  l'airelle.  —  P.  153,  1.  2  du  bas,  1. 
itasumances.  —  P.  154,  1.  24,  I.  moi:  -ai.  —  P.  155,  I.  6,  que,  I.  qui.  -^Ibid.,  1.  8  du 
bas.  I.  Viennois.  —  P.  158,  mettre  les  vers  1016-1020  entre  crochets,  et  intervertir  les 
vers  123  et  124.  —  P.  159,  1.  2,  1.  ses  tre^.  —  Ibid.,  1.  26,  suppr.  QPS  après  maU,  — 
P.  160,  n.  f,  iraîtrse,  1.  traîtres.  —  P.  171,  1.  17  et  p.  172,  I.  2,  lire  Chaytor.  — 
P.  33s,  1.  19,  Bonne,  lire  Bonn.  —  P.  551,  1.  18  da  bas.  1.  Estense.  —  P.  395,  1.  4  du 
bas.  1.  wasthui.  —  P.  602,  1.  7  du  bas,  d'après  une  vérification  faite  à  Londres  il  y 
aurait  dans  le  ms.,  aux  trois  endroits  cités,  la  même  leçon  :  dtscunorted. 


TABLE  DES   MATIÈRES 


Pages 

F.  Lot,  La  Chanson  de  Landri i 

P.  Meybr,  Les  manuscrits  français  de  Cambridge  (Trinity  Collège).. .  i8 

A.  Thomas»  Le  suffixe'  -aricius  en  français  et  en  provençal 177 

P.  Rajka,  Le  origini  délia  novella  narrata  dal  «  Frankeleyn  »  nei  Can- 

terbitry  Taies  del  Chaucer , 204 

P.  Meyer,   Recettes  médicales  en  provençal  d'après  le  ms.  R.  14.30 

de  Trinity  Collège,  Cambridge 268,  cf.  p.  472 

H.  SuCHiKR,  Recherches  sur  les  chansons  de  Guillaume  d*Orange  (pre- 
mier article) 355^  c^-  P-  473 

G.  Langlois,  Notes  sur  le  Jeu  de  la  Feuillèe,  d*Adam  le  Bossu 364 

J.  A.  Herbert,  A  new  ms.  of  Adgar's  Mar\--legends 394  - 

F.  Lot,  Lt  Mesnie  HelUquin  et  le  comte  Emequin  de  Boulogne 422 

G.  Paris,  Le  cycle  de  la  «  Gageure  » 481 

P.  Tou)o,  Pt\  faNeau  di  Constant  du  Hamel $52 

P.  ToYNBEE,  Dante*s  useoftheword  7>j//â/ointhe  Gmt'tttband  Fita 

ntioin 565 

MÉLANGES 

J.  PoPovia,  Les  noms  des  Roumains  de  ITstrie 121 

J.  CoRKU,  Disette  =  decepta    —  Tant  mieux,  tant  fis,  tant  t>lus,  tant 

moins,  —  Poche  «  cuiller  à  pot  ■ 124 

A.  Je.\xroy,  Fr.  sémillant 500 

G.  L.  Kittreoge,  The  chanson  du  Comte  Hemiquin 503 

G.  P.,  Or  est  lYfius  ifui  aunerj 442 

A.  Thomas,  Sur  un  vers  du  PeîMna^e  de  Cbarlemapu 442 

E.-S.  Shelix>n\  D(ix\  Jeki:: 444 

A.  DelboullE,   Beltrer.   —   Lcure^  loerre,   —  Origine  du  mot  sabre- 

mis  ou  sahrenauJ 445 

A.  Thomas,  Fr.  ^eline 447 

P.  M.,  Awir  son  cUt-ier  ^xtirant.  —  Cnix/on,  enÊint  changé  en  nour- 
rice. —  Charme  en  vers  français 450 

F.  Lot,  Conjectures  sur  Girart  de  Roussillon 572 

—  Orson  de  Beau\*ais 577 

P.  M..  Wauchîer  de  Denais 583 

UJst  ju  x-'i.  .À-u;,  p.  p.  G.  R-WNA'.D 58^ 

E.  Lakolois,  Trii»  mis  a  Tindex  au  xui«  siècle 588 


TABLE  DBS   MATIÈRES  64 1 

E.  Langlois,  Integrum  >  etUre 591 

J.  T.  Clark,  Les  explosives  sourdes  entre  voyelles  en  iulien 593 

COMPTES  RENDUS 

Andraud,  La  vie  et  Tœuvre  de  Raimon  de  Miraval  (A.  Jeanroy) 131 

Byhan,  Istrorumânisches  Glossar  (J.  Popovici) 32$ 

Carnoy,  Le  latin  d* Espagne  d'après  les  inscriptions  (M.  Roques) 307 

Chançun  {La)  de  ÎVillame  (P.  M.) 597 

Chronique  riraée  des  troubles  de  Flandre,  en  1378-80,  p.  p.  Pirenne 

(M.  Wilmotte) 621 

CoLLijN,  Les  suffixes  toponymiques  dans  les  langues  française  et  pro- 
vençale (G.  P.) 312 

GuiLLON,  Jehan  Clopinel  dit  de  Meung  (E.  Langlois) 322 

Jehan  le  Nevelon,  Die  Vengeance  Alixandre,  hgg.  von  Schultz-Gora 

(E.  >yalberg) lîS 

Jordan,  Girarsdtudien  (G.  Huet) 619 

Muîomedicina  Chironis,  p.  p.  E.  Oder  (O.  Densusianu) 454 

Nassau-Noordewier,  Bijdrage  tôt  de  Beoordecling  van  den  Willehalm 

(Minckwitz) 317 

Oder,  voy.  Muîomedicina  Chironis. 

Peires  von  Auvergne,  Die  Lieder  kritisch  hgg.  von  R.  Zenker  (A. 

Jeanroy) ^ 313 

Pirenne,  voy.  Chronique. 

Pirson,  La  langue  des  inscriptions  latines  de  la  Gaule  (M.  Roques). . .     307 

Robert  de  Ho,  Enseignements ,  p.  p.  M-.V.  Young  (G.  P.) 141 

Sachrow,  Ueber  die  Vengeance  d* Alexandre  von  Jean  le  Venelais  (E. 

Walberg) i  S© 

Schultz-Gora,  vpy.  Jehan  le  Nevelon. 

Tiersot,    Chansons  populaires  recueillies  dans   les    Alpes  françaises 

(P.M.) 457 

Tobler,  Etymologisches  (G.  P.) 127 

YouNG^  voy.  Robert  de  Ho. 

Weeks,  Aïmer  le  chetif  (E.  Langlois) 455 

Zenker,  voy.  Peires  von  Auvergne. 

UVRES  ANNONCÉS  SOMMAIREMENT 

Appel,  Provenzalischc  Chrestomathie,  2t«  auflage 176 

Appel,  voy.  Pétrarciob. 

Bandler,  Guyot  von  Provins 634 

Barnet,  voy.  Strong. 

Beiirâge  zur  romanischcn  u.  englischen  Philologie 347 

Bertoni,  La  Biblioteca  estense  e  la  coltura  ferrarese 351 


64^  TABLE    DES    MATIIkES 

BlADEÏÏE,  VOy>  BONVfiSm  liA  LA  Ri  VA, 

BoKDURAî^D^  vûy.  Leude. 

BoNVEstN  DA  LA  RiVA,  //  hbro  iîiUe  tre  scntturt,  a  cura  di  BrAûENE  .  ,     477 

BoREtrus,   Étude  sur  rempjoi  de^   pronrms   p*;rsonneb    sujets  en 

ancicD  fr^nçiàis .,.......,,....,,......., ,  , 347 

BouRCiEi*  L€S  mots  L-spagnoU  comparés  mt  mots  gascons. . . . , ^44 

BrANDIN.  VOy.  CUATELAlSfE, 

Candrèa-Hecht,  Les dlciunts  btins  de  \\  langue  roumaine. ,,.....  475 

Câitulaire  du  Chap.  de  Saint- LautI  4'A«gers,  p.  p.  Planchekault. , .  480 

Chaidûim  oj  Vergi  (The)^  by  Kemp-Welch  atîd  BRAKom  ..*... 63  a 

Chavtok,  vôy,  Troubadou  rs. 

CHRESTiEN  DE  TkoVHs,  Kristtan  von  Troyes  Yvain  ligg.  von  Fômer.  342 

Constantin  et  Desqrmaux,  DiciioïinHaire  iavoyar<i. .  ..Vp*.  ...,..*..  îSo 
Couture,  voy    Md anges. 

Crescihî,  L'epîsodîo  di  Francesca. .  _ , _ 174 

DUHRïlUX.  Dict.  etymol  Je  ta  bngue  gasconne. ._.........__..  17^ 

Desormaux^  voy,  Constantin. 

Fiordii  di  S.  Fmnduo  pubbl   da  Manzoni                                             ,  477 

FtERSi-ER,  voy,  Chrestien  de  Troyes. 

FounvifeRE  (k  p.  Xavier  de).  Lou  pichôi  Trcsor ,  . ,  173 

Fdknivall,  voy.  Lydgate  et  Robert  of  B^unne. 

Grandmaison  (de),  Étymologîe  du  mot  hu^uencL  ..,,.,,.....,...,  549 

Greenough  and  Khtredge,  Words  and  their  ways  in  engtish  speech.  347 
Guillaume  DK  DEGUaLEviLtE,    Ptkrinagf  jlmucrist,    ed,   by   Stùr- 

:£INGER .♦_...._.. ...,.,..  6|4 

Hanssen,  Hotas  a  la  versificacion  de  JuJin  Manuel , . . . . ,  175 

H  E  ucKENC a  mp  ,  voi  f  Quifi^t  foyts . 

HtLKA^  Die  directe  Rede  in  den  Romanen  des  Chresïi^n  M  Troyes . ,  ,  47e 

HORNtNG,  Die  BehandSung  d.  lat.  Proparoxytona  in  d.  MunJarten  d- 

Vogesen  u,  îm  Wallonîschen , 477 

Kastner,  a  historj*  ot  frencli  versification .,...,.... . . . .  < 657 

KawcxïKSXI,  Hum  de  EônStaux,  poecna^  starofrancuski. ............  478 

KEM^WELCll»  voy.  Châtelaine. 

Kittredce,  voy>  Greexoug». 

KosGHwrrz,  Les  plus  anciens  monuments  dit  U  kngue  française,  6*  éd.  54^ 

JêANHûy,  Cbûmons^  jeux  partis  ft  refrains. ..,_...,,,..',..,...._,.  348 

Leude  (La)  et  les  péages  de  Sahit-Gîïlcs  au  xw  s.,  p-  p  Bonourand.  172 

LydGate,  Tf?e  Fiignmage  oj  tbt  Lijf  of  tmn,  tû.  by  Fumîvall , .  6|4 

Manzoni,  voir  Fioretii, 

Mélanges  Léonce  Co  UT  U  RE , ..-         34S 

Metter,  voy.  Notice. 

MEYER-LûBKEf  Zur  Kcfintnîss  d.  Altlogudoresîschen . .............. .  J49 

MuRFT^  Dante  à  Lausanne?.  _     . .  _ ....... .  478 

Hotice  d*un  ms.  de  Trinity  Collcge  (Cambridge)  p.  P.  Meter  ...,..,  552 


TABLE    DES   MATIÈRES  643 

Nyrop,  Manuel  phonétique  du  français  parlé,  2*  éd.,  par  Philipot 347 

OviDio  (d'),  Reliquie  probabili  o  possibili  degli  antichl  dialetti  italici 

nei  modemi  dialeiti  italiani 346 

—  Un'  etimologia  francese 638 

Persico,  Cino  da  Pistoia  e  il  primo  sonetio  délia  Vita  titan'a 176 

PÉTRARCiUE,  Die  Triumphe  Franccsco  Petrarcas  hgg.  von  Appel 175 

—  I  trionfi  di  Francesco  Peirarca,  per  cura  di  Appel 175 

Philipot,  voy.  Nyrop. 

PiLLET,  Ueber  d.  gegenwàrtigen  Stand  d.  Fableaux  Forsdiung 638 

Planchenault,  voy.  Cartulaire. 

PoRENA,  Délie  manifestazioni  plastische  del  sentimento'nei  personaggi 

délia  D.C 342 

PuscARiu,  Studiï  §i  notice  filologice 476 

Qhtnie  (Les)joyfs  de  tmiriagey  p.  p.  Heuckencamp 174 

Restori,  Il  Cancionero  Classense  263 344 

Reure,  Conjecture  sur  les  origines  de  Fr.  Villon 343 

Robert,  voy.  Testaments. 

Robert  of  Brunne's  «  Handlyng  Syntie  »,  reedited  by  Furnivall 479 

Roy,  Études  sur  le  théâtre  français  du  xive  siècle 635 

Salverda  De  Grave,  De  franse  1  in  het  Nederlands 343 

Salvioni,  Di  un  récente  lavoro  sui  dialetti  di  Lugano  e  di  Mendrisio. .  345 

—  Nomi  locali  Lombardi 345 

—  Dell'  antico  dialetto  pavese 345 

Sanvisenti,  1  primi  influssi  di  Dante,  del  Petrarca  e  del  Boccacio  suUa 

letteratura  spagnuola 173 

Savj-Lopez,  Jaufre  Rudel 478 

ScHÔNBACH,  Ueber  Caesarius  von  Heisterbach,  1 174 

Sepet,  Le  drame  religieux  au  moyen  âge 636 

Strong  and  Barnet,  Historical  reader  of  french 635 

Strong,  Catalogue  of  documents  in  the  library  at  Wclbeck 637 

Stùrzinger,  voy.  Guillaume  de  Deguillevillk. 

Teichmank,  Aachcn  in  Ph.  Mouskets  Reimchronik 348 

Testaments  de  rofticialité  de  Besançon,  p.  p.  Robert 351 

Thayer  Holbrook,  Dante  and  the  animal  Kindgdom 638 

ToLDO,  Études  sur  le  théâtre  comique  du  moyen  âge 175 

TozER,  An  english  commentary  on  Dante's  Diviua  Commedia 351 

Troubadours   (The)  of  Dante,  by  Chaytor 171 

Ul.mann,  Die  Stellung  d.  relativpronomen 343 

Valgimigli,  Appunti  su  la  poesia  satirica  latina  medioevale  in  Italia.  .  636 

VisiNG,  Den  ridderiga  Kârleken  i  Medeltidens  Litteratur 347 

VossLER,  Zu  den  Anfângen  d.  franzôsischen  Novelle 349 


644  TABLE    DES   MATIÈRES 

PÉRIODIQUES 

Année  (L')  linguistique,  1 467 

Archiv  fùr  das  Studiuni  der  neuertn  Sprachen  und  Litteraturen  Cil,  CIII, 

CIV,  CV,  CVI,  CVII. 166 

Archivio  glottologico  italiano,  XV,  4 161 

Bulletin  de  la  Société  des  anciens  textes  français,  1902 468 

Jahresbericht  des  Instituts  fùr  rumanische  Sprache,  VIII 651 

Journal  des  Savants,  1903.  n«  6 468 

Moyen-Age  (Le),  XIII 630 

Revue  de  philologie  fran«,aise  et  de  littérature,  XV  (1901),  XVI  (1902)  628 

Studj  di   Filologia  romanza,  IX   465 

Studi  glottologici  italiani,  II   165 

-                    —      III •  464 

Zeitschrift  fùr   ronianische  Philologie.  XXVI,  5 460 

-  XXVI,  6 462 

—                         -                   XXVII,  I .  .  626 

-  XXVII,   2 .' 627 

CHRONIQUE 

Nécrologie  :  W.  Bosdorf.  632;  Bollati  de  Saint-Pierre,  470;  Couraye  du 
Parc,  168;  G.  Doncieux,  341  ;  A.  Gasté,  168;  Kirpitchnikof,  469  ;  Ch. 
Loizeau  de  Grandmaison,  470;  Ul.  Robert,  632;  Stùrzinger,  470;  O. 
Zenatti,  632.  —  Obsèques  de  G.  Paris,  et  discours  prononcr's  sur  sa  tombe, 
334.  —  Nominations  :  MM.  Guarnerio,  169;  C.  Salvioni,  169;  Zingarelli, 
169.  —  Prix  La  Grange  à  M.  Guesnon,  471.  —  Hommage  à  M.  Ad.  Mussa- 
fia,  633.  —  Congrès  historique  de  Rome,  341.  —  Société  des  anciens  textes 
français,  169,  633.  — Publication  d'une  notice  de  M.  Auvray  sur  les  manu- 
scrits de  Mgr  Desnoyers,  474  ;  des  iJfrendei  du  moyeu  d^e  de  G.  Paris  et 
d'un  mémoire  de  G.  Paris  sur  Philippe  de  Novare,  475  ;  du  t.  XXXVII  des 
Archives  de  la  Gironde^  474;  du  t.  II  delà  Gratnni.  hist.  de  hi  Uutgue  fnuiçaise 
par  M.  Nyrop,  633  ;  du  t.  IV  de  la  Flore  populaire  de  M.  M.  Rolland,  342; 
d'un  article  de  M.  Salvioni  sur  le  type  formica  for  ni  i car  ^  475;  des  Beitrâj^e 
^ur  romanisclyen  n.  etij^lischeii  Philologie^  169;  d'un  index  des  miracles  en 
latin  de  la  Vierge,  par  le  P.  Poncelet,  170.  —  .\nnonce  d'une  revue  amé- 
ricaine intitulée  Modem  Philolog\\  342  ;  de  la  publication  des  Arts  de 
rhétorique  par  M.  H.  l-anglois,  170.  —  Explication  de  quelques-un  des 
mots  «  obscurs  et  rares  »  signalés  par  M.  Delboulle,  471-2.  -  Remorques 
sur  quelques  passages  des  «  Recettes  médicales  en  provençal  »,  472:  sur 
des  chartes  franc- comtoises  p  p.  M.  J.  Gauthier,  169;  sur  un  mémoire 
de  M.  Mat/.ke  sur  la  légende  de  saint  Georges,  170  —  Discussion  de  l'opi- 
nion de  M.  Suchicr  sur  l'origine  de  w  Monglane  »  et  de  «   l'rete  »,  475. 


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Les  romans  de  la  Table  r^nde,   P^  [^  ^'^  <^'«„  ^  ^^^    ^^^ 

La  Bretagne  dans  les  romans  d'aventures,  F^  [f  "^^e.  Uoc 
. .^^ : — ^^-^ — — - — ^    urocnarc  gr.  la-^, 

^  Prm., ......  - ,       a  fr. 

L*évolution    du     roman    français    aux    environs    de    nSo, 

pdfM.  \\'n.\u/nïi,  lii-S.  —  Pnt ..        '.      .  .  .      .  2  fr^  50 

Considérations  sur  quelques  écoles  poétiques  contemporaioêS 

et  sm  les  lempcfLUii  rter  î  certaines  rè^lc;*  de  U  prosodie  trafi* 

çabe,  pptr  r.  ni-  Uoi^  < ,;îO(:hurc  ia-ïé.  —  Pdx         .    ,     0  ff.  SO 

Histoire  de  la  conquête  romaine  de  la  C^de    "^^  '^^  ,^^^*  ^*^" 
Ji-^ ^ —     méc  qtti  y  on?  pf\$ 

patE,  par  Mf"«  V.V'aschidë,  Cti  voL  ^r,  in-S,  acvom pagrjc  d'une  cane  *— 

Pm    . , *     *-    ^    .         .    .'     .        -  7  If. 

Les  officiers  royaux  des  Bailliages  et   Sénéchaussées      ^^ 
uistkatum\  nion.iKhlqiao  locales  en  France  4  U  hn  du  rnovcu  ii^e,  pÂT 

î\4îi,%dèmk  dfs  imcriptiofn  «t  iHlUuUmts,  Prtx  Gvhtrt*  —  Pii», . . ,  30  ff. 

LaVie  de  Saint- Alexis,    fï?:'^:;^^'       '    " *         ''       !*^ 

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Dictionnaire  savoyard,   P^'-'^''^  ^o^*  ^^"^   '  '^  ^  Siiciétt'  tîtiri- 

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fdépanemcnts  de  la  Savôîc  et  de  Li  H  i  Uîc 

d^s  textes  patoù  et  des  trdv,utx  vauuf ik  it>  jj-iit.,^  >.i.j.a,t  . 

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La  vie  et  l'œuvre  du  troubadour  Raimon  de  MiravaL    ^ 

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Études  sur  le  théâtre  français  du  XIV*  et  du  XV^  siècle^ 

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Le  roman  du  Comte  de  Toulouse.   ^^^  ^<=  mtoc.  Gr,  in-8.   — 
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Essai  comparatif  sur  l'origine  et  l'histoire  des  rythmes, 

JUIF    M     KAWtxYX^Kf.    dociajr  o  J  dires,   profc^cur  À  Wnlversïté  de 
Cfjtovic.  L'ti  voh  m-K.  —  Pfl:i ,  . ,    .       . .     , , g  fr, 

Oictionnairc  de  rancicnne  langue  française,  (îtitx'L^Ji^v*%îède, 

^ 1_  -    Frèd.    C;tiDt- 

FROY.  Torwc  X  et  dcml^.T.  Un  yoL  m-4,  —  (^n  &S  fr. 


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